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UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL
LES PRATIQUES EFFICIENTES DE CONSEILLERS ET
CONSEILLÈRES D’ORIENTATION UTILISANT L’ÉPREUVE
GROUPEMENTS ET L’APPROCHE PSYCHOGÉNÉTIQUE DE L’IDENTITÉ
DANS UN CONTEXTE D’ORIENTATION
RAPPORT D’ACTIVITÉ DIRIGÉE
PRÉSENTÉ
COMME EXIGENCE PARTIELLE
DE LA MAÎTRISE EN ÉDUCATION
PAR
NADINE DROLET
JUILLET 2013
2
Sommaire
L’intervention sur l’identité est une activité qui est définie dans le champ d’exercices des
conseillers et conseillères d’orientation du Québec. Pour intervenir, il est primordial
d’évaluer rigoureusement la situation de l’élève ou du client, ce qui inclut une évaluation
de son fonctionnement psychologique ainsi que de ses fonctions autant cognitives
qu’affectives (OCCOQ, site internet). De plus en plus l’identité est un sujet associé à
l’orientation. Pour Luc Bégin, cela fait plus de trente ans déjà qu’il travaille sur ce
concept. Ses recherches l’ont amenées à concevoir l’approche psychogénétique de
l’identité et a créer un outil qui diagnostique l’identité se nommant l’épreuve
Groupements.
Actuellement au Québec, des enjeux sociaux et éducatifs, comme le vieillissement de la
population et le décrochage ou abandon scolaire, réservent des défis aux conseillers
d’orientation qui se reconnaissent comme les spécialistes de la relation entre l’individu et
son environnement scolaire ou professionnel (OCCOQ, site internet). L’émergence de
nouvelles clientèles fait qu’ils doivent adapter leur pratique à des élèves ou clients plus
vulnérables. L’adoption du projet de Loi 21 leur octroie maintenant certains actes en lien
avec l’évaluation et l’intervention auprès de ces clientèles. Au regard de ces faits, les
besoins en orientation se complexifient et les conseillers d’orientation sont submergés par
l’abondance des informations à acquérir pour offrir un service de qualité qui est conforme
aux exigences de leur ordre professionnel.
Il devient donc intéressant d’examiner de plus près la pratique des conseillers et
conseillères d’orientation qui travaillent avec le concept de l’identité pour en dégager ses
apports. Pour les conseillers et conseillères d’orientation qui travaillent selon l’approche
psychogénétique de l’identité, la base de leur pratique se tourne vers l’humain puisque
selon le concepteur de l’approche : « S’orienter, c’est construire, clarifier et transposer
qui l’ont est en termes professionnels » (Bégin, Bleau, Landry, 2000).
Huit conseillers et conseillères d’orientation utilisant l’épreuve Groupements et
l’approche psychogénétique de l’identité depuis plus d’une décennie ont été rencontrés en
entrevue semi-structurée. Les constats qui ressortent de cette cueillette d’information
révèlent premièrement que l’apport d’avoir un diagnostic de l’identité permet de dépister
rapidement les besoins de leurs clients. Ces besoins pouvant être de trouver un
environnement dont les exigences correspondent à leurs structures identitaires ou de
traiter un problème identitaire qui touche leurs capacités à s’orienter de façon autonome.
Un autre apport important consiste au fait que les conseillers d’orientation qui travaillent
avec cette approche ont une base fondamentale à leur pratique qui reste la même, peu
importe les caractéristiques de leurs élèves ou clients (immigration, problématiques en
santé mentale, difficultés scolaires, etc.). Enfin, les réactions d’étonnement des clients
d’être compris si intimement et de demander aux conseillers d’orientation s’ils sont des
psychologues proposent que la vision traditionnelle de l’orientation est encore présente
dans la population en général qui s’attend peu à aborder les impacts de son identité dans
ses choix ou difficultés scolaires ou professionnelles.
3
Remerciements
Je n'aurais jamais eu l'occasion de faire cet essai sur ce sujet, sans l'ouverture et l'intérêt
de Louis Cournoyer envers la pratique des conseillers et conseillères d'orientation. Merci
Louis, aucun autre sujet ne m'aurait autant stimulé pour un essai de cet envergure. Tout
au long de ce chemin, tes commentaires m’ont « orienté » vers une vision de plus en plus
globale. Merci de ta patience, de ta disponibilité et de ton soutien. ҉
Je tiens aussi à remercier Luc Bégin qui dès les débuts c'est intéressé à ma recherche et à
Guy Perreault qui a révisé le chapitre traitant de la théorie de l'épreuve Groupements et
de l'approche psychogénétique. Cher Guy, chaque conversation avec toi m'apportait des
éclaircissements ou m'incitait à vouloir en savoir plus, tu as le don de rendre accessible ce
qui est parfois difficile à comprendre. ҉
J'ai été grandement choyé par les huit rencontres que j'ai eues avec les conseillers et
conseillères d'orientation qui ont accepté de partager leur vécu et expérience avec moi.
Merci à vous de votre générosité, de votre temps et je tiens à vous dire que vous êtes
chacun un modèle d'inspiration. Je garde de très bons souvenirs de chacune de ces
rencontres. ҉
Enfin, tant de gens dans ma vie privée m'ont encouragé; merci à mes parents pour leur
éternelle confiance envers tous mes projets et merci de votre présence auprès de mes
enfants chéris ces derniers temps où j'étais dédiée à mon essai. Chers Laurick et Louka,
mes petits Rauzon d'amour, merci de votre patience, enfin vous aurez maintenant une
maman plus disponible pour être avec vous. Merci aussi à mes amies qui m'ont souvent
encouragé et j'envoie un clin d'œil spécial à Marlène et Nathalie pour leur indescriptible
soutien. Il y a une dernière personne que je tiens à remercier de tout mon cœur
maintenant que mon essai est terminé et c'est mon amoureux Danny. Merci Dan, tu as
toujours cru que j'y arriverais même si parfois je me décourageais. Tu m'as gardé ancrée
dans notre vie de famille, auprès de ceux que j'aime. Tu as été, tu es et resteras mon
soutien moral le plus précieux. ҉
4
Table des matières
Sommaire ............................................................................................................................ 2
Remerciements .................................................................................................................... 3
Table des matières............................................................................................................... 4
Liste des tableaux ................................................................................................................ 7
Liste des figures .................................................................................................................. 9
Introduction ....................................................................................................................... 10
1. Problématique ............................................................................................................... 12
1.1 Éducation et clientèles émergentes ......................................................................... 13
1.2 Employabilité, de par les gens et les changements ................................................. 18
1.3 Orientation : des problématiques qui arrivent de partout! ....................................... 23
1.4 L’expertise des conseillers et conseillère d’orientation .......................................... 30
1.5 Recherches portant sur l’épreuve Groupements...................................................... 37
2. Cadre conceptuel ........................................................................................................... 50
2.1 La pratique des conseillers et conseillères d’orientation ......................................... 50
2.1.1 L’orientation : une science? .............................................................................. 51
2.1.2 Les bases théoriques au niveau des approches psychologiques ....................... 52
2.1.3 Les bases théoriques au niveau vocationnel ..................................................... 60
2.2 L’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique ........................................ 77
2.2.1 Historique et évolution de l'approche psychogénétique et de l'épreuve
Groupements .............................................................................................................. 78
2.2.2 L’identité et sa formation (la catégorisation) ................................................... 83
2.2.3 L’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique de l’identité ............. 88
2.2.4 L'interprétation et l’intervention ..................................................................... 103
2.2.5 La valeur scientifique de l’outil ...................................................................... 108
3. Objectif de recherche .................................................................................................. 110
4. Méthodologie .............................................................................................................. 111
4.1 Approche de recherche .......................................................................................... 112
4.2 Population et échantillonnage ............................................................................... 113
5
4.3 Instrument de recherche ........................................................................................ 115
4.4 Démarche d’entretien ............................................................................................ 116
4.5 Modalités d’analyse des données .......................................................................... 117
4.6 Mesures d’éthique ................................................................................................. 119
5. Présentation et analyse des résultats ........................................................................... 119
5.1 Les motivations des conseillers d’orientation à utiliser l’épreuve Groupements.. 120
5.1.2 Les conditions facilitant l’apprentissage ........................................................ 125
5.1.3 Les éléments motivateurs dans leur pratique actuelle .................................... 132
5.2 Les contextes d’utilisations ................................................................................... 142
5.2.1 Description des milieux et clientèles .............................................................. 143
5.2.2 Une difficulté identifiée : l’interprétation ....................................................... 150
5.2.3 L’apport des autres outils et approches .......................................................... 152
5.3 Les pratiques efficientes ........................................................................................ 157
5.3.1L’ utilisation de l’épreuve Groupements ......................................................... 157
5.3.1Les compétences relationnelles des conseillers d’orientation ......................... 164
5.3.3 Intervention en orientation.............................................................................. 171
5.4 Leurs représentations de l’intervention en orientation .......................................... 180
6. Discussion ................................................................................................................... 193
6.1 L’identité; un diagnostic qui permet de répondre aux besoins émotifs sous-jacents
aux demandes d’orientation ........................................................................................ 193
6.2 L’identité; plus significative que les problématiques ............................................ 195
6.3 L’identité; concept encore méconnu en orientation .............................................. 196
6.4 L’identité; les dimensions ayant un impact dans l’intervention. ........................... 199
6.5 L’identité; complexe pour qui? ............................................................................. 201
7. Conclusion .................................................................................................................. 202
7.1 Les apports de cette recherche .............................................................................. 202
7.2 Les limites de cette recherche ............................................................................... 205
7.3 Les retombés de cette recherche............................................................................ 206
Bibliographie................................................................................................................... 208
Bibliographie internet ..................................................................................................... 212
ANNEXE 1 ..................................................................................................................... 218
6
ANNEXE II .................................................................................................................... 221
ANNEXE III ................................................................................................................... 223
ANNEXE IV ................................................................................................................... 225
ANNEXE V .................................................................................................................... 231
ANNEXE VI ................................................................................................................... 237
ANNEXE VII.................................................................................................................. 239
ANNEXE VIII ................................................................................................................ 242
7
Liste des tableaux
Tableau 1 : Répartition des membres selon les milieux de travail
Tableau 2 : Activités réservées aux conseillers et conseillères d’orientation
Tableau 3 : Les dimensions à évaluer en orientation
Tableau 4 : Éléments déterminants dans le choix d’outils ou tests psychométriques
Tableau 5 : Les périodes du développement de l'identité
Tableau 6 : Fonctionnement psychologique selon les périodes
Tableau 7 : Signification des dimensions formant l’identité
Tableau 8 : Postulats, corollaires et hypothèses de l’approche psychogénétique de
l’identité
Tableau 9 : Thèmes émergents et définition opératoires des éléments incitatifs à la
formation initiale
Tableau 10 : Thèmes émergents et définition opératoires des conditions facilitant
l’apprentissage de l’épreuve Groupements
Tableau 11 : Thèmes émergents et définition opératoires des éléments motivateurs des
conseillers d’orientation dans leur pratique actuelles
Tableau 12 : Milieux de pratique des conseillers d’orientation et clientèles rencontrées
Tableau 13: Thèmes émergents et définition opératoire des conditions des milieux et
clientèles des conseillers d’orientation
Tableau 14 : Thèmes émergents et définition opératoires de l’apport des autres outils et
approches utilisés de concert avec l’épreuve Groupements et l’approche
psychogénétique
8
Tableau 15 : Thèmes émergents et définition opératoires des fondements des pratiques
efficientes des conseillers d’orientation, concernant l’utilisation de
l’épreuve Groupements
Tableau 16 : Thèmes émergents et définition opératoires des fondements des pratiques
efficientes des conseillers d’orientation, concernant leurs façons d’être en
relation
Tableau 17 : Thèmes émergents et définition opératoires des éléments incitatifs aux
représentations de l’intervention en orientation
Tableau 18 : Résumé synthèse des éléments motivateurs à l’utilisation de l’épreuve
Groupements et de l’approche psychogénétique de l’identité
Tableau 19 : Résumé synthèse des contextes d’utilisation
Tableau 20 : Résumé synthèse des pratiques efficientes
Tableau 21 : Résumé synthèse des représentations des conseillers d’orientation envers
l’intervention en orientation
9
Liste des figures
Figure 1 : Modèle des besoins d’orientation
Figure 2 : L’Arc en ciel de la carrière
Figure 3 : Modèle pyramidal des principaux éléments d’un choix vocationnel
Figure 4 : La conception linéaire classique du développement
Figure 5 : Le développement des fonctions de la pensée
10
Introduction
Au Québec, plusieurs problématiques et enjeux du domaine de l’éducation et de
l’employabilité sont présents et sont en lien avec la dynamique personnelle de l’individu.
En ce sens, Matte (2010) constate que l’identité des individus prend de plus en plus de
place dans la définition des difficultés vécues en orientation. De ce fait, l’association
entre les problématiques vécut par les individus et les impacts sur leur identité sont de
plus en plus reconnus.
L’ampleur des problématiques et leurs sources différentes occasionnent une
complexification de la tâche des conseillers d’orientation. L’évaluation de leurs clients
devient multidimensionnelle et l'on peut se demander s’ils s’y retrouvent. Depuis plus de
trente ans, certains conseillers d’orientation ont placé le concept de l’identité au cœur de
leur pratique professionnelle et au-devant des problématiques extérieures. L’utilisation
d’un outil diagnostic de l’identité (l’épreuve Groupements) et de l’approche
psychogénétique de l’identité leur permet de mieux comprendre leurs clients et les
impacts que les éléments extérieurs peuvent avoir sur eux. Cela leur permet ensuite de
concevoir leur processus d’orientation pour répondre aux besoins évoqués et sous-jacents
à la demande d’orientation. Considérant l’apport qu’a cet outil et cette approche face aux
défis en orientation, le présent essai vise donc à définir et comprendre les pratiques
efficientes de conseillers et de conseillères d’orientation utilisant l’épreuve Groupements
et l’approche psychogénétique de l’identité dans un contexte d’orientation.
Pour bien saisir les problématiques qui sont vécues à l’extérieur de l’individu et qui
peuvent avoir un impact lui-même et sur ses choix, le premier chapitre traitant de la
problématique présente les problématiques et enjeux vécus en éducation et en
employabilité ainsi que leurs répercussions dans le contexte de l’orientation scolaire et
professionnelle. Puisque les conseillers d’orientation sont les professionnels qui reçoivent
les individus vivant des problématiques face à leur choix de carrière, le deuxième
chapitre, qui est le cadre conceptuel, fait un survol des connaissances et compétences
qu’ils acquièrent dans leur parcours académique tant au niveau de la psychologie que du
11
domaine vocationnel. La cadre théorique présente en deuxième partie du deuxième
chapitre la théorie associée à l’épreuve Groupements et à l’approche psychogénétique de
l’identité. Le troisième chapitre indique l’objectif de recherche et le quatrième chapitre
présente toute la méthodologie entourant la recherche qualitative qui a été menée auprès
de huit conseillers et conseillères d’orientation. Le cinquième chapitre consiste à
présenter et analyser les résultats suite aux rencontres avec les conseillers d’orientation.
Enfin, la discussion sera ensuite présentée au chapitre six et le dernier chapitre, le
chapitre sept, conclu cet essai en présentant les apports, les limites et les retombés de
cette recherche.
12
1. Problématique
De nos jours, l’individu est de plus en plus laissé à lui-même pour guider sa destinée, que
ce soit au niveau personnel, scolaire ou professionnel (Boutinet, 2005). Pour certains
individus, cette autonomie est favorable alors que pour d’autres, c’est une source de
tension (Boutinet, 2005). Cela rejoint les idées formulées par Galinski et Fast (1966) à
l’effet que chez certaines personnes, c’est l’absence de certitude intérieure face à qui elles
sont, qui engendre des dysfonctionnalités individuelles importantes sur le plan du
traitement de l’information et de la prise de décision. Ainsi, sans une identité en équilibre
l’individu est souvent condamné à baigner dans l’incertitude, l’indécision et l’anxiété
(Institut de recherche fondamentale et clinique en psycho orientation, IRFCPO, 2012).
Plus concrètement, cela se traduit par des enjeux personnels qui entravent la vie scolaire
et professionnelle lorsque la personne doit faire un choix d’études ou de métier en partant
d’elle-même, pour transposer qui elle est en terme professionnel. Parallèlement aux
enjeux personnels, certaines difficultés peuvent être vécues par plusieurs personnes et
devenir des phénomènes sociaux. On constate que deux acteurs se côtoient quant aux
problématiques vécues, soit l’individu et le milieu. Il existe globalement deux façons
d’analyser ces problématiques pour en tirer des hypothèses et proposer des solutions.
D’une part, on peut croire que ce sont ces phénomènes sociaux qui ont un impact sur les
individus, ce qui entrainent des problématiques individuels, ou d’autre part on peut croire
que l’ensemble des problématiques vécues par chacun des individus deviennent des
problèmes sociaux, parce qu’elles sont rencontrées à maintes reprises, dans les mêmes
milieux. Peu importe pour l’instant l’angle selon lequel ces problématiques sont vues, il
s’avère pertinent de les présenter pour en mesurer leur étendue.
La première section présente les problématiques vécues en éducation et en employabilité
actuellement au Québec. Dans le monde de l’éducation, un enjeu qui est toujours
d’actualité concerne le décrochage scolaire et ce tant au niveau secondaire, qu’au
collégial ou universitaire. De plus, l’émergence de nouvelles clientèles incite les
13
dirigeants et intervenants de ces milieux à se questionner sur les mesures à mettre en
place pour faciliter la réussite de tous les étudiants. Au niveau de l’employabilité, un des
enjeux marquants concerne les manques de main-d’œuvre prévus en conséquence du
vieillissement de la population. Tout comme en éducation, le monde de l’emploi se
questionne sur la place qu’occupera chaque individu pour combler tous les postes
disponibles et nécessaires au bon fonctionnement de la société qui change et évolue
rapidement. Plusieurs professionnels œuvrent auprès des étudiants et des employés et
parmi eux se trouvent les conseillers d’orientation qui doivent jongler avec toutes les
particularités de leurs clientèles respectives. La présentation de la pertinence sociale de
ces professionnels face à ces enjeux est donc exposée pour comprendre le rôle possible de
ces acteurs. Enfin, pour terminer et pour saisir la couleur de cet essai, la dernière partie
propose de considérer une approche qui place l’identité au cœur des problématiques
vécues en orientation et même socialement : l’approche psychogénétique de l’identité.
Avant de présenter cette approche dans le cadre conceptuel, la pertinence scientifique
permettant de justifier son apport face aux différentes problématiques vécues en
orientation sera exposée par un résumé de littérature scientifique s’y rapportant.
1.1 Éducation et clientèles émergentes
En éducation, la problématique du décrochage scolaire persiste depuis plus de deux
décennies. Au Canada, le taux de décrochage scolaire au secondaire est calculé depuis
vingt-trois ans. Le premier calcul qui en a été fait a eu lieu pour l’année 1990-1991 et il
était de 16,6 % pour les 20-24 ans (Gouvernement du Canada, 2008). Au Québec, c’est
depuis 1999 que le taux de décrochage est diffusé (Gouvernement du Québec, 2012a). Il
était à ce moment à 21.9 % pour l’ensemble des élèves de niveau secondaire, alors que de
nos jours, pour l’ensemble du Québec, il est estimé à 16,2 % (Idib.). Par ailleurs, ces
chiffres peuvent se préciser selon certaines caractéristiques comme l’âge indiquant le
moment où les étudiants quittaient le secondaire sans diplôme. Ainsi, en 2011, le taux de
décrochage du secondaire était établi à 18,5 % pour les jeunes de 25 ans qui sortent du
secondaire sans diplôme, ce qui indique par le fait même que leurs parcours ont impliqué
14
quelques embuches, puisqu’un parcours scolaire régulier (sans arrêt ou retard) permet aux
étudiants de terminer leurs études secondaires à 17 ans. Dans ce même sens, on remarque
qu’il existe un écart important quant à cette caractéristique, les plus jeunes étant moins
nombreux à décrocher. Les statistiques du MELS (Gouvernement du Québec, 2011a)
indiquent en ce sens, qu’à 17 ans, le taux de sortie du secondaire sans diplôme, est de
8,7 % qui est presque deux fois moins élevés que pour les jeunes de 25 ans indiqués plus
haut (Idib.).
La vulnérabilité au décrochage scolaire s’accroit selon les facteurs de risques présents
chez un jeune. Selon Janosz et al. (2013), les premiers déterminants mentionnés sont le
sexe, le revenu familial, la scolarité des parents et le statut socio-économique de la
famille. Ces informations sont partagées par le Conseil supérieur de l’éducation (2010),
qui estime à seulement 65 % le nombre de diplômés du secondaire parmi les jeunes de
milieu socio-économique défavorisé, alors que c’est près de 80 % chez les jeunes de
milieux favorisés qui obtiennent un diplôme ou une qualification de niveau secondaire.
Quant aux garçons de milieu défavorisé, ils ne sont que 58 % à réussir leurs études de
niveau secondaire, comparativement aux garçons des milieux favorisés qui réussissent
dans 74 % des cas (Gouvernement du Québec, 2010b). Selon le MELS (Gouvernement
du Québec, 2010a), une clientèle qui est aussi vulnérable au niveau du décrochage est
celle des élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (EHDAA) 1.
Leur forte présence demande aussi aux enseignants, intervenants, professionnels, ainsi
qu’aux directions de s’adapter et de jongler avec les ressources financières et humaines
disponibles et souvent insuffisantes (Gouvernement du Québec, 2010a). Au secondaire,
cette clientèle a augmenté de 34 % entre 2002 et 2010 et pour les années 2009-2010, elle
représentait 22 % de l’ensemble des étudiants. Le taux de diplomation n’est que de
25,2 % pour la clientèle EHDAA intégrée dans les classes dites normales et ce taux varie
selon le trouble.
__________
(1) Pour connaître les critères définissant cette clientèle, voir l’annexe I.
15
Les élèves ayant le plus de difficulté à obtenir un premier diplôme sont ceux qui ont un
trouble grave du comportement, dont le taux de diplomation n’est estimé qu’à 3,7 %,
selon le MELS (Idib.).
La clientèle des immigrants est aussi ciblée comme vulnérable au décrochage selon le
Conseil supérieur de l’Éducation (2010). Les facteurs de risque identifiés sont d’être un
immigrant de première génération (être né à l’étranger), de ne pas parler le français,
d’arriver au pays au moment des études secondaires et d’être originaire de certains pays.
Le Conseil de l’éducation à ce sujet mentionne qu’être de minorité visible rend plus
vulnérable au décrochage scolaire, par comparaison à un immigrant d’un pays d’Europe
ou d’Asie. Selon le Conseil supérieur de l’Éducation (2010), la clientèle autochtone
québécoise est aussi vulnérable au décrochage scolaire. En plus des problématiques qui y
sont identifiées, telles la pauvreté, la toxicomanie, la violence et la détresse
psychologique, 43,2 % des jeunes de 20-25 ans n’obtiennent aucun diplôme ou certificat
d’études secondaires (Conseil supérieur de l’Éducation, 2010).
Ce n’est pas seulement au niveau secondaire qu’il y a des inquiétudes face au décrochage
scolaire. Les étudiants des secteurs collégiaux et universitaires vivent aussi des difficultés
face à la persévérance et au maintien aux études. Au secteur collégial technique, le taux
de diplomation n’est que de 61,9 % dont seulement 32,5 % des élèves obtiennent leur
diplôme dans la durée prescrite de trois ans (Gouvernement du Québec, 2011a). Au
secteur préuniversitaire, les chiffres indiquent un taux de réussite de 71.5 %. Par ailleurs,
là aussi peu d’élèves obtiennent leurs diplômes dans la durée prescrite. Selon le MELS
(Gouvernement du Québec,2011a), ce n’est que 43.8 % des élèves de la formation
collégiale préuniversitaire qui obtiennent leur diplôme d’études collégiales suite à deux
années d’études. Selon la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ, 2011),
parmi la clientèle EHDAA du secondaire, les élèves qui réussissent et obtiennent le
diplôme d’études secondaire ne sont plus à risque de décrochage rendu aux études
collégiales ou universitaires. Par ailleurs, comme au niveau secondaire, l’augmentation
de cette clientèle est aussi remarquée et le milieu doit adapter ses services. La FECQ
16
(2011) mentionne que la clientèle étudiante avec besoins particuliers a quintuplé entre
2005 et 2009. Parmi cette clientèle, 68,1 % des élèves font partie de ce que la Fédération
nomme la population étudiante émergente, qui comprend les troubles d’apprentissage, les
troubles déficitaires de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), ainsi que les
troubles de santé mentale. Par ailleurs, la FECQ (2011) déplore l’insuffisance de mesures
concrètes pour le transfert d’information entre les divers niveaux d’études. Ainsi un jeune
qui a reçu des services au secondaire auprès de divers professionnels de l’EHDAA, devra
refaire une demande au cégep pour bénéficier des services qui l’aident face à son
handicap, ce que seulement 10 % d’entre eux font. Le professionnel qui reçoit le jeune
n’a donc aucune information et doit reprendre tout depuis le début, l’expertise venant des
professionnels ayant aidé l’élève au secondaire est donc perdue. La FECQ a également
remarqué que l’autonomie laissée au jeune face à son parcours scolaire diminue sa
présence auprès des services, par manque de visibilité de ceux-ci. (Ibid.)
Le décrochage scolaire est aussi un phénomène connu au niveau universitaire. Selon le
MELS (Gouvernement du Québec, 2011a), seulement 67,6 % des étudiants terminent et
réussissent leur baccalauréat suite à 6,7 trimestres à temps plein. Pour les étudiants qui
quittent l’université avant l’obtention d’un diplôme, ils ont investi 2,4 trimestres (près
d’une année et demie) à temps plein dans des études universitaires qui ne leur apporteront
pas de qualification. Ils se retrouvent donc sur le marché du travail avec comme dernier
diplôme, le diplôme d’études collégiales qu’ils avaient fait avant leurs entrées à
l’université. Tout comme dans le réseau collégial, la clientèle dite émergente est
également en augmentation dans le secteur universitaire, ayant presque doublé dans les
cinq dernières années. Selon Gagné et Tremblay (2011) de l’Association québécoise
interuniversitaire des conseillers aux étudiants en situation de handicap (AQICESH), les
troubles associés à l’apprentissage, au TDAH, ainsi que les troubles de santé mentale
représentent 50 % de l’ensemble des différentes déficiences présentes chez la clientèle en
situation de handicap. Ces chiffres pourraient même augmenter si l'on considère que ces
dernières statistiques représentent seulement le nombre des étudiants qui ont utilisé les
services de leur université en lien avec leur situation.
17
Le phénomène du décrochage scolaire est, depuis longtemps, une problématique scolaire
et sociale fortement étudiée car il entraine des couts élevés à la société. La recherche faite
pour le Conseil Canadien sur l’apprentissage (Hankivsky, (2008) estime qu’il en couterait
plus de 15 000 $ à l’état, par année, pour chaque décrocheur de niveau secondaire. Le
gouvernement du Québec dépense, seulement pour le secteur de l’éducation 25,4 % de
son budget total, secteur le plus couteux après le domaine de la santé (Gouvernement du
Québec, 2011a). Dans les dix dernières années, les coûts de ce secteur ont augmenté de
3,7 % et cela s’explique, entre autres, par les nombreuses mesures de réinvestissements et
de développement mises en œuvre par le gouvernement du Québec pour contrer les
problématiques vécues en éducation (Ibid.).
Par ailleurs, on pourrait se demander ce qu’il en est des impacts du décrochage chez la
personne elle-même. Les couts ne sont pas que financiers, ils sont aussi au niveau
humain. Selon Potvin (2004), le décrochage scolaire des élèves de niveau secondaire (12
à 17 ans) n’est pas une décision impulsive, c’est un cheminement parsemé de plusieurs
frustrations, échecs et difficultés. Le décrochage étant donc l’aboutissement d’un
processus, les traces qu’il laisse sur l’identité de la personne sont présentes même avant
que le jeune quitte l’école. Potvin (2004) estime que les effets du décrochage scolaire ou
du cheminement d’un élève à risque de décrocher sont à plusieurs niveaux. Ainsi, les
effets recensés sont que ces jeunes développeront des stratégies d’adaptation inefficace
(comme l’évitement et le déni), qu’ils développement aussi une faible estime de soi qui
joue sur leur sentiment d’efficacité, qu’ils ont des relations difficiles avec les adultes
(Idib.). Ces jeunes ont une vision négative de l’école car elle est synonyme d’expériences
négatives pour eux et par conséquent, cela a un impact sur leur performance scolaire.
Potvin (2004) poursuit en mentionnant que ces jeunes n’ont pas la motivation nécessaire
pour remédier à leur situation et qu’ils ont aussi plus de troubles de comportement que les
élèves non vulnérables au décrochage scolaire. Enfin, il mentionne également que les
jeunes à risque de décrochage finissent par se regrouper avec d’autres jeunes ayant des
expériences scolaires négatives semblables à eux. On peut en déduire que l’inter
influence qui règne dans le groupe a aussi un impact sur la suite (ou non) de leurs études.
18
Ces couts humains du décrochage scolaire, ont le constate, ont un impact direct sur le
développement de l’identité des jeunes, ceux qui demain, voudront ou chercheront une
place sur le marché du travail.
À un autre niveau, il est aussi difficile pour la clientèle immigrante de trouver sa place
sur le marché du travail et faire reconnaitre les études qu’ils ont faites dans leur pays.
Selon le Ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles (MICC), la
population immigrante a doublé entre 2007 et 2011 (Gouvernement du Québec, 2012c).
Par ailleurs, tous immigrants confondus, près de la moitié arrive au Canada avec un
diplôme de leur pays. Parmi ces diplômés, ce n’est que 28 % d’entre eux qui réussissent à
faire reconnaître leur diplôme dans les quatre premières années de leur arrivée au Canada
(Gouvernement du Canada, 2010). La non-reconnaissance de leur diplôme dans notre
système scolaire québécois pourrait être une des raisons de leur forte présence dans les
universités québécoises, représentant 7,5 % des étudiants au premier cycle, 11,7 % au
deuxième et 22,4 % au troisième cycle (Gouvernement du Québec, 2011a).
1.2 Employabilité, de par les gens et les changements
Les problématiques rencontrées en éducation subsistent également dans le secteur de
l’employabilité. Parmi les étudiants sans diplôme, certains arrivent, ou tentent sans succès
d’inclure le marché du travail, en étant déjà défavorisés, ayant même de la difficulté à lire
et à écrire. Statistique Canada (Gouvernement du Canada, 2005) estime à 16 % la
clientèle analphabète au Québec. En mars 2012, le taux d’assistance sociale selon le
Ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MESS) (Gouvernement du Québec,
2012b) est de 7,1 % chez les 18 à 64 ans et les deux tiers de cette clientèle ont un niveau
de scolarité correspondant au cinquième secondaire ou moins. Parmi la clientèle des
prestataires à l’assistance-emploi, 59,4 % n’ont pas de contrainte à l’emploi et pourraient
travailler. Quant au taux de chômage, Statistique Canada (Gouvernement du Canada,
19
2012) indique que pour l’ensemble de la population, il était de 7,5 % en 2012, cependant,
ce taux varie selon certaines caractéristiques, dont le degré de scolarité. Ainsi, pour
l’année 2010, le taux de chômage pour les adultes sans diplôme était plus que le double
que celui de l’ensemble de la population (17,9 % versus 8 %). À l’inverse, il était près de
deux fois moins élevé chez les diplômés universitaires (4,9 %) (Gouvernement du
Québec, 2011b).
Parmi les clientèles vivant des difficultés sur le marché du travail, on retrouve également
les personnes handicapées. Dans une publication de l’Institut de la Statistique du Québec
(Gouvernement du Québec, 2010c), il est estimé que cette clientèle représente 10,4 % de
la population québécoise, que leur taux de chômage est supérieur aux gens sans
incapacité et que 23 % d’entre eux vivent sous le seuil de la pauvreté. Selon ces mêmes
statistiques, 33 % des personnes handicapées, âgées entre 15 et 64 ans n’ont aucun
diplôme. Par ailleurs, même avec un diplôme, cette clientèle vit plus de difficultés à
intégrer un emploi, comparativement à la population sans handicap. Le comité consultatif
de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CAMO, 2012) présentait la différence
entre les taux d’emploi pour les personnes handicapées et pour la population sans
handicap, qui était respectivement, de 38 % comparé à 69 %. Cet écart face au taux
d’emploi se maintient malgré les diplômes d’études collégiales ou universitaire avec,
respectivement, un écart de 26 % et 25 % plus bas chez les personnes handicapées. Parmi
cette clientèle certains sont encore plus défavorisés. Les femmes, les personnes ayant une
déficience intellectuelle, un trouble envahissant du développement, ou un trouble grave
de santé mentale, vivent davantage de difficulté à insérer le marché du travail (Office des
personnes handicapées du Québec, 2009).
Concernant la santé mentale, on constate que, tout comme en éducation, les problèmes
qui y sont liés prennent de plus en plus d’ampleur. Selon l’Alliance canadienne pour la
maladie mentale et la santé mentale (2012), un Canadien sur cinq souffre d’une maladie
mentale. Parmi les 10 causes d’incapacité dans le monde entier figurent cinq troubles
20
mentaux : la dépression majeure, la schizophrénie, le trouble affectif bipolaire, la
toxicomanie et le trouble obsessionnel-compulsif (Ibid.). Dans le même ordre d’idée et
parce que la maladie mentale est présente dans la majorité des cas, le suicide est la cause
la plus élevée de décès chez les jeunes Canadiens de 15 à 24 ans, faisant près de 4 000
victimes par année (Ibid.). Selon les estimations, les troubles dépressifs représenteront en
2020 les maladies les plus lourdes de conséquences dans les pays développés comme le
Canada (Ibid.).
Directement sur le marché du travail, le Ministère de la Santé et des Services Sociaux
(MSSS) (Gouvernement du Québec, 2013b) observait que les troubles les plus fréquents
vécus par les travailleurs sont les troubles anxieux (incluant, entre autres, le trouble
obsessionnel-compulsif et la phobie sociale) et la dépression et à ceux-ci s’ajoute aussi
les suicides et l’épuisement professionnel. À lui seul, le stress est vécu par 1 travailleur
sur 4 et parmi ceux-ci 60 % indiquent que le travail est leur source principale de stress
(Gouvernement du Canada, 2011). L'Association canadienne des compagnies
d'assurances de personnes indique qu'au Québec, en 2011, les problèmes de santé mentale
arrivaient au premier rang des prestations versées et représentaient 40 % de toutes les
prestations versées aux employés. Ces chiffres ont plus que doublé depuis les 20
dernières années, puisque ce taux était à 18 % en 1990. Pour le Québec, en 2007, cela
représentait 590 millions de dollars (Leduc, 2009). À la Commission de la santé et de la
sécurité du travail (CSST), les données sont presque identiques (Gouvernement du
Québec, 2008). Entre 1996 et 2007, les coûts liés aux problèmes de santé mentale ont,
eux aussi, plus que doublé, passant de 6,5 millions à 15,1 millions de dollars. À cause de
ces difficultés en santé mentale, il peut être difficile pour les travailleurs affectés à ce
moment de maintenir leur lien d’emploi. Certains peuvent se retrouver parmi les 42,2 %
des adultes prestataires d’assistance sociale présentant des contraintes sévères à l’emploi,
ayant un diagnostic médical associé à des problèmes liés à la santé mentale
(Gouvernement du Québec, 2012a).
21
Le trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) semble également
être une problématique de plus en plus rencontrée par la clientèle adulte en emploi ou
non. Selon le Dr Vincent, auteur du livre Mon cerveau a encore besoin de
lunettes (2010), sur le 5 % des enfants qui reçoivent un diagnostic de TDAH, plus de la
moitié gardera les symptômes lors de l’âge adulte. De plus, à tous âges, la moitié des
individus ayant ce diagnostic développera aussi un problème psychiatrique, comme un
trouble de l’humeur, de l’anxiété, un trouble de l’opposition, ou de la toxicomanie.
(Vincent, 2010)
Comme il a été mentionné plus tôt, selon le Ministère de l’Immigration et des
Communautés culturelles, en 2011 le Québec accueillait 51 737 immigrants. Pour la
période 2007-2011, plus des deux tiers (67,6 %) des personnes immigrantes sont admises
dans la catégorie de l’immigration économique, notamment comme travailleuses et
travailleurs qualifiés (60,8 %) ou comme gens d’affaires (4,6 %) (Gouvernement du
Québec, 2012c). Selon une enquête de Statistique Canada (Gouvernement du Canada,
2007), les difficultés les plus sérieuses rencontrées par cette clientèle sont, en ordre
d’importance, le fait de ne pas avoir d’expérience professionnelle au Canada, les
problèmes de langues, la non-reconnaissance des compétences acquises à l’étranger, ainsi
que la non-reconnaissance de leurs études.
La présence des immigrants de la catégorie des travailleurs qualifiés à l’assistance sociale
augmente avec les années, surtout lors de leurs premières années d’intégration
(Gouvernement du Québec, 2012c). De 1996 à 2004, le nombre d’immigrants prestataires
a presque triplé. Le taux de chômage augmente également pour les immigrants récents
(immigré depuis les 5 dernières années) étant estimés à plus de 22,4 % (Gouvernement
du Québec, 2009a). On s’en doute, pour les immigrants tout comme pour l’ensemble de
la population, le degré de scolarité a aussi un impact positif. Ainsi, le taux de chômage
des immigrants sans diplôme est de 25,2 %, alors qu’il diminue à 10,3 % pour ceux
détenant un diplôme universitaire (Gouvernement du Québec, 2009a). Les périodes de
22
difficultés économiques vécues au pays affectent davantage les immigrants, le taux de
chômage de ceux-ci aura tendance à augmenter durant ces périodes (Ibid.). La population
immigrante est composée de plusieurs groupes distincts qui subissent, à des degrés
divers, les difficultés liées à leur intégration au marché de l’emploi.
Ces informations tirées des secteurs de l’éducation et de l’employabilité proposent, entre
autres, que pour faciliter l’insertion professionnelle, l’acquisition d’un diplôme est une
condition de base et que plus le niveau d’études est élevé, plus on a des chances de
trouver un emploi. Dans ce même sens, une étude sur les perspectives à long terme
d’Emploi-Québec (2012) prévoit que le tiers des 1,4 million emplois qui seront créés,
d’ici 2020, exigeront une formation professionnelle (secondaire) ou technique
(collégiale). Quant aux emplois exigeant une formation universitaire, ils constitueront
près de 40 % des nouveaux emplois (Emploi-Québec, 2012). Selon ces mêmes
prévisions, les emplois à combler le seront majoritairement par des jeunes de moins de 25
ans, des immigrants et des chômeurs adéquatement formés. Cependant, un
débalancement dans la société québécoise est prévu dans les prochaines années puisque la
population des personnes qui quitteront le marché du travail pour la retraite est plus
élevée que celle des jeunes disponibles à l’emploi, diplômés ou non (Ibid.). Socialement,
cela amène des problématiques, entre autres pour les employeurs qui auront de la
difficulté à recruter des personnes adéquatement qualifiées ou qui pourraient également
avoir de la difficulté à les maintenir (Ibid.). Les régions, en raison de la dénatalité et
l’émigration des jeunes vers les grandes villes, verront leur population active diminuer.
Partout au Québec, la population vieillissante aura besoin de services, de soins et
d’hébergement, ce qui soulève également des questions quant à l’équilibre de l’offre et la
demande. Comme on l’a déjà vu plus haut, si les chiffres se maintiennent dans le temps,
malgré le nombre élevé d’emplois offerts, plusieurs jeunes sans formation resteront
exclus du marché du travail qui aura pourtant grandement besoin de plusieurs travailleurs
qualifiés. On peut soupçonner qu’ils utiliseront des prestations d’assistance sociales, dont
les fonds parviendront des contributions à l’impôt des travailleurs de moins en moins
nombreux (Thouez et al., 2006).
23
1.3 Orientation : des problématiques qui arrivent de partout!
La complexité des problématiques et l’émergence de nouvelles clientèles en éducation et
en employabilité ont un impact au niveau de l’orientation scolaire et professionnelle des
individus. Les conseillers d’orientation qui les rencontrent doivent considérer toutes ces
informations et tous ces enjeux qui peuvent avoir un impact dans le cheminement des
individus. D’un élève à un autre, ou d’un client à un autre, la situation de la personne
assise devant eux est unique, différente de la précédente et ils doivent s’adapter
constamment pour répondre à leurs besoins. En éducation, au niveau du décrochage
scolaire, la présence de l’orientation est essentielle pour diminuer le nombre grandissant
d’élèves qui quittent leurs études sans diplôme d’études secondaire (DES) ou qui
abandonnent pendant leurs études collégiales ou universitaires. Par ailleurs, les
problématiques vécues en orientation ne sont pas seulement en lien avec des phénomènes
sociaux comme le décrochage scolaire, les difficultés en lien avec la santé mentale ou
l’immigration. Parallèlement aux clientèles plus vulnérables, les clients consultant en
orientation ressemblent aussi à « monsieur et madame tout le monde ». Selon une enquête
du MELS (Gouvernement du Québec, 2004) portant sur les raisons d’abandon des études
collégiales techniques, 47 % des raisons évoquées étaient en lien avec un programme non
aimé, des difficultés dans le programme, ou de l’indécision quant à leur orientation. Cela
confirme ce que mentionne l’OCCOQ (OCCOQ, site internet) quant aux difficultés
vécues en orientation tels l’indécision, l’absence de but vocationnel, ainsi que les
problèmes d’adaptation ou de rendement. Par ailleurs, peu importe le statut, l’origine
culturelle ou la présence ou non d’handicap, des raisons comme l’indécision, l’absence de
but vocationnel et la difficulté à trouver un programme qu’ils aiment font plutôt référence
à l’individu comme tel, qui n’arrive pas à se visualiser dans un emploi et un
environnement de travail qui fait du sens avec qui il est. On pourrait alors de demander si
ces individus ont une idée de ce qui les définit. On peut aussi poursuive en se
questionnant sur le rôle des conseillers d’orientation quant à cette situation de manque de
connaissance de soi.
24
Lorsqu’un étudiant consulte en orientation, une des difficultés pour les conseillers
d’orientation selon Matte (2010) est de bien évaluer le besoin de l’élève et d’offrir le
service approprié. Dans un article sur les besoins des élèves du secondaire, Matte a
élaboré une pyramide exposant les différents besoins d’orientation.
Figure 1
Modèle des besoins d’orientation
Source : Matte, L. (2010), L’Orientation : répondre ou non aux besoins des élèves, Montréal, OCCOPPQ
À la base, l’on retrouve les besoins généraux, tels la documentation scolaire et
professionnelle fournie, les rencontres avec les professionnels des différents secteurs,
l’approche orientante ou les projets personnels orientant (PPO). Selon Matte (2010), ces
besoins sont présents chez tous les élèves et plusieurs personnes peuvent y répondre
(conseillers d’orientation, conseillers en développement de carrière, enseignants, parents).
Viennent ensuite les besoins d’intervention qui représentent les démarches un peu plus
structurées en orientation afin de faire un choix et de le valider. C’est à ce moment aussi
que les préoccupations personnelles des élèves peuvent apparaître (telles la peur de se
tromper et l’impression de ne pas être prêt à faire un choix aussi important) et demander
25
un accompagnement plus précis. En dernier lieu, au haut de la pyramide, paraissent les
besoins particuliers, associés aux besoins des élèves plus vulnérables ou aux
problématiques d’orientation plus complexes. C’est à ce moment que l’on parle de
problème d’orientation se référant soit à des problèmes d’identité, d’anxiété, ou
d’immaturité, soit à des situations particulières, celles vécues par les élèves handicapés
ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage. Quel que soit le besoin, Matte (2010)
souligne qu’ils sont dépendants du fonctionnement psychologique de l’élève, des
conditions de son environnement et des ressources personnels acquises jusqu’à ce jour.
Dans ce même article (Matte, 2010), le constat réalisé concernant les services en
orientation au secondaire, témoigne de difficulté à dépister et à offrir des services aux
clientèles plus vulnérables. La démarche d’orientation classique (connaissance de soi,
transmission d’informations, validation du choix) est trop superficielle et risque même de
déstabiliser les élèves.
Trop souvent, d’ailleurs, on est porté à croire que les problèmes
d’orientation et d’emploi se règlent par de l’information sur le marché du
travail, et que pour « attirer des candidats dans des professions en
demande », il suffit d’en faire la promotion. […] Bref, que cette
information est nécessaire, mais n’amène pas en soi de réponse à des
besoins spécifiques. (OCCOQ, 2008, p.6)
Par ailleurs, au-delà des tâches des conseillers d’orientation, pour être en mesure d’offrir
ces services, ces professionnels doivent être présents en nombre suffisant, avoir
l’opportunité et le temps d’exercer leur fonction. Cela ne semble pas être le cas dans le
secteur de l’éducation. Une problématique soulevée par Matte (2010) indique que 62 %
des conseillers d’orientation du secteur de l’éducation n’arrivent pas à rencontrer
l’ensemble des élèves demandant des services d’orientation.
26
Nous sommes inquiets de constater à quel point les besoins ne sont pas
couverts, en nature et en nombre, par ce qui est mis en place pour y
répondre en milieu scolaire, et étonnés du peu de préoccupations que cela
suscite. (Matte, 2010, p.1)
Dans ce même sens, une autre problématique identifiée est au niveau de la
reconnaissance de la profession. Selon la dernière enquête menée auprès des conseillers
d’orientation, l’orientation semble encore souffrir de préjugés ou être reconnue selon des
activités bien précises, comme les tests d’orientation (OCCOQ, 2010b). Bien que le
milieu scolaire soit celui où les conseillers d’orientation sont les plus présents, il semble
que ce soit là aussi que le service qu’ils offrent, ou qu’ils pourraient offrir, soit méconnu
de la part de la direction. Dans une présentation faite par l’OCCOQ (2010b) secteur
orientation, cette situation est décrite comme étant catastrophique. Les faits rapportés
sont que :
Le c.o. ne présente pas de plan d’action annuel ni d’évaluation de ses
services. [...] Il relève de son directeur d’école, sans être soutenu par un
ratio formel pour les services d’orientation. [...] Il ne réussit pas à
rencontrer tous les élèves dont il estime avoir besoin de ses services. [...]
Selon lui le temps d’attente pour avoir accès à ses services est
préoccupant. [...] Il effectue des tâches administratives qui ne sollicitent
pas son expertise et sa compétence, telle que des photocopies, des visites
d’écoles, etc. [...] Finalement, les différentes catégories de personnel de
l’orientation font les mêmes tâches. (OCCOQ, 2010b, p.27)
Les conseillers d’orientation du secteur scolaire, en plus de leurs tâches habituelles, se
voient dans l’obligation de recadrer l’image de leur profession, la faire connaître et
reconnaître à son juste titre. C’est, selon le groupe de travail de l’OCCOQ, une situation
possible, qui repose sur le pouvoir d’agir de chacun des conseillers d’orientation.
D’autre part, l’âge où débutent les réflexions en orientation arrive à une étape de vie où
les jeunes qui passent de l’adolescence à l’âge adulte vivent déjà plusieurs changements,
ce qui fait que le système psychologique est beaucoup sollicité. En même temps que se
27
forme leur l’identité, ils doivent faire des choix dont celui de leur orientation
professionnelle (Fédération des cégeps, 2010). Sans une identité claire, s’orienter devient
un parcours rempli d’enjeux et d’instabilité (Bégin, Bleau, Landry, 2000). Ainsi, si des
difficultés au niveau de l’identité perdurent et demeurent non résolues lorsque l’élève est
dans le milieu scolaire, il y a de fortes chances qu’elles soient encore présentes et parfois
même handicapantes chez l’adulte qu’il devient.
On constate donc que l’identité prend de plus en plus de place en orientation et dans la
définition des troubles de l’orientation. Tel que le mentionne Matte (2010), les difficultés
rencontrées par les élèves ou les clients que rencontrent les conseillers d’orientation se
manifestent souvent par des problèmes d’identité. Pour Guichard (2006), l’enjeu principal
de l’orientation d’aujourd’hui est la construction de soi. Il en est de même pour Bégin qui
place l’identité au cœur de l’orientation et à la base de la compréhension des
comportements humains (IRFCPO, site internet, 2012).
Selon Bégin (IRFCPO, 2012), la quête de l’identité peut être une recherche ou un besoin
des clients rencontrés en orientation, que ce soit dans un milieu scolaire ou tout autre
milieu. Lors des rencontres en orientation, Bégin soutient que certains questionnements
font référence directement à la recherche de son identité, tels :
Qui suis-je ?
Quel est le sens de ma vie ?
Quel choix d'orientation faire ?
Pourquoi persister à l'école ?
Quelle décision prendre dans telle ou telle situation ?
Pourquoi ai-je de la difficulté à obtenir et à conserver un emploi?
(IRFCPO, Accueil, Site internet, 2012)
28
Concernant le milieu scolaire, il a été remarqué que des problématiques en orientation
étaient également présentes pour les adultes qui retournent sur les bancs d’école. Dans un
contexte où le monde du travail vit plusieurs changements, il n’est pas rare que certains
adultes décident de retourner à l’école pour améliorer leur employabilité. Parmi ceux-ci
une partie est subventionnée par Emploi-Québec. Selon le MESS (Gouvernement du
Québec, 2011c), pour l’année scolaire 2010-2011, le taux d’abandon était de 20 % pour
les adultes inscrits aux formations subventionnés par Emploi-Québec. Selon Poulin
(2004), la façon dont les choix de programme de formation se font est problématique.
L’impulsivité et l’irréalisme semblent être les déterminants de leurs choix.
La démarche vocationnelle était pour plusieurs déficientes, ils manquaient
de réalisme et ils étaient au stade de la pensée magique où tout sera facile.
L'urgence se voit même dans la prise des rendez-vous. Le rendez-vous est
toujours trop loin. On note l'impulsivité, l'immédiateté. L'absence de
réflexivité fait en sorte que les demandes de cours sont faites de façon
impulsive en réponse aux stimulations du milieu par exemple une annonce
dans le journal local. Beaucoup de décrocheurs ne sont pas en contact avec
la réalité nous sommes au niveau du rêve, ils voient les côtés positifs et
moins les côtés négatifs. À la prise de décision, il y a un manque
d'information, ce n'est pas qu'elle n’est pas disponible, ces décrocheurs ne
font pas l'effort pour trouver cette information. Ils attendent tout du
conseiller ou du système et lorsqu'ils abandonnent ce n'est pas leur faute.
(Poulin, 2004, p. 2-3)
Dans ce contexte, la difficulté pouvant être rencontrée par les conseillers d’orientation est
d’amener le client à se sentir responsable de son avenir professionnel et personnel
(Poulin, 2004). Cela renvoi à de l’intervention davantage axée sur la réalité de l’individu,
son identité et sur l’influence de son environnement. Comme le mentionnait déjà
l’OCCOQ (2008), il y des besoins émotifs sous-jacents aux demandes d’orientation. Ces
besoins sont présents autant chez les jeunes que chez les adultes.
Au niveau du marché du travail, pour les conseillers d’orientation œuvrant en
employabilité, en réadaptation ou dans les milieux organisationnels, d’autres
29
problématiques s’ajoutent. Devant le manque de main-d’œuvre dans certains secteurs
d’emploi, ou devant les prévisions de manque de personnel dû au vieillissement de la
population, l’orientation bien qu’en adéquation avec le marché du travail, doit maintenir
son rôle. Pour le public ou les dirigeants d’entreprises, il peut y avoir confusion entre le
rôle des conseillers d’orientation et celui des agences de placement qui sont des
intermédiaires entre les employeurs et les chercheurs d’emplois (Gouvernement du
Québec, 2013a).
En un mot, orienter ne signifie pas façonner une pâte à modeler pour en
tirer les différentes formes souhaitées par le marché du travail. Il s’agit
d’aider une personne humaine, avec ses aspirations, ses talents et ses
limites, à prendre sa place dans le monde des possibilités, quitte, parfois, à
« créer » elle-même des possibilités inattendues. (OCCOQ, 2011, p.3)
Un autre enjeu rencontré de plus en plus souvent lors de consultation en orientation est
l’épuisement professionnel ainsi que les problèmes de santé mentale. Selon la Chaire de
gestion de la santé et sécurité du travail dans les organisations de l’Université Laval
(2003), le nombre de jours perdus dans une année est plus élevé lorsqu’il s’agit de
problèmes de santé psychologique que de problèmes physiques. Pour l’employeur, les
impacts se font directement sentir au niveau des coûts liés aux absences, aux prestations
d’invalidité de courte ou longue durée, des médicaments et frais paramédicaux utilisés
par le travailleur (Ibid.). Les impacts sont aussi présents au niveau de la baisse de
productivité que cela peut engendrer, du présentéisme, de la détérioration du climat de
travail, de l’insatisfaction au travail, des heures supplémentaires, des salaires encourus
pour le remplacement lors des absences, des frais de leur formation et de l’augmentation
du roulement de personnel (Ibid.). Le conseiller d’orientation, spécialiste de la relation
individu-travail, appelé pour des services de conseils dans les organisations, doit tenir
compte autant de l’individu qui souffre que des pertes vécues par l’employeur (OCCOQ,
site internet). Dans certaines sphères de l’orientation, par exemple en réadaptation ou en
employabilité, les problématiques liées à l’épuisement professionnel et aux problèmes de
santé mentale se retrouvent parfois au cœur de la démarche d’orientation. Selon
30
l’OCCOQ (2008), cette clientèle nécessite davantage d’attention, puisqu’elle peut être
vulnérable, influençable et malhabile dans sa réinsertion professionnelle, ce qui, de plus,
augmente leurs risques d’échecs. Une problématique identifiée dans ce contexte est
encore au niveau de la reconnaissance des conseillers d’orientation. Selon le type de
référence, de mandat, ou selon le stade de l’épuisement (pré épuisement, épuisement, ou
post épuisement) il n’est pas rare que ce soit plutôt les psychologues qui soient reconnus
pour traiter ce trouble (Péloquin, 2011). Par ailleurs, lorsque ce sont les conseillers
d’orientation qui interviennent, la difficulté peut venir de l’ambigüité entre les fonctions
liées à la psychothérapie et à l’orientation (Péloquin, 2011). La ligne entre le counseling,
l’intervention sur l’identité et la psychothérapie semble difficile à cerner clairement. La
Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives dans le
domaine de la santé mentale et des relations humaines (projet de loi nº 21) oblige
maintenant les conseillers d’orientation, pour le bien-être de leur client, à se questionner
davantage sur ce sujet et à se positionner. Par ailleurs, ignorer les besoins d’intervention
plus poussés pourrait occasionner le maintien des difficultés des élèves ou clients. Une
suite possible serait le syndrome des portes tournantes; la personne toujours insatisfaite
de sa situation passe d’un conseiller d’orientation à un autre, sans toutefois se sentir plus
stable dans sa vie professionnelle. Dans ce sens, on pourrait demander aux conseillers
d’orientation s’ils ont déjà entendu cette phrase : « J’ai déjà fait une démarche en
orientation, mais ça n’a rien donné! »
1.4 L’expertise des conseillers et conseillère d’orientation
Comme on le constate, le Québec de demain aura besoin d’un grand nombre de
travailleurs et tous doivent agir pour aider les jeunes et les adultes à intégrer une place sur
le marché du travail qui a du sens pour eux. Parmi les acteurs concernés, la place des
conseillers d’orientation face aux défis en éducation et en employabilité est justifiée.
31
Pour porter le titre de conseiller ou conseillère d’orientation (c.o.) et obtenir le permis de
pratique établi via le Règlement du Code des professions du Québec deux conditions sont
nécessaires. Les professionnelles doivent être membres de l’Ordre des conseillers et
conseillères d’orientation du Québec (OCCOQ) et avoir réussi la formation de deuxième
cycle universitaire dans l’une ou l’autre de ces universités québécoise :
Université du Québec à Montréal (Maîtrise en éducation, option carriérologie)
Université Laval (Maîtrise en science de l’orientation)
Université de Sherbrooke (Maîtrise en orientation)
Université Mc Gill (Master of Arts, Counselling Psychology Program)
Pour maintenir leur pratique et leur titre, les conseillers d’orientation doivent se
conformer à une politique de développement des compétences, qui propose entre autres
un minimum de trente heures d’activités de développement cumulées sur une période de
deux ans. Les services d’orientation sont présents dans le milieu scolaire, ainsi que dans
plusieurs autres domaines dont l’employabilité, l’organisationnel, la fonction publique, la
réadaptation, la santé et en secteur privé. Au 31 mars 2011, 2400 conseillers et
conseillères d’orientation étaient membres de l'Ordre des conseillers et conseillères
d'orientation du Québec (OCCOQ, site internet). Le tableau ci-contre présente bien
l’étendue de la profession.
32
Tableau 1 : Répartition des membres selon les milieux de travail.
Éducation 1 122
Primaire 15
Secondaire 494
Secondaire - éducation des adultes 231
Centre administratif 53
Cégep 207
Cégep - éducation des adultes 9
Université 42
Université (consultation) 71
Emploi 364
Centres de réadaptation 53
Santé et services sociaux 27
Fonction publique et
organismes publics
85
Entreprises 65
Cabinets-conseil 329
Autres 355
Source : OCCOQ, site internet.
Comme on le constate, près de la moitié des conseillers d’orientation travaillent dans le
domaine de l’éducation et le niveau où ils sont les plus nombreux sont au secondaire. Le
champ d’exercices de ces professionnels, ou la définition pouvant être faite de leur
pratique est :
Évaluer le fonctionnement psychologique, les ressources personnelles et
les conditions du milieu, intervenir sur l’identité ainsi que développer et
maintenir des stratégies actives d’adaptation dans le but de permettre des
choix personnels et professionnels tout au long de la vie, de rétablir
l’autonomie socioprofessionnelle et de réaliser des projets de carrière chez
l’être humain en interaction avec son environnement. (OCCOQ, 2010a,
p.3)
33
L’OCCOQ a élaboré un guide permettant de comprendre l’ensemble des compétences
exigées pour exercer rigoureusement le métier de conseiller ou de conseillère
d’orientation. Ce guide propose six compétences et chacune d’elle est décrite en plusieurs
points. En premier lieu, pour toute démarche d’orientation, quel que soit le milieu, le
conseiller d’orientation doit d’abord évaluer la situation de la personne qu’il rencontre.
C’est une étape majeure, qui permet de comprendre le besoin, la situation, les enjeux ou
problématiques et aussi d’établir le profil de la personne rencontrée. Le profil des
compétences ajoute que le conseiller d’orientation doit, en second lieu, être en mesure de
concevoir son intervention, ce qui déterminera les objectifs des interventions qu’il fera
auprès de l’élève ou du client qui le consulte. En troisième lieu vient la compétence
d’intervenir directement, ce qui fait référence à la qualité des échanges entre le conseiller
d’orientation et son élève ou client et qui tient compte également des connaissances qu’il
possède pour ajuster ses interventions, afin que cela soit le plus bénéfique possible pour
la personne qu’il rencontre. Vient en quatrième compétence, celle d’exercer un rôle-
conseil auprès d’autres acteurs. C’est ainsi que les conseillers d’orientation doivent
s’impliquer et impliquer l’orientation dans divers projets où leur science est pertinente et
joue un rôle prépondérant face à l’adéquation, individ-études-travail. En cinquième
position vient la compétence d’évaluer les impacts des interventions en orientation. Cela
permet aux conseillers d’orientation de constater si les objectifs d’intervention qu’ils
s’étaient fixés ont été réalisés et d’analyser sa pratique de façon critique. Enfin,
l’OCCOQ termine avec la compétence de gestion de sa pratique, ce qui permet d’assurer
la rigueur de ses actes, d’être conforme aux normes établies et de maintenir une pratique
qui contribue au rayonnement de la profession. (OCCOQ, 2010a)
Ce résumé des compétences des conseillers d’orientation permet de comprendre les
exigences nécessaires pour l’exercice de ces fonctions. Face aux mouvements et aux
enjeux du monde scolaire et professionnel, les conseillers d’orientation doivent
également s’ajuster pour maintenir un service de qualité. On ne parle plus seulement de
trouver un métier, la tâche du conseiller d’orientation devient plus globale et davantage
portée vers l’humain qui prend une place dans la société.
34
Non seulement le travail est un gage de prospérité, il est aussi un élément
contribuant de manière importante à la santé mentale des personnes, à leur
recherche d’un cadre de vie, d’un réseau de soutien interpersonnel […].
Permettre à la personne comme à la société elle-même de reconnaître et
mettre à profit ses forces vives est une composante importante de la
mission sociale de notre profession. (OCCOQ, 2008, p.2)
Pour suivre l’évolution des problématiques et s’y ajuster, suite aux recommandations du
rapport Trudeau, une nouvelle loi a confirmé et règlementé la place des conseillers
d’orientation au niveau de l’évaluation et de l’intervention auprès de clientèles plus
vulnérables. La Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives
dans le domaine de la santé mentale et des relations humaines (projet de loi nº 21) a été
adoptée en 2009 dans le but de protéger cette clientèle. Ainsi, quatre activités ont été
réservées aux conseillers d’orientation et une reconnaissance professionnelle a été
acquise. Le tableau qui suit en fait part :
35
Tableau 2 : Activités réservées aux conseillers et conseillères d’orientation
Activités professionnelles réservées Définition
Trois activités professionnelles sont
réservées à tous les conseillers
d’orientation en autant que leurs
compétences soient à jour.
1. Évaluer (en orientation) une
personne atteinte d’un trouble
mental ou neuropsychologique
attesté par un diagnostic ou par une
évaluation effectuée par un
professionnel habilité
2. Évaluer le retard mental
3. Évaluer (en orientation) un élève
handicapé ou en difficulté
d’adaptation dans le cadre de la
détermination d’un plan
d’intervention en application de
la Loi sur l’instruction
publique (LIP)
La quatrième activité professionnelle est
réservée uniquement aux conseillers
d’orientation qui détiennent une
attestation de formation délivrée par
l’Ordre. Un règlement prévoit les
conditions qu’ils doivent respecter pour
être autorisés à exercer cette activité.
Évaluer les troubles mentaux
Sous réserve de l'obtention d'un permis
délivré par l'Ordre des psychologues du
Québec :
La pratique de la psychothérapie
Source : OCCOQ, site internet.
Ces réserves d’activités aux professionnels adéquatement formés permettent d’assurer
que les personnes qui les évaluent, dont les conseillers d’orientation, ont une expertise
36
suffisante pour être en mesure d’évaluer adéquatement leur situation ainsi que les
incidences de leurs situations et difficultés lors de leurs démarches d’insertion ou de
réinsertion professionnelle (OCCOQ, 2008). L’expertise des conseillers d’orientation
face à la santé mentale est légitime et a été bien évoquée par l’OCCOQ, dans un aide-
mémoire préparé concernant le projet de Loi 21 :
Le travail est une sphère de l’activité humaine dans laquelle les problèmes
de santé mentale apparaissent. Soit que le travail en est la cause, soit que
ces problèmes aient un impact sur la capacité à travailler. Le conseiller
d’orientation est le spécialiste de la relation individu travail. Cette relation
entre santé mentale et travail a maintes fois été démontrée. La relation avec
le travail ou l’influence de ce dernier dans la vie des personnes sur les
plans cognitif, affectif, social et comportemental, est à même de s’avérer
un révélateur d’un trouble mental. Évaluer le trouble mental peut être
nécessaire pour s’assurer que la personne a les ressources pour faire face
aux exigences de l’insertion au travail. Autrement, une tentative de retour
présente un risque potentiel pour la santé mentale de la
personne. (L’Orientation, août 2011, p.5)
Ainsi, cette première section informe que les conseillers d’orientation, en plus de répondre au
besoin mentionné par leurs élèves ou clients, ont à considérer ces éléments lorsqu’ils rencontrent
des élèves ou des clients. En résumé, ces éléments font référence aux :
facteurs de risques de décrochage scolaire présents chez les élèves qu’ils
rencontrent;
impacts découlant de facteurs de vulnérabilité au décrochage scolaire, dont
l’immigration et les difficultés au niveau des handicaps physiques, des
problématiques en santé mentale et des difficultés d’adaptation;
facteurs de risque d’exclusion du marché du travail (pas de diplôme,
analphabètes, pauvreté, handicaps);
appât des formations subventionnées par Emploi-Québec
besoins émotifs et affectifs sous-jacents à leurs demandes d’orientation et
caractéristiques personnelles.
37
Face à ces problématiques qui arrivent de partout, qui peuvent être différentes d’un client
ou élève à un autre et ce, dans une même journée, on peut concevoir que les conseillers
d’orientation sont submergés d’information. Comme il a déjà été mentionné plus tôt,
deux façons d’analyser l’ensemble de ces informations prédominent, soit la vision en lien
avec les problématiques vécues de l’extérieur de l’individu, ou celles qui regardent en
premier lieu sur l’identité de celui-ci. L’approche psychogénétique de l’identité place la
personne au cœur de l’évaluation et de l’orientation.
1.5 Recherches portant sur l’épreuve Groupements
Les recherches qui seront présentées proviennent d’étudiants à la maîtrise en
carriérologie de l’UQAM. Comme le concepteur de cette approche était professeur à cette
université, certains étudiants ont connu l’outil et l’approche, s’y sont intéressés et ont
voulu approfondir un aspect de la théorie. Par le fait même, cela a nourri le concepteur
pour raffiner son outil et sa théorie.
En 1993, André Lauzon s’est intéressé à l’influence de l’identité sur l’orientation
scolaire. Plus précisément, il voulait savoir s’il y avait des outils capables de prédire la
stabilité du choix scolaire. Pour analyser cette situation, il s’est basé sur un groupe de 107
élèves francophones et allophones, du secteur public, de Montréal et de Laval. La
situation de ce groupe, au niveau du multiculturalisme, lui a aussi servi à étudier la
pertinence de l’utilisation d’un outil, soit l’épreuve Groupements, pour la clientèle
allophone. Lors du début de sa recherche, les sujets étaient élèves en secondaire cinq et
faisaient un choix d’études au niveau collégial. Pour analyser la variable de l’identité,
Lauzon a utilisé quatre outils. Premièrement un questionnaire fut rempli par les élèves.
Quatorze questions permettaient d’avoir de l’information sur la personne et sur son degré
38
de certitude ou d’incertitude face à son choix d’études. Deuxièmement, les élèves ont
tous fait le « Questionnaire d’identité professionnelle » conçu par Holland et ses associés,
qui mesure les problèmes susceptibles d’affecter l’identité professionnelle.
Troisièmement, les élèves ont également tous passé l’épreuve Groupements. Enfin, ces
mêmes 107 élèves ont été rejoints, à la fin de leur première année d’études collégiales,
pour connaître leur situation scolaire. Les résultats de la recherche de Lauzon ont montré
que le questionnaire rempli par les élèves n’avait pas été significatif quant à l’aspect
prédictif qu’il proposait. Concernant le Questionnaire d’identité professionnelle, ce test
s’est révélé prédictif dans 60 % des cas. L’épreuve Groupements, quant à elle a été l’outil
le plus prédictif, puisque 83 % des résultats ont été significatifs. Les élèves qui avaient
fait l’épreuve Groupements avaient été classés en deux groupes, soit élèves présentant
une identité en équilibre ou en déséquilibre. Ces deux groupes ont été comparés aux
prévisions, soit de maintien, soit de changements ou abandons. À 83 %, les élèves en
équilibre au niveau de leur identité maintenaient leurs études et leur choix, de même que
les élèves en déséquilibre changeaient de programme ou abandonnaient leurs études. De
plus, Lauzon a comparé les résultats de l’épreuve Groupements entre les élèves
francophones et allophones. La valeur prédictive de maintien ou de changement selon le
groupe en équilibre ou en déséquilibre s’est avérée semblable dans les deux groupes, ce
qui confirme la valeur prédictive de l’épreuve Groupements pour la clientèle allophone.
En 1996, Louis Lauzon a fait une recherche sur la congruence du choix scolaire ou
professionnel, qui fait référence au degré de ressemblance entre le profil d’une personne
et celui exigé par son milieu de travail. Étant à la recherche d’explication de la non-
congruence du choix vocationnel, Lauzon s’est intéressé au lien qu’il pouvait y avoir, ou
non, avec l’identité de la personne. Pour se faire, trois outils ont été administrés, soit,
l’épreuve Groupements, le Questionnaire de l’identité professionnelle et l’Inventaire
Canadien des Intérêts professionnels (ICIP). Les sujets participants à son étude étaient du
nombre de 190. La particularité des caractéristiques de ces sujets est qu’ils ont été choisis
en fonction de leur appartenance à chacun des types de personnalité de Holland. Ainsi,
chacun des six types sont représentés dans des proportions semblables et ont y retrouve
39
également 60 % d’étudiants et 40 % de travailleurs. La conclusion de sa recherche a
confirmé que plus une personne avait un profil identitaire en équilibre, plus son choix
vocationnel était congruent, ainsi que l’inverse, à un profil identitaire en déséquilibre se
joignait un choix vocationnel non congruent. Une hypothèse qui n’a pas été confirmée
dans sa recherche et qui pourrait également mériter une attention particulière est au
niveau du lien entre l’épreuve Groupements et le questionnaire d’identité professionnelle
de Holland. En effet, la recherche de Lauzon n’a pas pu confirmer qu’une identité claire,
selon le questionnaire, révélait une identité en équilibre à l’épreuve Groupements. Il est
donc intéressant de constater que selon l’instrument choisi, l’identité « claire » ou en
« équilibre » n’est pas équivalente. Enfin, la recherche de Lauzon n’a pas confirmé qu’à
une identité claire, mesurée par le Questionnaire de l’identité professionnelle,
s’apparentait un choix vocationnel congruent. Les résultats n’ayant pas permis de liens
significatifs.
En 2003, Diane Poupart s’est intéressée à l’écart entre les garçons et les filles quant à
leurs réussites et leurs persévérances scolaires, ainsi qu’au lien entre la complexité du
développement identitaire et la réussite scolaire des étudiants. Pour mener sa recherche,
elle s’est basée sur leurs habiletés scolaires, mesuré par le Test d’habiletés scolaires Otis
Lenon (THSOL) et leur développement identitaires, définis par l’épreuve Groupements.
L’étude a été faite auprès de 115 élèves de secondaire 3 au Collège de Montréal. Poupart
voulait, dans un premier temps, étudier la valeur prédictive du TSHOL en confrontant les
résultats des tests aux véritables performances des élèves. Intéressée par les autres
recherches scientifiques mentionnant que les filles réussissent mieux que les garçons, elle
a toujours évalué les résultats en comparant les sexes. En lien avec l’épreuve
Groupements, Poupart voulait savoir s’il y avait une relation entre les profils identitaires
des élèves et leurs résultats au TSHOL, en somme, si les élèves qui réussissent ont un
profil identitaire en équilibre.
40
Plusieurs résultats ont été présentés. Premièrement, les résultats obtenus au THSOL, qui
avait été passé lors de la demande d’inscription au Collège, ont pu être comparés aux
résultats des étudiants lors de leurs études. Poupart a montré que la valeur prédictive du
TSHOL s’avérait efficace pour les filles, mais pas pour les garçons. En effet, l’étude des
résultats scolaires a montré que les filles maintenaient ou dépassaient leurs habiletés
scolaires prédis par le TSHOL plus souvent que les garçons. L’étude du TSHOL et des
résultats scolaires a aussi validé le fait que les garçons ont des résultats scolaires
inférieurs aux filles. Tous les élèves faisant partie de l’étude ont aussi fait l’épreuve
Groupements. De la même façon qu’avec le TSHOL, tous les protocoles ont été analysés
en lien avec les résultats scolaires de chaque élève. Poupart a ainsi présenté les résultats
qui indiquent que les élèves dont l’identité est développée de manière plus complexe, ont
des résultats scolaires plus élevés. Les résultats ont aussi montré que l’inverse était
présent : à une identité peu complexe s’associent des résultats scolaires faibles.
Finalement, la recherche de Poupart faite auprès d’un groupe composé de filles et garçons
de 3e secondaire a indiqué que les filles avaient une identité développée de manière plus
complexe que les garçons. Sa recherche confirme donc qu’il y a un lien entre la réussite
scolaire et la complexité du développement identitaire.
Tout récemment, en 2011, Roxana Staiculescu, a présenté une thèse sur la persévérance
scolaire des adultes, immigrants ou non, à la formation continue. Le but de sa recherche
était de savoir s’il y avait un lien entre l’état de la structure identitaire d’une personne et
sa persévérance aux études et de voir si cette relation était la même, que la personne soit
immigrante ou non. Par le fait même, la recherche permettait de comparer les résultats
déjà obtenus (par d’autres chercheurs), concernant le lien entre la persévérance scolaire et
l’identité, avec de nouveaux et plus nombreux résultats et de mesurer la validité
transculturelle de l’épreuve Groupements, outil de l’approche psychogénétique de
l’identité. Enfin, comme dernier objectif, Staiculescu voulait proposer un modèle
explicatif des difficultés de persévérance des adultes.
41
Les participants à l’étude étaient des étudiants québécois, immigrants (51,6 %) ou non
(48,4 %). La moyenne d’âge était de 34 ans. Ces élèves étaient admis se suivaient dans
des cégeps publics de Montréal ou des environs dans un contexte pluriethnique. Les
formations auxquelles les élèves étaient inscrits avaient une durée de 2 ans et moins
(intensif ou régulier) et menaient à une attestation d’études collégiales (AEC) ou à un
diplôme d’études collégial (DEC).
Pour analyser cette situation, Staiculescu a fait passer l’épreuve Groupements à 697
élèves québécois. Suite à la correction des protocoles, le niveau d’organisation identitaire
a été déterminé selon trois possibilités : élevé (2,1 %), moyen (14,3 %) ou faible
(83,5 %). Un questionnaire papier-crayon a aussi été rempli par tous les participants. Les
variables analysées par ce questionnaire représentaient les catégories suivantes : le statut
socio-économique, les variables personnelles, la certitude du choix, le soutien familial et
social ainsi que les autres variables pouvant avoir une influence sur le choix de
programme. Quatre de ces variables ont aussi été utilisées pour mesurer, lors du début de
formation, l’intention des élèves de persévérer dans leurs études. Quant à la persévérance
réelle aux études, elle a été identifiée en consultant les données officielles du registraire
des cégeps et celles transmises pas les conseillers pédagogiques des cégeps en questions.
De plus, les 117 élèves ayant abandonné leurs études ont été rejoints pour une entrevue
téléphonique.
La conclusion de la recherche présente une relation positive et significative entre la
structure identitaire de niveau moyen ou élevé et l’intention de persévérer, ce qui
confirme partiellement la première hypothèse. Cependant, il n’y a pas de lien significatif
quant à la réelle persévérance. Les chiffres soumis mentionnent que selon les résultats à
l’épreuve Groupements 83,5 % des élèves avaient un potentiel de décrochage élevé
(puisqu’ils montraient une structure identitaire en déséquilibre) alors que seulement
16,8 % ont réellement abandonné leurs études. Staiculescu explique cette situation en
proposant un modèle explicatif de persévérance où elle fait ressortir les variables
42
indépendantes influençant le maintien aux études. Par ailleurs, en reprenant la première
affirmation voulant qu’il y ait une relation significative entre la structure identitaire et
l’intention de persévérer, les résultats ont permis de confirmer le fait qu’à un niveau
d’organisation identitaire semblable, les immigrants ont autant le désir de persévérer que
les non-immigrants. Les résultats fournis par l’expérimentation de Staiculescu ont ainsi
permis de valider l’épreuve Groupements dans un contexte transculturel, quant à
l’intention de la persévérance scolaire. Selon Staiculescu, cela permet de mettre de côté
les différences culturelles pour expliquer les abandons scolaires chez la clientèle
immigrante. Enfin, en se rapportant à trois recherches menées dans un contexte de
formation et où l’épreuve Groupements avait été administrée à des étudiants, Staiculescu
a montré que, comme eux aussi l’avaient déjà souligné, plusieurs individus, en contexte
de formation, présentent un protocole en déséquilibre identitaire.
En ce qui a trait au monde du travail, en 1992, Stéphan Michiels a fait une recherche
auprès des cadres intermédiaires. Cette recherche portait sur les variables influençant le
rendement au travail. De façon plus précise, Michiels voulait savoir si l’identité, définie
avec l’épreuve Groupements, avait une influence sur la performance au travail. Pour
effectuer cette analyse, 129 cadres intermédiaires, travaillant dans une entreprise de
Montréal, ont été rencontrés. Chacun des sujets a fait l’épreuve Groupements et Michiels
a aussi pu étudier et mettre en relation leur rendement au travail, mesuré par leurs
évaluations de rendement effectuées à l’interne, sur une période de deux années. Deux
groupes ont été formés à partir de l’échantillon de base, soit les « performants » (sujets
dont les évaluations de rendement étaient supérieures à la moyenne, avaient eu ou étaient
proche d’avoir une promotion) et les « non performants » (sujets dont les évaluations de
rendement étaient égales ou inférieures à la moyenne, qui avaient été rétrogradés ou qui
avaient le même poste depuis plusieurs années). Les résultats obtenus permettent de
conclure que l’identité influence le rendement au travail. De ce fait, l’analyse de
l’épreuve Groupements des sujets a pu prédire leur appartenance au groupe des sujets
performants ou non performants. Il a été constaté que les sujets dont l’épreuve
Groupements présentait un niveau de complexité élevé en lien avec les schèmes science
43
et créativité étaient évalués à l’interne comme des employés performants. Les résultats
ont aussi permis de constater que parmi les sujets du groupe « performant », les plus
performants avaient confiance en eux et étaient capables de s’accommoder des tâches
routinières. Concernant l’épreuve Groupements, cela fait référence à la construction des
schèmes science et routine à la période réflexive. Cela a aussi permis d’identifier les
autres schèmes significatifs de rendements performants à d’autres périodes. Ainsi, à la
période protoréflexive, les sujets qui avaient la capacité d’innover (schème artistique)
étaient aussi performants et à la période transconfigurative, étaient performants ceux qui
avaient du leadership et de la conscience sociale (leadership et social). Les conclusions de
Michiels quant à l’utilisation de l’épreuve Groupements dans un contexte
organisationnel, sont que cet outil a une utilité dans la sélection d’employés, mais aussi
lorsque ces employés sont en poste, pour comprendre ce qui va ou ce qui ne va pas quant
à leur rendement au travail.
En 2003, Diane Dagenais s’est intéressée à l’apport de la théorie psychogénétique dans
un contexte de coaching de dirigeants d’entreprise. Le processus de coaching ayant pour
but d’aider la personne face aux difficultés qu’elle vit lors de l’exercice de son emploi,
Dagenais voulait savoir si ces difficultés, reconnues par la personne elle-même, étaient en
lien avec ses résultats à l’épreuve Groupements. Pour faire cette étude, 20 dirigeants et
dirigeantes des commissions scolaires, d’organismes communautaires ou de PME, tous
bacheliers, ont fait l’épreuve Groupements. Les résultats ont été mis en lien avec leurs
motifs personnels de demandes de coaching, ainsi qu’avec les difficultés que les
dirigeants avaient mentionné vivre dans l’exercice de leur fonction. Les résultats à
l’épreuve Groupement montrent que les difficultés que les personnes ont mentionnées
sont directement en lien avec une ou plusieurs dimensions de leur identité qui n’est pas
construite. Cela confirme l’apport de l’outil, l’épreuve Groupements et de l’approche
psychogénétique dans le coaching, pour la détermination des sources d’inconfort ou de
difficultés vécut en emploi.
44
En 2004, Sonia Poulin a présenté une étude exploratoire des caractéristiques
entrepreneuriales des travailleurs autonomes et de leur persistance dans cette fonction.
Poulin était intéressée à établir un profil psychologique scientifique du travailleur
autonome, rendant compte de son savoir-être plutôt que de son savoir-faire. Pour choisir
ses sujets d’étude, elle s’est aussi intéressée aux résultats de Vachon (1999). Portant sur
le même sujet, la recherche exploratoire de Vachon a conclu à la non-réflexivité des
sujets dans leurs résultats à l’épreuve Groupements. Vachon, ayant mesuré les sujets qui
venaient tout juste de débuter leur entreprise et avaient une mesure de soutien financier,
Poulin a mené son analyse sur les sujets qui œuvraient en moyenne depuis cinq ans et qui
ne bénéficiaient plus de mesure de soutien financier.
Pour évaluer ses 31 sujets, trois outils ont été utilisés soit, l’épreuve Groupements,
l’échelle d’anxiété IPAT, et l’inventaire des motivations au travail de Blais. Les résultats
ont montré que sur les 31 sujets, la majorité montrait à l’épreuve Groupements un profil
identitaire réflexif, ce qui diffère de ce qui avait été proposé par Vachon (1999). À
l’échelle d’anxiété IPAT, la totalité des sujets montrait une anxiété normale (comparé à
faible, moyenne, élevés et très élevée) et à l’inventaire des motivations au travail de
Blais, la majorité des sujets avaient une motivation intrinsèque (comparé à extrinsèque ou
à l’amotivation). La comparaison de ses résultats avec les résultats obtenus par Vachon
n’a pas été un sujet d’étude pour Poulin, mais elle a émis l’hypothèse que leurs clientèles
respectives n’étaient pas à la même étape dans leur processus de démarrage d’entreprise,
ce qui peut faire différer les résultats. Ainsi cela précise l’étude de Poulin et propose un
profil psychologique des travailleurs autonomes et de ce qui pourrait être, en même
temps, significatif de persistance dans ce mode de travail.
En 2003, Nathalie Bougeau a voulu étudier l’hypothèse qu’il y aurait une différence au
niveau de la réflexivité reconnue par l’épreuve Groupements, entre les gens vivant une
dépression et ceux qui ne vivent pas cet état. Pour se faire, elle a examiné deux groupes
composés de 20 personnes, totalisant 40 sujets à l’étude. Dans un groupe, chacun
45
présentait un état dépressif diagnostiqué et dans l’autre aucun n’en présentait. L’épreuve
Groupements a été utilisée avec les 40 participants pour évaluer leur réflexivité et les
comparer. Pour évaluer la réflexivité, Bourgeau a analysé quatre caractéristiques : le
nombre de périodes préréflexives, d’activités non réflexives, de régressives, ainsi que le
nombre de groupements non réflexifs. Les résultats ont montré que le groupe d’individus
avec un diagnostic dépressif avaient des résultats à l’épreuve Groupements moins
réflexifs que le groupe composé de personnes non-dépressive, ce qui confirme son
hypothèse. De façon plus précise, il y avait une différence significative ou très
significative entre les personnes avec et sans un diagnostic de dépression, dans les
comparaisons du nombre de périodes préréflexives, de régressives et de groupements non
réflexifs. Comme Bourgeau l’a nommé, à l’épreuve Groupements ces renseignements
informent, entre autres, sur l’impulsivité, la rigidité, le peu de nuance, le sentiment de
culpabilité, de non-maîtrise de sa propre vie, la difficulté avec l’ambigüité, avec la
gestion du quotidien, le manque d’autonomie et l’influence de l’environnement. Elle
ajoute que ce sont également des éléments présents et reconnus lors d’une dépression,
selon entre autres le DSM IV.
Dans un même ordre d’idée, en 2007, Line Bilodeau a fait une recherche sur l’apport de
l’approche psychogénétique face à l’identification et la compréhension des
problématiques d’adaptation liées à l’épuisement professionnel. Bilodeau s’est basée sur
plusieurs sources pour identifier l’épuisement professionnel, dont l’inventaire de
dépression de Beck (1996), les critères étudiés par Bibeau et Al (1989) et les symptômes
associés à l’épuisement professionnel et définis par Pines (1982) et Maslach (1982).
Quarante sujets ont fait partie de l’étude, dont 28 étaient des femmes et 21 sujets étaient
des bacheliers (ères). L’âge moyen était de 36 ans. Ces personnes faisaient partie d’un
programme d’insertion pour aider les gens vivant, ou ayant vécu, un épuisement
professionnel et désirant réintégrer le marché du travail d’où ils étaient absents depuis
moins d’un an.
46
Trois problématiques d’adaptation ont été identifiées avec l’épreuve Groupements parmi
les sujets à l’étude. Tous les sujets de l’étude avaient une ou plusieurs de ces difficultés.
Celles-ci sont en lien avec le concept de « science » (70 %), qui représente, lorsqu’il est
en déséquilibre, des difficultés d’affirmation face à l’autorité, un manque de confiance en
soi et un sentiment de non-maîtrise de sa vie. Deuxièmement, des difficultés sont
ressorties quant au concept « social » (67,5 %), qui désigne un trouble de l’intimité et de
l’engagement et enfin, l’anxiété de performance (60 %) a aussi été présente chez certains
participants. Faisant référence aux critères ou symptômes associés à l’épuisement
professionnel que Bilodeau a présenté dans son étude, ces déficits identifiés par l’épreuve
Groupements, sont des difficultés qui empêchent les personnes d’être bien dans leur
emploi et qui peuvent les mener à l’épuisement professionnel.
Dans un autre d’idée, André Bricault, en 2001, s’est intéressé aux profils plats identifiés
au Myers Briggs Type Indicator (MBTI). Il voulait savoir si ces résultats au MBTI, dit
non discriminés, pouvaient être en lien avec une organisation en déséquilibre à l’épreuve
Groupements. Pour faire cette recherche, il s’est basé sur les résultats au MBTI et à
l’épreuve Groupements de 31 sujets. Ces participants, consultant à ce moment en
orientation, étaient majoritairement âgés de plus de 38 ans et bacheliers. Sur ces 31
sujets, 23 présentaient un profil non discriminé au MBTI et 28 présentaient une identité
en déséquilibre. L’analyse des résultats a montré que 91 % des individus avec un profil
identitaire en déséquilibre avaient également un profil peu discriminé au MBTI. Par
ailleurs, les résultats ont aussi montré que 87 % des individus avec un profil discriminé
au MBTI, avaient aussi un profil identitaire en déséquilibre.
Dans ce même sens, en 2001, Marcelle Therrien s’est intéressée au lien possible entre
l’épreuve Groupements et le Guide de recherche d’une orientation professionnelle
(GROP). Plus particulièrement, elle voulait savoir s’il y avait un lien entre les
caractéristiques reconnues pour le type « écologiste » du GROP et la carence affective ou
la difficulté de distance affective, pouvant être identifiées avec l’épreuve Groupements.
47
Pour faire cette étude, Therrien s’est basée sur un groupe de 20 femmes, âgées entre 25 et
55 ans, participantes à une démarche d’orientation ou de recherche d’emploi. Pour tous
les sujets, le type Écologiste était présent dans leur code sommaire et dans 50 % des cas,
ce type était à la quatrième position. Pareillement, dans leurs résultats à l’épreuve
Groupements, les sujets présentaient en résiduel le ou les cartons 7, 21 et 23, qui
symbolisent la carence affective ou la difficulté de distance affective. L’analyse des
résultats aux deux outils a confirmé que 65 % des sujets avaient une carence affective ou
un manque de distance affective.
En résumé, ces essais nous enseignent que le diagnostic de l’identité permet d’être
informé et de prévoir qu’habituellement :
En milieu scolaire,
les élèves en équilibre au niveau de leur identité à la fin de leurs études secondaire
maintiennent leurs études collégiales et leur choix de programme, de même que
les élèves en déséquilibre changent de programme ou abandonnent leurs études.
(A. Lauzon, 1993)
plus une personne a un profil identitaire en équilibre, plus son choix vocationnel
est congruent, ainsi que l’inverse, à un profil identitaire en déséquilibre se joint un
choix vocationnel non congruent. (L. Lauzon, 1996)
les élèves dont l’identité est développée de manière plus complexe, ont des
résultats scolaires plus élevés. (Poupart, 2003)
les élèves dont l’identité est peu complexe ont des résultats scolaires faibles.
(Poupart, 2003)
les filles ont une identité développée de manière plus complexe que les garçons.
(Poupart, 2003)
48
il y a une relation positive et significative entre la structure identitaire de niveau
moyen ou élevé et l’intention de persévérer. Quant à la persévérance réelle,
plusieurs variables influencent la persévérance aux études et s’ajoutent au
diagnostic identitaire, tels : les variables sociodémographiques, personnelles, la
certitude du choix, le soutien familial et social, ainsi que d’autres variables ayant
une influence sur le choix du programme. Seul, le diagnostic identitaire ne permet
pas de prédire la persévérance scolaire. (Staiculescu, 2011)
les résultats fournis par l’expérimentation de Staiculescu ont aussi permis de
valider l’épreuve Groupements dans un contexte transculturel, quant à l’intention
de la persévérance scolaire. (Staiculescu, 2011)
En employabilité les essais nous montrent que le diagnostic de l’identité permet d’être
informé et de prévoir qu’habituellement :
les travailleurs jugés « performants » par leur milieu, présentaient à l’épreuve
Groupements un niveau de complexité élevé en lien avec les schèmes science et
créativité. (Michiels, 1992)
lors de demande de coaching pour les dirigeants, les difficultés que ceux-ci
voulaient travailler étaient directement en lien avec une ou plusieurs dimensions
de leur identité non construite. (Dagenais, 2003)
les travailleurs autonomes qui persistent dans leur mode de travail, montrent à
l’épreuve Groupements un profil identitaire réflexif. (Poulin, 2004)
les personnes présentant un diagnostic dépressif avait des résultats à l’épreuve
Groupements moins réflexifs qu’un groupe de personne non-dépressive.
(Bourgeau, 2003)
lors de situation d’épuisement professionnel, trois problématiques d’adaptation
ont été identifiées avec l’épreuve Groupements, soit le déséquilibre des
dimensions science et social, ainsi que la problématique de l’anxiété de
performance. (Bilodeau, 2007)
49
En lien avec d’autres outils psychométriques utilisés en orientation, les essais ont montré
que :
le MBTI ne permet pas de distinguer une identité en équilibre ou en déséquilibre
selon l’épreuve Groupements. Plus précisément il a été remarqué que les profils
présentant une identité en déséquilibre à l’épreuve Groupements avaient autant un
profil discriminé que peu discriminé au MBTI. (Bricault, 2001)
plus de la moitié des sujets présentant un profil Écologiste au GROP ont une
carence affective ou un manque de distance affective, identifiée par l’épreuve
Groupements. (Therrien, 2001)
Ces informations servent surtout à nous situer face au lien direct entre ce qui est vécu
dans les milieux d’études ou de travail et ce que les diagnostics obtenus grâce à l’épreuve
Groupements permettent de cibler. Cela peut aider les conseillers d’orientation à
identifier une problématique possible plus rapidement, à l’évaluer avec son élève (ou
client-e) et selon le besoin et la situation, à intervenir directement à la source des
difficultés afin d’amener un changement positif.
On pourrait se demander si les conseillers d’orientation qui utilisent l’épreuve
Groupements voient eux aussi ces avantages et s’ils les vivent dans leur pratique. Jusqu’à
ce jour, on a peu parlé de leur pratique au quotidien puisque les essais s’intéressaient
surtout à aller voir dans le monde réel, les prédictions du diagnostic. C’est ainsi que le
présent essai a pour but de répondre à la question suivant :
Quelles sont les pratiques efficientes de conseillers et de conseillères
d’orientation utilisant l’épreuve Groupements et l’approche
psychogénétique de l’identité dans un contexte d’orientation?
50
2. Cadre conceptuel
Le cadre conceptuel qui suit est conçu en deux parties. La première partie présente une
conception des acquis scolaires et des pratiques de l’orientation scolaire et
professionnelle au Québec. La seconde partie présente de façon détaillée la théorie
associée à l’épreuve Groupements et à l’approche psychogénétique de l’identité. Puisque
ceux-ci sont présents dans les pratiques de l’orientation des conseillers d’orientation
depuis 30 ans déjà, un survol des moments clés, de sa conception à aujourd’hui, est
également présenté.
2.1 La pratique des conseillers et conseillères d’orientation
Avec tous les mouvements et problématiques qui se vivent actuellement sur le marché du
travail et en considération des prévisions concernant le vieillissement de la population, le
Québec d’aujourd’hui et de demain doit prendre soin de ses travailleurs et futurs
travailleurs. La pertinence sociale des conseillers d’orientation face aux défis en
éducation et en employabilité se constate et est justifiée, d’autant plus que leurs
expertises face à l’interrelation entre l’individu et son milieu. Au fil des années,
l’orientation s’est actualisée pour répondre de façon adéquate et actuelle aux besoins des
individus et du marché du travail. Cette science s’est renouvelée et a ses propres bases
théoriques au niveau du choix de carrière et du développement vocationnel. À ces
connaissances, s’ajoutent celles associées à la psychologie et aux différentes approches et
théories relatives à la compréhension de l’être humain, ce qui permet aux conseillers
d’orientation d’être des professionnels reconnus au niveau de la dynamique individu -
école - travail (OCCOQ, 2010a).
51
2.1.1 L’orientation : une science?
Avant de présenter les acquis académiques des conseillers d’orientation, il semble
d’abord important de souligner que ces acquis sont reconnus au niveau scientifique.
Beaugrand (1982), dont les propos sont rapportés par Bujold et Gingras (2000), propose
cette définition de la science :
Le but fondamental de la science serait d’établir des théories ou de trouver
des explications générales de phénomènes globaux, plutôt que de chercher
à expliquer des phénomènes considérés isolément. (Bujold et Gingras,
2000, p.19)
Par ailleurs, pour être considérées utiles, les théories doivent se conformer à certains
critères (Bujold et Gingras, 2000). Ces caractéristiques permettent d’avoir un repère pour
évaluer les approches psychologiques et les théories vocationnelles enseignées aux
conseillers d’orientation. Selon Bujold et Gingras, les théories se doivent :
Être assez simple pour se révéler compréhensible;
Tenir compte des faits;
Être cohérente;
Être suffisamment précise pour se prêter à la vérification empirique ou expérimentale;
Permettre d’expliquer et de prédire un nombre assez grand de phénomènes;
Être utilisable;
Être étayée par la recherche. (Bujold et Gingras, 2000, p.22-23)
Par ailleurs, suite à leurs études universitaires, les conseillers d’orientation débutent leur
pratique professionnelle et c’est alors qu’ils sont font face aux réalités qu’ils ont étudiées.
C’est aussi à ce moment que certaines approches sont davantage priorisées que d’autres,
de par le lien qu’ils font face aux défis qu’ils vivent dans leur quotidien.
52
La suite de cet essai présente les connaissances de base des conseillers d’orientation,
acquises lors de leurs formations. Naturellement, celles-ci peuvent varier selon le lieu de
formation ou les choix personnels de l’étudiant, mais la présentation qui suit permet
d’identifier les bases théoriques les plus communes des conseillers d’orientation, servant
par la suite de fondement au développement de leur jugement professionnel.
2.1.2 Les bases théoriques au niveau des approches psychologiques
Les approches psychologiques qui sont étudiées en orientation sont en majorité issues des
principaux courants de la psychologie. Une approche psychologique est une façon de voir
une situation, un angle pour aborder un problème. Chaque professionnel ne voit pas la
nature humaine de la même façon et ainsi, chacun privilégie une ou plusieurs approches
pour intervenir auprès de sa clientèle lors des difficultés qu’ils rencontrent (Papalia,
Wenkos Olds, 1988). Les approches ou courants qui seront présentés sont ceux
représentant les courants existentiel ou humaniste, psychodynamique ou analytique,
systémique ou interactionnel, ainsi que cognitive et béhaviorale. Cette classification
permet d’identifier certaines théories ou théoriciens de façon précise, surtout ceux
associés aux débuts de ces courants. Cependant, pour les théories plus actuelles, il peut
être difficile de les catégoriser définitivement en lien avec l’une ou l’autre des approches
puisque plusieurs théoriciens ont eu des sources d’inspiration provenant d’approches
différentes et ont apporté leurs propres visions suite à leurs observations cliniques. La
présentation qui en sera faite peut donc différer selon d’autres auteurs ou chercheurs.
53
Les approches existentielles ou humanistes
Les approches existentielles ou humanistes conçoivent que la personne a du pouvoir sur
elle-même et qu’elle a la capacité de modifier ses difficultés et son existence. Le but des
interventions est donc de faciliter la connaissance et l’exploration de soi (Ordre des
psychologues du Québec (OPQ), 2013). L’approche humaniste est inspirée en grande
partie de Carl Roger. La relation de confiance entre le thérapeute et le client, basée sur le
respect, l’empathie et l’engagement émotionnel font partie, entre autres, de ce qui est
encore reconnu et étudié en psychologie et en orientation. L’histoire subjective que bâtit
la personne par rapport à elle-même, ses conflits, ou les liens qu’elle voit dans ses
relations sont traités en priorité. Par un entretien non directif qui permet à la personne
d’explorer certains aspects d’elle-même, la personne peut elle-même reconstruire sa
personnalité. Le conseiller devient une sorte de miroir pour son client (Guichard et
Huteau, 2006). La théorie d’Abraham Maslow, bien connue aussi en orientation pour sa
pyramide des besoins (physiologiques, de sécurité, d’appartenance, d’estime et
d’accomplissement) est aussi un exemple de théorie en lien avec le courant humaniste.
Selon Maslow les besoins des êtres humains s’atteignent lorsque le besoin inférieur est
comblé. Dans les années soixante-dix, les groupes de croissance personnelle sont de plus
en plus nombreux. Inspirés de l’approche humaniste, certains sont cependant critiqués et
qualifiés de thérapies narcissiques et de producteurs de gourous (Lebourgeois, 1999).
Quant aux approches existentielles, elles peuvent se représenter par les approches
développées par Rollo May ou Irving Yalom. Inspirées à la base par des théories
philosophiques, les approches existentielles portent surtout sur le sens accordé à la vie et
sur des concepts tels que l’anxiété existentielle, la liberté et l’authenticité. Tout comme
pour l’approche humaniste, les thérapeutes misent sur la relation authentique envers leur
client (Lecompte-Drouin, 2007).
54
Les approches psychodynamique ou analytique
À l’inverse, l’approche psychodynamique ou analytique conçoit que la personne a moins
de pouvoir sur elle-même puisque la source de ses inconforts, ou problème vient de son
inconscient, de pulsions refoulées ou de conflits vécus dans l’enfance, qui sont non
résolus. Le psychologue, ou psychanalyste, rend donc conscient ces conflits et agit
ensuite sur ceux-ci dans le but d’éliminer les problématiques actuelles (OPQ 2013).
Sigmund Freud a fortement influencé ce courant. Il apporta une notion nouvelle quant à
tout ce qui touche l’inconscient. Freud définit l’identité sous la forme d’un iceberg où la
plus grande partie, qui est cachée, est l’inconscient. Sa définition de la structure de la
personnalité est bien connue. Brièvement, rappelons que selon Richard (1998) cette
structure est divisée en trois parties. Le « Ca » représente un état inconscient et individuel
via les pulsions et les désirs, le « Moi ou l’EGO » symbolise le contact avec la réalité et
la raison qui pour régulariser son monde intérieur, instaure des mécanismes de défense, et
que le « Surmoi » représente la conscience collective et la morale, venant principalement
de la famille immédiate et du milieu dans lequel a évolué l’enfant (Ibid.).
Freud est également reconnu pour les stades de développement de l’enfant qu’il a conçu
et pour les complexes qui peuvent s’y développer. Selon lui, une grande partie des
problématiques adultes viennent du Surmoi, ce qui met l’emphase en thérapie sur la
découverte de l’inconscient du client. Les méthodes les plus utilisées par Freud étaient au
niveau des associations libres que faisait le client, par l’expression de ce qu’il ressent, de
ses angoisses ainsi que de ses rêves (Richard, 1998). Les thérapies psychanalytiques
suggèrent de laisser le client parler librement, sans l’interrompre, de maintenir les
silences, ce qui permet au client de faire des associations libres et au psychanalyste,
d’avoir accès à la partie inconsciente de son client, à ce qui y est refoulé.
Dans la littérature sur la psychologie, Alfred Adler est souvent identifié comme un
dissident de Freud (Richard, 1998). La base de leur désaccord semble être concernant la
55
proposition de Freud, voulant que les pulsions structurent l’identité de la personne. De
son côté Adler s’oppose à ces faits et propose plutôt que ce qui forme la personne est en
lien avec le sentiment de perte de pouvoir ressenti dans l’enfance. Ces sentiments peuvent
alors se transformer en sentiment d’infériorité. (C’est d’ailleurs Adler qui a inventé le
terme « complexe d’infériorité »). Dépendamment de la façon dont ce complexe est
résolu ou non dans l’enfance, cela peut définir les manifestations possibles ensuite chez
l’adulte. Ainsi la psychologie individuelle d’Adler s’applique à connaitre comment la
personne compense positivement ou négativement ses faiblesses ou son sentiment
d’infériorité. Par exemple, un enfant ayant été malade toute son enfance peut décider par
la suite d’étudier en médecine, ou une personne de petite taille peut développer une
agressivité et rechercher le pouvoir (Richard, 1998).
Un autre dissident de Freud est Carl Jung. Son implication dans la psychologie analytique
est reconnue au niveau de certains concepts, mais aussi au niveau de la psychométrie. Il
s’est intéressé aux références que les gens faisaient face à la religion, ou envers les
mythes des contes de fées, pour expliquer divers phénomènes naturels. Cela l’a amené à
développer les concepts d’archétypes (symbole, représentation mentale liée à
l’inconscient collectif), d’anima (féminin) et d’animus (masculin), qui font référence au
côté inconscient de Freud. Tandis que Freud proposait que l’inconscient est individuel et
unique à chaque personne, Jung, lui, divisait l’inconscient en deux, avec une part
individuelle et une autre collective (Richard, 1998). Ses recherches l’ont aussi amené vers
l’élaboration de types de personnalité. Ces résultats sont aussi les bases théoriques qui ont
servi, en 1962, à Isabel Briggs Myers et Katherine Cook Briggs pour l’élaboration du
Myers Briggs Type Indicator (MBTI) qui définit les tendances au niveau du tempérament
(Guichard et Huteau, 2006).
56
Les approches systémiques ou interactionnelles
Dans les approches systémiques ou interactionnelles, l’accent est mis sur les interactions
avec l’autre et sur les effets que cela peut avoir sur la personne. L’environnement social
et les liens que la personne entretient avec ses proches sont donc la source de cette
approche. La résolution des difficultés se fait via la compréhension des effets positifs ou
négatifs de son comportement sur l’autre et ensuite par la modification des
comportements de chacun. Cette approche est souvent utilisée en groupe ou en thérapie
familiale (OPQ, 2013). L’école de Palo Alto, via la thérapie brève qui y est proposée, fait
partie de cette approche systémique. Très utilisée également pour les groupes, cette
approche semble aussi être reconnue pour aider à diminuer le stress, ainsi que pour les
phobies et les troubles obsessifs-compulsifs. Un théoricien reconnu en lien avec l’école
de Palo Alto est Paul Watzlawick (Delroeux, 2008). Tout d’abord analyste « jungien »,
Watzlawick s’intéresse ensuite plus particulièrement à la communication, au langage, à la
logique ainsi qu’au côté intuitif de la communication. Évoluant professionnellement
auprès de Bateson et Erikson, il remarqua que leurs réussites en thérapie provenaient de
faits difficiles à expliquer, tel un rire du patient (Delroeux, 2008). Il présenta cinq
axiomes du langage (Watzlawick, 1979). Le première est qu’il est impossible de ne pas
communiquer, le deuxième indique qu’il y a deux niveaux dans la communication, soit le
contenu et la relation, le troisième est que la nature de la communication dépend de la
séquence de communication, le quatrième mentionne qu’il y a deux modes de langage,
soir l’analogique et le digital et enfin, le dernier axiome du langage selon Watzlawick
(1979) mentionne que les échanges de communication sont systémiques ou
complémentaires (Ibid.).
Watzlawick s’intéresse également au moment présent dans la thérapie, recherchant à
modifier la situation actuelle qui affecte le patient sans nécessairement l’aider à revenir
aux sources, ou à faire comprendre aux patients l’origine de ses difficultés. Ce type de
thérapie consiste à recadrer la situation et non, comme les approches behavioristes à
récompenser ou punir un comportement (Delroeux, 2008).
57
Les approches behaviorale et cognitive
En ce qui a trait aux approches behaviorales, les difficultés sont associées à un
apprentissage inadéquat qu’a fait la personne lors d’interactions avec son environnement.
De façon synthétisée, disons que le psychologue ou thérapeute doit alors faire adopter de
nouvelles pensées ou de nouveaux comportements à la personne pour résoudre ses
problèmes (OPQ, 2013). Ivan Pavlov (connu pour son exemple du chien qui salive suite
au son d’une cloche) et Frédéric Skinner qui a développé le concept du conditionnement
opérant (avec « La boite à Skinner » il démontrait qu’un rat avait appris à se nourrir via
un bouton poussoir) sont des pionniers dans cette approche (Papalia, Wenkos Olds,
1988). Selon Guichard et Huteau (2006), la théorie sociale cognitive du psychologue
canadien Albert Bandura, découle de l’amalgame des théories behaviorales et cognitives
qui font partie du courant nommé néo-behaviorale. Plus récente que Pavlov et Skinner, sa
théorie de l’apprentissage social, élaborée en 1977, propose, en résumé, que
l’apprentissage se fait socialement, par imitation ou par observation. Trois facteurs sont
importants pour Bandura et s’interinfluencent, il s’agit de la personne, du comportement
et de l’environnement. Ce psychologue s’est aussi fait reconnaître via son concept de
sentiment d’auto-efficacité, préconisant que pour réussir, un individu devait
préalablement avoir confiance en ses capacités (Guichard et Huteau, 2006).
De son côté, l’approche cognitive propose que les difficultés soient causées par le
traitement inapproprié de l’information que la personne fait d’une situation. Ainsi,
l’approche cognitive se réfère aux processus mentaux, aux façons qu’utilisent les
individus pour percevoir leur environnement et pour résoudre leurs difficultés (OPQ,
2013). Cette approche fut beaucoup étudiée et plusieurs chercheurs lui ont donné un
angle particulier, ce qui fait qu’on pourrait la subdiviser en plusieurs branches. En
premier lieu, mentionnons une théorie fortement connue et qui est aussi une source pour
les autres branches de ce qui touche le cognitivisme : la théorie du développement
cognitif de Jean Piaget, théorie aussi appelée constructiviste par certains auteurs. On doit
à Piaget, entre autres, les stades de développement de l’intelligence, qui sont une
58
référence, surtout dans le développement de l’enfant. Pour comprendre comment une
personne apprend, Piaget a étudié les enfants et a défini les processus mentaux. Il a
proposé que l’apprentissage cognitif se construise d’une façon séquentielle, hiérarchique
et en contact avec l’environnement. L’action mentale de recevoir et organiser les
informations venant de l’extérieur a été nommée « schème ». Piaget a ensuite proposé
deux processus, soit l’assimilation (les nouvelles informations sont interprétées et
incorporées selon les schèmes déjà en place) et l’accommodement (les nouvelles
informations viennent changer et modifier les schèmes) qui définissent la construction
des apprentissages (Piaget, 1964).
Cela fait le lien avec une autre branche de la psychologie cognitive qui est associée au
traitement de l’information. Rouzier et Hermann (1992) soulignent : « En psychologie
cognitive, on traite les évènements psychologiques en termes de transformations de
l’information de l’unité d’entrée à l’unité de sortie » (p.17). Le cerveau semble alors
étudié comme un ordinateur et l’on propose de comparer les caractéristiques de la
mémoire humaine et de la mémoire de l’ordinateur : comment est reçue l’information, où
elle va et comment elle est repérée au moment voulu (Idib.). Cela peut aussi faire
référence à la mémoire, à la possibilité de garder l’information et d’y avoir accès au
moment voulu, au nombre de données qu’une personne peut retenir. C’est aussi en lien
avec cette approche que les différentes parties et fonctions du cerveau sont étudiées. Au
niveau de la mémoire à court terme, le chiffre magique 7 (+ ou – 2) indiquerait, selon les
recherches de George Miller, le nombre d’informations qu’une personne peut retenir,
devenant aussi une limite de charge informative (Rouzier, Hermann, 1992).
Toujours en lien avec l’approche cognitive, les thérapies cognitivo-comportementales
(TCC) ont aussi vus le jour suite aux recherches de plusieurs théoriciens, en partie dans le
but d’aider les gens à surmonter des problèmes de santé mentale dont l’anxiété. Selon
Cottraux (2007), les TCC ont connus trois vagues; comportementale, cognitive et
émotionnelle. La première vague s’associe à l’approche behaviorale, vue plus tôt, avec en
59
tête le modèle de Skinner. La deuxième vague, dite cognitive, inclut entre autres la
thérapie rationnelle émotive d’Albert Ellis, conçue en 1962 et connue entre autres pour
ces dix croyances irrationnelles (Cottraux, 2007). Un système de traitement de
restructuration cognitive proposait de suivre des étapes pré-établies, qui menaient vers
l’acceptation inconditionnelle de soi. Ces étapes étaient de réactiver une croyance
irrationnelle, de la déterminer, d’analyser les conséquences comportementales et
cognitives chez la personne et de corriger ces croyances (Ibid.). Dans cette même vague
est présente la thérapie de la dépression, mise en œuvre en 1963 par Aaron Beck, incluant les douze distorsions cognitives qu’il a élaborées. Beck proposait de repérer les
émotions négatives ressenties par l’individu et de les relier aux pensées automatiques
qu’avaient la personne. Suite à l’identification des pensées automatiques (ou des
distorsions), il est proposé de modifier ces pensées en faisant l’effort de les analyser et de
proposer une rectification où elles deviennent davantage rationnelles que spontanées
(Cournoyer, 2010). Enfin, la troisième vague des TCC, la vague émotionnelle, est
représentée entre autres par Jeffrey Young qui a élaboré la thérapie des schémas dont le
but est d’aider les patients présentant des troubles de la personnalité (Cottraux, 2007).
Young présente dix-huit schémas précoces inadaptés, qui sont reliés à cinq domaines de
besoins affectifs non comblés. Les schémas représentent la mémoire d’émotions ou de
cognitions négatives vécues ou ressenties dans l’enfance ou l’adolescence. Dans la vie
adulte lorsque ces schémas sont réactivés par certains évènements, la personne aura
tendance à réagir de façon dysfonctionnelle. Cette thérapie propose de mettre à jour ces
émotions et de les modifier en favorisant des modes d’adaptation plus sains et équilibrés
(Cottraux, 2007).
60
2.1.3 Les bases théoriques au niveau vocationnel
Les approches et théoriciens que l’on vient d’aborder sont étudiés en orientation, ainsi
que plusieurs autres, afin de connaitre les différentes façons d’expliquer l’humain. Par
ailleurs, l’orientation a ses propres bases théoriques au niveau du choix de carrière et du
développement vocationnel. Trois grands thèmes seront priorisés afin de présenter les
bases théoriques de l’orientation : le développement vocationnel et le counseling, le
traitement de l’information en lien avec la prise de décision, ainsi que l’évaluation via les
outils psychométriques. Ne pouvant élaborer sur chacune des théories dans le cadre de cet
essai, ce résumé se veut d’être précis, mais ne représente pas la globalité et la complexité
de chacun des concepts, ni l’analyse de leurs points forts, ou des critiques leur étant
associées. De même, en regard de l’ampleur des connaissances théoriques qu’acquièrent
les conseillers d’orientation, la présentation qui suit découlera principalement de deux
ouvrages de référence reconnus dans le secteur, soit : Choix professionnel et
développement de carrière : théories et recherches (2e édition), de Charles Bujold et
Marcelle Gingras (2000) et Psychologie de l’orientation, de Jean Guichard et Michel
Huteau (2006). Quant aux informations découlant de la pratique professionnelle des
conseillers d’orientation, les sources majeures de référence sont les publications de
l’Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec.
Le développement vocationnel
Selon Guichard et Huteau (2006), il semble qu’un des premiers acteurs importants au
niveau de l’orientation soit Alfred Binet, psychologue français. Il définissait l’orientation
comme une pratique utilisée pour combler les besoins de la société « […] où chacun
travaillerait selon ses aptitudes reconnues de manière à ce qu’aucune parcelle de force
physique ne fût perdue pour la société » (Binet, 1908, cité par Guichard et Huteau, 2006,
p.5).
61
Presque au même moment, en 1909 aux États-Unis, Frank Parsons développe sa vision de
l’orientation, qui porte davantage son attention à l’individu et à son enthousiasme face à
son emploi. Il cite même que le choix d’un emploi est aussi important que le choix d’un
mari ou d’une épouse. La définition qu’il fait de l’orientation peut paraître très actuelle,
bien qu’elle date de plus de cent ans.
In the wise choise of a vocation there are three broad factors :
(1) a clear understanding of yourself, your aptitudes, abilities, interests,
ambitions, resources, limitations and their causes;
(2) a knowledge of the requirements and conditions of success, advantages
and disadvantages, conpensation, opportunities, and prospects in differnt
lines of work :
(3) true reasoning on the relations of these two groups of facts (Parsons,
1909, p.5).
Comme on le voit, la thématique de la connaissance de soi, au-delà des aptitudes, prend
ainsi sa place en orientation et dans l’évaluation de l’adéquation individu-emploi.
Cinquante ans plus tard, Elie Ginzberg et ses collaborateurs ont proposé une des
premières approches développementales du choix professionnel (Guichard et Huteau,
2006). Conçue en trois périodes, cette échelle développementale présente aussi plusieurs
stades associés à des âges portant d’« avant 11 ans » à « après 17 ans ». Cette approche
est surtout connue pour sa troisième période débutant à l’âge de 17 ans, où les stades
d’exploration, cristallisation et spécification représentent les comportements
d’exploration, d’analyse, d’évaluation et d’engagement chez les jeunes dans leurs
démarches d’orientation (Ibid.).
Presque en même temps, en 1953, Donald E. Super proposa lui aussi sa théorie, qui
rejoint une clientèle plus âgée que celle de Ginzberg. La théorie de Super présente
62
quatorze propositions quant à l’orientation, regroupées sous quatre concepts qu’il a
étudiés et développés (Bujold et Gingras, 2000). Le premier concept est en lien avec la
psychologie différentielle, où les caractéristiques des gens sont considérées de façon
individuelle. Le deuxième concept se rapporte à la psychologie développementale. Super
présente en effet, des stades de développement (croissance, exploration, établissement,
maintien et désengagement), ainsi que les tâches y étant reliées, ce qui permet de mesurer
la maturité vocationnelle de l’individu. Le troisième concept présente les facteurs
sociaux, qui sont les éléments susceptibles d’influencer l’individu dans son choix
vocationnel ou dans son maintien. Il s’agit, entre autres, des parents et du contexte socio-
économique dans lequel évolue l’individu. Enfin, Super a également présenté ses
propositions quant au concept de soi qu’il définit de deux façons : le concept de soi et les
concepts de soi. Selon Super, le soi se défini comme : « […] ce que la personne est »
alors que les concepts de soi sont représentés sous forme d’une : « […] constellation, plus
ou moins organisée, de tous les concepts de soi » (Super, 1963, cité par Bujold et
Gingras, 2000, p.111).
La théorie de Super a eu un apport considérable en orientation, de même que le « Career
Patten Study » qui est une étude débutée en 1951 avec des collaborateurs. Cette recherche
a été menée pendant près de 22 ans auprès de plus d’une centaine de garçons ayant au
départ 14 ans et a servi, entre autres, à évaluer leur maturité vocationnelle, ainsi qu’à
élaborer plusieurs théories et outils par Super et par d’autres collaborateurs (Bujold et
Gingras, 2000, Guichard et Huteau, 2006). Pour résumer sa théorie, Super a conçu une
présentation visuelle de sa théorie qu’il a nommée : l’Arc-en-ciel de la carrière.
63
Figure 2 : L’Arc-en-ciel de la carrière
Source : Bujold, C. et M. Gingras. (2000). Choix professionnel et développement de carrière : théories et
recherches (2e édition). Boucherville : Gaetan Morin Éditeur ltée.
Dans ces mêmes années, John Holland conçut sa typologie qui fut également un apport
important dans le monde de l’orientation (Bujold et Gingras, 2000). La première version
de sa théorie fut présentée en 1959 et connue nombres de changements et améliorations
jusque dans les années quatre-vingt-dix. Son hexagone représentant six types de
personnalité est encore une image de base en orientation. La théorie de Holland propose
que la majorité des individus s’identifie à un (ou plusieurs) type de personnalité (réaliste,
investigateur, artistique, social, entreprenant et conventionnel) selon un ensemble de
traits, d’intérêts, d’aptitudes et de valeurs les caractérisant. En plus d’avoir déterminé ces
types de personnalité et conçu un questionnaire pour les identifier, Holland présente aussi
six types d’environnements professionnels leur correspondant. Ainsi la définition du (ou
64
des) type (s) de personnalité de l’individu permet de prédire l’environnement de travail y
correspondant. Afin de peaufiner cette équation, Holland élabora quatre concepts, soit la
cohérence, la différenciation, l’identité et la congruence. De façon synthétisée, le concept
de cohérence correspond au lien existant entre les types de personnalité présents chez la
personne. À cet effet, l’hexagone représentant les six types de personnalité dans l’ordre
proposé (tels qu’énuméré ci-haut) présente une image claire des types s’opposant et se
ressemblant. La différenciation correspond au degré de précision selon lequel une
personne ou un environnement sont définis. On analyse, par exemple, s’il y a un type
dominant ou si tous les types sont égaux, ce qui présente dans ce dernier cas, un profil
indifférencié. Pour ce qui a trait au concept d’identité, il représente l’image stable qu’une
personne a d’elle-même. Lorsque la personne se sent mature et confiante en elle, les
résultats sont eux aussi stables et représentent effectivement ce que la personne pense
d’elle-même. Quant à la congruence, concept le plus important selon Holland, il
représente la ressemblance entre les types de personnalités et l’environnement où la
personne travaille. Œuvrant dans un milieu identique à son profil, la personne y trouvera
davantage de satisfaction (Ibid.).
Comme toute science, ces théories venant d’être décrites ont évolué soit via leur auteur,
soit par d’autres personnes qui en ont été inspirées. Certaines parmi elles poursuivent ce
que proposait Ginzberg en 1951, ou Super, en 1959, avec des phases développementales
identifiant les étapes du processus d’orientation. Se basant sur ces phases, des actions ont
été mises en place dans les écoles pour aider les jeunes à faire leur choix de carrière et
d’études. Par exemple l’Activation du développement vocationnel et personnel (ADVP)
de Pelletier, Bujold et Noiseux, propose aussi une séquence avec des tâches
développementales y étant associées (Bujold et Gingras, 2000; Guichard et Huteau,
2006). Une phase, soit celle de la réalisation a été ajoutée à la fin du processus, identifiant
le passage concret à l’action. Pour les quatre phases, ce modèle propose des tâches en lien
avec un développement cognitif ciblé. Des âges, allant de 11 à 16 ans, sont associés à
chacune des phases, permettant d’évaluer la maturité vocationnelle de l’élève. Comme
l’âge correspond à l’étape scolaire du secondaire, le modèle de l’ADVP a été
65
fréquemment utilisé dans le réseau scolaire, pour les cours d’éducation au choix de
carrière (Bujold et Gingras, 2000; Guichard et Huteau, 2006).
Pour terminer cette section portant sur les approches en développement de carrière, il est
important de présenter d’autres théories, qui se sont attardées à dégager l’orientation
professionnelle d’un processus qui se fait en étape. Ainsi, d’autres façons de
« construire » une carrière ont été proposées, par exemple la Théorie de la construction de
carrière de Mark Savickas. Cette théorie s’intéresse particulièrement au sens que donne la
personne aux évènements qu’elle a vécus (Guichard et Huteau, 2006). La réalité ou les
faits concernant le marché du travail ou concernant l’image que la personne a d’elle-
même sont dits subjectifs, ainsi l’objectif est de découvrir la représentation que la
personne en fait pour ensuite l’aider à s’orienter. Savickas a élaboré le concept de
« Thème de vie » qui est une façon de recueillir de l’information sur les constructions
personnelles que la personne a bâties au fil du temps et sur le sens qu’elle leur
donne. Une attention est également portée vers les façons dont la personne a solutionner
des problématiques dans son passé et Savickas croit que cela pourrait, par le fait même,
indiquer ses intérêts (par exemple, la personne qui a été malade qui se dirige ensuite vers
une carrière en médecine). Les intérêts ne sont pas vus comme des traits et ne peuvent
être définis seulement par la passation d’un test. C’est le récit sur les thèmes de vie qui,
selon Savickas, les mettra en lumière (Guichard et Huteau, 2006). Le concept de
l’adaptabilité a aussi une place importante dans cette théorie. Après avoir saisi les thèmes
de vie, il faut ensuite savoir comment la personne peut s’adapter au marché du travail et
par le fait même s’orienter. Savickas définit l’adaptabilité comme :
[...] la capacité d’un individu à mobiliser les ressources nécessaires pour
faire face à des tâches d’orientation qui se présentent à lui, à des transitions
professionnelles et à des traumatismes personnels. (Savickas, 2005, cité
par Guichard-Huteau, 2006, p. 222)
66
Ainsi le modèle de la construction de la carrière de Savickas, par les informations
obtenues, tentera de dégager des thèmes importants pour l’avenir de la personne dans une
carrière. Ces informations ne détermineront pas de façon directe une profession ou un
secteur d’activité, mais plutôt une façon d’être de la personne.
Le traitement de l’information et la prise de décision
Le traitement de l’information a déjà été présenté plus haut en lien avec le courant
cognitif. Il s’agissait à ce moment de comprendre comment une personne donne un sens
aux informations qu’elle reçoit. Par ailleurs, le traitement de l’information peut aussi faire
référence à la prise de décision, puisqu’en orientation, les élèves ou les clients se
retrouvent inévitablement devant un choix. Les procédures de prises de décisions sont
donc étudiées par les conseillers d’orientation. La théorie de la prise de décision de
Krumbolz et Mitchell inspirée de la Théorie de l’apprentissage social de Bandura (Bujold
et Gingras, 2000) propose d’utiliser des expériences d’apprentissage, telles que des stages
d’observations, des visites guidées ou du bénévolat, pour aider la personne à déterminer
ses préférences et à prendre des décisions (Bujold et Gingras, 2000). Cependant, les
expériences d’apprentissage ne sont pas les seuls éléments à considérer. Krumbolz et
Mitchell suggèrent également de porter attention aux facteurs génétiques et aux aptitudes
spéciales, comme les talents naturels, les facteurs environnementaux et les compétences
relatives aux tâches (Ibid.). Krumbolz a aussi conçu, avec Hamel un modèle de prise de
décision pour l’orientation portant le nom et l’acronyme DECIDES (Guichard et Huteau,
2006). Chacune des lettres définit les étapes de la prise de décision, soit : Définir le
problème, Établir un plan d’action, Clarifier ses valeurs, Identifier les solutions
envisageables, Découvrir les conséquences probables, Éliminer de manière systématique
les solutions les moins satisfaisantes, et Se lancer dans l’action.
D’autres auteurs ont élaboré une approche cognitive du traitement de l’information, dont
Peterson, Sampson, Reardon et Lenz. Dans les années quatre-vingt-dix, ces auteurs ont
67
élaboré un modèle de prise de décision et de résolution de problème en orientation qu’ils
ont nommé CASVE (Bujold et Gingras, 2000; Guichard et Huteau, 2006). Tout comme
pour le modèle de Krumbolz et Hamel, ce nom est un acronyme et chacune des lettres fait
référence à des habiletés et des étapes du traitement de l’information ou de la résolution
de problème : Communication, Analyse, Synthèse, Évaluation (Valuing) et Exécution.
Peterson et ses collaborateurs proposent également un modèle pyramidal des principaux
éléments lors d’un choix vocationnel. À la base, il y a les besoins concernant la
connaissance de soi et la connaissance des professions et des programmes de formation.
Viennent ensuite les connaissances issues du CASVE telles que mentionnées plus tôt et le
dernier élément est celui des métacognitions, faisant référence aux fonctions cognitives
qui commandent et harmonisent le traitement de l’information.
Figure 3
Modèle pyramidal des principaux éléments d’un choix vocationnel
Adapté de : Peterson, G.W., Sampson, J.P., Reardon, R.C. et Lenz, J.G. (1996). A cognitive information
processing approach to career problem solving and decision making. Dans D. Brown, L. Brooks and
Associates, Career choice and development (3e éd. p. 423-475). San Francisco: Jossey-Bass.
Méta-
cognition
Habilité de prise de
décision CASVE
Connaissance des
professions et des
programmes de
formation
Connaissance
de soi
68
Ces deux modèles de prise de décision en orientation présentent des étapes à suivre lors
de décision ou d’indécision vocationnelle. Cela peut avoir un rôle éducatif sur les
séquences habituelles à suivre lors d’une analyse en lien avec un choix scolaire et
professionnel (Bujold et Gingras, 2000).
L’évaluation et les outils psychométriques
Dans leur pratique, les conseillers d’orientation évaluent les personnes à divers niveaux.
Selon le Guide de l’évaluation de l’OCCOQ (2010a), trois dimensions sont évaluées par
ces professionnels, soit le fonctionnement psychologique, les ressources personnelles et
les conditions du milieu.
69
Tableau 3 : Les dimensions à évaluer en orientation
Fonctionnement
psychologique
Ressources personnelles Conditions du milieu
Tempérament
Intérêts et valeurs
Croyances
Personnalité
Besoins fondamentaux
Sensibilité
Estime et confiance
en soi
Stratégies d’adaptation
Connaissance de soi
Expériences de vie, professionnelle et
scolaire
Connaissances
Aptitudes, habiletés,
capacités
Compétences génériques,
humaines et
techniques
Acquis formels et informels
Contacts et réseaux
sociaux
Soutien social
Santé physique et mentale
Famille, groupes de
pairs, collègues de
travail et d’études,
supérieurs,
enseignants :
Valeurs, normes, dynamique
relationnelle,
influences diverses
Possibilités d’emploi et de
formation
Motivation
Lieu de contrôle
Affirmation et
expression de soi
Projets et aspirations
Initiative, autonomie et
responsabilité
Rigueur et discipline, etc.
Sexe, âge, apparence, situation
de handicap
Diplôme et spécialisation
Qualification et
certification
Langues parlées
Permis de conduire, transport
Revenu et actifs financiers
Connaissance du
marché du travail
Connaissance en technologies des
communications et
de l’information,
etc.
Contexte socioculturel,
institutionnel et
organisationnel
Conditions économiques
Politiques sociales,
éducatives et du
travail
Autres lois et
réglementations du
travail, etc.
Source : OCCOQ, 2010a
70
Cette recherche d’informations est présente à tous les moments du processus
d’orientation. Le but d’évaluer ainsi toutes ces dimensions est de recueillir, décoder et
analyser les informations transmises par la personne, pour ensuite lui communiquer, de
façon appropriée, sa vision (son jugement clinique) concernant sa situation et faire le lien
avec le besoin qu’elle a exprimé. Ceci permet également d’être en mesure de détecter des
signaux au niveau de la santé mentale et plus précisément de distinguer s’il y a présence
de pathologie (OCCOQ, 2010a).
À cette étape, l’utilisation de tests psychométriques est une pratique courante dans une
démarche d’orientation. Bien choisis, ces outils permettent d’approfondir la
compréhension de la situation de la personne et d’avoir davantage d’objectivité. Selon
l’OCCOQ (2010a), trois facteurs sont importants dans le choix d’utilisation d’outils ou de
tests psychométriques, soit :
71
Tableau 4 : Éléments déterminants dans le choix d’outils ou tests psychométriques
Le choix de l’outil
Le contexte
L’interprétation
Reconnaissance des dimensions à
évaluer par rapport au motif de
consultation.
Adéquation de la structure et du
contenu de l’outil par rapport
aux conditions personnelles de la
personne : type de questions ou
d’énoncé, complexité du langage,
complexité cognitive, etc.
Résultats observés concernant la
normalisation, la validité et la fi
délité de l’outil.
Connaissance du sens conféré au
concept mesuré par l’auteur de
l’outil.
Compréhension de la personne
quant à l’usage des données
recueillies : consentement éclairé.
Conditions environnementales de
passation : individuelle ou en
groupe, espace et temps
disponibles.
Conditions psychologiques et
physiques de la personne :
méfiance, fatigue, anxiété,
craintes, accoutumance à la
passation de l’outil, médication,
limitation physique, ou toute
autre dimension cognitive,
affective ou comportementale
pouvant interférer avec cet
exercice. Cela vaut également
pour le conseiller ou la
conseillère d’orientation (ex. :
préoccupations personnelles
l’empêchant d’être suffisamment
disponible pour les personnes,
effet de halo).
Compétence et aisance à
communiquer les résultats de
mesures psychométriques aux
personnes concernées afin
qu’elles puissent en retirer une
information claire, utile et
constructive par rapport à elles-
mêmes.
Source : OCCOQ, 2010a
72
L’enquête sur les pratiques d’évaluation psychométrique a présenté les dimensions les
plus évaluées par les conseillers d’orientation, ainsi que les tests utilisés dans chacune des
dimensions (Le Corff, Y., Yergeau, É., Savard, R., 2011).
La dimension la plus évaluée est celle des intérêts; 94 % des conseillers
d’orientation utilisent souvent des tests pour mesurer les intérêts professionnels de
leurs clients. Les outils les plus utilisés sont en ordre décroissant : le GROP,
l’inventaire des intérêts professionnels Strong, l’Orientation professionnelle par
soi-même (OPSM) et l’Inventaire visuel d’intérêts professionnels (IVIP).
La deuxième dimension la plus évaluée, par 50 % des conseillers d’orientation,
est la personnalité. Le MBTI, le NEO-PI-R, l’Inventaire de personnalité de
Jackson et le 16 PF sont les outils les plus utilisés pour évaluer cette dimension.
L’évaluation des aptitudes est la troisième dimension la plus évaluée, par 35 %
des conseillers d’orientation avec, prioritairement la Batterie générale des tests
d’aptitudes (BGTA) comme outil psychométrique.
La dernière dimension la plus évaluée, par 24 % des conseillers d’orientation, est
l’intelligence et la Matrice de Raven est le test le plus utilisé pour mesurer cette
dimension.
L’adoption du projet de loi 21, en juin 2009, a réservé certaines activités à divers
professionnels, dont les conseillers d’orientation. Trois de ces quatre activités sont en lien
direct avec l’évaluation. Il s’agit :
D’évaluer une personne atteinte d’un trouble mental ou neuropsychologique
attesté par un diagnostic ou par une évaluation effectuée par un professionnel
habilité;
73
D’évaluer un retard mental;
D’évaluer un élève handicapé ou en difficulté d’adaptation dans le cadre de la
détermination d’un plan d’intervention en application de la Loi sur l’instruction
publique (LIP). (OCCOQ, site internet)
En 2010, au moment de l’enquête auprès des conseillers d’orientation, peu d’entre eux
utilisaient des outils psychométriques en lien avec ces activités. Ainsi, parmi les
conseillers d’orientation rejoints seulement 3 % avaient évalué une personne atteinte d’un
trouble mental ou neurologique, 2 % avaient évalué un ou des problèmes de santé
mentale, 2 % avaient évalué le retard mental et seulement 1 % avaient évalué un élève
avec un handicap ou en difficulté d’adaptation (Le Corff, Yergeau, et Savard, 2011).
Puisque ces informations datent déjà de trois ans, que le projet de loi 21 a été adopté et
compte tenu des problématiques soulevées en éducation et en employabilité concernant la
santé mentale, il serait probable qu’aujourd’hui ces chiffres aient augmenté. D’ailleurs,
l’OCCOQ (2012) mentionne également que certains outils pour évaluer des problèmes
liés à la santé mentale sont utilisés par 9 % des conseillers d’orientation. En ordre
décroissant, ces outils sont : l’Inventaire de dépression de Beck, le Minnesota
Multiphasic Personality Inventorie (MMPI), l’Inventaire d’anxiété de Beck, ainsi que
l’Échelle d’évaluation de Connors.
Le counseling et la psychothérapie : pour se démêler
Dans la pratique des conseillers d’orientation, les tests psychométriques et les supports
théoriques au niveau du développement de carrière ou du traitement de l’information ne
sont pas des « recettes » appliquées avec tous les clients. C’est plutôt un étendu de savoir,
74
voulant former le jugement critique de chaque professionnel. C’est par et dans la pratique
que les conseillers d’orientation appliquent ces savoirs, qui deviennent ainsi un « savoir-
faire ». Comme les processus d’orientation se font via des rencontres avec la personne
(ou avec un groupe), la qualité de relation entre celle-ci et le conseiller d’orientation est
indispensable. Le counseling a donc une place importante dans les études des futurs
conseillers d’orientation et par la suite, dans leur pratique. La définition du counseling,
selon l’Association canadienne de counseling et de psychothérapie (ACCP), est :
Le counseling est un processus relationnel se basant sur un usage éthique
de compétences professionnelles spécifiques afin de faciliter le
changement humain. Le counseling aborde le bien-être, les relations
interpersonnelles, la croissance personnelle, le développement de carrière,
la santé mentale, ainsi que la maladie et la détresse psychologiques. Le
processus de counseling se caractérise par l’application de principes
cognitifs, affectifs, expressifs, somatiques, spirituels, développementaux,
comportementaux, d’apprentissage et systématiques reconnus. (ACCP, site
internet)
Selon l’approche privilégiée par le conseiller d’orientation, le counseling se fera plus ou
moins différemment. Même si le but est sensiblement le même, la façon de faire de
chaque conseiller d’orientation apportera une teinte différente. Guichard et Huteau
(2006), décrivent bien ces distinctions. Ces auteurs ont étudié l’entretien de conseil et
proposent trois façons de les différencier. La première est en lien avec l’approche
humaniste et « La thérapie centrée sur le client » de Carl Rogers. Elle est caractérisée par
l’empathie, la non-directivité et veut laisser la personne qui consulte découvrir certains
aspects d’elle-même. Cette découverte, aidée par le conseiller d’orientation qui est vu
comme un miroir, permet à la personne de réorganiser sa personnalité pour être ensuite
capable de s’orienter et faire des choix professionnels. La seconde façon de vivre le
counseling, toujours selon Guichard et Huteau (2006), est centrée sur l’accumulation de
données et la transmission de son jugement clinique. Il s’agit pour les conseillers
d’orientation d’obtenir des informations précises sur la personne, afin de faire ensuite le
lien avec les métiers et le marché du travail. Les compétences et intérêts sont au cœur des
recherches et l’entretien est plutôt directif. On peut voir aussi un lien avec l’information
75
scolaire et professionnelle, où le côté éducatif est à la base des rencontres d’orientation.
En troisième lieu, la dernière façon de vivre le counseling a pour but d’aider la personne
qui consulte à se développer et à vivre adéquatement les changements qu’elle traverse. La
perception que la personne a d’elle-même est aussi importante que ce qui est reconnu
comme la « réalité ». La construction de soi est priorisée à la connaissance de soi
(Guichard et Huteau, 2006). Cela peut s’apparenter à ce qui est nommé « intervention sur
l’identité » dans la définition du rôle des conseillers d’orientation de l’OCCOQ.
Le counseling, au-delà des techniques utilisées, représente la relation interpersonnelle qui
s’établit entre le conseiller d’orientation et son client. Selon Guédon et Savard (2000), la
qualité de cette relation revêt une importance capitale : « Le support et la collaboration
comptent pour 48 % dans la variance des résultats quant à l’efficacité en relation d’aide,
et ce, du point de vue du client » (p. 72). Dans ce même sens, Bégin (1998) mentionne
qu’en intervention, les techniques utilisées sont neutres et qu’en ce qui concerne
l’efficacité de l’intervention dans le but de créer un changement chez le client. Il
mentionne que cela revient davantage aux thérapeutes et au lien significatif qu’il crée
avec son client.
Enfin, l’alliance de travail dans une approche psychanalytique se définit comme étant la
fusion de trois aspects, soit un lien de nature affective entre les participants, un accord et
une collaboration à propos des objectifs poursuivis dans les sessions et un accord sur les
tâches à effectuer (Guichard et Huteau, 2006). Les théoriciens Gysbers, Heppner et
Johnston (1998) se sont penchés sur le concept de l’alliance de travail et ils priorisent
l’établissement d’une bonne relation dès le début d’une démarche de conseil en carrière.
Il semble bien qu’une sorte de lien soit nécessaire entre le consultant et le
conseiller, un attachement qui comprend le souci de l’autre (caring) et la
confiance, car on observe que, sans un tel lien, les efforts destinés à
atteindre les objectifs sont compromis. (Gysbers, Heppner et Johnston
(1998) p.125)
76
Le fait d’utiliser le counseling dans un but d’intervention en orientation peut évoquer la
thérapie. Cependant, chaque acte a sa propre définition. Selon le projet de loi 21, la
psychothérapie se définit ainsi :
La psychothérapie est un traitement psychologique pour un trouble mental,
pour des perturbations comportementales ou pour tout autre problème
entraînant une souffrance ou une détresse psychologique qui a pour but de
favoriser chez le client des changements significatifs dans son
fonctionnement cognitif, émotionnel ou comportemental, dans son système
interpersonnel, dans sa personnalité ou dans son état de santé. Ce
traitement va au-delà d’une aide visant à faire face aux difficultés
courantes ou d’un rapport de conseils ou de soutien. (Éditeur officiel du
Québec, 2009, p.10)
Afin de maintenir une qualité d’intervention, le projet de loi 21 a prévu que pour exercer
la psychothérapie, seuls certains professionnels dont les conseillers d’orientation (ainsi
que les ergothérapeutes, les infirmiers et infirmières, les psychoéducateurs et
psychoéducatrices, les travailleurs sociaux et les thérapeutes conjugaux et familiaux)
peuvent obtenir un permis d’exercice de la psychothérapie, qui à la base est réservé aux
médecins et psychologues. Ce permis est délivré par l’Ordre des psychologues du Québec
et exige la réussite d’une formation théorique en psychothérapie et d’un stage, en plus
d’être membre d’un ordre professionnel (OPQ, 2013). Depuis l’adoption du projet de loi
21, l’Ordre des psychologues du Québec a défini des interventions qui ne sont pas
reconnues comme de la psychothérapie. Des interventions telles celles présentent lors de
rencontre d’accompagnement, d’intervention de soutien, d’intervention conjugale et
familiale, d’éducation psychologique, de réadaptation, de suivi clinique, de coaching et
d’intervention de crise ne nécessitent pas l’obtention du permis de psychothérapie (OPQ,
site internet).
Finalement, toutes les informations venant d’être présentées sur les connaissances et
compétences des conseillers d’orientation acquises au départ sur les bancs d’école
amènent le constat que le côté humain a une place importante en orientation. Cette
77
considération pour la personne est à deux niveaux. Premièrement, l’importance de
considérer ce côté humain prend naissance dès la formation des conseillers d’orientation,
dans plusieurs cours, où ils sont invité à se questionner sur eux-mêmes sur leurs savoirs,
savoirs-être et savoirs-faire, tout en identifiant leurs zones « d’angles morts ». Cette
« connaissance de soi » qui est proposée permet ensuite d'évaluer son rapport aux autres,
donc sa part dans la relation qu’ils établissent avec leurs clients ou élèves.
Deuxièmement, la considération de l’être humain se distingue également de par le fait
que les conseillers d’orientation tiennent compte davantage de l’identité de leurs élèves et
cherchent à avoir un portrait le plus juste de possible d’eux et de leurs situations.
L’évaluation qu’ils font de leurs clients a pour but de tenir compte des dimensions reliées
au fonctionnement psychologique, aux ressources personnelles et aux conditions de leurs
milieux. Par ailleurs lorsque les conseillers d’orientation évoluent sur le marché du
travail, ils peaufinent leurs acquis, se perfectionnent et utilisent les outils qui ont le plus
de sens pour eux dans leur pratique, autant pour être à jour sur les problématiques de
leurs clientèles respectives, que pour améliorer leurs propres compétences et savoir-être
professionnels.
2.2 L’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique
Le cadre théorique qui suit présente l’ensemble des informations nécessaire à la
connaissance de l’approche psychogénétique et l’utilisation de l’outil. La provenance de
ces informations découle en grande partie des livres écrits par son concepteur Luc Bégin,
soit : L’Identité du Moi : l’approche psychogénétique et ses applications (1993),
Reconstruire le sens de sa vie : le changement thérapeutique (1998) et L’École
orientante : la formation de l’identité à l’école (2000) en collaboration avec Bleau et
Landry. Le but de cet essai étant de présenter la théorie, il advient que certaines parties
sont davantage explicites dans les ouvrages du concepteur.
78
Ce cadre théorique débute en faisant un survol de l’évolution de l’outil et de l’approche,
de leur tout début jusqu’à aujourd’hui. La définition de l’épreuve Groupements, de
l’identité, de la catégorisation suivent. Le développement de l’identité selon l’approche
psychogénétique est ensuite présenté sur une échelle développementale de six périodes.
Connaissant les périodes de développement, le mode de fonctionnement leur étant associé
s’en suit, ainsi que la présentation des six dimensions de l’identité. Vient ensuite la
présentation des informations servant à interpréter l’épreuve Groupements pour avoir un
diagnostic identitaire, ainsi que les modes d’intervention sur l’identité. Enfin, cette
section se termine en présentant la valeur scientifique de l’outil.
2.2.1 Historique et évolution de l'approche psychogénétique et de
l'épreuve Groupements
L'épreuve Groupements et l'approche psychogénétique ont été conçues par Luc Bégin,
qui est anthropologue (École Nationale d'Anthropologie et d'Histoire de Mexico),
psychologue (Université Laval), conseiller d’orientation et docteur en counseling
(Université d'Ottawa). Sa pratique professionnelle a débuté comme psychométricien et
chercheur principal au service de Développement et de ressources humaines Canada et
s'est poursuivie comme professeur régulier à l’Université du Québec à Montréal (UQAM)
au baccalauréat et à la maîtrise en carriérologie. Tout au long de ses études et de sa
pratique professionnelle, Bégin s'est intéressé au rôle de l'identité dans la démarche
d'orientation et dans toutes problématiques d'adaptation de l'individu. Ses constats et
réflexions l'ont amené graduellement à élaborer une nouvelle conception de l'orientation.
Avant d'élaborer l'épreuve Groupements et l’approche psychogénétique, en 1973 Bégin
crée en collaboration avec Luc Lavallée, l’Inventaire canadien des intérêts professionnels
(ICIP). Cet outil, utilisé pendant plusieurs années par les Centres d'Emploi du Canada et
encore présent sur le site d'information scolaire et professionnelle REPÈRES, est un test
79
psychométrique mesurant les intérêts selon cinq échelles, soit : choses/gens, contacts
d’affaires/scientifique, routine/créatif, social/solitaire et prestige/production. En tant que
chercheur, Bégin publie plusieurs articles, la suite n'en cite que quelques-uns
représentatifs de l'évolution de ses réflexions et du développement de sa théorie.
En 1979 parait le premier article de Bégin, Pour une approche renouvelée de la
psychologie du développement vocationnel. Cet article présente ses recherches sur le
développement vocationnel et de nouvelles propositions quant à la façon de concevoir
l’orientation. Sa proposition insiste dès ces débuts sur l'importance à accorder à la
construction de l'identité dans un processus d'orientation.
En 1983, Bégin publie avec Doria Ross un article intitulé L'utilisation des inventaires
d'intérêts : traitement ou placebo. Cet article reprenait le constat de Holland (1979),
concernant le fait que les tests d'intérêts ne servaient pas à tous et que plus précisément,
ils n'étaient pas utiles à ceux qui en avaient le plus besoin. Cet article désigne un tournant
dans sa carrière quant à sa vision de l'utilisation des tests d'intérêts dans les démarches
d'orientation.
En 1984 parait le chapitre, Genèse des schèmes de conceptualisation, organisation du
moi et éducation à la carrière, dans le livre de Pelletier et Bujold (1984) Pour une
approche éducative de l’orientation. Dans ce chapitre, Bégin présente ses repères,
l’évolution de sa réflexion, ainsi que sa théorie et la première version de l’épreuve
Groupements, qui comportait alors 30 cartons. Dès cette période, Bégin a aussi créé une
version parallèle de l’épreuve Groupements, afin de permettre la recherche au niveau de
la valeur scientifique de l’outil. Une épreuve en images, qui vise à repérer certains
déficits aux première et deuxième périodes de développement, conçu vers ces années, est
toujours à la phase expérimentale.
80
Il est intéressant de constater que pendant ses études doctorales, Bégin s'est concentré sur
le concept du traitement de l'information. Complété en 1985, le titre de sa thèse Effets de
la transmission d'informations professionnelles sur les capacités de différenciation et de
discrimination cognitive des sujets, reflète son intérêt marqué pour le sujet et les univers
théoriques dans lesquels il baignait.
En 1990, puis 1993 (version revue et corrigée), l’auteur a présenté L'identité du Moi :
l'approche psychogénétique et ses applications. Ce premier livre présente l'approche
psychogénétique, l'épreuve Groupements dans sa première version, la cotation et
l'interprétation des résultats. Les bases anthropologiques de l’auteur se font sentir
lorsqu’ensuite il aborde le rôle de l’environnement dans l’adaptation de l’individu. Selon
Bégin, le milieu culturel qui entoure l’individu lui permet de ressentir la constance et la
continuité de l’être humain. Connaitre la construction de son identité permet donc de
prédire son adaptation et les impacts qui découlent de l’interaction individu-
environnement. La dernière partie du livre présente plusieurs informations statistiques sur
la validité scientifique de l’outil. Un lien est également fait en référence avec la théorie de
Piaget, où Bégin, pointe un manque dans sa théorie du développement cognitif : celui de
ne pas avoir étudié la nature ou la source spontanée qui permet à l’individu de solutionner
un problème et ainsi passer d’un stade à un autre. À travers cette dernière partie, Bégin
présente également en quoi la théorie de Piaget a été un élément important à ses
réflexions lors de l’élaboration de sa propre théorie.
En 1998 parait Reconstruire le sens de sa vie : le changement thérapeutique. Dans cet
ouvrage, Bégin explique plus en profondeur l'aspect « synthétique » de sa science, ainsi
que les paramètres d'intervention dans ce contexte. Un retour est aussi fait sur les théories
cognitives, sur l'identité selon Baldwin et Piaget et sur la conception de l'identité dans la
théorie psychogénétique. Sont aussi présentés l'échelle développementale de la théorie
psychogénétique, le diagnostic de l'identité suite à la passation de l'épreuve Groupements
et comment intervenir et provoquer des changements selon l'approche.
81
Enfin, Bégin présente des données empiriques sur son outil, bien que celui-ci ne
« mesure » rien, il partage ses données au niveau de la validité, de la fidélité et présente
cinq essais de maitrise qui témoignent de la fidélité de l'outil (Fellice)1 ou de ses
nombreuses possibilités d'applications (Michiels, Côté, A. Lauzon, L. Lauzon, Navert,
Grothé)2.
En 2000, en collaboration avec Bleau et Landry, Bégin publie l’ouvrage L'école
orientante : la formation de l'Identité à l'école où ils proposent les applications possibles
de l'approche psychogénétique dans un contexte d'école orientante. Toutes les facettes de
l'identité sont expliquées, ainsi que les conditions favorisant leur construction et les rôles
possibles des divers intervenants côtoyant les élèves.
__________
1.FELLICE, D. (1996) Fidélité de l’épreuve Groupements, Maitrise en Éducation. Montréal : Université
du Québec à Montréal
2.MICHIELS, S. (1992) Étude exploratoire des relations entre l’organisation des schèmes catégoriels et
le rendement au travail chez des cadres intermédiaires québécois du secteur privé, Maitrise en Éducation.
Montréal : Université du Québec à Montréal
LAUZON, A. (1993) Influence de l’organisation catégorielle sur la stabilité des choix scolaires lors du
passage du secondaire au collégial, Maitrise en Éducation. Montréal : Université du Québec à Montréal
LAUZON, L. (1996) Identité du moi et congruence du choix vocationnel : perspective psychogénétique,
Maitrise en Éducation. Montréal : Université du Québec à Montréal
NAVERT, S. (1997) Étude de la relation entre l’identité vocationnelle et le statut d’emploi chez les
personnes ayant subi un traumatisme crânio-encéphalique, Maitrise en Éducation. Montréal : Université du
Québec à Montréal
GROTHÉ, J-M. (1997) Recherche exploratoire sur l’impact des programmes d’aide à l’apprentissage sur
la stabilité vocationnelle, Maitrise en Éducation. Montréal : Université du Québec à Montréal
82
Depuis ces débuts une équipe de collaborateurs seconde le concepteur dans ses
recherches et ainsi sa théorie a évolué au fil des nouvelles découvertes. Par conséquent
l’outil qu’il a conçu s’est lui aussi raffiné et présente depuis 2003 une cinquième version.
Les recherches ont été réalisées grâce à l’application de la théorie et de l'outil par
plusieurs conseillers d’orientation, conseillers en emploi et psychologues,
majoritairement diplômés de l’Université du Québec à Montréal. À cet effet, la « Liste
Identité », créée en 1997 et toujours active, a deux utilités. Premièrement, ce service
gratuit, sous forme de forum de discussion, sert aux utilisateurs de l’épreuve
Groupements afin d’assurer un suivi de formation quant à la correction et l’interprétation
des protocoles et à l’approfondissement des apprentissages liés à l’intervention. En
second lieu, les nombreuses productions parues sur cette liste (environ une quinzaine par
semaine depuis quinze ans) ont aussi servi aux recherches du concepteur et de son
équipe.
En 2003, l’Institut de recherche fondamentale et clinique en psycho-orientation
(IRFCPO) est créé par Bégin et ses collaborateurs. La mission de l’IRFCPO est de
poursuivre les activités de recherche et de formation en lien avec l’approche
psychogénétique de l’identité. Quatre objectifs d’activités sont également présents, en
lien avec la poursuite des recherches et la validation des hypothèses émises par la théorie,
ou en lien avec la formation et le perfectionnement des membres.
En 2005, l’IRFCPO est accréditée comme établissement de formation privé. Les
formations offertes sont au niveau de la cotation (correction) de l’outil, ainsi que du
perfectionnement de la théorie de la cotation et de l’interprétation des résultats sous
forme d’étude de cas et de l’intervention selon l’approche psychogénétique de l’identité.
L’IRFCPO offre également la formation à la psychothérapie. Les conseillers
d’orientation l’ayant déjà suivi et réussi sont reconnus par le nouveau projet de Loi 21
(permis de pratique de la psychothérapie, reconnu par l’Ordre des psychologues du
Québec). Depuis sa création, l’IRFCPO présente des ateliers et conférences à ses
membres sous forme de colloque et en 2013 se tiendra son 5e colloque. Les sujets des
83
colloques touchent naturellement l’orientation et l’identité, par exemple : le concept de la
complexité selon Robert Kegan, l’utilisation de l’épreuve Groupements dans les
organisations, le maintien et les changements de programme au collégial, notions et
éléments d’intervention, transmission des résultats de l’épreuve Groupements à la
clientèle et études de cas.
2.2.2 L’identité et sa formation (la catégorisation)
En accord avec le champ d’exercices des conseillers d’orientation, où l’intervention sur
l’identité fait partie des fonctions de ces professionnels, Bégin (1979) place le concept de
l’identité au cœur de l’orientation. Ce concept étant majeur, il est important de définir les
différentes conceptions de l’identité ayant inspiré Bégin pour poursuivre avec la
présentation de la théorie qu’il a conçu.
Une des premières définitions de l’identité dans le monde de la psychologie est celle de
Williams James, élaborée en 1890. Ce qui attire Bégin dans les propos de James est au
niveau de la formation de l’identité.
[...] il soutenait déjà que le contenu des trois concepts de soi était
essentiellement le résultat de l’action de ce qu’il appelait le pur Ego. Cette
activité, soulignait-il, n’est pas consciente et, à travers une métaphore qu’il
serait trop long de décrire ici, il soutenait qu’elle était essentiellement
catégorielle. (IRFCPO, site internet)
D’autres sources ont été importantes pour Bégin, quant à la définition de l’identité, dont
celles d’Erikson et d’Adams. En 1972, Erik Erikson, psychanalyste américain, avait
proposé une définition de l’identité qui a inspiré Bégin. Cette définition proposait que
l’identité se définît comme étant « the sense of sameness » qui peut être traduit comme
84
« le sentiment d’être le même ». Par la suite, en 1976, Gérald R. Adams, professeur
américain à ce moment, dans le département de la famille et du développement humain,
suggère que l’identité du Moi est une « […] machine organisatrice de l’expérience
individuelle » (Bégin, 1993, p.3). Organisatrice, dans le sens où cela permet à l’individu
d’intégrer ses expériences, en reliant des éléments communs, de façon à y avoir accès
spontanément et globalement sans en diminuer la complexité. À partir de ces définitions,
Bégin propose que l’identité peut se définir ainsi :
[…] le caractère de ce qui demeure identique à soi-même, le sentiment que
ressent la personne d’être la même, la conscience de son individualité. On
peut aussi définir l’identité de la personne en disant que c’est le sens, la
signification et la certitude de ce qu’elle est, le sentiment de se sentir unifié
et non compartimenté. L’identité est aussi constituée de nombreux éléments
liés par un processus intégratif qui fait que la personne est unique et
différente d’une autre. (Bégin, Bleau, Landry, 2000, p.28)
Cette longue définition est intéressante, cependant l’apport de Bégin consiste au fait qu’il
s’est ensuite tourné vers la recherche de la formation de l’identité ce qui selon lui, semble
une recherche dont les autres théoriciens ont peu porté attention (Bégin, 1993). De par ses
recherches antérieures Bégin (2000) en est venu à concevoir que l’identité est une
structure qui peut se former, mais que ce n’est pas une formation dont il faut considérer
acquise d’avance pour tous. En ce sens, il présente un exemple tiré de Condamin (1996) :
[…] le développement de l’individu se construit comme une seule et même
maison, avec ses bases, ses murs et son toit, et il est inutile d’essayer de
faire un toit lorsqu’il n’y a ni murs solides ni bases établies. Ces bases
solides, cette structure de personnalité solide, c’est justement de cela dont
il est question dans la construction de l’identité. (Bégin, Bleau, Landry,
2000, p.32)
Par ailleurs l’importance qu’il accorde à l’identité en orientation consiste au fait que selon
lui : « […] s’orienter c’est construire, clarifier et transposer son identité en termes
professionnels » (Bégin, Bleau et Landry, 2000, p.35). Tel qu’il le précise ensuite, avant
de clarifier l’identité, il faut parfois la construite :
85
Sans cette construction il [lui] est presque impossible, entre autres choses,
de formuler un objectif stable à poursuivre, de transposer son identité en
termes professionnels, d’avoir une idée de sa direction, du sens de sa
direction, du sens de sa vocation, de définir un projet professionnel,
d’arrêter une décision et de s’y engager. (Bégin, Bleau, Landry, 2000, p.35)
En égard à ces constats, Bégin s’est appliqué à comprendre comment se forme l’identité.
Selon lui, la contribution du concept l’identité en orientation découle de l’hypothèse que
les difficultés vécues en orientation dépendent de l’absence ou de déficits dans la
structure identitaire des individus ou encore, que le milieu dans lequel ils évoluent n’a pas
des exigences équivalentes à la complexité de leur système psychologique.
La catégorisation
Pour comprendre comment se forme l’identité, on pourrait dire qu’au départ rien n’a de
« sens » (comme pour le nouveau-né) et que le cerveau, via les cinq sens que l’on
possède, structure l’information reçue et en fait des catégories. Bégin explique ainsi la
formation des catégories :
Pour les fins de notre étude, nous avons défini ce que l’on conviendra
d’appeler « les catégories expérientielles », auxquelles nous avons donné
le sens suivant : celles tirées par l’individu de son action sur un objet
personne ou chose) et qui donnent lieu à une représentation mentale ou
« objet mentale ». De plus, ces catégories sont celles que forme
« spontanément » l’individu et non celles que sa culture (au sens
anthropologique du terme) lui permet d’identifier. Il s’agit donc bien ici de
formation de catégories et non de leur identification. (Bégin, 1993, p.14)
Cette action cognitive, de former des catégories, se fait par les schèmes, les opérateurs
mentaux, qui trie et transforment les données brutes des expériences de l'individu. Bégin
nomme « catégorisation » le processus par lequel les schèmes traitent les informations et
en font des catégories. Ainsi, la catégorisation permet de relier entre elles des éléments
86
ayant une signification commune et équivalente pour former des catégories plus
englobantes, sans perdre la richesse de chacune des informations. Ces catégories, qui
comprennent les expériences du passé, donnent un sens aux évènements ou aux relations
que vit la personne dans le présent et sont une source de prévision pour le futur. Ayant
déjà ces représentations, l’individu, qui est en constante interaction avec le monde
extérieur, n’a pas besoin de retraiter l’information à chaque fois, le lien se fait
instantanément et inconsciemment. Selon Bégin, la catégorisation permet de connaître la
façon dont la personne attribue une signification, un sens, à ses expériences et par
conséquent cela présente son identité.
Au fil du temps et selon les stimulations venant de l’environnement de la personne,
l’identité « peut » se construire et cheminer vers de plus en plus de complexité et
d’abstraction. Ces stimulations, pour faire évoluer la personne vers plus de complexité,
doivent mettre une certaine pression sur le système psychologique de l’individu, il doit
sentir qu’il ne peut y échapper et que le recours à la catégorie pré-existante ne fasse plus
de sens pour lui. Il est essentiel de comprendre que l'identité ne se construit pas toujours,
le développement n'étant pas constant, il peut s’arrêter à tout moment et à tout âge. Il y a
une ligne directrice dans les séquences du développement, qui présentent l'évolution
possible, mais non nécessaire du développement de l'identité. Ces séquences de
développement ne sont pas représentées d’une façon habituelle et linéaire telle que la
figure ci-bas.
87
Figure 4
La conception linéaire classique du développement
Source : Bégin, L. (1998). Reconstruire le sens de sa vie : le changement thérapeutique. Montréal :
Éditions Nouvelles.
Piaget avait ajouté une distinction quant à ce modèle de développement en concevant que
les stades supérieurs d’une séquence reproduisaient (mais d’une façon différente) les
stades inférieurs de la suivante. Cette façon de voir le développement a inspiré Bégin
dans sa façon de concevoir la succession des étapes. Il propose donc une vision du
développement de la pensée qui peut évoluer ainsi :
88
Figure 5
Le développement des fonctions de la pensée
Source : Bégin, L. (1998). Reconstruire le sens de sa vie : le changement thérapeutique. Montréal :
Éditions Nouvelles.
Bégin (1998) explique que la pertinence de représenter l’évolution des phases de
développement d’une séquence de cette façon est, entre autres, de suggérer que même si
la nouvelle phase tire son origine de la précédente, cela n’implique pas qu’elle est
forcément terminée et que tout le potentiel à en tirer est acquis.
2.2.3 L’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique de
l’identité
Bégin a conçu une échelle développementale qui présente six périodes de développement.
Pour situer la personne sur l’échelle développementale, il utilise un outil diagnostic de
l’identité qu’il a nommé l’épreuve Groupements. Les résultats obtenus suite à sa
passation rendent compte de l’état actuel du développement de l’identité chez la
personne. Pour présenter l’échelle développementale, il faut comprendre ce qu’est
89
l’épreuve Groupements et la théorie associée à la cotation, qui permet ensuite d’analyser
les résultats. Ainsi la présentation qui suit débutera par la présentation de ce qu’est
l’épreuve Groupements et de la théorie de la cotation. Par la suite, le fonctionnement
psychologique associé aux périodes de développement sera présenté.
L’épreuve Groupements
L'épreuve Groupements est un outil diagnostic de l'identité. Dans sa version actuelle, il
comporte 37 cartons présentant une phrase (une action sur un objet). Le professionnel le
présente ainsi :
Vous avez devant vous 37 cartons. Sur chacun d’eux apparaissent une phrase et
un numéro. Votre tâche consiste à mettre ensemble les phrases qui, selon vous,
semblent s’unir. Il n’y a pas de bonne ou mauvaise réponse, et vous pouvez
prendre tout le temps nécessaire. Quand vous aurez terminé, vous indiquerez le
numéro de chacun des cartons des groupements que vous aurez constitués et vous
expliquerez pourquoi vous avez groupé ces cartons ensemble. Si un ou des
cartons vous semblent n’aller avec aucun autre, vous en faites la liste à la fin.
(IRFCPO, site internet)
Les résultats obtenus suite à la passation sont appelés « production » ou « protocole » et
permettent d’obtenir un diagnostic identitaire. Pour analyser et coter les protocoles, le
conseiller d’orientation doit identifier ce qui a été produit par la personne selon l’échelle
développementale présentée ici-bas. L'auteur a aussi conçu une grille de correction,
présenté à l'annexe II, qui est un outil facilitant la correction des productions les plus
courantes.
90
Tableau 5 : les périodes du développement de l'identité.
Période pré-configurative (0)
Les activités sont liées entre elles dans une forme de juxtaposition qui rappelle une histoire ou une fable.
Période configurative (I)
Les objets apparaissant dans les activités sont réunis entre eux : en raison de leur forme identique (IA),
puis parce que ce sont les mêmes personnes qui manipulent ces objets identiques (IB) et enfin parce qu’ils
remplissent la même fonction (IC)
Période trans-configurative (II)
Les activités sont d’abord réunies parce que : les objets que l’on y retrouve se rencontrent dans un même
lieu (II A), puis parce que les objets sont manipulés par une même personne ou que les activités sont
dirigées vers une même personne (II B) et enfin, les objets qui partagent une même propriété physique
sont réunis entre eux (II C).
Jusqu’ici, seuls les objets apparaissant dans les activités sont retenus pour former les catégories : l’action
qui s’exerce sur eux est, catégoriellement parlant, ignorée. C’est à la période suivante que la catégorisation
des actions est entreprise.
Période protoréflexive (III)
Au début de cette période (niveau IIIA), le lien entre les objets demeure ainsi très étroit. Seuls les objets
possédant des caractéristiques spécifiques en communs (assez proche de la propriété physique en IIC) sur
lesquels sont effectuées des actions assez similaires sont réunis entre eux. Au niveau III B, le groupement
aura la même forme que celui du niveau précédent, mais le sujet insistera sur les qualités que possèdent
habituellement les personnes qui réalisent la tâche conceptualisée. Au niveau III C, finalement, l’idée
d’objet s’élargit, passant ainsi, par exemple, « des objets en métal » aux « objets concrets ».
Quel que soit la sous-période (A-B- ou C), la période protoréflexive propose toujours une division en deux
aspects, par exemple le concret et le côté abstrait. Au prochain niveau, ces deux aspects ne sont plus
divisés, ils deviennent équivalents.
Période réflexive (IV)
Dans un premier temps seule l’action sera prise en compte, sans considération aucune des objets sur
lesquels elle porte (IVA) Au niveau IVB, puis ce sont encore une fois les qualités que possèdent les
personnes qui exercent les activités réunis comme au niveau IVA qui dominent la perception. (IVB). Au
niveau suivant (IVC), finalement, c’est l’action qui introduira dans l’objet le sens de ce dernier.
Période transréflexive (V)
En VA, l’opposition de deux catégories opposées par leur sens sont explicitement mentionnées par la
personne, pour une possibilité maximale de trois groupements d’opposition, tandis qu’en VB, se sont les
mondes féminins et masculins qui sont opposés un à l’autre.
Source : Inspiré de Bégin (1993) p.28 et Bégin (1998) p. 93 à 95
91
Comme on le constate, chaque période est divisée en deux ou trois sous-périodes. Ces
sous-périodes sont désignées par les lettres A, B ou C. Peu importe la période, la
signification des sous-périodes est la même, soit en « A » la similitude des objets ou des
actions réunis, en « B » la relation ou les qualités de la personne qui fait ou vit les objets
ou actions réunis plus tôt (en A) et en « C » les deux sous-périodes A et B sont intégrées
en une seule catégorie qui est plus englobante.
Selon Bégin, les catégories se forment tout d’abord à la période IA, ensuite, elles passent
au IB. Lors du développement vers le niveau II, avant d’y arriver, se vit une phase
nommée « relationnelle synthétique », qui sera expliquée plus loin. Cela se poursuit ainsi
pour la suite (la période IIA, ensuite IIB, puis IIC, relationnelle synthétique et ainsi de
suite) et la séquence peut s’arrêter à tout moment. Plus la période à l’échelle
développementale est élevée, plus la personne a une vision globale, sans perdre la
spécificité de chacune des périodes antérieures.
Afin qu’une catégorie passe à une période suivante, Bégin mentionne qu’une pression
adéquate doit être présente, qui permet au système psychologique d’évoluer en
complexité. Il est important ici de mentionner que le terme « pression » fait référence à
une : « remise en question de croyances imposées par le milieu qui force la réorganisation
du système catégoriel » (IRFCPO, Théorie psychogénétique de l’identité, 2012). Un
exemple de ce type de pression permettant le développement psychologique est
disponible sur YouTube : http://www.youtube.com/watch?v=uisT3vqKUnA. Dans cet
exemple, le narrateur présente un bouquet de fleurs à une petite fille d’environ huit ans.
Ce bouquet comprend deux œillets et cinq roses. Il demande à la petite fille le nom des
fleurs, qu’elle nomme et il lui demande ensuite s’il y a plus de roses que de fleurs dans le
bouquet. Au départ la petite fille répond qu’il y a plus de roses que d’œillets. Le narrateur
répète sa question plusieurs fois et elle répond plusieurs fois qu’il y a plus de roses que
d’œillets. Elle ne distingue pas que les roses sont incluses dans les fleurs, son cerveau
92
veut plutôt comparer deux éléments similaires. Vers la fin, par les questions constantes
du narrateur, mais un peu différentes, elle voit qu’elle ne peut plus réfléchir de la même
façon et l'on voit l’effort cognitif (donc la pression ressentie) faisant qu’elle saisit qu’il y
a plus de fleurs que de roses.
Le mode de fonctionnement selon les périodes
À chaque période de l’échelle développementale, Bégin distingue des modes de
fonctionnement psychologique qui y sont associés. Le tableau qui suit présente ce qui est
le plus représentatif des périodes de l’échelle développementale.
93
Tableau 6 : Fonctionnement psychologique selon les périodes
Périodes Pré-configurative (0), Configurative (1) et Trans-configurative (2) :
Chez la personne, la présence d’une ou l’autre de ces trois périodes signifie, de façon sommaire,
qu’elle a une vision stéréotypée du monde, qu’elle voit les choses en blanc ou en noir. Elle a
donc peu de nuance et sa pensée est rigide. Elle peut être impulsive dans ses actions. Dans le
monde du travail, elle aura besoin d’un cadre précis, où les normes sont très clairement définies
et où il n’y a pas d’ambiguïté.
Période Protoréflexive (3) : Chez la personne, la présence de la période protoréflexive signifie qu’elle est normative, dans le
sens où le cadre et les règles de fonctionnement lui sont nécessaires pour définir son action. Elle
n’est cependant pas rigide comme aux périodes précédentes. Comme elle a intégré les concepts,
elle est plus souple et s’adapte à ce qui est demandé de l’extérieur. Elle recherche l’approbation
de personnes significatives pour être à l’aise, ou, à l’inverse, elle s’oppose aux normes
habituelles de la société.
Période Réflexive (4) :
C’est à cette période que le niveau de fonctionnement de la personne est associé à l’autonomie.
Les comportements et décisions ne sont pas prescrits par le milieu ou les normes de la société,
mais par la personne elle-même. Elle aura la souplesse de s’adapter aux normes déjà présentes
dans son milieu, alors que dans d’autres circonstances elle utilisera son propre jugement et sera
indépendante le l'opinion des autres. Elle pourra facilement relativiser les évènements. Il a été
également reconnu qu’à cette période, les personnes pouvaient avoir davantage de
préoccupations existentielles.
Période Transréflexive (5) :
Parce qu’il y a eu peu d’individu qui ont fourni des productions de ce mode de fonctionnement,
peu de recherches ont été faites pour expliquer le fonctionnement psychologique associé à cette
période. Il est cependant proposé que ce mode de pensée puisse être orienté vers les spéculations
théoriques.
Source : Ross et Bégin (2005) p. 28 à 32
94
C’est à partir de la période protoréflexive que débute ce que Bégin nomme la « réflexivité ». Ce
terme ne renvoie pas à la capacité de réfléchir, mais plutôt au lien automatique et instantané fait
inconsciemment par la personne dans sa façon de traiter l’information, vers une « construction »
antérieure du même sens.
Le mode de fonctionnement des relationnelles
Dans la théorie de la cotation, Bégin a identifié des relationnelles synthétiques, des
relationnelles analytiques, des relationnelles pures, ainsi que des résiduelles et des
régressives. Les relationnelles synthétiques sont représentées dans un protocole par la
présence de deux niveaux (par exemple du III et du IV réunis dans un même
groupement), ou par la présence de deux aspects différents d’une même période (par
exemple, du III concret et du III abstrait). Ainsi, la personne sera « assise entre deux
chaises », dans le sens où elle a encore accès à ces références d’avant, mais y voit plus de
complexification sans pour autant être confortable dans ces nouvelles acquisitions
d’information plus englobante. La présence de relationnelle synthétique chez la personne
(il peut en avoir une ou plusieurs) implique donc une instabilité du système
psychologique, ce qui peut se traduire par de l’anxiété et des difficultés (de la pression)
en lien avec l’aspect de l’identité touché.
Bégin distingue aussi un autre type de relationnelles, soit les relationnelles analytiques.
Celles-ci sont plutôt traitées autour d’une valeur personnelle que l’individu a envers les
activités qu’elle regroupe, il n’y a pas de lien d’équivalence entre les activités. Une
relationnelle analytique implique que deux ou plusieurs dimensions ou aspects de
l’identité sont alors réunis. Lorsque plus de trois dimensions sont réunies, la relationnelle
se nomme « relationnelle pure », alors que lorsqu'il s'agit de seulement deux ou même
parfois trois dimensions, la relationnelle se nomme « relationnelle analytique », les
dimensions sont alors reconnues, mais confondues. Par exemple, la recherche a permis de
constater que les dimensions technique et routine sont souvent réunies et que cela est
95
souvent présent lors de démarche d’orientation. Comme cela révèle que la personne a,
entre autres, de la difficulté à se fixer des objectifs clairs, fermes et stables, on peut
comprendre les enjeux face à un choix de carrière ou face à toute autre décision.
Quelles que soit le type de relationnelle (synthétiques ou analytiques) leur présence crée
de l’anxiété et différentes difficultés chez la personne. Par ailleurs, selon la prévisibilité
de l’environnement dans lequel elle vit, la personne n’en est pas affectée de la même
manière. Une personne évoluant dans un cadre clair, autant à la maison, qu’à l’école ou
au travail, pourrait ne pas sentir les difficultés associées à des relationnelles, en autant
qu’il n’y ait pas d’évènement qui la bouscule et la sorte de ses cadres de référence.
L’impact du cerveau gauche, par la rationalisation (la justification que la personne se
donne, face à ses comportements) peut aussi avoir des effets sur l’anxiété ou sur les
difficultés dont les relationnelles révèlent la source et faire que la personne ne présente
pas de manifestation de ses relationnelles.
Lors de la cotation d’un protocole, peut se retrouver également des régressives ou des
résiduelles. Les régressives sont reconnues par la présence d’une activité d’une
dimension dans un regroupement d’une autre dimension. La dimension comprenant la
réunion de plusieurs activités est construite, mais l’ajout d’une activité (souvent il n’y en
n’a qu’une par dimension) qui n’y correspond pas évoque que le sens y étant associé met
une pression chez la personne. La justification que la personne fait pour inclure cette
activité parmi les autres ressemble souvent à une histoire, où il y a un long chemin pour
comprendre sa raison pour la faire entrer dans le groupement.
Quant aux résiduelles, il s’agit d’activité (une ou plusieurs) laissée seule, non incluse
dans un groupe. Les observations cliniques ont pu associer des significations leur étant
particulières. Par exemple, l’activité 23 laissée seule implique une difficulté de distance
affective. Les manifestations sont nombreuses et peuvent, entre autres, se voir lorsqu’une
personne a tendance à vouloir sauver le monde et être hypersensible. Les régressives vues
plus haut, auront les mêmes significations que celles reconnues aux résiduels.
96
Les dimensions formant l'identité
Maintenant que l’échelle développementale est présentée, il faut ajouter l’information
quant aux dimensions de l’identité. Ainsi l’analyse des constructions que feront les
individus suite à la passation de l’épreuve Groupements seront liés à six dimensions de
l’identité, correspondant aux types d’intérêts et de personnalité conçue par Holland
(lorsqu’elles sont construites à la période réflexive). Par ailleurs, même s’il existe une
ressemblance entre la typologie d’Holland et les dimensions de l’identité de Bégin, il y a
une distinction importante :
Alors que Holland soutenait que l’organisation progressive des
expériences d’une personne donnera lieu à l’apprentissage de six
dimensions qui formeront la personnalité, Bégin soutient, quant à lui, que
cette organisation progressive des expériences d’une personne donnera lieu
à la construction de six dimensions qui formeront sa structure identitaire et
grâce auxquelles la personne, en retour, parviendra à donner un sens aux
expériences qu’elle vit. Il est important alors de voir la typologie de
Holland dans un autre contexte. Il ne s’agit plus de savoir quel est le type
dominant d’une personne parmi les six dimensions avec tout ce que ça
implique, ni d’apprendre six dimensions. Il s’agit plutôt de six dimensions,
de six facettes de l’identité qu’il est important de construire. (Bégin, Bleau,
Landry, 2000, p.49)
En faisant référence à l’échelle développementale exposée plus haut, chaque dimension
est autonome dans le sens où elle se construit (ou pas) selon les stimulations reçues de
l’environnement. Dans le cadre de cet essai, la définition globale de chacune des
dimensions sera présentée ainsi que les manifestations qui en découlent lorsqu’elle n’est
pas construite et lorsque la dimension est construite aux périodes protoréflexives et
réflexives. Le but de cette présentation est de montrer l’évolution en complexité des six
dimensions. D’autres documents peuvent être consultés pour plus d’information sur les
définitions en lien avec chacune des dimensions et sur les manifestations lorsque la
dimension est aux autres périodes, ou en relationnelle synthétique ou analytique.
97
Tableau 7 : Signification des dimensions formant l’identité
Dimension Technique :
Définition Dimension non réflexive Dimension réflexive
Cette dimension, constituée
d’activités qui mettent en jeu la
vie quotidienne, implique, en
conséquence, le contact avec la
réalité, le réalisme et tout ce qui y
est relié. Parce qu’elle met en jeu
les éléments de la vie
quotidienne, c’est en y faisant
appel que le champ de la plupart
des décisions personnelles qu’il
faut prendre est délimité.
Difficultés à prendre des
décisions (qui se manifesteront
souvent par une multitude de
décisions qui se succèdent les
unes aux autres sans que le
système psychologique ne
parvienne à s’arrêter sur aucune
d’entre elles).
Manque de réalisme (qui pourra
se traduire, par exemple, en
l’adhésion à des croyances
magiques, en la croyance à
l’influence du surnaturel, en des
attentes sans rapport avec ce que
la réalité permet d’anticiper,
etc.).
Difficulté et même se verra
incapable de se fixer des objectifs
clairs, fermes et stables.
À la période 3 :
Besoin d’un cadre explicite pour
arrêter des décisions et en
comprendre les conséquences.
À la période 4 :
Prise des décisions sur une base
autonome.
Intuition des implications qui
découlent des décisions.
Sentiment d’être en contact avec
la réalité.
Besoin de comprendre les
données abstraites et de prendre
les décisions qui s’en suivent.
Source : Ross et Bégin (2005) p. 44 à 57
98
Tableau 7 : Signification des dimensions formant l’identité (suite)
Dimension Science :
Définition Dimension non réflexive Dimension réflexive
La notion de science renvoie à
l’idée de rigueur, de nécessité, de
logique et de relation nécessaires
entre les évènements. Avec le
développement de cette
dimension, on observera une
tendance de plus en plus grande à
faire appel à une pensée
stratégique, anticipatrice,
rigoureuse et consciente du
pouvoir qu’elle a d’exercer un
contrôle sur le milieu. C’est la
composante fondamentale de la
composante masculine de
l’Identité (activité versus
passivité). Elle détermine le sens
que l’autorité prendra pour
l’individu, le pouvoir que ce
dernier se sentira d’en arriver à
modifier à son avantage les
situations difficiles qui le
confrontent.
Difficultés à entrer en contact
avec l’autorité (passivité ou
agressivité).
Difficulté à exercer l’autorité.
Propension à culpabiliser les
conséquences des interactions
favorables avec l’entourage.
Sentiment de non-maîtrise des
évènements de sorte que la
passivité face aux situations
difficiles sera de mise.
À la période 3 :
Confiance en soi possible lorsque
le cadre fournit les paramètres à
l’intérieur desquels les actions
peuvent e prendre. Cela réfère à
une confiance en ses propres
moyens qui est possible lorsque
l’environnement est connu.
Autorité exercée si elle est
autorisée par le milieu et définie
par des règles.
La personne est indépendante,
mais pas autonome.
Besoin de rigueur au niveau de la
pensée, mais changera de milieu
s’il ne lui convient pas, car est
peu encline à transformer son
milieu.
À la période 4 :
Autorité de type charismatique.
Sentiment de contrôle face aux
changements qui surviennent
dans le milieu.
Confiance en l’avenir et aux
ressources autonomes dont
l’individu dispose pour faire face
aux imprévus.
Source : Ross et Bégin (2005) p. 44 à 57
99
Tableau 7 : Signification des dimensions formant l’identité (suite)
Dimension Routine :
Définition Dimension non réflexive Dimension réflexive
Les éléments constitutifs de la
routine sont reliés à la vie
quotidienne.
Difficultés à incorporer la routine
dans les activités de tous les jours
et de s’y soumettre de manière
souple.
Procrastination, désordre, ou
inversement souci exagéré
d’ordre et de contrôle en ce qui a
trait à l’organisation matérielle de
la vie.
À la période 3 :
Les activités répétitives et
routinières sont difficiles à
supporter.
La personne se sent étouffée par
ce qui est routinier et/ou répétitif.
À la période 4 :
Intégration des activités
préorganisées et répétitives qui
sont imposées dans l’économie
générale du contexte dans lequel
cette imposition se réalise.
Dimension Social :
Définition Dimension non réflexive Dimension réflexive
Cette dimension constitue la
composante féminine de
l’identité. Elle renvoie ainsi à la
confiance éprouvée à l’égard des
autres et à la compréhension
empathique de ce qu’ils
éprouvent. Elle met en jeu la
préoccupation qu’une personne a
à l’égard des autres et de degré
d’intimité dont elle se sentira
capable.
Difficulté qu’éprouvent les
individus à entretenir des
relations intimes avec les autres.
Difficulté à affirmer les
composantes féminines de
l’Identité autrement qu’en faisant
appel à des artifices de nature
objectale.
Difficulté à comprendre
empathiquement l’autre.
Manque de confiance dans la
composante féminine de
l’identité : prendre soin d’autrui,
lui faire de la place dans son
intimité.
À la période 3 :
La conception de l’aide fait
référence à ce qui se vit
directement, comme les soins
physiques.
À la période 4 :
Préoccupation sociale élargie,
moins directement préoccupé par
le bien-être des individus
particuliers que par celui des
gens en général.
Compréhension empathique de l’autre.
Forte conscience sociale.
Source : Ross et Bégin (2005) p. 44 à 57
100
Tableau 7 : Signification des dimensions formant l’identité (suite)
Dimension Créativité :
Définition Dimension non réflexive Dimension réflexive
La dimension artistique met en
cause le degré d’aise
qu’éprouvent les individus face à
des situations peu définies,
vagues. Elle reflètera, par le fait
même, les contextes dans
lesquels ils sauront prendre des
initiatives et la façon de prendre
ces dernières. La dimension met
aussi en jeu ces aspects de la
communication interpersonnelle
qui font appel aux sentiments
esthétiques et à l’innovation.
Tendance à éviter les situations
dans lesquelles ils devraient
entreprendre de leur propre chef
des activités.
Limite des actions sur le milieu à
ce qui est prévu à l’avance et
uniquement à cela.
À la période 3 :
Initiative possible si le cadre est
familier et connu.
Les personnes sont
habituellement prudentes et
observatrices.
L’approbation est nécessaire aux
initiatives envisagées.
À la période 4 :
L’initiative sera marquée par l’autonomie.
Aisance dans les situations vagues.
Considération de
l’environnement et du contexte
avant de prendre quelque
initiative que ce soit.
Dimension Leadership :
Définition Dimension non réflexive Dimension réflexive
La dimension Entreprenant
évoque l’idée d’entrer en contact
avec les autres dans le but de les
guider ou de les influencer ou les
deux. Elle donnera donc lieu chez
les individus à des conceptions
de « l’influence » qui peut
s’exercer sur autrui qui varieront
d’une période à l’autre.
Difficulté à exercer le leadership
autrement que soit en laissant
tout faire, soit en exerçant un
contrôle sur tout ce qui concerne
les subordonnés.
À la période 3 :
Le leadership peut s’exercer si le
statut ou le milieu le prévoit.
Leadership de style autorisé.
À la période 4 :
Leadership conçu sur le mode
démocratique et ouvert.
Exerce le leadership en tenant
compte des autres et du contexte.
Source : Ross et Bégin (2005) p. 44 à 57
101
La correction de la production d’une personne permet de voir sur l’échelle
développementale où chacune de ces dimensions se situe, si ces dimensions sont
construites ou non. C’est ainsi que le diagnostic de l’identité se présente selon la
conception de Bégin. Les recherches de Bégin sur la construction des catégories l’ont
amené à formuler trois postulats fondamentaux, quatre corollaires, ainsi que trois
hypothèses qui concernent l’application de la théorie dans un contexte d’orientation.
Ceux-ci sont présentés au tableau qui suit
102
Tableau 8 : Postulats, corollaires et hypothèses de l’approche psychogénétique de
l’identité
Les trois postulats fondamentaux
1. L’activité continue du système cognitif qui sous-tend les manifestations observables de l’identité
(les comportements) en est une de catégorisation de l’expérience,
2. L’activité de catégorisation de l’expérience croît en complexité avec les pressions adaptatives
inéluctables qui s’exercent sur le système,
3. La croissance en complexité du système cognitif n’est pas ni nécessairement ni généralement
uniforme (ou homogène) d’un domaine de contenu à un autre.
Les corollaires
1. La catégorisation a pour objet premier de réduire la diversité des stimulations qui parviennent au
système cognitif en leur conférant des significations. Lorsqu’on aborde les questions identitaires,
on se préoccupe donc de ce qui a du sens pour les individus et non de ce qui est “vrai ou faux”
pour eux. (Et pour en revenir brièvement à la restriction signalée plus haut, la portion du système
cognitif à laquelle s’intéresse la perspective psychogénétique est celle qui touche l’intuition du
monde (ou pensée synthétique) que développent les individus dans leur vie de tous les jours.) Il
faut comprendre « l’intuition du monde » comme la saisie immédiate et automatique que
réalisent les individus de l’information expérientielle à laquelle ils sont constamment
confrontés, saisie qui est à la fois rendue possible par le bagage expérientiel et enrichie par
les nouveaux éléments qu’elle s’incorpore de cette façon.
2. Les catégories qui résultent de l’activité de catégorisation jouent un rôle optimal pour le
fonctionnement identitaire des individus lorsqu’elles sont univoques. Elles présenteront
idéalement ce caractère lorsque l’ensemble des schèmes catégoriels dont un système cognitif
dispose sera du même niveau d’abstraction. On sait cependant qu’il n’en est ni nécessairement ni
généralement ainsi,
3. La catégorisation peut être analysée au mieux au plan des schèmes catégoriels qui donnent lieu
aux catégories expérientielles. On comprendra les catégories expérientielles comme étant celles
qui résultent de l’organisation des activités que les individus exercent sur des objets (ces derniers
pouvant être animés ou inanimés). L’organisation elle-même est réalisée par le système
psychologique des individus grâce aux schèmes catégoriels dont il dispose.
4. Les schèmes croissent en complexité, donc en abstraction, avec le développement. Certains
schèmes montrant des similitudes évidentes entre eux, ils participent à une même stratégie
catégorielle. À chaque stratégie de catégorisation correspond donc une période de
développement. Comme ce dernier ne peut être réduit à un simple phénomène de maturation, il
en résulte que l’âge ne peut le refléter que de façon fort lointaine et uniquement à titre
“d’indicateur développemental”.
Source : Bégin (1998) p. 86 à 89
103
Tableau 8 : Postulats, corollaires et hypothèses de l’approche psychogénétique de
l’identité (suite)
Les principales hypothèses
1. Les individus recherchent des milieux d’activité (travail, relations interpersonnelles
significatives) d’un niveau de complexité correspondant à celui des schèmes dont ils disposent,
2. Les milieux ont, en retour, des exigences de complexité que l’individu doit satisfaire pour s’y
adapter et pour s’y sentir adapté.
3. La capacité adaptative de l’individu sera fonction du degré d’organisation des schèmes
catégoriels dont son système psychologique dispose.
De façon plus spécifique, la théorie soutient encore que le fonctionnement d’un individu peut être inféré à
partir des schèmes catégoriels qu’il met en œuvre pour organiser un ensemble d’activités représentatives
d’un univers identitaire hypothétique.
Source : Bégin (1998) p. 86 à 89
Par ailleurs, les résultats suite à la passation de l’épreuve Groupements doivent s’analyser
et un tout, de façon globale. Pour se faire, la prochaine section présente les modes
d’interprétation de l’épreuve Groupements. Puisque les résultats peuvent indiquer des
absences ou déficits identitaires, l’intervention qui peut être faite sur l’identité selon
l’approche psychogénétique de l’identité est ensuite présentée.
2.2.4 L'interprétation et l’intervention
Ainsi, les informations obtenues, dans le protocole de la personne, suite à la passation de
l’épreuve Groupements permettront de connaître son profil identitaire. Premièrement,
cette interprétation renseigne le conseiller d’orientation sur l’organisation identitaire,
qui s’identifie via le niveau à l’échelle développementale de chacune des dimensions. Le
conseiller d’orientation peut alors connaître comment la personne traite l’information par
rapport aux six dimensions de l’identité. Vient ensuite l’analyse de l’équilibre
identitaire en lien avec l’homogénéité des productions. Plusieurs périodes présentes dans
104
un même protocole peuvent créer de l’anxiété chez la personne. Sachant que les périodes
révèlent les stratégies qu’utilise la personne pour comprendre le monde et s’y adapter, la
présence simultanée de plusieurs niveaux de complexité pour donner un sens aux
expériences qu'elle vit, peut déstabiliser la personne. L’analyse de l’équilibre identitaire
permet également de voir si la personne œuvre, ou prévoit s’orienter, dans un univers
professionnel de la même complexité qu’elle-même, la cohérence entre les deux étant
nécessaires pour que la personne se sente « à la bonne place. » Enfin, l’interprétation de
l’épreuve Groupements permet aussi d’être informé de la présence de certains déficits ou
difficultés, celles-ci étant révélées par la présence de relationnelles synthétique ou
analytique, ainsi que par la présence de régressives ou résiduelles significatives. Les
difficultés liées au processus d’orientation, telles que, par exemple, la difficulté à arrêter
une décision, à toujours vouloir explorer autre chose, à ne pas sentir que ça « clique »,
peuvent ainsi être rapidement identifiées et discutées avec le client. Selon l’entente et le
type de service souhaité par le client, le conseiller d’orientation peut aussi intervenir sur
l’identité dans le but d’éliminer ces difficultés et de rétablir l’autonomie personnelle de
l’individu pour qu’il puisse ensuite s’adapter à son milieu tant professionnel, scolaire que
personnel. Si l'on revient à l’affirmation « s’orienter, c’est construire, clarifier et
transposer ce que l’on est en terme professionnel » (Bégin, Bleau, Landry, 2000),
l’épreuve Groupements est un outil permettant justement d’identifier ce « qu’est » la
personne et de voir si avant de clarifier l’identité, il faut d’abord la construire.
105
L'intervention
Dans le cadre de l'approche psychogénétique de l'identité, intervenir sur l'identité fait
référence à construite l’identité ou en traiter les déficits. Comme cela a été présenté plus
haut, il est alors question, selon les besoins du client, d'agir sur les relationnelles
synthétiques, analytiques, sur les régressives et sur les résiduels. En accord avec les
besoins du client, le but de l’intervention est :
[...] de rendre à l'individu l'intégrité de ses ressources psychologiques de
manière à ce qu'il puisse faire appel à l'ensemble organisé de son expérience
pour s'insérer dans le monde. (IRFCPO, site internet)
L'intervenant doit tenir compte des problématiques que son client désire vaincre et du
contexte de l'environnement dans lequel il évolue. Ces informations serviront ensuite à
déterminer quel type de changement est indiqué. Quatre formes de changements sont
possibles, soit en premier lieu la modification du répertoire comportemental, en second,
l’actualisation du système psychologique, le troisième type de changement concerne
l’accroissement de la puissance du système psychologique et en fin le dernier représente
la réduction de la puissance du système psychologique.
Les pensées analytique et synthétique
L’intervention psychogénétique de l’identité fait aussi référence à l’utilisation des
fonctions distinctives des deux hémisphères du cerveau. Le conseiller d’orientation qui
pose des questions à son client, aura surtout accès, par ces réponses verbales, au côté
gauche du cerveau, est le siège du langage et de la logique (Papalia, Wendkos Olds,
1988). Le côté droit du cerveau fait plutôt référence aux capacités spatiales et aux
106
aptitudes artistiques et musicales. Cependant, l’hémisphère droit a aussi une implication
face au langage, le site Le cerveau à tous les niveaux, qui présente des découvertes et
informations sur le cerveau et les comportements humains (associé et financé jusqu’en
mars 2013 par l’Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies du
Canada) défini son apport ainsi :
Plus subtile et nuancée, la contribution de l’hémisphère droit dans le
comportement langagier a été reconnue beaucoup plus tard. Elle concerne
la capacité d’aller au-delà du sens littéral des mots et recourt pour ce faire
à de multiples processus. (Le cerveau à tous les niveaux, article :
Contribution de l’hémisphère droit au langage, site internet, consulté en
novembre 2012)
Bégin mentionne que l’épreuve Groupements, permet d’accéder à l’hémisphère droit du
cerveau, partie comprenant ce qui est peu disponible par le langage. Dans l’approche
psychogénétique, les fonctions apparentées à l’hémisphère droit du cerveau font
référence à ce qu’il a nommé la pensée « synthétique » ou « intuitive ». Par le fait même,
ce qui est représenté par les fonctions de l’hémisphère gauche du cerveau, est, selon
Bégin, le mode de pensée « analytique ». Ce mode de pensée analytique représente le
monde logico-mathématique, qui se construit en séquences, étape par étape. La pensée
synthétique quant à elle fait plutôt référence aux significations personnelles qui ont été
construites, à l’intuition ou à l’anticipation qui se manifestent bien avant la conscience.
Cela fait aussi référence au monde affectif, aux façons de réagir émotivement. Ce type de
pensée ne connait pas le vrai ou le faux, car le sens qui est donné, par exemple, à un
évènement, est personnel, lié aux constructions de sens fait antérieurement, aux synthèses
spontanées faites instantanément par la personne. La catégorisation, qui a été présentée
plus haut, se formerait dans ce mode de pensée. L’approche psychogénétique propose que
la pensée analytique tire son origine de la pensée synthétique, d’où l’importance d’y avoir
accès pour comprendre le « sens » de ce que dit la personne.
107
Pour traiter les déficits identitaires, Bégin propose d’utiliser un principe actif qui
provoquera un changement. Ce principe est la pression. Le terme de pression n’est pas
évocateur d’un affrontement négatif, ou d’une façon d’exercer un pouvoir sur le client.
La pression dont parle Bégin se définit plutôt par une constance, une affirmation, une
position claire qui agira sur le système synthétique du client, là où le sens se construit.
Les nuances ne permettant pas une identification (vert-bleu, vert pâle, vert foncé, vert
forêt, etc.), ni les contradictions (ce n’est pas vert), l’affirmation propose plutôt de
déterminer un sens à un concept (vert), qui vise à inclure toutes les extensions lui étant
associées. Cette affirmation, qui peut se faire tout en douceur, est un mode de pression
sur le système qui provoque une réorganisation du système psychologique.
Un autre concept important dans l’intervention psychogénétique est tout le rapport à la
relation thérapeutique qui s’établit entre le conseiller d’orientation (intervenant,
psychologue, psychothérapeute, ou autre) et son client. Sans entrer dans l’explication
exhaustive (puisque le but ici est de présenter et non de former), Bégin fait entre autres
référence aux concepts de transfert, de contre-transfert et de résistances. Dans ce même
sens, il priorise le développement de l’identité du conseiller d’orientation pour rendre
efficaces les ressources qu’il possède.
L’intervention selon l’approche psychogénétique est enseignée via la formation en
psychothérapie de l’IRFCPO. Par ailleurs, un autre angle pour voir l’approche
psychogénétique est en lien avec l’intervention sur la pensée synthétique, qui fait
référence au cerveau droit. Voir l’intervention sous cet angle permet de comprendre les
modes d’intervention que propose l’approche (l’affirmation, le non verbale, la relation)
puisque ce sont des façons d’accéder au cerveau droit. Bégin propose également
l’utilisation de l’approche cognitive, pour traiter les relationnelles analytiques
(Charpentier, 2004).
108
2.2.5 La valeur scientifique de l’outil
Malgré les valeurs scientifiques de validité de construit et de fidélité inter-juges, reconnu
à l’épreuve Groupements, (Bégin, 1993, 1998) cet outil n’est pas un test psychométrique
puisqu’il ne mesure rien. Actuellement, on commence à identifier l’épreuve Groupements
comme un outil pouvant ressembler davantage à un test à valeur prédictive, ou plus
communément nommé, test projectif. Selon la Société Québécoise des Méthodes
Projectives (SQMP) (2011) :
Les techniques projectives permettent l’étude du fonctionnement
psychique individuel dans une perspective dynamique. De façon générale,
elles consistent à présenter à un individu un matériel le moins structuré
possible et à lui demander de le structurer à sa façon. La personne
accomplira donc cette tâche en y projetant sa propre structure de
personnalité. Les tests projectifs font appel à plusieurs types de fonctions
mentales, telles que la perception visuelle, la perception auditive, les
associations d’idées ou d’images, l’expression symbolique du dessin et de
la couleur, etc. (SQMP, site internet)
Bien que Bégin n’ait pas reconnu l’épreuve Groupements comme un test projectif,
certains éléments semblent correspondre à cette définition. Par ailleurs, il ne reconnait
pas non plus son outil comme un test psychométrique :
L'épreuve Groupements est une épreuve au sens piagétien du terme. Il ne
s'agit pas d'un test psychométrique au sens classique du terme, ni d'un
inventaire d'intérêts, ni d'une mesure des aptitudes. Ce n’est pas un test à
correction objective. Ce n'est pas non plus un instrument de mesure.
C'est un instrument révélant la vision du monde d'une personne. C’est une
tâche qui résulte en une production unique à chaque personne, production
qui peut varier dans le temps. La production d'une personne fournit un
portrait de l'état de sa construction identitaire. (IRFCPO, site internet)
109
Selon Houareau (1974) qui a écrit sur les tests prédictifs, il n’y a pas de hasard lorsqu’une
personne associe un mot à un autre dans ce type de test. Cette association de mot est
également présente dans l’épreuve Groupements puisque l’on demande aux individus de
mettre ensemble les phrases qu’ils trouvent qui vont ensemble et que chaque phrase
comprend quelques mots, dont une action et un objet.
[...] les mots que vous allez choisir seront d’une façon ou d’une autre
directement ou indirectement, révélateurs des traits de votre personnalité.
Vous aurez cru les choisir au hasard, mais ce hasard, en fait, n’est rien
d’autre que l’ordre intérieur qui constitue votre être et dont vous ignorez
l’agencement. Par vos choix, il apparait malgré vous. (Houareau, 1974 ,
p.120)
La critique faite habituellement aux tests projectifs concerne leur manque de validité et
de fiabilité. Dans le cas de l’épreuve Groupements, jusqu’à maintenant, les valeurs de
fidélité inter-juges et de validité de construit ont été confirmés.
Des études ont démontré que lorsqu’un ensemble de productions est
interprété par deux personnes ou plus, bien entraînées, on obtient
généralement une fidélité inter-juges de l’ordre de 90 %. […] Quant à sa
validité de construit, c'est-à-dire la capacité de mettre en évidence la nature
développementale de la théorie, Bégin a démontré, dans une étude réalisée
en 1990, qu’il y avait une corrélation de 0,53 entre l’échelle
développementale des schèmes catégoriels et celle du développement de la
notion de proportion de Noelting (1978). (IRFCPO, site internet)
Ainsi, même si l’épreuve Groupements n’est pas un test psychométrique, ces études
présentent certains des aspects leur étant habituellement accordés. Dans la pratique
professionnelle des conseillers d'orientation, il y a peu d’outils qui permettent d’évaluer
l’identité. L’épreuve Groupements est un outil utilisé par plusieurs conseillers
d’orientation œuvrant autant dans tous les secteurs de la pratique. Avant de dévoiler
l’apport de cet outil pour huit conseillers d’orientation l'utilisant depuis plus d'une
110
décennie, la section suivante présentera la méthodologie associée à l'éthique de cette
recherche qualitative.
3. Objectif de recherche
Considérant le nombre élevé de problématiques en éducation, en employabilité qui
deviennent des problématiques en orientation et considérant également la diversité des
clientèles susceptibles d’utiliser des services d’orientation, il est possible de prévoir que
les conseillers d’orientation, qui ont une clientèle éclectique, pourraient se sentir en
manque de ressources face à toutes ces diversités qui défilent dans leur bureau. Acquérir
une expertise lorsque sa clientèle est homogène est plus facile, mais cela n’est pas
habituel parmi les pratiques des conseillers d’orientation. Dans ce cadre, l’analyse d’un
outil et d’une approche qui mise sur l’identité de la personne peut alors être une voie
intéressante à explorer. Peu importe les caractéristiques de cette personne, son identité
peut révéler davantage d’information sur son fonctionnement psychologique et ses
besoins que des caractéristiques externes comme son lieu d’origine, ses difficultés
scolaires, ou même sa santé mentale. Sachant que s’orienter c’est construire, clarifier et
transposer qui l’on est en termes professionnels (Bégin, Bleau et Landry, 2000), le
fondement de la pratique de l’orientation pourrait justement être l’identité des individus.
L’approche psychogénétique de l’identité, qui possède aussi un outil diagnostic de
l’identité : l’épreuve Groupements, est une pratique liée au fonctionnement
psychologique utilisé par de plus en plus de conseillers d’orientation. L’enquête sur les
pratiques d’évaluation psychométrique faites pas l’OCCOQ (2012) n’a pas fait le calcul
des praticiens de l’épreuve Groupements, cependant en 2004, le nombre de ses
utilisateurs a été mesuré et 16 % des conseillers d’orientation mentionnaient l’utiliser
régulièrement ou occasionnellement. Pour répondre adéquatement aux multitudes de
besoins et de clientèles, de plus en plus de conseillers d’orientation se sont formés et
travaillent avec cet outil leur permettant de connaître rapidement le mode de
fonctionnement et les besoins sous-jacents de leurs clientèles. Dans ce sens l’approche
111
psychogénétique et l’épreuve Groupements doivent être explorées et analysées davantage
et c’est pourquoi l’objectif de la présente recherche est de : présenter et analyser les
pratiques efficientes des conseillers et conseillères d’orientation utilisant l’épreuve
Groupements et l’approche psychogénétique de l’identité dans un contexte
d’orientation. En ce sens, les objectifs spécifiques de la recherche sont de :
A) Décrire l’expérience d’appropriation de l’épreuve Groupements des conseillers
d’orientation.
b) Analyser les contextes et les procédures d’utilisation de l’épreuve Groupements des
conseillers d’orientation ainsi que les réactions des clients.
c) Présenter les motivations sous-jacentes à l’utilisation de l’épreuve Groupements.
d) Comprendre les perceptions des conseillers d’orientation quant à leur rôle face à
l’intervention sur l’identité.
Par ailleurs, l’épreuve Groupements est un outil nécessitant une formation précise qui
offre peu de descriptions toutes faites prêtes à coller. Pour un conseiller d’orientation qui
souhaite se former à l’outil et par le fait même à l’approche psychogénétique, c’est
beaucoup d’investissement à consacrer en temps et en apprentissage.
4. Méthodologie
Le chapitre de la méthodologie présente la démarche qui a été suivie pour répondre à la
question de recherche qui vient d’être présentée. Cette recherche s’intègre dans un cadre
rigoureux et scientifique, où les normes et les critères sont définis d’avance, dans le but
d’être conforme aux exigences d’éthique émises pas le cadre universitaire. Comme le
mentionne Karsenti (2011), une méthodologie c’est :
112
[...] la stratégie, le plan d’action, le processus sous-jacent aux choix et à
l’application de techniques de travail spécifiques nommés méthodes. Elle
fait le lien entre le choix des méthodes et les résultats attendus. (Karsenti,
2011, p.112)
Ayant analysé les différentes problématiques en éducation et en employabilité, vu la
place que les conseillers d’orientation y avaient, décrit leur pratique et proposé un cadre
conceptuel permettant un angle d’analyse, il est temps maintenant de préparer la collecte
d’information pour répondre à la question de recherche. Cette section présentera le type
d’approche qui a été choisi pour effectuer cette recherche, les critères identifiés pour
déterminer le choix de la population à l’étude, les instruments ayant servi à la collecte
d’information, les procédures précédents les entretiens, ainsi que les modalités d’analyse
des données recueillies. Afin d’assurer une conformité au niveau déontologique, l’éthique
entourant cette partie de recherche sera également exposée.
4.1 Approche de recherche
Parmi les types de recherches les plus fréquemment utilisés, c’est la recherche de type
qualitative/interprétative qui a été choisie puisqu’elle : « […] est ainsi animée du désir de
mieux comprendre le sens qu’une personne donne à son expérience » (Karsenti, 2011,
p.124). Plusieurs définitions pouvant être données à ce type de recherche, la synthèse de
Karsenti est celle qui correspond le plus à ce qui sera présenté ici, c’est-à-dire :
[…] la recherche qualitative interprétative est une forme de recherche qui
exprime des positions ontologiques (relatives à la vision de la réalité) et
épistémologiques (associées aux conditions de production du savoir)
(Karsenti, 2011, p.128)
113
Ainsi cela permettra de mieux saisir le vécu quotidien des conseillers et conseillères
d’orientation rencontrés pour connaître et ensuite comprendre leurs réalités. Cela permet
également de comprendre les interactions possibles avec leurs environnements
professionnels respectifs. (Idib.).
4.2 Population et échantillonnage
Pour collecter les informations servant à la recherche, huit conseillers d’orientation ont
été choisis comme population à l’étude. Afin d’être rigoureux dans le choix de
l’échantillonnage, Savoie-Zajc (2007) propose quatre critères :
le choix est intentionnel,
l’échantillon est constitué en fonction des buts poursuivis par la recherche,
le choix est balisé par des critères de sélection,
le choix est justifié.
Dans un premier temps, des critères ont été définis pour identifier comment devait être
formé l’échantillon des huit conseillers d’orientation. Ainsi, il était voulu que les
conseillers d’orientation recherchés aient une dizaine d’années d’expérience dans
l’utilisation de l’épreuve Groupements. Le but de ce premier critère est en considération
des pratiques dites efficientes. Ainsi, plus l’utilisation s’échelonne sur un nombre élevé
d’années, plus il y a de chance d’avoir intégré des pratiques efficaces et d’avoir un regard
sur ce qui a été plus difficile dans les premières années d’acquisition. Pour analyser la
portée de l’outil au niveau de l’orientation en général et non dans un seul secteur de
pratique, les conseillers d’orientation devaient œuvrer dans différents secteurs de
l’orientation. Enfin, pour être susceptibles d’être en contact avec une clientèle diversifiée,
incluant les immigrants, les conseillers d’orientation devaient œuvrer à Montréal, Laval,
ou en Montérégie.
114
Pour recruter les participants à la recherche, une demande de participation (qui parait à
l’Annexe III) mentionnant les critères de recherche évoqués ci-haut, soit être conseiller
ou conseillère d’orientation, utiliser l’épreuve Groupements depuis une dizaine d’années,
habiter Montréal, Laval ou la Montérégie, a été envoyée sur la Liste Identité. Ce forum de
discussion, de correction et d’information, est reçu par la plupart des conseillers
d’orientation utilisant l’épreuve Groupements. Le courriel de l’étudiante-chercheuse, mis
comme référence, a servi à recueillir les offres de participations qui ont été analysées
selon deux critères. Le premier critère était de revoir si les participants potentiels étaient
conseiller ou conseillère d’orientation, utilisaient l’épreuve Groupements depuis une
dizaine d’années ou plus et s’ils habitaient Montréal, Laval ou la Montérégie. Comme
deuxième critère, leur lieu et fonction de travail fut comparé, dans le but d’avoir un
échantillon représentant le plus possible des secteurs différents de l’orientation, comme
l’éducation, l’employabilité, l’organisationnel, le privé et la réadaptation.
L’évaluation des participants potentiels ayant répondu suite à la lettre d’invitation parue
sur la Liste Identité a fait ressortir des manques quant à ce critère recherché. À ce
moment, des demandes directes et intentionnelles de participation à la recherche vers des
conseillers d’orientation correspondant à ce critère furent effectuées par l’étudiante-
chercheuse. Ces derniers ont été contactés directement par téléphone ou courriel. Selon
Karsenti (2011) ce type d’échantillonnage est théorique et :
[...] fait référence au processus d’échantillonnage basé non pas sur un
modèle statique, mais bien sur un choix conscient et volontaire des
répondants par le chercheur. (Karsenti, 2011, p. 131)
Une fois l’échantillon des huit conseillers d’orientation créé, l’étudiante-chercheuse les a
tous rejoints par courriel ou par téléphone pour valider leur désir de participation et
expliquer davantage le processus. Afin de bien comprendre les implications de leurs
participations et les modalités entourant la recherche, un formulaire d’information et de
115
consentement leur fut envoyé (présenté en Annexe IV). Dans ce même sens, pour
s’assurer qu’ils puissent répondre de façon approfondie et qu’ils ne se sentent pas
démunis face aux questions, le questionnaire d’entrevue leur fut également envoyé.
Quelques jours plus tard, ces mêmes conseillers d’orientation furent rejoints de nouveau
par téléphone ou courriel afin de confirmer leur intention de participer à l’étude suite à la
lecture des documents envoyés et pour prendre un rendez-vous afin d’effectuer
l’entrevue.
4.3 Instrument de recherche
Pour mener à bien cette recherche, la collecte des données se fera par entrevue de type
semi-structurée. Selon Karsenti (2011), l’entrevue permet un échange verbal entre deux
personnes volontaires, qui s’engagent dans la relation afin de partage un savoir
d’expertise. L’entrevue semi-dirigée favorise la constance d’une entrevue à un autre, ce
qui permet ensuite de relever les différentes perceptions des sujets sur les mêmes thèmes
de recherche pour pouvoir les comparer et les analyser. Ce type d’entrevue met donc un
cadre et permet aussi une souplesse par rapport aux détails abordés et aux dynamiques
personnelles (Karsenti, 2011). Un schéma d’entrevue a été préalablement bâti autour des
thèmes se rapportant aux problématiques en éducation et en employabilité ainsi qu’au
cadre théorique élaboré au début de recherche. Le guide d’entrevue présenté en Annexe
V comprend quatre sections et 13 questions. Les questions 1 et 2 sont liées au premier
objectif spécifique et veulent comprendre comment les conseillers d’orientation ont vécu
leurs apprentissages de l’épreuve Groupements et ce qui les a motivés à se former à cet
outil. Comme cet outil nécessite une formation initiale et un entrainement à la cotation, il
est intéressant de connaître les étapes par lesquelles sont passés les conseillers
d’orientation questionnés, le temps qu’il leur a fallu pour se sentir confortable avec l’outil
et leur vécu en tant qu’apprenant. Les questions 4, 5, 6, 7 se rapportent au deuxième
objectif spécifique, soit de comprendre comment les conseillers d’orientation utilisent
l’épreuve Groupement dans leur pratique et comment les clients y réagissent. Ces
116
questions veulent présenter à qui s’adresse l’épreuve Groupements en termes de
clientèles ou de problématiques et avoir un portrait de l’utilisation dans le quotidien de la
pratique des conseillers d’orientation. Comme les conseillers d’orientation interrogés ne
sont pas des mêmes secteurs de pratique, cela permet aussi de comprendre l’apport de
l’outil dans plusieurs sphères de l’orientation. Le troisième objectif spécifique est couvert
par les questions 3, 8, ainsi que par la 12. Ces questions traitent des motivations des
conseillers d’orientation à utiliser l’épreuve Groupements, des avantages que cela a dans
leur pratique et des difficultés pouvant être rencontrées dans l’utilisation de cet outil.
Enfin les questions 9, 10 et 11 couvrent le quatrième objectif spécifique voulant connaître
la perception des conseillers d’orientation face à leur rôle envers l’intervention sur
l’identité, que l’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique préconisent et qui
fait partie du champ d’exercices des conseillers d’orientation. Cela permet de comprendre
les apports de l’épreuve Groupement face à l’intervention sur l’identité et la position des
conseillers d’orientation rencontrés quant à leurs compétences envers ce type
d’intervention. La question 13, qui demande aux participants s’ils voudraient ajouter
quelque chose d’important n’ayant pas été couvert lors de l’entretien, sert à s’assurer que
le participant ne reste pas avec des informations pertinentes sans avoir l’occasion pour les
partager et à clore l’entrevue. L’ordre des questions ne correspond pas en tout temps aux
sections en lien avec les objectifs spécifiques et cela est un choix fait pour avoir une
continuité lors de l’entretien avec les conseillers d’orientation, une logique dans les
propos qui sont tenus pendant la rencontre (Karsenti, 2011). Ainsi, les huit conseillers et
conseillères d’orientation ont été rencontrés en personne, au lieu de leur choix, pour une
entrevue face à face, afin de répondre à ces questions. La durée de la rencontre fut d’une
heure.
4.4 Démarche d’entretien
Afin de s’assurer de la conformité de la démarche envers tous les participants et que
ceux-ci comprenaient bien l’implication de leur participation, un protocole d’entretien fut
117
utilisé en début de rencontre. Ce protocole présenté à l’Annexe VI est une révision des
sujets importants à revoir avec les participants avant de débuter la rencontre. Comme
ceux-ci avaient déjà reçu, via leur courriel, un formulaire d’information et de
consentement, cette étape visait seulement à vérifier que toutes les informations étaient
bien comprises et à répondre aux questions si nécessaire. Ainsi, cette étape consistait à
revoir le but de l’entrevue, les avantages et inconvénients pouvant y découler, dont
l’inconfort possible face à certaines questions qui pourraient faire ressortir les difficultés
qu’ils vivent face à l’outil ou face à la théorie. Un moment a été pris par l’étudiante-
chercheuse pour revoir ces possibilités en mettant l’emphase sur le fait que ces
informations sont constructives et qu’elles exposent la réalité du vécu des participants. À
cela s’est ajouté les modalités prises pour assurer la confidentialité et l’anonymat (qui
sont décrites plus loin), les étapes du déroulement de l’entrevue avant, pendant et après,
la possibilité pour le participant d’arrêter l’entrevue en tout temps et finalement de
réitérer la disponibilité de l’étudiante-chercheuse à répondre aux questions à tout
moment. Suite à cette étape, le formulaire de consentement libre et éclairé fut signé, le
dictaphone mis en marche et l’entrevue a pu débuter.
Il a également été important pour l’étudiante-chercheuse de mettre les participants en
confiance et de créer un climat favorable à l’ouverture de soi et au partage des
connaissances et du vécu. Selon Karsenti (2011), de la qualité de la relation découlera
une qualité des échanges pour que l’entrevue se déroule dans une atmosphère
harmonieuse et agréable pour tous.
4.5 Modalités d’analyse des données
L’analyse des données est l’étape qui permet de découvrir les liens à travers les
informations accumulées, de saisir le sens de ce qui a été dit (Karsenti, 2011). Selon
118
Karsenti, plusieurs types d’analyse existent, mais ce sera l’analyse logique inductive
délibératoire qui sera employée ici dans le cadre de cet essai. Ce type d’analyse :
[...] consiste à utiliser le cadre théorique comme un outil qui guide le
processus d’analyse. La grille d’analyse initiale peut toutefois être enrichie
si d’autres dimensions ressortent des données. (Karsenti, 2011, p. 138)
Suite à la collecte de données, un verbatim fut produit pour chacune des entrevues. Les
réponses, commentaires et explications des participants étant ainsi par écrit, il est ensuite
plus facile de passer à l’étape de les visualiser et ensuite de faire la réduction des données
par, ce que Karsenti nomme, le codage (Karsenti, 2011). Cette opération vise à attribuer
un nom aux différents segments des entrevues et permet de faire ressortir les principales
idées contenues dans les verbatims.
Selon Paillé et Mucchielli (2011), ce travail d’analyse comporte trois niveaux, soit la
transcription, la transposition et la reconstitution. Dans le cadre de cette recherche, la
transcription permet de transférer les enregistrements sonores en des transcriptions
d’entretiens ayant la forme d’un verbatim. Cela rejoint également Karsenti (2011) qui
nomme « codage » l’opération vise à attribuer un nom aux différents segments des
entrevues et permet de faire ressortir les principales idées contenues dans les verbatims.
La transposition, qui permet d’annoter, catégoriser, commenter ou réécrire les
informations, ainsi que de les reconsidérer (Paillé et Mucchielli, 2011) sera présentée
dans cette recherche lors de la présentation des résultats. Enfin, la reconstitution, qui
« […] prend la forme d’un récit argumenté autour des principales catégories d’analyse,
avenues de compréhension, pistes d’interprétation » (Paillé et Mucchielli, 2011, p. 79)
sera présentée sous forme de discussion des résultats. Ce processus d’analyse des
données n’est pas linéaire, puisque chaque étape est en relation avec les autres. Karsenti
(2011) mentionne également que l’analyse est aussi un processus dynamique où
s’entrecroisent vérification et comparaison qui permettra une meilleure compréhension
des éléments collectés.
119
4.6 Mesures d’éthique
Afin d’être bien informé des règles d’éthique entourant une recherche sur des êtres
humains, une formation en ligne a été faite par l’étudiante-chercheuse. (Cours : Énoncé
de politique des trois Conseils : Éthique de la recherche avec des êtres humains :
Formation en éthique de la recherche (EPTC 2 : FER)) Cette formation est offerte par
« Le groupe d’éthique de la recherche » et remet un certificat d’accomplissement aux
personnes l’ayant complétée et réussis. Pendant et suite à la collecte des données, des
procédures ont été prises pour assurer la confidentialité des participants et pour diminuer
le risque de les reconnaître. C’est pour ces raisons que l’étudiante-chercheuse a pris soin
que leurs nom, lieu de travail, nom de leurs clients, élèves, collègues ou patron n’ont pas
été révélé. Les participants en étaient d’ailleurs déjà informés via le formulaire
d’information et de consentement. Suite aux transferts des enregistrements sur fichiers
informatiques, les enregistrements sonores furent tous détruits et les fichiers mis sous
deux clés USB possédant le même code d’accès. Une clé fut remise au directeur de
recherche. Lorsque les clés n’étaient pas utilisées, elles étaient conservées dans un
classeur fermé sous clé. Concernant la confidentialité des participants, dès le transfert sur
fichier leur nom fut remplacé par un code (C.O.1, C.O.2, etc.) et pendant les démarches,
seule l’étudiante-chercheuse a été en contact avec eux.
5. Présentation et analyse des résultats
Cette section présente et analyse les résultats de ce qui a été recueilli lors des rencontres
avec les conseillers d’orientation. Tel que décrit dans la méthodologie, huit conseillers
d’orientation ont participé à une entrevue semi-dirigée afin de partager leur pratique de
l’orientation avec l’épreuve Groupements. Pour maintenir leur anonymat, les huit
conseillers d’orientation (C.O.) sont identifiés par un chiffre : C.O.1, C.O.2, C.O.3,
C.O.4, C.O.5, C.O.6, C.O.7 et C.O.8. De plus, 4 sections présentent les résultats obtenus
120
par ces professionnels, qui correspondent également aux objectifs spécifiques de la
recherche, soit :
a) Décrire les motivations des conseillers d’orientation à utiliser l’épreuve Groupements.
b) Analyser les contextes d’utilisation de l’épreuve Groupements des conseillers
d’orientation.
c) Présenter les pratiques efficientes des conseillers d’orientation en lien avec l’utilisation
de l’épreuve Groupements et de l’approche psychogénétique.
d) Comprendre les perceptions des conseillers d’orientation quant à leur rôle face à
l’intervention sur l’identité.
5.1 Les motivations des conseillers d’orientation à utiliser l’épreuve
Groupements
Pour bien comprendre les motivations des conseillers d’orientation à utiliser l’épreuve
Groupements dans leur pratique, quatre sous-sections ont été créées. Il s’agit
des éléments incitatifs à la formation, des conditions facilitant l’apprentissage, ainsi que
des éléments motivateurs dans leur pratique actuelle.
Les conseillers d’orientation reconnaissent que certains éléments ont fourni un intérêt
particulier à se former, ou à maintenir leur formation et ensuite se perfectionner. Deux
thèmes sont ressortis lors des entretiens, soit, découvrir une vision de l’orientation qui les
interpellaient et le second élément est d’avoir été en contact avec Luc Bégin.
121
Tableau 9 : Thèmes émergents et définition opératoire des éléments incitatifs à la
formation initiale
Thèmes émergeant Définitions opératoires
Une vision de l’orientation L’approche psychogénétique est venue
mettre des mots sur une vision de
l’orientation qui les interpellaient, qui
décrivait ce qu’ils faisaient
instinctivement, ou elle a mis en place les
morceaux qui leur manquaient pour
comprendre l’orientation et ses difficultés.
Luc Bégin, un mobilisateur Le contact avec le concepteur de l’outil fut
un élément mobilisateur. La personnalité
de Luc Bégin et le lien qu’il a créé avec
certains c.o. a été un élément de motivation
pour qu’ils se surpasser. Dans leur
parcours scolaire et professionnel, il a été
une figure marquante.
Une vision de l’orientation.
Le thème « Une vision de l’orientation » fait référence au fait que pour les conseillers
d’orientation, connaître l’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique est venue
mettre des mots sur une vision de l’orientation qui les interpellaient davantage que ce
qu’ils avaient déjà appris, qui décrivait ce qu’ils faisaient instinctivement, ou qui mettait
en place les morceaux qui leur manquaient pour comprendre l’orientation et ses
difficultés.
122
Pour la C.O.1, l’approche est venue mettre des mots sur ce qu’elle faisait intuitivement,
alors qu’elle ne s’associait pas à une approche en particulier, bien qu’intéressée
davantage par les approches freudiennes et jungiennes : « [...] l’approche
psychogénétique est venue mettre un nom, des concepts sur une façon que moi j’avais
d’être en intervention ». Cette vision de l’orientation a pris forme lors d’un cours à
l’Université du Québec à Montréal (UQAM), de niveau maitrise. Elle ajoute que
lorsqu’elle a connu l’approche, l’effet a été instantané :
[...] un des cours que j’ai eu à faire à la maîtrise c’est counseling
individuel, c’était avec Luc pis moi ça été vraiment une… presque une
révélation en ce sens que formée quand même en psychologie j’avais vu
toutes les approches, c’est comme venu tout placer, donc après ça, j’ai
décidé de m’inscrire à la formation à l’épreuve Groupements. (C.O.1)
Ce type de réaction s’est aussi ressenti chez la C.O.2, qui mentionne être allée chercher la
formation à l’épreuve Groupements lors de laboratoire donné dans le cadre de sa
formation à la maitrise en carriérologie à l’UQAM :
Tandis que là à la maîtrise, moi j'me questionnais sur c'est quoi
l'orientation, est-ce que j'voulais devenir une conseillère en orientation,
j'avais pas de modèle vraiment par rapport à ça, j'tais souvent e… déçue
par c’que j'voyais alors en m'inscrivant à ce cours là (avec Luc Bégin), ben
pour moi, ça été un déclencheur... [...] pour moi c'était une approche qui
vraiment était révélatrice et me convenait vraiment beaucoup. (C.O. 2)
Alors que la C.O.1 et la C.O.2 ont ressenti que l’approche psychogénétique leur proposait
une vision de l’orientation qui avait du sens pour elles, pour la C.O.3, c’est la puissance
de l’outil qui l’a d’abord interpellé. Elle mentionne aussi avoir apprécié le fait qu’il lui
soit accessible, même si elle n’était pas conseillère d’orientation.
123
[...] il nous formait à l’intérieur du BAC. Donc pour nous c’était quelque
chose d’extraordinaire. J’m’en allais intervenante [...] On avait pas
beaucoup d’outils, fac moi j’trouvais ca ben intéressant, [...] t’sé on sortait
du cadre, de l’étiquette [...] Fac j’trouvais que l’épreuve ça allait plus loin
que ça, ça m’parlait de la perception de la personne de comment elle voit
le monde, de comment elle l’organise, pis de l’unicité de la personne, pis
ça moi, ça me parlait beaucoup. (C.O.3)
Par ailleurs, lorsque le conseiller d’orientation est déjà actif sur le marché du travail, qu’il
est en contact avec d’autres théories, l’approche psychogénétique apporte de nouveaux
éléments qui incitent à vouloir ensuite se former. C’est ce qu’a vécu le C.O.8 qui
explique :
[...] j’ai été en contact avec les gens qui ont accédé beaucoup au
développement de la conscience des gestionnaires donc, on est dans les
mêmes mêmes eaux là quand on parle de Kegan ou qu’on parle de Bégin,
qu’on parle de Kohlberg. Fa qu’au départ c’qui m’a intéressé, c’qui
m’intéresse particulièrement de Luc, c’tait l’approche là, de pouvoir
comprendre les organisations, de comprendre l’organisation des individus
[...] alors que les autres courants ont jamais réussi à développer un outil
précis qui permet de poser un diagnostic avec l’évaluation, de structurer
l’évaluation. (C.O.8)
Ces nouvelles informations l’ont ensuite motivé à pousser la compréhension en allant
chercher la formation initiale à l’épreuve Groupements. Formation qu’il mentionne avoir
suivie à l’intérieur des locaux de l’entreprise où il œuvrait.
Donc, en résumé, ces extraits nous présentent le fait que, les conseillers d’orientation ont
reconnu que, lorsqu’ils ont été en contact avec l’épreuve Groupements ou l’approche
psychogénétique, cela à donné un éclairage nouveau à leur vision de l’orientation et
qu’ils y ont adhéré. Cela les a ensuite incités à se former à l’approche psychogénétique,
ou à la maitrise en orientation, si la formation était déjà acquise lors du passage au
baccalauréat.
124
Luc Bégin, un mobilisateur
Le contact avec le concepteur de l’outil fut un élément mobilisateur. La personnalité de
Luc Bégin et les liens qu’il a créés avec certains conseillers d’orientation ont été un
élément de motivation pour qu’ils se surpassent. Dans leur parcours scolaire et
professionnel, il a été une figure marquante.
En d’autres mots, rencontrer Luc Bégin dans un contexte d’apprentissage, où il partageait
ses connaissances et sa vision de l’orientation, a été un point de départ à leur intérêt à se
former à l’épreuve Groupements et à l’approche psychogénétique.
[...] c’était Luc qui m’avait donné la formation pis comment j’te dirais, il
m’a fait embarquer là, tsé j’ai accroché à Luc. J’ai accroché à la
psychogénétique, à sa vision, à sa vision des choses, à sa vision de
l’identité. (C.O.5)
Tout comme la C.O.5, la C.O.6 ajoute que Luc Bégin fut mobilisateur, dans le sens où de
par son contact, elle s’est investie au-delà de ce qu’elle avait prévu au départ.
[...] j’ai commencé par connaître l’homme avec sa théorie sur l’identité
pis…comment j’dirais ça, à partir de là on dirait que j’ai commencé par me
connaître, c’est lui qui m’a comme e… qui m’a fait découvrir l’orientation
au fond parce que moi j’m’en allais en information scolaire et
professionnelle, j’pensais jamais aller à la maîtrise. Fa que c’est comme,
j’avais l’impression que j’me… qu’à travers lui j’me découvrais
finalement. (C.O.6)
Rencontrer Luc Bégin était donc signifiant dans le parcours scolaire ou professionnel des
conseillers d’orientation. Par ailleurs, tel que le mentionnent la C.O.4 et la C.O.7 ce
125
contact a parfois été déroutant. En ce sens la C.O.4 se rappelle que d’avoir rencontré Luc
Bégin lui a ouvert d’autres portes : « […] parce que c’est sûr que Luc, y m’a fait aller
dans des zones que a priori, j’serais sans doute pas allée. Il m’a demandé e… ça m’a
demandé de sortir de certaines zones de conforts. » Sortir d’une zone de confort n’est pas
toujours facile et pour la C.O.7 qui a ressenti elle aussi cet état, elle mentionne avoir
préféré attendre un peu avant de s’y plonger.
Ben sur l’coup c’était un choc pas mal que j’ai eu, surtout avec Luc, de sa
personnalité, comment il était là, j’étais vraiment bouleversée quand j’ai
compris l’outil, qu’est-ce qu’on pouvait aller voir avec ça, donc j’étais en
état de choc mais j’tais assez bonne pour le maitriser, mais à l’époque j’ai
pas voulu m’investir là-dedans [...] c’est quand je suis revenue à la
maitrise [...] j’ai décidé d’aller vers c’qui m’attirait et là j’ai choisi Luc
comme directeur de maitrise, c’est là que là j’ai r’commencé à réutiliser de
façon plus quotidienne l’épreuve Groupements (C.O.7)
En résumé, ces citations nous font voir que Luc Bégin a marqué ces conseillers
d’orientation. Il semble que malgré le fait que sa vision de l’orientation ou sa façon d’être
les a parfois perturbés, dans le sens où cela les sortait d’un confort, cela a été un élément
mobilisateur, une sorte de tremplin pour qu’ils s’engagent ensuite vers une carrière en
orientation.
5.1.2 Les conditions facilitant l’apprentissage
L’épreuve Groupements nécessite une formation particulière, ce n’est pas un outil qui
peut être appris de façon autodidacte. Les conseillers d’orientation reconnaissent que
certains éléments ont facilité leurs apprentissages. Trois thèmes émergent à ce sujet, soit :
s’investir en temps formel et informel, être entouré et être motivé par les défis
intellectuels.
126
Tableau 10 : Thèmes émergents et définition opératoires des conditions facilitant
l’apprentissage de l’épreuve Groupements
Thèmes émergent Définitions opératoires
S’investir en temps formel et informel
Les c.o. reconnaissent que l’apprentissage
théorique et pratique de l’outil et de la théorie
demandent d’investir du temps personnel en
pratique et du temps académique en
perfectionnement.
Être entouré Le fait d’être entouré dans les débuts est un
élément positif pour développer sa
compréhension de l’outil.
Que ce soit à travers un regroupement de
collègues qui se sont formés en même temps
ou auprès d’un collègue qui était formé depuis
un moment et qui partageait ses connaissances,
les c.o. mentionnent qu’être entouré a été une
source de stimulation les aidant à persévérer et
progresser dans l’acquisition de leurs
connaissances.
Être motivé par les défis intellectuels La complexité de l’outil est un défi intellectuel
pendant la formation et après dans l’évolution
de leur pratique. Les c.o. mentionnent que le
fait que l’outil et la théorie soient complexes a
été un élément stimulant.
Sa propre structure identitaire Les conseillers d’orientation ont constaté que
leur propre identité avait un impact dans leur
appropriation de l’épreuve Groupements.
127
S’investir en temps formel et informel
Les c.o. reconnaissent que l’apprentissage théorique et pratique de l’outil et de la théorie
demandent d’investir du temps personnel en pratique et du temps académique en
perfectionnement. Plus cet investissement sera présent, plus il sera profitable dans
l’appropriation des connaissances et l’aisance d’utilisation.
L’analogie faite par la C.O.1 représente bien ce concept d’investissement : « c’est comme
un sport… … c’est clair que si tu pratiques juste une heure pas semaine, ça va être plus
long avant de maîtriser fa que ça demande que tu puisses le pratiquer presque au
quotidien dans ta vie professionnelle. » Pour elle, le temps à investir et les efforts à y
mettre allaient de soi, car :
[...] y a que quand ça fait du sens on peut, en tout cas moi, quand quelque
chose fait du sens, j’peux plus mettre les efforts. On peut pas dire que j’ai
une auto- discipline super réglée, mais quand quelque chose fait du sens
pour moi, j’veux dire j’suis en mesure de me… d’m’y mettre, j’avais
tellement de plaisir là, en faite j’en ai encore aujourd’hui (C.O.1)
Pour cette conseillère d’orientation effort est récompensé par plaisir d’apprendre quelque
chose qui fait du sens pour elle. C’est aussi par intérêt que la C.O.5 s’est investie en
temps. De façon concrète, elle présente ce à quoi cet investissement en temps
professionnel et personnel a représenté pour elle :
[...] une fois qu’on a fait la formation, à chaque fois dans mon équipe de
travail j’leur disais faites passer l’épreuve, moi j’vais vous faire passer
l’épreuve, j’vais la faire passer aux clients, je cotais toutes les épreuves du
bureau, je les cotais, tout ce que je voyais passer sur la Liste Identité,
j’cotais tout, vraiment. (C.O.5)
128
Par ailleurs, l’investissement en temps représente aussi un temps en apprentissage formel,
en ateliers ou perfectionnement. La C.O.5 poursuit en disant : « [...] tout ce qui passait
j’le prenais. Il faut que tu t’intéresses à l’outil, c’est un outil tellement complexe… que si
tu fais pas ça tu peux pas y arriver, j’pense pas ». Il en est de même pour la C.O.3, qui
mentionne s’être investie dans [...] « soit du perfectionnement soit des des gens qui euh
faisaient des études de cas, j’me suis même inscrite, j’ai même demandé à nos
organisations de nous fournir de la supervision ». Les occasions de se perfectionner sont
aussi présents sous d’autres formes, le C.O.8 mentionne se perfectionner entre autres via
la « Liste Identité » qui est un forum de discussion servant aux utilisateurs de l’épreuve
Groupements, qui assure un suivi de formation quant à la correction et l’interprétation des
protocoles et à l’approfondissement des apprentissages liés à l’intervention. Les
corrections faites par les correcteurs sont visibles à tous et servent d'apprentissage
continu. Ainsi le C.O. 8 maintient et actualise ses connaissances via la Liste Identité, les
formations et les colloques.
En résumé, ces informations indiquent qu’ultérieurement aux formations initiales les
conseillers d’orientation ont été autonomes dans l’apprentissage de l’épreuve
Groupements et de l’approche psychogénétique. Ils se sont investis personnellement en
temps pour comprendre l’outil et l’approche et ont été chercher des formations de
perfectionnement, pour maintenir et continuer de développer leurs compétences.
Être entouré
Le fait d’être entouré dans les débuts est un élément positif pour développer sa
compréhension de l’outil. Que ce soit à travers un regroupement de collègues qui se sont
formés en même temps, ou auprès d’un collègue qui était formé depuis un moment et qui
partageait ses connaissances, les conseillers d’orientation mentionnent qu’être entouré a
129
été une source de stimulation les aidant à persévérer et progresser dans l’acquisition de
leurs connaissances. À ce titre, la C.O.3 mentionne :
[...] je me suis beaucoup liée au réseau [...] plus t’en parles plus tu y
trouves un sens, parce que tu fais des études de cas là-dessus, pis tu vois
tout le raffinement de ton interprétation en en discutant avec les autres, fac
euh, comme n’importe quel outil de toute façon d’évaluation [...] j’ai
travaillé aussi avec d’autres professionnels qui l’utilisaient, des
psychologues qui eux aussi suivaient la formation, j’ai des des collègues
psychologues, des superviseurs psychologues qui utilisaient l’épreuve
Groupements, ça c’était fort intéressant. (C.O.3)
Dans le même ordre d’idée la C.O.4 se rappelle que lors de ses débuts il était stimulant
d’échanger à ce sujet avec ses collègues de travail : « on parlait de l’épreuve, on essayait
de comprendre, c’est vraiment comme ça qu’on s’est formé entre nous finalement. » Être
entouré représente aussi travailler avec une personne qui est déjà à l’aise avec l’épreuve
Groupements et l’approche psychogénétique. Le partage des connaissances qui se fait
alors facilite l’acquisition et la maitrise de l’outil et de l’approche. La C.O. 2 mentionne
qu’à ses débuts, une collègue qui maitrisait l’épreuve Groupements était présente à son
lieu de travail et qu’elle était devenue, par le fait même, une sorte de coach pour elle.
C’est aussi ce qu’a vécu la C.O.7.
[...] j’ai travaillé deux ans et demi avec elle, et là c’était vraiment très très
formateur, parc’que j’tais à l’aise pour coter l’outil, mais pas
nécessairement à l’aise pour interpréter et intervenir, là elle a été mon
mentor à ce moment là, pis elle m’a vraiment aidé à avoir une bonne
maitrise de cet outil là et de l’approche. (C.O.7)
Donc en résumé, dans les débuts, le fait de ne pas être seul à utiliser l’outil est une
condition qui a facilité l’apprentissage de ces conseillers d’orientation. Que ce soit d’être
parmi un groupe d’apprenant ou d’évoluer avec d’autres personnes déjà formées qui
partagent leurs connaissances, cela a été formateur.
130
Être motivé par les défis intellectuels
La complexité de l’outil est un défi intellectuel pendant la formation et cela se maintient
aussi dans l’évolution de la pratique de ses utilisateurs. Les conseillers d’orientation
reconnaissent et acceptent ce fait et ajoutent qu’en même temps cela les stimulent. Cette
acceptation, d’être interpellés et devoir s’investir intellectuellement, devient donc une
source de motivation et fait partie des éléments qui ont facilité leur apprentissage. En ce
sens, la C.O.1 mentionne que la complexité de l’outil n’a pas été un obstacle : « y avait
un challenge, j’ai trouvé ça ardu… mais dans mon cas à moi, ça m’a pas découragée ».
Elle poursuit en ajoutant : « ben par ailleurs si on veut être mesure de l’utiliser cet outil
là, il faut avoir cet, cet intérêt là aussi à…. . à maîtriser un outil complexe. » Dans le
même ordre d’idée, la C.O.3 fait le lien avec son besoin de stimulation : « J’trouve que
c’est un outil difficile, mais moi, ça va de soi avec moi. Ça va de soi, ça va chercher le
meilleur de ce que je suis ». Être motivé par les défis intellectuels implique également le
fait que lorsqu’il n’y en n’a pas dans le quotidien des conseillers d’orientation, ils
s’ennuient, tel que le présentent les C.O. 5 et C.O. 6.
Parce que faut dire aussi que je m’ennuyais. Tsé comme conseillère en
emploi, j’en avais un peu assez. [...] C'est-à-dire, ça faisait six ans que
j’étais conseillère en emploi, pis j’avais l’impression que j’avais fait le tour
du jardin, fa que j’cherchais des sources de stimulation, tsé, m’en aller un
peu ailleurs [...] Fa que l’épreuve est arrivée comme au bon moment.
(C.O.5)
[...] pis j’m’ennuyais beaucoup dans les cours tsé, c’tait, c’tait l’UQUAM,
j’m’ennuyais dans l’sens que c’est… j’aimais ça, j’aimais ça quand c’tait
plus, plus complexe, plus difficile là tsé, j’trouvais c’tait trop, trop facile
les cours pis j’allais chercher beaucoup beaucoup à l’extérieur des cours
pour m’alimenter un peu parce que j’m’ennuyais vraiment beaucoup…
(C.O.6)
131
Donc, en résumé cela fait état que la complexité de l’outil n’est pas un obstacle pour les
conseillers d’orientation interrogés, mais que bien au contraire, cela a été un élément de
motivation et de stimulation dans leur apprentissage. Cela implique que cette stimulation
s’est présentée à eux et qu’ils y ont adhéré, ou, qu’ils étaient déjà à la recherche de défis
intellectuels parce qu’ils s’ennuyaient dans le cadre de leur fonction et que l’arrivée de
l’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique ont été une réponse à leurs
besoins de stimulation.
Sa propre structure identitaire
Les conseillers d’orientation ont constaté que leur propre identité avait un impact dans
leur appropriation de l’épreuve Groupements. Dans ce sens, la C.O.6 mentionne un
exemple concret qui montre que l’utilisation qui est faite de l’outil est façonnée en
fonction de ce qui est intégré dans sa propre identité.
Quand y a des aspects de ton identité qui sont à travailler, à structurer et à
réorganiser ben moi j’te parle de la relationnelle technique, la routine là e
ça fait… c’est dur de bien coter. Tsé parce que… e… comment j’te dirais
ça e, ben y a toute cette partie-là que t’es pas capable de coter. Pis au
quotidien tu les mêles tout l’temps, [...] Faq à chaque fois que j’ai
amélioré, que j’me suis améliorée, j’ai amélioré ma façon de coter [...] Pis
e… pis chu pas parfaite, j’le serai jamais parce que [...] peut-être parce que
j’suis pas encore assez sûre de moi, peut-être que… je l’sais pas, mais je,
mais, mais j’pars avec l’idée que j’le sais que j’suis pas parfaite la-dans
là… (C.O.6)
Alors que la C.O.6 fait le lien entre son identité et la cotation de l’épreuve Groupements,
la C.O.7 elle, fait le lien entre son identité et sa façon d’intervenir : « Ben tsé comme moi
j’ai eu un cheminement personnel et [...] j’pense que c’est, tsé pour aider quelqu’un,
j’pense qui faut être soi-même euh en équilibre ». Cela va dans le même sens que ce que
mentionnent les C.O.1 et 2 :
132
[...] pour moi, le fait qui soit complexe, ça va avec le fait que il ya une
puissance dans cet instrument là. Ça veut dire que, [...] à partir du moment
qu’un instrument est puissant veut, veut pas, pour l’interpréter ça demande
une complexité (C.O.1)
[...] je pense que pour l'utiliser oui ne serait-ce que la compréhension de
l'outil, à quoi y peut servir... ouais j'pense qu'y faut que t'aies une, une
identité qui est... qui est... quand même assez bien structurée (C.O.2)
Donc, en résumé ses conseillers d’orientation croient que la structure identitaire du
conseiller d’orientation va influencer leur pratique, autant au niveau de la cotation de
l’épreuve Groupements que dans l’intervention en relation d’aide.
5.1.3 Les éléments motivateurs dans leur pratique actuelle
Suite à leurs formations initiales, les conseillers d’orientation ont maintenu leur pratique
de l’épreuve Groupements et de l’approche psychogénétique au-delà d’une décennie.
Pour que cet outil chemine avec eux durant toutes ces années, certains éléments ont été
présents et assez puissants pour qu’ils continuent de l’utiliser et ressentent encore de
l’intérêt. Quatre motivations sous-jacentes au maintien de leur utilisation ont été
répertoriées, soit, le fait de diagnostiquer l’identité rapidement, de constater la validation
des clients, de pouvoir moduler ses interventions instantanément et d’avoir un « tour du
jardin » impossible, ce qui fait référence au fait qu’ils conçoivent avoir encore dans leur
avenir personnel et professionnel des occasions d’évoluer grâce à l’outil ou l’approche.
133
Tableau 11 : Thèmes émergents et définition opératoire des éléments motivateurs des
conseillers d’orientation dans leur pratique actuelle
Thèmes émergeant Définitions opératoires
Diagnostic rapide de l’identité Les c.o. apprécient avoir rapidement un
diagnostic de l’identité. Cela leur permet, dès
le début des rencontres, de comprendre le
fonctionnement de leur client, d’identifier les
sources des difficultés ou malaises vécus en
emploi.
« T’as vu ça où? » : La validation des
clients
Le fait que les clients confirment
l’interprétation de leurs résultats à l’épreuve
Groupements, motive les conseillers
d’orientation à maintenir cet outil.
Moduler ses interventions
Connaître dès le début le fonctionnement de
leurs clients permet aux conseillers
d’orientation de moduler leurs interventions
dès les débuts pour s’adapter aux besoins de
ceux-ci et même être au-devant des besoins
qu’ils ne mentionnent pas toujours. Cela crée
la confiance et un sentiment d’efficacité.
Un « Tour du jardin » impossible
La vision de l’apprentissage continue qui est
associée à l’épreuve Groupements et à
l’approche psychogénétique, selon les
conseillers d’orientation rencontrés, est à deux
niveaux, autant ils voient qu’ils peuvent encore
apprendre, autant ils voient que l’outil peut
encore se raffiner. Ces possibilités de
développement sont une source de stimulation.
134
Diagnostic rapide de l’identité
Les conseillers d’orientation apprécient avoir rapidement un diagnostic de l’identité. Cela
leur permet, dès le début des rencontres, de comprendre le fonctionnement de leur client
et d’identifier les sources des difficultés ou malaises vécus en emploi. Pour ces
conseillers d’orientation, avoir un diagnostic permet de dépasser ou de confirmer les
hypothèses qu’ils se font.
Pis là tu lui émets des p'tites hypothèses : « j'suis sure qu'y est comme ça...
pis j'suis sure comme ça... » Pis là tu lui fais passer l'épreuve pis là, aille,
ça valide ce que t'as pu, en tout cas... émettre comme hypothèses là, alors
tsé de poser un diagnostic en fait... j'trouve que c'est vraiment intéressant.
(C.O.2)
La C.O. 4 abonde en ce sens, en reconnaissant qu’aucun autre outil ne lui donne toutes
les informations qu’elle peut retirer avec l’épreuve Groupements. De l’histoire subjective
du client, elle peut faire des liens avec ce que présente son diagnostic identitaire, ce qui
semble être une force qu’elle reconnait de l’outil.
Parce que pour moi c’est l’outil qui me donne une compréhension
qu’aucun autre outil me donne de la personne, et à un point tel, parce que
là c’est tellement précieux, après toutes ces années, c’que j’peux aller
chercher comme, comme nuance, comme précision, des fois c’est
quasiment chi… chirurgicale j’oserais avec certaines personnes. C’qui fait
que le lien de confiance là, y s’établit là. (C.O.4)
Avoir ce diagnostic permet donc aux conseillers d’orientation de donner des informations
précises, tel que le dit la C.O. 5, cela mets, entre autres, les mots sur les maux : « je mets
des mots sur leurs malaises ou au contraire sur leurs forces qu’ils avaient pas pensées.
Les gens forment pas des liens et là c’est comme de faire les liens entre tous ça. » De
135
plus, ces informations sont accessibles rapidement, ce qui semble être un avantage,
comme l’émet la C.O.6 :
[...] j’trouve que d’avoir cet outil là, ça m’outille, ça me donne un plus, une
lunette de plus pour voir peut-être c’que d’autres c.o. vont prendre
plusieurs rencontres avant d’le voir là tsé. Faq là, tsé j’dis pas qu’ils le
verront pas, éventuellement, mais c’est parce que c’t’à la longue que
t’apprends à connaître quelqu’un, tandis que c’t’outil-là déjà ça te donne
un bon… un bon coup de pouce. (C.O.6)
Dans un contexte scolaire où les conseillers d’orientation sont souvent seuls pour, utiliser
l’épreuve Groupements et avoir accès rapidement au diagnostic de l’identité est considéré
comme un avantage, comme le présente la C.O.7:
[...] c’parc’ que dans l’fond, comment j’fais pour m’en sortir, dans le
contexte de mon travail que je suis toute seule, c’est que, j’fais une
entrevue avec la personne, souvent j’la vois une fois mon étudiante, mais
des fois deux ou trois et j’leur dis aussi on s’voit une fois et ça s’peut que
tu quittes mon mon bureau avec un autre rencontre pis ça va dépendre de
la façon qu’on va travailler ensemble [...] première rencontre ça dure une
heure et demie, donc c’est l’entrevue, l’épreuve Groupements, l’ana,
l’interprétation d’l’épreuve Groupements et (bruit : tape dans ses mains) le
travail d’information scolaire. (C.O.7)
Donc, en résumé, ce qui ressort de ces extraits est que ces conseillers d’orientation
apprécient la précision des informations qu’ils vont chercher sur le fonctionnement de
leurs clients grâce à l’épreuve Groupements. Le fait que ces informations sont accessibles
rapidement est un avantage sur la durée requise pour connaître leur client.
136
« T’as vu ça où? »
Le fait que les clients confirment l’interprétation de leurs résultats à l’épreuve
Groupements motive les conseillers d’orientation. Les réactions des clients, lorsqu’ils
sont touchés par la justesse des informations qui leur sont données sont révélatrices et ils
en font même part aux conseillers d’orientation. La C.O.1 présente cette situation :
[...] un monsieur que j’évaluais pour un poste de V.-P. donc, qui y avait
quand même une certaine prestance, un statut, qui m’a dit : « j’me sens
tout nu devant vous là Madame » [...] « juste avec le test de jeu de carte là,
que vous avez vu ça ? » (C.O.1)
Ce client a donc été surpris de la justesse des informations que révélait un « test » qu’il
croyait anodin. La C.O. 4 présente aussi les réactions de certains de ces clients qui
semblent elles aussi assez révélatrices :
[...] pis y en a d’autres qui tout de suite vont être complètement cul par-
dessus tête, de dire : « Ayoye j’en r’vient pas, nan, nan, nan, comment ça,
comment tu fais pour savoir ça? [...] même mes amis, y a juste mes
meilleurs amis, même j’ai des amis qui savent même pas ça… tsé de
comment j’me sens… »
Il en est de même pour la C.O.5 qui mentionne que plusieurs clients, surpris de la justesse
des informations qu’elle leur transmet, lui disent : « [...] ah ben là j’pensais pas qu’on
allait parler de ça [...], mais êtes-vous psychologue? ». Elle ajoute d’ailleurs que cela la
motive à poursuivre l’utilisation de l’outil.
[...] ce qui incite aussi à continuer c’est quand j’donne l’interprétation à
froid là, j’dirais j’connais pas, ça fait une heure, même pas, des fois c’est
une demi-heure que j’connais la personne pis j’y dis un truc, pis là le client
fait comme « ben là, comment tu sais ça? » (C.O.5)
137
Il en est de même pour la C.O. 2 qui parle de la réaction des élèves en disant : « c'qui est
vraiment drôle c'est que quand y sont réflexifs [...] eux, c'est vraiment intéressant parce
que : "Ah, mais madame comment ça fait?" [...] comment ça s'fait que vous avez pu voir
ça... de moi? ». Elle ajoute également :
Ça c’est vraiment, à mon avis, c’qui y a de vraiment d’intéressant dans
c’travail là [...] tu sais quand y a des cas d’élèves ou ça va pas la
motivation tout ça, on va e la direction, au service pédagogique [...] on va
souvent me d’mander d’être à la rencontre, d’avoir un portrait de l’élève,
et parfois l’élève là j’le connais pas OK, je, j’ai, j’ai pas commencé a faire
de rencontre avec lui, mais j’ai fait l’épre… je, je lui ai fait faire l’épreuve
Groupements. [...] Et c’est arriver à plusieurs reprises… ou des parents
m’ont dit « Mais Madame, c’est parce que je pense que vous l’connaissez
autant que moi ». (C.O.2)
Par ailleurs, la C.O.3 mentionne que ses clients ne sont pas surpris de ce qu’elle leur dit,
mais plutôt qu’ils : « sont surpris d’avoir quelqu’un qui voit ça assez vite, parce que c’est
ma deuxième rencontre », ce qui fait en même temps un lien avec ce qui était présenté
plus tôt, concernant la rapidité à obtenir un diagnostic de l’identité. Enfin, la C.O.6
précise que ce qu’elle aime est le fait que suite à la présentation des résultats, ses élèves
sont : « [...] tellement surpris que là ça les fait parler. [...] C’est ça qui est l’fun parce que
ça les fait s’ouvrir. »
Donc, en résumé, ces conseillers d’orientation mentionnent que les réactions positives de
leurs clients, face à l’interprétation qu’ils leur font de leur épreuve Groupements, valident
l’utilisation qu’ils en font. Par le fait même, c’est également une source de motivation.
138
Moduler ses interventions
Connaître le fonctionnement de leurs clients permet aux conseillers d’orientation de
moduler leurs interventions dès les débuts pour s’adapter aux besoins de ceux-ci et même
être au-devant des besoins qu’ils ne mentionnent pas toujours en premier lieu. Cela crée
la confiance et un sentiment d’efficacité.
Plusieurs conseillers d’orientation mentionnent que connaître le fonctionnement de leur
client leur permet de savoir comment les aborder. En ce sens, la C.O.2 explique : « Si j’ai
un jeune, ou qui est incapable de donner un sens à tout ça, mes interventions ne seront
pas les mêmes que si j’ai un jeune, j’vois bon, qui a une identité assez solide. Dans ce
même sens, la C.O.3 explique :
[...] dépendamment de la structure de la personne, comment je dois
l’aborder, c’est ça que j’aime de l’épreuve Groupements, c’est que ça me
donne des paramètres à comment intervenir avec elle. Par exemple si la
personnel est toute en relationnelle, j’peux bien comprendre que on va
s’promener de partout, pis que probablement s’qu’on va décider là, dans
une semaine, ça va r’venir et ça va être très, tsé le sentiment de vide [...] fa
que j’fais attention, même j’peux le dire à la personne, j’peux l’avertir qu’à
va avoir ce sentiment là. (C.O.3)
Cette possibilité d’aborder le client selon les besoins de son identité et même d’intervenir
dans un contexte d’orientation est aussi un apport que reconnait la C.O.6. Elle mentionne
que : […] la façon que j’vois comment est-ce qui est organisé c’est ça qui va m’enligner
par rapport à lui dans mes interventions, pis c’est ça qui va m’inter… qui va m’enligner
sur comment j’vas l’aborder c’te jeune-là. (C.O.6)
Il en est de même pour le C.O.8, qui mentionne que connaître le diagnostic identitaire :
« ça l’aide vraiment à savoir là où se situe mon client [...] qu’est-ce que j’peux faire moi
pour l’aider. » La C.O. 5 abonde dans le même sens et ajoute que les informations qu’elle
139
a lui permettent d’être au-devant de son client : « [...] ça permet d’aller chercher euh,
d’aller identifier les craintes du client pour pouvoir aller le rassurer avant même qu’il t’ait
nommé la, qu’il t’ait nommé sa crainte. »
En résumé, avoir le diagnostic identitaire permet aux conseillers d’orientation de moduler
leurs démarches afin de s’accorder à ce que le profil de leurs clients requiert. C’est une
façon pour eux de respecter et d’être congruent avec les limites et les ressources de leurs
clients.
Un « Tour du jardin » impossible
La vision de l’apprentissage continue qui est associée à l’épreuve Groupements et à
l’approche psychogénétique, selon les conseillers d’orientation rencontrés, est à deux
niveaux, autant ils voient qu’ils peuvent encore apprendre, autant ils voient que l’outil
peut encore se raffiner. Ces possibilités de développement sont une source de stimulation.
Dans l’avenir professionnel de tous les conseillers d’orientation rencontrés, ils désirent
maintenir leur pratique de l’outil et de l’approche.
La C.O.1 mentionne : « c’que j’trouve encore aujourd’hui fascinant de l’épreuve c’est
que, encore aujourd’hui on découvre des nouvelles interprétations ». Il en est de même
pour la C.O.4 qui ajoute qu’il est aussi important d’accepter que la maitrise de l’outil et
de l’approche évolue dans le temps et sur une période indéterminée.
Mais pour moi l’épreuve, c’est parce qu’y a pas de case, donc les
possibilités sont infinies, alors ça demande d’avantage d’acceptation du
fait que là c’t’un travail d’une vie professionnelle [...] d’apprendre à
maîtriser cet outil-là pis on n’arrête pas d’apprendre, parce que y est en
mouvement l’outil, y est vraiment pas figé dans l’temps. (C.O.4)
140
Ainsi, le fait que l’outil se développe encore et que l’apprentissage est un processus qui
se vit en continuité dans le temps est une source de motivation pour ces conseillers
d’orientation. Ils voient positivement l’éventualité d’apprentissage futur et ce, malgré le
fait qu’ils y sont impliqués depuis plusieurs années déjà. En ce sens, la C.O.5 et le C.O.5
racontent :
[...] même encore aujourd’hui, y a encore, pis j’pense ça va être toute la
vie de même là, y a encore des moments où j’comprends pas trop c’qui
s’passe, pis là c’est hop, quelqu’un m’dis un affaire pis là « ha oui, OK,
tiens, j’avais pas vu ça », tsé c’est vraiment, c’est sans fin c’t’affaire là.
(C.O.5)
[...] c’est quelque chose qu’on apprend toujours, j’pense que j’s’rais là
dans trente ans et y aura encore des choses à voir [...] c’est pas d’main que
j’va arrêter [...], j’va continuer de lire là-d’sus, ça m’intéresse, j’suis tombé
d’dans, j’suis vraiment d’dans, c’est clair. (C.O.8)
Les huit conseillers d’orientation voient également leur pratique de l’outil et de
l’approche se maintenir dans leur avenir professionnel, en autant qu’ils maintiennent un
rôle approprié à l’utilisation. La C.O.1 résume bien les dires de l’ensemble des conseillers
d’orientation rencontrés.
Ben en faite tant que j’vais rester dans, dans un rôle comme celui que je
joue, Oui. tsé moi j’me vois pas e ne pas utiliser l’épreuve fa que la seule
chose qui f’rait que j’utiliserais pu l’épreuve c’est que j’serais dans un rôle
où e ça fait pas partie de mes fonctions là (C.O.1)
En résumé, ces extraits présentent le fait que ces conseillers d’orientation considèrent que
leurs apprentissages peuvent encore évoluer et ce malgré le fait qu’ils ont plus d’une
décennie de pratique. Le fait que les huit conseillers d’orientation disent vouloir
maintenir leur pratique de l’Épreuve Groupements et de l’approche psychogénétique dans
l’avenir peut, par le fait même, que ce n’est pas un obstacle pour eux.
141
En conclusion de cette section, pour les conseillers d’orientation rencontrés, les
motivations sous-jacentes à l’utilisation de l’épreuve Groupements et de l’approche
psychogénétique sont :
Ils y voient une vision de l’orientation à laquelle ils adhèrent;
Le fait que cette vision leur a été transmise par Luc Bégin et le lien qu’ils ont créé
avec lui a été un élément stimulant;
Ils ont été attirés par les défis intellectuels et ils savent qu’il y en a encore devant
eux;
L’interprétation qu’ils font de l’épreuve Groupements est validée par leurs clients
et ceux-ci sont surpris de la précision et de la profondeur de ce qui leur est dit;
Ils connaissent rapidement le fonctionnement identitaire de leur client et peuvent
ainsi adapter leur façon de les aborder.
En plus de ces motivations, trois autres éléments ressortent concernant les conditions qui
ont facilité l’apprentissage de l’épreuve Groupements des conseillers d’orientation dans
leur début de pratique. Les deux premiers éléments sont le temps et l’entourage, qui font
référence au fait qu’ils y ont investi du temps en formation formelle (structurée) et
informelle (temps personnel) et qu’ils se sont entourés de gens qui apprenaient ou
connaissaient déjà l’épreuve Groupements. La dernière condition facilitant
l’appropriation de l’épreuve Groupements et l’intervention avec les clients est la structure
identitaire même des conseillers d’orientation. Les conseillers d’orientation rencontrés
ont constaté que cela avait un impact face à la cotation de l’épreuve Groupements et face
à la relation qu’ils ont avec leurs clients.
En somme, on constate que pour ces conseillers d’orientation, le moment où est arrivée
l’épreuve Groupements dans leur vie, a eu un impact différent selon leurs années
142
d’expériences professionnelles en orientation. Plus ces professionnels étaient déjà actifs
depuis un certain temps dans leur milieu, plus l’intérêt était instantané et répondait à un
besoin non comblé. Ce besoin non comblé pouvait être autant au niveau d’un manque de
stimulation intellectuelle que d’une insatisfaction quant à la vision de l’orientation qui
leur avait été présentée jusqu’à maintenant. Pour tous ces conseillers d’orientation, le fait
d’être stimulé intellectuellement par l’outil révèle une curiosité naturelle et c’est aussi
l’élément clé, faisant qu’ils étaient prêts à s’investir en temps, en effort et en formations
de perfectionnement de façon autonome. La puissance des informations provenant de
l’épreuve Groupements et le fait de ne pas posséder toute la matière dès les débuts et
même de voir que leurs apprentissages ne se termineraient pas de si tôt ne les a pas
rebutés, car dans leur pratique quotidienne ils constataient la satisfaction des clients
d’être si bien compris si rapidement. Par ailleurs, les conseillers d’orientation vivent un
sentiment d’efficacité de par le fait que, connaissant l’identité de leurs clients et
transposant ces informations en besoins dans leurs démarches avec eux, ils sont capables
de moduler leur processus ainsi que ce qu’ils interpréteront des résultats de l’épreuve
Groupements. Ainsi, ils s’ajustent afin d’être en cohérence avec les besoins mentionnés
par leurs clients et pour répondre, dans un même temps, aux besoins parfois non dits qui
découlent de leur identité. Dans les contextes où les conseillers d’orientation n’ont pas
beaucoup de temps pour rencontrer leurs clients, par exemple, en éducation, l’utilisation
de l’épreuve Groupements rend optimal le peu d’heures qu’ils ont avec eux.
5.2 Les contextes d’utilisations
Afin de décrire les contextes dans lesquels les conseillers d’orientation utilisent l’épreuve
Groupements, deux sections seront présentées. En premier lieu, un tableau présentera les
secteurs de travail, les services utilisés et les clientèles rencontrées par les huit conseillers
d’orientation. Cette partie descriptive a pour but de situer le lecteur face aux différents
contextes dans lesquelles évoluent les conseillers d’orientation et par le fait même cela
aidera aussi à mieux comprendre leurs utilisations. Cette première partie inclut également
l’analyse des éléments qui ressortent de ces différents contextes, soit, le fait que les
143
conseillers d’orientation vivent des proximités variables avec leur client, qu’il s’agit de
présence volontaire et involontaire et que l’ensemble des conseillers d’orientation utilise
l’épreuve Groupements avec tous les types de clientèles qu’ils rencontrent. Puisque c’est
lors de leur utilisation que cet élément est vécu (ou a été vécue), la deuxième partie
portera sur la principale difficulté qu’ils ont rencontrée, soit l’interprétation des résultats
de l’épreuve Groupements.
5.2.1 Description des milieux et clientèles
Le tableau qui suit présente les milieux dans lesquels évoluent les conseillers
d’orientation, les besoins de leurs clients, ainsi que les types de clientèles qu’ils
rencontrent. La clientèle émergente, qui est représentée par les immigrants et les
personnes ayant une ou des problématiques en santé mentale, est présentée sous trois
niveaux. Le niveau faible indique que les conseillers d’orientation rencontrent rarement
des clients immigrants ou ayant des problématiques en santé mentale. Le niveau moyen
indique que les conseillers d’orientation disent rencontrer régulièrement des clients
immigrants ou des clients ayant des problèmes de santé mentale, mais que ce n’est pas la
majorité de leur clientèle. À titre d’exemple, la c.o. 4 mentionne que les dernières
statistiques de son organisme indiquaient que la clientèle immigrante représentait 20 %
de leur clientèle et que la clientèle ayant des problématiques en santé mentale représentait
33 % de leur clientèle habituelle. Enfin, le niveau élevé représente la caractéristique
principale de la clientèle qui les consulte. Dans le cas où une seule clientèle est
représentée sous l’appellation « clientèle émergente », sa caractéristique est indiquée
entre parenthèses. De plus, pour les conseillers d’orientation œuvrant en éducation, le
ratio indiquant le nombre de conseillers d’orientation présents dans leur école pour le
nombre d’élèves présents est inscrit.
144
Tableau 12 : Milieux de pratique des conseillers d’orientation et clientèles rencontrées
c.o
Milieux
Besoins des
clients
Clientèles
Clientèles
émergentes
1 Organisationnel Sélection
Évaluation
Développement-
Coaching
Consolidation
d’équipe
Mandat de relève
Tout âge
Adultes en emploi
Faible
8 Organisationnel Sélection
Évaluation
Tout âge
Adultes en emploi
Faible
2 Éducation/
Secondaire (ratio 1c.o./1200
élèves)
Orientation
Jeunes de niveau
secondaire –
école privée
Faible
6 Éducation/
Secondaire (1/900)
Orientation
Jeunes de niveau
secondaire –
école publique
Moyen
(adaptation
scolaire)
7 Éducation/
Collégial (1/1200)
Orientation
Jeunes de niveau
collégial-
école publique
Faible
3 Réadaptation Orientation
Adultes avec handicaps Élevé
(santé
mentale)
4 Employabilité Orientation
Toutes personnes de 18
ans et plus, habituellement
sans emploi ou prestataire
d’assurance-emploi ou
d’assistance-emploi.
Référence Emploi-Québec
Moyen
5 Employabilité Orientation
Toutes personnes de 18
ans et plus, habituellement
sans emploi ou prestataire
d’assurance-emploi ou
d’assistance-emploi.
Référence Emploi-Québec
Moyen
145
Maintenant que le lecteur peut situer les milieux et clientèles des conseillers d’orientation
rencontrés suivra la présentation des thèmes émergeant. Il a donc été remarqué que les
conseillers d’orientation rencontrés n’ont pas tous la même proximité avec leur client en
termes de nombre de rencontres. De plus, parmi leur clientèle, certains de leur client se
présentent volontairement à eux, alors que pour d’autres, leur présence est obligatoire ou
fait partie d’un processus d’évaluation. Enfin, il a été remarqué que les huit conseillers
d’orientation utilisent l’épreuve Groupements auprès de tout type de clientèle, incluant la
clientèle immigrante et la clientèle ayant eu des problématiques en santé mentale.
Tableau 13 : Thèmes émergents et définition opératoire des conditions des milieux et
clientèles des conseillers d’orientation
Thèmes émergeant Définition opératoire
Une proximité variable avec les clients
Les conseillers d’orientation n’ont pas tous
le même nombre de rencontres avec leur
client.
Volontaire la démarche d’orientation?
Les clients qui consultent les conseillers
d’orientation le font volontairement ou de
façon obligée.
« Bon pour tous »
Les conseillers d’orientation utilisent
l’épreuve Groupements avec tout type de
clientèles, incluant la clientèle immigrante
et la clientèle ayant des problématiques en
santé mentale.
Une proximité variable avec les clients
Les conseillers d’orientation n’ont pas tous le même nombre de rencontres avec leur
client. Premièrement, le secteur où ils œuvrent à un impact direct. Les deux conseillers
d’orientation œuvrant dans les milieux organisationnels lorsqu’ils ont un mandat
d’évaluation n’ont pas à rencontrer leur client sur une longue période, ce sont plutôt des
rencontres sur un court laps de temps. En ce sens, le C.O. 8 mentionne : « c’est vraiment
très circonscrit comme approche, c’est très spécialisé, donc j’fais, j’dis que j’fais un peu
146
le radiologiste, j’arrive, j’prends l’portrait, j’fais d’l’intervention pour expliquer… » De
son côté, la C.O.1 mentionne faire également du coaching, ce qui pourrait être alors une
occasion d’avoir un nombre de rencontres plus élevées. En ce qui concerne les conseillers
d’orientation œuvrant en éducation, le fait qu’ils soient seuls dans leur établissement en
tant que conseiller d’orientation pour un nombre élevé d’étudiants les oblige à ne pas
étendre leurs processus d’orientation. À l’exception des occasions où, pour un nombre
minime d’étudiants seulement, ils vont décider de les rencontrer sur une plus longue
durée, les conseillers d’orientation vont surtout avoir des processus plus courts, allant
d’une à quatre rencontres, comme le présente la C.O. 6, qui se dit semble croire qu’avoir
quatre rencontres en éducation n’est pas habituel : « je peux les voir au moins quatre fois
les gens, parce que moi j’ai ce privilège-là à mon école ».
Les conseillères d’orientation du milieu de l’employabilité semblent être celles qui ont un
plus long processus, tournant habituellement autour des trois mois, qui sont aussi la
norme prévue selon leur mandat avec Emploi-Québec. Ainsi si le client se présente une
fois par semaine, il y a un potentiel de douze rencontres.
Volontaire la démarche d’orientation?
Dans tous milieux, les clients n’arrivent devant les conseillers d’orientation avec le même
enthousiasme. C’est d’ailleurs dans le secteur de l’employabilité que l’aspect
involontaire, voir obligé, se fait le plus sentir pour une partie de leur clientèle comme le
mentionne la C.O.5 : « Dans les caractéristiques des clientèles, on a des clients qui nous
sont envoyés d’Emploi Québec, ils sont obligés de venir s’ils veulent avoir un cours ». Ce
qui est entendu ici est que la conseillère d’orientation a le rôle de valider le choix qu’a
déjà fait le client, ou qu’elle doit l’aider à trouver une formation qui lui convient. Elle
précise que cela à un impact, dans le sens où certains clients, disent : « j’vais quand
même utiliser cette ressource là pour moi, même si c’est mon agent qui me force », alors
147
que d’autres semblent moins ouverts : « y en a qui disent oui-oui-oui, mais c’est plus les,
j’dirais, passifs-agressifs là, c’est oui-oui, mais tu m’f’ras pas changer d’idée ».
Dans le secteur de l’éducation et celui de la réadaptation, les démarches sont
habituellement volontaires. Par ailleurs, la C.O. 2 fait remarquer : « parce qu'on est une
école privée, y a les demandes des parents ». Ce qui peut alors impliquer des activités
précises en orientation ou des consultations en orientation fortement suggérées.
« Bon pour tous »
Tous les conseillers d’orientation des secteurs de l’éducation, de la réadaptation et de
l’employabilité font passer l’épreuve Groupements à tous leur client, tant que cela fait
référence à des services d’orientation. C’est-à-dire que dans un contexte où un client
demande un service qui n’est pas de l’orientation les conseillers d’orientation
n’utiliseront pas l’épreuve Groupements.
[...] c’est sûr que étant conseillère dans une grosse école comme ça parfois
si y a des cas ou j’vois que on va s’arrêter à l’information là OK donc dans
un cas comme ça je l’utiliserai pas là, mais [...] tout c’qui est intervention-
orientation c’est sûr que j’vais utiliser l’épreuve Groupements. (C.O.2)
[...] ceux à qui j’fais la recherche d’emploi, que j’fais juste juste ça,
recherche d’emploi, ils ont besoin d’un cv j’vois ben que c’est juste ça que
j’vais faire avec eux [...] fa que là j’leur fais pas nécessairement passer
l’épreuve [...], mais sinon, c’est systématique, j’me pose pas la question.
(C.O.5)
148
En ce qui concerne les conseillers d’orientation du milieu organisationnel, la C.O. 1
indique qu’elle le fait passer à tous ses clients : « Dès qu’il y a une évaluation, peu
importe notre batterie d’outils psychométrique, il va toujours y avoir l’épreuve. [...] dans
toute ma batterie de tests là, c’est celle qui a le plus de poids... » Alors que du côté du
C.O.8, il mentionne utiliser l’épreuve Groupements sporadiquement, surtout lors de
contexte d’évaluation. Pour terminer, au niveau du contexte d’utilisation, peu importe le
nombre de rencontres avec les clients, les conseillers d’orientation font passer l’épreuve
Groupements en début de processus, lors de la première ou deuxième rencontre.
Les huit conseillers d’orientation utilisent aussi l’épreuve Groupements avec tout type de
clientèles, incluant la clientèle immigrante et la clientèle ayant des problématiques en
santé mentale. La C.O.3 qui travaille exclusivement avec une clientèle handicapée
mentionne que l’épreuve Groupements est un outil qui a l’avantage de sortir les gens des
étiquettes.
Quelqu’un qui a euh, des prob euh… problématiques de perception euh
quand tu lui fais passer les inventaires d’évaluation ou un questionnaire sur
ce qu’elle pense d’elle-même, c’est quelquefois difficile euh, sur évaluer,
sous-évaluer, y’on de la difficulté à se voir comme personne [...] et pour la
personne qui est en santé mentale on a, qui est, qui a été soumise a
beaucoup d’étiquette, on éloigne ça beaucoup avec cet outil là [...] et le
mode de fonctionnement, c’est au-delà de la maladie (C.O.3)
Elle mentionne utiliser l’épreuve Groupements avec tous ces autres clients qui se dirigent
vers des études ou vers un emploi. Dans un contexte où elle ne rencontre que des clients
ayant une problématique en santé mentale, elle mentionne que parler d’identité est un
ajout positif à la vision qu’ils ont d’eux. Elle mentionne : « Moi ça m’ouvre encore des
possibilités, ça me permet d’avoir euh, une crédibilité auprès de la clientèle, parce que je
parle de d’autres choses, je touche d’autres choses chez eux, et j’les fais grandir »
(C.O.3). Par ailleurs, la C.O.6 qui travaille dans une école incluant en grande partie
l’adaptation scolaire, quant à elle décide pour certaines situations, dont les élèves ayant le
149
syndrome Gilles de la Tourette ou le trouble dysphasique de ne pas leur faire passer
l’épreuve Groupements. Par ailleurs pour tous ces autres élèves elle utilise cet outil. Elle
explique pour ces élèves :
Ceux-là j’leur passe, pis des fois ça m’aide à voir que, que ces jeunes-là,
là, y sont là, mais pour une autre raison tsé c’est, c’est pas à cause de… de
comment leur identité est formée parce que des fois y sont super bien
formés, mais y se sont retrouvés là, moi j’trouve par « bad luck » parce
qu’y a pas d’autres choses… (C.O.6)
Donc l’épreuve Groupements est aussi un outil adéquat auprès des clientèles ayant une
difficulté en santé mentale. Par ailleurs, ce n’est pas un outil qui sert à confirmer des
diagnostics en santé mentale. La C.O. 1 explique ce fait en donnant un exemple en lien
avec la dépression :
[...] ça veut pas nécessairement confirmer que la personne est en
dépression, mais, à la lumière de l’épreuve, j’peux voir compte tenu de son
fonctionnement pis à l’extérieur d’elle en… c’est en adéquation de son
fonctionnement pis de l’environnement dans lequel elle s’est r’trouvé qui
peut oui, (Bruit) à ce moment là expliquer la dépression. Mais c’est pas
l’épreuve toute seule qui l’a expliqué. (C.O. 1)
La C.O. 5 utilise aussi l’épreuve Groupements avec les clientèles ayant des
problématiques en santé mentale et dit même qu’il n’a pas vécu d’occasion où elle a
décidé de ne pas utiliser l’outil puisque l’information sur la stabilité du fonctionnement
de son client lui aurait manqué. Cette même conseillère d’orientation, ainsi que la C.O. 4
et la C.O. 1 utilisent aussi l’épreuve Groupements avec une clientèle immigrante. Bien
qu’elle ne rencontre pas souvent d’immigrants dans le cadre de son travail, la C.O. 1 se
rappelle avoir utilisé l’épreuve Groupements avec un homme originaire de l’Inde et
mentionne qu’il a validé les résultats. Par ailleurs elle ajouter qu’il faut dans ces
contextes rester vigilant :
150
[...] quand on utilise l’épreuve, dans des contextes où on n’a pas
nécessairement plein d’informations encore là, mais on l’utilise quand
même, en se disant r’garde là, on va se fier aussi à notre jugement
professionnel. (C.O.1)
En résumé, ces extraits montrent que les conseillers d’orientation utilisant l’épreuve
Groupements depuis plus de dix ans ont vu dans leur pratique la pertinence d’utiliser
l’épreuve Groupements avec tous types de clientèle pouvant être définis comme clientèle
émergente. Dans ces contextes, les conseillers d’orientation font aussi usage de prudence.
5.2.2 Une difficulté identifiée : l’interprétation
Les conseillers d’orientation mentionnent qu’ils ont trouvé ou trouvent encore difficile
d’interpréter les résultats de l’épreuve Groupement. C’est à ce niveau surtout que le
temps à un impact, tel que le mentionne la C.O. 4 : « Ça c’est, y faut vraiment être
patient. » Il en est de même pour la C.O.5 qui conçoit que cela peut être un inconvénient :
« le seul inconvénient c’est euh, en fait peut-être un inconvénient, c’est que
l’interprétation est pas facile. » Elle se rappelle ses débuts :
[...] j’me souviens qu’au départ, ben j’pense, non, j’le disais pas, tsé
j’savais coter, j’avais une idée de l’interprétation, mais j’en parlais pas [...]
j’attendais, tsé quand le client me nommait un truc pis là ça faisait un
affaire que j’voyais ah! je relançais. [...] j’y suis allée progressivement là.
(C.O.5)
Par ailleurs, le fait qu’ils ont trouvé difficile d’interpréter les résultats n’a pas été une
raison d’arrêter d’utiliser l’outil. La C.O.3 mentionne qu’elle s’est trouvé une façon
personnelle pour interpréter : « quand j’explique l’épreuve Groupements, [...] j’fais
beaucoup d’allusion, euh, j’essaie de beaucoup de faire, de l’imager, parce que c’est
difficile à expliquer. » Elle ajoute que pour expliquer verbalement les résultats sa
151
confiance a évolué avec le temps, mais que pour elle, c’est plutôt au niveau des
interprétations écrites qu’elle trouve cela plus difficile :
[...] j’fais mon p’tit graphique, mon hexagone, j’mets mes paramètres,
j’explique le pourquoi, dans quoi on baigne, j’ai mes histoires autour de
ça, mes analogies, mes métaphores pour expliquer un p’tit peu euh les
résiduels, les ci les ça, dans des thèmes accessibles, pis qui ont du sens,
mais j’aurais aimé ça qu’on travaille plus là-dessus [...] Fac moi, peut-être
ce que j’aurais à développer, c’est un peu comment le rédiger, j’y va,
j’t’assez collé au cahier, quand y a eu le cahier, j’trouvais ça intéressant
quand ils ont sorti le cahier là d’interprétation (C.O.3)
Selon la C.O.7 certains éléments sont plus difficiles à maitriser dans les débuts, pour elle
ce fut d’avoir une vision globale des résultats. Elle mentionne que : « […] pour coter ça
allait bien j’l’ai pris assez vite, mais c’est pour euh interpréter, ça c’était long, c’était, ça
m’a pris quasiment deux ans avec XXX pour bien euh, le maitriser au bout des doigts, si
on veut. Il en est de même pour le C.O.8 qui constate qu’il s’est raffiné avec le temps :
[...] les cours que j’ai suivis antérieurement dans l’autre, dans l’cadre de
d’autres formations euh, par le biais de l’institut euh, ça pas été vains,
j’vois que ça s’intègre en que’que part, pis j’vois que ça prend forme dans
le contexte d’intervention euh que que j’fais maintenant, que j’faisais pas
peut-être y a dix quinze ans, si tu m’avais observé peut-être y a quinze ans,
ça devait être un peu plus raide, pis un peu moins euh, moins nuancé, plus
technique, là tsé, alors que aujourd’hui c’est moins le canevas comme tel
qui interviens c’est ben plus la relation (C.O.8)
En ajout à ces informations concernant la difficulté à interpréter les résultats de l’épreuve
Groupements, la C.O.1 mentionne que l’outil a cette limite : « […] l’épreuve, va pas
mesurer l’… comment j’dirais bien ça tsé l’impact ou le dosage. L’ampleur. Par exemple,
d’une… tsé d’une manifestation là, là on l’sait pas, c’t’une limite ».
En résumé, selon ces conseillers d’orientation, il est difficile, surtout dans les débuts,
d’interpréter les résultats de l’épreuve Groupement d’une façon fluide. Une difficulté
152
également identifiée fait référence au fait que l’outil ne présente pas l’ampleur d’une
manifestation identifiée.
5.2.3 L’apport des autres outils et approches
Les conseillers d’orientation rencontrés mentionnent utiliser d’autres outils
psychométriques. Ils mentionnent qu’il peut y avoir des liens intéressants à faire entre les
résultats de certains tests et l’épreuve Groupements. Ils mentionnent aussi que les
informations venant des autres outils peuvent apporter un éclairage aux résultats de
l’épreuve Groupements. Dans le cadre de leur pratique, ils mentionnent intervenir selon
l’approche psychogénétique et utiliser également l’approche cognitive dans certains types
d’interventions.
Tableau 14 : Thèmes émergents et définition opératoires de l’apport des autres outils et
approches utilisés de concert avec l’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique
Thèmes émergeant Définition opératoire
Un « plus » pour mieux comprendre
Les conseillers d’orientation voient des
liens intéressants entre les résultats de
l’épreuve Groupements et les résultats de
d’autres outils.
L’approche cognitive : une consœur de
travail
Les conseillers d’orientation ajoutent
l’approche cognitive à l’approche
psychogénétique dans certains buts
d’intervention précis.
153
Un « plus » pour mieux comprendre
Les conseillers d’orientation mentionnent que les informations provenant d’un test
psychométrique peuvent s’ajouter aux résultats de l’épreuve Groupements et donner des
nuances intéressantes, tel que l’exprime la CO.4 : « entre le MBTI et l’épreuve c’est
vraiment l’fun, l’épreuve Groupements rajoute une p’tite précision ou des p’tites couleurs
supplémentaires ». Parlant du même test psychométrique, la C.O.1 explique de façon plus
précise :
[...] un exemple fort simple : la technique routine, elle va se manifester
différemment si au MBTI la personne elle est P ou J. [...] Fa que c’est des
beaux liens à faire quand même [...] e… pis même chose sur e… tsé la RS
sociale ce sont des thinkings ou des feelings fa que tsé c’est des
observations qu’on, qu’on va avoir fait. (C.O.1)
Elle ajoute également un lien intéressant entre le test Wonderlic et l’anxiété de
performance à l’épreuve Groupements. Dans une situation de sous-performance au test
Wonderlic, elle mentionne avoir vu les impacts associés à un diagnostic d’anxiété de
performance.
Le Wonderlic y est chronométré douze minutes. [...] la semaine passée,
une femme qui a un post doctorat en génie donc, on s’entend que au
niveau des habiletés logiques, raisonnements logiques complexités
intellectuelles, a doit être quand même dans les percentiles élevés, écoute,
elle a obtenu un percentile autour de onze là. Ça, ça s’peut pas là. [...]
Quand j’l’ai rencontré en entrevue, elle m’a dit : « écoutez j’ai
l’impression que mon cerveau ne fonctionnait plus ». Elle, elle avait dans
l’épreuve, une anxiété de performance. (C.O.1)
De son côté, la C.O.3 utilise l’Orientation par soi-même et elle utilise les résultats qui en
découlent pour faire des liens directs avec chacune des dimensions de l’épreuve
Groupements : « […] j’dis maintenant que tu sais ton salage, par-dessus, y a les intérêts,
c’que les gens voient, que t’aimes telle affaire, telle autre affaire, pis tu développes telle
154
affaire, pis on va en parler, c’est très intéressant, maintenant qu’on sait dans quoi ça
s’assoit ». Par ailleurs, la C.O.5, mentionne qu’il lui arrive de se sentir coincée entre les
résultats de l’épreuve Groupements et celles provenant d’un test d’intérêt. Elle explique :
[...] des fois les affaires que le GROP va faire paraître, va faire apparaître,
dans le sens que le client est, je sais pas moi, créatif, pis en même temps
moi j’sais que tsé sa créativité est vraiment pas là pis la science non plus,
tsé y a des choses qui me font dire que ça va manquer de rigueur, manquer
justement d’initiative, tsé des fois j’me sens un peu coincée là dedans,
parce que de dire à un client ben non, té pas créatif, d’abord c’est pas
d’même que ça fonctionne, mais en même temps c’est contradictoire, tsé,
il voit qu’il est de type artistique, pis en même temps y a y a des bogues
sur la créativité, fa que tsé, c’est ça que j’lui explique là, que c’est pas la
même chose, qu’on peut avoir des intérêts, mais ça c’est un peu euh… des
fois j’me suis r’trouvé comme à être un peu, soit j’privilégie l’épreuve, soit
j’privilégie le GROP parce que ça m’semble un peu en contradiction [...]
ben y en a qui vont le reconnaître, (la « contradiction ») ben là dans
c’temps là ça va bien, mon problème c’est quand la personne est
intimement persuadée qu’elle est ambitieuse (C.O.5)
Par ailleurs, même s’ils utilisent plusieurs autres outils psychométriques, certains
conseillers d’orientation mentionnent que l’épreuve Groupements est l’outil prioritaire.
En ce sens la C.O.1 mentionne qu’il a préséance sur les autres outils ou tests : « […] dans
toute ma batterie de tests là, c’est celle qui a le plus de poids quand je fais mon entrevue
avec la personne pour l’évaluer ». Cette priorisation se voit aussi chez les clients :
[...] les gens sont vraiment impressionnés de l’outil à tel point que, les
autres outils en pâtissent un peu par comparaison. Y vont dire : « Ah
c’t’intéressant oui c’t’intéressant, mais vraiment l’autre fois l’épreuve là
Aye là ça! » Fa que les autres deviennent plus informatifs et intéressants,
mais c’qui a, les a marqués, c’est c’que j’leur ai dit avec l’épreuve. (C.O.4)
En résumé, lorsque les conseillers d’orientation utilisent d’autres tests psychométriques,
ils arrivent à faire des liens avec les résultats de l’épreuve Groupements, ce qui affine les
informations déjà apportées par l’épreuve Groupements. Par ailleurs, dans l’ensemble de
leurs outils, c’est celui qu’ils priorisent.
155
L’approche cognitive : une consœur de travail
Les conseillers d’orientation mentionnent utiliser l’approche cognitive en appui à
l’approche psychogénétique. La C.O.1 mentionne qu’elle utilise cette approche surtout
pour donner des trucs aux gens en lien avec les distorsions cognitives ou le stess :
Dans la façon d’intervenir, je, je moi je dirais que c’est psychogénétique
avec du cognitif parce dans le psychogénétique on a été formé quand
même aussi pis le cognitif j’va l’utiliser e, on l’utilise même quand on fait
des consultations d’équipe parce qu’on, on donne aux gens les trucs pour
[...] J’trouve que le cognitif là pour gérer e le stress, l’anxiété e des
distorsions cognitives… sans dire qu’on fait de la thérapie, on va donner
aux gens les trucs qui viennent des approches cognitives. (C.O.1)
Il en est de même pour la C.O.4 et la C.O.5 qui nomment que l’approche cognitive est
intéressante face aux distorsions cognitives, entre autres, pour revenir sur les pensées des
clients qui influencent leurs émotions :
[...] j’utilise aussi quand pas mal d’affaires de la perspective cognitive…
e… Beck et compagnie…… pour e… plusieurs clients parce qu’y a des
trucs avec lesquels ça s’prête bien, notamment les clients qui sont très
analytiques. Ça peut les aider à faire focusser leur analytique, pour qui
soient moins éparpillés, parce que l’analytique y est souvent très éparpill
… en faite y a cette tendance là. Fa que le cognitif, je l’utilise souvent,
j’utilise donc beaucoup des exercices là, j’ai le fameux petit livre « Être
bien dans sa peau » du Docteur David D. Burns (C.O.4)
Enfin, la C.O.7 mentionne qu’elle utilise également l’approche cognitive. Elle explique
que cela se fait de façon instinctive dans certains contextes, comme : « et que son
utilisation est : « […] ceux qui arrivent en catastrophe parce qui sont en train d’échouer
156
des cours, là c’est c’est c’est l’drame là, fa que j’a j’a j’aborde plus, bon qu’est-ce que
t’as à faire, tsé c’est vraiment analytique là ».
En résumé, les conseillers d’orientation utilisent l’approche cognitive dans leur pratique
dans des situations où ils voient que cela rejoint davantage le côté analytique des pensées.
Ils utilisent cette approche spontanément, en accord avec l’approche psychogénétique de
l’identité.
Donc, en conclusion de cette section, les conditions de pratique et d’utilisation de
l’épreuve Groupements des conseillers d’orientation sont :
Ils utilisent l’épreuve Groupements avec tous leurs clients, incluant les
immigrants et les personnes ayant une problématique en santé mentale, tant que le
service est en lien avec l’orientation ou l’évaluation;
Parmi leurs clientèles respectives, certains clients peuvent faire une démarche non
volontaire;
Ils n’ont pas tous la même proximité avec leur client, les rencontres allant d’une à
douze rencontres pour le même client;
Ils ont trouvé difficile d’interpréter les résultats de l’épreuve Groupements dans
leurs débuts.
Ils font des liens avec les autres tests et estiment que cela nuance les résultats des
tests ou ceux de l’épreuve Groupements;
Ils utilisent également l’approche cognitive pour des situations liées aux
distorsions cognitives ou à la gestion du stress.
En somme, l’utilisation de l’épreuve Groupements s’adapte à tous les milieux
professionnels des conseillers d’orientation rencontrés. Ainsi ces professionnels des
157
secteurs de l’éducation, de l’employabilité, de la réadaptation et du secteur
organisationnel en ont fait leur outil de base. Peu importe leurs clientèles, peu importe la
problématique ou le besoin demandé, ces conseillers d’orientation constatent l’apport de
l’outil dans leur pratique et les occasions où ils ne l’utilisent pas sont rares ou
inexistantes. La passation de l’outil se fait dès les premières rencontres, presque
automatiquement. Les conseillers d’orientation qui utilisent d’autres tests
psychométriques voient les liens entre les résultats de ces tests et ceux de l’épreuve
Groupements, qui permettent de bonifier certaines informations. Dans leur pratique,
plusieurs utilisent aussi l’approche cognitive pour des situations précises où ils veulent
intervenir sur les pensées de leurs clients.
5.3 Les pratiques efficientes
Pour bien comprendre les pratiques efficientes des conseillers d’orientation dans leur
pratique de l’orientation avec l’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique,
trois sous-sections ont été créées. Il s’agit des pratiques efficientes liées à l’utilisation de
l’épreuve Groupements, ainsi que celles liées à leurs façons d’être en relation et enfin, les
pratiques efficientes liées à l’intervention sur l’identité.
5.3.1L’ utilisation de l’épreuve Groupements
Les conseillers d’orientation manifestent des pratiques efficientes dans leur utilisation de
l’épreuve Groupements et trois thèmes sont ressortis face à ce sujet. Il s’agit du fait qu’ils
utilisent les résultats de l’épreuve Groupements pour faire des liens avec les
environnements de travail actuels ou futurs, qu’ils les utilisent également pour ajuster ce
qu’ils diront à leurs clients afin que l’information soit traitée efficacement et enfin les
conseillers d’orientation qui utilisent l’épreuve Groupements reconnaissent aussi que
parfois il faut voir au-delà de l’outil et garder son sens critique.
158
Tableau 15 : Thèmes émergents et définition opératoires des fondements des pratiques
efficientes des conseillers d’orientation, concernant l’utilisation de
l’épreuve Groupements
Thèmes émergents Définition opératoire
En congruence avec l’environnement
Les conseillers d’orientation évaluent la
congruence entre le fonctionnement de leur
client et l’environnement actuel ou qu’ils
prévoient.
Pour un traitement de l’information
efficace
Dans la transmission d’informations aux
clients, que ce soit lors de la passation de
l’épreuve Groupements, ou lors de
l’interprétation des résultats, les conseillers
d’orientation utilisent leur jugement pour
savoir quoi dire à leurs clients et comment
le dire.
Voir au-delà de l’outil
Dans certaines circonstances, les
conseillers d’orientation sont capables de
sortir du cadre de l’épreuve Groupements
159
Faire le lien avec l’environnement
Les conseillers d’orientation évaluent la congruence entre le fonctionnement identitaire
de leurs clients et leur environnement actuel ou celui qu’ils prévoient. Dans leurs
pratiques professionnelles l’interprétation de l’épreuve Groupements a pour fonction de
connaître le fonctionnement de leur client pour ensuite faire des liens avec les
environnements de travail actuels ou futurs, dans le but qu’ils évoluent dans un milieu qui
leur correspond. Comme le mentionne la C.O.1 qui œuvre dans le milieu organisationnel,
le lien entre le profil identitaire et l’environnement est important, car : « l’épreuve pour
nous, ça nous permet d’avoir accès à toute l’envergure d’la personne, jusqu’à quel point
la personne se connaît, jusqu’à quel point a va être en mesure de s’adapter à son
contexte ». Cette adaptation entre le profil identitaire de la personne et l’environnement
est aussi présente dans la vision de la C.O.3 qui mentionne « moi quand j’vois le profil de
la personne, j’essaie de faire une concordance avec l’environnement de travail. » Elle
ajoute :
Fa que j’peux des fois avec une profession, retrouver l’encadrement
qu’elle a besoin. Tsé faire des liens, parce que j’leur dis c’est pas mauvais,
toute structure est bonne, mais si t’es en incohérence avec ton
environnement t’as un problème. (C.O.3)
C’est également ainsi que procède la C.O.6 qui explique que les résultats de l’épreuve
Groupements lui permettent de cibler ses interventions et : « en même temps aussi de
diriger (ses étudiants) vers un avenir professionnel ou qui va correspondre à qui il est la
(C.O.6) Toujours dans ce même sens, pour la C.O.4, tenir compte de l’environnement
présent ou futur de ses clients lui permet d’évaluer ses chances de réussites dans leurs
divers projets et ce sont des informations qui s’ajoutent au profil identitaire qu’elle a déjà
validées avec lui. Elle donne cet exemple :
160
[...] un client vient pour une validation. Y est vraiment sûr de son choix.
Son choix correspond à son profil d’intérêts, son choix correspond à son
profil MBTI, e y a les capacités académiques pour, tsé ça va, mais e j’le
sais pas là y a pleins, pleins, pleins de résiduels. Bon qu’est-ce que j’fais
avec ça? Je sais que y a une possibilité d’impulsivité, je sais qu’y a une
possibilité que la personne vise une dizaine pis qu’a finisse jamais son
affaire, mais y a une possibilité aussi que le cadre soit suffisant pour tenir
la personne pis qu’a se rende jusqu’au boute. J’peux lui faire certaines,
certains bémols (C.O.4)
Pour être en congruence avec son environnement, il peut être nécessaire de quitter le lieu
de travail présent. Le C.O.8 mentionne avoir déjà dit à une cliente qui vivait des
difficultés dans un emploi : « j’lui ai refait passer l’épreuve un moment donné, pis j’y ai
dit [...] changes de job t’es pas à ta place, vas ailleurs, ça donne rien r’gard y
comprennent pas. » Il explique :
[...] les organisations se structurent autour des individus, donc quand tu
comprends l’identité des gens avec qui tu fais affaire tu, t’as une idée
d’voir les limites les forces les points de vigilance dans l’organisation
(C.O.8)
En résumé, ces conseillers d’orientation se servent des connaissances qu’ils ont du profil
identitaire de leur client pour faire des liens avec les environnements de travail actuels ou
futurs de ceux-ci. C’est leur façon de voir si l’individu peut s’adapter à son
environnement et si celui qu’il a, ou aura, le supportera dans qui il est.
161
Pour un traitement de l’information efficace
Dans la transmission d’informations aux clients, que ce soit lors de la passation de
l’épreuve Groupements1, ou lors de l’interprétation des résultats, les conseillers
d’orientation utilisent leur jugement pour savoir quoi dire à leurs clients et comment le
dire. Tout d’abord, comme l’explique le C.O. 1 lors de la passation de l’épreuve
Groupements aux clients, la présentation de l’outil est présente et adaptée :
Pis pour moi quand on évalue les gens, nous on connaît la complexité des,
de la théorie, mais e on n’a pas, notre objectif c’est pas de faire
comprendre cette théorie là à la personne. Tsé… Pis quand on présente
l’épreuve, c’est important de l’dire c’que ça mesure parce qu’on est tenu
en, comme on évalue des gens, y faut dire avec quoi on va les mesurer…
(C.O.1)
La C.O. 2 abonde dans le même sens en disant : « j’leur explique dans des termes pour
qui comprennent... », de même que la C.O. 6, qui elle aussi ajuste son langage : « Fa que,
mais moi c’t’une clientèle… regarde j’ai, des fois mon langage j’l’adapte. » Cette façon
de présenter l’épreuve Groupements fait aussi partie de la pratique de la C.O.5. Elle
mentionne qu’adapter ce qu’elle dit peut également résulter à donner davantage
d’information :
__________
1. Il serait trop long ici d’exposer toutes les façons qu’ont les huit conseillers
d’orientation de présenter l’épreuve Groupements à leurs clients, par ailleurs puisque cela
est aussi instructif, à mon avis, une présentation en est faite à l’annexe VII
162
Si j’peux me permettre d’aller un p’tit peu plus loin, pour ceux que j’sens
qui a une introspection qui est un peu plus euh, qui est déjà là, ben là j’leur
dis on peut aussi aller voir quelles sont les difficultés, ça va nous aider à
identifier les difficultés qui fait que vous avez du mal à vous orienter par
vous-même.
Par ailleurs, l’ajustement que font les conseillers d’orientation de ce qu’ils mentionnent à
leurs clients lors de la passation de l’épreuve Groupements est aussi pertinent lors de la
transmission des résultats. Tel que le mentionne la C.O. 1, l’épreuve Groupements est un
outil puissant et il faut l’utiliser avec discernement :
[…], faut en même temps tellement faire attention sur l’information qu’on
reçoit pis surtout sur comment on va la transmettre à l’autre. […] parce
que tsé, c’est, c’est ça quand t’as un outil puissant c’est l’fun là, mais y
faut l’utiliser à bon escient. Faut faire attention tsé à c’qu’on va dire aux
gens (C.O.1)
Elle conçoit donc qu’il n’est pas toujours opportun de dire tout ce que l’épreuve
Groupements révèle : « […] des fois y a des informations qu’on obtient à l’épreuve qu’on
va pas transmettre à la personne nécessairement parce que, on est pas dans un contexte
d’aide » (C.O.1). Dans ce même sens, la C.O. 2 mentionne : « […] si j'ai un jeune devant
moi où j'vois que il est pas réflexif, j'dirai pas tout. », ainsi que la C.O. 4 qui explique :
Mais j’le dirai pas nécessairement [...] pis mettons que quelqu’un qui
m’arrive, qui a pas beaucoup de ressources pour traiter cette information-
là, qui a déjà tsé, excuses-moi « le trou cul en d’sous du bras », j’vas faire
attention de comment j’dis les choses, qu’est-ce que j’y amène.
Enfin, la C.O.7 explique que le temps a aussi un impact quant à la façon de transmettre
les résultats de l’épreuve Groupements à un client, de savoir si elle dit tout ce que révèle
leur diagnostic identitaire. De par ses connaissances et sont aisance qui ont évolué, elle
voit que son interprétation est plus raffinée maintenant que lors de ses débuts.
163
Ben avec l’expérience euh tsé j’m’habitue aussi en terme de finesse pour
expliquer les résultats, parc’que y en a que juste parler là j’sens que y en
veulent y en veulent, fa que là j’m’amuse on a du fun, pis d’autres, c’est il
faut que j’fasse plus attention comment j’présente ça là, [...] pis j’dis pas
tout non plus là, pour euh, si c’est pas nécessaire. (C.O.7)
En résumé, ces conseillers d’orientation tiennent compte de la disposition de leur client à
recevoir les informations pour effectuer leurs interprétations des résultats de l’épreuve
Groupements. Ce soucie de rendre les informations accessibles est également présent lors
de l’explication de l’outil avant la passation.
Voir au-delà de l’outil
Dans certaines circonstances, les conseillers d’orientation sont capables de sortir du cadre
de l’épreuve Groupements. Cela fait référence au fait, qu’à la base, ces conseillers
d’orientation utilisent l’outil tout en gardant en tête qu’il peut y avoir des occasions ou ce
même outil n’est plus utile. Dans ce contexte, ils travaillent alors selon l’approche
psychogénétique. En ce sens, la C.O.5 mentionne qui lui arrive de mettre de côté
l’épreuve Groupements :
[...] parce que sais-tu, des fois l’épreuve euh ça arrive aussi, entre ce que
l’épreuve montre, le protocole et ce que la personne dit [...] le lien je l’fais
pas [...] fa que là moi l’épreuve (on entend un papier qui se fait bouger)
j’mets ça de côté pis là j’suis comme : ben c’est quoi le problème?
J’travaille avec les problèmes, mais avec la psychogénétique qui est mon
approche (C.O.5)
Il en est de même pour la C.O. 4 qui explique que dans certaines situations : « y faut aller
au-delà des fois de c’que l’épreuve nous amène à mesure de l’état de la personne. » Le
164
C.O.8 a des propos similaires et ajoute aussi que cela peut être une limite de l’outil :
« l’épreuve a une certaine limite, des fois j’réalise qui a de, y faut sortir de c’cadre là pis
analyser la personnalité en soit ». Il peut être difficile d’imaginer ce que « sortir du
cadre » veut dire. Il semble que la C.O.7 amène une explication possible :
[...] ça dit quelque chose d’intéressant, mais je ne pense pas, avec
l’expérience là, j’ai euh, ça dit pas tout. Y a d’autre chose des fois dans la
personne, que je vois pas et que j’peux avoir l’impression de voir, mais
qu’avec l’épreuve, ça ne concorde pas nécessairement [...] j’en avais parlé
avec Luc, pis c’est ça qui m’avait dit, y dis peut-être que c’est son système
le symbolique, pis sémi sémi, sémiotique j’ai d’la misère là, y a d’autre
chose là qu’avec l’épreuve en image on pourrait aller voir, sans doute
(C.O.7)
Donc en résumé, ces conseillers d’orientation reconnaissent qu’il y a des moments où les
résultats provenant de l’épreuve Groupements ne concordent pas avec ce qu’ils constatent
en présence de leurs clients. Les extraits présentés montrent que pour ces conseillers
d’orientation leur vision de leur client va au-delà de l’outil et qu’ils l’utilisent encore
après toutes ces années, en gardant un œil critique et professionnel.
5.3.1Les compétences relationnelles des conseillers d’orientation
Les conseillers d’orientation manifestent des pratiques efficientes dans leurs relations
avec leurs clients. Dans leurs façons d’être en relation, deux thèmes sont ressortis, soit la
compétence de créer un lien et s’engager face à leurs clients et l’affirmation de soi, qui
fait référence à affirmer leurs positions et leurs jugements professionnels, même si cela
n’est pas toujours ce que les clients veulent entendre.
165
Tableau 16 : Thèmes émergents et définition opératoires des fondements des pratiques
efficientes des conseillers d’orientation, concernant leurs façons d’être en relation
Thèmes émergeant Définition opératoire
Créer un lien et s’engager
Les conseillers d’orientation sont soucieux
de créer un lien de confiance avec leurs
clients et ils s’engagent concrètement
auprès d’eux.
S’affirmer … jusqu’au bout
Les conseillers d’orientation s’affirment
dans ce qu’ils disent à leurs clients et
affirment leur pratique de l’approche
psychogénétique.
Créer un lien et s’engager
Les conseillers d’orientation sont soucieux de créer un lien de confiance avec leurs
clients et ils s’engagent concrètement auprès d’eux. Dans leur pratique professionnelle, la
relation qu’ils établissent avec leurs clients est aussi une base importante. Pour la C.O. 5
le lien qui évolue avec le temps permet aussi d’aborder des informations liées à un aspect
plus intime d’eux-mêmes : « Ca, c’est parce qu’avant le lien est fait, tsé y a des choses
que j’dis pas au début que j’vais dire dans cinq rencontres ». La C.O.4 présente sa façon
d’interpréter les résultats de l’épreuve Groupements d’où découle un souci envers la
présence et l’attention de l’autre. Dans un exemple, elle explique son besoin d’être en
contact avec son client lors de la transmission des résultats : « j’vas partir dans mon
interprétation, j’vais toujours leur demander de ne pas prendre de note [...] j’veux qui
soient toutes avec moi ». Pour la C.O. 3 et le C.O.8 qui considèrent également
l’importance du lien, ils le voient comme quelque chose qui se bâtit. En ce sens, la C.O.3
166
mentionne : « […] tu es toi-même le reflet du type de relation qui est établit et tu dois
réagir aussi, pour ne pas refaire ce que lui les gens refont avec lui, pis de leur fournir une
autre nourriture, tout en ayant un lien affectif ». Quant au C.O.8 il explique :
[...] j’pense qui avait une bonne relation thérapeutique [...] j’pense que ça
s’établit au fur et à mesure, ça se met en place, du moment que j’prends
contact avec la personne j’vais la chercher dans la salle d’attente, [...] la
relation commence, ça se bâtie, on marche, on prend l’escalier on va vers
les passages, puis on établi le lien quand on rentre dans l’bureau quand la
porte se ferme y s’fait, y s’bâtie quelq’chose dans la salle là, ben c’est
quoi, j’suis là pour une heure, on établit, c’t’intense, des fois même on va
dépasser le temps, ont, ça peut être plus rapide, mais ça se passe
maintenant les relations (C.O.8)
Enfin, la C.O.1 qui parlait des atouts à avoir pour utiliser adéquatement l’épreuve
Groupements et l’approche psychogénétique incluait que les conseillers d’orientation
doivent être à l’aise d’entrer en relation avec les gens, peut importe le client en question,
tout comme plusieurs approches et recherches le démontrent. Il va de soi qu’être en lien
implique que ça se fait à deux. Les conseillers d’orientation s’investissent dans leur
relation auprès de leur client, autant concrètement qu’émotivement. Pour la C.O. 6 cela
implique, par exemple, qu’elle partagera son inquiétude à ces étudiants et décidera de
prendre davantage de temps avec eux. Elle explique :
[...], mais là j’ai dit elle, non elle, il faut que j’intervienne avec elle [...] j’ai
dit « Non, toi tu fais des affaires que tes parents y savent pas. Mais je le
sais pas dans quoi tu t’es sacré par exemple, j’sais pas dans quoi tu… » Pis
j’ai dit « Tsé, c’est confidentiel ici en… » j’ai dit « T’es pas obligée de
m’dire les choses que tu fais, mais moi j’suis inquiète pour toi là. » (C.O.6)
De son côté, la C.O.2 va s’impliquer concrètement lorsqu’elle voit que son apport peut
être positif. Travaillant dans un collège privé elle mentionne que certains parents exercent
167
de la pression sur leurs enfants concernant leurs choix d’études collégiales, elle explique
qu’elle peut s’impliquer de cette façon :
[...] alors là j'vais demander la permission au jeune : « Est-ce que tu, tu
serais d'accord à c'que je communique avec tes parents? » Et un jeune qui
m'accorde cette permission-là, j'vais communiquer avec le parent pour
e...faire état un peu de cette situation-là. Tout en respectant les choses qui
sont e...qui ne regarde que le client et moi. Là où c'est un peu plus difficile,
c'est les parents de jeunes immigrants. [...] pour les jeunes asiatiques, aller
en science... [...] y a quelque chose de culturel dans ça, et ça... [...] si je
vois que le jeune qui est devant moi est vraiment mal en point OK, que
ça... va pas bien là, qu'c'est, parce que c'est vraiment une source de conflit
et que le jeune me permet de faire l'intervention, j'vais quand même risquer
de l'faire (appeler les parents) (C.O.2)
En résumé, ces extraits nous informent que ces conseillers d’orientation dans leur
pratique et plus spécifiquement dans leur transmission des résultats de l’épreuve
Groupements, ont le soucie de créer un lien de confiance entre eux et leurs clients. Ils
s’engagent également dans la relation, par des actions concrètes ou en exprimant leurs
sentiments.
S’affirmer… jusqu’au bout
Les conseillers d’orientation s’affirment dans ce qu’ils disent à leurs clients et affirment
leur pratique de l’approche psychogénétique. Tel que l’explique la C.O.5, s’affirmer est
une façon d’être qui va de soi avec l’approche psychogénétique :
[...] si tu fais de la psychogénétique, mais sans t’affirmer c’est pas possible
en fait tu peux pas, ça fait partie de c’qu’on développe en psychothérapie
notre capacité à s’affirmer (claque sur la table) quand c’est l’temps et notre
capacité au contraire à être une bonne maman quand c’est l’temps (C.O.5)
168
La C.O.3 mentionne que s’affirmer, c’est aussi prendre position et la maintenir. Par
exemple, face à un client qui change constamment d’idée et qu’elle constate que la
dimension « sociale » est touchée dans son identité, elle peut décider d’arrêter le
processus :
Quand j’lui ramène à chaque fois, ben là t’es, tu m’amènes là, pis moi j’y
va pas, parce que je me positionne comme intervenante [...] Si la personne,
la relation est bien engagée, a peut se dire eh tabouaire, elle en train de me
quitter [...] Moi j’va revenir, mais pas à n’importe quelle condition, pis
j’veux pas jouer dans ton yo-yo ». (C.O.3)
Cette prise de position est remarquée également chez la C.O.5. Elle raconte : « Quand
j’dis à un client j’pense que c’est de même, c’est une réponse que j’lui offre, pis qu’on
peut en discuter, parce que la manière dont c’est dit et c’est fait c’est jamais « paf » de
même. » Le C.O.8 mentionne lui aussi être affirmatif et que cela est apprécié dans son
secteur : « dans l’milieu industriel y a a habituellement, certaines organisations
apprécient beaucoup qu’on soit affirmatif ». Dans son contexte de travail, le C.O.8 est
clair quant aux informations qu’il donne à ses clients, par exemple, il leur explique : « en
terme de développement de potentiel, y est là, donc si y dirige l’organisation y ira pas
plus loin là, y est là votre individu, si vous voulez l’avoir plus loin ben, l’coaching
pourrait p’t’être l’amener plus loin ». Pour s’affirmer, il faut donc être capable de dire des
choses qui ne font pas toujours plaisir et c’est dans ce même sens qu’agit la C.O.5
maintenir son jugement professionnel même si sa conclusion va à l’encontre des vœux
des clients. Elle donne cet exemple :
[...] j’ai eu le cas d’un monsieur qui voulait être préposé aux bénéficiaires,
le social ça n’allait pas du tout là, le le sur le social et pis dans la relation
avec moi c’est l’enfer là je voyais bien que ça fonctionnait pas, fa que c’est
sûr que là j’y ai dit des p’tites affaires au compte-goutte, en lui disant ben
j’pourrai pas dire autre chose dans le rapport, j’pourrai pas dire que vous
entretenez des relations agréables avec les gens, j’peux pas faire ça. Fa que
tsé à ce moment là, quand y a un truc qui est quand même problématique,
169
j’dis pas c’est juste l’épreuve [...] j’dis j’pense que y va y avoir un
problème à ce niveau là (et) c’est aussi c’que j’ai ressentis, parce qu’on se
sert aussi de ça (C.O.5)
Les entrevues avec les huit conseillers d’orientation ont aussi permis de remarquer que
leurs affirmations allaient au-delà de leur relation avec leur client. Les conseillers
d’orientation affirment également leur pratique de l’approche psychogénétique dans leur
milieu professionnel, même si cela n’est pas toujours facile. La C.O.7 partage ce fait :
J’vis une frustration par rapport à ça, par rapport à mon environnement de
travail (on venait de parler du livre L’École orientante : la formation de
l’identité à l’école et du fait d’agir sur chacune des dimensions) parc’que
je tente de toutes les façons possibles d’essayer d’expliquer ça à mon
entourage et ça c’est difficile : les enseignants, ont, comprennent pas ça,
les enseignants y ont pas l’temps d’faire ça. Fa que là je sensibilise, tsé
c’est long là. J’ai même donné des ateliers lors de journée pédagogique
(C.O.7)
Par ailleurs, il n’y a pas seulement des effets négatifs à affirmer sa vision de l’orientation, même
si elle est différente de celles de ces collègues. Les conseillers d’orientation qui affirment leur
pratique rencontrent également des gens qui y adhèrent. C’est ainsi que deux des trois
conseillères d’orientation du réseau scolaire ont mentionné que les dirigeants de leur
établissement, ainsi que certains professeurs faisaient appel à eux pour bénéficier de leur
expertise au niveau de l’approche psychogénétique et du diagnostic de l’identité, lors de sélection
de personnel, cas problèmes avec les étudiants, ou autres mandats spécifiques. À ce sujet, la
C.O.7 mentionne :
[...] à l’époque c’était le directeur des ressources humaines qui m’avait
posé des questions, pis moi j’l’avais, j’l’avais sensibilisé, j’lui avais
expliqué l’outil et et y avait aimé euh ça. Maintenant au XXX tout le
monde qui applique passe l’épreuve Groupements (C.O.7)
170
Elle ajoute également que dans les comités de sélection, les dirigeants font appel à elle
dans certains contextes : « [...] des fois les gens étaient pas d’accord sur comment
s’positionner et quand moi j’interprétais les tests, là ça disait, ah ben oui, ben oui, ben oui
pis là ça les aidait à se positionner » (C.O.7). Il en est de même pour la C.O.2, dont
l’expertise est aussi reconnue. L’épreuve Groupements est maintenant un outil de
sélection pour tous les membres de son établissement et elle est convoqué pour des
mandats spécifiques, dont :
[...] le directeur adjoint qui pouvait dire « XXX, pourrais-tu m’dire là, cet
élève là, là, on a des problèmes avec là… et y ont fait quelques
interventions pis y ont besoin… (de plus d’information). Dans ce cas la,
j’peux utiliser l’outil encore, j’leur dis « r’garde j’pense [...] qui y a
quelque chose par rapport à ça sur lesquelles y faudrait peut-être
intervenir. » Ça c’est vraiment, à mon avis, c’qui y a de vraiment
d’intéressant dans c’travail là, ici. (C.O.2)
Pour poursuivre dans le thème de l’affirmation, la C.O.5 dit que si elle avait à changer
d’emploi et que le nouveau lieu n’utilise pas ses pratiques, elle n’irait pas : « sauf si on
me dit ben r’gardes personne l’utilise, toi tu vas l’utiliser pis tu vas nous le montrer, j’y
vais, mais sinon, non ». Il en est de même pour la C.O.4 qui serait ferme, elle aussi, dans
le maintien de sa pratique : « Tsé moi j’pense que moi je m’présenterais en disant :
« Voici ma boîte à outils, pis ça comprend cet outil-là, pis je dois l’utiliser.» [...] Je vois
pas comment j’arriverais pas à utiliser mon outil, je, je comprendrais pas. »
En résumé, les extraits venant d’être cités indiquent que les conseillers d’orientation
s’affirment à deux niveaux, soit face à leur client et face à leur pratique de l’approche
psychogénétique. Cette affirmation se constate, lorsqu’il y a des choses plus difficiles à
dire ou lorsque leur décision ne rejoint pas celle de leur client et pourrait avoir un impact
négatif sur leur projet, ou encore lorsque le milieu ne semble pas ouvert à vivre les
implications associées à leur approche.
171
5.3.3 Intervention en orientation
Les conseillers d’orientation manifestent des pratiques efficientes lorsqu’ils interviennent
auprès de leurs clients. Ces pratiques sont qu’ils tiennent compte du contexte dans lequel
les rencontres se font pour concevoir leur intervention, qu’ils tiennent compte également
des besoins de leurs clientèles qui peuvent faire référence à une vision classique de
l’orientation et enfin que lorsqu’ils interviennent sur l’identité, leurs clients sont
consentants.
Tableau 16 : Thèmes émergents et définition opératoires des fondements des pratiques
efficientes des conseillers d’orientation, concernant l’intervention sur l’identité
Thèmes émergeant Définition opératoire
Tenir compte du contexte Les conseillers d’orientation tiennent
compte de leur environnement de travail et
des besoins de leur clientèle pour
concevoir leur intervention
Tenir compte des besoins des clients
Les conseillers d’orientation tiennent
compte des besoins de leurs clients et
remarquent que certains besoins
correspondent à une vision traditionnelle
de l’orientation.
« Oui je le veux »…
le consentement du client
Les conseillers d’orientation respectent
l’engagement pris avec leurs clients. S’ils
interviennent sur l’identité, c’est avec leur
autorisation.
172
Tenir compte du contexte
Les conseillers d’orientation tiennent compte de leur environnement de travail et des
besoins de leur clientèle pour concevoir leur intervention. Les informations qui suivent
seront donc présentées par secteurs de travail, dans l’ordre suivant : en premier lieu le
secteur scolaire, en second le secteur organisationnel et enfin, les secteurs de la
réadaptation et de l’employabilité.
En milieu scolaire, les conseillères d’orientation mentionnent être restreintes par le
temps. Là où elles le ressentent est concernant les types d’interventions qu’elles feront.
Par exemple, la C.O.2 mentionne :
[...] bon on est dans une école alors c'est sur que j'peux pas faire de
l'intervention, à long terme, ça c'est, ça c’est clair [...] la liste d'intervention
elle va être limitée, malheureusement parce que bon, y a toujours la, la...
l'objectif d'entrer au Cegep [...], c'que j'vais tenté de faire, c'est de défaire
des choses, de mettre le choix de carrière en perspective, de dédramatiser
des choses, parce que souvent y vont arriver e... bon ben là... en relationnel
surtout e... qu'est-ce qui est bon, qu'est-ce qui est pas bon e... c't'un choix
pour la vie e... [...] alors ça c'est des choses que j'vais tenter de défaire...
« Bon ben r'garde on va y aller une étape à la fois, j'pense que là, toi, où,
où on est rendu actuellement j'pense qu'on pourrait peut-être essayer de
démêler des choses par rapport au Cegep, mais la suite, « la profession-
là », j'pense qu'on a encore le temps e... d'y penser » (C.O.2)
Il en est de même pour la C.O.6 qui travaille aussi en milieu scolaire. Expliquant
également que le temps lui manque, elle mentionne faire des interventions plus
ponctuelles lorsque cela est opportun.
[…] j’peux pas intervenir à long terme ben ça me… pour moi ça me donne
rien d’embarquer sur quelque chose que j’peux pas continuer. [...] J’leur
donne des trucs, « j’y dis… j’dis… « j’peux pas intervenir, pas parce que
j’voudrais pas, mais j’ai, j’ai pas l’temps, j’te vois quatre fois, faudrait que
j’te vois dix fois minimum dans l’année » (C.O.6)
173
Alors que la C.O.6 parle de trucs, la C.O. 7 dit donner des « prescriptions », dans le sens
où elle leur dit les aspects de leur identité qui méritent d’être travaillés et les raisons pour
lesquelles ce travail doit être fait. Elle ajoute par ailleurs qu’il peut lui arriver de faire de
l’intervention sur une plus longue période : « […] j’ai pas la prétention de travailler sur
l’identité à long terme avec tous mes étudiants tsé, j’peux pas, mais des fois j’en prends
sous mon aile, des fois, j’peux n’avoir que j’vois pendant un an, j’me permets ça ».
Cela peut ressembler aux conseillers d’orientation du secteur organisationnel. Tout
comme la C.O.6 mentionnait faire des interventions ponctuelles, le C.O.8 considère le
temps qu’il a autant lorsqu’il donne son interprétation que lorsqu’il rencontre ses clients.
Il explique :
[...] fa que c’est des « snap shot » que j’fais vraiment, c’est des
interventions ponctuelles, j’suis sûr, probablement des gens par la suite
vont dire « ah oui, y m’a déjà dit ça! » [...], mais y a un principe : j’le
déshabillerai pas plus que j’capable de ré habiller! (C.O.8)
De son côté, la C.O.1 considère que le contexte dans lequel elle rencontre la personne,
ainsi que l’ampleur des informations qu’elle obtient à l’épreuve Groupements, vont aussi
moduler son intervention. Dans son rôle en évaluation, elle mise d’avantage sur la qualité
des informations qu’elle transmettra à ses clients et pourrait donner des « mises en
garde » en lien avec des difficultés potentielles qu’elle constate suite à l’analyse de leur
fonctionnement identitaire. Par ailleurs ayant déjà travaillé directement en orientation,
elle mentionne que même si elle n’intervient pas sur le profil de son client, elle considère
qu’il est important de dire ce qu’elle observe de son fonctionnement :
Ca m’est déjà arrivé de recommander, pis d’expliquer aux parents, ça
serait important par exemple, que son jeune prenne une pause [...] j’peux
dire : on voit, on comprend qui y a de la difficulté à s’orienter parce que on
a comme résultat que la personne e… est encore en recherche beaucoup
174
d’elle-même ou de lui-même. Pis on sait que ça c’est pas nécessairement
en s’inscrivant au CÉGEP, dans n’importe quel programme que ça va
s’régler. [...] Faq c’est là, l’… l’épreuve, pour moi, qu’on peut quand
même faire une démarche d’orientation, pis notre responsabilité à nous [...]
c’est plus comment utiliser cette information là, pis la responsabilité de
l’utiliser à bon escient, pis de l’dire : « r’garde là… on observe ça »
(C.O.1)
Dans le contexte des secteurs de la réhabilitation et de l’employabilité, les conseillères
d’orientation ont davantage de temps devant eux. Par contre, cela ne veut pas dire que
malgré l’accord et le besoin de leurs clients, elles interviennent sur l’identité de leurs
clients dans toutes les situations. La C.O.5 explique qu’il « faut que j’sois capable
d’identifier ce que je peux travailler en quelques semaines versus ceux qui vont avoir
besoin de beaucoup plus de temps ». L’analyse de l’épreuve Groupements les guidera
alors dans leurs façons de concevoir leur processus avec eux. C’est alors qu’elles peuvent
dans certaines conditions se permettre d’intervenir directement sur l’identité comme
l’explique la C.O.4 :
Alors ça dépend, parce que c’est sûr que le mandat que j’ai ici [...] est un
mandat limité. ...], mais si e… j’le sais pas moi si, quelqu’un depuis des
années brette, pis que dans sa tête c’est qua l’a pas encore trouvé c’qui faut
alors que moi avec l’épreuve j’constate que sa, sa, sa science est construite
de telle sorte que elle n’arrive pas à se donner assez confiance pour
prendre ça entre ses mains pis oser, ben j’vas y dire, non seulement j’vas y
dire, mais j’vas y proposer qu’on, qu’on travaille ça ensemble. (C.O.4)
Dans d’autres circonstances, les informations qu’elles ont sur l’identité de leurs clients
les incitent à ne pas intervenir sur l’identité pour traiter les problématiques. La C.O.5
mentionne que si elle n’intervient pas, elle informe tout de même ses clients des
difficultés qu’ils vivent et de leur importance :
175
Y a toutes sortes de circonstances qui fait en sorte qu’on peut pas. Mais,
j’y dis, à vous dans deux ans si ça vous arrive, trouvez des ressources pour
lutter contre ça, fa que tsé, c’est finalement de leur dire, on peut pas traiter
ça maintenant ici, on n’est pas, on s’rencontre pas pour ça, on n’a pas les
outils pour le faire maintenant, mais vous, vous avez la responsabilité de
vous en occuper (C.O.5)
Par ailleurs, même si elle ne traite pas les déficits identitaires la C.O. 5 mentionne utiliser
d’autres types d’intervention pour pallier à ces déficits : « […] faut bien qu’on fasse avec
le problème, j’peux pas lui dire : Rentrez chez vous, vous avez un problème
d’engagement, j’peux rien faire pour vous! [au lieu de cela elle] mets les manifestations
de difficultés d’engagement très concrètes et je lui dis : Si vous traitez pas ça, dans cinq
ans, dans deux ans, vous allez me revenir dans le même problème que vous avez
aujourd’hui! » (C.O.5)
En résumé, en ce qui concerne leurs perceptions de l’intervention sur l’identité, les
conseillers d’orientation, peu importe leurs secteurs d’activités, vont d’abord tenir compte
de leur contexte de travail pour juger de la pertinence de ce type d’intervention. Dans les
contextes où cela n’est pas possible, les conseillers d’orientation se servent des
informations qu’elles ont du fonctionnement identitaire de leur client pour concevoir leur
processus d’orientation ou d’évaluation. Ce concept avait d’ailleurs été présenté dans
leurs motivations à utiliser l’épreuve Groupements.
Tenir compte des besoins des clients
Les conseillers d’orientation tiennent compte des besoins de leurs clients et remarquent
que certains des besoins correspondant à une vision traditionnelle de l’orientation. Cette
vision traditionnelle se manifeste à plusieurs égards selon les conseillers d’orientation
176
rencontrés. En premier lieu, selon la C.O.1, il y a les gens qui s’attendent à faire des tests
psychométriques lorsqu’ils font une démarche d’orientation :
[...] pis c’est sûr qu’on est toujours un peu prise dans l’sens où les gens qui
font appel à nous, en autre ici en privé, y a même ici en privé, e… m… les
gens y veulent faire une démarche en orientation classique là on s’entend
là, faut quand même faire un test d’intérêt (C.O.5)
La C.O.2 rencontre aussi ce type de demande de la part des parents des élèves de son
école privée : « mais encore là c'est pour répondre à un besoin des parents, les, les parents
en milieu privé : "Bon, est-ce que mon jeune va passer des tests?" Alors donc, j'le fais
pour ça ». Par ailleurs, les C.O. 7 et 8 mentionnent que leurs rôles sont aussi confondus
avec celui d’un psychologue : « j’le précise, un moment donné j’va dire j’suis c.o. là,
mais y oublie ça, c’est le psy, c’est une boite de psy là ». Dans le contexte scolaire de la
C.O.7, cela ne cadre pas parfois avec les attentes des étudiants. Elle explique :
[...] les étudiants viennent voir une conseillère d’orientation, y viennent
pas voir une psychologue fa que ça aussi des fois faut qu’j’explique et
sont pas nécessairement prêt non plus à travailler sur leur identité, parce
que eux v’naient chercher une réponse [...], mais tsé, y veulent pas
travailler sur leur identité. (C.O.7)
En résumé, ces conseillers d’orientation reconnaissent que la vision qu’ont les clients de
leur rôle est encore classique dans le sens où elle est associée aux tests psychométriques
et n’est pas associée à la psychologie.
177
« Oui je le veux »… le consentement du client
Les conseillers d’orientation respectent l’engagement pris avec leurs clients. S’ils
interviennent sur l’identité, c’est avec leur autorisation. Ce consentement peut prendre
plusieurs formes. Pour la C.O.2, le consentement du client se fait lors de la présentation
de son rôle, information qu’elle donne en début de rencontre. Elle explique :
[...] quand je parle de mon rôle, de mon approche pis que j'utilise l'épreuve
Groupements e... je leur explique e... tout dépendant de c'que j'ai devant
moi, [...] ça s'pourrait que e... que j't'aide à relaxer un peu, mais ça pourrait
aussi que... j'mette un p'tit peu de pression sur toi [...] Pis en même temps
c'est un, c'est un consentement libre et éclairé (C.O.2)
La C.O.4 mentionne elle aussi que ce consentement est essentiel pour qu’elle intervienne
sur l’identité de ses clients. Ce type de consentement est surtout une entente des sujets qui
seront discutés en lien avec les besoins manifestés. Elle explique :
[...] parce que de toute façon c’est toute l’idée du consentement… éclairé
fa que c’est sûr que j’pourrais pas travailler ça sans que la personne, j’veux
dire, j’y dirai pas « Actuellement j’suis en train de travailler sur la
confiance en toi, mais en faite… » Tu comprends c’que veux dire c’est [...]
faut qu’à soit d’accord qu’on aborde ça. C.O.4
La C.O.1, en lien avec le consentement, amène toute la notion de confiance qui doit
s’établir entre elle est ses clients, ainsi que face à son expertise. Elle mentionne qu’il ne
peut y avoir, dans tous les accords, de but précis d’intervention, puisque la source de
l’inconfort que nomme le client n’est peut-être pas identique à celle identifiée par elle-
même et par l’épreuve Groupements. Elle explique :
178
Pis j’va leur dire tu m’arrives avec une demande, mais ça s’peut que moi
j’t’amène ailleurs, mais y faut que tu m’fasses confiance. J’t’amène
ailleurs pas juste pour le plaisir de t’amener ailleurs. […] J’en ai un client
en c’moment qui est venu m’voir parce qu’y sait qui a un trouble
décisionnel, mais, finalement c’est pas ça pantoute là… J’le r’voyait hier,
j’le r’voyait hier pis j’y dis, c’est drôle hen parce que j’y ai dit dans l’fond
c’qu’on a réalisé ensemble c’est pas que t’as un problème de décision, t’as
d’la difficulté à t’affirmer c’pas pareil. [...] tsé c’est, c’est l’fun là. Fa que
si j’l’avais pris juste : « y a d’la misère à arrêter une décision » pis que
j’aurais focusé sur y donner des trucs pour arrêter une décision, j’aurais été
à coté de son besoin réel. (C.O.1)
C’est ainsi qu’elle conçoit qu’un consentement avec les clients n’implique pas que ce
sont eux qui décident sur quelle dimension elle interviendra puisque cela concerne son
expertise et son jugement. Elle ajoute que d’une certaine façon le consentement fait
conjointement sur les points à travailler et les façons d’y arriver n’est pas le type de
consentement que l’approche psychogénétique suggère :
Le conjointement là, parce que dans l’approche psychogénétique… y faut
être devant notre client en fa que c’est pas nécessairement e…
contrairement à d’autres approches où on va s’entendre sur quoi on va
travailler [...] Mais même en conseling d’orientation, moi quand j’faisais
d’l’orientation, c’pas vrai qu’y avait toujours nécessairement le
conjointement, c’est sure que en portant attention là, j’veux dire y faut pas
brimer notre client, faut pas faire des choses qui pourraient lui nuire pis
faut quand même respecter son consentement là (C.O.1)
En résumé, ces conseillers d’orientation interviennent sur l’identité de leur client suite à
l’obtention de leur consentement à ce sujet. Ce consentement qui respecte les demandes
et attentes des clients n’est pas obligatoirement formulé en terme descriptif de point à
travailler.
179
En conclusion de ce thème, les pratiques efficientes des conseillers d’orientation utilisant
l’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique depuis plus de dix ans sont :
Ils évaluent l’environnement de leurs clients dans le but de voir s’il est congruent
avec leurs identités. Ils mentionnent que l’environnement doit correspondre aux
besoins identifiés dans leurs profils identitaires;
Ils ajustent leurs transmissions d’informations en fonction de l’identité de leurs
clients;
Ils voient au-delà des résultats de l’épreuve Groupements et sont capables de s’en
détacher s’il est nécessaire;
Ils créent un lien de confiance avec leurs clients et s’engagent dans la relation
avec eux;
Ils s’affirment et prennent position, même lorsque le contexte est plus délicat;
Ils tiennent compte du mandat de leur lieu de travail pour concevoir leur
intervention;
Ils tiennent compte des besoins des clients, en référence à la passation de tests
psychométriques, ainsi qu’avec la vision de certains qui ne reconnaissent pas la
place de la psychologie en orientation;
Ils se soucient d’obtenir le consentement de leurs clients pour toute forme
d’intervention.
En somme, les conseillers d’orientation qui utilisent l’épreuve Groupements sont
efficients lorsqu’ils utilisent simultanément l’approche psychogénétique de l’identité.
Deux comportements ont été identifiés à une pratique efficiente de l’épreuve
Groupements et de l’approche psychogénétique et plus les conseillers d’orientation
naviguent aisément, voire intuitivement, d’un à l’autre, plus la démarche est efficiente.
180
Premièrement (et non dans un ordre de priorité), les conseillers d’orientation montrent
avoir acquis une vision globale qui leur permet d’ajuster continuellement leur pratique.
Que ce soit face aux limites de temps que leurs milieux leur imposent ou face à
l’interprétation des résultats à leurs clients, les conseillers d’orientation utilisent leur
jugement personnel pour concevoir leur utilisation de l’épreuve Groupements.
Conséquemment, ils ne suivent pas de plan pré-établit, ce qui propose qu’ils sont en
concordance avec le moment présent et ses impératifs. Cette vision leur permet
également de rester critiques face aux résultats de l’épreuve Groupements et lorsque
nécessaire, de prioriser la pratique de l’approche psychogénétique à l’outil. En deuxième
lieu dans les comportements qui présentent une pratique efficiente de l’utilisation de
l’épreuve Groupements vient la capacité à naviguer entre deux rôles, soit celui de
s’affirmer et de s’engager. Tout comme le mentionnait la C.O.5 c’est de pouvoir être
autant un papa qui affirme qu’une maman qui prend soin. Dans l’ensemble de leurs
interventions auprès de leurs clients, les conseillers d’orientation ont montré que ces deux
rôles étaient indispensables pour pouvoir avoir un impact positif auprès de leurs clients.
Dans ce même sens c’est l’amalgame de ces deux comportements qui fera en sorte qu’ils
pourront prendre position face à un client récalcitrant qui, par exemple, veut que la
conseillère d’orientation valide un choix de carrière, qui selon son jugement à elle ne
présente pas de… pour l’avenir. Ainsi s’affirmer et s’engager ne sont pas seulement des
compétences professionnelles, cela correspond également à des façons d’« être » de ces
conseillers d’orientation. Ces façons d’être sont le reflet de ce que préconise l’utilisation
de l’approche psychogénétique et ce qui est également le fondement de la formation à
l’intervention (IRFCPO, site internet).
5.4 Leurs représentations de l’intervention en orientation
Les conseillers d’orientation ont une vision quant à leur pratique professionnelle de
l’intervention en orientation. Ils conçoivent donc que le concept d’identité à sa place en
181
orientation et ils l’intègrent dans leurs rôles et ils estiment qu’il est possible d’intervenir
sur l’identité en orientation.
Tableau 17 : Thèmes émergents et définition opératoire des éléments incitatifs aux
représentations de l’intervention en orientation
Thèmes émergeant Définition opératoire
La place de l’identité en orientation Les conseillers d’orientation conçoivent
que le concept d’identité est une pièce
indissociable à leur pratique
professionnelle. Pour eux, l’approche
psychogénétique n’est pas qu’une
approche d’intervention, c’est aussi un
angle pour comprendre le monde et se
définir eux-mêmes.
Assez formé ? Les conseillers d’orientation croient être
assez formés avec l’approche
psychogénétique pour intervenir en
orientation à divers niveaux.
La place de l’identité en orientation
Les conseillers d’orientation conçoivent que le concept d’identité est une pièce
indissociable à leur pratique professionnelle. Pour eux, l’approche psychogénétique n’est
pas qu’une approche d’intervention, c’est aussi un angle pour comprendre le monde et se
définir eux-mêmes.
182
Au départ, les conseillers d’orientation considèrent que leurs rôles en orientation
impliquent de travailler avec le concept de l’identité. La C.O.3 affirme son rôle ainsi et
sur la place qu’elle veut prendre auprès de ses clients : « Moi j’suis conseillère
d’orientation, j’veux travailler sur ce qu’il projette, c’qui va amener un sens. Rapidement,
faut que j’ai des outils qui touchent l’identité et pis ça, c’est ma spécialité. » Il en est de
même pour la C.O.2 qui explique que malgré les désaccords de collègues qu’elle peut
rencontrer, elle maintien qu’identité et orientation sont inter relié : « Parce que moi j'ai
déjà entendu des gens dans l'milieu dire : "Ben pourquoi j'travaillerais sur l'identité là, j'ai
pas l'temps de m'occuper de ça là." Ben c'est parce que l'identité c'est à la base de ça hen?
Pis moi, y a pas d'orientation si y a pas d'identité. » En ce sens, lorsque l’on aborde
l’identité, cela implique qu’on entre dans un aspect plus psychologique. Questionné sur la
vision de son rôle en orientation, la C.O.4 mentionne :
Mais mon mandat c’t’un mandat de conseillère d’orientation et moi je
considère qu’on s’oriente pas avec les genoux, on s’oriente avec la tête fa
que j’veux dire si faut que j’touche la tête de quelqu’un je vais y toucher,
mais naturellement y faut que ça soit en toute connaissance de cause, que
la personne veuille ça aussi tsé j’vas jamais imposer quoi que se soit à
quelqu’un (C.O.4)
Par ailleurs, certains secteurs n’offrent pas un cadre permettant aux conseillers
d’orientation d’agir selon les besoins de leurs clients. En ce sens, la C.O.6 qui n’a pas le
temps d’intervenir de cette façon vit une insatisfaction : « Tsé de pas pouvoir tout leur
donner [...] quand on l’voit, pis ce qu’on pourrait leur donner, mais on peut pas. [...] C’est
poche hen? C’est comme un peu culpabilisant à quelque part là » (C.O.6).
Travailler selon le concept de l’identité en orientation peut paraître large. Deux
conseillères d’orientation mentionnent qu’elles ont adapté leur vision de leur rôle et de
leur pratique pour être en accord avec leur réalité professionnelle :
183
[...] on avait une pensée une peu plus e… idéalisée tsé dans l’sens qu’y
faut amener tout l’monde à un certain e… une certaine stabilité de
fonctionnement avant que ces personnes-là puissent s’orienter. C’est, c’est
ben beau dans un monde idéal, mais sur le terrain c’est rarement possible.
Moi c’que j’me dis c’est que mon rôle c’est d’essayer d’amener la
personne à aller vers une, une meilleure e… adéquation de ses besoins, e…
de ses intérêts bien sûr, mais de ses besoins, de ses intérêts pis là au niveau
du, de c’qui est possible actuellement e… de l’aider tsé dans, dans l’fond à
passer à l’action [...] j’ai comme revue mon rôle quand même un peu
différemment, des fois j’me dis j’suis comme le grain de sable. Fa que peut
être que moi, j’suis comme la première personne à y avoir dit certaines
choses, pis là c’est comme un p’tit grain de sable. (C.O.4)
C’est aussi de cette façon que la C.O.5 voit son rôle. Puisqu’il n’est pas toujours possible
d’intervenir sur l’identité, de traiter les déficits, la C.O.5 mentionne qu’elle a le rôle
d’informer ses clients des sources de leurs difficultés dans leur carrière. Elle explique
ceci :
Mon rôle c’est de lui dire. Pis voilà pourquoi vous êtes malheureux, pour
telle telle telle raison, à vous de faire en sorte que ça ne se reproduise plus.
Fa que c’est ça, je pallie, j’leur dis, j’les préviens, j’leur mets une p’tite
graine dans la tête pis y partent avec ça pis, c’est sûr dans le tas là y en a
qui vont oublier, mais c’est sûr qui en a qui que ca fait comme ah! tsé,
quelques années après, « oui elle m’avait dit ça ! » (C.O.5)
Ces conseillers d’orientation définissent donc leur pratique en fonction du rôle qu’ils
peuvent avoir face au concept de l’identité et le voient comme indissociable. Au-delà de
leur pratique professionnelle, pour la C.O5 et la C.O.4 l’approche psychogénétique de
l’identité explique aussi la vision du monde en général et par le fait même, cela les définit
aussi. La C.O. 4 mentionne qu’elle ne pourrait envisager de changer d’emploi et ne plus
utiliser l’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique, car cela fait maintenant
partie d’elle : « C’est moi, je, c’est, c’est, c’est c’qui me définit ». C’est un concept qui
est intégré par ce que cela a du sens pour elle. De son côté, la C.O.5 décrit sa vision
ainsi :
184
[...] c’est ma vision de l’orientation, la vision que j’ai de ma vie c’est la
même affaire, c’est comme si l’épreuve, pas l’épreuve, mais la
psychogénétique avait mis des mots qui me permet de faire ces liens-là et
c’est ce que je fais avec les clients maintenant (C.O.5)
Donc, en résumé, les conseillers d’orientation intègrent l’identité dans leur pratique de
l’orientation et cela peu importe leurs secteurs professionnels. Ils croient que c’est leur
rôle de façonner ce concept dans l’optique de ce que leur milieu leur permet. Ils ont une
vision de l’orientation qui se transcende en une vision du monde en général, qui les inclut
également.
Entre intervenir et traiter
Les conseillers d’orientation croient être assez formés avec l’approche psychogénétique
pour intervenir en orientation à divers niveaux. Questionnés s’il est pertinent d’être formé
en psychothérapie pour intervenir adéquatement selon l’approche psychogénétique, sept
conseillers d’orientation répondent que cette formation n’est pas nécessaire pour
intervenir correctement dans le contexte de leur cadre de travail. Dans ce sens, la C.O.6
répond qu’elle n’a pas besoin d’être formée en psychothérapie pour intervenir en
orientation :
[...] parce que j’le fais à journée longue sans la psychothérapie. [...] Mais
j’interviens comme tout le monde pourrait intervenir de cette façon là, sauf
que moi c’est ciblé, parce que je l’vois où j’peux intervenir. (C.O.6)
La C.O.2 abonde dans le même sens : « je pense pas que pour utiliser l'épreuve
Groupements pis faire des interventions qui sont pertinentes que tu doives nécessairement
être formé à la psychothérapie là ». La C.O.4 ne pense pas, elle non plus, que cette
formation en psychothérapie soit nécessaire pour certains milieux ou contextes de
travail :
185
Non parce que tsé y a des contextes et tout [...] ben j’sais pas, moi dans
l’milieu scolaire qui voit un élève deux fois, est-ce que de faire une
formation en psychothérapie c’est nécessaire, ben c’est pas nécessaire
c’est… c’est toujours bon parce que tsé tu vas plus loin dans ta
compréhension de toi-même et de l’être humain [...], mais c’est-tu
nécessaire? Non. (C.O.4)
La psychothérapie, bien qu’elle apporte davantage de connaissance et d’actualisation de
soi-même, comme le mentionne la C.O.4, n’est pas nécessaire pour intervenir
adéquatement en orientation selon l’approche psychogénétique. La formation en
psychothérapie à un but précis. Tout repose sur le contexte dans lequel les conseillers
d’orientation œuvrent, tel que le mentionne la C.O.1 : « parce que la psychothérapie,
quand on s’forme à la psychothérapie, c’est pour pouvoir agir dans un contexte… de
psychothérapeute ! » Les conseillers d’orientation utilisent donc l’approche
psychogénétique en lien avec le potentiel d’intervention que leur milieu leur permet.
Comme le précise la C.O.3, le but qu’il y ai un changement favorable pour le client est
tout de même présent :
Par contre c’est sûr que quand je donne des devoirs, travailler sur la zone
qui est plus faible, quelque part j’espère que ça va donner un peu de
changement, quand j’travaille à à re, tsé la technique routine, ben en fait si
j’lui apprends tranquillement à avoir un langage euh moins de
surévaluation pis d’estim, tsé de de de voir des objectifs peut-être que je
ré-éduque quelque part, j’fais un peu de pression à ce niveau là. (C.O.3)
Dans ce contexte de distinction des formes d’intervention différentes, la C.O.5
explique qu’elle ne fait pas de psychothérapie dans le cadre de son travail, mais qu’elle
intervient sous d’autres formes. Elle présente sa vision ainsi :
[...] ben c’est que l’intervention c’est euh pour moi euh c’est comme euh,
tu vas modifier la perception que la personne a de sa situation fa que tu vas
le faire avec plus ou moins de profondeur [...] y a des sujets que en
orientation, on n’abordera pas quand même. (C.O.5)
186
Par ailleurs, le C.O.8, bien qu’il mentionne ne pas intervenir sur l’identité dans son
contexte de travail, présente sa vision de l’orientation qui implique que la formation en
psychothérapie devrait être utilisé afin de re définir le rôle de l’orientation :
[…] c’est là que le conseiller d’orientation a une place, c’est notre métier,
c’est notre intervention […] la psychothérapie, c’est un moyen de
d’explorer de développer notre expertise de l’intérieur, c’t’une question de
rayonnement actuellement (C.O.8)
Donc, en résumé, les conseillers d’orientation croient avoir les outils nécessaires pour
intervenir en orientation selon l’approche psychogénétique. Bien qu’ils ne le nomment
pas ainsi, on distingue des niveaux d’intervention variables, qui font référence à la
psychothérapie, l’éducation formative, le counseling et l’éducation dont Bégin avait déjà
fait la distinction en 1997.
En conclusion de ce thème, les représentations des conseillers d’orientation quant à leurs
rôles face à l’intervention sur l’identité en orientation sont :
Le concept d’identité selon l’approche psychogénétique fait partie intégrante de
leur pratique professionnelle;
Il est possible d’intervenir sur l’identité à divers niveaux;
Le choix du type d’intervention est modulé par le potentiel d’intervention dont ils
disposent dans leurs milieux de pratique;
Les conseillers d’orientation mentionnent ne pas avoir assez de temps pour traiter les
déficits identitaires. Lorsque cela est possible, c’est surtout parce que l’ampleur des
déficits est minime.
187
La vision de la compréhension de l’humain selon l’approche psychogénétique est
une représentation qui dépasse leur pratique professionnelle et devient un angle
pour se voir et voir le monde.
En somme, l’apport de l’approche psychogénétique dans la vie de ces professionnels
dépasse l’utilité professionnelle. C’est devenu pour eux une façon de se définir et un
angle pour comprendre les comportements humains. Ces conseillers d’orientation n’ont
pas tous un contexte professionnel permettant d’intervenir sur l’identité afin de traiter les
déficits identitaires. Ils interviennent donc à d’autres niveaux qui permettent de tenir
compte de l’identité tout en respectant leur champ d’activité.
Dans un langage psychogénétique, on pourrait dire que ces c.o. ont été touchés autant
dans leur côté « analytique » qu’« intuitif », en ce sens que l’intérêt envers l’outil et
l’approche a été et est encore autant cognitive qu’émotive. Des mots, tels « un choc »,
« une révélation », un « déclencheur » pour décrire ce qui les a incités à se former
évoquent davantage un côté émotif. C’est possiblement cet amalgame qui fait que par la
suite s’installe un engagement sérieux dans l’apprentissage et l’utilisation de l’épreuve
Groupements et de l’approche psychogénétique de l’identité. On parle alors du sens, qui
selon le dictionnaire Larousse se définit comme suit :
Aptitude à connaître, à apprécier quelque chose de façon immédiate et
intuitive : Avoir le sens des nuances. […] Raison d'être, valeur, finalité de
quelque chose, ce qui le justifie et l'explique : Donner un sens à son
existence. (Dictionnaire Larousse en ligne, site internet)
Les conseillers d’orientation rencontrés ont donc reconnu de façon instantanée et intuitive
l’apport de l’épreuve Groupements et de l’approche psychogénétique dans leur pratique.
L’emploi qu’ils en font n’est pas qu’utilitaire comme un autre outil qu’on applique dans
188
une situation précise, c’est plutôt ce qui a « donné un sens » à leur profession et c’est
aussi devenu ce qui les définit.
Afin de terminer cette section suivra une présentation sous forme de tableau synthèse des
quatre sections qui présentent les motivations des conseillers d’orientation, leurs
contextes d’utilisation, leurs pratiques efficientes ainsi que leurs représentations de
l’intervention en orientation. Ces tableaux présentent également les principaux constats
qui ressortent suite aux entrevues avec les conseillers d’orientation.
189
Tableau 18 : Résumé synthèse des éléments motivateurs à l’utilisation de l’épreuve
Groupements et de l’approche psychogénétique de l’identité
Les motivations des
conseillers
d’orientation à
utiliser l’épreuve
Groupements
Les éléments incitatifs à la
formation initiale
Une vision de l’orientation
Luc Bégin, un mobilisateur
Les conditions facilitant
l’apprentissage
S’investir en temps formel et
informel
Être entouré
Être motivé par les défis
intellectuels
Sa propre structure identitaire
Les éléments motivateurs dans
leur pratique actuelle
Diagnostic rapide de l’identité
« T’as vu ça où? » : La
validation des clients
Moduler ses interventions
Un « Tour du jardin »
impossible
Quatre constats ressortent de cette première section, soit :
Les conditions facilitant une acquisition optimale de l’outil sont : d’avoir la possibilité d’y
investir du temps, d’être bien entouré et d’avoir une identité en équilibre.
Le fait d’être stimulé intellectuellement par l’outil révèle une curiosité naturelle et c’est aussi
l’élément clé, faisant qu’ils étaient prêts à s’investir en temps, en effort et en formations de
perfectionnement de façon autonome.
Les conseillers d’orientation ont adhéré à la vision de l’orientation en lien avec l’approche
psychogénétique, alors qu’ils étaient insatisfaits de ce qui était présenté comme vision dans leurs
études ou milieux. Cette approche a répondu à des questions qui restaient sans réponse.
Les conseillers d’orientation vivent un sentiment d’efficacité de par le fait que l’utilisation d’un
diagnostic identitaire permet d’être rapidement en mesure de cibler les besoins dits et non dits des
clients et de moduler la démarche d’orientation qui s’en suit.
190
Ce premier tableau présentait les motivations des conseillers d’orientation à utiliser
l’épreuve Groupements, ainsi que les trois sous-sections qui en découlaient, les thèmes
émergeant des rencontres avec les conseillers d’orientation rencontrés et les constats qui
ressortent des informations qu’ils ont transmises. Le prochain tableau présente, sous la
même forme, un résumé des contextes d’utilisation, des trois sous-sections qui en
découlent et des thèmes qui ont émergé suite aux entrevues avec les conseillers
d’orientation. Ce tableau se termine en résumant les constats qui ressortent suite aux
informations accumulées.
Tableau 19 : Résumé synthèse des contextes d’utilisation
Les
contextes
d’utilisations
Description des milieux et
clientèles
Une proximité variable avec les
clients
Volontaire la démarche
d’orientation?
« Bon pour tous »
Une difficulté identifiée :
l’interprétation
L’apport des autres outils et
approches
Un « plus » pour mieux
comprendre
L’approche cognitive : une
consœur de travail
Trois constats ressortent de cette deuxième section, soit :
Dans leurs débuts, les conseillers d’orientation ont trouvé difficile d’interpréter les résultats de
l’épreuve Groupements.
L’utilisation de l’épreuve Groupements s’adapte à tous les milieux professionnels des conseillers
d’orientation rencontrés. Peu importe leurs clientèles, peu importe la problématique ou le besoin
demandé, ces conseillers d’orientation en font la base de leur pratique. Le concept de l’identité
est priorisé aux caractéristiques personnelles des clients.
Les conseillers d’orientation qui utilisent d’autres tests psychométriques voient les liens entre les
résultats de ces tests et ceux de l’épreuve Groupements, qui permettent de bonifier certaines
informations. Dans leur pratique, plusieurs utilisent aussi l’approche cognitive pour des situations
précises où ils veulent intervenir sur les pensées de leurs clients.
191
Afin de poursuivre ce même type de présentation, vient maintenant le tableau résumé des
pratiques efficientes des conseillers d’orientation rencontrés en entrevue. En lien avec ces
pratiques, trois sous-sections sont présentées en lien avec les thèmes qui ont émergé dans
les entrevues et les constats qui découlent de l’analyse des résultats.
Tableau 20 : Résumé synthèse des pratiques efficientes
Les
pratiques
efficientes
L’utilisation de l’épreuve
Groupements
En congruence avec
l’environnement
Pour un traitement de
l’information efficace
Voir au-delà de l’outil
Les
compétences relationnelles des
conseillers d’orientation
Créer un lien et s’engager
S’affirmer… jusqu’au bout
Intervention en orientation
Tenir compte du contexte
Tenir compte des besoins des
clients
« Oui je le veux »… le
consentement du client
Deux constats ressortent de cette troisième section, soit :
Les conseillers d’orientation montrent avoir acquis une vision globale qui leur permet d’ajuster
continuellement leur pratique. Que ce soit face aux limites de temps que leurs milieux leur
imposent ou face à l’interprétation des résultats à leurs clients, les conseillers d’orientation
utilisent leur jugement personnel pour concevoir leur utilisation de l’épreuve Groupements.
Conséquemment, ils ne suivent pas de plan préétabli, ce qui propose qu’ils sont en concordance
avec le moment présent et ses impératifs. Cette vision leur permet également de rester critiques
face aux résultats de l’épreuve Groupements et lorsque nécessaire, de prioriser la pratique de
l’approche psychogénétique à l’outil.
Un autre comportement qui présente une pratique efficiente de l’utilisation de l’épreuve
Groupements est la capacité des conseillers d’orientation à naviguer entre deux rôles, soit celui de
s’affirmer et de s’engager. Ces façons d’être sont le reflet de ce que préconise l’utilisation de
l’approche psychogénétique :
La formation à l'intervention psychogénétique ne vise pas à donner des « façons de
faire » ou de « dire » toutes faites à l'intervenant. Elle visera surtout à rendre efficaces
les ressources que l'intervenant possède. (IRFCPO, 2012)
192
Le prochain et dernier tableau résume les représentations des conseillers d’orientation
quant à l’intervention en orientation. Cette section n’a pas de sous-section, mais présente
les deux thèmes qui ont émergé suite aux rencontres avec les conseillers d’orientation.
Les constats qui ressortent suite aux informations cumulées sont présents pour terminer
ce résumé synthèse.
Tableau 21 : Résumé synthèse des représentations des conseillers d’orientation envers
l’intervention en orientation
Leurs
représentations de
l’intervention en
orientation
La place de l’identité en
orientation
Assez formé ?
Deux constats ressortent de cette dernière section, soit :
Les conseillers d’orientation n’ont pas tous un contexte professionnel permettant d’intervenir sur
l’identité afin de traiter les déficits identitaires. Ils interviennent donc à d’autres niveaux qui
permettent de tenir compte de l’identité tout en respectant leur champ d’activité.
Dans un langage psychogénétique, on pourrait dire que ces conseillers d’orientation ont été
touchés autant dans leur côté « analytique » qu’« intuitif », en ce sens que l’intérêt envers l’outil
et l’approche a été et est encore autant cognitif qu’émotif. L’emploi qu’ils en font n’est pas
qu’utilitaire comme un autre outil qu’on applique dans une situation précise, c’est plutôt ce qui a
« donné un sens » à leur profession et c’est aussi devenu ce qui les définit.
Ces résultats qui ont été présentés et analysés sont en lien avec ce que les conseillers
d’orientation conçoivent, vivent ou ont vécu dans leur pratique en orientation. Pour
terminer cet essai, la suite met ces informations en lien avec celles des autres sections de
l’essai, soit celles de la problématique et du cadre conceptuel.
193
6. Discussion
L’analyse des entretiens avec les huit conseillers d’orientation permet d’établir des liens
significatifs avec les connaissances scientifiques présentées dans la problématique de la
recherche et dans le cadre conceptuel. C’est ainsi que cinq sujets sont maintenant
présentés en discussion. Le premier sujet présente le lien entre les besoins émotifs sous-
jacents aux demandes d’orientation dont faisait part Matte (2010) et l’apport de l’épreuve
Groupements en ce sens. Le deuxième sujet fait un retour sur les problématiques en
orientation qui arrivent de partout, en constatant que pour les conseillers d’orientation qui
travaillent selon l’approche psychogénétique de l’identité, l’identité est davantage
significative pour aider leurs clients à s’orienter. Le troisième sujet présente le manque de
reconnaissance de l’identité et la psychologie en orientation. En quatrième sujet sont
présentés les liens entre les compétences relationnelles reconnues en orientation selon
divers auteurs et ce qui a été remarqué chez les conseillers d’orientation rencontrés.
Enfin, le dernier sujet discuté concerne la complexité de l’épreuve Groupements. Cette
complexité est discutée en se questionnant sur ce que cela explique et pour qui cet outil
peut être complexe.
6.1 L’identité; un diagnostic qui permet de répondre aux besoins
émotifs sous-jacents aux demandes d’orientation
Les conseillers d’orientation rencontrés ont mentionné qu’un des apports de l’épreuve
Groupements dans leur pratique consistait à moduler leurs interventions selon les besoins
de leurs clients. Dans ce sens, grâce au diagnostic de l’identité qui est rapide et
instantané, ils peuvent dépister ce dont leurs clients ont besoin, même si ceux-ci ne le
mentionnent pas toujours. Les besoins émotifs sous-jacents aux demandes d’orientation
sont des informations accessibles via l’épreuve Groupements. Cet outil diagnostic va
« chercher » la pensée synthétique, faisant référence à ce que ressentent les clients
« émotivement » et qui fait du sens pour eux. Par le fait que la pensée synthétique est
194
moins accessible par le langage, ce qui en découle est parfois difficile à nommer. Ces
informations transcendent donc l’histoire subjective que la personne se fait, ou ce qu’elle
veut faire voir de sa situation.
Ces informations sont directement en lien avec les besoins en éducation dont faisait état
Matte (2010). Selon lui, une des difficultés en orientation consiste justement à évaluer et
dépister le service adéquat dont les élèves ont besoin. Dans une pyramide qu’il présentait,
il déplorait le fait que les services d’orientation offerts dans le réseau scolaire agissaient
peu souvent à la pointe de la pyramide, là où les besoins devenaient particuliers, c’est-à-
dire, où l’on rencontre les « problèmes d’orientation ». Matte (2010) poursuivait en
mentionnant que le risque de ne pas évaluer correctement les besoins des élèves est de
passer à côté du besoin réel de ceux-ci et surtout de ceux qui sont plus vulnérables et de
leur offrir un service qui tend plutôt vers l’information scolaire et professionnelle. De
même, l’OCCOQ (2008) affirme que de donner (seulement) de l’information scolaire et
professionnelle ne répond pas aux besoins émotifs des individus consultant en
orientation.
C’est aussi ce qu’ont constaté les conseillers d’orientation rencontrés. À ce sujet, une
conseillère d’orientation qui travaille auprès d’une clientèle en adaptation scolaire
mentionnait qu’il arrivait que des étudiants se retrouvent dans des groupes spéciaux par
« bad luck » parce qu’il n’y a rien d’autre pour eux. C’est l’identification de leur
problématique et non de leur identité qui avait causé cette situation. Dans ce même sens,
une autre conseillère d’orientation, qui travaille uniquement avec une clientèle
handicapée, constate que le mode de fonctionnement identitaire est au-delà de la maladie.
Ainsi connaître l’identité de ses clients lui permet de dépasser les étiquettes associées aux
divers troubles et maladies et justement de dépister le besoin du client en lien avec son
identité et non seulement en lien avec sa maladie.
Dans ce contexte, l’apport de l’épreuve Groupements et de l’approche psychogénétique
de l’identité est manifestement une solution à ces difficultés de dépister et d’offrir le
service adéquat, car cela permet une évaluation objective et précise de la situation de
195
leurs clients. Il est donc possible de constater que la personne à une ou des
problématiques identitaires qui persisteront, peu importe les changements de milieu
effectué, car ces inconforts sont à l’intérieur de la personne même et se « déplacent »
avec elle. Dans cette situation, changer de milieu pourrait avoir un effet positif immédiat
pour la personne, mais comme le mentionnaient les conseillers d’orientation, tôt ou tard,
les problématiques si elles ne sont pas réglées referont surface. C’est ainsi également
qu’un conseiller d’orientation peut rencontrer un client qui lui dit avoir déjà fait une
démarche d’orientation qui n’a « rien donné », même si face au conseiller d’orientation
rencontré antérieurement il semblait heureux de son choix.
6.2 L’identité; plus significative que les problématiques
La première partie de cet essai portait sur les problématiques vécues en éducation, en
employabilité ainsi qu’en orientation. C’est aussi à ce moment qu’étaient présentées les
clientèles émergentes en orientation qui, par leur nombre grandissant, provoquent des
questionnements envers l’expertise des conseillers d’orientation. Le constat est que les
conseillers d’orientation sont face à plusieurs enjeux, autant en ce qui concerne l’individu
que la société et on pourrait se demander s’ils ne se sentent pas submergés face à toutes
ces informations. Par ailleurs, on ne peut prévoir que ce flux d’information diminuera, car
il y aura toujours de nouveaux besoins en orientation et chez les gens, car la société
change et évolue constamment.
C’est en ce sens que lorsque l’identité est le point de départ du processus d’orientation, la
base de la pratique reste invariablement la même soit : comprendre ce que l’identité de la
personne a comme effet dans sa vie scolaire, professionnelle, dans sa démarche en
orientation et quels sont les besoins qui en découlent. Dès la première rencontre, à partir
des résultats de l’épreuve Groupements, des besoins de la personne, du mandat
professionnel et des dispositions du milieu, les conseillers d’orientation peuvent déjà
concevoir leur démarche d’orientation.
196
Pour les conseillers d’orientation, avoir un diagnostic identitaire permet de dépister si le
besoin d’orientation se tourne vers « l’externe ou l’interne ». Ainsi, en premier lieu, les
conseillers d’orientation peuvent constater que la personne n’évolue pas dans un
environnement dont les exigences correspondent à son identité. Le besoin qui en découle
est donc de rechercher un milieu dont les exigences sont congruentes à l’identité du
client. Par ailleurs, dans les situations où les individus vivent des problématiques dans
leurs démarches d’orientation (ou d’études, ou d’emploi) la pratique de l’orientation,
lorsque l’on priorise l’identité est de dépister les déficits identitaires. Cela permet ensuite
d’éduquer les individus, en leur montrant les liens entre leurs déficits identitaires et les
problématiques qu’ils vivent, ou dans les contextes où cela est possible, les conseillers
d’orientation peuvent également traiter les déficits, ce qui éliminera les problématiques
vécues en orientation et permettra aux individus d’être capables de s’orienter de façon
autonome.
6.3 L’identité; concept encore méconnu en orientation
Comme l’on mentionné les conseillers d’orientation rencontrés, travailler en orientation
avec le concept de l’identité selon l’approche psychogénétique se rapproche de la
psychologie. Même les clients le reconnaissaient. Par ailleurs, certains d’entre eux étaient
également très surpris de cette façon d’aborder l’orientation. La perception était alors que
l’orientation s’exerçait à partir de l’extérieur d’eux-mêmes, ou à partir d’un test qui leur
révèlerait « où aller ». Il semble y avoir un inconfort à notre époque, à inclure la
psychologie en orientation et cet inconfort semble installé depuis longtemps. En ce sens,
Bégin (1999) qui milite depuis longtemps pour reconnaître la psychologie en orientation
mentionnait dans son article De l'orientation scolaire et professionnelle... à l'orientation
vocationnelle, qu’on le taxait de « psychologiser » l’orientation. Pourtant, plusieurs
éléments de la pratique actuelle des conseillers d’orientation tiennent compte de l’aspect
psychologique, tel :
197
Ils étudient les différentes approches psychologiques pour comprendre le
développement de l’humain,
ils évaluent le fonctionnement de la personne quant à leurs fonctionnements
psychologiques, leurs ressources personnelles et les conditions de leurs milieux,
ils interviennent sur des problématiques telles que le manque de motivation,
l’indécision, l’immaturité vocationnelle, tout en considérant les besoins émotifs
de leurs clients,
ils ont une reconnaissance professionnelle leur donnant le droit d’exercer des
activités réservées par la loi (Loi modifiant le Code des professions et d'autres
dispositions législatives dans le domaine de la santé mentale et des relations
humaines (projet de loi nº 21) qui concerne la protection des clientèles plus
vulnérables psychologiquement.
ils peuvent faire de la psychothérapie, suite à une formation précise reconnue par
l’Ordre des psychologues du Québec.
Cette relation ne semble pas être toujours reconnue de l’ensemble de la population. Là où
le bât blesse en orientation est lorsque les personnes vivent des difficultés à s’orienter.
Orienter quand c’est facile, ça va, mais lorsque ça ne pas, que se passe-t-il? Lorsque le
client est en haut de la pyramide, telle que celle décrite par Matte (2010), qu’il se
retrouve avec des besoins particuliers, qui fait quoi, comment et est-ce que le dénouement
est heureux? En considérant que les formations universitaires des conseillers
d’orientation sont de deuxième cycle universitaire, peut-on envisager que les élèves qui
vivent des problèmes d’orientation seraient en mesure d’être servis par des professionnels
à qui l’ont reconnait cette expertise et à qui ont donne les outils adéquats pour le faire?
Serait-il temps d’inclure davantage la psychologie en orientation, sans pour autant
éliminer l’aspect éducatif?
Dans ce contexte, l’apport de l’épreuve Groupements et de l’approche psychogénétique
est à divers niveaux :
198
C’est une approche qui fait le lien entre les besoins des individus en rapport avec
la construction de leur identité et les exigences des milieux professionnels,
C’est une approche qui possède un outil de diagnostic de l’identité, cela permet
d’aller au-delà des hypothèses et de ce que l’individu « pense » de sa situation,
l’épreuve Groupements donne accès au cerveau droit qui est à la base de ce qui
aura du « sens » pour l’individu,
C’est une approche qui en peu de temps discerne les besoins des clients, ce qui
permet de référer vers des services appropriés, ou d’intervenir sur les déficits
identitaires lorsque cela est demandé par les clients,
C’est une approche qui a une théorie qui la sous-tend, qui présente des façons
d’intervenir pour créer un changement chez la personne, dans le but qu’elle puisse
s’adapter aux exigences qui émergent du marché du travail et avant tout qu’elle
soit elle-même en équilibre.
Les conseillers d’orientation ont une place importante à prendre concernant la
reconnaissance de leur profession. C’est ce que Matte (2010) mentionnait lorsqu’il
constatait à quel point les besoins particuliers en orientation n’étaient pas comblés dans le
domaine de l’éducation. Comme il l’expliquait alors, la responsabilité du manque de
service doit revenir à tout le monde et il invitait les conseillers d’orientation à utiliser leur
zone d’influence pour faire changer une vision de l’orientation qui est dépassée.
Les conseillers d’orientation rencontrés, du secteur de l’éducation, ont également
manifesté leur frustration et leur insatisfaction envers cet aspect. Elles s’impliquent
activement dans leur milieu pour présenter l’apport de leur pratique face aux difficultés
mentionnées et constatent qu’elles devront continuer de s’armer de patience et d’effort
parce que le rôle que joue l’identité en orientation est encore flou pour plusieurs
personnes dans leur environnement, autant collègue en orientation, que professeurs. Par
ailleurs leur persévérance porte fruit, car deux des conseillères en orientation du secteur
scolaire ont mentionné que leurs dirigeants utilisaient leur expertise dans des contextes
divers, tels, sélection d’employés et dépistage de problématique avec des élèves. Ces
199
deux conseillères d’orientation ont indiqué que la passation de l’épreuve Groupements
faisait désormais partie des pratiques habituelles de sélection des employés dans leurs
établissements respectifs. C’est ce qu’on appelle, voir les récoltes de ce qu’on a semé!
Enfin, que ce soit dans le domaine de l’éducation ou dans les autres domaines de
l’orientation, les conseillers d’orientation rencontrés agissent et affirment leur pratique et
leur vision de l’orientation en lien avec l’approche psychogénétique. Ils sont capables
d’exercer une influence positive, car dans leur quotidien professionnel, ils retirent un
sentiment d’efficacité dû au fait que l’identité est le fondement de leur pratique de
l’orientation.
6.4 L’identité; les dimensions ayant un impact dans l’intervention.
L’analyse des résultats a aussi permis de faire ressortir les compétences relationnelles des
conseillers d’orientation rencontrés comme étant des pratiques efficientes. Plusieurs
auteurs, cités dans le cadre théorique (Bégin, 1998; Guédon et Savard, 2000; Guichard et
Huteau, 2006) évoquent que la qualité du lien a d’ailleurs un pouvoir plus élevé que les
techniques d’intervention utilisées. Ainsi, le type de lien qui s’établit entre les conseillers
d’orientation et leurs clients est déjà un élément permettant le changement chez leurs
clients. Dans les résultats en lien avec les compétences relationnelles des conseillers
d’orientation rencontrés, il était question d’engagement et d’affirmation. L’engagement
dont il est ici question, se remarque chez les conseillers d’orientation rencontrés par le
souci qu’ils ont d’établir avant tout une relation significative avec leurs clients. Ils ne
craignent pas d’exprimer leurs sentiments, de faire des démarches pour eux, ou même
d’attendre que la relation soit plus développée pour discuter de sujets plus personnels. En
deuxième lieu, l’affirmation se présentait dans leur façon d’intervenir, alors qu’ils
donnent des informations claires, dans leur façon de maintenir leur position et leur
jugement en tout temps même lorsque cela était plus difficile.
Ces façons de faire ou d’être, correspondent exactement à ce que prône l’approche
psychogénétique de l’identité au niveau de l’intervention. Comme il a été décrit plus
200
haut, Bégin et d’autres auteurs conçoivent qu’au départ, pour induire un changement chez
un client, l’élément de base est la qualité de la relation. Aussi, selon cette approche, les
affirmations sont nécessaires pour rejoindre le cerveau droit qui ne traite pas les nuances
ou le négatif du langage. Les deux vont de pairs puisque, pour que le conseiller
d’orientation ait un impact en affirmant des faits il doit également être en relation avec
son client pour que celui-ci lui fasse confiance. Dans l’approche psychogénétique de
l’identité, ces informations correspondent aux dimensions de la science et du social. Est-
ce dire alors que pour intervenir de façon optimale selon cette approche et avoir un
impact positif chez les clients, les conseillers d’orientation doivent avoir ces dimensions
construites? Les faits semblent répondre positivement à cette question.
Par ailleurs, pour poursuivre en ce sens, certaines informations provenant des conseillers
d’orientation rencontrés semblent correspondre à un autre aspect. En effet, les conseillers
d’orientation ont mentionné que pour travailler avec l’épreuve Groupements il faut être à
l’aise à sortir du cadre habituel, à aborder des sujets qui eux aussi sortent du cadre et de
plus, ils mentionnent le faire eux même lorsque les résultats de l’épreuve Groupements ne
font pas de « sens » avec ce qu’ils voient dans la relation qu’ils ont avec leurs clients. Ils
ont également mentionné qu’il faut être à l’aise avec ce qui est vague et flou, car
l’interprétation des résultats n’est pas un « copier-coller » à remettre aux clients, il y a
toute une construction à faire provenant de plusieurs informations. Les conseillers
d’orientation ont également mentionné que leurs années de pratique les avaient aidées à
avoir une vision globale des résultats et non une vision compartimentée. Cela propose
que les conseillers d’orientation se servent leur côté intuitif pour utiliser l’épreuve
Groupements de façon optimale. Si l’on se rappelle, la théorie psychogénétique de
l’identité conçoit que l’aspect intuitif ne fait pas référence à ce qui est vrai ou faux, mais
plutôt à ce qui fait du sens, ce qui est construit et accessible de façon instantanée, sans
qu’à chaque fois le cerveau n’ait à retraiter l’information. C’est possiblement de cet
aspect que résulte le fait que malgré qu’ils reconnaissent que l’épreuve Groupements est
un outil complexe, ces conseillers d’orientation ne ressentent pas cette complexité dans
leur utilisation au quotidien.
201
6.5 L’identité; complexe pour qui?
Enfin, dans ce qui est nommé comme critère définissant une théorie, il y a l’élément
demandant que l’approche soit assez simple pour se révéler compréhensible. Ce fait peut
être discuté, car en maintes reprises, il a été mentionné que c’est une théorie complexe,
que l’interprétation de l’épreuve Groupements n’est pas facile dans les débuts et que
même après plusieurs années les conseillers d’orientation d’expérience se trouvaient
parfois devant des incertitudes. Un autre élément qui peut également donner une
impression de complexité est le langage « personnalisé » associé à l’interprétation de
l’épreuve Groupements. Pour les gens qui ne connaissent pas l’outil, savoir qu’une
personne a une relationnelle technique-routine ne veut rien dire. Ce langage « codé » peut
donner l’impression que c’est complexe ou du moins que cela semble inatteignable. Par
ailleurs, les conseillers d’orientation qui ont été rencontrés permettent de nuancer cette
vision de complexité, dont le mot même (complexité) peut être perçu sous différents
angles, passant de compliqué à rigoureux.
Tout d’abord, lorsque l’on présente le critère qu’une science doit être simple pour se
révéler compréhensible, il faudrait expliquer pour qui elle doit être simple. En ce sens, il
semble que l’approche psychogénétique a été facile à comprendre pour les conseillers
d’orientation qui avaient déjà (ou qui ont acquis) un vécu professionnel ou qui avaient
des études en psychologie. De même, certains ont mentionné qu’ils savaient qu’ils
n’utilisaient pas l’outil et l’approche à leur plein potentiel, mais qu’ils l’utilisaient de
façon optimale pour leur propre identité et selon les exigences de leurs milieux de travail
respectifs. Cela suggère qu’une utilisation peut être adéquate, même si elle n’utilise pas
tout le pouvoir de l’outil.
Cette complexité de l’outil et de l’approche fut n’a pas été un élément négatif pour les
conseillers d’orientation puisqu’ils ont reçu des réponses face aux « vides » laissés par
d’autres théories et face aux problématiques qu’ils rencontraient dans leur pratique. Ils
ont fait mention que cette théorie était le morceau manquant à une vision de l’orientation
auquel ils trouvaient un « sens », face à l’explication des comportements humains. Un
autre élément qui est porteur est aussi la réaction des clients qui sont stupéfaits de la
202
justesse des informations qui leur sont transmises. Ces reconnaissances les ont sollicitées
à se dépasser, à aller vers des zones moins confortables, à mettre des efforts, car les
conseillers d’orientation voyaient les impacts positifs, autant sur eux-mêmes que sur leurs
clients.
Alors, que dire concernant cette complexité? Peut-être qu’elle est indispensable à un
diagnostic de l’identité!
7. Conclusion
Afin de conclure cette recherche et présenter ces apports, limites et retombés, il est
important de se rappeler son objectif principal, qui était de : présenter et analyser les
pratiques efficientes des conseillers et conseillères d’orientation utilisant l’épreuve
Groupements et l’approche psychogénétique de l’identité dans un contexte d’orientation.
Plus spécifiquement la recherche visait à décrire l’expérience d’appropriation de
l’épreuve Groupements des conseillers d’orientation, analyser les contextes et les
procédures d’utilisation de l’épreuve Groupements des conseillers d’orientation ainsi que
les réactions des clients, présenter les motivations sous-jacentes à l’utilisation de
l’épreuve Groupements et comprendre les perceptions des conseillers d’orientation quant
à leur rôle face à l’intervention sur l’identité.
7.1 Les apports de cette recherche
Cette recherche a permis de faire le point sur le vécu des conseillers d’orientation qui
utilisent l’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique de l’identité, de voir les
retombés de l’utilisation dans le quotidien de ces professionnels pour en comprendre les
applications possibles dans des environnements de travail qui possèdent eux aussi des
exigences et des limites.
203
Le premier apport constaté concerne l’expérience d’appropriation de l’épreuve
Groupements des conseillers d’orientation. Deux termes en sont ressortis, soit
enthousiasme et efforts. Les conseillers d’orientation rencontrés ont manifesté un
enthousiasme quant à l’arrivée de l’épreuve Groupements et de l’approche
psychogénétique dans leur vécu professionnel, puisque cela répondait à des
questionnements qui ne trouvaient de réponses avec d’autres approches ou connaissances.
Ils trouvaient (enfin) des réponses à questions, comprenaient la source des
problématiques de leurs clients et avaient un angle de vision pour cheminer dans un
processus d’évaluation et-ou d’orientation. Ils ont également mentionné être stimulés
intellectuellement à apprendre et comprendre l’approche psychogénétique de l’identité,
stimulation qui évoquait aussi le plaisir de découvrir quelque chose qui avait pour eux du
« sens ». Comme on le constate, l’appropriation de l’épreuve Groupements pour ces
conseillers d’orientation à rejoint autant leur côté cognitif (analytique) qu’émotif
(synthétique). L’autre élément qui marque leur appropriation de l’outil et de l’approche
est l’effort à mettre en apprentissage et mémorisation. Il s’avère que sans effort et sans
temps investi il ne semble pas possible d’intégrer la théorie associée à la cotation de
l’épreuve Groupements. Les conseillers d’orientation ont aussi tous constaté qu’au fil du
temps ces connaissances devenaient de plus en plus intégrées, fluides et faciles à
transmettre aux clients.
Le deuxième apport de cette recherche concerne l’utilisation de l’épreuve Groupements
auprès de tous types de clientèles et de problématiques. Il a donc été constaté que les
conseillers d’orientation utilisaient « toujours » l’épreuve Groupements, peu importe les
caractéristiques de leurs clients. Les quelques exceptions mentionnées faisaient référence
à des troubles de santé mentale très précis. Donc, que leurs clients soient jeunes, plus
âgés, avec un diagnostic de TDAH, de trouble de comportement, immigrant, avec un
diagnostic en santé mentale, l’utilisation de l’épreuve Groupements est significative, car
elle va au-delà de ces caractéristiques et présente la construction identitaire des individus.
Dans ce sens, l’épreuve Groupements est devenue pour ces conseillers d’orientation, la
base de l’évaluation du fonctionnement psychologique de leurs clients et comme ils
204
utilisent ces informations dès le début du processus, ils accélèrent l’étape des hypothèses
entourant le fonctionnement des individus.
Un troisième apport de cette recherche est la constatation que les conseillers d’orientation
utilisent l’approche psychogénétique selon le potentiel que leur permet leur propre
structure identitaire et selon les exigences et limites de leurs milieux professionnels. Tous
ont mentionné que l’outil était puissant. Plusieurs ont ajouté à cela qu’ils ne pouvaient
pas utiliser toute cette puissance, par exemple pour intervenir en accord avec l’approche
(lorsque cela est opportun et consenti par le client) pour traiter les déficits identitaires, car
ils n’avaient pas le temps de le faire. Quant à leurs propres structures identitaires, les
conseillers d’orientation ont mentionné qu’inévitablement, les dimensions qui ne sont pas
formées chez eux sont plus difficiles à interpréter ce qui est alors transmis aux clients
comme lien ou informations est puisé via les références fournies par la théorie. On en
comprend que ces informations restent vraies, mais qu’il peut être plus difficile pour les
conseillers d’orientation d’avoir une vision plus globale et d’être plus souple dans leur
interprétation. Dans ce même sens, un autre apport de cette recherche concerne le fait que
plusieurs conseillers d’orientation, ont mentionné s’être développé personnellement au
contact soit du concepteur, soit par l’ensemble des connaissances et remises en question
que l’approche a provoqué en eux. La puissance de l’outil ne rayonne pas seulement
envers leur rôle professionnel, mais aussi envers eux.
Un cinquième apport observé est le sentiment d’efficacité qu’ils éprouvent en lien avec
l’intervention sur l’identité et le service d’orientation qu’ils offrent. Les conseillers
d’orientation rencontrés ont tous mentionné que l’épreuve Groupements était un outil qui
leur donnait des informations précieuses sur l’identité de leur client, ce qui leur permet
d’évaluer la situation de manière rigoureuse, de concevoir leur intervention et
d’intervenir à divers niveaux sur l’identité. Ces trois éléments sont représentatifs des
compétences énoncées par l’Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec
(OCCOQ), dans leur profil de compétences. Ce sentiment d’efficacité fait aussi qu’ils
sont capables de se positionner pour faire reconnaître leurs professions et le rôle de
l’identité, ou de la psychologie, en orientation.
205
7.2 Les limites de cette recherche
La première limite de cette recherche est le fait qu’elle est basée sur le vécu et les
représentations de seulement huit conseillers d’orientation. Bien qu’ils ont été
minutieusement choisis, le nombre peu élevé ne peut représenter ce que vivent et pensent
tous les conseillers d’orientation qui utilisent l’épreuve Groupements et l’approche
psychogénétique de l’identité. Dans ce sens, d’autres recherches pourraient être utiles
afin de valider ou invalider les faits mentionnés ici.
Une autre limite est l’inexpérience de l’étudiante-chercheuse pour ce type de travail
scientifique. Certaines connaissances et constats se font au même temps que la recherche
prend forme. Avoir ces connaissances avant d’entreprendre l’ensemble de cette recherche
aurait amené davantage de finesse, par exemple aux questions posées aux conseillers
d’orientation. Un soucie s’est maintenu de la part de l’étudiante chercheuse pour éviter le
plus possible de ne pas se servir des informations d’un conseiller d’orientation rencontré
antérieurement avec le conseiller d’orientation suivant. Comme il s’agissait d’une
entrevue semi-structurée, les conseillers d’orientation avaient une certaine liberté
d’aborder les questions selon leur angle de vision, ce qui fait que des thèmes nouveaux
ressortaient, mais ne pouvait être ré-évoqués dans les entrevues subséquentes si le
conseiller d’orientation n’en faisait pas état par lui-même. Cela occasionne une perte
d’informations qui auraient pu être fort intéressantes.
Enfin, une dernière limite concerne la neutralité de l’étudiante chercheuse qui est elle-
même une utilisatrice de l’épreuve Groupements. Comme le mentionne Karsenti (2011) :
« […] leurs schèmes personnels et théoriques, leurs valeurs influent sur leur conduite et
le chercheur tente de produire un savoir objectivé, c'est-à-dire validé par les participants à
la recherche » (p. 128). En ce sens, l’étudiante-chercheuse consciente de pouvoir glisser
vers ses valeurs a été le plus attentive possible à maintenir un regard extérieur et à faire
« parler » les conseillers d’orientation et non ce qu’elle pensait elle-même. En ajout à
206
cette attention, le fait que son directeur d’essai ne soit pas un pratiquant de l’épreuve
Groupements et de l’approche psychogénétique, a été un deuxième regard pour maintenir
une objectivité pour l’ensemble de la recherche.
7.3 Les retombés de cette recherche
La première retombée de cette recherche est concernant le fait que jusqu’ici plusieurs
recherches scientifiques ont été faites en lien avec l’épreuve Groupements et l’approche
psychogénétique de l’identité, mais aucune ne présentait la pratique des conseillers
d’orientation qui l’utilisaient. Cela fait donc le lien entre la théorie et la pratique et
permet d’avoir un aperçu de la réalité de l’utilisation de l’outil et de l’approche dans des
contextes divers d’orientation tels en éducation, en employabilité, en évaluation et en
réadaptation.
Une autre retombée de cette recherche est qu’elle pourra permettre aux conseillers
d’orientation ou autres professionnels qui « entendent parler » de l’épreuve Groupements
d’avoir une référence sérieuse sur la pratique de l’outil et d’évaluer la pertinence et
l’apport qu’il peut avoir pour eux dans leur contexte de travail. Puisque l’appropriation de
l’outil est un processus exigeant temps et efforts, les conseillers d’orientation qui veulent
se former pourront avoir un aperçu des exigences et des bénéfices avant de s’inscrire aux
formations initiales et par la suite s’y engager en toutes connaissances.
Il est probable qu'une autre retombée de cette recherche soit envers les utilisateurs et
utilisatrices de l'épreuve Groupements et envers l'Institut de recherche fondamentale et
clinique de psycho-orientation (IRFCPO). Comme pour toutes pratiques, l'échange et le
partage d'informations et de connaissances quant à l'utilisation que les membres en font
est une source de réflexion et de stimulation. Les conseillers et conseillères d'orientation
pourront par le fait même porter un regard sur leur propre pratique et même s'ils le
désirent, se positionner quant aux réponses qu'ils auraient données en entrevue selon le
207
questionnaire d'entrevue fourni en annexe. Pour l'IRFCPO, cette recherche peut être
intéressante pour connaître la situation de quelques uns de leurs membres et peut-être
offrir d'autres opportunités de recherche.
Enfin, une dernière retombée est davantage personnelle, car elle est pour l’étudiante-
chercheuse qui termine cet essai en constatant avoir acquis quantité d’informations qui
ont bonifié les acquis qu’elle avait déjà. Une compréhension plus globale s’en résulte,
reste à voir dans la pratique future si ces connaissances ont été intégrées!
208
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Gouvernement du Québec (2010b). Rapport sur l’état des besoins 2008-2010. Québec :
Ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport. Conseil supérieur de l’Éducation.
Consulté le 16-02-2012 à l’adresse :
http://www.cse.gouv.qc.ca/fichiers/documents/publications/CEBE/50-0192.pdf
Gouvernement du Québec (2010c). Vivre avec une incapacité au Québec. Un portrait
statistique à partir de l’Enquête sur la participation et les limitations d’activités de 2001
et 2006. Québec : Institut de la Statistique du Québec. Consulté le 06-03-2012 à
l’adresse:
http://www.stat.gouv.qc.ca/publications/sante/pdf2010/rapport_EPLA.pdf
Gouvernement du Québec (2011a). Indicateur de l’Éducation – Édition 2011. Ministère
de l’Éducation, du Loisir et du Sport. Consulté le 22-03-2012 à l’adresse:
http://www.mels.gouv.qc.ca/sections/publications/publications/SICA/DRSI/IndicateurEd
ucationEdition2011_f.pdf
Gouvernement du Québec (2011b). Le marché du travail au Québec. Perspectives à long
terme 2011-2020.Québec : Emploi Québec. Consulté le 06-04-2012 à l’adresse :
http://emploiquebec.net/publications/imt.asp?categorie=1002103
Gouvernement du Québec (2011c). Rapport annuel de gestion 2010-2011. Québec :
Ministère de l'emploi et de la Solidarité sociale. Consulté le 12-04-2012 à l’adresse:
http://www.mess.gouv.qc.ca/publications/pdf/ADMIN_rapport_annuel_2010-2011.pdf
214
Gouvernement du Québec (2012a). Indicateurs de l’Éducation – Édition 2012. Ministère
de l’Éducation, du Loisir et du Sport. Consulté le 20-03-2012 à l’adresse:
http://www.mels.gouv.qc.ca/sections/publications/publications/SICA/DRSI/Indicateurs_e
duc_2012_webP.pdf
Gouvernement du Québec (2012b). Rapport statistique sur la clientèle des programmes
d'assistance sociale. Québec: Ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale. Consulté le
16-02-2012 à l’adresse:
http://www.mess.gouv.qc.ca/statistiques/prestataires-assistance-emploi/
Gouvernement du Québec (2012c). Tableaux sur l'immigration permanente au Québec
2007-2011. Québec : Ministère de l’Immigration et Communautés culturelles. Consulté le
15-06-2012 à l’adresse:
http://www.micc.gouv.qc.ca/publications/fr/recherches-statistiques/Immigration-Quebec-
2007-2011.pdf
Gouvernement du Québec. (2013a). Entreprises 2013. Québec : Service Québec.
Consulté le 06-03-2012 à l’adresse :
http://www2.gouv.qc.ca/entreprises/portail/quebec/ressourcesh?lang=fr&g=ressourcesh&
sg=3101862988&t=s&e=2067211939:2623218587:2792025304
Gouvernement du Québec (2013b). Santé mentale au Québec. Ministère de la Santé et
Services sociaux. Consulté le 10-05-2012 à l’adresse :
http://www.msss.gouv.qc.ca/sujets/prob_sante/sante_mentale/index.php?sante_mentale_a
u_travail
Hankivsky, O. (2008). Estimation des coûts du décrochage scolaire au Canada. Conseil
Canadien sur l’apprentissage. Consulté le 06-03-2012 à l'adresse:
http://www.ccl-cca.ca//pdfs/OtherReports/CostofdroppingoutHankivskyFinalReport.pdf
Janosz , M., Pascal, S., Belleau, L., Archambault, I., Parent, S., et Pagani L. (2013). Les
élèves du primaire à risque de décrocher au secondaire : caractéristiques à 12 ans et
prédicteurs à 7 ans, Étude longitudinale du développement des enfants du Québec
(ÉLDEQ 1998-2010) – De la naissance à 12 ans, Institut de la statistique du Québec,
Vol. 7, fascicule 2. Consulté le 07-03-2013 à l'adresse:
http://www.stat.gouv.qc.ca/publications/sante/pdf2013/ELDEQ_fasc7no2_fr.pdf
Le cerveau à tous les niveaux, Contribution de l’hémisphère droit au langage,
Consulté en novembre 26-01-2012 à l’adresse: http://lecerveau.mcgill.ca/
Leduc, L. (2009). L’épuisement professionnel coûte cher. La Presse, édition du 21
novembre 2009. Consulté le 16-02-1012 à l’adresse :
http://affaires.lapresse.ca/economie/quebec/200911/21/01-923811-lepuisement-
professionnel-coute-cher.php
215
Matte, L. (2010). L’orientation : répondre ou non aux besoins des élèves. Montréal,
OCCOPPQ. Consulté le 15-03-2012 à l'adresse:
http://www.orientation.qc.ca/Communications/~/media/447BC3B4B5CB4342AC880D2
1243A5179.ashx
Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec. (2008). Avis pour le Pacte
de l’emploi. Consulté le 12-05-2012 à l’adresse :
http://www.orientation.qc.ca/Communications/~/media/C39B13FE801E4D9BAFB4DAF
BF78761AC.ashx
Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec (2010a). Guide d’évaluation
en orientation. Partenariat avec le Canadian Education and Research Institute for
Counselling (CERIC). Consulté le 07-03-2012 à l’adresse :
https://www.orientation.qc.ca/MembresCandidatsCO/INFORMATION/Formation_Amel
iorationCompetence/~/media/0802DD0A6BDA4818BD8441BF8823D09C.ashx
Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec (2011). Au cœur de
l’adéquation formation-emploi : la personne. Consulté le 06-03-2012 à l’adresse :
http://www.orientation.qc.ca/Communications/~/media/DB6D24B87DD744519A84F144
709BC9E7.ashx
Poulin, D. (2004). Les causes de l’abandon scolaire chez les chômeurs. Emploi-Québec
Terrebonne. Consulté le 22-06-2012 à l'adresse:
http://www.natcon.org/archive/natcon/papers/natcon_papers_2004_Daniel_Poulin.pdf
Thouez et all. (2006). Atlas du vieillissement et des déséquilibres régionaux du Québec
2001- 2021- 2041. Consulté le 16-02-2012 à l'adresse:
http://www.frqsc.gouv.qc.ca/upload/editeur/Atlas_final-YvesBussieres(1).pdf
216
Bibliographie des rapports d’activités dirigées, mémoires et thèse citées
Bilodeau, L. (2007). Contribution de la théorie psychogénétique de l'identité pour
identifier et comprendre les problématiques d'adaptation reliées à l'épuisement
professionnel, maîtrise en éducation. Montréal : Université du Québec à Montréal.
Bourgeau, N. (2003). Contribution de l'approche psychogénétique à la compréhension
des états dépressifs, maîtrise en éducation. Montréal : Université du Québec à Montréal.
Bricault, A. (2001). Apport de l'approche psychogénétique de l'identité à l'administration
du Myers Briggs Type Indicator en contexte de transition de carrière, maîtrise en
éducation. Montréal Université du Québec à Montréal.
Charpentier, C. (2004). L'intervention thérapeutique en psychogénétique : l'état de la
situation, maîtrise en éducation. Montréal : Université du Québec à Montréal.
Dagenais, D. (2003). L'apport de la théorie psychogénétique dans le processus de
coaching auprès des dirigeants, maîtrise en éducation. Montréal : Université du Québec
à Montréal.
Fellice, D. (1996). La fidélité de l’épreuve Groupements, maîtrise en éducation.
Montréal : Université du Québec à Montréal.
Grothé, J-M. (1997). Recherche exploratoire sur l’impact des programmes d’aide à
l’apprentissage sur la stabilité vocationnelle, maîtrise en éducation. Montréal :
Université du Québec à Montréal.
Lauzon, A. (1993). Influence de l’organisation catégorielle sur la stabilité des choix
scolaires lors du passage du secondaire au collégial, maîtrise en éducation. Montréal :
Université du Québec à Montréal.
Lauzon, L. (1996). Identité du moi et congruence du choix vocationnel : perspective
psychogénétique, maîtrise en éducation. Montréal : Université du Québec à Montréal.
Michiels, S. (1992). Étude exploratoire des relations entre l’organisation des schèmes
catégoriels et le rendement au travail chez des cadres intermédiaires québécois du
secteur privé, maîtrise en éducation. Montréal : Université du Québec à Montréal.
Navert, S. (1997). Étude de la relation entre l’identité vocationnelle et le statut d’emploi
chez les personnes ayant subi un traumatisme crânio-encéphalique, maîtrise en
éducation. Montréal : Université du Québec à Montréal.
Poulin, S. (2004). Étude exploratoire sur les caractéristiques entrepreneuriales des
travailleurs autonomes et leur persistance dans ce mode de travail, maîtrise en éducation.
Montréal : Université du Québec à Montréal.
217
Poupart, D. (2003). Les habiletés scolaires, le développement identitaire et les résultats
scolaires des garçons et des filles de 3e secondaire, maîtrise en éducation. Montréal :
Université du Québec à Montréal.
Staiculescu, R., (2011). La persévérance scolaire des adultes (immigrants récents et non
immigrants) dans un contexte d'éducation des adultes et de formation continue, doctorat
en éducation. Montréal : Université du Québec à Montréal.
Therrien, M. (2001). Étude sur la relation entre le type écologiste du Guide de recherche
d'une orientation professionnelle, la carence affective et la difficulté de distanciation
affective, maîtrise en éducation. Montréal: Université du Québec à Montréal.
218
ANNEXE 1
219
ÉLÈVES HANDICAPÉS OU EN DIFFICULTÉ D'ADAPTATION OU
D'APPRENTISSAGE (EHDAA)
Le terme EHDAA, est un terme utilisé par le MELS dans les systèmes préscolaire,
primaire et secondaire. Ce terme est également celui utilisé pour le financement de ces
étudiants.
Élèves handicapés Élèves en difficultés
Déficience atypique
Déficience auditive
Déficience intellectuelle moyenne à
sévère
Déficience intellectuelle profonde
Déficience langagière
Déficience motrice grave
Déficience motrice légère ou
organique
Déficience visuelle
Troubles envahissants du
développement
Troubles relevant de la
psychopathologie
Troubles graves du comportement
(sans entente MELS MSSS)
Élève reconnu handicapé au sens
de la Loi assurant l’exercice des
droits des personnes handicapées
en vue de leur intégration scolaire,
professionnelle et sociale
Plan d’intervention sans code
Pour plus d’informations : http://www.mels.gouv.qc.ca/dgfj/das/orientations/pdf/19-
7065.pdf
ÉLÈVES AVEC BESOINS PARTICULIERS (ÉBP)
ET CLIENTÈLE ÉMERGENTE
Le terme ÉBP est l'équivalent collégial du terme EHDAA au secondaire.
Le terme « étudiants avec besoins particuliers » (ÉBP) désigne l'ensemble des étudiants
présentant un trouble, un handicap ou une déficience requérant des accommodements
particuliers. Dans le milieu de l'éducation collégial, le terme le plus souvent rencontré est
celui de « étudiants ayant des besoins spécifiques » (ÉBS).
Un autre terme largement utilisé dans le réseau collégial est celui de « clientèle
émergente ». Ce concept regroupe les types de troubles ou de déficiences dont
l'augmentation est la plus marquée dans le réseau collégial. Cette notion inclut les
étudiants atteints d'un trouble de santé mentale (TSM), d'un trouble d'apprentissage (TA)
220
ou d'un trouble déficitaire de l'attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). Au départ, la
notion de population étudiante émergente excluait les TDAH de sa définition, mais a fini
par les y inclure par la force du nombre.
Notions divergentes de personne handicapée :
La notion de handicap la plus large est celle employée par la Charte. De l'évolution de la
jurisprudence a émergé une définition incluant, selon l'avis juridique confidentiel
consulté, de tels cas : les limitations de nature psychologique, physique, intellectuelle ou
mentale, les limitations découlant de perceptions, de mythes ou de stéréotypes et les
limitations de nature temporaire, comme la dépression ou la dépendance face à l'alcool ou
une drogue.
On voit donc ici que pour être considéré comme handicapé ou sens de la Charte, le
handicap peut aussi bien être temporaire que seulement perçu. Cette définition large,
puisqu'elle provient de la Charte, est celle qui détermine s'il y a discrimination ou non.
La définition de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées en vue
de leur intégration scolaire, professionnelle et sociale est plus restrictive que celle de la
Charte, mais beaucoup moins que celle du MELS. La Loi, à son article 1 g), définit la
personne handicapée comme : « toute personne ayant une déficience entraînant une
incapacité significative et persistante et qui est sujette à rencontrer des obstacles dans
l'accomplissement d'activités courantes. » Cette définition réfère au sens courant de
« personne handicapée » et est suffisamment large pour être interprétée et étendue à
plusieurs cas.
Finalement, la définition de personne handicapée du MELS, destinée à baliser le
financement, est très restrictive. Cette définition n'inclut que les étudiants ayant une
déficience auditive, visuelle, motrice ou organique. Cette définition ne comprend qu'une
partie des personnes réellement atteintes d'un handicap ou d'une déficience.
Source : Fédération Étudiante Collégiale du Québec, (FECQ, 2011). Pour une éthique de
l’égalité des chances. Recherche sur les étudiants avec besoins particuliers. 62e
congrès ordinaire, Collège Ahuntsic. Montréal,Québec.
Et
http://www.mels.gouv.qc.ca/sections/publications/publications/Ens_Sup/Affaires_univers
itaires_collegiales/PortraitEtudHandBesoinsEmergentsEnsPostsec_RapportSyn.pdf
221
ANNEXE II
222
Invitation IDENTITÉ
Bonjour,
Dans le cadre de mon essai, portant sur la pratique professionnelle des conseillers
d’orientation utilisant l’épreuve Groupements dans leur pratique, je suis à la recherche
de huit participant(e)s désirant partager son expérience lors d’une entrevue semi-
structurée d’une durée approximative d’une heure. Les critères recherchés sont :
Être conseiller ou conseillère d’orientation
Utiliser l’épreuve Groupements depuis une dizaine d’années
Habiter Montréal, Laval ou la Montérégie
J’aimerais également pouvoir interroger des conseillers d’orientation venant des
différents secteurs de pratique (comme l’éducation, l’employabilité, l’organisationnel, la
réadaptation ou la pratique privée) et utilisant l’épreuve Groupements auprès de
différentes clientèles, dont les immigrants, les décrocheurs et la clientèle ayant (ou ayant
eu) des difficultés au niveau de la santé mentale.
Mes objectifs spécifiques de recherche sont :
Décrire l’expérience d’appropriation de l’épreuve Groupements des conseillers d’orientation.
Analyser les contextes et les procédures d’utilisation de l’épreuve Groupements
des conseillers d’orientation ainsi que les réactions types des clients.
Présenter les motivations sous-jacentes à l’utilisation de l’épreuve Groupements.
Comprendre les perceptions des conseillers d’orientation quant à leur rôle face à l’intervention sur l’identité.
Si cela vous intéresse, vous pouvez me contacter via mon courriel UQAM pour de plus
amples informations. Je pourrai également vous remettre un formulaire d’information (et
de consentement si vous désirez participer) et vous aurez la possibilité de consulter les
questions de l’entrevue avant de confirmer votre participation à la recherche. Vous
pouvez également remettre cette invitation à des collègues dont vous jugez que la
participation à cette recherche serait intéressante.
Veuillez svp, me contacter le plus tôt possible, d’ici le 15 février 2013. Il me fera plaisir
de répondre à vos questions, ou mieux, de vous rencontrer!
Merci.
Nadine Drolet [email protected]
223
ANNEXE III
224
GRILLE DE COTATION DE L’ÉPREUVE GROUPEMENTS
Groupements aux périodes III et IV
1. Tisser une couverture 20. Ajuster des lunettes 2. Écrire de la poésie 21. Mettre en place un système pour assurer la sécurité d’un député 3. Conseiller des personnes qui ont des problèmes d’orientation 22. Vendre des jouets pour les enfants 4. Convaincre quelqu’un d’acheter un produit 23. Mener des expériences sur des animaux 5. Changer le système de refroidissement d’un réfrigérateur 24. Superviser un groupe de travailleurs 6. Présider une assemblée 25. Perforer des feuilles de papier 7. Isoler un plafond 26. Écouter des gens qui vous parlent de leurs problèmes 8. Décorer un appartement 27. Compiler les résultats d’un sondage 9. Localiser la source de pollution d’une rivière 28. Transporter des blessés 10. Empiler des marchandises 29. Démonter un carburateur pour le réparer 11. Dessiner de nouvelles robes 30. Tenir à jour un inventaire 12. Raconter des histoires 31. Compter des clous 13. Accorder un piano 32. Interpréter un test d’intelligence 14. Classer des échantillons de terre 33. Veiller à l’application de normes administratives 15. Soigner un blessé 34. Assister une personne handicapée 16. Analyser des échantillons de terre 35. Installer une prothèse auditive 17. Observer le comportement de jeunes délinquants 36. Mémoriser ses tables de multiplication 18. Remplir une machine à laver le linge 37. Étudier les coutumes d’un peuple primitif
19. Coordonner la vérification de rapports d’impôt
1 Les activités entre parenthèses peuvent être trouvées dans ces groupements. 2 Les activités soulignées marquent le C à chacune des périodes où elles se retrouvent.
Humaine
Humaine
Objet
Physique
Symbolique
Physique
Physique
Physique
Abstrait
Concret
Psychologique
Idée
(1)- 10 - 14 - 18 -
25 -(28) - 30 - 31
(1)- 5 - 7 - 13 -
29 - 31
9 - 14 - 16 - 23 - 36
1 - 8 - 11 - (13) -
25 - (37)
15 - (20) - (21) - 28 -
34 - (35)
4 - 10 - 22 - (30)
20 - 33- 35
(17) - 27 - 32 - 37
2 - 12 - 13
3 - 17 - 26 - (32) - (37)
6 - (19) - 21 -
24 - (27) - (30)
(33)
19 - (27) - 30 - (33) -
36
36 -
(1) - 5 - 7 - 13 -
20 - 21 - (25) -
28 - 29 - 35
9 - 16 - 17 -
23 -32 - 37
1 - 2 - 8 - 11 - 12
3 - 15 - 26 - 34
(3) - 4 - 6 - (12) - 19 - (21) - 22 -
(23) - 24 - 33
(1) - 10 - 14 - 18 25 - 27 - 30 - 31 -36
225
ANNEXE IV
226
UQÀM
FORMULAIRE D’INFORMATION ET DE CONSENTEMENT (participant majeur)
« Les pratiques efficientes des conseillers d’orientation utilisant
l’épreuve Groupements dans le cadre de leur fonction »
IDENTIFICATION
Étudiante responsable de la recherche :
Chercheur responsable du projet : Nadine Drolet
Programme d’enseignement : Maîtrise en carriérologie
Adresse courriel : [email protected]
Téléphone : 514-425-3939
Supervisions de la recherche :
Responsable de la supervision : Louis Cournoyer
Directeur des unités de programmes en
développement de carrière
Professeur (counseling de carrière)
Adresse courriel : [email protected]
Téléphone : 514-987-3000 p.3994
BUT GÉNÉRAL DU PROJET ET DIRECTION
Vous êtes invité(e) à prendre part à ce projet visant à explorer et décrire la pratique
professionnelle des conseillers d’orientation utilisant l’épreuve Groupements dans le
cadre de leur fonction. Plus spécifiquement, ce projet s’intéresse à :
227
a) Décrire l’expérience d’appropriation de l’épreuve Groupements des conseillers
d’orientation.
b) Analyser les contextes et les procédures d’utilisation de l’épreuve Groupements des
conseillers d’orientation ainsi que les réactions des clients.
c) Présenter les motivations sous-jacentes à l’utilisation de l’épreuve Groupements.
d) Comprendre les perceptions des conseillers d’orientation quant à leur rôle face à
l’intervention sur l’identité
Ce projet est réalisé dans le cadre de la production d’un rapport d’activité dirigée de la
maîtrise en carriérologie de l’Université du Québec à Montréal. La direction en est
assurée par Louis Cournoyer, Directeur des unités de programmes en développement de
carrière et professeur.
PROCÉDURE(S) OU TÂCHES DEMANDÉES AU PARTICIPANT
Votre participation consiste à donner un entretien individuel au cours duquel il vous sera
demandé de décrire votre expérience passée en tant que conseiller d’orientation utilisant
l’épreuve Groupements, votre expérience actuelle et votre vision de l’intervention sur
l’identité. Cet entretien est enregistré numériquement avec votre permission et prendra
environ 1 heure 15 de votre temps. Le lieu et l’heure de l’entretien sont à convenir avec la
responsable du projet. La transcription sur support informatique qui en suivra ne
permettra pas de vous identifier. À votre demande, une copie du rapport peut vous être
envoyée à la fin de sa production.
AVANTAGES ET RISQUES
Votre participation contribuera à l’avancement des connaissances par une meilleure
compréhension de l’utilisation et de l’apport de l’épreuve Groupements pour les
conseillers d’orientation, quelques soient leur secteur de pratique et leurs fonctions.
C’est aussi un moment privilégié pour réfléchir à votre pratique et vous positionner ou
vous re-positionner face aux avantages et inconvénients de l’utilisation de l’outil.
Suite à la rédaction finale, vous pourrez explorer les différentes représentations des autres
conseillers d’orientation ayant participé à la recherche, ce qui peut vous informer sur les
différentes pratiques de l’outil, selon les secteurs de pratique et les fonctions d’autres
conseillers d’orientation.
228
Il n’y a pas de risque d’inconfort important associé à votre participation à cette rencontre.
Vous devez cependant prendre conscience que certaines questions pourraient faire
ressortir les inconforts que vous avez face à l’utilisation de l’épreuve Groupements. Cela
n’est pas négatif en soi puisque ces informations sont constructives et permettent d’avoir
une représentation concrète de votre pratique. Vous demeurez libre de ne pas répondre à
une question que vous estimez embarrassante sans avoir à vous justifier. Une ressource
d’aide appropriée pourra vous être proposée si vous souhaitez discuter de votre situation.
Il est de la responsabilité de la responsable du projet de suspendre ou de mettre fin à
l’entretien si elle estime que votre bien-être est menacé.
ANONYMAT ET CONFIDENTIALITÉ
Il est entendu que les renseignements recueillis lors de l’entretien sont confidentiels et
que seuls, la responsable du projet, Nadine Drolet et son directeur de recherche, Louis
Cournoyer, auront accès à votre enregistrement et au contenu de sa transcription. Le
matériel de recherche (enregistrement numérique et transcription codés) ainsi que votre
formulaire de consentement seront conservés sous clé par la responsable du projet pour la
durée totale du projet. Les enregistrements sonores seront détruits suite à la transcription
informatique et les formulaires de consentement seront détruits 5 ans après les dernières
publications.
PARTICIPATION VOLONTAIRE
Votre participation à ce projet est volontaire. Cela signifie que vous acceptez de
participer au projet sans aucune contrainte ou pression extérieure et que par ailleurs vous
être libre de mettre fin à votre participation en tout temps au cours de cette recherche.
Dans ce cas les renseignements vous concernant seront détruits. Votre accord à participer
implique également que vous acceptez que la responsable du projet puisse utiliser aux
fins de la présente recherche (articles, mémoire, essai ou thèse, conférences et
communications scientifiques) les renseignements recueillis à la condition qu’aucune
information permettant de vous identifier ne soit divulguée publiquement à moins d’un
consentement explicite de votre part.
COMPENSATION FINANCIÈRE
Votre participation à ce projet est offerte gratuitement. Un résumé des résultats de
recherche vous sera transmis au terme du projet.
229
DES QUESTIONS SUR LE PROJET OU SUR VOS DROITS?
Vous pouvez contacter le responsable du projet au numéro (514) 425-3939 pour des
questions additionnelles sur le projet. Vous pouvez également discuter avec le directeur
de recherche des conditions dans lesquelles se déroule votre participation et de vos droits
en tant que participant de recherche.
Le projet auquel vous allez participer a été approuvé au plan de l’éthique de la recherche
avec des êtres humains. Pour toute question ne pouvant être adressée au directeur de
recherche ou pour formuler une plainte ou des commentaires, vous pouvez contacter le
Président du Comité d’éthique de la recherche pour étudiants (CÉRPÉ), par
l’intermédiaire de son secrétariat au numéro (514)-987-3000 # 1646 ou par courriel à :
REMERCIEMENTS
Votre collaboration est importante à la réalisation de ce projet et nous tenons à vous en
remercier.
230
UQÀM
CONSENTEMENT LIBRE ET ÉCLAIRÉ
« Les pratiques efficientes des conseillers d’orientation utilisant
l’épreuve Groupements dans le cadre de leur fonction »
Je __________________________________, reconnais avoir lu le présent formulaire de
consentement et consens volontairement à participer à ce projet de recherche. Je
reconnais aussi que la responsable du projet a répondu à mes questions de manière
satisfaisante et que j’ai disposé suffisamment de temps pour réfléchir à ma décision de
participer. Je comprends que ma participation à cette recherche est totalement volontaire
et que je peux y mettre fin en tout temps, sans pénalité d’aucune forme, ni justification à
donner. Il me suffit d’en informer la responsable du projet.
Signature du participant : Date :
Nom (lettres moulées) et coordonnées :
Je déclare avoir expliqué le but, la nature, les avantages, les risques du projet et avoir
répondu au meilleur de ma connaissance aux questions posées.
Signature de la responsable du projet : Date :
Nom (lettres moulées) et coordonnées :
Un exemplaire du formulaire d’information et de consentement signé doit être remis au participant.
231
ANNEXE V
232
GUIDE D’ENTRETIEN
DONNÉES SOCIODÉMOGRPAHIQUES ET PROFESSIONNELLES
1. SEXE : HOMME
FEMME
2. CATÉGORIE D’ÂGE :
20-29 ans
30-39 ans
40-49 ans
50-59 ans
60 ans et plus
3. ANNÉES
D’UTILISATION DE
L’ÉPREUVE
GROUPEMENTS
CONSEILLER D’ORIENTATION
10 à 15
16 à 20
21 à 25
25 et +
4. SECTEUR DE PRATIQUE Éducation
Employabilité
Privé
Organisationnel
Réadaptation
Objectifs spécifiques :
1- Décrire l’expérience d’appropriation de l’épreuve Groupements de conseillers d’orientation
(Questions -2)
2- Analyser les contextes et les procédures d’utilisation de l’épreuve Groupements des conseillers
d’orientation ainsi que les réactions (effets) des clients (Questions 4-5-6-7 et peut-être 12)
3- Présenter les motivations sous-jacentes des conseillers d’orientation à l’utilisation de l’épreuve
Groupements (Questions 3-8 et peut-être 12)
4- Comprendre les perceptions des conseillers d’orientation quant à leur rôle face à l’intervention sur
l’identité (Question 9-10-11)
233
Question 1
À titre de conseiller d’orientation, qu’est-ce qui vous a incité INITIALEMENT à vous
former et à utiliser l’épreuve Groupements dans le cadre de votre pratique d’intervenant ?
Relance : Quelle pertinence pouvait avoir cet outil plutôt qu’un autre ?
Question 2
Comment s’est passé votre apprentissage de l’utilisation de l’épreuve Groupements en
contexte d’orientation scolaire et professionnelle ?
Relance : Comment s’est fait votre progression dans la maîtrise de l’outil ?
Relance : Quelles furent vos principaux apprentissages en cours de route ?
Relance : Quelles furent vos belles découvertes ? Quelles furent vos principales
difficultés ?
Question 3
Qu’est-ce qui fait que vous utilisez toujours AUJOURD’HUI l’épreuve Groupements
après toutes ces années ?
Relance : Quels sont les caractéristiques de l’outil qui vous motivent à maintenir
l’usage de cet outil dans le cadre de vos interventions en orientation scolaire et
professionnelle ?
Relance : Quels sont les avantages que vous voyez pour vous à en maintenir
l’usage ?
Question 4
Quelle place occupe l’épreuve Groupement dans votre travail de conseiller d’orientation?
Relance : Quelle fréquence d’utilisation ? (avec tous vos clients, avec certains
clients répondants à certaines problématiques ? Si c’est le cas, lesquelles ?)
234
Relance : En faites-vous l’usage avec certaines clientèles dites plus lourdes ou
particulières (ex. : personnes immigrantes, problématique de santé mentale,
épuisement professionnel, etc.) ? Y a-t-il des restrictions, raisons de la non-
utilisation?
Temps alloué au perfectionnement, en lien avec l’outil? Rapport écrit des résultats
donné aux clients?
Relance : Comment l’épreuve Groupements, comme outil et l’approche
psychogénétique influencent-ils votre façon de cibler vos interventions ?
Question 5
Vous arrive t-il de combiner l’utilisation de l’épreuve Groupements avec d’autres outils
psychométriques ou avec d’autres activités d’orientation ?
Si oui, lesquels ? Pourquoi combiner ces autres outils ou activités avec l’ÉG ?
Concrètement, comment vous les combinez dans le cadre d’interventions ?
Si non, pourquoi ?
Question 6
Imaginons que vous rencontrez un client, comment présentez-vous l’ÉG à vos clients ?
Relance : Sur quels aspects misez-vous le plus lors de cette présentation ?
Pourquoi ?
Relance : Quelles sont les questions qui émergent le plus souvent chez eux et
comment y répondez-vous ?
Question 7
Quels sont les réactions types des clients à la suite d’une interprétation de résultats à
l’ÉG?
235
Relance : Quelles sont les réactions possibles sur le plan cognitif, sur le plan
affectif, sur le plan comportemental ou même sur le plan corporel ?
Relance : Quelles sont les réactions positives que vous observez le plus ?
Pourquoi en est-il ainsi selon vous ?
Relance : Quelles sont les réactions plus négatives que vous observez le plus ?
Pourquoi en est-il ainsi selon vous ?
Question 8
AUJOURD’HUI, quels sont les obstacles que vous pouvez rencontrer dans l’utilisation
de l’ÉG en contexte d’évaluation et-ou d’intervention en orientation scolaire et
professionnelle ?
Relance : Si non, qu’est-ce qui fait que vous ne rencontrez plus ces obstacles?
Relance : Si oui : comment gérez-vous ces obstacles ? Qu’est-ce que vous faites
par rapport à cela ? Est-ce les mêmes obstacles qu’au début?
Question 9
Croyez-vous qu’il soit nécessaire de maîtriser la théorie de l’approche psychogénétique
pour être efficace dans l’utilisation de l’épreuve Groupements? ou est ce que l’approche
psychogénétique en lien avec l’outil (EG) vous aide au niveau de l’intervention? En
quoi?
Relance : Si oui, pourquoi selon vous ?
Relance : Si non, pourquoi selon vous ?
Question 10
Croyez-vous qu’il soit nécessaire de devenir psychothérapeute pour intervenir
adéquatement avec l’approche psychogénétique?
236
Relance : Si oui, pourquoi selon vous ?
Relance : Si non, pourquoi selon vous ?
Question 11
Sachant que la théorie psychogénétique propose que pour être capable de transposer son
identité en termes professionnels il faut d’abord qu’elle soit construite et équilibrée, et
connaissant les impacts des difficultés associées aux protocoles non réflexifs, comment
percevez-vous votre rôle lorsque vous êtes face à une personne dont le protocole présente
une identité en déséquilibre?
Question 12
Pensez-vous utiliser l’épreuve Groupements et l’approche psychogénétique dans
l’avenir?
Relance : Qu’est-ce qui ferait, pourrait faire, que vous ne l’utiliseriez plus?
Question 13 (question pour clore l’entrevue) :
Au regard de tout ce que nous avons discuté ensemble aujourd’hui ou peut être au regard
de ce nous avons pu oublier de discuter, qu’est-ce que vous jugez important de retenir sur
l’utilisation de l’ÉG après tant d’années ?
Merci de votre participation !
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ANNEXE VI
238
Protocole d’entretien
1. Arrivée, présentation et remerciement pour la participation
2. Revoir avec les participants la fiche d’information, dont :
a) Le but de l’entretien
b) Les avantages et inconvénients
c) La confidentialité et l’anonymat
d) Le déroulement de l’entretien (temps alloué, questions-réponses, ne pas être
dérangé)
e) La possibilité de retirer son consentement à tout moment, ou d’arrêter
l’enregistrement
3. Revoir leurs intentions concernant le rapport final
4. Demander aux participants s’ils ont des questions et y répondre
5. Faire signer le formulaire de consentement libre et éclairé
6. Remplir les informations générales (âge, formation, etc.) sur le Guide d’entretien
7. Installer le dictaphone numérique pour l’enregistrement
8. Demander au répondant s’il est prêt pour la suite; si oui, débuter
Une fois l’entrevue terminée
9. Cesser l’enregistrement
10. Demander aux participants comment ils se sentent, s’ils ont des questions ou
commentaires
11. Les remercier et quitter
239
ANNEXE VII
240
Les C.O. présentent l’épreuve Groupements :
« Quand j’transmets les résultats, j’prends quand même le temps d’expliquer que le
cerveau catégorise l’information. J’tombe pas dans l’aspect plus psychologique de
l’épreuve projectif mais j’vais expliquer que leur cerveau utilise une grille pour donner de
l’infor…, pour e catégoriser l’information, […] y m’ont donner accès à leur grille. […] et
que cette grille là me donne des informations sur la, sur leur identité, sur leur
personnalité. »
« L'outil, j'leur dis que pour moi c't'un outil de travail qui me permet de mieux
comprendre comment à c'moment-ci y fonctionnent pis comment j'pourrais mieux les
accompagner... »
« J’aimerais ça (que) vous vous laissiez aller dans ce genre d’évaluation là qui est plus au
niveau de la personne […] pis de l’identité, pis de comment vous organisez vos
expériences de vies. Quand j’explique (quand elle interprète les résultats) l’épreuve
Groupements, euh, j’explique un peu c’est quoi, en après, surtout c’est basé sur
l’approche psychogénétique, qu’est-ce que c’est… »
« Alors j’leur dis que l’épreuve Groupements n’est pas un test, que c’est un outil
diagnostic qui nous permet de comprendre comment les personnes construisent la réalité
qui les entoure et aussi la réalité intérieure, leur réalité dans l’fond. E… que c’est un outil
qui me parle de la…on appelle ça la structure identitaire, donc qui me parle de leur
structure identitaire, de la stabilité de leur structure identitaire et des besoins qui peuvent
en découler. Que cet outil-là me permet de comprendre finalement e…la partie non-
consciente de leur personnalité et e…mais que ça ne me parle pas de leur inconscient
c’qui est différent… »
« […] quels impact ça va avoir, ça va aussi me permettre de voir les types
d’environnements qui devraient te convenir le mieux […] compte tenu qu’on est en
orientation, c’est important. Si j’peux me permettre d’aller un p’tit peu plus loin, pour
ceux que j’sens qui a une introspection qui est un peu plus euh, qui est déjà là, ben là
j’leur dis on peut aussi aller voir quelles sont les difficultés, ça va nous aider à identifier
les difficultés qui fait que vous avez du mal à vous orienter par vous-même. »
241
« Ah j’leur dis que ça c’est pour voir leur potentiel d’action, tsé j’leur explique toute la
démarche, […] tu intuitionnes peut-être des choses de toi que là tu vas pouvoir mettre des
mots dessus. »
« Bon fac c’pas un test d’intérêt c’est un test qui va me permettre à moi de savoir quels
sont tes besoins comme personne, pour être bien dans un travail et quels sont tes
difficultés potentiels qui peuvent affecter l’atteinte de tes objectifs. »
« J’dis souvent que c’est quelqu’chose, un outil parapluie qui va m’permettre d’avoir un
paquet d’information, de données sur l’individu et que ça m’permet de voir comment tout
ça se met en action, de comprendre où sont les ressources, de comprendre où sont les
défis de développement à c’te stade-ci, c’est le développement avant tout, c’est pas un
outil d’évaluation de sélection, donc c’est pas un outil de pure vérité, c’est un outil qui va
me permettre de comprendre la dynamique de ces éléments là et dans la rétroaction. »
242
ANNEXE VIII
243
LES « PERLES » DES C.O.
Des petites phrases soutirées des rencontres, elles sont instructives, drôles,
inspirantes…
Concernant la motivation à utiliser l’ÉG dans sa pratique :
Moi ma préoccupation première c’est de diminuer la souffrance et d’expliquer le mieux
possible, de comprendre c’qui se passe dans la peau de la personne, de me mettre dans
son monde à elle, de prendre sa vie comme une enveloppe sur moi. Pis l’identité, ben
c’est ça!
Ce qui m’incite aussi à continuer d’utiliser l’ÉG c’est quand j’donne l’interprétation à
froid, ça fait une heure, même pas, des fois ça fait juste une demi-heure que j’connais la
personne pis j’y dis un truc, pis là le client dit « ben là, comment tu sais ça, t’as vu ça
dans les cartes? »
Concernant Luc Bégin :
Quoi que, là tu vois en t’en parlant, j’me souviens des fois de mettre dis « Qu’est-ce que
ça aurait été si j’n’avais pas rencontré Luc? » parce que c’est sûr que Luc, y m’a fait aller
dans des zones que a priori, j’serais sans doute pas allée. Il m’a demandé e…ça m’a
demandé de sortir de certaines zones de conforts. Avec Luc, j’avais pas l’choix de
m’questionner…
Lors de la formation initiale j’ai accroché à Luc, à la psychogénétique, à sa vison des
choses, à sa vision de l’identité, ca répondu à des questions que j’me posais et que
j’voyais pas comment j’pouvais y répondre. Pis les c.o. que j’avais vu à date ben c’était
très technique, c’est on passent des tests pis j’avais un peu cette vision là,
malheureusement des c.o.; « on passe des tests pis on dit après aux gens pas quoi
faire mais presque », bon fa que lui il m’a apporté une vision de l’orientation vraiment
très différente, pis c’est aussi là dedans que j’ai embarqué.
244
J’ai commencé par connaître l’homme avec sa théorie sur l’identité pis…comment
j’dirais ça, à partir de là on dirait que j’ai commencé par me connaître, c’est lui qui m’a
comme e… qui m’a, qui m’a fait découvrir l’orientation au fond parce que moi j’m’en
allais en information scolaire et professionnelle, j’pensais jamais aller à la maîtrise, fa
que c’est comme j’avais l’impression que j’me…qu’à travers lui j’me découvrais
finalement…
Concernant le rôle du c.o. face à l’intervention sur l’identité :
Y faut voir encore là, le contexte dans lequel on est (phrase dite lentement, avec un ton de
voix très affirmatif). Fa qu’c’est plus comment utiliser cette information là pis la
responsabilité de l’utiliser à bon escient.
Pour moi c'est comme si y avait de l'information scolaire et professionnelle pis y avait la
psychologie. Ok? Pis entre les deux c’tait comme un vide, mais là dans c'cours là j'ai
découvert que l'orientation ça servait à quelque chose dans la vie et la façon dont lui (Luc
Bégin) l'abordait, en lien avec l'identité, pour moi c'était une approche qui vraiment était
révélatrice et me convenait vraiment beaucoup. Donc, j’ai décidé que j’allais à la
maîtrise…
Mais mon mandat c’t’un mandat de conseillère d’orientation et moi je considère qu’on
s’oriente pas avec les genoux, on s’oriente avec la tête fa que j’veux dire si faut que
j’touche la tête de quelqu’un je vais y toucher, mais naturellement y faut que ça soit en
toute connaissance de cause, que la personne veuille ça aussi, tsé j’vas jamais imposer
quoi que se soit à quelqu’un…
Moi j’ai toujours un peu de problème avec ma job, j’le dis depuis le début, j’ai toujours
l’impression d’être une psychologue de l’orientation et non une conseillère d’orientation!
245
Concernant la façon d’interpréter l’EG :
On dit que l’épreuve nous ouvre le spontané, l’automatique, moi j’considère que dans
l’interprétation je dois faire appel à mes ressources spontanées et automatiques. Fa que
j’peux pas être dans mon analytique pis mon…j’veux dire, faut que je l’aille intégré pour
que ça sorte fluide. C’est sûr des fois y a des épreuves où est-ce que les mots nous
viennent moins facilement, ça arrive, mais là où j’suis rendue, c’est rare. C’est vraiment
rare.
Si tu fais de la psychogénétique, mais sans t’affirmer c’est pas possible en fait tu peux
pas, ça fait partie de c’qu’on développe en psychothérapie, notre capacité à s’affirmer
(claque sur la table) quand c’est l’temps et notre capacité au contraire à être une bonne
maman quand c’est l’temps.
Où j’ai un impact, c’est quand j’fais d’la sélection pour un poste de directeur général ou
un poste de directeur de service, je r’garde l’ensemble du profil, il se différencie très peu
au niveau des ressources intellectuelles, au niveau de la personnalité, ça ressemble pas
mal, mais quand tu vois qui a des différences fondamentales au niveau du profil de
l’épreuve Groupements, c’est là que j’interviens en disant voici c’que vous allez avoir
avec c’t’individu là, voici où l’organisation va vous amener, l’identité de l’individu va
avoir c’t’impact là dans l’organisation.
C’est pas l’épreuve Groupements en soit qui est intéressante, ben c’t’intéressant oui
parc’que Luc a réussi à concrétiser un outil qui permet d’aller beaucoup plus loin dans le
diagnostic, d’asseoir le diagnostic, mais c’est dans la relation que ça s’passe, c’est dans la
relation avec les gens, c’est là qu’on voit comment l’identité s’est construite, se déploie
dans la vie de tous les jours, dans l’action là.
246
Concernant la réaction des gens
… parce qu’en même temps, tsé, les gens sont pas fous. Quelqu’un qui a quarante ans,
qui a jamais su c’qui voulait faire de sa vie y s’doute bien que j’vais rien faire moi en
cinq minutes, y sait bien que c’est pas des tests, le XXX pis la XXX qui va lui dire ou
est-ce qu’il faut aller. Quand j’lui nomme les malaise et les difficultés qu’il a, là les yeux
s’allument, c’est comme enfin, enfin, on me dit c’est quoi mon problème!
Il y a un monsieur que j’évaluais pour un poste de V.-P., il avait quand même une
certaine prestance, un statut, qui m’a dit : « j’me sens tout nu devant vous là Madame ! »
« Juste avec le test de jeu de carte là, que vous avez vu ça ? »
À mon avis, c’qui y a de vraiment intéressant dans c’travail là, tu sais quand y a des cas
d’élèves ou ça va pas la motivation, la direction, au service pédagogique, va souvent me
d’mander d’être à la rencontre, d’avoir un portrait de l’élève et parfois l’élève j’le connais
pas, j’ai pas commencé a faire de rencontre avec lui, mais je lui ai fait faire l’épreuve
Groupements. Et c’est arriver à plusieurs reprises, où des parents m’ont dis « Mais
Madame, c’est parce que je pense que vous l’connaissez autant que moi ».
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