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Droit Bancaire 1 Droit Bancaire Droit Privé /Semestre 6 Professeur Abdelilah EL MOUTAOUAKIL Enseignant-Chercheur Année universitaire 2019-2020

Droit Bancaire - fsjes-umi.ac.ma · qui deviendront réalité avec la loi de 1993 et qui se renforceront avec les dispositions du Code de Commerce de 1996 et la loi bancaire de 2006

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Droit Bancaire

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Droit Bancaire

Droit Privé /Semestre 6

Professeur

Abdelilah EL MOUTAOUAKIL

Enseignant-Chercheur

Année universitaire 2019-2020

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Introduction

1. Pourquoi la nécessité d’une réforme financière ?

Une réforme qui viendrait unifier le cadre juridique qui engloberait contrairement à

l’ancienne loi de 1967 non seulement les banques mais aussi les autres sociétés de financement

et qui élargirait la notion même d’établissement de crédit et les opérations qu’ils sont habilités

à effectuer. Ainsi, durant plus de vingt ans, les organismes financiers ne pouvaient bénéficier

des dispositions de la loi de 1967 contrairement aux banques et se contentaient de quelques

textes spécifiques, voire n’obéissaient à aucune réglementation comme les sociétés de crédit à

la consommation. Une réforme qui viendrait aussi élargir la concertation entre les différents

intervenants et acteurs dans le secteur. Une réforme qui viendrait enfin garantir plus de

protection aux déposants et aux emprunteurs en réglementant les activités des établissements

de crédit, et en renforçant le contrôle exercé par Bank Al-Maghrib , en instituant des mesures

de sécurité tendant à prévenir les déséquilibres financiers des établissements de crédit et en

instituant enfin des sanctions disciplinaires et pénales graduelles et diversifiées. Des mesures

qui deviendront réalité avec la loi de 1993 et qui se renforceront avec les dispositions du Code

de Commerce de 1996 et la loi bancaire de 2006. Alors que la nouvelle loi n° 103.12 relative

aux établissements de crédit et organismes assimilés du 25 novembre 20141, va intégrer une

nouvelle catégorie d’établissement de crédit, les banques participatives.

2. Qu’est ce qu’un droit bancaire ?

Branche du droit économique2, le droit bancaire est défini comme étant l’ensemble des

règles qui fixent le statut des établissements de crédit. Ces règles permettent à l’Etat

d’intervenir dans le secteur bancaire et donc dans l’économie du pays. Il s’agit d’un droit qui a

pour objet de régir les activités exercées à titre de profession habituelle par les établissements

de crédit. Le droit bancaire est alors à la fois un droit des acteurs et un droit des activités3.

Les opérations bancaires, rappelons-le, sont considérées comme des actes de commerce

pas nature. Tous les actes énumérés par l’article 6 du code de commerce marocain, dont la

banque, le crédit et les transactions financières, sont des actes de commerce par nature. Par

conséquent, et en se basant sur la conception objective octroyant la qualité de commerçant à

celui qui exerce l’une de ces dix-huit activités d’une manière habituelle ou professionnelle, les

établissements de crédit ont la qualité de commerçant. Cette commercialité des activités des

établissements de crédit interdit à certaines personnes l’exercice de cette activité et exclut de

son champs certaines professions et fonctions.

1 BO du 22 janvier 2015. 2 Voir JEANTET, Aspects du droit économique, Mélange Hamel, p.33. 3 Thierry Bonneau, Droit bancaire, Delta Montchrestien, 2003, p. 5.

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Chapitre I

Le cadre juridique

Section I : La loi du 6 juillet 19931

Le cadre institutionnel dans lequel exerçaient les établissements de crédit leurs activités

sous la loi de 1967, étant insuffisant pour les banques et ne concernant pas les sociétés de

financement, la réforme bancaire s’est tracée alors comme objectifs d’abord l’unification du

cadre juridique des banques, des organismes financiers spécialisés et des autres sociétés de

crédit, en les regroupant sous le vocable d’établissements de crédit. Un vocable qui prend en

compte la nature des activités et des opérations effectuées pour définir l’établissement de

crédit et lui reconnaitre cette qualité. Cet objectif et cette volonté d’unifier le régime juridique

des différents organismes bancaires et para-bancaires et les soumettre au même contrôle de la

part des autorités monétaires, ainsi qu’aux mêmes conditions d’exercice de leurs activités, tout

en diversifiant les activités des établissements de crédit, s’adapte et adopte au Maroc pour la

première fois ce qu’on appelle le principe de « l’universalité ». La qualité et la qualification

d’établissement de crédit s’impose ainsi au Maroc grâce à la loi de 1993 et remplace

définitivement la notion restrictive et dépassée de « banque » utilisée par le Décret Royal du 21

avril 19672 (ancienne loi bancaire).

Soumettre ces établissements de crédit à la loi bancaire est alors la plus importante des

conséquences de cette qualité. Ainsi selon l’article 11 de la loi du 6 juillet 1993 « sous réserve,

le cas échéant, des dispositions législatives particulières qui leur sont applicables et de celles

de l’article 12 ci-après, toutes les entreprises considérées comme établissements de crédit au

sens de l’article premier et exerçant leur activité sur le territoire du royaume du Maroc, sont

soumises aux dispositions du présent dahir, quel que soit leur caractère national, régional ou

local et quels que soient le lieu de leur siège social, la nationalité de leurs dirigeants ou celle

des propriétaires de leur capital social ». L’élargissement de cette notion d’établissement de

crédit aux autres organismes et sociétés grâce à la loi de 1993 a permis à ces établissements de

dépasser la sphère des opérations de banque et effectuer des opérations et des activités qui

relèvent d’autres secteurs ou qui accompagnent l’évolution de l’économie et de la technologie

au plan national et international.

Parmi les innovations de la loi de 1993, signalons aussi quatre points importants :

- La définition pour la première fois de l’opération de crédit.

- La définition des moyens de paiement dont la gestion et la mise à disposition sont

considérées comme opérations de banque.

1 Le Dahir portant loi n°1-93-147 du 6 juillet 1993 relatif à l’exercice des activités des établissements de crédit et

à leur contrôle. Bulletin Officiel n°4210 du 7 juillet 1993, p. 333. 2 El Hadi Chaibainou, La nouvelle loi bancaire marocaine. Analyse et commentaire, Editions Datapress,

Casablanca 1993. p. 53.

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- L’introduction de nouvelles opérations dites connexes et annexes effectuées désormais

par les établissements de crédit.

- La définition de l’affacturage et du crédit-bail.

Sous section 1 : L’introduction du principe de l’universalité

En introduisant ce principe la loi de 1993 a ainsi permis d’unifier le régime juridique des

établissements de crédit qui comprennent deux catégories : les banques qui sont habilitées à

effectuer toutes les opérations de banque et les sociétés de financement qui ne peuvent

accomplir que les opérations figurant dans leur décision d’agrément ou dans leurs textes

législatifs propres. L’unification du régime juridique a aussi permis de définir pour la première

fois au Maroc la notion d’établissement de crédit1 qui tire cette qualité des opérations qu’il est

habilité à effectuer et non le contraire. Ainsi l’exercice à titre de profession habituelle de l’une

de ces activités est seul en mesure de conférer à cet établissement la qualité d’établissement de

crédit et lui procurer l’agrément des autorités monétaires du pays.

Sous section 2 : La rénovation du cadre institutionnel

La nouvelle loi a aussi innové par la création de nouveaux organes de consultation et de

contrôle afin d’élargir la concertation entre autorités monétaires et établissements de crédit. Ces

organes sont le Conseil National de la Monnaie et de l’Epargne et le Comité des Etablissements

de Crédit, la Commission de Discipline des Etablissements de Crédit et enfin les Associations

Professionnelles2.

Section II : Le Code de Commerce de 1996

On peut résumer l’apport et les innovations du Code de Commerce au niveau bancaire et

financier comme suit :

- Le Code de Commerce a consacré un titre entier aux contrats bancaires3 qui

facilitent ou permettent certaines opérations bancaires ou de crédit, devenues

indispensables aujourd’hui comme ouvrir un compte en banque, le virement, l’escompte

etc.

1 L’Article premier de la loi de 2006 reprend ainsi la même définition : « Sont considérés comme établissements

de crédit les personnes morales qui exercent leur activité au Maroc, quels que soient le lieu de leur siège social, la

nationalité des apporteurs de leur capital social ou de leur dotation ou celle de leurs dirigeants et qui effectuent, à

titre de profession habituelle, une ou plusieurs des activités suivantes :

- la réception de fonds du public ;

- les opérations de crédit ;

- la mise à la disposition de la clientèle de tous moyens de paiement ou leur gestion. ». 2 Voir Les institutions de concertation, de régulation et de contrôle. 3 Titre VII du livre IV. Les articles de 487 à 544.

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- Le Code de Commerce a adopté les nouveaux moyens de paiement utilisant la

nouvelle technologie et l’informatique comme les cartes bancaires et les transferts

télématiques1.

- Le Code de Commerce a aussi et surtout consacré plusieurs articles à d’autres

contrats devenus très fréquents aujourd’hui en pratiques bancaires comme le crédit-bail

mobilier et immobilier2.

Sans oublier enfin les dispositions et les mesures concernant le chèque développées

avec les effets de commerce3.

Section III : La loi bancaire du 14 février 20064

Cette loi est venue surtout consolider les orientations initiales de la loi de 1993 et accroitre

les pouvoirs de décision et de contrôle de Bank Al-Maghrib, les mesures prudentielles et les

règles de prévention des risques. La loi de 2006 maintient ainsi le principe de l’universalité,

insiste sur l’importance de l’élargissement de la concertation grâce au rôle joué par les

institutions de concertation et de contrôle, ainsi que les associations professionnelles. Cette loi

a surtout renforcé le rôle de contrôle qui incombe à Bank Al-Maghrib. Cet accroissement des

pouvoirs de décision et de contrôle de Bank Al-Maghrib par la loi de 2006 se justifie par la

montée des risques et la nécessité de les prévenir et de surveiller et contrôler les autres acteurs

dans le secteur. Si la loi de 1993 ne permettait à Bank Al-Maghrib le contrôle que des banques

et des sociétés de financement, la loi de 2006 a étendu ce contrôle pour la première fois :

- aux services financiers de la poste (Caisse d’Epargne Nationale, Service des

Comptes Courants et des Chèques Postaux et Service des Mandats Postaux)

- à la Caisse de Dépôt et de Gestion C.D.G

- à la Caisse Centrale de Garantie C.C.G

- aux associations de micro-crédit

- aux banques offshore

- aux entreprises intermédiaires en matière de transferts de fonds

- aux entreprises effectuant le conseil et l’assistance en matière de gestion de

patrimoine

La loi bancaire de 2006 a aussi introduit comme règles prudentielles, deux autres

obligations pour les établissements de crédit :

1 Titre IV du livre III. Les articles de 329 à 333. 2 Traité dans le titre V. les articles de 431 à 442. 3 Voir Livre III du code de commerce. Les articles de 159 à 333. 4 Dahir n ° 1-05-178 du 15 moharrem 1427 portant promulgation de la loi n ° 34-03 relative aux établissements de

crédit et organismes assimilés. B.O. n ° 5400 du 2 mars 2006.

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- Se doter d’un système de contrôle interne approprié qui vise à identifier,

mesurer et surveiller l’ensemble des risques qu’ils encourent et mettre en place des

dispositifs permettant de mesurer la rentabilité de leurs opérations1.

- Un devoir de vigilance qui concerne toute opération dont la cause économique

ou le caractère licite n’est pas apparent.

Parmi les innovations de la loi de 2006 notons aussi :

- Si la loi de 1993 interdisait aux sociétés de financement de recueillir du public

des fonds à vue ou d’un terme inférieur ou égal à 2 ans, la loi de 2006 par le biais de

l’article 11 autorise les sociétés de financement dans le cadre de leur agrément à recevoir

désormais du public des fonds d’un terme supérieur à un an.

- La loi de 2006 a étendu l’acceptation en matière judiciaire, des relevés de compte

des établissements de crédit à tous les clients des établissements de crédit contrairement

à la loi de 1993 qui ne concernait que les clients commerçants. On trouve cette nouvelle

mesure dans l’article 118 de la loi bancaire qui prévoit qu’en « matière judiciaire, les

relevés de comptes établis par les établissements de crédit selon les modalités fixées par

circulaire du Gouverneur de Bank Al-Maghrib, après avis du comité des établissements

de crédit, sont admis comme moyens de preuve entre eux et leurs clients, dans les

contentieux les opposant jusqu’à preuve du contraire ».

La loi de 2006 a aussi mis un terme à l’application aux opérations de dépôts et de crédits

du taux légal des intérêts et du maximum des intérêts conventionnels fixés par le dahir du 9

octobre 1913. Rappelons que le taux légal, fixé à 6% dans le dahir du 9 octobre 1913 était pris

en considération par les tribunaux quand il n’y avait pas de contrat écrit ou lorsque les

établissements de crédit2 omettaient ou négligeaient de déterminer avec précision le taux

débiteur applicable dans les conventions de crédit les liant à leur clientèle. Certains auteurs3

reprochent toutefois à la loi de 2006 certaines lacunes parmi lesquelles le fait de ne pas accorder

la même importance aux relations entre les établissements de crédit et leur clientèle, que

révèlent :

- Les défauts d’une contractualisation systématique des services et des crédits

bancaires.

- Les carences relatives à l’information sur les tarifs bancaires.

- La non introduction de la médiation préalablement aux recours judiciaires4.

- L’absence d’institution de dispositions spécifiques régissant les relations

particulières entre les établissements de crédit et les entreprises en difficulté.

1 Un contrôle interne que consolide l’article 77 de la loi 103.12 qui oblige les établissements de crédit, dans les

conditions fixées par circulaire du Wali de Bank Al-Maghrib, après avis du comité des établissements de crédit,

de se doter d’un système de contrôle interne approprié visant à identifier, mesurer et surveiller l’ensemble des

risques qu’ils encourent et de mettre en place des dispositifs qui leur permettent de mesurer la rentabilité de leurs

opérations. 2 Autrefois des banques et des sociétés de financement. 3 Berrada Mohamed Azzedine, Les techniques de banque, de crédit, et de commerce extérieur au Maroc. Secea 5e

édition, Casablanca 2007, p. 43. 4 Introduite désormais grâce à l’article 158 de la nouvelle loi n° 103.12 relative aux établissements de crédit et

organismes assimilés du 25 novembre 2014 (BO 22 janvier 2015).

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Section IV : La nouvelle loi n° 103.12 relative aux établissements de crédit et

organismes assimilés1

Parmi les objectifs annoncés de cette nouvelle loi :

- Commercialiser au Maroc et donc réglementer les nouveaux produits de la

finance islamique.

- Financer l’économie et développer le secteur bancaire marocain au niveau

régional et international.

- Attirer des investisseurs moyen-orientaux.

- Dynamiser le marché bancaire marocain.

- Accroître le taux de bancarisation de la population marocaine sceptiques vis-à-

vis des autres catégories d’établissements de crédit. Le taux de bancarisation

aujourd’hui ne dépasse pas 56 %.

- Harmoniser la nouvelle loi bancaire avec d'autres textes législatifs dont la loi sur

la protection du consommateur, les lois sur la lutte contre le blanchiment et sur la

concurrence, et la loi relative à la protection des données privées.

Le Conseil Economique, Social et Environnemental estime que la nouvelle loi a comme

principaux apports:

1. L'introduction de nouvelles dispositions relatives aux associations de micro-crédit et

banques offshore2. Tout en restant régies parleurs textes spécifiques, ces dernières seront

soumises aux dispositions de la loi bancaire relatives à l'octroi et au retrait d'agrément, à la

réglementation prudentielle et comptable et au régime des sanctions;

2. L'introduction du statut d'établissements de paiement habilités à effectuer des

opérations de paiement et englobant les sociétés de transfert de fonds régies par la loi en

vigueur, et le développement de dispositions relatives à la définition des conglomérats

financiers et à leur surveillance;

3. L'introduction d'un cadre légal et réglementaire pour l'encadrement de l'activité de

commercialisation des produits et services de banques participatives dans le secteur bancaire

marocain;

4. L'instauration d'un cadre de surveillance macro-prudentielle et de gestion des crises

systémiques et l'introduction de nouvelles règles de gouvernance du secteur bancaire;

5. La mise en conformité de la loi bancaire avec d'autres textes législatifs par sa mise en

adéquation avec la loi sur la protection du consommateur, celles de lutte contre le blanchiment

et sur la concurrence, et celle relative à la protection des données privées;

6. La mise en place de passerelles entre Bank Al Maghrib et le Conseil de la Concurrence

concerné par les situations de fusions relatives aux établissements de crédit.

1 BO 22 janvier 2015. 2 La banque offshore est une banque qui se trouve à l'extérieur du pays de résidence du déposant, généralement

dans un pays qui procure des avantages financiers et juridiques, dont, une protection de la vie privée, une

imposition faible ou nulle etc.

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La nouvelle loi intègre ainsi au Maroc et définit le statut des banques islamiques, appelées

banques participatives comme en Turquie. Le contrôle et la supervision de ces banques sont

confiés au Conseil supérieur des oulémas.

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Chapitre II

Les acteurs

Après l’unification du cadre juridique des banques commerciales et des autres organismes

et établissements à statut légal spécial (section I), et l’élargissement des rapports de

concertation, de régulation et de contrôle entre les autorités monétaires et ces établissements

(section V) ainsi que leurs relations avec la clientèle (section IV), instaurés avant la nouvelle

loi n° 103.12 relative aux établissements de crédit et organismes assimilés du 22 janvier 2015,

cette dernière intègre et définit pour la première fois le statut de nouveaux acteurs comme les

organismes assimilés (section II) et les banques participatives (section III).

Section I : Les établissements de crédit

Sous section 1 : La qualité d’établissement de crédit

Les lois de 1993 et de 2006 ont le mérite d’avoir introduit une définition d’un

établissement de crédit à travers les opérations de banque qu’il peut effectuer. Le premier

article de la nouvelle loi n° 103.12 reprend cette définition : « Sont considérés comme

établissements de crédit les personnes morales qui exercent leur activité au Maroc, quels

que soient le lieu de leur siège social, la nationalité des apporteurs de leur capital social ou

de leur dotation ou celle de leurs dirigeants et qui effectuent, à titre de profession habituelle,

une ou plusieurs des activités suivantes :

- la réception de fonds du public ;

- les opérations de crédit ;

- la mise à la disposition de la clientèle de tous moyens de paiement, ou leur

gestion.».

Le législateur marocain maintient ainsi la conception objective1 retenue par les lois de

1993 et 20062. C’est l’accomplissement à titre de profession habituelle de l’une des

opérations de banque prévues par la loi qui confère à la personne morale qui l’exerce la qualité

d’établissement de crédit.

Sous section 2 : La distinction entre établissements de crédit

1 On trouve dans cette notion la même conception objective du droit commercial pour qui l’acte de commerce est

le fondement pour remonter à la personne qui l’effectue. 2 Ces deux lois ne liaient plus les opérations de dépôts et de crédit et leur exercice simultané pour être considéré

comme un établissement de crédit.

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Aux termes de l’article 10 de la nouvelle loi n° 103.12, on distingue entre deux catégories

d’établissements de crédit, qui sont unis par le même cadre juridique depuis 1993: les banques

(paragraphe 1) et les sociétés de financement (paragraphe 2). Ces banques et ces sociétés de

financement peuvent être classées par Bank Al-Maghrib en sous-catégories, en fonction des

opérations qu’elles sont autorisées à effectuer et de leur taille.

Paragraphe 1 : Les banques

Les banques au Maroc sont généralement soit des banques privées comme Attijari Wafa

Bank, soit des établissements bancaires à caractère public ou semi-public comme le Crédit

Agricole du Maroc etc. La loi autorise toutes ces banques à exercer outre les opérations de

banque par nature (réception des fonds du public, opérations des crédits, gestion et mise à

disposition des moyens de paiements), des opérations connexes et annexes et procéder à des

prises de participation. L’article 12 de la nouvelle loi n° 103.12 permet aux banques qui sont

seules à pouvoir être habilitées à recevoir du public des fonds à vue ou d’un terme égal ou

inférieur à deux ans, d’être agréées en vue d’exercer toute ou partie des activités visées aux

articles 1, 71 et 162.

Paragraphe 2 : Les sociétés de financement

Ce sont des sociétés soumises depuis 1993 au droit bancaire marocain et au contrôle de

Bank Al Maghrib dans le cadre du principe de l’unification et de l’universalité. L’article 13 de

1 Article 7 : « Les établissements de crédit peuvent également effectuer, sous réserve du respect des dispositions

législatives et réglementaires applicables en la matière, les opérations ci-après :

1) les services d’investissement visés à l’article 8 ci-après ;

2) les opérations de change ;

3) les opérations sur or, métaux précieux et pièces de monnaie ;

4) la présentation au public des opérations d’assurance de personnes, d’assistance, d’assurance-crédit et toute autre

opération d’assurance conformément à la législation en vigueur;

5) les opérations de location de biens mobiliers ou immobiliers, pour les établissements qui effectuent, à titre

habituel, des opérations de crédit-bail. 2 Article 16 : « 1) Sont considérés comme services de paiement :

— les opérations de transfert de fonds ;

— les dépôts et les retraits en espèces sur un compte de paiement ;

— l’exécution d’opérations de paiement par tout moyen de communication à distance, à condition que l’opérateur

agisse uniquement en qualité d’intermédiaire entre le payeur et le fournisseur de biens et services ;

— l’exécution de prélèvements permanents ou unitaires, d’opérations de paiement par carte et l’exécution de

virements, lorsque ceux-ci portent sur des fonds placés sur un compte de paiement.

On entend par compte de paiement tout compte détenu au nom d’un utilisateur de services de paiement et qui est

exclusivement utilisé aux fins d’opérations de paiement.

2) Ne sont pas considérés comme services de paiement, les opérations de paiement effectuées par :

— un chèque tel que régi par le Code de commerce ;

— une lettre de change tel que régie par le Code de commerce ;

— un mandat postal émis et / ou payé en espèces ;

— tout autre titre similaire sur support papier.

Les modalités d’exercice des services de paiement sont arrêtées par circulaire du wali de Bank Al-Maghrib, après

avis du comité des établissements de crédit.

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la nouvelle loi n°103.12 n’autorise les sociétés de financement à exercer, parmi les activités

visées à l’article premier et aux paragraphes 2 a 5 de l’article 7, que celles précisées dans les

décisions d’agrément qui les concernent ou, éventuellement, dans les dispositions législatives

ou réglementaires qui leur sont propres. Toutefois, selon les termes de l’article 14, par

dérogation aux dispositions de l’article 12, ces sociétés peuvent être agréées, elles aussi, dans

les formes et les conditions prévues à l’article 34, à recevoir du public des fonds d’un terme

supérieur à un an.

Il y a deux catégories de sociétés de financement, celles dont les opérations sont limitées

par des dispositions législatives ou réglementaires propres, ou celles dont l’activité est précisée

dans leur agrément.

I. Les sociétés de financement dont les opérations sont limitées dans la décision

d’agrément

Ce sont généralement des sociétés de crédit à la consommation, de crédit-bail mobilier et

immobilier, des sociétés de cautionnement mutuel, d’affacturage, de crédits d’équipement, de

capital risque et d’investissement etc. Le système de distribution du crédit au Maroc1 est tout à

fait semblable au système français. Les deux systèmes ont subi presque les mêmes

développements et les mêmes étapes d’encadrement et de désencadrement depuis la seconde

guerre mondiale. Le marché du crédit est partagé entre les banques de dépôt traditionnelles et

les établissements financiers spécialisés, dits sociétés de financement.

Avant la loi de 1993, aucun texte de caractère général n’a été consacré aux sociétés de

financement à part le décret royal portant loi du 21 avril 1967 relatif à la profession bancaire et

au crédit, qui définit le cadre juridique de la réglementation des intermédiaires financiers, mais

qui n’évoque aucunement une réglementation des sociétés de financement. Un contexte

juridique peu restrictif qui a favorisé la création effrénée des sociétés de crédit. Leur nombre a

doublé en quelques années.2 Une atmosphère qui a permis à ces sociétés de développer des

habitudes professionnelles inspirées le plus souvent de la réglementation du crédit en France.

Des usages qui sont respectés par ces sociétés du simple fait, qu’elles y trouvent leur compte et

1 C’est un système qui comprend quatre catégories d’établissements distincts :

- Les banques de dépôts qui reçoivent du public des dépôts à vue ou à terme.

- Les banques d’affaires, dont l’activité principale est la prise et la gestion de participation dans les affaires

existantes ou en formation, et l’ouverture de crédits sans limitation de durée aux entreprises publiques ou privées,

qui bénéficient de ces participations.

- Les banques de crédit à long et moyen terme sont celles dont l’activité principale consiste à ouvrir des crédits

dont le terme est au moins égal à deux ans.

- Les établissements financiers qui ont pour mission de servir d’intermédiaire dans les opérations portant sur les

valeurs mobilières et les fonds d’état, les effets de commerce ou les effets publics, d’effectuer des opérations de

change, d’escompter, prendre en nantissement ou encaisser des effets de commerce, des chèques et des effets

publics. 2 Laraqui HOUSSAINI HAMZA, Le crédit à la consommation et le développement au Maroc. Thèse Es sciences

Economiques. Université Hassan II- Casablanca. Juin 1988. p.53.

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parce que l’inobservation de ces usages peut les exposer à un double risque, celui de la

réprobation du milieu professionnel et de la perte d’une partie de la clientèle.1

Interdites d’avoir des guichets pour recueillir les dépôts à l’image des banques, et donc

d’ouvrir des agences, les sociétés de crédit ont des représentants à travers tout le Maroc. Le

marché marocain de la distribution du crédit à la consommation réparti entre l’équipement

domestique et le crédit automobile2, est monopolisé par quelques sociétés comme la société

Crédit-Eqdom, qui symbolise chez nombre de familles marocaines l’acte du crédit lui-même.

Elles la confondent souvent avec les autres canaux et formes de crédit, car elle a des

représentants présents un peu partout au Maroc. Cette société a pour objet toutes les opérations

de financement et de crédit, de nature à permettre ou faciliter le paiement à terme de tout

appareil, articles électroménagers, mobilier et généralement des biens meuble etc.3

Etant semblable au marché français, le marché marocain est lui aussi affecté des mêmes

défauts. A savoir, une concentration excessive, puisque deux ou trois établissements spécialisés

assurent presque la totalité du crédit à la consommation. S’ajoute à cela une absence de toute

concurrence. Ces établissements font en sorte d’éviter toute concurrence qui peut nuire à leurs

intérêts. Enfin on remarque l’existence de quelques complications inutiles, dues au nombre

élevé des formes de crédit proposées. Sans oublier aussi la rigidité des méthodes et des formules

pratiquées, puisque la plupart des prêts consentis sont caractérisés par la fixité des taux et de la

durée.4 Le travail des professionnels de la finance est marqué par le manque de souplesse et de

flexibilité et d’un effet de sclérose des structures. Un système de distribution de crédit qui se

présente finalement comme comprenant de nombreux archaïsmes.5

II. Les sociétés de financement dont les opérations sont limitées par les dispositions

législatives ou réglementaires propres

Ce sont des sociétés constituées sous forme d’une société anonyme à capital fixe et qui

doivent après la loi de 1993 être agréées en tant que sociétés de financement. Parmi ces sociétés

on trouve surtout la Caisse Marocaine des Marchés, créée par arrêté du Directeur des Finances

du 29 aout 1950 modifié par arrêté du Ministre des Finances du 12 juin 1964, comme une

société anonyme de droit privé, et dont l’objet est le financement des entreprises ayant des

marchés publics de travaux ou de fournitures.

Sous section 3 : Les activités des établissements de crédit

1 Mohammed Ali MEKOUAR, La vente à crédit des véhicules automobiles. DAR EL KITAB. Casablanca. 1977,

p. 171. 2 Pour écouler leur production d’une façon plus étendue et rapide, les grandes firmes automobiles ont créé leurs

propres sociétés de crédit. 3 Laraqui HOUSSAINI HAMZA op. cit. p.202. 4 Bernard LIVIAN, « Le consommateur de crédit » in Le Consommateur, 81è Congrès des Notaires de France.

Tome II. Lyon 1985, p. 1341. 5 Ibid.

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Les établissements de crédit sont des personnes morales qui exercent leur activité au

Maroc, quels que soient le lieu de leur siège social, la nationalité des apporteurs de leur capital

social ou de leur dotation ou celle de leurs dirigeants et qui effectuent, à titre de profession

habituelle, une ou plusieurs de ces trois opérations par nature : la réception de fonds du public

(paragraphe 1), les opérations de crédit (paragraphe 2) et la mise à la disposition de la clientèle

de tous moyens de paiement, ou leur gestion (paragraphe 3).

Paragraphe 1 : La réception de fonds du public

Aux termes de l’article 13 de la loi 103.12, les banques sont seules à pouvoir être habilitées

à recevoir du public des fonds à vue ou d’un terme égal ou inférieur à deux ans, alors que les

sociétés de financement ne peuvent être agréées à recevoir du public des fonds que d’un terme

supérieur à un an selon l’article 14.

Qu’est ce qu’un fonds ?

Sont considérés comme fonds reçus du public aux termes de l’article 2 de la loi 103.12, les

fonds qu'une personne recueille de tiers sous forme de dépôt ou autrement, avec le droit d'en

disposer pour son propre compte, à charge pour elle de les restituer.

Sont donc assimilés aux fonds reçus du public :

- les fonds déposés en compte à vue, avec ou sans préavis, même si le solde du

compte peut devenir débiteur ;

- les fonds déposés avec un terme ou devant être restitués après un préavis ;

- les fonds versés par un déposant avec stipulation d’une affectation spéciale, si

l’établissement qui a reçu le dépôt ne le conserve pas en l’état, à l’exception des fonds

versés auprès des sociétés légalement habilitées à constituer et gérer un portefeuille de

valeurs mobilières ;

- les fonds dont la réception donne lieu à la délivrance, par le dépositaire, d’un

bon de caisse ou de tout billet portant intérêt ou non1.

1 Ne sont pas considérés comme fonds reçus du public selon l’article 2 :

-les sommes laissées en compte, dans une société, par les associés en nom, les commanditaires et les commandités,

les associés, les gérants, les administrateurs, les membres du directoire ou du conseil de surveillance et les

actionnaires, détenant 5 % au moins du capital social ;

-les dépôts du personnel d’une entreprise lorsqu’ils ne dépassent pas 10 % de ses capitaux propres ;

-les fonds provenant de concours d’établissements de crédit et des organismes assimilés visés à l’article 11;

- les fonds inscrits dans les comptes de paiement prévus à l’article 16.

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Dans cette opération ou activité, il y a un fonds reçu d’un tiers appelé « public ». Ce tiers

est généralement défini comme toute personne physique ou morale commerçante ou particulière

autre que celle qui reçoit les fonds. La remise des fonds peut prendre diverses formes (dépôt,

prêt etc.) et qui peut être directe sous forme de versement d’espèces, d’ordre de virement etc.,

ou indirecte sous forme de mandat de recouvrement de créance. Il y a aussi une obligation de

restitution, c'est-à-dire que la personne qui reçoit les fonds du public, qui est généralement une

banque, a l’obligation de les restituer selon la volonté de ce tiers. Et un droit de la personne qui

reçoit les fonds d’en disposer pour son propre compte, à charge pour elle comme cela a été dit

de les restituer1.

Paragraphe 2 : Les opérations de crédit

Si les banques ont l’exclusivité de recevoir des fonds du public2, la distribution de crédit

est une activité que se partagent tous les établissements de crédit, à savoir, les banques et les

sociétés de financement. L’article 3 de la loi 103.12 reprend la définition de l’opération de crédit

comme énoncée la première fois par la loi de 1993. Ainsi on désigne par une opération de crédit

tout acte, à titre onéreux, par lequel une personne :

- met ou s’oblige à mettre des fonds à la disposition d’une autre personne, à charge

pour celle-ci de les rembourser ;

- ou prend, dans l’intérêt d’une autre personne, un engagement par signature sous

forme d’aval3, de cautionnement ou de toute autre garantie.

En même temps sont assimilées à des opérations de crédit :

- les opérations de crédit-bail et de location avec option d’achat et assimilées;

- les opérations d’affacturage ;

- les opérations de vente à réméré d’effets et de valeurs mobilières et les opérations

de pension telles que prévues par la législation en vigueur.

Cet article nous propose en réalité deux catégories de crédit : des opérations de crédit par

nature (I) et des opérations de crédit par assimilation (II).

I. Les opérations de crédit par nature

1 Ce qui exclut de ces opérations bien entendu les subventions ou les aides non remboursables, les dons et les

libéralités. 2 Les sociétés de financement peuvent être agréées à recevoir du public des fonds d’un terme supérieur à un an

selon l’article 14. 3 Garantie donnée sur une lettre de change, un billet à ordre ou un chèque. L’aval doit en principe indiquer pour le

compte de qui il est donné. Le donneur d’aval devient garant du paiement de l’effet de commerce. Il devra donc

l’honorer si, à l’échéance, la personne pour le compte de qui l’aval a été donné se dérobe à son obligation.

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Il s’agit de tout acte par lequel une personne met ou s’oblige à mettre des fonds à la

disposition d’une autre. Cette opération peut être à court, moyen ou long terme.

Un acte qui est accompli à titre onéreux, c'est-à-dire que la personne qui met ou s’oblige

à mettre des fonds à la disposition d’une autre personne ou prend dans l’intérêt de celle-ci un

engagement par signature, perçoit une rémunération. Cette rémunération est directe, et revêt

généralement la forme de versement d’intérêt, d’agios, de commissions…

II. Les opérations de crédit par assimilation

Sont donc assimilées à des opérations de crédit aux termes de l’article 3 :

- les opérations de crédit-bail et de location avec option d’achat et assimilées;

- les opérations d’affacturage ;

- les opérations de vente à réméré d’effets et de valeurs mobilières et les

opérations de pension telles que prévues par la législation en vigueur.

Le législateur ne fait ainsi que suivre et faire entrer dans le champ de la législation des

opérations et des pratiques déjà très répandues dans la profession bancaire. Rappelons que les

banquiers ne cessent d’innover et de proposer de nouveaux produits et formules qui imposent

au législateur de suivre, laissant la doctrine souvent en retard.

Paragraphe 3 : la mise à la disposition de la clientèle de tous moyens de paiement,

ou leur gestion.

La révolution technologique et informatique a permis aux banquiers et aux professionnels

du crédit d’utiliser et de proposer de nouveaux instruments de paiement1 plus sophistiqués et

permettant une rapidité sans précédant dans certaines opérations devenues aujourd’hui

indispensables pour les entreprises et les particuliers. Les banquiers voulant ainsi améliorer les

services rendus aux clients et réduire en même temps les coûts de gestion des moyens de

paiement. On parle désormais de la monétique ou de monnaie électronique qui est un ensemble

de techniques informatiques, magnétiques, électroniques et télématiques qui permettent

l’échange de fonds sans support papier et implique une relation tripartite entre les banques, les

commerces et les consommateurs.

1 Nous connaissons déjà les moyens de paiement classiques comme le chèque, les effets de commerce etc.

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Selon l’article 6 de la loi 103.12 « Sont considérés comme moyens de paiement, tous les

instruments qui, quel que soit le support ou le procédé technique utilisé, permettent à toute

personne de transférer des fonds. ». La monnaie électronique est considérée également comme

un moyen de paiement. L’article 6 la définit comme étant toute valeur monétaire représentant

une créance sur l'émetteur, qui est:

- stockée sur un support électronique ;

- émise contre la remise de fonds d'un montant dont la valeur n'est pas inférieure

à la valeur monétaire émise ;

- et acceptée comme moyen de paiement par des tiers autres que l'émetteur de la

monnaie électronique.

En consacrant ces nouveaux moyens de paiement depuis 1993, le législateur marocain a

voulu suivre les développements rapides de ces moyens de paiement et en même temps

contrôler l’évolution de ces opérations et leurs risques afin de protéger les déposants.

L’outil favori de la monétique est ce qu’on appelle une carte bancaire, qui peut être une

carte de crédit, de paiement, de retrait etc. Au début symbole de l’appartenance à une certaine

classe, la carte bancaire semble aujourd’hui plus généralisée surtout avec le souci de la

bancarisation et de l’accès aux services financiers pour tout le monde. L’utilisation de plus en

plus des cartes bancaires1 a nécessité l’ouverture de centaines de guichets automatiques à

travers tout le pays et ceci avant même que le législateur marocain n’intervient pour réglementer

cette technique profitant au début d’un vide législatif et réglementaire inquiétant.

Rappelons enfin, concernant les activités des établissements de crédit, qu’il est interdit

aux termes de l’article 18 de la loi 103.12, à toute personne non agréée en qualité

d'établissement de crédit ou d’établissement de paiement d'effectuer, à titre de profession

habituelle, ces mêmes opérations. Toutefois, toute personne peut pratiquer les opérations

suivantes sans être considérée comme un établissement de crédit:

- consentir à ses contractants, dans l’exercice de son activité professionnelle, des

délais ou des avances de paiement, notamment sous forme de crédit commercial;

- conclure des contrats de location accession à la propriété immobilière;

- procéder à des opérations de trésorerie avec des sociétés ayant avec elle,

directement ou indirectement, des liens de capital conférant à l’une d’elles un pouvoir

de contrôle effectif sur les autres sociétés ;

- émettre des valeurs mobilières ainsi que des titres de créances négociables sur

un marché réglementé ;

- consentir des avances sur salaires ou des prêts à ses salariés pour des motifs

d’ordre social ;

- émettre des bons et des cartes délivrées pour l’achat, auprès d’elle, de biens ou

de services déterminés dans les conditions et suivant les modalités fixées par circulaire

du wali de Bank Al-Maghrib, après avis du comité des établissements de crédit ;

1 Des millions de porteurs et de cartes bancaires circulent actuellement dans le marché marocain.

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- prendre ou mettre en pension des valeurs mobilières inscrites à la cote de la

bourse des valeurs, des titres de créances négociables ou des valeurs émises par le Trésor

;

- remettre des espèces en garantie d’une opération de prêt de titres régie par les

dispositions de la loi n° 45- 12 relative au prêt de titres.

Section II : Les organismes assimilés

Selon l’article 11 de la loi 103.12, les établissements de paiement, les associations de

micro-crédit1, les banques offshore2, les conglomérats financiers3, les compagnies financières4,

la Caisse de Dépôt et de Gestion et la Caisse Centrale de Garantie sont désormais considérés

comme organismes assimilés aux établissements de crédit.

Les établissements de paiement introduits la première fois par la nouvelle loi, sont selon

les articles 15 et 16, ceux qui offrent un ou plusieurs des services de paiement suivants5 :

- les opérations de transfert de fonds ;

- les dépôts et les retraits en espèces sur un compte de paiement ;

- l’exécution d’opérations de paiement par tout moyen de communication à distance, à

condition que l’opérateur agisse uniquement en qualité d’intermédiaire entre le payeur et le

fournisseur de biens et services ;

- l’exécution de prélèvements permanents ou unitaires, d’opérations de paiement par carte

et l’exécution de virements, lorsque ceux-ci portent sur des fonds placés sur un compte de

paiement qui est tout compte détenu au nom d’un utilisateur de services de paiement et qui est

exclusivement utilisé aux fins d’opérations de paiement.

Ces établissements peuvent aussi, dans le respect des dispositions législatives et

réglementaires en vigueur, exercer les opérations de change. Toutefois, ne sont pas soumis aux

dispositions de la nouvelle loi selon l’article 23 :

- Bank Al-Maghrib ;

- la Trésorerie générale du Royaume ;

- le Service de Mandats Postaux ;

- les entreprises d’assurances et de réassurance régies par la loi n°17-99 portant code des

1 Les associations de microcrédit sont des institutions de micro-finance qui octroient des prêts de faible montant à

des entrepreneurs ou à des artisans qui ne peuvent accéder aux prêts bancaires classiques. 2 La banque offshore est une banque qui se trouve à l'extérieur du pays de résidence du déposant, généralement

dans un pays qui procure des avantages financiers et juridiques, dont, une protection de la vie privée, une

imposition faible ou nulle etc. 3 Selon l’article 21, constitue un conglomérat financier, tout groupe remplissant les trois conditions suivantes :

- être placé sous contrôle unique ou influence notable d’une entité du groupe ayant son siège social ou activité

principale au Maroc ;

- deux au moins des entités du groupe doivent appartenir au secteur bancaire et/ ou au secteur de l’assurance et/

ou relèvent du secteur du marché des capitaux ;

- les activités financières exercées par le groupe sont significatives. 4 Les compagnies financières, selon l’article 20, sont les sociétés qui ont pour filiales, exclusivement ou

principalement, un ou plusieurs établissements de crédit. 5 Toutefois Ne sont pas considérés comme services de paiement, les opérations de paiement effectuées par :

- un chèque tel que régi par le Code de commerce ;

- une lettre de change tel que régi par le Code de commerce ;

- un mandat postal émis et / ou payé en espèces ;

- tout autre titre similaire sur support papier.

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assurances et les organismes de prévoyance et de retraite ;

- les organismes à but non lucratif qui, dans le cadre de leur mission et pour des raisons

d’ordre social, accordent sur leurs ressources propres des prêts à des conditions préférentielles

aux personnes qui peuvent en bénéficier en vertu des statuts de ces organismes ;

- le Fonds Hassan II pour le développement économique et social régi par la loi n° 36-01 ;

- les institutions financières internationales et les organismes publics de coopération

étrangers autorisés par une convention conclue avec le gouvernement du Royaume du Maroc à

exercer une ou plusieurs opérations visées à l’article 1.

Section III : Les banques participatives

Aux termes de l’article 54, sont considérées comme banques participatives les personnes

morales habilitées1 à exercer à titre de profession habituelle les activités suivantes :

Les activités de l’article 1 :

- la réception de fonds du public ;

-les opérations de crédit ;

- la mise à la disposition de la clientèle de tous moyens de paiement, ou leur gestion.

Les activités de l’article 55 :

- recevoir du public des dépôts d’investissement dont la rémunération est liée aux résultats

des investissements convenus avec la clientèle.

Les dépôts d’investissement étant des fonds recueillis par les banques participatives

auprès de leur clientèle en vue de leur placement dans des projets et selon des modalités

convenus entre les parties.

Les activités de l’article 58 :

- procéder au financement de la clientèle à travers divers produits qui appartiennent à la

finance islamique dont la Mourabaha, l’Ijara etc. Les caractéristiques techniques de ces produits

ainsi que les modalités de leur présentation à la clientèle sont fixées par circulaire du wali de

Bank Al-Maghrib, après avis du comité des établissements de crédit et avis conforme du

Conseil supérieur des Ouléma visé à l’article 62.

Toutefois ces activités et opérations ne doivent pas impliquer la perception et / ou le

versement d’intérêt.

1 La loi autorise ces banques à exercer dans les mêmes conditions prévues à l’article 54, les opérations prévues

aux articles 7, 8, 9 et 16.

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Section IV : La clientèle

La position privilégiée du banquier lui impose certes d’être prudent et vigilant pour

déceler les anomalies apparentes que présentent les opérations qu’on lui demande d’effectuer

et de tout mettre en œuvre pour éviter la réalisation d’un préjudice, mais en même temps lui

permet de collecter des informations confidentielles très importantes qui entrent souvent dans

la sphère de la vie privée des clients particuliers (sous section 4). Ces clients ont aussi le droit

au respect de leur droit à l’information (sous section 3), au crédit (sous section 2) et au compte

(sous section 1).

Sous section 1 : Le droit au compte

Il y a actuellement un important débat au sein de l’Union Européenne sur cette notion de

« droit au compte » et sur ce qu’on appelle l’exclusion du droit au compte ou « exclusion

financière ». Le droit à un compte bancaire pour le plus grand nombre de citoyens, répond et

s’accorde bien avec l’objectif annoncé dans chaque pays qui modernise et démocratise son

système financier, à savoir, la bancarisation42.

Au Maroc, le droit à un compte bancaire43 est prévu depuis 2006 (article 112). Un droit

que reprend l’article 150 de la nouvelle loi 103.12 qui confère à toute personne qui ne dispose

pas d’un compte bancaire et qui s’est vue refuser son ouverture par plusieurs établissements de

crédit, de demander à Bank Al-Maghrib de désigner un établissement bancaire auprès duquel

elle pourra se faire ouvrir ce compte. Cet établissement est alors tenu de s’exécuter sous peine

de sanctions.

Cependant, rien n’oblige l’établissement de crédit à accorder au client en question tous

les services d’habitude liés à l’ouverture d’un compte. Généralement cet établissement

acceptera cette ouverture mais limitera les services aux opérations de caisse seulement : des

versements, des virements, des recouvrements etc.

42 Le taux de bancarisation usuellement utilisé par Bank Al-Maghrib qui correspond au rapport entre le nombre de

comptes et le total de la population a atteint 40% de la population en 2007. On estime que le taux de bancarisation

au Maroc devrait croître de plus de 50% sur la période 2007-2013 pour dépasser après la barre des 60%. 43 Il s’agit surtout d’un compte de dépôt ou compte de chèque.

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Sous section 2 : Le droit à l’information

L’information des clients sur les conditions pratiquées par un établissement de crédit est

devenue obligatoire grâce aux lois bancaires et au code de commerce. Ainsi selon l’article 154,

les conditions appliquées par les établissements de crédit à leurs opérations, notamment en

matière de taux d’intérêt débiteurs et créditeurs, de commission et de régime de dates de valeur,

doivent être portées à la connaissance du public selon les modalités fixées par circulaire du

Wali de Bank Al-Maghrib, après avis du comité des établissements de crédit, et convention type

précisant les clauses minimales de la convention de compte doit édictée par circulaire du Wali

de Bank Al-Maghrib, après avis du comité des établissements de crédit (art 151).

L’article 159 de la nouvelle loi bancaire 103.12 permet à toute personne qui s’estime lésée

du fait d’un manquement par un établissement de crédit aux dispositions de la loi et des textes

pris pour son application dans une ou plusieurs opérations réalisées, de saisir de Bank Al-

Maghrib44 qui réservera à la demande la suite qu’elle juge appropriée. Une disposition, qui,

malgré son côté positif, nous parait insuffisante, contrairement à l’obligation d’information que

doivent respecter les dirigeants des établissements de crédit, sous peine de sanctions

importantes, envers le ministre des finances, le Gouverneur de Bank Al-Maghrib et le Conseil

d’administration ou le Conseil de surveillance de l’établissement en question, qui doit les

informer de toute anomalie ou événement grave survenu dans l’activité ou la gestion de

l’établissement et susceptible d’en compromettre la situation ou de porter atteinte au renom de

la profession.

Certes, l’article 157 impose aux établissements de crédit de se doter d’un dispositif interne

permettant un traitement efficace et transparent des réclamations formulées par leur clientèle,

adapté à leur taille, leur structure et la nature de leurs activités. Les modalités de traitement de

ces réclamations sont arrêtées par circulaire du Wali de Bank Al-Maghrib, après avis du comité

des établissements de crédit. Les établissements de crédit doivent aussi selon l’article 158

adhérer à un dispositif de médiation bancaire visant le règlement à l’amiable des litiges qui les

opposent à leurs clients. Les modalités de fonctionnement de ce dispositif sont aussi arrêtées

par circulaire du Wali de Bank Al-Maghrib, après avis du comité des établissements de crédit.

Les banquiers et les professionnels du crédit sont supposés partager avec leurs clients,

entreprises et particuliers, une obligation d’informer et un devoir de s’informer. L’inégalité

foncière de ces deux parties contractantes justifie cette obligation précontractuelle de

renseignement qui pèse d’abord sur les professionnels et qui découle du fait que le professionnel

détient souvent des informations dont le client ne dispose pas et surtout parce que l’ignorance

du client est le plus souvent légitime45. Les professionnels ont instauré des pratiques rigoureuses

44 Bank Al-Maghrib peut procéder à des contrôles sur place ou demander à l’établissement concerné de lui fournir,

dans les délais fixés par ses soins, tous les documents et renseignements qu’elle estime nécessaires pour l’examen

de ces demandes. 45 Anne Sinay- Cytermann, « Les relations entre professionnels et consommateurs en droit français » in La

protection de la partie faible dans les rapports contractuels. Comparaisons Franco-belges. LGDJ. Paris. 1996. p.

251.

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qui leur permettent d’être suffisamment éclairés sur la situation financière, la solvabilité et le

sérieux du client. Les clients sont souvent invités à fournir un dossier très complet, et répondre

à un questionnaire qui va au-delà des données personnelles et de la vie privée.

Section V : Les institutions de concertation, de régulation et de contrôle

Avant la réforme de 1993 et 2006, le cadre institutionnel était représenté par le Ministère

des Finances, Bank Al-Maghrib, le Comité du Crédit et du Marché Financier, la Commission

Restreinte du même Comité, et le Groupement Professionnel des Banques du Maroc. Après ces

deux réformes46, la loi 103. 12 consolide aujourd’hui le même cadre institutionnel constitué de

plusieurs institutions de concertation (sous section 1), de régulation et de contrôle (sous section

2).

Sous section 1 : Les institutions de concertation

Plusieurs organes ont été créés pour permettre aux autorités monétaires et aux autres

acteurs, les professionnels surtout, une concertation élargie avant la prise de toute décision

importante qui concerne le développement et l’avenir du secteur et qui a un impact direct sur

les intérêts de tous les acteurs. Les autorités monétaires trouvent dans le Conseil National du

Crédit et de l’Epargne (paragraphe 1), le Comité des Etablissements de Crédit (paragraphe 2)

et la Commission de Discipline des Etablissements de Crédit (paragraphe 3), des organes de

consultation incontournables avant toute prise de décision. Alors que les établissements de

crédit agréés en tant que banques ou en tant que banques participatives, les banques offshore,

les sociétés de financement et les établissements de paiement trouvent dans leurs associations

professionnelles (paragraphe 4) les intermédiaires les plus aptes à défendre leurs intérêts face

aux autorités de tutelle.

46 Surtout la loi de 2006 et ses innovations.

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Paragraphe 1 : Le Conseil National du Crédit et de l’Epargne

Autrefois dénommé Conseil National de la Monnaie et de l’Epargne (loi de 1993), il est

aujourd’hui après la loi de 2006 dénommé Conseil National du Crédit et de l’Epargne. Ce

conseil, aux termes de l’article 27 de la loi 103.12, est composé47 de représentants de

l’administration, de représentants des organismes à caractère financier, de représentants des

chambres professionnelles, de représentants des associations professionnelles et de personnes

désignées par le Chef du gouvernement en raison de leur compétence dans le domaine

économique et financier.

Il s’agit d’un organe de réflexion, de consultation et de débat, permettant aux différents

acteurs d’exposer leurs points de vue quant au développement du secteur, et aux autorités

monétaires une prise de décision éclairée et qui bénéficie du consensus de tous les acteurs. Au

sein de ce Conseil sont donc débattues en premier lieu les questions intéressant le

développement de l’épargne ainsi que de l’évolution de l’activité des établissements de crédit

et des organismes assimilés, en formulant des propositions au gouvernement dans les domaines

qui entrent dans sa compétence. Il peut aussi constituer en son sein des groupes de travail pour

mener toutes études qu’il juge utiles ou qui peuvent lui être confiées par le ministre chargé des

finances ou le wali de Bank Al-Maghrib. Il peut demander à Bank Al-Maghrib et aux

administrations compétentes de lui fournir toute information utile à l’accomplissement de sa

mission. Le conseil national du crédit et de l’épargne est présidé par le ministre chargé des

finances, alors que son secrétariat est assuré par Bank Al-Maghrib.

A propos des groupes de recherche constitués en son sein, rappelons que la loi de 1993 a

même prévu la constitution obligatoire au sein du Conseil National de la Monnaie et de

l’Epargne de l’un de ces groupes dénommé le « Groupe de Conjoncture Economique et

Sociale » qui devait obligatoirement se pencher sur les rapports entre les établissements de

crédit et la clientèle et sur l’information du public. Certains auteurs48 vont même jusqu’à

considérer que la création obligatoire d’un tel groupe s’inscrit dans la politique générale de

défense des consommateurs puisque invité à examiner en particulier les points suivant :

- les modalités de publication par les établissements de crédit des conditions de

leurs opérations ;

- les questions liées aux incidents de paiement de chèques et d’effets de commerce

ainsi qu’aux nouveaux moyens de paiement ;

- les problèmes d’octroi et de coût des crédits et l’amélioration des procédures

dans ce domaine ;

- l’analyse des comportements des épargnants ;

- les problèmes rencontrés par certaines catégories de clientèle notamment les

particuliers dans leurs rapports avec les agences bancaires ;

- la bancarisation de l’économie marocaine.

Paragraphe 2 : Le Comité des Etablissements de Crédit

47 La composition et les modalités de fonctionnement du conseil sont fixées par décret. 48 El Hadi Chaibainou, La nouvelle loi bancaire marocaine. Analyse et commentaire. Editions Datapress.

Casablanca, 1993. p. 149.

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Ce Comité qui est présidé par le Wali de Bank Al-Maghrib49 est un cadre institutionnalisé

par la loi de 1993, élargi par la loi de 2006 et consolidé par la nouvelle loi 103.12, permettant

une concertation active entre le wali de Bank Al-Maghrib et les établissements de crédit sur des

questions soit d’ordre général, soit d’ordre individuel ayant trait à l’activité des établissements

de crédit et des autres organismes assimilés. Il composé d’un représentant de Bank Al-Maghrib

; de deux représentants du ministère chargé des finances, dont le Directeur du Trésor et des

Finances Extérieures ; de deux représentants de l’association professionnelle visée à l’article

32, dont le président ; du président de l’association professionnelle des sociétés de financement;

du président de l’association professionnelle des établissements de paiement et du président de

la Fédération nationale des associations de micro-crédit.

I) Les questions d’ordre général

Les questions d’ordre général qui doivent être débattues par sa composition élargie

comprenant tous ses membres, sont des questions liées à l’activité des établissements de crédit.

Il s’agit de :

- la définition des services d’investissement et les modalités de leur fourniture visés à

l’article 8;

- les modalités d’application des dispositions de l’article 9 relatives aux limites de prises

de participations, par les établissements de crédit, dans des entreprises existantes ou en

création ;

- les modalités d’exercice des services de paiement visés à l’article 16;

- les conditions et modalités d’émission des bons et des cartes pour l’achat auprès d’elle

de biens ou de services déterminés visés à l’article 18;

- les conditions spécifiques prises par le wali de Bank Al-Maghrib en application des

dispositions de l’article 19;

- les conditions et modalités de mise en application des dispositions de l’article 20

relatives aux compagnies financières ;

- les conditions et modalités de mise en application des dispositions de l’article 22

relatives aux établissements de paiement;

- les statuts des associations professionnelles et les modifications susceptibles de leur être

apportées visés a l’article 32;

- les conditions et modalités de nomination, par les établissements de crédit,

d’administrateurs ou membres indépendants visés à l’article 35;

- le montant du capital, ou de la dotation minimum, exigible des établissements de crédit,

prévu par l’article 36;

- les modalités d’application des dispositions de l’article 37 relatives aux fonds propres

minimums des établissements de crédit ;

- les conditions et modalités d’ouverture au Maroc, par les établissements de crédit ayant

leur siège social à l’étranger, de bureaux d’information, de liaison ou de représentation, prévues

49 Parmi les membres du Comité des Etablissements de Crédit, on trouve :

- un représentant de Bank Al-Maghrib, vice-président

- le directeur du Trésor

- un autre représentant du Ministère des Finances

- 2 représentants du Groupement Professionnel des Banques du Maroc GPBM dont le président

- 2 représentants de l’Association Professionnelle des Sociétés de Financement APSF dont le président

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Droit Bancaire

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à l’article 41;

- les mesures d’application des dispositions des articles 47 et 160 relatives respectivement

à la communication à Bank Al-Maghrib des documents et informations nécessaires au

fonctionnement des services d’intérêt commun et aux conditions et modalités d’accès à ces

informations ;

- les taux maximum des intérêts conventionnels et les taux d’intérêt pouvant être appliqués

à l’épargne et les conditions de distribution de crédits par le biais de conventions avec les

établissements concernés visés à l'article 51;

- les conditions et modalités de collecte et d’emploi des dépôts d’investissement prévus à

l’article 56;

- les caractéristiques techniques des produits prévus à l’article 58 ainsi que les modalités

de leur présentation à la clientèle ;

- les conditions et modalités d’exercice des opérations prévues par l’article 6 1;

- les conditions et modalités de fonctionnement du comité d’audit prévu à l’article 64;

- les conditions dans lesquelles est communiqué le rapport prévu à l’article 65;

- les conditions et modalités prévues à l’article 69 relatives au fonctionnement du fonds

de garantie des dépôts des banques participatives figurant à l’article 67;

- les conditions et modalités d’application des dispositions de l’article 70;

- les mesures d’application des dispositions de l’article 71 relatives aux obligations

comptables des établissements de crédit ;

- les conditions selon lesquelles les établissements de crédit doivent publier leurs états de

synthèse et leurs états financiers visés à l’article 75;

- les mesures d’application des dispositions des articles 76 et 77 relatives aux règles

prudentielles;

- les conditions et modalités de fonctionnement des comités, prévus à l’article 78;

- les modalités selon lesquelles les entreprises visées à l’article 81 doivent communiquer

à Bank Al-Maghrib leurs états de synthèse;

- les modalités selon lesquelles les établissements de crédit doivent soumettre à Bank Al-

Maghrib les changements affectant la composition de leurs instances dirigeantes prévues à

l’article 92;

- les modalités d’application des dispositions de l’article 97 relatives au devoir de

vigilance et de veille interne ;

- les mesures d’application des dispositions de l’article 99;

- les modalités d’exercice de la mission des commissaires aux comptes prévue à l’article

100;

- les conventions bilatérales relatives au contrôle des établissements de crédit, visées a

l’article 1 12;

- les conditions de versement des cotisations au fonds collectif de garantie des dépôts,

visées à l’article 130;

- les modalités de gestion des ressources des fonds de garantie des dépôts par la société

gestionnaire et ses interventions visées à l’article 142 ;

- la convention type prévue à l’article 151;

- les modalités d’application des dispositions de l’article 154 relatives à l’information du

public conformément aux conditions appliquées par les établissements de crédit à leurs

opérations avec la clientèle ;

- les modalités d’application des dispositions de l’article 156 relatives à l’élaboration des

relevés de comptes ;

- les modalités d’application des dispositions de l’article 157 relatives au traitement des

réclamations ;

- les modalités de fonctionnement du dispositif de médiation bancaire prévues à l’article

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Droit Bancaire

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158;

- les conditions visées à l’article 167 dans lesquelles Bank Al-Maghrib autorise les

intermédiaires mandatés par les banques pour recevoir des fonds du public.

II) Les questions d’ordre individuel

Les questions suivantes, d’ordre individuel, doivent être traitées par une composition

restreinte ne comprenant que les seuls représentants de Bank Al-Maghrib et du ministère chargé

des finances :

- l’octroi d’agréments pour l’exercice de l’activité d’établissement de crédit,

d’établissement de paiement, d’association de micro-crédit et de banque offshore ;

- la fusion de deux ou de plusieurs établissements de crédit ou organismes assimilés;

- l’absorption d’un ou plusieurs établissements de crédit par un autre établissement de

crédit ;

- la création de filiales ou l’ouverture de succursales, ou de bureaux de représentation à

l’étranger, ainsi que toute prise de participation aboutissant à un contrôle d’un établissement de

crédit installé à l’étranger, par les établissements de crédit ayant leur siège social au Maroc;

- les changements qui affectent la nationalité, le contrôle d’un établissement de crédit ou

organisme assimilé ou la nature des opérations qu’il effectue à titre de profession habituelle.

Après la réforme de 2006, le Comité des établissements de crédit a été chargé de mener

des études50 sur les rapports des établissements de crédit avec la clientèle et sur l'information

du public51. Un principe consolidé par l’article 25 de la nouvelle loi 103.12, qui charge le

comité de mener toutes études portant sur l’activité des établissements de crédit et

notamment sur leurs rapports avec la clientèle et sur l’information du public. Ces études

peuvent donner lieu à des circulaires ou recommandations du wali de Bank Al-Maghrib.

.

50 En plus des études portant sur l'activité des établissements de crédit. 51 Ces études peuvent donner lieu à des circulaires ou recommandations du gouverneur de Bank Al-Maghrib

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Droit Bancaire

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Paragraphe 3 : la Commission de Discipline des Etablissements de Crédit

Instaurée par la loi de 1993, cette commission était chargée aux termes de l’article 21 de

la loi de 2006 d’instruire les dossiers disciplinaires et de proposer les sanctions contre les

établissements de crédit qui ne respectent pas la loi et les règles imposées par les autorités

monétaires. Aux termes de l’article 28 de la nouvelle loi 103.12, cette commission est chargée

d’instruire les dossiers disciplinaires dont elle est saisie et de proposer au wali de Bank Al-

Maghrib les sanctions disciplinaires à prononcer en application des dispositions de l’article 178,

qui sont :

- suspendre un ou plusieurs dirigeants ;

- interdire ou restreindre l’exercice de certaines opérations par l’établissement de crédit ;

- décider la nomination d’un administrateur provisoire ;

- prononcer le retrait d’agrément.

Cette commission est présidée par le vice-wali ou le directeur général ou un représentant

de Bank Al-Maghrib désigné par le wali de Bank Al-Maghrib. Elle comprend les membres

suivants :

- un représentant de Bank Al-Maghrib ;

- deux représentants du ministère chargé des finances ;

- deux magistrats nommés par le Conseil Supérieur du pouvoir

Judiciaire.

Le président de la commission peut faire appel à toute personne52 dont la collaboration

est jugée utile pour donner à la commission un avis à propos de l’affaire dont elle est saisie53.

La commission convoque alors, afin de l’entendre, le représentant légal de l’établissement

concerné, après lui avoir signifié les griefs relevés à son encontre et communiqué tous les

éléments du dossier. Ce dernier peut se faire assister par toute personne de son choix pour

assurer sa défense.

Paragraphe 4 : Les Associations Professionnelles

52 Cette personne ne prend pas part aux délibérations de la commission. 53 La commission élabore et adopte son règlement intérieur. Elle se réunit sur convocation de son président et

délibère valablement lorsque quatre au moins de ses membres sont présents. Ses avis sont pris à la majorité des

membres présents et, en cas de partage égal des voix, celle du président est prépondérante. (art 30)

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Parmi les innovations de la loi de 1993, consolidées par la loi de 2006 et élargies par la

nouvelle loi 103.12, le législateur marocain a généralisé à tous les établissements de crédit

l’obligation d’adhérer à une association professionnelle constituant un cadre professionnel

institutionnalisé qui permettra de canaliser leur représentativité au sein des différents organes

consultatifs et d’avoir un interlocuteur unique. Ainsi aux termes de l’article 32 de la loi 103.12,

les établissements de crédit agréés en tant que banques ou en tant que banques participatives,

les banques offshore, les sociétés de financement et les établissements de paiement agréés sont

tenus d’adhérer à une association professionnelle régie conformément aux dispositions du dahir

du 3 joumada I 1378 (15 novembre 1958) réglementant le droit d’association, tel qu’il a été

modifié et complété.

Ces associations étudient les questions intéressant l’exercice de la profession, notamment

l’amélioration des techniques de banque et de crédit, l’introduction de nouvelles technologies,

la création de services communs, la formation du personnel et les relations avec les

représentants des employés. Elles peuvent aussi être consultées par le ministre chargé des

finances ou le wali de Bank Al-Maghrib sur toute question intéressant la profession. Comme

elles peuvent leur soumettre des propositions dans ce domaine. Elles servent également, selon

l’article 33 de la loi 103.12 d’intermédiaire, pour les questions concernant la profession, entre

leurs membres, d’une part, et les pouvoirs publics ou tout autre organisme national ou étranger,

d’autre part. Elles doivent alors informer le ministre chargé des finances et le wali de Bank Al-

Maghrib de tout manquement, dont elles ont eu connaissance, dans l’application, par leurs

membres, des dispositions de la loi et des textes pris pour leur application. Les associations

professionnelles sont habilitées à ester en justice lorsqu’elles estiment que les intérêts de la

profession sont en jeu et notamment lorsqu’un ou plusieurs de leurs membres sont mis en cause.

Sous section 2 : Les institutions de régulation et de contrôle

Ces institutions qui sont le Ministre des Finances (paragraphe 1) et Bank Al-Maghrib

(paragraphe 2) reflètent l’esprit même de la loi de 2006 dont les deux plus importants objectifs

sont l’élargissement et le renforcement du contrôle.

Paragraphe 1 : Le Ministre chargé des Finances

En présidant le Conseil National du Crédit et de l’Epargne aux termes de l’article 27 de

la loi 013.12, le ministre chargé des finances influence rigoureusement tout le secteur du crédit

grâce aux prérogatives qui lui sont conférées par la loi bancaire. Il intervient aux aussi, par

arrêté, après avis du Comité des établissements de crédit, en vue d’assurer le développement de

l’économie, la défense de la monnaie, la protection des déposants et des emprunteurs etc.

Paragraphe 2 : Bank Al-Maghrib

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Bank Al-Maghrib dénommée avant 1987 « Banque du Maroc » ou Banque Centrale, a été

créée le 30 juin 1959 par dahir54. Jouant ainsi un des rôles les plus importants dans le

développement et la stabilité de l’économie nationale, en suivant les orientations de la politique

économique et financière de chaque gouvernement et ceci depuis l’indépendance du pays, tout

en assurant les rôles de conseiller financier du gouvernement55, d’agent du Trésor et de

représentant du gouvernement auprès des institutions financières et monétaires internationales

et dans les négociations des accords financiers internationaux.

Après 2005 et grâce à la loi du 23 novembre 200556, son statut va bénéficier d’une large

réforme, élargissant et modernisant ses missions qui concernent essentiellement aux termes des

articles de 5 à 10 de la loi portant Statut de Bank Al-Maghrib du 23 novembre 2005 :

• l’émission des billets de banque et des pièces de monnaie

• les missions d’arrêter et de mettre en œuvre les instruments de politique

monétaire ainsi que la conduite de la politique de change

• le choix des outils appropriés, parmi ceux prévus par la loi, pour ses interventions

sur le marché monétaire en veillant au bon fonctionnement de ce marché et en assurant

son contrôle.

• la réglementation, la supervision et le contrôle des établissements de crédit et

des organismes assimilés.

• la responsabilité de veiller au bon fonctionnement et à la sécurité des systèmes

de paiement tout en facilitant les transferts de fonds et en prenant toutes mesures y

afférentes.

Au niveau du secteur du crédit et grâce à la loi bancaire, Bank Al-Maghrib dirige et

influence les plus importantes institutions de concertation, de régulation et de contrôle. Ainsi,

le Wali de Bank Al-Maghrib est président du Comité des établissements de crédit et vice

président du Conseil National du Crédit et de l’Epargne, alors que le vice-wali ou le Directeur

Général de Bank Al-Maghrib est le président de la Commission de Discipline des

établissements de crédit. Renforçant et élargissant ainsi les attributions de Bank Al-Maghrib en

matière de surveillance du système bancaire et financier.

Bank Al-Maghrib aux termes de l’article 36 de la loi du 23 novembre 2005 est composée

de 3 organes :

54 Dahir n° 1-59-233 du 30 juin 1959. 55 Rappelons que Bank Al-Maghrib publie chaque année un Rapport qui est considéré comme un document de

référence concernant toutes les données économiques, monétaires et financières du Maroc. 56 Dahir n°1-05-38 du 20 chaoual 1426 (23 novembre 2005) portant promulgation de la loi n° 76-03 portant statut

de Bank Al-Maghrib.

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- Un Conseil : qui se réunit au moins une fois par trimestre et qui est composé du

Gouverneur de Bank Al-Maghrib président, du vice Gouverneur, du directeur général

de la banque, du directeur du Trésor et de 6 membres désignés par le premier ministre.

- Un Gouverneur57 : qui est nommé par Sa Majesté le Roi, chargé de la Direction

de Bank Al-Maghrib, assisté soit d’un vice gouverneur, soit d’un directeur général.

- Un Comité de direction : qui est composé du Gouverneur, du vice Gouverneur

ou du directeur général et des directeurs désignés par le gouverneur et qui se charge

d’assurer la direction des affaires journalières de Bank Al-Maghrib.

57 Article 41 de la loi n° 76-03 du 23 novembre 2005 portant promulgation de la loi portant statut de Bank Al-

Maghrib : « Sous réserve des attributions dévolues par la présente loi au conseil, le Gouverneur administre et dirige

la Banque. A cet effet :

- il préside le conseil, le convoque et arrête l’ordre du jour de ses séances ;

- il tient le conseil informé périodiquement de la conduite de la politique monétaire et des opérations sur devises

effectuées par la Banque ;

- il prépare le projet de rapport annuel sur la situation économique, monétaire et financière du pays et sur les

activités de la Banque, prévu à l’article 57 ci-dessous qu’il soumet à l’examen et à l’approbation du conseil ;

- il propose au conseil la nomination des directeurs, recrute et nomme à tous autres grades et emplois. Il désigne

des représentants de la Banque au sein des conseils d’autres institutions lorsqu’une telle représentation est prévue;

- il arrête les attributions respectives des directions et départements de la Banque ;

- il arrête les conditions de passation des marchés de la Banque ;

- il prépare les projets de budget annuel des dépenses et des modifications apportées à celui-ci en cours d’exercice

- il organise les services de la Banque et définit leurs fonctions ;

- il fait procéder à toutes acquisitions, aliénations ou échanges immobiliers approuvés par le conseil ;

- il représente la Banque à l’égard des tiers. Il intente les actions en justice, les poursuit et les défend. Il prend

toutes mesures d’exécution et toutes mesures conservatoires qu’il juge utiles ;

- il veille à l’observation des dispositions de la présente loi et des règlements de la Banque ;

- il peut déléguer ses pouvoirs en vue d’actes déterminés.

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Droit Bancaire

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Chapitre III

Les activités des établissements de crédit

Section I : La réception de fonds du public

Section II : La distribution de crédits

Section III : La mise à la disposition de la clientèle de tous moyens de paiement et leur

gestion

Section I : La réception de fonds du public

La rapidité et la modernisation des opérations effectuées aujourd’hui entre les

établissements de crédit et leurs clients ont créé une diversité de contrats bancaires qui

sont de plus en plus nombreux et reflètent l’innovation continue des professionnels58. Ces

contrats bancaires sont généralement considérés comme des contrats d’adhésion. Parmi

ces contrats il y a le contrat de Compte bancaire. L’ouverture d’un compte en banque révèle

souvent à propos des particuliers un certain niveau d’intégration dans la société. Alors que

l’exclusion de ce compte révèle au contraire la précarité de la personne en question. Le

compte en banque reste toutefois l’instrument bancaire par excellence des commerçants et

des entreprises, facilitant et protégeant la manipulation d’espèces sans risques de vol ou de

perte et accélérant nombre d’opérations très répandues aujourd’hui dans le commerce.

Section II : La distribution de crédits

Théoriquement, la définition du crédit intègre plusieurs éléments59 :

- le temps qui sépare l'avance de fonds de sa restitution ;

- la confiance dans le remboursement ultérieur ;

- le risque couru par le dispensateur de crédit.

La notion de temps révèle ainsi l’existence de trois types de crédit :

- Le crédit à court terme ne dépasse pas un délai de remboursement de 2 ans.

- Le crédit à moyen terme dure de 2 à 7 ans.

- Le crédit à long terme peut aller jusqu'à trente ans.

58 On parle même d’un « foisonnement de contrats ». Charqi Mimoun, Droit Bancaire Marocain. Collection

Banque & Entreprise. Salé, 2000. p. 17. 59 Françoise Dekeuwer-Défossez et Sophie Moreil, Droit bancaire, Dalloz, 10ème édition, Paris, 2010, p. 103.

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Sous section 1 : La distinction entre achat à tempérament et emprunt.

La distribution du crédit à la consommation a souvent été sous la forme de deux

catégories de crédits : les achats à tempérament et les emprunts. Les premiers étant orientés

vers la réalisation d’actes de consommation par l’emprunteur, les autres sont plutôt liés à la

personne de l’emprunteur et les garanties offertes par lui.

Paragraphe 1 : Achat à tempérament

La conception large du concept « achat à tempérament » est résumée en une vente dont

le prix est stipulé payable à tempérament, c'est-à-dire par fraction échelonnée60. Selon la

définition donnée par le vocabulaire juridique Henri CAPITANT61, il s’agit d’un achat pour

lequel un crédit a été accordé par le vendeur avec l’échelonnement des paiements bien entendu.

Dans un sens très général, G.THIERRY définit l’achat à tempérament comme étant : « toute

vente effectuée dans des conditions différentes de la simultanéité entre livraison de la

marchandise et paiement du prix »62. L’achat à tempérament est donc généralement conçu

comme un contrat de vente dans lequel le prix n’est pas versé en intégralité au moment de la

livraison du bien acheté, mais à terme par fractions échelonnées. Ce terme est ainsi entendu au

sens général de l’acquisition de fournitures, qu’elles soient de biens ou de services.63 Cette

conception ne fait pas l’unanimité de la doctrine ; ainsi G. GRIMALDI64 estime que la plupart

des opérations dont le financement est fait par un établissement de crédit théoriquement distinct,

mais en pratique un partenaire habituel du vendeur, sont considérées comme des emprunts

distincts de l’achat.

Paragraphe 2 : L’emprunt

C’est un crédit détaché de toute opération précise. Cette formule est connue sous le

terme de prêt à intérêt, comme étant un prêt dans lequel l’emprunteur s’engage à verser un

intérêt périodique en contrepartie d’une somme dont il peut se servir. C’est un contrat réel qui

ne peut se réaliser que par la remise d’une chose prêtée à l’emprunteur lui-même ou à un tiers

qui la reçoit et la détient pour le compte de l’emprunteur.65 Au sens de l’article 1874 du code

civil français, il y a prêt, dès lors qu’il y a remise par le préteur d’une chose à l’emprunteur pour

que celui-ci s’en serve à charge de restitution. La différence qu’il faut donc retenir entre l’achat

à tempérament et l’emprunt, réside dans le fait que dans le premier contrat, c’est le vendeur qui

60 J CARBONNIER, Droit civil. T II. La famille.17è éd. PUF. Paris 1995, p.142. 61 Cité par C. ATIAS, « Le sort des dettes de ménage non solidaires en régime légal », D 1976 chron. p.191. 62 G.THIERRY, Financement et recouvrement des créances, Delmas et Cie. Paris 1971. p.141. 63 Marylène BUCQUET, Crédit et famille, de la protection de la famille en tant que consommatrice de crédit.

Thèse en droit. Université de Corse Pascal PAOLI. Droit- Economie-Gestion. 15 janvier 2000. p.20. 64 G.GRIMALDI, « Le logement et la famille » Rapport français, in Le droit au logement. Les journées mexicaines.

Travaux de l’Association H. CAPITANT. Tome XXXIII. Economica. Paris 1982. n°72. 65 Marylène BUCQUET op. cit. p. 24.

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Droit Bancaire

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organise la relation contractuelle de crédit, alors que dans le second contrat il appartient au

consommateur d’accomplir les démarches pour obtenir le financement nécessaire à

l’acquisition du bien choisi.66

Sous section 2 : Taux d’intérêt et commissions

L’article 154 de la loi 103.12 impose aux établissements de crédit de porter à la

connaissance du public, selon les modalités fixées par circulaire du Wali de Bank Al-

Maghrib, après avis du comité des établissements de crédit, les conditions appliquées à leurs

opérations, notamment en matière de taux d’intérêt débiteurs et créditeurs, de commission et de

régime de dates de valeur.

Paragraphe 1 : le Taux d’intérêt

Le taux d’intérêt est une sorte de nerf des opérations des établissements de crédit. Il y a

différents types de taux d’intérêt selon chaque type et catégorie d’opérations. Les plus

importants et fréquents sont :

I. les taux d’intérêt créditeurs et débiteurs

1) les taux intérêts créditeurs

Les intérêts créditeurs sont versés par chaque banque à ses clients déposants. Le taux

d’intérêt de cette opération varie en fonction de la durée du dépôt et des conditions arrêtées par

les autorités monétaires.

2) les taux d’intérêt débiteurs

Il s’agit de taux d’intérêt applicables aux opérations de crédit et qui sont généralement

fixés par voie contractuelle en respectant les dispositions et le plafond autorisé par les

autorités monétaires.

II. le taux d’intérêt légal

66 Ibid.

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Droit Bancaire

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C’est un taux fixé par les autorités monétaires et qui permet de reconnaitre le niveau

des autres taux d’intérêt. Ainsi au-dessus du taux d’intérêt légal il y a le taux d’intérêt

conventionnel puis le taux effectif global et au-dessus de ce taux on parle d’un taux usuraire

interdit par la loi.

Rappelons que législateur marocain a très tôt réagi sur le principe de la fixation du

taux d’intérêt67, et ceci depuis 1913. Ainsi, l’article 875 du D.O.C, précise qu’en : « matière

civile et commerciale, le taux légal des intérêts et le maximum des intérêts conventionnels

sont fixés par un dahir spécial »68. Le dahir du 6 juin 1950 ajoute dans son article premier

que : « le taux légal en matière civile et commerciale est fixé à 6%, le maximum des intérêts

conventionnels en matière civile et commerciale est fixé à 10% ». Malheureusement, les

articles 876 et 877 du D.O.C, prévus pour sanctionner le dépassement de ce taux, sont d’une

portée très limitée.

La jurisprudence marocaine n’a d’ailleurs fait que limiter l’importance de ces articles,

même si dans un arrêt de la cour d’appel de Rabat, il a été décidé que « toute clause d’une

convention ayant pour objet la stipulation d’un taux d’intérêt supérieur au maximum

autorisé est entachée de nullité absolue »69. La cour suprême quant à elle, n’a fait que limiter

l’étendue de cette sanction, en se basant sur l’article 62 du D.O.C pour décider dans un arrêt

du 26 octobre 1965 que seule la clause stipulant un intérêt usuraire devait être annulée en

tant qu’illicite, et que le contrat la contenant reste valable pour le surplus70.

III. Le taux effectif global (TEG)

67 D’autres définitions s’imposent :

* Un taux nominal : c’est le taux qui, appliqué au capital, détermine l’intérêt payable au cours d’une période. Dans

la langue bancaire, on parle du taux « sec » d’un prêt.

* Un taux actuariel : c’est celui qui résulte des tables de calculs d’intérêt mises au point et tenues à jour par les

actuaires qui sont d’une manière générale les spécialistes du calcul des probabilités et de la statistique en matière

de banques, d’assurances et de prévoyance sociale, et par expression des experts en mathématiques financières.

* Un taux effectif : résulte de la prise en compte du montant des intérêts et de leur périodicité.

* Un taux effectif global (T.E.G) : c’est le taux effectif à la charge de l’emprunteur, comptabilisations versées par

lui à quelque titre que ce soit, au prêteur ou à toute autre personne.

Voir Bernard LIVIAN, « Le consommateur de crédit » in Le Consommateur, 81è Congrès des Notaires de France.

Tome II. Lyon 1985, p. 1335 et 1336. 68 Il s’agit du dahir du 9 octobre 1913 et des modifications par le dahir du 6 juin 1950. 69 29.11.1949 cité par Mohammed Ali MEKOUAR, La vente à crédit des véhicules automobiles. DAR EL KITAB.

Casablanca. 1977. p.169. 70 Civ.26.10.1965 cité par Mohammed Ali MEKOUAR , op cit. p.169. Dans un autre arrêt de la Cour d’Appel de

Fès du 16.12.1980. Dossier civil n°15462. La cour a considéré que les taux pratiqués par les sociétés de crédit sont

excessifs. Il faut noter par ailleurs qu’il s’agissait des intérêts de retard et non pas des intérêts contractuels qui

restent sans aucun contrôle.

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Droit Bancaire

35

Pour calculer un taux effectif global71, il y a plusieurs éléments à prendre en compte72 :

- Le taux « sec » du prêt, c'est-à-dire le taux actuariel nominal du prêt.

- Les frais d’ouverture de dossier.

- Les frais d’expertise éventuellement.

- L’incidence des primes d’assurances si le contrat prévoit l’adhésion à un

contrat de groupe.

- L’incidence des frais de passation du contrat (honoraires, timbres,

enregistrement, etc.).

- Toutes les commissions payées à des négociateurs, démarcheurs ou autres

intermédiaires intervenus dans la conclusion du contrat.

Paragraphe 2 : les commissions

Les banques perçoivent de nombreuses commissions sur leurs clients pour chaque

service rendu et chaque crédit octroyé. Parmi les commissions les plus répandues on trouve

la commission pour frais et étude de dossier qui est prélevée sur chaque client demandeur

d’un crédit. Françoise Dekeuwer-Défossez et Sophie Moreil proposent un autre exemple,

celui de la « commission de confirmation » : le banquier a droit à rémunération s'il a promis

à son client la disposition d'une certaine somme, même si celui-ci ne s'en sert pas, ou pas

totalement. Ce banquier est obligé de tenir compte de cette promesse pour avoir les fonds

à la disposition de son client si celui-ci décide de les utiliser. Ce dernier bénéficie d'une

sécurité qui est un « service » rendu par le banquier. Des perceptions forfaitaires qui

s'appellent « commissions » et qui peuvent être calculées par le moyen d'un pourcentage

ou faire l'objet d'une perception fixe73.

71 Laraqui Houssaini Hamza propose l’exemple suivant : « le taux effectif global est calculé en tenant compte des

modalités d’amortissement de la créance. En cas de remboursement échelonné, le taux effectif ressort au double

environ du taux qui résulterait d’un remboursement linéaire en fin de période. Par exemple le taux d’un prêt de

10.000 DH consenti pour un an donnant lieu à un remboursement unique en fin de période de 11630 DH est de

16,30%.

« Supposons maintenant que ce prêt fasse l’objet de remboursements échelonnés, à raison de 12 mensualités de

969 Dh - exemple pris du barème de financement des véhicules neufs appliqué par le comité professionnel des

sociétés de crédit au Maroc.

« Le total des remboursements s’élève donc à 969 × 12=11628.

En effet, sans se livrer à de longs calculs actuariels, il suffit d’observer que l’emprunteur en remboursant 969 Dh

par mois, ne disposera plus au milieu de l’année que de 5155 Dh sur les 10.000 Dh empruntés au début de l’année,

tout se passe en définitive comme si la société de crédit prélevait 969 Dh d’intérêt sur un prêt qui s’élève en

moyenne à 5155 Dh. Le taux d’intérêt atteint donc 16,30 ×100/5155=31%.

« Ce taux réel est pratiquement le double du taux apparent. L’illusion d’un taux faible est donnée parce qu’on

rapporte l’intérêt apparent au capital que l’on croit avoir emprunté. Ce taux linéaire pratiqué par les sociétés de

crédit correspond à un taux dégressif corrigé par le multiplicateur 1,9 ». Laraqui Houssaini Hamza, op cit. p. 75. 72 Voir Bernard LIVIAN, op cit. p.1160. 73 Françoise Dekeuwer-Défossez et Sophie Moreil, Droit bancaire, Dalloz, 2010, p. 104.

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Section III : La mise à la disposition de la clientèle de tous moyens de paiement ou

leur gestion

L’outil favori de la monétique est ce qu’on appelle une carte bancaire, qui peut être une

carte de crédit, de paiement, de retrait etc. Au début symbole de l’appartenance à une certaine

classe, la carte bancaire semble aujourd’hui plus généralisée surtout avec le souci de la

bancarisation et de l’accès aux services financiers pour tout le monde. L’utilisation de plus en

plus des cartes bancaires74 a nécessité l’ouverture de centaines de guichets automatiques à

travers tout le pays et ceci avant même que le législateur marocain n’intervient pour réglementer

cette technique profitant au début d’un vide législatif et réglementaire inquiétant. L’article 6 de

la loi 103.12 considère comme moyens de paiement, tous les instruments qui, quel que soit le

support ou le procédé technique utilisé, permettent à toute personne de transférer des fonds.

Considérant aussi comme moyen de paiement, la monnaie électronique, définie comme étant

toute valeur monétaire représentant une créance sur l'émetteur, qui est:

- stockée sur un support électronique ;

- émise contre la remise de fonds d'un montant dont la valeur n'est pas inférieure à la

valeur monétaire émise ;

- et acceptée comme moyen de paiement par des tiers autres que l'émetteur de la monnaie

électronique.

Seuls les établissements de crédit agréés sont autorisés à émettre des cartes de paiement

ou de crédit. Il est question donc de l’émission d’une monnaie électronique définie par la

Directive de la communauté européenne n°2000 du 18 septembre 2000, concernant l’accès à

l’activité des établissements de monnaie électronique ainsi que la surveillance prudentielle de

ces établissements, comme étant :

74 Des millions de porteurs et de cartes bancaires circulent actuellement dans le marché marocain.

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Chapitre IV

Les banques participatives

Section I: L’avènement des banques participatives au Maroc

La nouvelle loi n° 103.12 a fait de l'introduction d'un cadre légal et réglementaire pour

l'encadrement de l'activité de commercialisation des produits et services de banques

participatives dans le secteur bancaire marocain, son principal apport. Des banques qu’elle

considère selon l’article 54, comme des personnes morales habilitées à exercer à titre de

profession habituelle les activités visées aux articles 1er75, 5576 et 58 , ainsi que les opérations

commerciales, financières et d’investissements, après avis conforme du Conseil supérieur des

Ouléma visé à l’article 62.

Section II : Les produits des banques participatives

Les banques participatives proposent les produits suivants77 :

- La Murabaha (marge bénéficiaire ou coût majoré) : c’est un contrat par

lequel une banque participative acquiert un bien meuble ou immeuble en vue de le

revendre à son client à son coût d’acquisition plus une marge bénéficiaire convenue

d’avance. Le règlement de cette opération par le client est alors effectué selon les

modalités convenues entre les parties. Le vendeur informe ainsi l’acheteur du coût

d’acquisition du bien et négocie avec lui une marge de profit. Il s’agit d’un

financement à court terme qui se fonde sur la notion traditionnelle de financement

de l’achat à tempérament.

- Al Ijara (crédit-bail) : location ou location avec acquisition. C’est un contrat

selon lequel une banque participative met, à titre locatif, un bien meuble ou

immeuble déterminé et propriété de cette banque, à la disposition d’un client pour

un usage autorisé par la loi. Cette Ijara peut revêtir l’une des deux formes suivantes

:

- Ijara tachghilia qui consiste en une location simple ;

75 La réception de fonds du public ; les opérations de crédit et la mise à la disposition de la clientèle de tous moyens

de paiement, ou leur gestion. 76 Les banques participatives sont ainsi habilitées à recevoir du public des dépôts d’investissement dont la

rémunération est liée aux résultats des investissements convenus avec la clientèle. 77 Les caractéristiques techniques de ces produits ainsi que les modalités de leur présentation à la clientèle sont

fixées par circulaire du wali de Bank Al-Maghrib, après avis du comité des établissements de crédit et avis

conforme du Conseil supérieur des Ouléma.

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- Ijara wa iqtinaa qui consiste en une location assortie de l’engagement ferme

du locataire d’acquérir le bien loué à l’issue d’une période convenue d’avance.

Cette technique est utilisée dans environ 10% des transactions financières

islamiques.

- Al Modaraba (le partage des bénéfices) : C’est un contrat mettant en relation

une ou plusieurs banques participatives (Rab el Mal) qui fournissent le capital en

numéraire et / ou en nature et un ou plusieurs entrepreneurs (Moudarib) qui

fournissent leur travail en vue de réaliser un projet. La responsabilité de la gestion

du projet incombe entièrement aux entrepreneur(s), alors que les bénéfices réalisés

sont partagés selon une répartition convenue entre les parties et les pertes sont

assumées exclusivement par Rab el Mal, sauf en cas de fraude commise par le(s)

Moudarib. Il s’agit de fonds investis dans les activités définies en termes généraux.

Les modalités de partage des bénéfices et des risques sont adaptées à chaque

investissement. Les placements se font pour des périodes allant du court au moyen

terme, une solution convenant davantage aux activités commerciales.

- Al Mucharaka (les prises de participation) : c’est un contrat ayant pour objet

la participation, par une banque participative, à un projet, en vue de réaliser un

profit. Les parties participent alors aux pertes à hauteur de leur participation et aux

profits selon un prorata prédéterminé. Cette Moucharaka peut revêtir l’une des

deux formes suivantes :

- la Moucharaka Tabita : les parties demeurent partenaires jusqu’à

l’expiration du contrat les liant ;

- la Moucharaka Moutanakissa : la banque se retire progressivement du projet

conformément aux stipulations du contrat.

Il s’agit d’une technique analogue à celle des coentreprises classiques.

L’entrepreneur et l’investisseur contribuent tous deux, à des degrés variables, au

capital (actifs, savoir-faire en matière de technique et de gestion, fonds de

roulement, etc.). Ils s’accordent sur le partage des bénéfices (et des risques) dans

des proportions convenues à l’avance. Une technique utilisée traditionnellement

pour le financement du capital fixe et de fonds de roulement à moyen et à long

terme. Enfin toutes les parties ont un droit de regard sur la gestion du projet78.

Les banques participatives peuvent également proposer à leur clientèle tout autre produit

sous réserve de l’avis conforme du Conseil supérieur des Ouléma, dont les produits suivants :

78 Voir Mohsin S. KHAN et Abbas MIRAKHOR, «Les pratiques bancaires islamiques », Finances et

Développement .vol 23 n° 3 sept 1986, pp.32.36.

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- Al Muzara’a : une variante traditionnelle de la Mudaraba appliquée à

l’agriculture. La banque qui peut apporter des fonds ou des terres de culture,

partage la récolte avec l’entrepreneur.

- Al Musaka : une variante traditionnelle de la mucharaka appliquée à la

production des vergers. La récolte est partagée entre la banque et ses partenaires

selon leurs contributions respectives.

- Al Kard Al Hassan (le prêt de bienfaisance ou de charité) : c’est un prêt sans

intérêt, à caractère charitable. La banque peut exiger le paiement de frais

administratifs à condition que leur montant ne soit pas lié à la période de maturité

du prêt.

Il est clair qu’à l’exception de quelques produits (Mudaraba, Kard Hassan etc.), la

plupart des autres modes de financement existent dans la finance conventionnelle, mais avec

une importante différence qui est l’inexistence totale d’intérêt dans les produits islamiques.

S’agissant de l’avenir du système financier islamique, il faut savoir que la moitié de

l’épargne « islamique » n’est pas encore gérée par les banques islamiques, et entre 800 milliards

et 1,3 billions de dollars sont encore investis dans les organismes occidentaux par les

musulmans.79

79 Miguel MENNIG, op.cit. p.42.