12
1 DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES PETITS BOURGEOIS Bertolt Brecht Distribution Traduction : Jean-François Poirier Mise en scène : Carlo Boso Avec La femme : Béatrix Ferauge L’ami : Thierry Janssen Le père de la mariée : André Lenaerts Le marié : David Pion L’homme : Guy Pion Le jeune homme : Grégory Praet La mère du marié : Hilde Uiterlinden La soeur de la mariée : Coralie Vanderlinden La mariée : Sandrine Versele Assistante à la mise en scène : Anouchka Vingtier Scénographie : Stefano Perocco di Meduna Lumières : Laurent Kaye Musique : Pascal Charpentier Régie plateau : Josiane Blicq Maquillage : Zaza da Fonseca Costumes : Isabelle Chevalier Vidéo : Eric Castex Chorégraphie : Fanny Roy Régie générale : Maximilien Westerlinck Régie lumières : Jacques Perera Avec l’aide de l’équipe technique de l’Atelier Théâtre Jean Vilar Une production du Théâtre de l’Eveil, du Théâtre Le Public, du Festival de Théâtre de Spa et de l’Atelier Théâtre Jean Vilar. Avec l’aide de la Fabrique de Théâtre et de la Communauté Wallonie-Bruxelles. Dates : du 13 au 25 septembre et du 11 au 29 octobre 2005 Lieu : Théâtre Jean Vilar Durée du spectacle : 1h30, sans entracte Réservations : 0800/25 325 Contact écoles : Adrienne Gérard : 0473/936.976 – 010/47.07.11

DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

  • Upload
    doanque

  • View
    216

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

1

DOSSIER PÉDAGOGIQUE

LA NOCE CHEZ LES PETITS BOURGEOISBertolt Brecht

Distribution

Traduction : Jean-François PoirierMise en scène : Carlo Boso

AvecLa femme : Béatrix FeraugeL’ami : Thierry JanssenLe père de la mariée : André LenaertsLe marié : David PionL’homme : Guy PionLe jeune homme : Grégory PraetLa mère du marié : Hilde UiterlindenLa sœur de la mariée : Coralie VanderlindenLa mariée : Sandrine Versele

Assistante à la mise en scène : Anouchka VingtierScénographie : Stefano Perocco di MedunaLumières : Laurent KayeMusique : Pascal CharpentierRégie plateau : Josiane BlicqMaquillage : Zaza da FonsecaCostumes : Isabelle ChevalierVidéo : Eric CastexChorégraphie : Fanny Roy

Régie générale : Maximilien WesterlinckRégie lumières : Jacques PereraAvec l’aide de l’équipe technique de l’Atelier Théâtre Jean Vilar

Une production du Théâtre de l’Eveil, du Théâtre Le Public, du Festival de Théâtre de Spa et del’Atelier Théâtre Jean Vilar.Avec l’aide de la Fabrique de Théâtre et de la Communauté Wallonie-Bruxelles.

Dates : du 13 au 25 septembre et du 11 au 29 octobre 2005

Lieu : Théâtre Jean Vilar

Durée du spectacle : 1h30, sans entracte

Réservations : 0800/25 325

Contact écoles : Adrienne Gérard : 0473/936.976 – 010/47.07.11

Page 2: DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

2

En 1919, Brecht a écrit plusieurs pièces en un acte, parmi celles-ci La Noce, représentée en1926 sous le titre La Noce chez les petits bourgeois.

En 1919, Brecht a 21 ans et passe volontiers ses soirées dans les brasseries munichoisesen compagnie de Karl Valentin, fasciné par la logique farfelue et la dialectique complexe dece dernier.Un soir, il écoute - bien involontairement - un homme raconter à ses voisins un repas denoce auquel il avait été convié la veille.Brecht trouve la description étrange : des paroles de l’inconnu - un petit bourgeois classique– émergeait un tableau « idéal » de ce repas nuptial. Il se dit : "Ce Monsieur -volontairementou non - a oublié quelque chose dans son récit…mais quoi ? Il a raconté un repas de nocecomme si tous les repas de noce s’étaient toujours ressemblés. Il n’a rien dit des mariés nides invités, presque rien de l’endroit où s’est passé le repas de noce ; il pense sans doutequ’un repas de noce reste un repas de noce, qu’il ait lieu à la ville ou à la campagne, dans lagrande ou la petite bourgeoisie…" Et Brecht ouvre son carnet de notes :

- Et si le repas avait été brûlé, que se serait-il passé ?- Et si l’installation électrique avait été détraquée ?- Et si les deux invités s’étaient mis à se disputer au beau milieu de la noce ?- Et si un des invités avait commencé une chanson et n’avait pas pu la terminer ?- Et si le marié n’avait pas invité la mariée pour ouvrir la danse ?- Et si quelques chaises, mal faites, s’étaient cassées ?- Et si la mariée avait été enceinte ?- Et si un des invités ne s’était plus souvenu de son compliment ?- Et si l’ami du marié avait dansé avec la mariée de façons inconvenante ?- Et si le garçon d’honneur avait lutiné la soeur de la mariée ?- Et si l’ami du marié avait chanté une chanson obscène ?- Et si quelqu’un avait parlé de ma dernière pièce ?

Délibérément Bertolt Brecht n’avait imaginé que des événements vraisemblables. C’estaprès s’être posé toutes ces questions qu’il comprend ce qui manquait au récit de l’inconnuet se lance dans la rédaction de La Noce chez les petits bourgeois.

Nous assistons à un repas de noce chez de jeunes mariés. Tout est parfait, le repas, leshistoires du père, les attentions de la mère, les amis, la famille. Le marié a tout fait dans lamaison : le divan, la table, les chaises, l'armoire "même la colle il l'a faite lui-même".Pourtant, peu à peu tout se déglingue : les meubles s’effondre, les conversationss’enveniment sous l’influence de l’alcool. C'est que ce monde petit bourgeois n'estqu'apparence : il est bancal. Derrière la façade, les fondations ne tiennent pas…

I. La Noce chez les petits bourgeois et son contexte historique

La pièce décrit de manière caustique et grinçante une classe sociale précise d’un paysprécis dans une époque précise : L’Allemagne des années ‘20 est caractérisée par lesentiment de défaite, l’inflation et le chômage généralisé. A l’image du jeune époux de lapièce, certains pensent pouvoir trouver le bonheur en se réfugiant entre leurs quatre murs,plaçant tous leurs espoirs dans des solutions individualistes : le bricolage auquel il s’adonnepour fabriquer son univers familial n’est pas simplement un remède à la pauvreté, il est aussiune façon de s’affirmer comme un individu à part entière. Cette activité fait de lui « le garsqui s’en tire tout seul », le self-made-man qui reste un modèle enviable dans une société où90% des gens crèvent de faim et où personne ne peut rien pour personne.

Page 3: DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

3

Et pourtant, précisément parce qu’au cours de ce repas de noce tout s’écroule- les meubles,mais aussi les règles morales d’une classe sociale en pleine crise- les jeunes épouxdécident d’épauler le cours des événements : mesurant l’étendue du désastre de leur repasde noce, ils finissent la soirée désespérément, en se saoulant, en injuriant les invités qui sontpartis et en détruisant le lit nuptial. Ils nient l’ordre moral qui était jusqu’ici l’objet de leursefforts.

Comme l’Allemagne m’ennuie ! C’est un bon pays moyen, les couleurspâles et les plaines y sont belles, mais quels habitants ! Une paysanneriedéchue, mais dont la grossièreté n’engendre pas de monstres fabuleux, aucontraire un abrutissement tranquille, une classe moyenne chargée demauvaise graisse et une intelligentsia épuisée !

Bertolt BrechtIn Journaux 1920-1922 (éd. L’Arche)

II. En pleine démission politique

Le choix des solutions individuelles recouvre aussi, chez le petit bourgeois allemand, unedémission politique. « Je m’en sortirai tout seul, la politique est un domaine de spécialistes,ça n’a rien à voir avec mes affaires, ce n’est pas la politique qui me donnera desmeubles… »

Et cet apolitisme se transforme très vite en agressivité contre tout ce qui est politique ousimplement critique.

Dans la pièce, les petits bourgeois opposent « l’humain », « la vie » à « la politique ». EtHitler a su profiter pleinement de ce choix, en se présentant comme un individu naturel plusque comme un homme d’Etat. Hitler a joué sans arrêt le rôle d’un personnage de théâtreavec ses passions et ses coups de génie, pour pouvoir dissimuler ses conduites proprementpolitiques.

Il (Hitler) est une individualité, un héros de drame et il veut faire dire aupeuple, plus exactement au public, ce qu’il dit lui-même. Pour être plusexact encore, lui faire ressentir ce qu’il ressent. Tout dépend donc de cettecondition : il faut qu’il ressente lui-même les choses avec force. Et pourpouvoir ressentir les choses avec force, le peintre en bâtiment parle enhomme privé à des hommes privés. Il combat des individus, ministresétrangers ou politiciens. Il en résulte l’impression qu’il s’est lui-mêmeengagé dans une lutte personnelle avec ces gens, en raison descaractères propres à ces gens… Il proteste bien haut de son indignation, ilsignale qu’il a mille peines à se retenir de sauter carrément à la gorge deson adversaire, l’appelant par son nom il lui jette ses exigences à la face, ilse moque de lui et ainsi de suite . En tout ceci l’auditeur peut le suivreintuitivement et sentimentalement, l’auditeur prend part aux triomphes del’orateur, il adopte ses attitudes. Le peintre en bâtiment maîtrise un procédéqui lui permet d’amener son public à le suivre presque aveuglément.

Bertolt Brecht « La théâtralité et le fascisme », in l’Achat du Cuivre.

Page 4: DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

4

Page 5: DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

5

III. Bertolt Brecht : une biographie

Bertolt Brecht naît en 1898 à Augsbourg, petite ville de Bavière, dans une famillebourgeoise. Il y reçoit une bonne éducation – dans le sens le plus conventionnel du terme.Le jeune garçon, dont le père dirige une petite fabrique de papier, va à l’école primaire, puisau lycée. Brecht expliquera : « J’étais le fils de gens qui ont du bien. Mes parents m’ont misun col autour du cou. Et m’ont donné l’habitude d’être servi. Et m’ont enseigné l’art decommander. Mais quand plus tard, je regardai autour de moi, je n’ai pas aimé les gens dema classe, ni commander, non plus qu’être servi. »

Dès 1916, il quitte le lycée pour l’Université de Munich, où il suit les cours de médecine.Mais, deux ans plus tard, alors que la Première guerre mondiale touche à sa fin, BertoltBrecht est enrôlé comme infirmier militaire et donc, contraint d’interrompre ses études pourune triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’ilcompose ses premières chansons de révolte, dans les années ‘20 ; des poèmes qu’il réciteet chante lui-même, en s’accompagnant à la guitare. Notons, entre autres, La légende duSoldat Mort qui fait scandale dans un cabaret de Munich. Ses premières œuvres témoignentavec cynisme et férocité du désarroi de la jeunesse dans l’après-guerre.

C’est en 1918 qu’il écrit sa première pièce de théâtre : Baal. L’année suivante marque sonretour à Munich. Il fréquente le milieu théâtral et se lie notamment avec l’auteur - cinéaste -homme de cabaret Karl Valentin, qui lui inspire peut-être certaines de ses pièces en un acte.C’est à cette période qu’il aurait d’ailleurs écrit La Noce chez les petits bourgeois, même s’ilne la sort officiellement de ses tiroirs qu'en 1926, à l'occasion de sa création à Francfort. En1922, il reçoit le prestigieux prix Kleist pour sa troisième pièce, Tambours dans la nuit, undrame sur le retour du soldat. Deux ans plus tard, il signe l’adaptation et la mise en scène –sa première – de La vie d’Edouard II d’Angleterre de Marlowe, au Kammerspiel de Munich.C’est également à cette période qu’il rencontre l’actrice viennoise Helene Weigel. Il décided’aller vivre à Berlin avec elle.

Quittant l’attitude anarchique et cynique de l’immédiate après-guerre, il lit Le Capital etadhère au marxisme aux alentours de 1926. En 1928, il écrit Homme pour Homme. Maisc’est L’Opéra de quat’sous, créé à Berlin la même année, qui fait connaître Brecht enAllemagne et à l’étranger. En adaptant L’Opéra des gueux de John Gay (1728), il gardel’esprit satirique de ce dernier. Il nous entraîne dans le monde haut en couleurs de sesmendiants pour y pointer du doigt l’exploitation et la méchanceté que l’on trouve dans lasociété bourgeoise.

A cette époque, qui voit la crise économique plonger l’Allemagne dans la misère et lechômage, Brecht élabore sa théorie du théâtre épique (ou narratif), qu’il expliquera plus tarddans son Petit Organon pour le théâtre (1948). Selon lui, la forme épique « doit raconter. Ellen’a pas à croire qu’il soit possible de s’identifier à notre monde, et elle doit interdire cetteillusion. Ce qu’on a gagné, c’est que le spectateur prend au théâtre une attitude nouvelle (…)Le théâtre n’essaie plus de le soûler, (…) de lui faire oublier le monde, de le réconcilier avecson destin. Désormais, le théâtre lui présente le monde pour qu’il s’en saisisse ». Il refuseles valeurs et les procédés magiques du théâtre traditionnel. Engagé dans la lignée marxiste,Brecht entend désigner les tenants et les aboutissants de l’exploitation féroce des uns parles autres. Son théâtre se veut dénonciateur, non pas à travers le texte, mais l’extra-texte, le

Page 6: DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

6

spectacle : mise en scène, ponctuation visuelle, gestuelle et acoustique, qui manifestent ceque Brecht veut donner à voir au spectateur.Le théâtre épique se fonde, selon lui, sur la distanciation. Le spectateur n’entre pas dansl’intrigue, il n’y est pas tout à fait plongé. Mis à distance, il reste critique et continue àréfléchir, pendant que tout se joue devant lui.

En 1929, Bertolt Brecht épouse Helene Wiegel, actrice qui désormais, jouera dans nombrede ses pièces et dont il aura plusieurs enfants. Mais il n’en est pas à sa première conquête :il avait épousé Marianne Zoff en 1922, dont il a divorcé sept ans plus tard. Il aimeincontestablement les femmes et aura plusieurs relations au cours de sa vie. De cesrelations et mariages naîtront plusieurs enfants.

Dans les années ‘30, il multiplie les œuvres didactiques et engagées. Helene Weigelenseigne alors à un groupe de jeunes comédiens. Pour la création de La Mère, Brechtengage donc ces jeunes gens et donne le rôle-titre à sa femme.A la même époque, les 7 premiers volumes des Versuche qui contiennent les pièces deBrecht et ses essais théoriques paraissent à Berlin.

En 1933, Hitler est nommé Chancelier du Reich par Hindenburg. C’est ensuite l’incendie duReichstag, l’interdiction du Parti Communiste, puis des syndicats et des autres partis. Brechtest inscrit sur la liste noire. Ses œuvres sont interdites et brûlées par les nazis. Mais il a déjàpris la route de l’exil (qui durera 15 ans). Elle le mène d’abord à Prague, en Autriche, enSuisse… : comme bien d’autres, les Brecht ne sont plus en sécurité en Allemagne mais nesavent pas encore où s’installer.

Composant environ deux pièces par an, Brecht poursuit son œuvre de théoricien, de poète,de militant et de dramaturge. Il dira : « Contre la montée de la barbarie il n’y a qu’un allié : lepeuple, qui en souffre tellement lui-même. Il n’y a que de lui qu’on puisse attendre quelquechose. Il est donc naturel de se tourner vers le peuple, et plus nécessaire que jamais deparler son langage. »

C’est durant l’été 1933 que Brecht et sa famille s’installent au Danemark. Entre 1934 et1936, il voyage pourtant constamment (Londres, Moscou…), à la recherche de nouvellessources de revenus et pour rester en contact avec ses amis dispersés. Désireux de ne paslaisser en suspens ses relations de travail, Brecht se rendra aussi à Paris à plusieursreprises. En 1937, il y met en scène Les Fusils de la mère Carrar qui ont pour fond une autreguerre, commencée un an auparavant : la guerre d’Espagne, une autre préoccupation pourle dramaturge. Toujours à Paris, il assiste aux répétitions de L’Opéra de quat’sous. Lesderniers mois de 1938 et les premiers de 1939 sont placés sont le signe d’une nouvellepièce : La Vie de Galilée, qui connaîtra trois versions différentes.C’est à cette époque que Brecht est déchu de la nationalité allemande. Heureusement, ilréussit à faire prolonger de cinq ans son passeport, ainsi que ceux de sa famille. Unecondition essentielle de leur existence pour les années à venir…

La menace d’une guerre imminente aggrave la situation de nombreux exilés. Limitrophe del’Allemagne, le Danemark n’est plus un pays sûr. Après un séjour d’un an en Suède, lesBrecht se réfugient en Finlande, en 1940. Dans Bertolt Brecht. L’Homme et son œuvre, Berget Jeske racontent : « Il est à chaque fois plus pénible d’interrompre à nouveau son travail,de perdre des amitiés à peine nouées. » Galileo Galilei, La Bonne âme de Se-tchouan , MèreCourage et ses enfants et Maître Puntila et son valet Matti (créée en 1997 au Théâtre JeanVilar) sont quelques-unes des pièces de cette période malgré tout, extrêmement productivepour Brecht.

Page 7: DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

7

En 1941, alors que les armées hitlériennes envahissent l’U.R.S.S., Bertolt Brecht et safamille partent s’installer aux Etats-Unis, la destination prévue depuis longtemps, l’Europen’étant plus sûre. Là-bas, il retrouve un grand nombre d’intellectuels allemands réfugiés.Certains d’entre eux se font naturaliser. Brecht, lui, attend impatiemment, sept annéesdurant, le moment de rejoindre sa patrie. Il écrit La Résistible Ascension d’Arturo Ui, unepièce métaphorique, un parallèle entre le monde des gangsters et la montée du nazisme.

La vie quotidienne est difficile. Etant donné la proximité de l’industrie cinématographique enplein essor, Brecht est décidé à tenter sa chance comme scénariste. Il travaille, entre autres,à Hollywood Films et collabore avec Fritz Lang. Mais il ne parvient pas à s’adapter au genredu film hollywoodien et sera bientôt déçu. Selon Berg et Jeske, « c’est dans la poursuite deson travail théâtral qu’il entrevoit les meilleures chances de retrouver les succès du passé ».Grâce à Eric Bentley qui traduit et monte plusieurs de ses pièces dans des théâtresuniversitaires, Brecht conquiert une certaine partie de la jeunesse intellectuelle aux U.S.A.La première version du Cercle de craie caucasien (qui débute la saison 1978-79 à l’AtelierThéâtre Jean Vilar) est terminée en juin 1944.En 1947, Brecht – en tant que sympathisant communiste… – subit un interrogatoire devantla Commission des « activités anti-américaines ». Il n’est pas accusé mais juge préférable dequitter les Etats-Unis.

Il attend de longs mois à Zurich que les forces d’occupation occidentales l’autorisent àrentrer chez lui. La même année, il adapte Antigone (pièce qui sera jouée au Théâtre JeanVilar durant la saison 1994-95). C’est sa première occasion de collaborer à nouveau avecses amis d’autrefois.

En octobre 1948, enfin, Bertolt Brecht et sa femme Helene Weigel, retrouvent le lieu de leurssuccès passés. Ils s’installent à Berlin-est et fondent, en 1949, le groupe théâtral « BerlinerEnsemble ». Provisoirement hébergée au Deutsches Theater, la troupe occupera dès 1954le Theater am Schiffbauerdamm, où les pièces étaient jouées avant Hitler, où L’Opéra dequat’sous fut créé vingt ans plus tôt. Le « Berliner Ensemble » joue Brecht, bien sûr, maisaussi d’autres auteurs, comme La Cruche cassée de Kleist ou Urfaust de Goethe. Ledramaturge mettra lui-même ses œuvres en scène : Lucullus (1951), Les Fusils de la MèreCarrar (1952), Le Cercle de craie caucasien (1954)… Comme l’explique Geneviève Serreau,Bertolt Brecht, entouré d’une solide équipe de techniciens, de musiciens et de décorateurs,forme des acteurs et de jeunes metteurs en scène à qui il confie la régie de certainsspectacles.Sa réputation ne cesse de croître en Allemagne et dans le monde entier, tout comme celledu « Berliner Ensemble » qui jouit, dès le milieu des années cinquante, d’unereconnaissance internationale. En 1954, à l’occasion du Cercle de craie caucasien, uncomité international décerne à Brecht le prix Staline « pour la consolidation de la paix entreles peuples ». La même année, il écrit dans son Journal de travail (Brecht prend en effet desnotes personnelles entre 1938 et 1955) : « Le pays est toujours inquiétant. Récemment,quand je suis allé à Buckow [non loin de Berlin, il y loue une vieille maisonnette] avec desjeunes gens de la dramaturgie, je m’étais installé le soir dans le pavillon, tandis qu’euxtravaillaient ou conversaient (…) Il y a dix ans, m’avisai-je soudain, tous trois, quoi qu’ilsaient pu lire de moi, m’auraient, si j’étais tombé entre leurs mains, livré sur-le-champ à lagestapo. »

Peu à peu, Brecht songe à se reposer. Désormais, les affaires quotidiennes fonctionnentsans lui et la troupe est en place. Il meurt d’un infarctus, le 14 août 1956, dans sonappartement à Berlin. Sollicité quelques jours plus tôt par un journaliste, Brecht, ne perdantpas son goût pour les discussions, avait déclaré : « Ecrivez que je n’étais pas commode etque je compte le rester après ma mort. Même là, il y aura encore certaines possibilités. »

Page 8: DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

8

IV. Pourquoi monter cette pièce aujourd’hui, parole à l’équipe duThéâtre de l’Eveil…

« Le Théâtre de l’Eveil, Carlo Boso et la farce forment un trio de longue date : d’ Arlequinvalet de deux maîtres à la Mort accidentelle d’un anarchiste en passant par L’Opéra dequat’sous et les Jumeaux vénitiens, une réelle complicité s’est créée autour de textesmajeurs du répertoire ayant pour thème principal la mise en évidence – pour ne pas dire lacritique – de certains comportements dits de société qui n’ont pour seule finalité que lapréservation inconditionnelle d’une morale capitaliste, bourgeoise et individualiste audétriment de la justice, du bien-être commun et de la vérité.

La Noce chez les petits bourgeois est une pierre supplémentaire à notre édifice de mise encritique farcesque : en regardant la petite bourgeoisie allemande des années 20 telle quedécrite par Brecht, nous ne pouvons nous empêcher de nous rappeler que c’est cette mêmepetite bourgeoisie qui, déçue de l’avancement démocratique que lui proposait la républiquecapitaliste de Weimar, finira par élire Hitler au pouvoir, avec l’espoir tacite que ce "guide"redresserait le pays économiquement, lui rendrait sa fierté nationale, doperait la monnaie,abolirait le chômage, et les débarrasserait définitivement des parasites, des mécontents etdes philosophes.L’Histoire nous a appris la suite.En proposant aujourd’hui La Noce chez les petits bourgeois, il ne s’agit nullement pour nousde refaire le énième procès d’un pays ou d’une société qui a engendré l’horreur etl’inconcevable, mais bien davantage de pointer des attitudes morales qui semblent avoirtraversé l’Histoire sans jamais se remettre en cause et qui aujourd’hui encore pourraientengendrer la même bête immonde.

Que de fois n’entendons-nous ces "Je m’en sortirai tout seul", "La politique c’est pour lesspécialistes, ça n’a rien à voir avec MES affaires", "Ce n’est pas la politique qui ME donneradu travail…ou des meubles"….

Et l’apolitisme se transforme en agressivité contre tout ce qui est politique…

En 2005 comme en 1920 persiste le mythe de la force individuelle, de l’homme qui se créeseul et crée à lui seul sa vie et son environnement. Le bricolage – do it your self - n’est plussimplement la recherche de solutions commodes et avantageuses face à une situationmatérielle difficile, mais affirmation de soi comme personnage souverain, nanti…propriétaire.Le mot est prononcé ! Paradoxe d’une société bourgeoise qui érige en morale la self-mademania et ne fournit pas aux hommes qui la composent les moyens de vivre comme desindividus… (pour être un individu, il faut un capital).

L’affirmation forcenée de chaque individu se heurte dès lors à l’affirmation forcenée desindividus voisins. Vivre en individu signifie dès lors piétiner les autres, y compris sur le terraindes rapports quotidiens les plus simples. C’est un peu cette évolution de l’individualisme versl’agressivité que, par la biais de la farce et de la parabole, nous raconte. »

Page 9: DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

9

V. Interview de Carlo Boso, le metteur en scène

Qui êtes-vous, Carlo Boso ?

On peut dégager quatre aspects dans ma carrière : le comédien, l’organisateur, le metteuren scène et le pédagogue, sans compter l’auteur. J’ai débuté en tant que comédien, à l’écoledu Piccolo Teatro de Milan où j’ai été élève de Giorgio Strehler. J’ai travaillé au Piccolojusqu’en 1980 et dans d’autres théâtres d’Italie, notamment à Rome et à Gènes. Ensuite, j’aicommencé à m’intéresser à l’organisation théâtrale. J’ai notamment organisé une tournéetrès importante d’Arlequin valet de deux maîtres de Goldoni par le Piccolo Teatro. Cettepièce est également celle qui m’a offert une large reconnaissance de la part du public en tantqu’acteur. Ensuite, je suis entré dans l’organisation de différents festivals et j’ai ouvert unthéâtre, à Milan, le Théâtre Porta Romana, avec Roberto Begnini. Ce lieu s’était notammentdonné pour but de recevoir les grandes compagnies d’Europe et du Monde. Puis j’ai fait mapremière mise en scène, Andromaque, à Lyon, et j’ai poursuivi mon travail de metteur enscène de façon régulière à travers une quarantaine de créations - de Goldoni à Beckett -dans de très nombreux pays d’Europe. Parallèlement à la mise en scène, j’ai réalisé unitinéraire de pédagogue. Je voulais m’intéresser et intéresser les gens à ce que sont lestechniques théâtrales italiennes, en particulier la Commedia dell’arte. J’ai créé en 2004l’Académie Internationale des Arts du Spectacle. Cette école défend l’idée que,contrairement à beaucoup d’idées préconçues, la langue n’est pas une barrière à l’exercicedes arts de la parole : les enseignants comme les élèves sont de nationalités très différentes.Enfin, je suis l’auteur d’une trentaine de pièces qui concernent toujours de près ou de loinl’art de la Commedia dell’arte.

Comment avez-vous rencontré le Théâtre de l’Eveil ?

Le Théâtre de l’Eveil, c’est avant tout son animateur, Guy Pion. J’ai rencontré Guy en Italie,dans un stage qu’animait Dario Fo avec lequel je suis très lié. Bien plus tard, il y a unedizaine d’années, le fils de Guy, qui est également comédien, s’était inscrit à l’un de messtages. Nous nous sommes retrouvés de cette façon. Enfin une comédienne, DelphineBougart, que je venais de mettre en scène dans Ubu Roi, m’a fait part de son rêve de jouerArlequin, valet de deux maîtres. Ainsi est né le spectacle présenté au Théâtre Le Public en1997, qui a été ma première collaboration avec l’Eveil. Puis les expériences avec l’Eveil eten Belgique se sont multipliées pour moi : La Locandiera, L’Opéra de Quat’sous, LesJumeaux vénitiens, Mort accidentelle d’un anarchiste… J’ai donné à Guy une liste de piècesque j’ai envie de monter « dans l’absolu ».

Ce choix de La Noce était dans votre liste ?

Oui. Vous savez, le grand art de la programmation consiste à savoir quelle pièce jouer à quelmoment, anticiper un peu les goûts du public. Dans la période actuelle, où il existe unevéritable crise des valeurs de la bourgeoisie, il me paraît particulièrement important demonter La Noce.

Certains critiques disent que La Noce est une pièce très marquée par son contexte social,économique, politique…

Je crois que c’est injuste. Tout d’abord, d’autres pièces de Brecht sont beaucoup plusmarquées que La Noce. Entre 1935 et 1950, Brecht était très impliqué sur le plan politique,et ça a rejailli directement sur son œuvre. Bien sûr, La Noce est politique dans une certainemesure, puisque liée à une certaine société. Comme toute pièce, elle est le miroir d’une

Page 10: DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

10

société. Mais La Noce a été écrite quand Brecht avait vingt-et-un ans. Elle se définit avanttout comme une critique de la nouvelle génération vis-à-vis de l’ancienne. La Noce dénoncel’homme individualiste, la bourgeoisie égoïste et égocentrique repliée sur certains symboles.Prenons le mobilier du décor de La Noce. Il a été entièrement réalisé par le personnage duMarié. Voilà un symbole : la bourgeoisie se complaisant dans son « savoir-faire tout seul »,fière de son indépendance et incapable de rien mettre à la disposition des autres. On peutfaire un parallèle entre La Noce et La Cerisaie de Tchekhov. La Cerisaie montre un paysanparvenu qui achète un domaine à des bourgeois décadents. Une inversion de valeurs seproduit. Il en est de même dans La Noce. Qui fait le discours pour féliciter les mariés ? Le filsde la concierge…

Mais la pièce anticipe quand même l’évolution de la politique allemande des années trente…

Quand Brecht a écrit sa pièce, en 1919, il ne savait évidemment pas que viendrait Hitler. Il afait la critique d’une catégorie sociale qui aurait pu servir de sonnette d’alarme : « Voyez àquoi nous courons si nous ne nous mettons pas plus en question. Voyez comme noussommes devenus les esclaves du regard des autres. Tâchons de nous méfier de cette perted’identité. » Sans une certaine mentalité, sans un « climat », la pièce n’aurait pas eu deraison d’être. Et sans cette même mentalité, Hitler n’aurait sans doute pas pris le pouvoirquelques années plus tard. Voilà ce qui est vraiment actuel dans la Noce : lorsqu’il y a uneperte de valeurs, lorsque s’établit une confusion entre vice et vertu, il y a souvent quelqu’unpour en profiter. La panique morale d’une société laisse souvent le champ libre à quelquesindividus habiles à l’instrumenter. Regardez comment s’y est pris George Bush…

Alors comment monter La Noce ? Comme un leçon ? Comme une satire ?

En fait, ni l’un ni l’autre. La Noce est une farce, voilà ce qui me paraît prépondérant. Bien sûr,il y a un aspect satyrique, je viens de montrer de quelle façon. Mais notre choix esthétique,avec la troupe et les artisans, est vraiment de mettre en valeur la farce. Nous avonsprivilégié un décor entièrement blanc, incliné pour insister sur l’aspect déséquilibré de lasociété dans laquelle on se trouve. Les costumes, eux non plus, ne seront pas réalistes, ouen tout cas pas liés à une époque précise et déterminée. Au contraire, nous avons travaillésur des éléments de costumes issus de différentes époques. Le but est d’être le plus a-storique, si je puis dire, que possible. En tout cas, il ne faut en aucun cas en faire une leçon.On ne monte cette pièce ni contre quelqu’un, ni contre une époque… non… on la montepour quelque chose. C’est une farce dans le sens le plus ancien du terme : elle s’amuse desvices et des vertus de la société dans une optique positive.

Le théâtre de Brecht est aujourd’hui entré dans le répertoire, il est devenu l’apanage de cettebourgeoisie que Brecht critique…

Qui vient principalement au théâtre ? Les bourgeois. Pourquoi y viennent-ils ? Parce qu’ilsconstituent la classe sociale extrêmement fragile qui porte en elle les valeurs de la société.Son mérite, c’est peut-être d’être devenue aujourd’hui la catégorie sociale qui se pose le plusde questions, parce qu’elle doit gérer la base. Les grandes périodes créatives du théâtre,Molière, Goldoni, Brecht, s’articulent souvent sur les crises de la bourgeoisie. Rassurer labourgeoisie par l’action théâtrale et par le rire en n’omettant pas de dénoncer ses vices estsalutaire. Ne perdons pas de vue que Brecht a écrit son théâtre pour la bourgeoisie. Dansmes pérégrinations, j’ai eu le privilège d’être envoyé par le Piccolo Teatro au BerlinerEnsemble. J’y suis resté trois mois. Helen Weigel, l’épouse de Brecht, racontait combien ilavait peur lorsque son théâtre allait être joué devant des ouvriers. Ce n’était pas son public,si l’on peut dire. Il ne savait pas comment il allait réagir.

Page 11: DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

11

Brecht a écrit de Shaw : « Shaw est un terroriste. La terreur qu’il exerce sort de l’ordinaire,tout comme l’arme avec laquelle il opère : l’humour. ».

Ce qui est déjà extraordinaire, c’est que George Bernard Shaw, qui est un vrai auteur dethéâtre bourgeois, ait touché si intensément Brecht. Il faut recadrer un peu qui était Brecht.Au départ, c’est un fils de bourgeois, et son écriture est une forme d’autocritique. Il sereconnaît évidemment dans Shaw qui, lui, dénonce avec force dans ses pièces les vices dela bourgeoisie anglaise. Voilà deux hommes, deux grands auteurs, qui ont deux systèmesdramatiques totalement différents, mais pour lesquels le théâtre a la même fonction. Maisintéressons-nous à son mot de terrorisme. Le théâtre ne peut pas faire la révolution lui-même, c’est vrai. Mais il peut la générer d’une certaine façon. Il peut créer une révolutionsociale, ou en tout cas travailler au quotidien à amener les spectateurs à s’interroger. Il estvéritablement susceptible d’opérer une révolution des mœurs, lentement mais sûrement.

Brecht parle bien d’une « terreur qui sort de l’ordinaire »…

Absolument. Le théâtre est la garantie de la démocratie. Il n’y a pas de démocratie s’il n’y apas de théâtre. Et la façon dont ont procédés certains grands despotes de l’Histoire en est lameilleure illustration. La tentation est souvent grande, dans les régimes centralisés, decouper la parole aux comédiens parce qu’ils pratiquent une forme de terrorisme intellectuelvis-à-vis du pouvoir en place. De ce point de vue, le théâtre est une sorte de terrorisme. Unesorte de terrorisme positif, fondé sur le principe de l’éternelle question : comment bousculerles acquis ? Le théâtre réinvente toujours un nouveau moyen de rééquilibrer le monde.Brecht écrit La Noce en souhaitant sans doute que l’Homme aide un peu plus l’Homme. Ill’écrit sans doute en pensant qu’il y a un moyen pour chacun d’être plus heureux. Mais ilconstate du même coup que le bonheur des patrons n’est pas le bonheur des ouvriers, etque c’est de là que naît le conflit. Alors comment redistribuer les cartes pour en arriver àdavantage d’harmonie ? Le fait de poser cette question est une petite révolution en soi. Danscette optique, La Noce doit amener chacun à faire son autocritique tout en restant dans labonne humeur.

Brecht a écrit « Comme l’Allemagne m’ennuie… Reste : l’Amérique »

Il faut se remettre dans la logique des années vingt, la période florissante de la Républiquede Weimar : un pouvoir qui s’autoproclamait socialiste mais destiné seulement à préserverles acquis de la bourgeoisie. A l’opposé de ce conservatisme, l’Amérique représentait unEtat et une société en mouvement. Le rêve américain était encore bien réel, bien vivant. Onallait là-bas et on pouvait vraiment faire carrière, ou à tout le moins il existait une parité dansles chances, dans les occasions de départ. Chacun avait la possibilité d’être reconnu à sajuste valeur. Il y avait là vraiment l’invention quotidienne d’un nouveau monde. Mais Brecht apu vérifier de son vivant que ce n’était pas complètement vrai. La tendance européenne atoujours existé de voir dans l’Amérique un paradis sur terre pour créer et pour s’exprimer.Moi-même, il a fallu que je me rende là-bas pour comprendre.

Page 12: DOSSIER PÉDAGOGIQUE LA NOCE CHEZ LES … · une triste expérience des atrocités de la guerre. C’est d’ailleurs pour les blessés qu’il compose ses premières chansons de

12

VI. Après la représentation, quelques prolongements

Les costumes :De quelle époque datent-ils selon vous ? tous de la même époque ?

La musique :Avez-vous reconnu certains passages musicaux ? quel style de musique est-ce ?

Les personnages :Vous semblent-ils crédibles ? Vous touchent-ils ou les trouvez-vous stéréotypés ?

Le décor :Que pensez-vous du plancher incliné ? des meubles ? des couleurs ?

La chanson finale :Quelle impression ? Pensez-vous qu’elle fasse partie du texte original ? Quel message ?

BibliographieAvant-scène n° 552, novembre 1974, pp. 47-50La Noce chez les petits bourgeois, Supplément à « Rebelote » n° 3Actualité Théâtre de Bourgogne, n° 3, 1968, pp. 7-12Dossier du Théâtre de l’EveilProgramme du Théâtre Varia