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MUSEE CARNAVALET DOSSIER DOCUMENTAIRE « CLASSES CULTURELLES DE LA VILLE DE PARIS » CYCLE HISTOIRE DE PARIS Carnavalet par Westermann d’après Raguenet, actif au début du 20 e © Musée Carnavalet/Roger Viollet Dossier réalisé par le service d’action culturelle du musée Carnavalet

dossier documentaire Histoire de paris - Musée Carnavalet · Opéra de Paris/ B. Tezenas de Montcel. – Clermont-Ferrand : L’instant durable, cop. 2000. – 45p. : ill. – (compas

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MUSEE CARNAVALET

DOSSIER DOCUMENTAIRE

« CLASSES CULTURELLES DE LA VILLE DE PARIS »

CYCLE HISTOIRE DE PARIS

Carnavalet par Westermann d’après Raguenet, actif au début du 20e © Musée Carnavalet/Roger Viollet

Dossier réalisé par le service d’action culturelle du musée Carnavalet

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Dossier documentaire - Classes culturelles de la Ville de Paris Cycle Histoire de Paris

Le présent dossier a pour objet de vous accompagner dans la mise en place de votre projet pédagogique sur l’histoire de Paris. Il ne s’agit pas à proprement parler d’un prolongement des informations que vous apportera la conférencière, mais d’une proposition de pistes pour élargir avec vos élèves la découverte des différentes périodes qui ont marqué l’histoire de la capitale. Le dossier suit l’ordre des séances avec la conférencière. Nous commençons directement à partir de la seconde séance, puisque la première est une introduction au parcours. Voici la liste des thématiques qui sont proposées :

Séance Séance avec la conférencière Ouverture proposée

2 Bercy et les premiers habitants de Paris. Découverte du site de Lutèce

3 Paris médiéval : la crypte et l’île de la Cité. Notre Dame de Paris, lecture architecturale d’une

cathédrale gothique.

4 Le Marais : le quartier des précieuses ridicules. Le Marais, exemple de prise de conscience

patrimoniale au 20ème siècle.

5 Le quartier des Invalides. Un hôte illustre aux Invalides : Antoine-Augustin

Parmentier (1737-1813)

6 la vie dans les demeures bourgeoises et

aristocratiques aux XVIIème et XVIIIème siècles.

Le peuple de Paris aux XVIIème et XVIIIème siècles.

7 La Révolution Française. Vandalisme et découverte de la notion de

patrimoine national.

8 L’Opéra et le style Napoléon III. La vie dans le Paris d’Haussmann : un immeuble

Haussmannien et les grands magasins.

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Bibliographie : Séance 2 - musée Carnavalet :

� Carnavalet: musée de l’histoire de Paris; Hors série de Beaux-arts magazine. – Paris : Paris musées, 1994. – 71p. :ill.

� Lutèce : Paris ville romaine / Philippe de Carbonniéres. – Paris : Gallimard : Paris musées, 1997. – 128p. : ill. – (découverte Gallimard ; archéologie ; 330)

� Le premier village de Paris il y a 6000 ans : Les découvertes archéologiques de Bercy / par Yves Lanchon et Philippe Marquis ; avec la collab. d’Annie Roblin-Jouve. – Paris : Paris musées, 2000. – 85p. : ill.

� Les grands monuments de Lutèce : premier projet urbain de Paris : exposition crypte archéologique du parvis de Notre Dame 21 janvier 2009 au 31 janvier 2010 / Didier Busson, Sylvie Robin. – Paris : Paris Musées , 2008. – 111p. : ill.

� Et Lutèce devint Paris : Métamorphoses d’une cité au IVe siècle : exposition Crypte archéologique du parvis de Notre Dame 15 mars 2011 au 26 février 2012 / sous la dir. de Rose Marie Mousseaux et sylvie Robin. Paris : Paris Musées, 2011. – 127p. : ill.

� Quand les Gaulois étaient romains / Françoise Beck, Hélène Chew. – Paris : Gallimard : RMN, 2008. – 176p. : ill. – (découvertes Gallimard histoire N°63)

� La vie des enfants en Gaule romaine/Gérard Coulon. – Paris : Sorbier, 1998. – 44p. : ill. – (La vie des enfants)

Séance 3 - l’île de la Cité :

� Atlas de Paris au Moyen Âge : espace urbain, habitat, société, religion, lieux de pouvoir / Philippe Lorentz, Dany Sandron ; Jacques Lebar ; Bénédicte Loisel. – Paris : Parigramme, 2006. – 237p. : ill.

� Guide de Paris au Moyen Age / Evelyn Mullally. – Paris : du patrimoine : Biro et Cohen, 2011. – 140p. : ill.

� Paris : la cathédrale Notre Dame / Thierry Crepin-Leblond,… - Paris : Monum’ éditions du patrimoine, 2000. – 95p. : ill.

� The square of Notre-Dame : Archeology and History = Le parvis de Notre-Dame : archéologie et histoire : 1624 – 2002 : exposition : crypte de Notre Dame de Paris : 1er octobre 2002 27 avril 2003/Didier Buisson. – Paris : Paris musées, 2002. – 101 p. : ill.

� Paris : la cathédrale Notre Dame / Thierry Crepin-Leblond,… - Paris : Monum’ éditions du patrimoine, 2000. – 95p. : ill.

� Petit Glossaire pour la description des églises / texte de Jean Cabanot; ill. de Francis Lafargue. – Dax : Association des amis des églises anciennes du département des Landes (AEAL), 1995. – 52p. : ill.

� La crypte archéologique du parvis Notre – Dame/Michel Fleury,… et Venceslas Krata,… - Nouvelle éd. revue et corrigée. – Dijon : Faton, 2001. – 40p. : ill. – (guide et monographie)

� Autour de Notre-Dame / sous la dir. de Alain Erlande – Brandenburg, Jean – Michel Leniaud, François Loyer,…[et al.]. – Paris : Action artistique de la ville de Paris, 2003. – 296 p. : ill.

� Naissance D’une cathédrale/David Macaulay. – Paris : Deux coqs d’or, 1987. – 77p. – (Bibliothèque du livre d’or)

Séance 4 - le Marais :

� Le Marais : évolution d’un paysage urbain/ Danielle Chadych. – Paris : Parigramme, 2005. – 208p. : ill. - (promenades d’architecture et d’histoire)

� Le Marais / Marianne Ström, Jean Dérens . – Paris : Héritage architectural : sauvegarde et mise en valeur du Paris historique, 2002. – 103p. : ill.

� La rue des Francs-Bourgeois au Marais ; exposition : 1992/études réunies par Béatrice de Andia et Alexandre Gady ; avec la collab. de Jean-Pierre Babelon,…Marie-Noëlle Baudouin Matuszek,…Robert-Henri Bautier,…[et al.]. – Paris : délégation à l’action artistique de la ville, 1992. – 303p. : ill. – (Paris et son patrimoine)

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� Le Marais : guide historique et architectural/Alexandre Gady ; Jean-Pierre Babelon,… - Paris : Carré, cop. 1994. – 326p. : ill. [Un chapitre assez complet sur comment lire l’architecture].

� Le Marais : mythe et réalité : exposition ; hôtel de Sully du 30 avril au 30 août 1987/ Jean-Pierre Babelon, Jean-Marc Leri, Denis Lavalle,…[et al.]. – Paris : CNMHS : Picard, 1987. – 340p. : ill.

� Connaissance des arts : hors série n°75 : Le Marais / Philip Jodidio ; Virginie de la Batut. – Paris : Société française de promotion artistique, 1995. – 66p. : ill.

� De la place royale à la place des Vosges : exposition : Académie d’architecture : centre culturel Suédois/Textes réunis par Alexandre Gady ; Béatrice de Andia, Jean Pierre Babelon,… Hilary Ballon. – Paris : action artistique de la ville de Paris : académie d’architecture, 1996. – 414p. : ill. – (Paris et son patrimoine)

Séance 5 - Invalides :

� Invalides musée de l’armée : l’hôtel des Invalides et le tombeau de Napoléon / Christine Helfrich,… Frédéric Lacaille,… François Lagrange,… [et al.]. – Paris : Paris musées : Musée de l’armée, 2003. – 127 p. : ill. – (ISSN en cours)

� Histoire des invalides/Anne Muratori-Philip ; Maurice Druon. – [s.l.] : Perrin, 2001. – 350p. : ill. � Les Invalides : L’état, la guerre, la mémoire / François Lagrange et Jean Pierre Reverseau. –

Paris : Gallimard, 2007. – 127p. : ill. – (découverte Gallimard histoire ; 508) Séance 6 - Musée Carnavalet :

� Carnavalet, Musée de l’Histoire de paris, Beaux-Arts Magazine Hors-série, 1994. Et pour proposer un contre point :

� Paris au temps de Louis XIV : 1660-1715 / Georges Dethan,… - Paris : Association pour la publication d’une histoire de Paris, 1990. – 510p. : ill. – (Nouvelle histoire de Paris)

� Vivre dans la rue à Paris au XVIIIe siècle/Arlette Farge. – Paris : Folio, 1992. – 252p. : ill. – (Folio histoire ; 43)

� Au temps de Louis XIV/François Bluche. – [Paris] : Hachette, 1994. – 363p. – (La vie quotidienne, civilisations et sociétés ; ISSN : 0768 0074)

� La vie des Français au temps du Roi-Soleil / François Trassard, Dimitri Casali, Antoine Auger. – [Paris] : Larousse, 2002. – 192p. : ill. – (L’histoire au quotidien).

� Les petits métiers à Paris au XVIIe siècle ; exposition : « Paris et les Parisiens au temps du roi soleil » ; musée Carnavalet du 05 novembre 1997 eu 18 janvier 1998/Charlotte Lacour-Veyranne ; Jean Jacquart. – Paris : Paris musées, 1997. – 103p. : ill. – (musée Carnavalet ; ISSN : 1258-0716)

� Tableau de Paris ; t.1/Louis-Sébastien Mercier ; éd. établie sous la dir. De Jean-Claude Bonnet. – Paris : Mercure de France, 1995. – 1908p.

� Tableau de Paris ; t.2/Louis-Sebastien Mercier ; éd. établie sous la dir. De Jean-Claude Bonnet. – Paris : Mercure de France, 1995. – 2068p.

� Index onomastique. Glossaire � Le tableau de Paris/Louis-Sebastien Mercier. – Paris : la découverte, 1992. – 351p. – (La

découverte ; 10) � Les rues de Paris au XVIIIe siècle : le regard de Louis-Sebastien Mercier ; musée Carnavalet : 18

mars- 20 juin 1999/Elisabeth Bourguinat. – Paris : Paris musées, 1999. – 79p. : ill. – (Musée Carnavalet ; ISSN : 1258-0716)

Vous pouvez consulter le dossier de presse de cette exposition. Séance 7 - Musée Carnavalet :

� Nouvelle histoire de Paris : la Révolution / Jean Tulard. – Paris : Hachette, 1989. – 585 p. : ill. � La révolution : musée Carnavalet / Philippe de Carbonnières. – Paris : Paris musées, 2009. –

71p. : ill. – (les collections de la ville de Paris, petites capitales Histoire ; 06 ; ISSN : 1958 0800) � Patrimoine parisien 1789 1799 : destructions, créations, mutations/sous la dir. de Alfred Fierro ;

Béatrice de Andia, Jean-Paul Avice, Simone Balayé…[et al.]. – Paris : délégation à l’action artistique de la ville de Paris : Bibliothèque historique de la ville de Paris, 1989. – 165p. : ill.

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� Histoire et dictionnaire de la révolution française: 1789-1799/par Jean Tulard,…Jean-François Fayard,…Alfred Fierro,… - Paris: Robert Laffont, 1988. – 1213p. – (bouquins)

� Histoire du vandalisme : les monuments détruits de l’art français/Louis Réau ; éd. augm. Par Michel Fleury et Guy-Michel Leproux. – Paris : Robert Laffont, 1994. – 1190p. : ill. – (Bouquins)

� 1789 : La révolution racontée aux enfants/Raoul Dubois. – Paris : enfance heureuse, 1987. – 229p.+8pl. ill. – (Livre d’initiation et d’éveil)

� 1789 sur les pavés de Paris ; exposition ; musée en herbe ; jardin d’acclimatation bois de Boulogne ; du 18 janvier au 31 décembre 1989/Sylvie Girardet, Claire Merleau-Ponty, Anne Turdy. – Paris : Nathan, 1989. – 68p. : ill. – (Monde en poche ; 256)

Séance 8 - l’Opéra :

� La deuxième République et le second Empire : 1848-1870 / Louis Girard,... – Paris : Association pour la publication d’une histoire de Paris, 1981. – 471p. : ill. – (Nouvelle histoire de Paris)

� Paris Haussmann : « Le pari d’Haussmann » ; exposition inaugurée le 19-09-1991 au pavillon de l’arsenal/Jean des Cars et Pierre Pinon. – Paris : Pavillon de l’arsenal : Picard ; 1991. – 365p. : ill.

� Atlas du Paris haussmannien : la ville en héritage du Second Empire à nos jours / Pierre Pinon. – Paris : Parigramme, 2003. – 209p. : ill.

� Au bonheur des dames / Emile Zola. – Paris : LGF, 2010. – 542p. : ill. – (le livre de poche classiques ; N°228)

� Pot Bouille / Emile Zola. – Paris : LGF, 2011. – 510p. : ill. – (le livre de poche classiques ; 247) � Le Ventre de Paris / Emile Zola ; commentaires et notes de Philippe Hamon et Marie France

Azema ; intro Robert Abirached. – Paris : LGF, 2011. – 383p. : ill. – (le livre de poche classiques ; N°277)

� Les cathédrales du commerce parisien : grands magasins et enseignes / sous la dir. de Béatrice de Andia, Caroline François. – Paris : Action artistique de la ville de Paris, 2006. – 238p. : ill. – (Paris et son patrimoine)

� Autour de l’opéra : naissance de la ville moderne / sous la dir. de François Loyer ; à l’occasion de l’exposition réalisée par Jean François Pinchon ; textes réunis par Anne Marie Châtelet. – Paris : action artistique de la ville de Paris, 1995. – 254 p. : ill. – (Paris et son patrimoine)

� Opéra de Paris/ B. Tezenas de Montcel. – Clermont-Ferrand : L’instant durable, cop. 2000. – 45p. : ill. – (compas ; 3)

� Haussmann/Michel Carmona. – [Paris]: Fayard, 2000. – 647p. +6p. cartes et plans Sélection de sites Internet : Le site du musée Carnavalet : www.carnavalet.paris.fr La visite d’autres musées parisiens peuvent compléter le propos de ce programme, vous les trouverez sur le portail culturel de la Ville de Paris : www.culture.paris.fr, rubrique « musées ». www.histoire-en-ligne.com : présente des textes historiques tels le réquisitoire contre Marie-Antoinette, propose également des parcours thématiques, tels les ponts de Paris ou le métro parisien. www.paris-pittoresque.com : un site majoritairement consacré à la vie quotidienne à Paris jusqu’au au XXème siècle. Des textes et de nombreuses images à télécharger. www.parisrama.com : des plans de Paris à différentes époques à télécharger, une petite histoire des transports parisiens et un catalogue d’images anciennes sur les différents quartiers. http://erra.club.fr : Cours d’histoire géographie en ligne par des enseignants de collège. http://www.culture.gouv.fr/culture/infos-pratiques/fiches/fiche14.htm : concerne la loi Malraux sur les secteurs sauvegardés. http://www.u-picardie.fr/~patrick/Cathedrale/Glossaire/ : un glossaire illustré très clair sur les cathédrales. Le site de la Bibliothèque Nationale de France (www.bnf.fr) propose différents dossiers pédagogiques qui complètent ce document, notamment : « Paris », « les cathédrales de Villard de Honnecourt » ou « l’enfance au Moyen-âge ». [On accède aux dossiers pédagogiques de la BNF par la rubrique « offre culturelle et éditions ».]

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Séance 2 - musée Carnavalet

Nous vous proposons d’approfondir avec votre classe la découverte de Lutèce. Voici donc quelques textes vous permettant de mieux cerner l’importance de cette ville située au croisement de plusieurs voies de circulations majeures. Vous trouverez également une vue de Lutèce en page 8 et une chronologie en page 9.

C’est en 58 avant J-C que Jules César, alors gouverneur romain, commence la conquête de la Gaule, pays prospère divisé entre de nombreuses tribus. La guerre des Gaules, est un ouvrage d'histoire en sept livres constitué de notes rédigées au fur et à mesure de la guerre. Jules César y relate ses opérations militaires dont il fut le généralissime victorieux, entre 58 à 52 av. J.-C. En 53 av J.-C., Lutèce est citée pour la première fois dans La Guerre des Gaules comme le lieu de convocation par César d’une assemblée des peuples gaulois en pays Parisii :

« Ayant, au commencement du printemps, convoqué, selon son usage, l'assemblée de la Gaule, les différents peuples s'y rendirent, à l'exception des Sénons, des Carnutes et des Trévires. Regardant cette conduite comme un signal de guerre et de révolte, César ajourna toute autre affaire, et transféra l'assemblée à Lutèce, capitale des Parisii. (5) Ces derniers étaient voisins des Sénons, et n'avaient autrefois formé avec eux qu'une seule nation ; mais ils paraissaient étrangers au complot actuel. (6) »

► Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus: oeuvres complètes, Collection Nisard, Paris, 1865, 727 p. Mais c’est véritablement en 52 av. J.-C., à l’occasion du fameux épisode de la « Bataille de Lutèce » que nous sont données des informations plus précises : « (1) Pendant ces mouvements de l'armée de César, Labiénus ayant laissé à Agédincum (Sens), pour la garde des bagages, les recrues récemment arrivées d'ltalie, se porte avec quatre légions vers Lutèce (Paris). Cette ville appartient aux Parisii et est située dans une île de la Seine. (2) Au bruit de son arrivée, un grand nombre de troupes ennemies se réunirent des pays voisins. (3) Le commandement en chef fut donné à l'Aulerque Camulogène, vieillard chargé d'années, mais à qui sa profonde expérience dans l'art militaire mérita cet honneur. (4) Ce général ayant remarqué que la ville était entourée d'un marais qui aboutissait à la Seine, et protégeait merveilleusement cette place, y établit ses troupes dans le but de nous disputer le passage. (1) Labiénus travailla d'abord à dresser des mantelets, à combler le marais de claies et de fascines, et à se frayer un chemin sûr. (2) Voyant que les travaux présentaient trop de difficultés, il sortit de son camp en silence à la troisième veille, et arriva à Metlosédum (Melun) par le même chemin qu'il avait pris pour venir. (3) C'est une ville des Sénons, située, comme nous l'avons dit de Lutèce, dans une île de la Seine. (4) S'étant emparé d'environ cinquante bateaux, il les joignit bientôt ensemble, les chargea de soldats, et par l'effet de la peur que cette attaque inopinée causa aux habitants, dont une grande partie d'ailleurs avait été appelée sous les drapeaux de Camulogène, il entra dans la place sans éprouver de résistance. (5) Il rétablit le pont que les ennemis avaient coupé les jours précédents, y fit passer l'armée, et se dirigea vers Lutèce en suivant le cours du fleuve. (6) L'ennemi, averti de cette marche par ceux qui s'étaient enfuis de Metlosédum, fait mettre le feu à Lutèce, couper les ponts de cette ville ; et, protégé par le marais, il vient camper sur les rives de la Seine, vis-à-vis Lutèce et en face du camp de Labiénus. » ► Salluste, Jules César, C. Velléius Paterculus et A. Florus: oeuvres complètes, Collection Nisard, Paris, 1865, 727 p.

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Pièce de bronze représentant Julien, v.360-363

Le 6 novembre 355, Constance II (317-361, empereur romain chrétien du Bas-Empire et fils de Constantin), présente Julien (331 ou 332 - 26 juin 363, neveu de Constantin) à l'armée, et lui décerne le titre de César, c'est-à-dire de vice-empereur. Début décembre, Julien part en Gaule avec une escorte réduite pour contrer les ravages des Alamans. A partir de 357, Julien prend ses quartiers d'hiver à Lutèce, cité mineure mais relativement proche des frontières du Rhin et facile à défendre grâce à la Seine qui l'entoure comme un rempart naturel. Julien apprécie l'endroit et y passe les hivers suivants. :

« J’étais alors en quartiers d’hiver auprès de ma chère Lutèce : les Celtes appellent ainsi la petite ville des Parisii. C’est un îlot jeté sur le fleuve qui l’enveloppe de toutes parts ; des ponts de bois y conduisent des deux côtés ; le

fleuve diminue ou grossit rarement ; il est presque toujours au même niveau, été comme hiver ; l’eau qu’il fournit est très agréable et très limpide à voir et à qui veut boire. Comme c’est une île, les habitants sont forcés de puiser l’eau dans le fleuve. L’hiver y est très doux à cause de la chaleur, dit-on, de l’océan, dont on n’est pas à plus de neuf cents stades, et qui peut-être, répand jusque-là quelque douce vapeur : or il paraît que l’eau de mer est plus chaude que l’eau douce. Que ce soit cette cause ou quelque autre qui m’est inconnue, le fait n’en est pas moins réel : les habitants de ce pays ont de plus tièdes hivers. Il y pousse de bonnes vignes, et quelques-uns se sont ingéniés d’avoir des figuiers, en les entourant pendant l’hiver comme d’un manteau de paille ou de tout autre objet qui sert à préserver les arbres des injures de l’air. »

► Julien, Misopogon, tomeII. éd. Hertlein .

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Jean-Claude Golvin, Lutèce au Haut-empire, aquarelle, 2007.

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Chronologie

Histoire de Lutèce Histoire de Gaule IIIème siècle : Installation d’une population celte ; Formation de la cité des Parisii

IIème siècle : Frappe de monnaie 53 av. J.C : Convocation des peuples de Gaule par César 52 av. J.C : Les Parisii se joignent au soulèvement. Bataille de Lutèce et défaite contre les troupes de Labienus

52 av. J.C : Révolte de Vercingétorix 50 av. J.C : Défaite et réddition de Vercingétorixà Alésia 43 av. J.C : Fondation de Lyon, longtemps capitale de Gaulle. 15-13 av. J.C : Organisation des trois nouvelles provinces gauloises de l’empire : lyonnaise, Belgique et Aquitaine

Ier au IIIème siècle de notre ère : Lutèce se développe sur le modèle romain Contexte : pax romana

Ier siècle de notre ère : Révoltes (Florus chez Trévires, Sacrovir chez les Eduens) 48 : Discours de l’empereur Claude (né à Lyon) en faveur des notables gaulois, qui sont admis au Sénat romain 58 : Incendie de Lyon 68-70 : Révolte de Vindex et Sabinus 77 : Affichage du cadastre d’Orange IIème siècle : Siècle des Antonins, apogée de l’Empire. Période de paix marquée par de nombreuses constructions et un essor économique. Voyage de l’empereur Hadrien 177 : Persécutions à Lyon, contre les chrétiens (Blandine) 196 : Lutte d’Albinius et de Septime Sévère pour le pouvoir. Sac de Lyon

Vers 250 : Evangélisation et martyre de Denis, premier évêque de la cité (?)

IIème siècle : Insécurité et révoltes, notamment contre le fisc (Bagaudes) 260-275 : « empire gaulois » (Postumus) 275-300 : Constructions d’enceintes autour de la ville (incursions germaniques)

Fin du IIIème siècle : Menace barbare sur Lutèce et insécurité dans la région Vers 300 : La ville se concentre principalement dans l’île de la Cité, à l’abri des remparts

IVème siècle : Du fait des incursions des Francs, Alamans et Saxons, Lutèce joue un rôle stratégique important avec son statut de carrefour économique. Des troupes y cantonnent fréquemment 360 : Le César Julien, qui affectionne Lutèce y est proclamé Auguste. La même année il y convoque un concile 365-366 : Séjour de l’empereur Valentinien Ier

IVème siècle : Installation de troupes auxiliaires, mercenaires et fédérées, souvent d’origine barbare, dans le nord 307 : Trêves, capitale des Gaules 370-390 : Martin évangélise les campagnes 395-396 : Arles, capitale des Gaules

Vème – Vème siècles : Les généraux Aetius, Egidius et Syagrius tentent successivement de maintenir la romanité dans la région comprise entre la Somme et la Loire, le plus souvent avec l’aide des Francs (Childéric puis Clovis). Lutèce se trouve au cœur du dispositif de défense. Le christianisme s’y développe. 451 : Attila menace Lutèce. Geneviève anime la résistance. Elle meurt en 502.

Vème siècle : Installation de troupes auxiliaires, mercenaires et fédérées, souvent d’origine barbare, dans le nord 451 : Invasion des Huns 453 : Attila et les Huns sont vaincus par Aetius aux Champs Catalauniques 486 : Clovis, fils de Childéric, vainqueur de Syagrius à Soissons 496 (?) : Baptême de Clovis

508 : Clovis fait de Lutèce (Paris) sa capitale

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Séance 3 - l’île de la Cité

Un exemple d’architecture gothique, la Cathédrale Notre-Dame de Paris.

Vue Latérale de la Cathédrale de Paris, côté méridional, Ransonnette et Chapuis, 1833,

© Musée Carnavalet/Roger Viollet L'architecture gothique fut un style architectural de la seconde partie du Moyen Âge en Europe occidentale. Elle est née en Île-de-France pendant la deuxième moitié du XIIe siècle ; elle se diffuse rapidement au nord de la Loire et s'impose en Europe jusqu'au milieu du XVIe siècle. La façade harmonique : un élément d’architecture caractéristique La façade type d'une cathédrale gothique est la façade harmonique à tours symétriques hérité du massif occidental carolingien. Cependant, si la symétrie est parfois strictement respectée, comme c'est le cas à Reims, à Laon ou à Notre Dame de Paris, il arrive bien plus fréquemment qu'elle ne le soit que partiellement. Cela est parfois dû à des différences de styles, lorsque les deux tours ont été édifiées à des époques différentes comme à Rouen, à Chartres ou à Meaux.

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Comparer deux cathédrales gothiques

Notre Dame de Paris Notre Dame de Chartres

Notre-Dame de Paris – façade : A Notre-Dame de Paris, la façade est divisée en plusieurs registres par deux éléments horizontaux : la galerie des rois, ornée de statues, et la galerie supérieure avec sa haute arcature ajourée.

Notre Dame de Paris Notre Dame de Chartre

Combien y a-t-il de portails ?

Ces portails sont-ils identiques ?

Que voit-on au dessus du portail central ?

Combien y a-t-il de tours ?

La façade donne t-elle une impression de symétrie ?

Où se situent la ou les flèche(s) ?

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Portail de la Vierge – Notre Dame de Paris :

1 - Tympan Couronnement de la Vierge 2 - Linteau inférieur Inférieur : Ensevelissement de la Vierge et Assomption Supérieur : Trois rois et trois prophètes méditant sur le mystère de Marie 3 - Trumeau Statue, Vierge portant l’enfant Socle, Création de la femme, La Faute, La Punition Face latérale gauche, Les Saisons Face latérale droite, Les Ages de la vie 4 - Piédroits Gauche en montant, Verseau (janvier : homme à table), Poisson (février : voyageur se

réchauffant au coin du feu), Bélier (mars : paysan taillant sa vigne), Taureau (avril : paysan regardant pousser son blé), Gémeaux (mai : jeune homme partant pour la chasse), Cancer (juin : paysan portant sur son épaule une botte de foin)

Droite en descendant, Lion (juillet : paysan aiguisant sa faux), Vierge (août : moissonneurs fauchant les épis), Balance (septembre : vendangeur dans la cuve), Scorpion (octobre : les semailles), Sagittaire (novembre : porcher menant ses bêtes à la glandée), Capricorne (décembre : paysan tuant le porc)

5 - Ebrasements De l’intérieur vers l’extérieur Gauche, Saint Denis tenant sa tête, entouré de deux anges, Constantin Droite, Saint Jean-Baptiste, saint Etienne, sainte Geneviève, saint Sylvestre 6 - Voussures De l’intérieur vers l’extérieur, ange tenant des encensoirs et des cierges, Patriarches, Rois, Prophètes

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Chronologie XIIe siècle 1160 Début des travaux par l’évêque Maurice de Sully. 1177 Achèvement du chœur et de son double bas-côté mais pas de la couverture. 1179 19 mai : consécration du chœur par le légat du Saint-Siège. 1185 17 janvier : office pontifical pour le chœur entièrement livré. 1196 Mort de Maurice de Sully. La nef est terminée à l’exception des premières travées. Travail de la

toiture. XIIIe siècle 1208 Achèvement de la façade avec les trois portails. Sculpture de la porte de la vierge. 1210 Elévation de la première travée double de la nef et des travées correspondantes des

bas-côtés. 1220 Façade jusqu’à l’étage de la rose. La grande façade s’élève jusqu’à la base de la

galerie à jour. 1225 Construction de la rose occidentale et des baies des tours qui les flanquent. 1230 Sculpture de la porte du Jugement. Chapelle de la nef. 1235-1250 Troisième chapelle de la nef. 1236 Elévation de la tour sud. Salle pour agrandir le trésor. 1240 Chapelle Saint-Michel. Elévation de la tour nord. 1241 Le légat du Saint-Siège Eudes défend de recevoir les sans-abris la nuit dans les

grandes salles des tours. 1245 Achèvement des tours et de la galerie haute entre les deux tours. 1250 Construction de la rose du transept nord ; commencement du croisillon nord par Jean

de Chelles. 1252 Deuxième chapelle au nord de la nef dédiée à Saint-Georges et Saint-Blaise. 1254 Chapelle Saint-Eustache. 1258 Pose de la première pierre du croisillon sud. 1265 Chapelle Sainte-Anne (première au sud de la nef). 1266 Troisième chapelle au nord de la nef. 1267 Construction de la petite porte Rouge, sous la fenêtre de la troisième travée du chœur. 1270 Construction de la rose du transept sud. 1288 Construction en cours de la chapelle Saint-Jean-Baptiste et Sainte-Madeleine à l’est de

la porte Rouge. 1291-1304 Construction des trois chapelles d’axe du chœur par Pierre de Chelles et Jean Ravy

(Saint-Louis, Saint-Rigobert, Saint-Nicaise). XIVe siècle 1310 Construction des trois chapelles du chœur côté sud, dédiées à Saint-Etienne, Saint-

Crépin et Saint-Jacques. 1312 Construction de trois chapelles du chœur côté nord, dédiées à Sainte-Foy, Saint-

Europe, et à la Décollation de Saint-Jean-Baptiste. 1316 Construction des trois chapelles suivantes côté sud, dédiées à Saint-Pierre, Saint-Paul

et Saint-Rémi. 1318 Construction des chapelles du côté nord, dédiées à Sainte-Ferréol et Saint-Férutien,

Saint-Michel, Saint-Martin et Sainte-Anne. 1320 Achèvement de la ceinture des chapelles qui enveloppent la cathédrale. 1333-1338 Achèvement des nouvelles chapelles du chœur, des piliers surmontés de clochetons et

d’épis qui les flanquent. Etablissement d’un pinacle au croisillon sud. 1351 Achèvement du chœur.

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Glossaire architectural Abside ou Chevet : Extrémité arrondie ou polygonale de la nef, généralement orientée, c'est à dire dirigée vers l'est (l'Orient). Autour de l'abside principale viennent se greffer des absides secondaires, appelées absidioles ou chapelles rayonnantes. Absidiole : abside secondaire greffée sur l'abside principale (aussi appelée chapelle rayonnante). Arc : Courbe dessinée par la voûte ou la partie supérieure d'une ouverture. Arcade : Ensemble formé d'un arc et de ses supports. Arcature : Série d'arcades juxtaposées qui jouent un rôle décoratif. Arc-boutant : Arc partant d'un contrefort , qui enjambe le bas-côté pour transmettre les poussées de la voûte centrale à un organe vertical, la culée, qui sert aussi de contrefort aux voûtes des bas-côtés. Il peut être à double volée (pour enjamber en deux fois un bas-côté double) et à double étage (pour recevoir les poussées à deux hauteurs différentes). Assise : désigne une rangée de pierre dans une construction. Bandeau : Moulure rectiligne horizontale. Barlong : De forme rectangulaire. Bas-côtés : Nefs latérales d'une église. Synonyme: collatéraux. Cathédrale: Du latin cathedra : siège épiscopal. L'église cathédrale est l'église principale d'un diocèse, où se trouve le trône de l'évêque. Claveau : Pierre taillée en forme de coin composant l'appareillage d'un arc. Clef de voûte : Claveau placé au sommet de la voûte, à la rencontre des nervures de l'ogive. Chapiteau : Pierre taillée et sculptée surmontant une colonne ou un pilastre et recevant la retombée des arcs. Chevet : cf. « abside ». Chœur : Partie de l'église généralement réservée au clergé. Dans les églises françaises, le choeur se situe généralement après la croisée du transept, dans le chevet. Collatéraux : Synonyme de Bas-côtés. Contrefort : Bloc de maçonnerie en saillie sur un mur pour le renforcer à l'endroit des poussées. Culée : Massif de maçonnerie qui, par sa masse, neutralise les poussées transmises par un arc-boutant. Déambulatoire : Galerie de circulation faisant le tour du choeur, sur laquelle s'ouvrent souvent les chapelles rayonnantes. Façade : Coté de l'église où se trouve l'entrée principale. Gâble : Motif ornemental triangulaire, souvent ajouré, surmontant les fenêtres, les portes, ou placé à la base des clochers. Hucher : (ou Huchier) Artisan qui travaille le bois (pourrait être assimilé aux menuisiers de nos jours) Jouée : Cloison latérale, généralement sculptée en bas-relief, d'une rangée de stalles. Jubé : Clôture monumentale, en général surmontée d'une galerie, séparant le choeur de la nef dans certaines églises et servant aux lectures et chants liturgiques. Lierne: Nervure supplémentaire renforçant la croisée d'ogive. Linteau : Traverse horizontale en pierre qui ferme le haut d'une baie ou d'une porte. Miséricorde : Support placé sous le siège mobile d'une stalle d'église, et qui permet de s'asseoir légèrement. Nef : Partie de l'église comprise entre la façade et le choeur. Son nom vient de la ressemblance avec la nef renversée d'un bateau. Ogive : Nervure diagonale qui renforce et soutient la voûte. Piédroit : Montants verticaux encadrant un portail. Pilastre : Pilier rectangulaire en faible saillie, engagé dans le mur. Le pilastre cannelé, copié sur les monuments antiques, a un décor de sillons parallèles creusés verticalement. Pinacle : Pyramide ou cône couronnant un support vertical. A une double fonction: architecturale (son poids consolide le support) et décorative (son dessin, souvent décoré, donne de l'élégance à l'ensemble). Porche : Construction placée devant la façade de l'église. En bois ou en pierre, elle sert à protéger les fidèles, ainsi que les sculptures, des intempéries. Portail : entrée principale et monumentale de l'église. Rosace : Motif ornementale en forme de rose. Rose : Grande baie circulaire décorant les façades d'églises pour éclairer l'intérieur. Stalles : sièges dans lesquels prenaient place les chanoines lorsqu'ils se réunissaient au choeur pour dire et chanter offices, prières, psaumes... Tierceron : Nervure supplémentaire qui relie la lierne au départ des ogives. Transept : Galerie transversale d'une église qui coupe la nef en donnant à l'église la forme symbolique d'une croix.

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Travée : Portion de la nef comprise entre deux supports. Triforium : Série de baies ajourées ou d'arcatures aveugles situées sur les murs latéraux d'une nef. Trumeau : Pilier supportant le linteau d'un portail en le divisant en deux baies. Tympan : Espace compris entre le linteau et l'arc d'un portail; celui est fréquemment sculpté. Voussure : Arc d'un portail retombant sur un piédroit. Ymagier (ou entailleur) : Artisan sculpteur (sur bois ou même sur pierre…).

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Séance 4 - le Marais

La séance avec la conférencière porte sur le quartier du Marais au temps des précieuses ridicules. En complément de cette séance, nous vous proposons d’aborder avec votre classe une vision plus transversale de ce quartier. De la fin des années 50 au début des années 60, il fut au cœur d’une véritable bataille idéologique qui aboutit à la prise en compte du patrimoine urbain dans la politique d’aménagement des villes. Le Marais fut le premier des secteurs sauvegardés suite à la loi du 4 août 1962. Nous vous proposons dans ce dossier différents documents relatifs à la rénovation du patrimoine urbain dans un secteur précis du Marais ; l’îlot sis entre la rue des jardins-Saint-Paul et la rue Saint-Paul. Vous pourrez aborder avec vos élèves à la fois :

−−−− la densité du tissu urbain originel −−−− la diversité du patrimoine urbain présent dans le Marais (le plus important vestige du rempart de Philippe

Auguste est situé de l’autre côté de la rue des jardins-Saint-Paul) Nous vous recommandons la lecture du livre de Danielle Chadych, cité dans la bibliographie.

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Plan de Turgot, détail incluant la Bastille, la place des Vosges (…), XVIIIème s

© Musée Carnavalet/Roger Viollet

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Plan de Turgot, détail montrant l’îlot sis entre la rue des jardins-Saint-Paul et la rue Saint-Paul, musée Carnavalet [agrandissement du détail précédent]

Vue de l'église Saint-Paul sur le Sud et la rue des jardins-Saint-Paul, (avant les travaux), anonyme, 1er juillet 1942, gélatino-bromure

d'argent, Ph 20262, musée Carnavalet

Vue de l'église Saint-Paul sur le Sud et la rue des jardins-Saint-Paul, (après les travaux),

anonyme, 9 septembre 1948, gélatino-bromure d'argent, Ph 20263, musée Carnavalet

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La tour Montgomery, l’une des deux tours fortifiées de la poterne Saint-Paul, vestiges de l’enceinte de Philippe Auguste, Eva Riaux, 2006

© Musée Carnavalet/Roger Viollet

La place des Vosges, E. Gossin, vers 1900, épreuve au gélatino-bromure d'argent © Musée Carnavalet/Roger Viollet

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Séance 5 - Invalides.

En complément de la visite du quartier des Invalides avec la conférencière nous vous proposons de vous faire découvrir un personnage célèbre qui œuvra dans ces murs : Antoine-Augustin Parmentier (1737-1813). « De tous les monuments élévés par Louis XIV, il n’en est peut-être aucun qui soit plus digne que celui-ci d’illustrer son règne : sublime par la dignité de son objet, remarquable par la grandeur de son plan et la beauté de son exécution, cet édifice attestera pendant plusieurs siècles la bienfaisance du monarque qui l’a fondé » Quatremère de Quincy, 1808.

Vue et perspective des Invalides à Paris, Aveline, XVIIème s., gravure © Musée Carnavalet/Roger Viollet

« En 1670, Louis XIV décide de faire construire un bâtiment susceptible d'abriter ses soldats invalides ou trop âgés pour servir. Il confie son projet au Secrétaire d'Etat à la Guerre, Louvois, qui choisit l'architecte Libéral Bruant pour la construction de l'hôtel, dont le plan n'est pas sans rappeler l'Escorial de Philippe II (Espagne). Ce projet s'inscrit dans le courant charitable et social du XVIIe siècle et l'Hôtel des Invalides devient un exemple pour bien d'autres pays européens. » http://www.invalides.org/pages/historique.html

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Antoine-Augustin Parmentier (1737-1813) © Musée Carnavalet/Roger Viollet

« Lorsqu'en 1670, Louis XIV ordonne la construction d'un hôtel royal « pour le logement, subsistance et entretenement de tous les pauvres officiers et soldats » estropiés ou ayant vieilli dans ses troupes, la « Compagnie des Filles de la Charité », fondée par saint Vincent de Paul a déjà un riche passé de services rendus aux pauvres malades. Conformément aux lettres patentes par lesquelles le roi a approuvé la compagnie en 1657, ses religieuses sont « dressées à bien servir les pauvres malades..., à faire et administrer les médicaments » ; ensuite elles sont envoyées dans les paroisses et dans les hôpitaux où elles sont demandées.

Il n'est donc pas surprenant que le marquis de Louvois, ministre de la Guerre, et à ce titre directeur et administrateur général de l'Hôtel des Invalides, passe un contrat avec la compagnie des Filles de la Charité pour les établir en cet hôtel. Ce fut fait le 7 mars 1676. Le contrat stipule « qu'elles auront seules la charge des infirmeries dudit hôtel, et le soin des soldats malades ; qu'elles feront la cuisine pour eux et pour elles seulement, qu'elles auront le gouvernement entier de l'apothicairerie, composeront les médicaments, drogues, sirops et confitures nécessaires ; et quant aux onguents, si elles ne savent ou ne les peuvent faire, elles les feront faire par l'apothicaire ou le chirurgien, auxquels elles fourniront ce qu'il conviendra pour la composition d'iceux ; et ne donneront pas les lavements, et ne feront pas les saignées, cela étant réservé pour l'apothicaire et le chirurgien dudit hôtel, lesquels n'auront aucune vue sur elles ni sur leurs emplois... » (…) Quatre-vingt-dix ans plus tard (1766), le contrat est toujours en vigueur quand Parmentier est nommé apothicaire gagnant-maîtrise en l'Hôtel des Invalides. (…) Le brevet d'apothicaire-major de Parmentier, en date du 18 juillet 1772, nous apprend que ce jour le roi décide « d'établir un apothicaire-major pour le plus grand bien et l'utilité des malades aux infirmeries de l'Hôtel des Invalides, de faire exploiter la pharmacie par un sujet expérimenté et versé dans son art ». (…) Il devient pensionnaire du roi, gardant son traitement et son logement à l'Hôtel des Invalides. « C'est de cette période que commencent ses recherches qui vont continuer jusqu'à sa mort. » ► Massy R. À l'apothicairerie de l'Hôtel Royal des Invalides. Le conflit de 1772 entre l'administration et les Filles de la Charité. In: Revue d'histoire de la pharmacie, 42e année, N. 142, 1954. pp. 315-324.

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La Pomme de terre: Solanum tuberosum escculentum.Originaire des Andes dans la région du lac Titicaca, les Incas la cultivaient sous le nom de "papa", près de 1.000 ans avant J.C. La pénétration jusqu'en Europe se fait vers 1570 par les "conquistadores" espagnols qui transportent les premiers tubercules en Espagne (en Andalousie elle s'appelle encore papa) et en Irlande.

D'Espagne, Philippe II en envoie à Rome au pape Pie IV, le pape en envoya au gouverneur de Mons en Belgique qui en en fait parvenir en Autriche. De là, la pomme de terre se propagea en Allemagne, en Suisse puis dans l'Est de la France. En France, les premières plantations de pommes de terre "les truffoles" sont localisées en Ardèche au milieu du 16e siècle. Officiellement c'est Olivier de Serres qui, en 1600, les cultive pour la première fois en Vivarais.

Son emploi dans l'alimentation humaine, en France, date de 1616 environ, mais rencontre de vives résistances car des plantes voisines ont la réputation de contenir des substances pouvant entraîner des troubles.

Antoine Augustin Parmentier (1737-1813) était un agronome, nutritionniste, hygiéniste français et pharmacien militaire qui avait fait carrière dans l’armée. À l'âge de 20 ans, il est pharmacien aux armées pendant la guerre de Sept Ans, contre la Grande-Bretagne et la Prusse. Au cours de son incarcération en Allemagne, il découvre la qualité nutritive d’une plante de la famille des solanacées, la pomme de terre. Il avait vu des paysans donner leurs pommes de terre à des porcs.

Les travaux sur la pomme de terre

À son retour en France, en 1771, il est apothicaire-major de l’Hôtel royal des Invalides. Là, il plante clandestinement (parce que la plante était réputée nocive et de nature à propager des maladies), des tubercules de pomme de terre dans la terre du cimetière. Il est dénoncé par les sœurs et passe pour un alchimiste, voire un sorcier inspiré par le diable !

Pourtant Parmentier réussit à démontrer scientifiquement le caractère nutritif et totalement inoffensif de la pomme de terre. Il rédige un mémoire, qui le rend célèbre. À l’issue de la publication de son mémoire, l’Académie des Sciences, des Belles-Lettres et des Arts le récompense, malgré une interdiction du Parlement de cultiver la pomme de terre datant de 1748. En 1772, les membres de la Faculté de médecine de Paris planchent pendant de longues semaines sur le sujet et finissent par déclarer que la consommation de la pomme de terre ne présente pas de danger. Mais le terrain sur lequel il avait installé ses plantations près des Invalides appartenant à des religieuses, il dut bientôt renoncer à les cultiver. Ne baissant pas les bras pour autant, Parmentier, va promouvoir la pomme de terre en organisant des dîners où seront conviés des hôtes prestigieux tels que Benjamin Franklin ou Lavoisier.

Il essaie, avec l’appui du roi Louis XVI, de développer la culture de la pomme de terre en créant une plantation de ce tubercule dans la plaine des Sablons, à Neuilly, en 1785. En août

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1786, il apporte même au roi un bouquet de fleurs de pomme de terre. Louis XVI en glisse une à sa boutonnière et une autre sur la perruque de Marie-Antoinette !

Portrait of Antoine Parmentier (1737-1813) d’après Francois Dumont (1751-1831) © Musée Carnavalet/Roger Viollet

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Chronologie de la construction de l’Hôtel des Invalides : 1671 14-15 mars : Louvois passe le marché de la construction de l’hôtel royal des Invalides

avec l’architecte Libéral Bruant et l’entrepreneur Pipault. 30 novembre : pose de la première pierre.

1674 Octobre : achèvement des bâtiments principaux, à l’exception de l’église, de l’infirmerie et du logement des prêtres.

1675 Décoration de l’intérieur des bâtiments. 1676 Mars : Louvois, mécontent de Libéral Bruant, convoque le jeune architecte Jules

Hardouin–Mansart. Il est séduit par son projet d’église (8 avril). 14 novembre : marché de construction du « choeur de l’église » (église des soldats).

1677 24 février : Signature du marché des fondations de l église. 30 décembre : marché de maçonnerie allant des fondations à la grande corniche.

1678 Construction des chaires dans l’église des soldats. 1679 25 mars : marché : édification du buffet d’orgues confiée à Germain Pilon.

29 mars : marché de construction des infirmeries. 12 mai : commande du mécanisme de l’orgue au facteur du roi, Alexandre Thierry.

1687 23 mars : marché pour la construction du reste du dôme. 1689 11 mars : Jules Hardouin-Mansart prend l’avis de ses confrères de l’Académie

d’Architecture sur la solidité de la charpente du dôme. 1690 Décembre : achèvement du dôme.

12 décembre : marché pour la dorure. 1692 7 juillet : Jules Hardouin-Mansart invite ses confrères à visiter l’édifice. 1701 13 février : marché du pavage du dôme. 1706 28 août : Louis XIV inaugure le dôme. 1708 11 mars : mort de Jules Hardouin-Mansart, il est remplacé par son beau-frère Robert de

Cotte. 1730 Construction des bâtiments de la boulangerie du côté ouest du dôme. 1735 14 juillet : mort de Robert de Cotte. 1747 –1750 Jules de Cotte succède à son père. Il dirige la construction des bâtiments des officiers

(« aile Robert de Cotte ») et des ouvriers. 1813 6 février : devis pour la pose d’un paratonnerre sur la flèche du dôme.

Mars – mai : restauration et redorure du dôme, adjudication s pour l’échafaudage et pour la dorure.

1842 Début des travaux d’aménagement du tombeau de Napoléon dans l’église du dôme par l’architecte Visconti. (fin des travaux en 1861).

1903 - 1905 Construction d’un bâtiment en U, « à la Mansart », à l’angle sud-Ouest de l’aire générale. 1937 Redorure du dôme. 1957 8 décembre : inauguration des grande sorgues restaurées. 1967-1969 Dégagement des douves devant le parvis de l’église du dôme. 1970-1972 Creusement d’une douve devant le musée de l’Ordre de la libération, le long du

boulevard de la Tour-Maubourg. 1972-1974 Démolition du mur d’enceinte remplacé par une grille, le long du boulevard des

Invalides. 1975 Démolition des bâtiments édifiés en 1903-1905. 1976 Travaux de rénovation de l’Institution nationale des Invalides (aile ouest). 1978 Rénovation des ailes est et sud de l’Institution nationale des Invalide. 1980 Reconstitution du jardin de l’Intendant. 1980-1989 Poursuite des travaux de rénovation et restauration des toitures de l’hôtel des Invalides. 1989 Juillet : inauguration de la redorure du dôme. Modernisation des illuminations. 1989-1993 Travaux du nouveau musée des Plans-Reliefs 1992-2005 Rénovation du musée de l’Armée.

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Séance 6 - Musée Carnavalet. La séance avec la conférencière porte sur la demeure bourgeoise et aristocratique aux XVIIème et XVIIIème siècles. En contrepoint nous vous proposons d’aborder en classe quelle pouvait être la vie du peuple à Paris à la même époque. Vous pouvez notamment aborder le contraste entre le luxe et le raffinement des intérieurs que les enfants ont découvert pendant la visite, et le l’effervescence qui règne dans les rues. Vous trouverez ci-joint trois extraits des écrits de Louis-Sébastien Mercier (1740-1814), grand chroniqueur parisien de la fin du XVIIIe siècle, et des représentations de marchands de rues. Chapitre CCCLXXIX, Cris de Paris Non, il n’y a point de ville au monde où les crieurs et les crieuses de rue aient une voix plus aigre et plus perçante. Il faut les entendre élancer leur voix par-dessus les toits ; leur gosier surmonte le bruit et le tapage des carrefours. Il est impossible à l’étranger de pouvoir comprendre la chose ; le Parisien lui-même ne la distingue jamais que par la routine. Le porteur d’eau, la crieuse de vieux chapeaux, le marchand de ferraille, de peaux de lapin, la vendeuse de marées, c’est à qui chantera sa marchandise sur un mode haut et déchirant. Tous ces cris discordant forment un ensemble, dont on a point d’idée lorsqu’on ne l’a point entendu. L’idiome de ces crieurs ambulants est tel, qu’il faut en faire une étude pour bien distinguer ce qu’il signifie. Les servantes ont l’oreille beaucoup plus exercée que l’académicien, parce qu’elles savent distinguer du quatrième étage, et d’un bout de la rue à l’autre, si l’on crie des maquereaux ou des harengs frais, des laitues ou des betteraves. Comme les finales sont à peu près du même ton, il n’y a que l’usage qui enseigne aux doctes servantes à ne point se tromper, et c’est inexplicable cacophonie pour tout autre.

Le Mercier : « Au public je suis nécessaire », Bonnart, gravure

© Musée Carnavalet/Roger Viollet

Marchande de tisane, Carle Vernet, gravure, © Musée Carnavalet/Roger Viollet

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Chapitre XXXIX, Gare ! Gare !

L'Embarras de Paris Estampe par Nicolas Guérard (XVIIIème siècle) © Musée Carnavalet/Roger Viollet

Gare les voitures ! Je vois passer dans un carrosse le médecin en habit noir, le maître à danser dans un cabriolet, le maître en fait d’armes dans un diable1, et le prince court à six chevaux ventre à terre, comme s’il était en rase campagne. L’humble vinaigrette se glisse entre deux carrosses, et échappe comme par miracle. Elle traîne une femme à vapeurs, qui s’évanouirait dans la hauteur d’un carrosse. De jeunes gens à cheval gagnent impatiemment les remparts, et sont de mauvaise humeur, quand la foule pressée, qu’ils éclaboussent, retarde un peu leur marche précipitée. Les voitures et les cavalcades causent un nombre d’accidents, pour lesquels la police témoigne de la plus parfaite indifférence. J’ai vu la catastrophe du 18 mai 17702, occasionnée par la foule des voitures qui obstruèrent la rue, unique passage ouvert à l’affluence prodigieuse du peuple qui se portait en foule à la triste illumination des Boulevards. J’ai manqué d’y perdre la vie ; Douze à quinze cents personnes ont péri le même jour, ou des suites de cette presse effroyable ; J’ai été renversé trois fois sur le pavé à différentes époques, et sur le point d’être roué tout vif. J’ai donc un peu le droit d’accuser le luxe barbare des voitures. Il n’a reçu aucun frein, malgré les réclamations journalières. Les roues menaçantes qui portent orgueilleusement le riche, n’en volent pas moins rapidement sur un pavé teint du sang des malheureuses victimes qui expirent dans d’effroyables tortures, en attendant la réforme qui n’arrivera pas, parce que tous ceux qui participent à l’administration roulent carrosse, et dédaignent conséquemment les plaintes de l’infanterie. Le défaut de trottoirs rend presque toutes les rues périlleuses. Quand un homme qui a un peu de crédit est malade, on répand du fumier devant sa porte, pour rompre le bruit des carrosses ; et c’est alors surtout qu’il faut prendre garde à soi.

1 Grands chariots à deux ou quatre roues pour les « grands fardeaux », utilisés surtout par les charpentiers selon le dictionnaire de Trévoux, 1771. 2 En vérité le 30 mai 1770

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Jean-Jacques Rousseau3, renversé en 1776 sur le chemin de Ménilmontant par un énorme chien danois qui précédait un équipage, resta sur la place, tandis que le maître de la berline le regardait étendu avec indifférence. Il fut relevé par des paysans, et reconduit chez lui boiteux et souffrant beaucoup. Le maître de l’équipage ayant appris le lendemain quel était l’homme que son chien avait culbuté, envoya un domestique pour demander au blessé ce qu’il pouvait faire pour lui : Tenir désormais son chien à l’attache, reprit le philosophe, et il congédia le domestique. Quand un cocher vous a moulu tout vif, on examine chez le commissaire si c’est la grande ou petite roue. Le cocher ne répond que de la petite ; et si vous expirez sous la grande roue, il n’y a point de dédommagements pécuniaires pour vos héritiers4. Puis il est un tarif pour les bras, les jambes, les cuisses ; et c’est un prix fait d’avance. Que faire ! Bien écouter quand on crie, gare ! gare ! Mais nos jeunes Phaétons5 font crier leurs domestiques de derrières le cabriolet. Le maître vous renverse, puis le valet s’égosille, et se ramasse qui peut. Chapitre LXXXV, Le Faubourg Saint-Marcel C’est le quartier où habite la populace de Paris la plus pauvre, la plus remuante et la plus indisciplinée. Il y a plus d’argent dans une seule maison du faubourg Saint-Honoré que dans tout le faubourg Saint-Marcel, ou Saint-Marceau, pris collectivement. C’est dans ces habitations éloignées du mouvement central de la ville, que se cachent les hommes ruinés, les misanthropes, les alchimistes, les maniaques, les rentiers bornés, et aussi quelques sages studieux, qui cherchent réellement la solitude, et qui veulent vivre absolument ignorés et séparés des quartiers bruyants des spectacles. Jamais personne n’ira les chercher à cette extrémité de la ville. Si l’on fait un voyage dans ce pays-là, c’est par curiosité ; rien ne nous y appelle ; il n’y a pas un seul monument à y voir ; c’est le peuple qui n’a aucun rapport avec les parisiens, habitants polis des bords de la Seine. Ce fut dans ce quartier que l’on dansa sur le cercueil du diacre de Paris6, et que l’on mangea de la terre de son tombeau, jusqu’à ce qu’on eût fermé le cimetière :

De part le roi, défense à Dieu De faire miracle en ce lieu

Les séditions et les mutineries ont leur origine cachée dans ce foyer de la misère obscure. Les maisons n’y ont point d’autre horloge que le cours du soleil. Ce sont des hommes reculés de trois siècles par rapport aux arts et aux mœurs régnantes. Tous les débats particuliers y deviennent publics ; et une femme mécontente de son mari, plaide sa cause dans la rue, le cite au tribunal de la populace, attroupe les voisins, et récite la confession scandaleuse de son homme. Les discussions de toute nature finissent par de grands coups de poing ; et le soir on est raccommodé, quand l’un des deux a eut le visage couvert d’égratignures. Là, tel homme enfoncé dans un galetas, se dérobe à la police et aux cents yeux de ses argus, à peu près comme un insecte se dérobe aux forces réunies de l’optique. Une famille entière occupe une seule chambre, où l’on voit les quatre murailles, où les grabats sont sans rideaux, où les ustensiles de cuisine roulent avec les vases de nuit. Les meubles en totalité ne valent pas vingt écus ; et tous les trois mois les habitants changent de trou, parce qu’on les chasse faute de payement du loyer. Il serrent ainsi, et promènent leurs misérables meubles d’asile en asile. On ne voit point les souliers dans ces demeures ; on n’entend le long des escaliers que le bruit des sabots. Les enfants y sont nus et couchent pêle-mêle. C’est un faubourg qui, le dimanche, peuple Vaugirard et ses nombreux cabarets ; car il faut que l’homme s’étourdisse sur ses maux : c’est lui surtout qui remplit le fameux salon de gueux. Là dansent

3 Dans Rêveries, Rousseau raconte lui-même cet accident survenu le 24 octobre 1776. 4 La grande roue était placée à l’arrière, « le cocher ne répond que de la petite », comme dans nos contrats d’assurances actuels. 5 « Chaise roulante fort propre, qui n’est ordinairement que pour une personne, qui est tirée par un cheval, et qui va fort vite. On l’appelle ainsi par allusion à Phaéton, qui voulu conduire le char du Soleil, parce que ce sont des jeunes gens ou des petits-maîtres qui se servent de cette sorte de voitures, qui le mènent eux-mêmes, et qui courent souvent grand risque. C’est ce qu’on nomme aujourd’hui cabriolet. » Trévoux. 6 François Pâris, fils d’un conseiller au parlement devint diacre en abandonnant fortune et carrière et s’installa dans une simple maison du bas de la rue Mouffetard pour se livrer à la charité envers les pauvres du faubourg. Après sa mort, le 1er mai 1727, sa tombe fit l’objet d’un véritable culte. Une « société de convulsionnaires » se mis en place. A partir de 1731 les scènes de convulsions firent place à de véritables violences subies volontairement ce qui conduisit la police à fermer le cimetière le 27 janvier 1733, alors que l’archevêque de Paris interdisait le culte du diacre Pâris. Par dérision, une main anonyme apposa l’inscription mentionnée par Mercier.

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sans souliers, et tournoyant sans cesse, des hommes et des femmes, qui, au bout d’une heure, soulèvent tant de poussière, qu’à la fin on ne les aperçoit plus. Une rumeur épouvantable et confuse, une odeur infecte, tout vous éloigne de ce salon horriblement peuplé, et où, dans des plaisirs faits pour elle, la populace boit un vin aussi désagréable que tout le reste. Ce faubourg est entièrement désert les fêtes et les dimanches. Mais quand Vaugirard7 est plein, son peuple reflue au Petit-Gentilly, aux Porcherons et à la Courtille8. On voit le lendemain devant les boutiques de marchands de vins, les tonneaux vides, et par douzaines. Ce peuple boit pour huit jours. Il est, dans ce faubourg plus méchant, plus inflammable, plus querelleur, et plus disposé à la mutinerie, que dans les autres quartiers. La police craint de pousser à bout cette populace ; on la ménage, parce qu’elle est capable de porter aux plus grands excès9.

Le cabaret, Bibliothèque nationale

7 L’urbanisation de ce secteur a été lente, la population aisée des quartiers Saint-germain et des Invalides, répugnant à se déplacer plus au sud, loin des remparts. Ce relatif éloignement maintenait le gros village de Vaugirard à l’abri d’un éventuel recul des barrières fiscales et en faisait ainsi un lieu de débits de boisson recherché. 8 Le quartier des Porcherons, encore rural et en voie d’urbanisation, au sud de la butte Montmartre. Situé hors les barrières, il bénéficiait lui aussi de l’exemption fiscale sur les vins. La Courtille était un nouveau quartier populaire en construction dans les années 1780, au pied du plateau de Belleville, dans le prolongement du faubourg du Temple. Situé en dehors des barrières de Paris, il était particulièrement connu pour ses guinguettes. Il y eut une véritable révolte des marchands de vin et restaurateurs en 1786, quand on décida d’inclure ce quartier, avec celui des Porcherons, dans l’enceinte de Paris. 9 Les travaux de Haïm Burstin (1983) ont montré que la vision que Mercier proposait du faubourg Saint-Marcel était quelque peu déformée. Certes, il était bien le lieu de concentration de la population flottante, des mendiants, des petits métiers. Mais le faubourg Saint-Marcel était avant tout un quartier d’artisans modestes, mais ayant pignon sur rue : brasseurs, tanneurs, métiers de l’ameublement, du textile et surtout imprimeurs-relieurs et fondeurs de caractères. La pauvreté de ce faubourg était pourtant bien réelle : en janvier 1789, il reçut à lui seul 23% des 100 000 livres que le roi offrit pour le soulagement des pauvres de Paris pendant cet hiver si rigoureux. Sa population totale s’élevait à 60-65000 habitants, ce qui en faisait le quartier le plus peuplé de Paris.

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Séance 7 - la Révolution Française. Nous proposons d’aborder un aspect fondamental de la Révolution française : son rôle central dans la construction d’un sentiment patrimonial national. Vous trouverez dans ce document des illustrations d’époque sur le vandalisme révolutionnaire, des références de textes législatifs révolutionnaires, ainsi que des illustrations et descriptions du musée des Monuments français d’Alexandre Lenoir.

La violation des caveaux des rois dans la basilique de Saint-Denis en octobre 1793 / H. Robert, huile sur toile ©

Musée Carnavalet / Roger Viollet

La salle d’introduction au musée des Monuments Français aux petits augustins, J.L. Vauzelle, 1804, huile sur

toile © Musée Carnavalet / Roger Viollet

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Le mot « vandalisme » est utilisé pour la première fois en 1794 par l’abbé Grégoire, pour qualifier l’attitude du gouvernement et du peuple envers le patrimoine depuis le début de la Révolution : Le 28 fructidor an II de la République, l'abbé Grégoire proclamait devant la Convention dans son rapport resté célèbre " sur les destructions opérées par le vandalisme et sur les moyens de les réprimer qu'une horde de brigands ont émigré ; mais les arts n'émigrent pas. Comme nous, les arts sont enfants de la liberté ; comme nous, ils ont une patrie, et nous transmettrons ce double héritage à la prospérité". L'abbé Grégoire écrit ainsi : "De toutes parts, on faisait main basse sur les livres, les tableaux, les monuments qui portaient l'empreinte de la religion, de la féodalité, de la royauté ; elle est incalculable, la perte d'objets religieux, scientifiques et littéraires.[...] Cependant tels furent les excès auxquels on se porta qu'enfin il fut possible de faire entendre utilement ma voix et l'on consentit au Comité d'Instruction Publique à ce que je présentasse à la Convention un rapport contre le vandalisme. Je créai le mot pour tuer la chose".

Avec la nationalisation des biens du clergé et les ventes d’objets nobiliaires et royaux, le gouvernement se retrouva devant un fonds énorme à inventorier. Il nomma pour cela des commissions de savants. Ces objets ou œuvres d’art furent inventoriés, puis envoyés dans des dépôts en attendant d’être soit vendus, soit envoyés dans un musée. Ces dépôts furent crées par Bailly, premier maire de Paris, et par le duc de la Rochefoucauld, président du Comité des biens nationaux. Le plus célèbre est le dépôt des Petits-Augustins, confié à Alexandre Lenoir. De nombreuses œuvres d’art parvinrent (mais souvent partiellement) ainsi à être sauvées de la destruction. Le gouvernement républicain décida ensuite de former des musées pour assurer le progrès des connaissances utiles et l’émulation des artistes. Le « Muséum central des arts » au Louvre fut ainsi fondé par le décret du 27 juillet 1793 pour recevoir les « bienfaits de la civilisation ». Les dépôts servirent alors à remplir le Louvre, même s’ils étaient ouverts au public certains jours pour « montrer les œuvres conquises sur les ennemis de la Révolution ». Certains dépôts furent quand même transformés en musées, comme celui des Petits-Augustins d’Alexandre Lenoir, qui devient en 1795 le Musée des Monuments français.

Alexandre Lenoir (1761-1839) défendant les monuments de l'abbaye de Saint-Denis,

Paris, musée du Louvre, collection Rothschild , © RMN

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► Instructions sur la manière d'inventorier et de conserver, dans toute l'étendue de la République, tous les objets qui peuvent servir aux arts, aux sciences et à l'enseignement, 1794. "Tous ces objets précieux qu'on tenait loin du peuple, ou qu'on ne lui montrait que pour le frapper d'étonnement et de respect, toutes les richesses lui appartiennent. [...] Vous n'êtes que les dépositaires d'un bien dont la grande famille a le droit de vous demander des comptes". ► Michelet, Le Peuple, 1846. « Que d’âmes ont pris dans ce musée l’étincelle historique, l’intérêt des grands souvenirs, le vague désir de remonter les âges ! (…) Je me rappelle encore l’émotion, toujours la même et toujours vive, qui me faisait battre le cœur quand, tout petit, j’entrais sous ces voûtes sombres et contemplais ces visages pâles, et que j’allais et cherchais, ardent et anxieux, craintif, de salle en salle et d’âge en âge.» ► Victor Hugo, Guerre aux démolisseurs, 1825. « Il y a deux choses dans un édifice : son usage et sa beauté. Son usage appartient au propriétaire, sa beauté à tout le monde, à vous, à moi, à nous tous. Donc, détruire, c’est dépasser son droit. [ … ] S’il faut une loi, répétons-le, qu’on la fasse. »

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Séance 8 - Paris au XIXème siècle.

La séance avec la conférencière porte sur l’Opéra Garnier et le style Napoléon III. En complément de cette séance, nous vous proposons d’aborder avec votre classe les grands travaux haussmanniens qui bouleversèrent Paris sous le Second Empire. - La photographie et l’extrait de Pot-bouille d’Emile Zola vous permettront d’aborder la répartition des classes sociales dans un immeuble moderne sous le Second Empire. - La gravure suivante et l’extrait du Bonheur des Dames d’Emile Zola vous permettront d’évoquer la révolution commerciale et sociale que représente l’apparition des grands magasins.

Boulevard des Capucines, Achille Quinet, fin 19e siècle, Tirage sur papier albuminé © Musée Carnavalet/Roger Viollet

L’immeuble haussmannien : Généralement l’immeuble haussmannien présente une élévation à 5 niveaux. L’animation de la façade en respecte la structure :

- le rez-de-chaussée et l’entresol sont striés de refends horizontaux[1] qui assoient l’ensemble de la construction. Ils forment le soubassement.

[1] Refends horizontaux : canaux accusant ou simulant les joints.

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- le niveau supérieur (en architecture on parle plutôt de « niveau » et non d’étage ; les niveaux incluent le rez-de-chaussée), est le « bel étage » ou « étage noble ». Il est distingué des autres par un décor des fenêtres plus chargé.

- le dernier étage comprend un balcon filant soutenu pas des consoles et des modillons. - enfin, les combles, au couronnement de l’immeuble, sont identifiables par les lucarnes

qui ressortent du brisis incliné en ardoise.

A l’intérieur de cet immeuble, les niveaux sociaux des habitants déclinent au fur et à mesure que l’ont s’élève vers les toits. Il y a donc une hiérarchie verticale.

Extrait de Pot-bouille :

« Il tournait le tête, comme s’il eut sondé les murs, de son œil d’architecte.

− Mon cher, vous allez voir, elle est tout à fait bien… Et habitée rien que par des gens comme il faut !

Alors, montant avec lenteur, il nomma les locataires. A chaque étage, il y avait deux appartements, l’un sur la rue, l’autre sur la cour, et dont les portes d’acajou verni se faisaient face. D’abord, il dit un mot de M. Auguste Vabre : c’était le fils aîné du propriétaire ; il avait pris, au printemps, le magasin de soierie du rez-de-chaussée, et occupait également tout l’entresol. Ensuite, au premier, se trouvaient, sur la cour l’autre fils du propriétaire, M. Théophile Vabre, avec sa dame, et sur la rue, le propriétaire lui-même, un ancien notaire de Versailles, qui logeait du reste chez son gendre, M. Duveyrier, conseiller à la cour d’appel.

− Un gaillard qui n’a pas quarante-cinq ans, dit en s’arrêtant Campardon, hein ? c’est joli ! Il monta deux marches, et, se tournant brusquement, il ajouta :

− Eau et gaz à tous les étages. Sous la haute fenêtre de chaque palier, dont les vitres bordées d’une grecque, éclairaient l’escalier d’un jour blanc, se trouvait une étroite banquette de velours. L’architecte fit remarquer que les personnes âgées pouvaient s’asseoir. Puis, comme il dépassait le second étage sans nommer les locataires :

− Et là ? demanda Octave, en désignant la porte du grand appartement. − Oh ! là, dit-il, des gens qu’on ne voit jamais, que personne ne connaît… La maison s’en passerait volontiers. Enfin, on trouve des taches partout…

Il eut un petit souffle de mépris.

− Le Monsieur fait des livres, je crois. Mais, au troisième, son rire de satisfaction reparut. L’appartement sur la cour était divisée en deux : il y avait là Mme Juzeur, une petite femme bien malheureuse, et un monsieur très distingué, qui avait loué une chambre, où il venait une fois par semaine, pour des affaires. Tout en donnant des explications, Campardon ouvrait la porte de l’appartement.

− Ici, nous sommes chez moi, reprit-il. Attendez, il faut que je prenne votre clef… Nous allons monter d’abord à votre chambre, et vous verrez ma femme ensuite.

Pendant les deux minutes qu’il resta seul, Octave se sentit pénétré par le silence grave de l’escalier. Il se pencha sur la rampe, dans l’air tiède qui venait du vestibule, il leva la tête, écoutant si aucun bruit ne tombait d’en haut. C’était une paix morte de salon bourgeois, soigneusement clos, où n’entrait pas un souffle du dehors. Derrière les belles portes d’acajou luisant, il y avait comme des abîmes d’honnêteté.

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− Vous aurez d’excellent voisins, dit Campardon, qui avait reparu avec la clef : sur la rue, les Josserand, toute une famille, le père caissier à la cristallerie Saint-Joseph, deux filles à marier ; et, près de vous, un petit ménage d’employés, les Pichon, des gens qui ne roulent pas sur l’or, mais d’une éducation parfaite…Il faut que tout se loue, n’est-ce pas ? même dans une maison comme celle-ci.

A partir du troisième, le tapis rouge cessait et était remplacé par une simple toile grise. Octave en éprouva une légère contrariété d’amour-propre. L’escalier, peu à peu, l’avait rempli de respect ; il était tout ému d’habiter une maison si bien, selon l’expression de l’architecte. Comme il s’engageait, derrière celui-ci, dans le couloir qui conduisait à sa chambre, il aperçut, par une porte entr’ouverte, une jeune femme debout devant un berceau. Elle leva la tête, au bruit. Elle était blonde, avec des yeux clairs et vides ; et il n’emporta que ce regard très distinct, car la jeune femme, tout d’un coup rougissante, poussa la porte, de l’air honteux d’une personne surprise. Campardon s’était tourné pour répéter :

− Eau et gaz à tous les étages, mon cher. Puis, il montra une porte qui communiquait avec l’escalier de service. En haut, étaient les chambres des domestiques. » ► E. Zola, Pot-Bouille, 1882.

P.F GRIGNON, 1910, fond Forney, Ville de Paris

A noter : La Bibliothèque Forney (Paris IVe) présente, «Gaz à tous les étages. La naissance du confort 1850-1920». Luxe, confort et propreté sont les maîtres mots de cette invention française du début du XIXe siècle. L'éclairage au gaz change la vie des gens, non seulement dans les rues, mais dans les appartements: finies les corvées de bois ou de charbon. Jusqu'au 28 janvier 2012, du mardi au samedi de 13h à 19h.

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Le Bon Marché en 1879, anonyme © Musée Carnavalet/Roger Viollet

Extrait de Au bonheur des Dames : « Bien qu’elle connût déjà la nouvelle installation, Mme Desforges s’était arrêtée, saisie par la vie ardente qui animait ce jour-là l’immense nef. En bas, autour d’elle, continuait le remous de la foule, dont le double courant d’entrée et de sortie se faisait sentir jusqu’au rayon de la soie : foule encore très mêlée, où pourtant l’après-midi amenait d’avantage de dames, parmi les petites bourgeoises et les ménagères ; beaucoup de femmes en deuil, avec leurs grands voiles ; toujours de nourrices fourvoyées, protégeant leurs poupons de leurs coudes élargis. Et cette mer, ces chapeaux bariolés, ces cheveux nus, blonds ou noirs, roulaient d’un bout de la galerie à l’autre, confus et décolorés au milieu de l’éclat vibrant des étoffes. Mme Desforges ne voyait de toutes parts que les grandes pancartes, aux chiffres énormes, dont les taches crues se détachaient sur les indiennes vives, les soies luisantes, les lainages sombres. Des piles de rubans écornaient les têtes, un mur de flanelle avançait un promontoire, partout les glaces reculaient les magasins, reflétaient les étalages avec des coins de public, des visages renversés, des moitiés d’épaule et de bras ; pendant que, à gauche, à droite, les galeries latérales ouvraient des échappées, les enfoncement neigeux du blanc, les profondeurs mouchetées de la bonneterie, lointains perdus éclairés par le coup de lumière de quelque baies vitrée, et où la foule n’était plus qu’une poussière humaine. Puis, lorsque Mme Desforges levait les yeux, c’était le long des escaliers, sur les ponts volants, autour des rampes de chaque étage, une montée continue et bourdonnante, tout un peuple en l’air, voyageant dans les découpures de l’énorme charpente métallique, se dessinant en noir sur la clarté diffuse des vitres émaillées. De grands lustres dorés descendaient du plafond ; un pavoisement de tapis, de soies brodées, d’étoffes lamées d’or, retombait, tendait les balustrades de bannières éclatantes ; il y avait, d’un bout à l’autre, des vols de dentelles, des palpitations de mousseline, des trophées de soieries, des apothéoses de mannequins à demi vêtus ; et , au-dessus de cette confusion, tout en haut, le rayon de la literie, comme suspendu, mettait des petits lits de fer garnis de leurs matelas, drapés de leurs rideaux blancs, un dortoir de pensionnaires qui dormaient dans le piétinement de la clientèle, plus rare à mesure que les rayons s’élevaient davantage.

− Madame désire-t-elle des jarretières bon marché, dit un vendeur à Mme Desforges, en la voyant immobile. Tout soie, vingt-neuf sous.

Elle ne daigna pas répondre. Autour d’elle, les propositions glapissaient, s’enfiévraient encore. Pourtant elle voulut s’orienter. La caisse d’Albert Lhomme se trouvait à sa gauche ; il la connaissait de vue, il se permit un sourire aimable, sans hâte aucune au milieu du flot de factures qui l’assiégeait ; pendant que, derrière lui, Joseph, se battant avec la boite à ficelle, ne pouvait suffire à empaqueter les articles. Alors, elle se reconnut, la soie devait être devant elle. Mais il lui fallut dix minutes pour s’y rendre, tellement la foule augmentait. En l’air, au bout de leurs fils invisibles, les ballons rouges

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s’étaient multipliés ; ils s’amassaient en nuages de pourpre, filaient doucement vers les portes, continuaient à se déverser dans Paris, et elle devait baisser la tête sous le vol des ballons, lorsque de tout jeunes enfants les tenaient, le fil enroulé à leurs petites mains.

− Comment ! madame, vous vous êtes risquée ! » ► E. Zola, Au Bonheur des Dames, 1883

Le Bon Marché © Musée Carnavalet/Roger Viollet

Magasins du Bon Marché. Façades sur les rues de Sèvres et Velpeau, Fichot, Sweeton-Tilly © Musée Carnavalet/Roger Viollet

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L’Opéra de Paris

La place de l'Opéra, anonyme, vers 1900, photographie sur papier albuminé © Musée Carnavalet/Roger Viollet

Fin