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Actualités 325 [2] Turk DC, Swanson KS, Tunks ER. Psychological approaches in the treatment of chronic pain patients — when pills, scalpels, and needles are not enough. Can J Psychiatry 2008;53:213—23. [3] Norrbrink Budh C, Kowalski J, Lundeberg T. A comprehensive pain management programme comprising educational, cognitive and behavioural interventions for neuropathic pain following spinal cord injury. J Rehab Med 2006;38:172—80. [4] Van de Wetering EJ, Lemmens KMM, Nieboer AP, Huijsman R. Cognitive and behavioral interventions for the management of chronic neuropathic pain in adults — A systematic review. Eur J Pain 2010;14:670—81. [5] Daniel HC, Narewska J, Serpell M, Hoggart B, Johnson R, Rice ASC. Comparison of psychological and physical function in neuropathic pain and nociceptive pain: implications for cognitive behavioral pain management programs. Eur J Pain 2008;12:731—41. Franck Henry Consultation pluridisciplinaire de la douleur, 216, avenue de Verdun, 36000 Châteauroux, France Adresse e-mail : [email protected] Disponible sur Internet le 23 octobre 2010 doi:10.1016/j.douler.2010.09.009 Sale temps pour les rhumatismes ! Pain and weather changes Qui n’a jamais entendu un patient faire des liens entre les « changements de temps » et ses rhumatismes ? Cette asso- ciation d’idée est décrite depuis l’antiquité et la majorité des patients interrogés dans différentes études estiment que le « mauvais temps » aggrave leurs douleurs. Qu’en est-il réellement ? Deux de nos collègues norvégiens ont cherché à en avoir le cœur net grâce à une revue de la littéra- ture, publiée dans l’European Journal of Pain [1]. Au total, neuf études de bonne qualité méthodologique concernant la polyarthrite rhumatoïde ont été « méta-analysées ». Sta- tistiquement, les faits sont là : aucune corrélation entre la douleur et trois facteurs météorologiques (tempéra- ture, pression atmosphérique, humidité) n’a été démontrée. Cependant, deux études apportent des données plus pré- cises (car individuelles) et viennent nuancer le constat global : respectivement 11 % et 21 % des patients étaient sensibles à la température, 0% et 11 % à la pression atmosphérique, 6 % et 11 % à l’humidité. Qui plus est, la proportion de patients qui n’étaient sensibles à aucun des trois paramètres variait de 79 % à 100 %. Au total, à l’échelle macroscopique, la météorologie n’a pas d’effet significa- tif sur la douleur liée à la polyarthrite rhumatoïde. En revanche, une sous-population de patients apparaît plus sen- sible aux changements de temps. Conflit d’intérêt Aucun. Référence [1] Smedslund G, Birger Hagen K. Does rain really cause pain? A systematic review of the associations between weather factors and severity of pain in people with rheumatoid arthritis. Eur J Pain 2010, doi:10.1016/j.ejpain.2010.05.003 . Florentin Clère Consultation pluridisciplinaire de la douleur, centre hospitalier, 216, avenue de Verdun, 36000 Châteauroux, France Adresse e-mail : [email protected] doi:10.1016/j.douler.2010.09.006 Douleur du grand brûlé : il n’y pas que les médicaments... Burn-related pain and medications: What else? Les services qui prennent en charge les grands brûlés sont confrontés au quotidien à la douleur de leurs patients. La place des différentes molécules antalgiques est parfai- tement décrite dans une revue de la littérature publiée en 2009 dans la revue Burns [1]. L’utilisation des antal- giques y est décrite, avec des algorithmes prenant en compte l’intensité et le type de douleur (fond, paroxysmes, provoquée par les soins, recours aux opioïdes forts, postopératoire). La place des traitements des douleurs neuropathiques semble croissante, comme en témoigne un autre article paru dans la même revue [2]. Au total, cette revue de la littérature de 16 pages consacre la quasi- totalité de ses écrits aux approches médicamenteuses à visée antalgique [1]. Seule une demi-page évoque la place des moyens « non-pharmacologiques ». Durant l’année 2010, trois nouveaux articles viennent enrichir la discussion : ils sont tous parus dans le même numéro de la revue Burns et s’intéressent à : l’hypnose, utilisée le plus précocement possible chez les grands brûlés [3]. Cette approche a permis chez 23 patients de diminuer l’intensité douloureuse, de ren- forcer l’efficacité des opioïdes et de réduire l’anxiété ; la « distraction multimodale », utilisée pour les change- ments de pansements chez les enfants [4]. Il s’agit d’une sorte de console qui nécessite une attention soutenue et sollicite les sens de la vue et du toucher. Cette tech- nique, associée aux antalgiques chez 20 enfants, a permis un meilleur soulagement que les approches médicamen- teuses utilisées seules ou en association à un jeu vidéo classique ; la « réalité virtuelle », qui modifie la perception de l’environnement dans lequel évolue le patient [5]. L’utilisation d’un tel système a diminué significativement la douleur de neuf des 11 patients qui l’ont essayé. L’hypnose et les méthodes « électroniques » de distrac- tion (qui ont sûrement des mécanismes d’action communs) sont donc prometteurs en tant que complément aux antal- giques pour la prise en charge de la douleur des grands brûlés. Conflit d’intérêt Aucun. Références [1] Richardson P, Mustard L. The management of pain in the burns unit. Burns 2009;35:921—36.

Douleur du grand brûlé : il n’y pas que les médicaments…

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[2] Turk DC, Swanson KS, Tunks ER. Psychological approaches in thetreatment of chronic pain patients — when pills, scalpels, andneedles are not enough. Can J Psychiatry 2008;53:213—23.

[3] Norrbrink Budh C, Kowalski J, Lundeberg T. A comprehensivepain management programme comprising educational, cognitiveand behavioural interventions for neuropathic pain followingspinal cord injury. J Rehab Med 2006;38:172—80.

[4] Van de Wetering EJ, Lemmens KMM, Nieboer AP, Huijsman R.Cognitive and behavioral interventions for the management ofchronic neuropathic pain in adults — A systematic review. Eur JPain 2010;14:670—81.

[5] Daniel HC, Narewska J, Serpell M, Hoggart B, Johnson R,Rice ASC. Comparison of psychological and physical functionin neuropathic pain and nociceptive pain: implications forcognitive behavioral pain management programs. Eur J Pain2008;12:731—41.

Franck HenryConsultation pluridisciplinaire de la douleur, 216,

avenue de Verdun, 36000 Châteauroux, France

Adresse e-mail : [email protected] sur Internet le 23 octobre 2010

doi:10.1016/j.douler.2010.09.009

Sale temps pour les rhumatismes !

Pain and weather changes

Qui n’a jamais entendu un patient faire des liens entre les« changements de temps » et ses rhumatismes ? Cette asso-ciation d’idée est décrite depuis l’antiquité et la majoritédes patients interrogés dans différentes études estiment quele « mauvais temps » aggrave leurs douleurs. Qu’en est-ilréellement ? Deux de nos collègues norvégiens ont cherchéà en avoir le cœur net grâce à une revue de la littéra-ture, publiée dans l’European Journal of Pain [1]. Au total,neuf études de bonne qualité méthodologique concernantla polyarthrite rhumatoïde ont été « méta-analysées ». Sta-tistiquement, les faits sont là : aucune corrélation entrela douleur et trois facteurs météorologiques (tempéra-ture, pression atmosphérique, humidité) n’a été démontrée.Cependant, deux études apportent des données plus pré-cises (car individuelles) et viennent nuancer le constatglobal : respectivement 11 % et 21 % des patients étaientsensibles à la température, 0 % et 11 % à la pressionatmosphérique, 6 % et 11 % à l’humidité. Qui plus est, laproportion de patients qui n’étaient sensibles à aucun destrois paramètres variait de 79 % à 100 %. Au total, à l’échellemacroscopique, la météorologie n’a pas d’effet significa-tif sur la douleur liée à la polyarthrite rhumatoïde. Enrevanche, une sous-population de patients apparaît plus sen-sible aux changements de temps.

Conflit d’intérêt

Aucun.

Référence

[1] Smedslund G, Birger Hagen K. Does rain really cause pain? Asystematic review of the associations between weather factorsand severity of pain in people with rheumatoid arthritis. Eur JPain 2010, doi:10.1016/j.ejpain.2010.05.003.

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Florentin ClèreConsultation pluridisciplinaire de la douleur,

centre hospitalier, 216, avenue de Verdun, 36000Châteauroux, France

Adresse e-mail : [email protected]

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ouleur du grand brûlé : il n’y pas que lesédicaments. . .

urn-related pain and medications: What else?

es services qui prennent en charge les grands brûlés sontonfrontés au quotidien à la douleur de leurs patients.a place des différentes molécules antalgiques est parfai-ement décrite dans une revue de la littérature publiéen 2009 dans la revue Burns [1]. L’utilisation des antal-iques y est décrite, avec des algorithmes prenant enompte l’intensité et le type de douleur (fond, paroxysmes,rovoquée par les soins, recours aux opioïdes forts,ostopératoire). La place des traitements des douleurseuropathiques semble croissante, comme en témoignen autre article paru dans la même revue [2]. Au total,ette revue de la littérature de 16 pages consacre la quasi-otalité de ses écrits aux approches médicamenteuses àisée antalgique [1]. Seule une demi-page évoque la placees moyens « non-pharmacologiques ». Durant l’année 2010,rois nouveaux articles viennent enrichir la discussion : ilsont tous parus dans le même numéro de la revue Burns et’intéressent à :

l’hypnose, utilisée le plus précocement possible chezles grands brûlés [3]. Cette approche a permis chez23 patients de diminuer l’intensité douloureuse, de ren-forcer l’efficacité des opioïdes et de réduire l’anxiété ;la « distraction multimodale », utilisée pour les change-ments de pansements chez les enfants [4]. Il s’agit d’unesorte de console qui nécessite une attention soutenue etsollicite les sens de la vue et du toucher. Cette tech-nique, associée aux antalgiques chez 20 enfants, a permisun meilleur soulagement que les approches médicamen-teuses utilisées seules ou en association à un jeu vidéoclassique ;la « réalité virtuelle », qui modifie la perception del’environnement dans lequel évolue le patient [5].L’utilisation d’un tel système a diminué significativementla douleur de neuf des 11 patients qui l’ont essayé.

L’hypnose et les méthodes « électroniques » de distrac-ion (qui ont sûrement des mécanismes d’action communs)ont donc prometteurs en tant que complément aux antal-iques pour la prise en charge de la douleur des grandsrûlés.

onflit d’intérêt

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éférences

1] Richardson P, Mustard L. The management of pain in the burnsunit. Burns 2009;35:921—36.

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2] Wong L, Turner L. Treatment of post-burn neuropathic pain:evaluation of pregablin. Burns 2010;36:769—72.

3] Berger MM, Davadant M, Marin C, Wasserfallen JB, Pinget C,Maravic P, et al. Impact of a pain protocol including hypnosisin major burns. Burns 2010;36:639—46.

4] Miller K, Rodger S, Bucolo S, Greer R, Kimble RM. Multimodaldistraction. Using technology to combat pain in young childrenwith burn injuries. Burns 2010;36:647—58.

5] Morris LD, Louw QA, Crous LC. Feasibility and potential effect ofa low-cost virtual reality system on reducing pain and anxiety inadult burn injury patients during physiotherapy in a developingcountry. Burns 2010;36:659—64.

Florentin ClèreConsultation pluridisciplinaire de la douleur,

centre hospitalier, 216, avenue de Verdun, 36000Châteauroux, France

Adresse e-mail : [email protected]

oi:10.1016/j.douler.2010.09.005

’ostéopathie et la douleur : mêmesoncepts, mêmes combats ?

urrent osteopathic medicine: From concepts to painanagement

a douleur est la cause la plus fréquente d’automédicationt de recours aux professionnels de santé. C’est en partante ce constat que la revue internationale de médecinestéopathique est venue à se questionner sur la place de’ostéopathie dans la prise en charge de la douleur [1].ette place semble naturelle et pour cause : la « philosophiestéopathique » répond sur le papier aux besoins d’unexpérience sensorielle et émotionnelle désagréable :le corps n’est rien sans l’esprit (concept de globalité dela personne) ;le corps est capable de s’autoréguler ;les tissus et les grandes fonctions du corps humain sontréciproquement interconnectés ;les traitements entrepris doivent être basés sur ces diffé-rents constats.

Cette philosophie peut aisément se rapprocher duodèle biopsychosocial de la douleur (neurophysiologie,

omportements, émotions, interactions socioculturelles,tc.). Pour autant, malgré des concepts très proches,’ostéopathie peine à démontrer un bon niveau de preuven termes de prise en charge de la douleur (méta-analysese la littérature, recommandations de bonnes pratiques).’auteur de cet article [1] invite ses collègues ostéopathesmodifier leur attitude pour :ne plus se définir comme de purs « thérapeutes manuels »,dont l’approche est réductrice face à la complexité dessituations rencontrées ;élargir leurs connaissances dans les champs psycholo-

giques et sociaux pour mieux répondre aux besoinsglobaux de la personne malade, en adéquation avec la phi-losophie ostéopathique affichée comme globaliste. Celanécessite d’ajouter des « outils thérapeutiques à leurrépertoire » ;

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Actualités

éviter de s’isoler face à la douleur chronique, en partici-pant à des prises en charge multimodales.

Élargir sa vision, ajouter des cordes à son arc, collabo-er avec d’autres professionnels : telles sont les pistes queropose cet article à l’ostéopathe moderne.

onflit d’intérêt

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éférence

1] Penney JN. The biopsychosocial model of pain and contemporaryosteopathic practice. Int J Osteopath Med 2010;13:42—7.

Florentin ClèreConsultation pluridisciplinaire de la douleur,

centre hospitalier, 216, avenue de Verdun, 36000Châteauroux, France

Adresse e-mail : [email protected]

Disponible sur Internet le 23 octobre 2010

oi:10.1016/j.douler.2010.09.004

’expérience de la douleur et saédicalisation

ain experience and its medicalization

orsque qu’une personne dit « j’ai mal », elle a tendance àroire que sa représentation de la douleur est universelle.ans son ouvrage La douleur, expérience et médicalisation,ean-Claude Fondras prouve le contraire en nous faisantoyager dans des univers très différents [1]. L’historien, lehilosophe, le scientifique ont chacun leur propre définitione la douleur. De même, chaque personne percoit la douleure manière individuelle. De ce fait, le médecin aura unerise en charge différente de celle de son collègue ; la per-onne qui présente une douleur aura une attente différentee celle de son voisin. La première partie de cet ouvrage,ntitulée « Des phénomènes aux concepts », expose diffé-ents points de vue scientifiques (biologie, neurosciences)t philosophiques (antique, classique). De leurs divergencesécoulent toujours plus de questions. La douleur est-elleoujours localisable ? Est-elle un état fonctionnel ? Est-ellene subtile rencontre entre le corps et l’esprit ? La secondeartie, intitulée « L’épreuve et sa réplique », s’appuieur l’anthropologie, la phénoménologie et l’expérience dea douleur vécue par des philosophes et des écrivains.orsqu’elle se répète dans le temps (l’auteur parle deréplique de la douleur »), la douleur ne se réduit plus à sa

onction initiale de signal d’alarme, elle devient souffrance.ace à elle, l’individu met en place ses propres « répliquesla douleur » : ces réactions sont extrêmement variables

faibles, fortes, actives, passives). Ainsi Nietzsche, qui

’inscrit dans l’action (allant jusqu’à proposer d’amputerour tenter de supprimer la douleur) et les épicuriensqui estiment pouvoir être heureux malgré la douleur) sonteux exemples parmi d’autres. La dernière partie, intituléeMédecine de la douleur, douleur de la médecine », explique