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DOSSIER PÉDAGOGIQUE Éditeur responsable: Florence Doyen, Egyptologica asbl, 22 rue Ernest Solvay, 1050 Bruxelles, 02 736 93 31 Website: www.egyptologica.be

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DOSSIER PÉDAGOGIQUE

Éditeur responsable: Florence Doyen, Egyptologica asbl, 22 rue Ernest Solvay,

1050 Bruxelles, 02 736 93 31 Website: www.egyptologica.be

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Créée en 1987, Egyptologica a.s.b.l. est une association qui regroupe des égyptologues professionnels.

En dialogue avec le grand public, ces chercheurs et professeurs s'attachent à diffuser leurs connaissances de la civilisation égyptienne au moyen de stages, conférences et visites

dont ils assurent la conduite et garantissent la qualité scientifique. Egyptologica a.s.b.l. a reçu le prix 1990 du Centre d'Éducation Permanente de l'U.L.B.

Le contenu de ce dossier pédagogique, composé par Florence Doyen, est sous

© Egyptologica 2006. Website www.egyptologica.be créé par Jean-Pol Schrauwen.

Ce dossier pédagogique doit être complété par la visite de l'exposition en la Salle Saint-

Georges au Musée d'Art Wallon, et s'accompagne du texte de l'audiophone, réalisé dans le cadre de La Caravane du Caire. L'Égypte sur d'autres rives.

En outre, ce dossier sera très utilement enrichi par la lecture du catalogue de l'exposition E. Warmenbol (dir.), La Caravane du Caire. L'Égypte sur d'autres rives, 2006.

Texte de l'audiophone composé en français par Florence Doyen, égyptologue Egyptologica asbl, traduit en néerlandais par Bart Van Dooren, égyptologue Egyptologica Vlaanderen vzw, traduit en anglais par Christophe Nicodème, traducteur professionnel, traduit en allemand par Silvia Brügelmann-Gaspard, traductrice assermentée FR-DE.

L'exposition La Caravane du Caire est organisée par l'Échevin de la Culture, des Musées, des Arts

et Lettres de la Ville de Liège, Monsieur Hector Magotte, et par l'asbl "Les Musées de Liège". Infos: [email protected] - T. 04 221 93 25; www.lacaravaneducaire.be

Crédits photographiques:

Marc Verpoorten, Ville de Liège: (numéros de figures de ce dossier) 23, 24, 25, 26, 28, 29, 31, 32, 33, 35, 37, 40, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 51.

Eugène Warmenbol, ULB: figs 55, 56, 57, 58. Archives de la famille Sneyers: fig. 60.

Bibliothèque royale Albert Ier, Bruxelles: fig. 59. www.egyptologica.be: figs 38, 39.

Sources iconographiques: Catalogue La Caravane du Caire, 2006: figs 18, 34, 36.

CD Egyptian Treasures, vol. II M.R.A.H Bruxelles: figs 19, 20, 21, 22, 27, 52, 53. Description de l'Égypte: fig. 12, 17.

Catalogue Mémoires d'Égypte, 1990: fig. 16bis. Catalogue Gott, Mensch, Pharao, 1992: fig. 41, 49.

Catalogue H.-J. Redouté, 1993: figs 13, 14. Catalogue Egypte onomwonden, 1995: fig. 6.

Catalogue Iside, 1997: fig. 1. Catalogue L'Égypte romaine. L'autre Égypte, 1997: fig. 54.

Catalogue Cracking Codes, 1999: fig. 15. Catalogue Les Empereurs du Nil, 2000: fig. 2. Catalogue Lambert Lombard, 2006: figs 5, 7.

E. Leospo, La Mensa Isiaca di Torino, 1978: figs 8, 9, 10, 11. S. Donadoni et al., L'Égypte du Mythe à l'Égyptologie, 1990: fig. 3, 16 S. Ikram & A. Dodson, The Mummy in Ancient Egypt, 1998: fig. 30.

E. Hornung, L'Égypte ésotérique, 2001: fig. 4. Dossiers d'Archéologie, HS 9, mai 2003: fig. 50.

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TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION 1

SECTION 1 2

SECTION 2 4

SECTION 3 10

SECTIONS 4-5 15

SECTION 6 38

SECTION 7 41

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La Caravane du Caire. L'Égypte sur d'autres rives

INTRODUCTION

La première partie du titre est choisie en référence à l'Opéra-Ballet composé en 1783 par un illustre

Liégeois, André-Modeste Grétry. La Caravane du Caire, accueillie triomphalement, dès sa

création, par le public parisien, est une œuvre musicale au charme pétillant; elle s'inscrit dans le

courant orientalisant, créé au cours du 18è siècle et illustré notamment par Les Indes Galantes de

Rameau ou L'Enlèvement au Sérail de Mozart.

Buts de l'exposition:

* découvrir un des fleurons, méconnu, du patrimoine liégeois: les antiquités égyptiennes du Musée

Curtius, exposées ici en grand nombre, pour la toute première fois.

* découvrir l'histoire de la passion liégeoise pour l'Égypte, depuis l'époque romaine jusqu'à nos

jours, pour répondre à la question "comment ces trésors venus des rives du Nil sont-ils arrivés ici?".

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SECTION 1

La première section de l'exposition vous présente un éventail d'objets égyptiens retrouvés dans

nos régions, dont quelques Isiaca.

Définition: tous les objets, retrouvés hors d'Égypte, qui témoignent de pratiques cultuelles en faveur

d'Isis.

Origine de ce type d'objets: Isis est la seule déesse du panthéon égyptien à avoir été l'objet d'une

diffusion "universelle" dans l'ensemble du monde méditerranéen de l'Antiquité, à partir du 3è siècle

avant Jésus-Christ.

Cologne (Colonia Agrippinensis), l'ancienne capitale de la Germanie

Inférieure, est située sur la rive gauche du Rhin et, nœud routier

essentiel, connut une importance militaire et commerciale durant

tout l’Empire. Son temple isiaque n'a pas encore été localisé, mais

quelques textes conservés témoignent de l’implantation de la

religion isiaque en cette ville, où Isis occupe une place importante.

Sur ce document (non présent dans l'exposition) est elle est qualifiée

d’Invicta, soit "invaincue", ce qui évoque son triomphe sur la mort,

sur le destin et les forces néfastes, mais encore sa suprématie sur les

autres divinités. Fig. 1: statue d'Isis invicta, trouvée dans les fondations de l'église Sainte Ursule à

Cologne, Cologne Römisch-Germanisches Museum, inv. 29.306, env. 200 de

notre ère, calcaire, ht 51 cm

À distinguer dans les représentations d'Isis:

– la relation à son origine pharaonique (voir le costume et la pose) et l'évocation de son rôle. En

contexte pharaonique, la personnalité de la déesse est essentiellement liée à la protection d'Osiris,

son époux, et d'Horus, l'enfant appelé à la succession. Isis joue un rôle fondamental dans la

transmission du pouvoir royal, en tant qu'épouse et mère divine;

– l'évocation de son rôle (voir costume et attributs) élargi à l'époque hellénistique.

À l'époque hellénistique en Égypte, la personnalité de la déesse a été enrichie d'attributs et de

fonctions, par son identification à des déesses étrangères. La diversité des aspects du pouvoir

bienveillant de la déesse contribuera à largement diffuser son culte dans le bassin méditerranéen.

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De son association aux déesses Demeter, Aphrodite, Tyché, entre autres, Isis tire de "multiples

compétences": elle donne de bonnes récoltes et de beaux enfants. Secourable, elle guérit les

malades et protège les marins…

La présence d'Isiaca dans nos régions atteste le chemin que la déesse Isis a parcouru depuis

l'Égypte, grâce au déplacement de certains corps de métiers, et des armées, pendant l'Empire

romain.

Comparaison entre les différentes images de la déesse Isis. Celle où, sous sa forme égyptienne, elle

allaite l'enfant Horus: Isis est protectrice de la maternité.

Une autre, sous sa forme hellénisée d'Isis-Fortuna, la présente

coiffée d'une couronne appelée basileion, composée de cornes

entourant le disque solaire surmonté de plumes; la déesse est

couverte de vêtements drapés grecs. Ses attributs sont la corne

d'abondance et le gouvernail, ceux d'une déesse clairvoyante et

capable de vaincre le Destin. Fig. 2: statuette Isis Fortuna, Leyde Rijksmuseum van Oudheden F 1997/7.1,

2è siècle de notre ère, bronze, ht 7,7 cm

Isis est généralement associée au dieu Sérapis, un dieu également de souche égyptienne, mais dont

l'image est, elle aussi, hellénisée, avec sa barbe et son épaisse chevelure, à la manière d'un Zeus.

L'enfant, Harpocrate, reconnaissable au doigt qu'il porte à la bouche, complète la famille d'Isis qui

connut un large succès dans nos régions.

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SECTION 2

La deuxième section de l'exposition est consacrée aux amateurs éclairés de la Renaissance et des

Lumières.

Pendant la Renaissance, c'est la ville de Rome, peuplée de monuments égyptiens ramenés par les

empereurs depuis les rives du Nil, qui contribue à la redécouverte de l'Égypte. Les hiéroglyphes

antiques, gravés sur les parois des obélisques, ont littéralement fasciné les écrivains, les artistes et

les savants. De cette époque datent les premières tentatives de déchiffrement, ou plus exactement

les premières interprétations des signes sacrés.

Par exemple, le roman dû au frère dominicain Francesco

COLONNA, Le songe de Poliphile, est une fiction littéraire à la

gloire de l'Antiquité. Le paysage fantastique servant de cadre au

parcours rêvé du héros, a été illustré sur base des éléments

d'architecture égyptienne, visibles à Rome.

Sur une illustration venant de cet ouvrage, on remarque que

l'inspiration de la composition architecturale vient de monuments

présents à Rome, où les obélisques sont nombreux, et où s'élève

même une pyramide (celle de Cestius). Fig. 3: illustration de l'ouvrage de Fr. Colonna Le Songe de Poliphile, 1ère

édition 1499

Les monuments de Rome ont été à la source de la création d'une écriture nouvelle, composée de

néo-hiéroglyphes servant à coder les inscriptions.

Ces signes nouveaux, sortis de l'imagination des érudits de l'époque, ont connu un très large succès,

à tel point qu'on les a longtemps encore considérés comme de vrais hiéroglyphes égyptiens.

Un autre ouvrage bénéficie d'une belle réputation au milieu du 16è siècle: le traité en latin de Jan-

Pierius VALERIAN, Hieroglyphica. Inspiré par le codex des Hieroglyphica d'Horapollon, une

œuvre redécouverte à la Renaissance dont la composition remonte au 5è siècle de notre ère,

VALERIAN donne un commentaire détaillé sur la signification de quantité d'hiéroglyphes;

toutefois son interprétation reste, pour nous, fantaisiste puisqu'elle puise à la source des auteurs

classiques du monde antique, ainsi que des écritures sacrées du monde chrétien…

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Le néo-hiéroglyphe adoratio = la prière.

Fig. 4: illustration de l'ouvrage de J.P. Valérian Hieroglyphica, 1567

À Liège, à cette époque, un autre humaniste s'inscrit dans ce contexte de savants portés sur la

redécouverte de l'Égypte ancienne: il s'agit du peintre Lambert LOMBARD. Ses compositions

picturales foisonnent de références au monde antique et à l'Égypte ancienne, et témoignent de

l'intérêt qu'il a porté à la lecture des ouvrages précités: lui aussi verse dans la symbolique antique et

est l'auteur de néo-hiéroglyphes originaux.

Sur ce dessin de Lombard sont assemblées

les figures d'une quenouille à gauche (texte:

atropos; tronco il filo) , d'un lion (texte:

breve e veloci è la vita dei grandi) surmonté

d'un dauphin (festina), et, dessous, d'une

roue (instabile).

Fig. 5: Hiéroglyphes, dessin annoté de L. Lombard, Liège Cabinet des Estampes

(album d'Arenberg N. 208), 5,2 x 8,2 cm

Godelieve Dehaene, la commissaire de la récente exposition de Liège consacrée à Lombard nous

commente cette image comme suit: "[…] chaque motif correspond à un hiéroglyphe de Valeriano

ou de Colonna. La composition illustre l'idée que la mort n'épargne pas les hommes puissants. Ces

derniers sont représentés par un lion; alors que l'équilibre précaire de leur vie est symolisé par une

roue. Le dauphin indique la fuite du temps, tandis que le couteau qui coupe le fil d'une quenouille

symbolise la mort." (citation du Catalogue Lambert Lombard, Liège, 2006, p. 410).

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En parallèle d'un des dessins de LOMBARD, vous trouverez une curieuse vaisselle appelée Osiris-

Canope. Il s'agit d'un vase cultuel à l'effigie du dieu Osiris. Ce vase est censé contenir les eaux

fécondantes du Nil, c'est-à-dire les liquides ou les humeurs du dieu. Un culte rendu à la crue se

déroulait à Canope, en bord de Méditerrannée. Le toponyme de Canope et la forme pansue de cette

vaisselle ont été à l'origine de l'expression "vase canope", utilisée en égyptologie pour désigner les

pots contenant les viscères du défunt.

Fig. 6: copie d'un canope venant de la villa Albani,

Anvers Museum Vleeshuis AV 7378, 18è ou 19è siècle, terre cuite, ht 47,5 cm

Saint Paul devant l'autel du dieu Inconnu

(élément du retable de St Denis à Liège).

Observez, au centre de l'image, le doigt de Saint

Paul pointant vers le socle d'une statue: on y

relève trois hiéroglyphes, un soleil, un œil et un

lion, qui figurent symboliquement les qualités

d'un dieu bon, puissant et juste, à savoir le Dieu

des Chrétiens. Fig. 7: détail du retable de St Denis à Liège, Lambert Lombard

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À l'époque baroque, c'est la figure du Jésuite allemand Athanase KIRCHER qui est particulièrement

remarquable. Auteur de nombreuses études relatives aux monuments égyptiens, encore et toujours

ceux de Rome, on lui doit, entre autres, la paternité d'un ouvrage consacré à la grammaire copte.

KIRCHER envisage encore les hiéroglyphes de manière essentiellement symbolique et non

linguistique, car pour lui les signes sont porteurs d'un grand mystère divin; on lui doit, néanmoins,

d'avoir été un des premiers à mettre en lumière la filiation entre la langue pharaonique et la langue

copte, parlée par les premiers Chrétiens d'Égypte et écrite en grec.

Au début du 18è siècle, Bernard de Montfaucon publie une vaste encyclopédie L'Antiquité

expliquée et représentée en figures. Ses planches commentées illustrent quantité de monuments que

l'auteur a rencontrés au fil de ses lectures de récits de voyageurs en Égypte, ou au cours de ses

visites en différents "Cabinets de curiosités" (nom que l'on donnait aux premières collections

privées d'antiquités). Grâce à cet ouvrage, la documentation sur les monuments égyptiens va

considérablement s'enrichir. Nous vous en montrons une planche figurant un monument célèbre,

conservé actuellement au Musée égyptien de Turin: il s'agit de la Mensa Isiaca, soit une table de

culte en bronze, découverte dans l'Iseum du Champ de Mars à Rome au début du 16è siècle.

La création de cette table remonte à l'époque impériale où le culte d'Isis occupait une place notoire à

Rome.

Fig. 8: dessin au trait de la Mensa Isiaca,

Turin Musée Égyptien C. 7155, 1er-2è siècle de notre ère, bronze incrusté, ht 75 cm

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À remarquer:

*la figure centrale de la déesse assise dans une chapelle

entourée d'autres divinités et de scènes de culte.

Détail: Isis dans son naos, flanqué de serpents. À gauche le

serpent est coiffé de la couronne blanche de la Haute Égypte

(voir la plante héraldique dessous: le lys représentant la région

sud de l'Égypte). À droite, le serpent est coiffé de la couronne

rouge de Basse Égypte; il s'enroule autour de la plante

papyrus, qui évoque la région nord de l'Égypte. Fig. 9: détail Isis dans son naos

* à gauche de la table, au milieu, le motif de l'Union

des Deux Terres. Deux dieux Nil nouent une corde

autour d'un signe inspiré de l'hiéroglyphe séma qui

signifie unir (une trachée reliée aux poumons).

Remarquer les mamelles pendantes, signe de la fertilité

du fleuve. Pourquoi deux dieux? Parce que deux

régions constituent l'Égypte. De l'union des deux terres

sous l'autorité d'un seul pharaon dépend la stabilité

politique du pays. Fig. 10: détail les dieux Nils unissant les Deux Terres

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* à droite de la table, au milieu, le motif du

taureau Apis, animal sacré représentant le dieu

Ptah de Memphis dans le monde des hommes

(vous reconnaîtrez ce taureau Apis, lors du

transport de la momie d'Osiris, plus tard dans

l'exposition, sur une plaquette en bois peint,

près des sarcophages). Fig. 11: détail culte au taureau Apis

Le bord de la table est également gravé de figures diverses: on y reconnaît le dieu Osiris et divers

animaux sacrés dont la silhouette rappelle le propotype égyptien, mais reste néanmoins fantaisiste.

La lecture de ces signes ne donne guère de sens... Cette œuvre atteste simplement l'égyptomanie

ambiante à Rome, au début de notre ère.

Dans nos régions, une statue, très spéciale, a fait l'objet de nombreuses spéculations: la pseudo-Isis,

soit-disant découverte à Anvers.

Observer les parties qui la composent: en fait, cette statue, importée d'Italie au 18è siècle, est le

piteux résulat d'un assemblage moderne d'une tête de pharaon d'époque ptolémaïque au corps d'un

dignitaire privé de la 27è dynastie, reconnaissable au costume et au geste des bras croisés sur le

ventre.

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SECTION 3

La troisième articulation de La Caravane du Caire. L'Égypte sur d'autres rives sera réservée à la

Commission des Sciences et des Arts qui, avec ses 167 savants, accompagnera Bonaparte à

l'occasion de sa Campagne d'Égypte débutée en 1798. Des érudits du 18è siècle (section 2), nous

passons maintenant aux savants du 19e siècle (section 3). Grâce à eux, nous allons à présent

découvrir une Égypte, non pas rêvée et réinterprétée par le monde occidental, mais plus concrète et

réelle, grâce aux travaux, sur le terrain, d'exploration et de description.

Voici la première page, de couverture, de La Description de l'Égypte, l'ouvrage monumental, publié

au retour des savants, qui regroupe l'ensemble de leurs dessins glanés tout au long de leur parcours,

d'Alexandrie à Philae. Cet ouvrage fondateur va marquer une étape décisive dans notre

connaissance de l'Égypte. Ce dessin est celui d'une perspective imaginaire, comme si on regardait

toute la Vallée du Nil, depuis Alexandrie (sur la côte méditerranéenne) jusqu'à Philae (la région de

la 1ère cataracte), plus de mille kilomètres plus au sud.

Au milieu de l'image, on reconnaît la façade du

temple de Dendera, avec ses colonnes hathoriques.

Un peu plus loin, sur la gauche du fleuve, s'élève le

temple de Louqsor, avec ses colosse de Ramsès II,

ses deux obélisques, et son pylône. Les deux

obélisques sont dessinés, encore en place! Nous

sommes en effet à une époque antérieure à celle du

déménagement d'un des obélisques vers la France,

Paris et la Place de la Concorde. Fig. 12: "Perspective de l'Égypte, d'Alexandrie à Philae",

frontispice de La Description de l'Égypte

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Parmi les savants d'Égypte, figure un homme de nos Ardennes: Henri-Joseph REDOUTÉ, né en

1766. A 19 ans il rejoint ses frères à Paris (dont Pierre-Joseph le Raphaël des Fleurs) et s'initie au

dessin d'histoire naturelle. Grâce à son talent de dessinateur, il est invité à rejoindre la Commission

des Savants et partagera avec eux l'aventure égyptienne, à 32 ans. Nous avons rassemblé ici

quelques planches dont il est l'auteur: le trait y est précis, adroit, sensible. Imaginez tous ces jeunes

savants, confrontés à des conditions de terrain difficiles, dans un contexte pour le moins périlleux,

en train de copier inlassablement de vastes monuments et leurs hautes parois, couvertes

d'hiéroglyphes qu'ils ne comprennent pas! On voudra bien leur pardonner quelques erreurs de

graphie…

Sur cette planche, les figures 1 et 2 sont de la main de

Redouté: nous reconnaissons le colosse de Ramsès II, celui

de gauche devant la façade du temple de Louxor. La statue

émerge à peine des sables, en ce début de 19è siècle!

À comparer avec une image actuelle de la façade du

temple, où l'on verra qu'à présent la tête royale a été

remise en place. On peut aussi observer le dessin de

Redouté et voir de quelle manière il rend la musculature

du corps, en suivant une tradition picturale davantage

propre à l'artiste du 19è siècle. Fig. 13: dessin original de H.-J. Redouté "Thèbes. Louqsor. Détails du

colosse oriental placé près de la porte du palais", Description de

l'Égypte, Antiquités III, pl. 13

Sur la deuxième planche, Redouté dessine différents objets issus

d'un contexte funéraire de la nécropole de Saqqara, dans le nord

de l'Égypte.

Observer l'enveloppe de momie (fragment de cartonnage

entourant les pieds, à comparer avec des exemples similaires

dans l'exposition); les statuettes de serviteurs funéraires, tenant

en main les instruments agricoles (pour d'autres exemples, voir

les sections 4 et 5); une statuette de faucon en bois (voir un

parallèle, sans la couronne, dans l'exposition, section 4). Fig. 14: dessin original de H.-J. Redouté "Saqqarah. Objets divers",

Description de l'Égypte, Antiquités II, pl. 57

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Rappelons que si la Pierre de Rosette a été découverte par un Français au début de la Campagne

d'Égypte, ce document, entre autres prises de guerre, a rejoint le sol anglais, suite à la capitulation

française. C'est donc un estampage qui arrive entre les mains de Jean-François CHAMPOLLION; il

ne verra jamais le texte gravé sur cette pierre!

La figure nous montre comment on peut

restituer la forme générale de la stèle: le

sommet cintré où se déploie le disque

solaire ailé, qui protège une rangée de

divinités. Dessous le même texte du décret,

en trois exemplaires.

La Pierre de Rosette est en fait le fragment

d'un décret monumental promulgué à

Memphis en 196 avant Jésus-Christ, à

l'occasion du premier anniversaire de

l'accession au trône du pharaon Ptolémée V:

le clergé des prêtres y garantit le bon

déroulement du culte du roi en

remerciement de ses faveurs à leur égard.

Afin que ce décret soit accessible au plus

grand nombre, le texte égyptien, en

hiéroglyphes, est doublé de sa transcription

en écriture cursive, appelée le démotique,

ainsi que d'une traduction en langue et

écriture grecques. Vous n'ignorez pas que

c'est ce document qui a contribué au

déchiffrement des hiéroglyphes grâce à

Jean-François CHAMPOLLION.

Fig. 15: recontruction de la stèle originale d'où vient le fragment appelé "Pierre de Rosette"

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Ce tableau, de la main de Champollion, est un document très important qui a été à la base du

déchiffrement. Dans un premier temps, Champollion s'est attaché à reconnaître les hiéroglyphes dits

alphabétiques (un signe = une lettre).

Fig. 16: table des signes phonétiques des écritures démotique et hiéroglyphique comparés à l'alphabet grec,

Lettre à Monsieur Dacier, 1822

Fig. 16bis: signes hiéroglyphiques formant le nom du pharaon Ptolémée

Reconnaître les signes qui composent le nom du roi Ptolémée avec leur concordance en lettres

grecques et signes hiéroglyphiques.

P = signe du siège cubique; T =petit pain; O = corde; L = lion couché; M = sorte de côte

d'animal?; Y = deux roseaux; S = étoffe pliée.

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Le zodiaque de Dendera a également été copié par les savants de l'Expédition d'Égypte. Mais c'est

un antiquaire français qui, en 1821, grâce à l'autorisation du khédive d'Égypte, détache la dalle de

grès de son plafond, dans une des chapelles osiriennes du temple d'Hathor.

Fig. 17: "Denderah (Tentyris)", Description de l'Égypte, Antiquités IV, pl. 21

Depuis la publication de ces reliefs, le zodiaque n'a pas manqué de fasciner le public et de susciter

de nombreuses interrogations sur l'inteprétation des signes et leur datation. On sait maintenant que

la position des décans, des zodiaques et des constellations renvoie à un ciel observé au cours de l'été

50 avant notre ère.

À droite du zodiaque, observer la figure féminine au geste particulier, bras levés.

Il s'agit de la déesse Nout, la déesse du ciel. Ce dessin, au plafond de la chapelle, évoque le corps

de la déesse en position arquée au-dessus de la terre, à l'image de la voûte céleste. C'est la même

déesse que l'on retrouve au revers des couvercles de sarcophages ou au fond des cuves (voir plus

loin dans la section 5 de l'exposition).

C'est la déesse du ciel que le soleil parcourt pendant son trajet diurne, d'est en ouest.

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SECTIONS 4 et 5

Quelques mots sur deux personnalités de l'I.A.L.

Un homme va constituer le noyau de ce qui deviendra la future collection liégeoise du Curtius: le

baron Albert d'OTREPPE de BOUVETTE (1787-1875). En avril 1850, à 63 ans, le baron Albert

d'Otreppe de Bouvette fonde l'Institut Archéologique Liégeois, auquel il souhaite adjoindre un

musée. Dans le but de remplir son musée – ce beau projet ne verra jamais le jour – il fait

l'acquisition d'antiquités égyptiennes, en décembre 1859. Il achète une bonne partie de la collection

de feu Antoine SCHAYES, conservateur au Musée Royal d'Artillerie, d'Armures et d'Antiquités de

Bruxelles.

Les dons du baron à l'Institut datent, quant à eux, de 1865 et 1873.

L'origine de la collection Schayes est une collection d'antiquités égyptiennes rassemblées par

Giovanni ANASTASI, ancien consul-général en Égypte pour la Suède et la Norvège.

Dans la section 5, les antiquités, actuellement conservées à Bruxelles, ont, quant à elles, été

rassemblées par Gustave HAGEMANS (1830-1908), un autre membre de l'Institut Archéologique

Liégeois.

Passionné par l'Antiquité, Gustave Hagemans se met à collectionner des objets de la préhistoire, de

l'Égypte ancienne ou de l'Antiquité étrusque, grecque et romaine. Mais son principal souci est

d'offrir ces objets à la connaissance du plus grand nombre, sans vouloir les conserver pour son seul

plaisir personnel: Gustave Hagemans est donc un pionner en matière de vulgarisation.

Ainsi, il cède ses collections, tant à l'Institut Archéologique Liégeois qu'au Musée Royal

d'Antiquités, d'Armures et d'Artillerie de la Porte de Hal à Bruxelles, en 1861. La majeure partie des

objets égyptiens de la donation Hagemans aux futurs Musées Royaux d'Art et d'Histoire de

Bruxelles est présentée dans cette section; ils ont été acquis soit en Italie, soit en Égypte-même, au

milieu du 19è siècle.

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Les pratiques funéraires en Égypte ancienne

La collection d'Otreppe (section 4) et la collection Hagemans (section 5) vous offrent un choix

d'antiquités égyptiennes illustrant de nombreux aspects des pratiques funéraires de l'Égypte

ancienne qui seront commentés, dans ce dossier, en suivant la structure ci-dessous (à charge de

chaque enseignant de repérer, dans l'exposition, les objets qui vont servir à sa visite, en fonction du

ou des thèmes(s) qu'il souhaitera développer):

°la momification °les canopes et le coffret à viscères °les amulettes °les sarcophages et la statuette de faucon °les funérailles °le trousseau funéraire

statues

stèle et table d'offrandes

statuettes funéraires et oushebtis

papyrus

vaisselle à cosmétique °les momies animales et sarcophages

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LA MOMIFICATION

Entourant la rupture irrévocable et violente provoquée par la mort, par la perte du souffle de vie et

la dispersion des éléments de la personnalité, les Égyptiens de l'Antiquité ont créé de nombreux

procédés destinés à atténuer les effets dramatiques causés par le décès.

La momification, tout au long de l'histoire égyptienne, reste le plus répandu de ces procédés; elle

vise à préserver cet élément essentiel de la personnalité humaine, le corps, auquel il convient de

garantir la durée en le transformant en corps divin.

L'intervention rapide des embaumeurs est nécessaire, afin de mener toutes les opérations

nécessaires, contribuant à enrayer le processus de corruption du corps. Ainsi, ceux-ci, au moyen de

couteaux et de crochets, se livrent à l'éviscération (enlever les organes internes) et l'excérébration

(ôter l'humeur cervicale). Le corps est alors desséché grâce à l'action du natron, tandis que les

viscères sont traités à part, eux-aussi desséchés et emmaillotés.

Fig. 18: autopsie virtuelle (CHU Liège): radiographie de la momie et du cartonnage,

Musée Curtius I/628 C (catalogue 2006 n° 8B)

Après traitement, les viscères sont stockés, soit dans le corps-même du défunt, soit dans un coffret

(à époque tardive), soit dans une vaisselle spécifique qu'on appelle le vase canope. La collection de

canopes sera alors rangée dans des coffres en bois ou en pierre, partagés en quatre compartiments

pour recevoir chacun des vases spécifiques.

Voir l'origine du terme "vase canope" dans la section 2.

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LES CANOPES ET LE COFFRET À VISCÈRES

Le bouchon des vases canopes peut adopter une forme simple en dôme, ou une image humaine

évoquant celle du défunt, ou encore l'image de quatre dieux, appelés les Quatre Fils d'Horus. On

distingue alors le dieu Imset, à tête humaine (protection du foie), Hapi, à tête de babouin (protection

de la rate), Douamoutef, à tête de canidé (protection des poumons) et Qebehsenouf, à tête de faucon

(protection des intestins). Cette correspondance entre l'inscription au nom d'un dieu, la forme du

bouchon et le contenu du vase canope ne sera pas forcément respectée durant toute l'histoire de la

civilisation égyptienne; on relève de nombreuses variantes.

Fig. 19, 20, 21, 22: bouchons à tête humaine, tête de babouin, tête de canidé, tête de faucon.

Fig. 19: vase canope à bouchon Imset, Bruxelles MRAH E. 5892, 26è dyn., calcite, ht 35,5 cm

Fig. 20: vase canope à bouchon Hapi, Bruxelles MRAH E. 5893, 26è dyn., calcite, ht 33,5 cm

Fig. 21: vase canope à bouchon Douamoutef, Bruxelles MRAH E. 5904, Nouvel Empire?, calcite, ht 36,9 cm

Fig. 22: vase canope à bouchon Qebehsenouf, Bruxelles MRAH E. 5902, Basse Époque, calcite, 35,5 cm

Le coffret à reliques funéraires, d'époque tardive, est en forme de naos, ou chapelle, destiné à

abriter les viscères, substituts des vases canopes précédemment utilisés dans les pratiques

funéraires. Plutôt que d'isoler chaque viscère dans un vase différent au nom et à l'effigie de chacun

des quatre fils d'Horus, on les rassemble dans les compartiments de ce coffret. Avoir à sa

disposition, dans son matériel funéraire l'ensemble des parties de son corps est, pour le défunt, une

condition sine qua non pour rentrer dans le monde des morts, être déclaré juste par Osiris,

s'assimiler à lui et vivre alors sa renaissance.

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Reconnaître les dieux protecteurs des viscères. Ils occupent

l'espace décoré sur les parois du naos: Imset à tête humaine, Hapi

à tête de babouin, Douamoutef à tête de canidé, et Qebehsenouf à

tête de faucon. Le défunt, devant les portes et face aux dieux, est

vêtu comme un pharaon: pagne royal, sceptre et couronnes. Fig. 23: coffret à reliques funéraires, Liège Musée Curtius Eg. 78 (catalogue

2006 n° 10)

LES AMULETTES

Le bandelettage s'opère une fois le corps traité. À l'intérieur des bandelettes sont disposées

différentes amulettes protectrices. À partir du Nouvel Empire (soit à partir du17è siècle av.n.è.), les

chapitres 155 à 160 du Livre des Morts prescrivent l'emploi d'amulettes spécifiques devant être

placées au cou du défunt. Ces textes précisent même le matériau à utiliser pour les façonner: or,

amazonite (de couleur verte), jaspe ou cornaline (de couleur rouge). Si l'emploi d'un minéral

spécifique, l'amazonite, est généralement recommandé, on trouve pourtant le plus souvent de la

faïence, tout autant resplendissante, de moindre coût et de couleur semblable. En effet, la couleur

verte évoquant la végétation et le renouveau annuel de son cycle est particulièrement indiquée pour

matérialiser la colonnette papyriforme, soit le signe ouadj, signifiant le reverdissement cyclique de

la nature, et de là la renaissance. Le pilier djed apparaît sous forme d'amulette dès le début de la

civilisation égyptienne; le djed sert à renforcer la stabilité du défunt. Grâce à cette amulette, celui-ci

peut se redresser dans l'Au-delà, et ainsi renaître. Fig. 24: amulette en forme de colonnette papyriforme, Liège Musée Curtius Eg. 49 (catalogue 2006 n° 91)

Fig. 25: amulette en forme de pilier djed, Liège Musée Curtius Eg. 48 (catalogue 2006 n° 94)

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Autres amulettes présentées dans l'exposition:

Fig. 26: scarabée naturaliste avec anneau de suspension, Liège Musée Curtius D.L. 51 (catalogue 2006 n° 74)

Qualifié de 'naturaliste' car les détails du corps sont précisés, ce scarabée, possède un anneau de

suspension. Cela nous indique que cette amulette était conçue pour être attachée aux bandelettes de

la momie et assurer sa protection, au plus près du corps défunt. La Nature qui entourait les anciens

Égyptiens a été source de multiples métaphores. Ainsi l'activité de l'insecte-bousier qui roule sa

boule a été à la base d'une très belle image mythique: le globe solaire qui pointe lentement à

l'horizon du matin devait être poussé par un immense scarabée. Le signe scarabée signifie "venir à

l'existence" et évoque le soleil levant, triomphant des ténèbres de la nuit et de son passage dans

l'Au-delà.

Rechercher le scarabée sur le papyrus mythologique.

L'amulette en forme de deux doigts évoque le geste de l'embaumeur qui

procède à l'éviscèration, ou celui du prêtre-ritualiste qui procède à

l'Ouverture de la Bouche, soit qui donne vie au corps du défunt. Fig. 27: amulette en forme de deux doigts, Bruxelles MRAH E. 3419, Basse Époque,

obsidienne, ht 8,7 cm

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On retouve les figures des Quatre Fils d'Horus au nombre des

amulettes, intégrées à la résille de perles couvrant le corps

emmailloté. Ici, les deux figurines en verre, aux formes de

Imset et Hapi, ne possèdent pas de moyen de suspension. Ce

seraient plutôt des plaquettes d'incrustation, destinées à être

incrustées dans le décor externe d'un cercueil. Fig. 28: plaquettes d'incrustation en forme de Imset et Hapi, Liège Musée

Curtius B. 1584 H-I (catalogue 2006 n° 136)

Le signe de l'oeil-oudjat, durant toute l'histoire de la civilisation égyptienne, constitue la protection

la plus répandue.

Fig. 29: amulette en forme d'œil oudjat, Liège Musée Curtius Eg. 70 (catalogue 2006 n° 95)

Fig. 30: croquis de l'œil oudjat

Il figure un sourcil bordant un œil humain fardé, auquel sont joints deux traits : l'un court et vertical,

à l'aplomb de la pupille, l'autre courbe se déroulant sous l'extérieur de l'œil. Ces traits reproduiraient

le dessin du plumage coloré sous l'œil du faucon. L'oudjat est la manifestation de l'œil gauche du

dieu-faucon Horus, arraché par son oncle Seth, au cours d'un combat singulier les opposant dans la

lutte pour la succession légitime du trône d'Osiris. Il est également l'oeil droit du dieu solaire Rê.

Dans les deux cas de la disparition de l'œil, lunaire ou solaire, c'est le dieu Thot qui est chargé de le

retrouver, de le restaurer et de le ramener à son divin propriétaire, assurant à celui-ci le

recouvrement de toute son intégrité.

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Porter l'oudjat permet de se prémunir contre tout danger qui menaçerait de désunion l'intégrité

physique. On comprend que ce signe d'écriture serve à couvrir la cicatrice formée dans le flanc

gauche de la momie, au moment de l'éviscération; on le trouve aussi couvrant de larges pans de la

momie, à hauteur du torse et de l'abdomen. Enfin, c'est en présence d'un œil oudjat que doit être

prononcée la formule du chapitre 140 du Livre des Morts.

LES SARCOPHAGES ET LA STATUETTE DE FAUCON MOMIFORME

Divers cercueils sont rassemblés au centre de l'exposition.

Commençons par le plus ancien de la série, le couvercle du cercueil extérieur de

Nesamonnesouttaouinakht, un prêtre au temple d’Amon à Karnak, au début de la 22è dynastie, soit

vers 900 avant notre ère. Ce couvercle en bois appartient à un ensemble d'enveloppes funéraires.

En effet, outre le traitement du corps, le bandelettage et le placement des amulettes, la momie

nécessite d'être conservée au sein de multiples boîtes, en bois, ou en pierre aux époques plus

anciennes. La surface du couvercle est recouverte de bitume appliqué sur une fine couche de stuc où

contrastent décor et inscriptions en peinture jaune pâle; le texte, sous le grand faucon, est une courte

formule d’offrande dédiée à Ptah-Sokar-Osiris. Ce grand faucon est une image du dieu solaire Rê,

qui parcourt le ciel. Placé sur la poitrine du défunt, il évoque l'assimilation de celui-ci au cycle

quotidien du soleil (lever et coucher solaires). Comme le soleil qui renaît chaque jour, le défunt

pourra renaître dans l'Au-delà.

Fig. 31: détail d'un couvercle de sarcophage, Liège Musée Curtius SN (catalogue 2006 n° 9)

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Diverses enveloppes funéraires d'un autre prêtre d'Amon au temple de Karnak, Harsiésis, sont

présentes dans notre exposition. Elles sont datées de la fin du 8è siècle avant notre ère, soit la fin de

la 22è dynastie. Ce prêtre était doté d'un ensemble de quatre cercueils: une caisse extérieure

conservée actuellement aux Musées Royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles, deux cercueils

intermédiaires en bois, le couvercle et la planche à pieds, en bois, du cartonnage bipartite. De la

momie, il ne reste pas grand-chose, car elle a été violemment démaillotée au 19è siècle!

Au 19è siècle, on a également entrepris de "restaurer" les inscriptions, donnant ainsi à certains

signes une allure empatée et fantaisiste! On peut néanmoins restituer les formules d'offrandes qui

couvrent les couvercles et les caisses de ces cercueils à la vive polychromie.

Ci-dessous, détail de la cuve du cercueil intermédiaire extérieur d'Harsiésis. On y voit une

succession de chapelles où se tient accroupi un dieu momiforme, armé d'un couteau. On reconnaît

le motif et les textes caractéristiques du chapitre 146 du Livre des Morts. Ces divinités sont des

dieux-gardiens. En dépit de leur arme, ils ne sont pas forcément hostiles…; ils surveillent les allées

et venues dans le monde de l'Au-delà. Il est nécessaire que le défunt connaisse le nom de ces

gardiens ainsi que celui des portes dont ils défendent l'accès. À disposition du défunt, sur son

sarcophage, ou sur un papyrus, la mention du chapitre 146 du Livre des Morts garantit la

connaissance de certaines étapes de son itinéraire dans le monde des morts.

Fig. 32: détail de la cuve du cercueil intermédiaire extérieur d'Harsiésis,

Liège Musée Curtius Eg. 82A (catalogue 2006 n° 6A)

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Curieusement, le cartonnage final, la dernière enveloppe protectrice

autour de la momie, est de couleur noire. Ce n'est pas sa couleur

d'origine! Observez les couleurs vives sous-jacentes sur le dessus

des pieds. C'est sans doute le vernis, posé par-dessus les reliefs en

stuc, qui a viré avec le temps. On utilise le mot cartonnage quand le

matériau utilisé n'est pas du bois, mais bien un matériau composé

principalement de textiles agglomérés et enduits. Fig. 33: couvercle du cartonnage d'Harsiésis, Liège Musée Curtius Eg. 81

(catalogue n° 7A)

La planchette de pied de ce cartonnage présente le

motif de la course du taureau Apis portant la momie

d'Osiris sur son dos: ce motif évoque le retour de

l'inondation fertile, soit une promesse de renaissance

pour Harsiésis. Fig. 34: planchette de pieds du cartonnage d'Harsiésis, Liège

Musée Curtius I/634 (catalogue 2006 n° 7B)

Les sarcophages de cette époque (Troisième Période Intermédiaire, début du 1er millénaire av.n.è)

ont la forme d'un corps humain, coiffé de sa perruque, orné de colliers et emmailloté de bandelettes

qui lui donnent son aspect momiforme. Les abondants éléments de décor alignent diverses

amulettes mêlées aux dieux solaires et funéraires qui tous, par leur action, contribuent à la

renaissance du défunt.

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Deux des Quatre Fils d'Horus, protecteurs des viscères.

Fig. 35: deux des Quatre Fils d'Horus, détail du cartonnage d'«Isistamen»,

Liège Musée Curtius I/628B (catalogue 2006 n° 8A)

Un autre exemple de décor, interne cette fois, au fond du cercueil ou au revers du couvercle: la

déesse Nout, déesse céleste que le soleil parcourt d'est en ouest durant la journée. Dans le

sarcophage, elle est figurée au-dessus ou en dessous du défunt, qui, assimilé au dieu solaire, trouve

à disposition son propre ciel qu'il va parcourir cycliquement, à savoir la déesse Nout.

Fig. 36: (dessin de Gustave Hagemans) fond de cercueil peint, avec la figuration de Nout,

Bruxelles MRAH E. 7623, Époque gréco-romaine, bois peint, L 160 cm

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C'est le cartonnage d'Isistamen qui contient la momie (rappel, Fig. 18) dont vous avez entendu

parlé dans la presse, quand elle a été soumise au scanner du CHU de Liège, en septembre 2005.

Malheureusement, tout pose problème dans cet ensemble funéraire! À commencer bien sûr par les

inscriptions remaniées au 19è siècle, la datation du matériel, l'identité et le patronyme du défunt et,

enfin, le stockage, sans doute récent, de son cercueil et de son cartonnage, dans le cercueil extérieur

d'un autre personnage, Ousirmès, barbier et gardien de portes dans un temple de Rê de la Thèbes

antique. Ce cercueil n'est pas visible dans l'exposition, car toujours en cours de restauration.

Ousirmès est par ailleurs connu, grâce à deux autres cercueils conservés à Bruxelles.

Ce faucon est représenté au repos, cachant ses

pattes dans son plumage. On parle alors de

faucon couché, momiforme, ou akhem, d'après

la lecture du signe hiéroglyphique

reproduisant cette position et signifiant

"image divine". Fig. 37: faucon akhem, Liège Musée Curtius I/640

(catalogue 2006 n° 16)

À partir de la Troisième Période Intermédiaire (1er millénaire av.n.è.), les sarcophages externes en

bois de l'élite moyenne ont une caisse rectangulaire, caractérisée par des montants angulaires,

supportant en général quatre représentations de faucon debout. Le couvercle est voûté et dessus sont

placées des statues de bois du faucon akhem et/ou du dieu canidé Anubis. Horus n'est pas le seul

dieu prenant la forme d'un faucon. Par exemple, Sokar adopte cette forme; dieu de la nécropole

memphite, il garde le tombeau et l'entrée de l'Au-delà, qu'il ouvre pour accueillir le roi défunt, puis

tout défunt, et participer à sa renaissance. Sur les sarcophages en bois comme les coffres, la

présence d'un ou deux faucons a le même rôle que celle du canidé Anubis, celui de garder et

protéger la momie ou tout autre contenu.

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LES FUNÉRAILLES

Une fois le corps du défunt apprêté par les prêtres embaumeurs, on peut procéder aux funérailles.

Le sarcophage, accompagné de la famille et des proches, est halé jusqu'à l'entrée de la tombe où le

prêtre ritualiste se livre à divers rites de purification et d'animation. Ceux-ci comprennent

l'important Rituel d'Ouverture de la Bouche. Au moyen de l'herminette (sorte de petite hache) et

d'un bâton à tête de bélier, appelé Grand de Magie, le prêtre touche les différents orifices du visage,

yeux, bouche, nez, oreilles. Grâce à ce rite fondamental, le corps est assuré de retrouver son souffle

vital et de jouir à nouveau de ses organes: il pourra parler, respirer, se nourrir des offrandes,

reprendre sa liberté de circulation et être en contact avec les vivants.

Fig. 38: détail du papyrus d'Ani: § 1 Livre des Morts, Londres British Museum EA 10470

Alors seulement le défunt pourra se diriger vers le royaume des morts où l'attend encore une

épreuve, avant d'être assimilé au dieu Osiris. Il s'agit de la Pesée du Cœur où, sur une balance, le

cœur est posé en équilibre par rapport à la plume de la déesse Maât, gardienne de l'Ordre. Le cœur

va alors témoigner, favorablement, pour le défunt, en énumérant l'ensemble de ses souvenirs de

bonne conduite morale.

C'est le dieu Thot qui enregistre, sur sa palette, le contenu de cette confession. Une grande menace

veille sur cette déclaration, matérialisée par une déesse au corps composite (lion, hippopotame et

crocodile), appelée la Grande Dévoreuse. Au cas où la déclaration ne satisfait pas, le coeur est

englouti par le monstre infernal.

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C'est toujours l'heureuse issue de ce jugement qui est représentée: le défunt est alors déclaré "juste"

et accueilli dans le monde des morts.

Fig. 39: détail du papyrus d'Ani: § 125 Livre des Morts, Londres British Museum EA 10470

LE TROUSSEAU FUNÉRAIRE: STATUES

Observons tout d'abord, la statue de Piya, à genoux, tenant une stèle devant lui. Ce type de

statue a été créé au début du Nouvel Empire pour, sans doute, se situer à l'extérieur de la

tombe, face au soleil levant.

Le défunt se présente en adorateur de l'astre solaire, par son

geste, les deux mains levées, et grâce au salut qu'il adresse à

la divinité, inscrit sur la stèle portée devant lui. Par cette

invocation au dieu Rê, Piya souhaite s'assimiler au cycle du

soleil et, comme lui, renaître éternellement. Fig. 40: statue stéléphore de Piya, Liège Musée Curtius I/633 (catalogue

2006 n° 1)

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La "Dame de Bruxelles" est la pièce la plus ancienne présentée dans l'exposition; cette statue est

datée du début du 3è millénaire avant notre ère, soit la 3è dynastie, l'époque des premières

pyramides royales. La "Dame de Bruxelles" est un des plus anciens témoignages de la grande

statuaire privée en pierre. Cette statue illustre une période très créatrice de la civilisation égyptienne

où se mettent définitivement en place, et pour des millénaires, des codes de représentation et de

pensée qui sous-tendent l'idéologie pharaonique.

Taillée dans le calcaire, la silhouette féminine offre des courbes

souples et synthétiques. Les volumes sont néanmoins compacts,

avec la lourde perruque, les bras serrés le long du corps, jambes et

pieds joints. Le corps est étroitement enveloppé d'une longue

tunique, échancrée au col. L'image humaine, en pierre, tend vers une

perfection éternelle, et sert de réceptacle à la survie d'une

individualité particulière, celle d'une dame de la cour, dont nous

ignorons malheureusement le nom, le socle de la statue étant perdu. Fig. 41: statue de femme debout, Bruxelles MRAH E. 752, 3è dyn., calcaire, ht

74,5 cm

Les statues que l'on dépose dans les chapelles des tombes ont bien plus qu'une fonction mémoriale

de la personne disparue. Plutôt, elles sont l'interface nécessaire pour que le mort, devenu un dieu,

puisse se manifester dans le monde des vivants. La statue funéraire sert de réceptacle au ba du

défunt. Dans la civilisation égyptienne, le ba est un des éléments qui constituent l'ensemble de la

personnalité humaine ou divine. Le ba donne la faculté de communiquer entre différentes réalités,

celle des vivants, celle des morts, celle des dieux. Le ba est notamment représenté sous la forme

d'un oiseau à tête humaine, celle du défunt, voletant hors de sa chapelle funéraire, ou depuis celle-ci

vers le caveau. L'image du volatile illustre la faculté de communication du ba entre divers mondes.

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LE TROUSSEAU FUNÉRAIRE: STÈLE ET TABLE D'OFFRANDES

Cette stèle adopte une forme rectangulaire, au cadre bordé de tores d'angle et surmonté d'une

corniche à gorge couverte d'un texte autobiographique: "L’imakh Ankhou, il dit : Je suis un fort

frappant celui qui est plus fort que lui. Je me nourris du vent du ciel. Je me repose assis sur le

porche de ma maison, les prémices de papyrus dans la main. J’ai érigé cette stèle quand je suis venu

pour suivre le monument d’Osiris, seigneur d’Abydos, seigneur de la nécropole" (trad. René Preys).

Remarque: imakh est l'épithète donnée au défunt défini comme 'bienheureux'.

À l'intérieur du cadre, s'étagent quatre registres où sont

figurées deux scènes d'offrandes au défunt. Assis à

gauche du troisième registre, Ankhou est salué par ses

deux épouses et leur fille respective; le couple de ses

parents figure au quatrième registre, tandis que d'autres

membres de sa famille sont accroupis au deuxième

registre. Le registre inférieur présente une scène

d'artisanat, en relation avec l'activité de la brasserie; des

collègues ou des employés d'Ankhou y travaillent. Fig. 42: stèle d'Ankhou, Liège Musée Curtius I/630 (cat. 2006 n° 2)

D'après le texte biographique, Ankhou serait venu à Abydos pour adorer Osiris. Au Moyen Empire

(environ 2000-1800 av.n.è.), le temple d’Abydos représentait un lieu de pèlerinage. Il était de

tradition que le pieux, en visite au temple d'Osiris, érige une stèle ou construise un cénotaphe. Situé

à proximité du temple, sur le chemin emprunté par le dieu au moment de ses sorties festives en

procession, le monument participait activement à l'activité rituelle, et assurait à son propriétaire une

place privilégiée dans la suite d'Osiris. En effet, pour suivre l'exemple du dieu, certes tué par son

frère Seth, mais ramené à la vie par son épouse Isis afin de concevoir l'héritier Horus, le défunt

formulait le voeu d'accéder à la renaissance éternelle.

Ces stèles qu'on appelle "familiales" nous montrent que le dédicataire souhaitait que son désir de

renaissance rejaillisse bénéfiquement sur différents membres de sa famille, voire même de son

entourage professionnel, afin que ceux-ci accèdent, eux-aussi, à l'Éternité.

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La table d'offrandes de Ouabet et Kherty évoque l'approvisionnement en offrandes du défunt. Deux

vases cultuels entourent un pain, au centre de la table. Au cours d'une visite dans la chapelle des

défunts, en versant de l'eau sur la table (regardez le canal d'écoulement face à vous), on activait,

magiquement, les propriétés alimentaires de l'offrande du pain.

Fig. 43: tables d'offrandes de Ouabet et Kherty, Liège Musée Curtius I/632 (catalogue 2006 n° 4)

L'offrande funéraire la plus simple est constituée de pain, l'alimentation de base des anciens

Égyptiens; le mot égyptien hetep « offrandes » s’écrit précisément à l’aide d’un signe représentant

une natte surmontée d’un pain (

ï). Le texte à gauche du canal de la rigole place Kherty sous la

protection d'Osiris, tandis que celui de droite concerne une dame, Ouabet, qui confie à Anubis,

seigneur de la nécropole, la responsabilité d'assurer son offrande alimentaire dans l'Au-delà.

LE TROUSSEAU FUNÉRAIRE: STATUETTES FUNÉRAIRES ET OUSHEBTIS

On distingue les statuettes funéraires de Ptah-Sokar-Osiris grâce à la figurine

momiforme dressée sur un socle. La statuette, appuyée contre un pilier dorsal,

est souvent coiffée d’une perruque tripartite surmontée des plumes de la

couronne atef du dieu Osiris. Dans le socle, on trouve une cavité, fermée par un

couvercle à glissière, et destinée à contenir un petit papyrus, ou un fragment

momifié. La cachette n'est plus visible, une fois recouverte de stuc, peinte et

couverte d'inscriptions, tout comme l'ensemble du socle et de la figurine. Les

textes sont de simples formules d'offrandes aux dieux funéraires. Fig. 44: statuette funéraire au nom d'une dame, Liège Musée Curtius I/657 (cat. 2006 n° 21)

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Les statuettes précédentes diffèrent des serviteurs funéraires,

appelés chaouabtis et oushebtis. Ceux-ci portent le plus souvent un

texte spécifique, celui du chapitre 6 du Livre des Morts, ainsi que

des instruments agricoles. En effet ces serviteurs, indispensables

composants du trousseau funéraire du défunt, répondent

magiquement à l'appel de celui-ci, dès qu'il est sollicité pour des

travaux dans les champs de l'Au-delà. Fig. 45: oushebti de Padihormeden(ou), Liège Musée Curtius D.L. 36 (catalogue

2006 n° 44)

Osiris est le principal dieu du monde funéraire. Sur cette statuette, c'est sa main droite, superposée à

la gauche, qui tient le flagellum. Au cou, se trouve un large collier, à deux rangs et à perles

pendantes. Fixée dès le Moyen Empire (vers 2000 av.n.è.), l'iconographie d'Osiris rend bien compte

de sa spécificité. Dieu mort, il est représenté momiforme des pieds au cou, emmailloté dans un

suaire moulant le corps. Seules sa tête et ses mains émergent de son linceul, signe qu'il est un dieu

ressuscité. Souverain des défunts, il saisit deux sceptres, toujours associés, l'héqa ou la crosse, et le

nekhakha, ou flagellum, emblèmes traditionnels du pouvoir royal. Le dieu Osiris porte ici sa

couronne habituelle, appelée atef, une mitre de couleur blanche, flanquée de deux plumes

d'autruche. Au-dessus du front est accroché un serpent, l'uræus, qui manifeste la puissance solaire et

protège le dieu contre ses ennemis.

Fig. 46: statuette d'Osiris, Liège Musée Curtius 33/13 (catalogue 2006 n° 56)

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LE TROUSSEAU FUNÉRAIRE: PAPYRUS

L'Égypte nous a livré de nombreux textes illustrés décrivant le voyage nocturne du dieu solaire Rê:

celui-ci sillonne la Douât, le monde souterrain, en quête d’Osiris, le souverain du monde de l'Au-

delà. Au milieu de la nuit, Rê et Osiris s'unissent. De cette union dépend le rajeunissement du soleil:

elle lui garantira la poursuite de sa course nocturne et, principalement, sa réappararition à l’horizon

oriental.

Nous voyons ici la fin du parcours solaire, à la douzième heure de la nuit, quand le soleil s'apprête à

quitter le monde souterrain.

Fig. 47: papyrus mythologique, Liège Musée Curtius SN (catalogue 2006 n° 67)

Au registre central, la barque divine est halée à travers un grand serpent, l'ennemi du dieu solaire, à

ce stade de la nuit parfaitement maîtrisé. L’horizon est marqué par un ovale d'où émerge la tête du

dieu Chou dont les bras "scellent" le monde souterrain. C'est Chou qui accueille le dieu solaire sous

sa forme de scarabée (l'image du soleil rajeuni et renaissant) et lui permet d’apparaître à l’horizon.

(Le scarabée et la tête de Chou ont été restaurés par un dessinateur moderne). Au registre

inférieur, le corps d’Osiris s'adosse au bord de la Douât: il ne quittera pas ce monde et reste en

attente du prochain passage du dieu solaire Rê qui viendra l'illuminer, lui et tous les défunts, lors de

sa prochaine course nocturne. Les autres figures divines, alentour, assurent la protection de Rê en

détruisant ses ennemis.

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LE TROUSSEAU FUNÉRAIRE: LA VAISSELLE À COSMÉTIQUE

La vaisselle et les instruments servant à la toilette et à la parure font également partie du trousseau

funéraire: palettes à fard, tubes à khôl, miroirs et pincettes diverses reflètent les soins que le défunt

portera à son corps, comme de son vivant.

Fig. 48: amphorisque, Liège Musée Curtius B. 2312 (catalogue 2006 n° 146)

Au cours des périodes grecque et romaine en Égypte, bien des pratiques funéraires sont héritées de

l'Égypte pharaonique, comme l'usage d'accompagner le défunt de vaisselle à cosmétique.

Une telle vaisselle forme l'essentiel de la collection d'Armand Baar composée d'alabastres et

d'amphorisques, en verre moulé sur noyau d'argile, vaisselle servant à transporter des huiles

parfumées aux époques classique, hellénistique et romaine.

Le nom amphorisque est un diminutif d’amphore, le contenant en céramique servant à stocker et

transporter toutes sortes de denrées comestibles. Par contre, ces petites amphorisques en verre,

issues de contexte funéraire, renfermaient des huiles parfumées.

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LES MOMIES ANIMALES ET SARCOPHAGES

Les images de chat ont été, très tôt, au goût des collectionneurs et, de

même, dans l'antiquité égyptienne du 1er millénaire avant notre ère, au

goût des pieux qui en offrirent en grand nombre à la déesse Bastet,

déesse féline régnant dans le Delta égyptien. Le mythe de l'Œil de Rê, un

des noms de la fille du créateur le dieu Rê, a été très populaire en Égypte

ancienne. Le mythe met l'accent sur l'ambivalence de la déesse, tantôt

lionne furieuse, tantôt douce chatte. En offrant à celle-ci, Bastet, une

statuette, un sarcophage ou une momie de chat, le pieux sollicite la

présence apaisée de la déesse, ainsi que sa protection. Fig. 52: sarcophage en forme de chat, Bruxelles MRAH E. 6750, Basse Époque,

bronze, ht 45 cm

Cet autre sarcophage, en bois, est à l'effigie d'une déesse lionne,

Ouadjyt adorée à Bouto dans le Delta. Le socle creux contient une

momie d'ichneumon, ou mangouste, un animal prédateur des

serpents, les ennemis du dieu solaire. En offrant un tel objet au

temple, le pieux contribuait à préserver le cycle de la création, c'est-

à-dire la renaissance du soleil à chaque matin du monde. Fig. 53: cercueil d'ichneumon (avec sa momie) en forme de divinité-lionne,

Bruxelles MRAH E. 7074, 26è dyn., bois, ht 64,3 cm

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Autour de Hori

A la fin de la section 4, vous serez face à divers objets rassemblés autour de la personnalité de

Hori; la collection liégeoise conserve un beau canope en calcite (Fig. 51) à son nom! Celui-ci est

surmonté d'une tête de canidé, celle du dieu Douamoutef protégeant une partie des viscères du

défunt, soit l'estomac. Cette vaisselle funéraire est la seule pièce de la collection d'Otreppe ayant

appartenu à un personnage issu d'une famille régnante de l'Égypte ancienne.

Fig. 51: vase-canope et bouchon Douamoutef de Hori, Liège Musée Curtius I/635 (catalogue 2006 n° 11)

Il s'agit d'une famille très célèbre dont nous avons rapproché différents membres. Hori est en effet

le fils d'un grand-prêtre de Ptah à Memphis, Khaemouaset (Fig. 50), lui-même quatrième fils de

Ramsès II. Accompagnant Hori, un buste de son arrière grand-père Sethi Ier (Fig. 49), le deuxième

pharaon de la 19è dynastie.

Il est vraisemblable qu'Hori, ayant exercé ses fonctions sacerdotales à Memphis, dans le nord de

l'Égypte, ait reçu une tombe dans la nécropole toute proche de Saqqara. Cette tombe a été visitée au

19è siècle; de cette époque date, en effet, la dispersion de plusieurs objets du matériel funéraire sur

le marché des antiquités. Depuis ce temps, l'emplacement de la tombe d'Hori est dissimulé sous les

sables de la nécropole… L'oushebti de Hori, récemment acquis par la Ville de Liège, ne vient pas

de sa tombe, mais d'une cachette votive située dans une autre zone de la nécropole memphite, celle

du dieu funéraire Sokar.

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Outre ses qualités stylistiques incontestables

(observer les contrastes offerts par les zones

soigneusement polies et les zones délicatement

striées des plissés de vêtement, des tresses de la

perruque et du plumage du faucon), on retiendra

ici la présence, à l'arrière de la tête royale, du

faucon Horus aux ailes éployées. Ce dieu, le fils

d'Osiris, est, aux yeux des Égyptiens, l'expression

tangible de la renaissance du père. Si celui-ci

règne sur le monde des morts, Horus, le pharaon

monté sur le trône, règne quant à lui sur le monde

des hommes. Le roi Sethi Ier affiche ainsi sa

double personnalité, humaine, d'une part, et

surtout divine, d'autre part, grâce à la présence du

dieu Horus exprimant l'omnipotence de la

souveraineté terrestre. Fig. 49: buste fragmentaire de Sethi Ier, Vienne Kunsthistorisches Museum ÄS 5910, 19è dyn., grano-diorite, ht 76 cm

Khaemouaset et son frère Ramsès, quatrième et deuxième fils de

Ramsès II et de sa deuxième grande épouse royal Isisnofret, sont

figurés couchés, en gisants, sur leur lit funéraire. Ils portent des

perruques caractéristiques de leur charge professionnelle à

Memphis. Observer comme leurs pieds sont libérés de la gaine

momiforme; au revers du socle de soutien, deux personnages

féminins, surmontés du signe hiéroglyphique de la voile, sont

prêtes à redonner le souffle de vie nécessaire à ces petits serviteurs

funéraires.

Fig. 50: double-gisant de Khaemouaset et son frère, collection privée, 19è dyn., péridotite, L 24,5 cm

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SECTION 6

La section 6 marquera un retour vers l'égyptomanie, telle qu'elle est diffusée dans les milieux

maçonniques.

Il faut bien reconnaître qu'au 19è siècle, les plus grands amoureux de l'Égypte sont les francs-

maçons: ils y cherchent les sources de l'humanité et les sources du Beau qu'ils chérissent tant.

Rappelons l'immense rôle joué par la déesse Isis elle-même qui incarnera, aux yeux des francs-

maçons, l'Égypte en tant que terre-mère de la religion universelle de la Nature.

Pour illustrer cet engouement pour Isis de la part des francs-maçons, nous avons choisi la belle

statue de la déesse en granite noir conservée au Musée royal de Mariemont. Il s'agit du premier

achat d'antiquité égyptienne par l'industriel hennuyer Raoul WAROCQUÉ, la même année que son

entrée en Loge, soit en 1903.

La déesse se présente debout, dans l'attitude de la marche, pied

gauche légèrement en avant; elle s'appuie contre un pilier dorsal

et ses pieds reposent sur un socle. Le modelé de son corps est

souligné par son vêtement, tombant en drapé. Au milieu de la

poitrine, les extrémités de son châle forment un nœud

caractéristique. Sa chevelure est composée de boucles spiralées.

Au-dessus, entourée d'uraei, une petite base de couronne.

L'uraeus est un cobra en position dressée; il offre sa protection à

la tête des divinités ou des rois. Fig. 54: statue d'Isis, Musée royal de Mariemont B 130, 50 av.n.è.-50 d.n.è.,

diorite, ht 1,41 m

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Cette médaille, frappée à l'occasion du centenaire du Grand

Orient de Belgique en 1932, reprend également une image

d'Isis. Il s'agit de la réplique d'une statuette en bois doré qui

protégeait le coffret à canopes découvert, 10 ans plus tôt, dans la

tombe de Toutankhamon. Fig. 55: médaille frappée pour le centenaire du Grand Orient de Belgique en

1932 (coll. privée)

Le Grand Orient de Belgique, tout particulièrement dans le dernier quart du 19e siècle, croira à

l'Égypte ancienne, édifiant des temples qui s'inspirent de l'architecture du pays du Nil; par exemple

pour la loge "Le travail" à Verviers, la loge "l'Indivisible" à Spa, ainsi que la Loge "La parfaite

Intelligence et l'Étoile Réunies" au Boulevard d'Avroy à Liège. Ici, c'est en façade que

l'égyptomanie maçonnique s'affiche!

Ci-dessous, détail de la façade de la loge "La Parfaite Union" à Mons, inaugurée le 9 novembre

1890. On reconnaît de nombreux éléments de décor "à l'égyptienne": disque ailé, scarabée (?) ailé et

chapiteaux papyriformes des colonnes.

Fig. 56: détail de la façade du temple maçonnique de la "Parfaite Union" rue Chisaire à Mons (1890)

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Sur le portail de cette loge liégeoise on reconnaît bien sûr, au sommet, le disque solaire ailé entouré

de serpents. Deux jambages, composés de cinq blocs chacun, soutiennent une architrave frappée du

compas et de l'équerre, encadrant l'étoile à cinq branches, ici dans un bouquet de branches d'acacia.

Avec ces quelques objets simples, l'essentiel de la

symbolique des loges bleues est illustrée, les objets se

référant essentiellement au grade de Compagnon. Avec trois

marches à gravir pour entrer, cinq assises composant les

jambages à passer, et sept assises constituant l'encadrement

à franchir, le portail joue de plus sur la numérologie

maçonnique. Il est dit d'une loge, en effet, que trois

l'éclairent, cinq la dirigent et sept la rendent juste et parfaite.

Ces trois chiffres sont, par ailleurs, liés au trois degrés des

loges initiant aux grades d'Apprenti, de Compagnon et de

Maître. Ainsi, même un portail, côté rue, d'une loge

maçonnique peut être riche d'une symbolique ne s'adressant

pas aux profanes. Fig. 57: portail du temple de "La Parfaite Intelligence et l'Étoile Réunies" boulevard d'Avroy à Liège (vers 1905)

Nous retrouvons cette même symbolique dans nos

cimetières communaux, où certains édifices

funéraires de membres de la Loge prennent

également des formes égyptiennes: la pyramide du

cimetière de Robermont à Liège, ou le monument

égyptisant de la famille Spinette à Andenne. Fig. 58: monument Delpier-Marcellis (1876) au cimetière de

Robermont à Liège

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SECTION 7

La section 7 vous donne un éclairage sur l'Exposition Internationale de 1930 et l'Égypte dans la

publicité.

L'Exposition Universelle est un concept né dans la deuxième moitié du 19è siècle et constitue un

phénomène culturel majeur; il relève d'une volonté de présenter l'Ailleurs et l'Autre, de manière

complète et didactique.

Fig. 59: revers de la médaille frappée à l'occasion de la visite du roi Fouad en Belgique en 1927

Sur cette médaille (non exposée dans La Caravane du Caire. L'Égypte sur d'autres rives), on

reconnaît les deux félins propres à chaque nation: le sphinx égyptien à l'avant-plan, et le lion belge

derrière lui. Par-dessus, deux cartouches royaux, remplis de signes hiéroglyphiques alphabétiques

formant les noms de Fouad et Albert.

Au 20è siècle, dans la période entre les deux guerres, le couple royal Albert et Elisabeth de

Belgique et le roi égyptien Fouad entretiennent des liens étroits et chaleureux, mis en valeur par la

participation de l'Égypte à l'Exposition Internationale tenue à Liège en 1930. L'Égypte souhaite y

présenter toute la modernité de son État souverain et indépendant.

La forme choisie est néanmoins parfaitement pharaonique, la référence suprême à la civilisation

prestigieuse de l'Égypte ancienne. La section réservée à l'Égypte dans l'Exposition sera donc

occupée par un temple égyptien!

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Fig. 60: vue nocturne de la façade principale du Pavillon égyptien de l'Exposition Internationale de 1930 à Liège

C'est à l'occasion de l'Exposition Internationale de 1930 à Liège, que sont présentés, pour la

première fois en Europe continentale, des moulages des trésors de Toutankhamon, ainsi que des

créations égyptomaniaques qui en étaient inspirées (rappelons que la tombe, découverte en 1922, est

toujours en cours de fouilles en 1930…!). D'autres éléments du décor du temple, statues ou reliefs,

copient des œuvres conservées au Musée du Caire ou illustrées dans différents ouvrages du 19è

siècle, comme l'Histoire de l'art égyptien d'Émile PRISSE D'AVENNES. Dans la section 7, portez

votre attention sur les projets et plans d'architectes du pavillon de 1930, des moulages d'oeuvres du

Musée du Caire qui y furent exposés, et aujourd'hui conservés aux Musées Royaux d'Art et

d'Histoire de Bruxelles ou en collections privées, ainsi que du mobilier égyptisant.

Dans le domaine de la publicité également, sont présentes des références à l'Égypte, et à

l'Exposition Internationale, comme en témoignent les objets conçus par la faïencerie SPHINX de

Maastricht. Avec un tel nom, l'industrie se devait d'utiliser l'image du félin bien connu, à corps de

lion et tête de pharaon.

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