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Journal de Radiologie Diagnostique et Interventionnelle (2013) 94, 100—102 LETTRE / Pédiatrie Duplication iléale P.-H. Vivier a,, M. Beurdeley b , B. Bachy b , C. Aguilella c , V. Ickowicz c , F. Lemoine d , J.-N. Dacher a a Service d’imagerie pédiatrique et fœtale, CHU Charles-Nicolle, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France b Service de chirurgie pédiatrique, CHU Charles-Nicolle, 1, rue de Germont, 76031 Rouen cedex, France c Service de radiologie, hôpital du Belvédère, 72, rue Louis-Pasteur, 76130 Mont-Saint-Aignan, France d Service d’anatomopathologie, CHU Charles-Nicolle, 1, rue de Germont, 76031 Rouen, France MOTS CLÉS Kyste ; Iléon ; Échographie ; Enfant ; Anomalies congénitales La découverte d’une image kystique intra-abdominale est relativement fréquente en anté- et périnatal. Nous rapportons un cas typique de duplication iléale. La découverte précoce (deuxième trimestre de grossesse), l’aspect et la localisation d’un kyste intrapéritonéal ont permis d’évoquer ce diagnostic en prénatal. Le diagnostic a été posé en postnatal grâce à une sémiologie échographique caractéristique. Observation Lors d’une échographie obstétricale systématique réalisée à 22 semaines d’aménorrhée (Fig. 1) chez une femme de 32 ans, une image kystique centimétrique sans calcification pariétale est découverte en fosse iliaque droite chez un fœtus de sexe féminin. Une dupli- cation iléale avait été évoquée en raison de la localisation en fosse iliaque droite. Le diagnostic de kyste ovarien n’avait pas été retenu en raison du terme de la grossesse. L’enfant, à 40 semaines d’aménorrhée, était en parfait état général. Une échographie a été réalisée à 13 jours de vie. L’échographie (Fig. 2) a retrouvé une image kystique située sur l’iléon terminal dont l’aspect est très évocateur de duplication iléale non compliquée. DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.diii.2012.04.022. Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc ¸aise de cet article, mais celle de l’article original paru dans Diagnostic and Interventional Imaging, en utilisant le DOI ci-dessus. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (P.-H. Vivier). 2211-5706/$ see front matter © 2012 Éditions françaises de radiologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.jradio.2011.12.011

Duplication iléale

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Page 1: Duplication iléale

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ournal de Radiologie Diagnostique et Interventionnelle (2013) 94, 100—102

ETTRE / Pédiatrie

uplication iléale�

P.-H. Viviera,∗, M. Beurdeleyb, B. Bachyb,C. Aguilellac, V. Ickowiczc, F. Lemoined, J.-N. Dachera

a Service d’imagerie pédiatrique et fœtale, CHU Charles-Nicolle, 1, rue de Germont,76031 Rouen cedex, Franceb Service de chirurgie pédiatrique, CHU Charles-Nicolle, 1, rue de Germont, 76031 Rouencedex, Francec Service de radiologie, hôpital du Belvédère, 72, rue Louis-Pasteur, 76130 Mont-Saint-Aignan,Franced

Service d’anatomopathologie, CHU Charles-Nicolle, 1, rue de Germont, 76031 Rouen, France

MOTS CLÉSKyste ;Iléon ;Échographie ;Enfant ;Anomaliescongénitales

La découverte d’une image kystique intra-abdominale est relativement fréquente en anté-et périnatal. Nous rapportons un cas typique de duplication iléale. La découverte précoce(deuxième trimestre de grossesse), l’aspect et la localisation d’un kyste intrapéritonéalont permis d’évoquer ce diagnostic en prénatal. Le diagnostic a été posé en postnatalgrâce à une sémiologie échographique caractéristique.

Observation

Lors d’une échographie obstétricale systématique réalisée à 22 semaines d’aménorrhée(Fig. 1) chez une femme de 32 ans, une image kystique centimétrique sans calcificationpariétale est découverte en fosse iliaque droite chez un fœtus de sexe féminin. Une dupli-cation iléale avait été évoquée en raison de la localisation en fosse iliaque droite. Lediagnostic de kyste ovarien n’avait pas été retenu en raison du terme de la grossesse.

L’enfant, né à 40 semaines d’aménorrhée, était en parfait état général.

Une échographie a été réalisée à 13 jours de vie. L’échographie (Fig. 2) a retrouvé uneimage kystique située sur l’iléon terminal dont l’aspect est très évocateur de duplicationiléale non compliquée.

DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.diii.2012.04.022.� Ne pas utiliser, pour citation, la référence francaise de cet article, mais celle de l’article original paru dans Diagnostic and Interventionalmaging, en utilisant le DOI ci-dessus.∗ Auteur correspondant.

Adresse e-mail : [email protected] (P.-H. Vivier).

211-5706/$ — see front matter © 2012 Éditions françaises de radiologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.oi:10.1016/j.jradio.2011.12.011

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Figure 1. Image échographique anténatale à 22 semainesd’aménorrhée. Image kystique de 9 mm de diamètre en fosse iliaquedroite. Le fœtus est positionné dos à droite (astérisque : rachis ;flèche : cordon ombilical) et tête en bas.

Figure 2. Image échographique axiale en fosse iliaque droite(sonde linéaire haute fréquence : 12 MHz) mettant en évidence laduplication iléale. Il existe un kyste anéchogène (astérisque blanc)associé à un renforcement postérieur des échos, avec un aspect dedouble paroi : hyperéchogène en interne (tête de flèche blanche) ethypoéchogène en externe (tête de flèche noire). Ce kyste est accoléà l’iléon terminal dont la lumière est bien visible (flèche blanche).

Figure 3. Photographie peropératoire. La duplication iléo-cæcale(tête de flèche) déforme la paroi de l’iléon terminal sur son bordmésentérique. L’appendice est tenu par la pince de droite.

Figure 4. Examen anatomopathologique de la duplication. Laduplication partage la même musculeuse (M) que l’iléon adjacent.La paroi interne de la duplication est composée d’une muqueuserudimentaire de type gastrique (tête de flèche). Astérisque gris :Ci

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Le cæcum (astérisque noir) est aisément reconnu grâce à sa positionet son aspect avec un contenu aérique net.

Une intervention chirurgicale a été pratiquée à j14 et aconfirmé l’existence d’une duplication iléale non commu-nicante de 2 cm de diamètre (Fig. 3), modérémentinflammatoire, comprimant la lumière iléale et venantau contact de la valvule de Bauhin. Une résection iléo-cæcale avec anastomose iléo-colique termino-terminale aété effectuée. L’examen anatomo-pathologique (Fig. 4)a confirmé la duplication iléale avec une musculeusecommune avec l’iléon, ainsi qu’une muqueuse rudimentairede type gastrique. Les suites opératoires ont été simples.

Discussion

Les duplications digestives sont des malformations raresavec une incidence de 1 pour 4500 naissances. Elles peuventse localiser n’importe où, de l’œsophage au rectum. La loca-

lisation la plus fréquente est l’iléon terminal comme dansle cas présenté. Les autres localisations classiques sont, parordre de fréquence décroissante, l’œsophage, le côlon, le

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entre du kyste. Astérisque noir : lumière iléale. Flèche : muqueuseléale.

éjunum, l’estomac et le duodénum. Les atteintes grêliquest coliques sont classiquement situées sur le bord mésen-érique de l’anse atteinte. La cause exacte des duplications’est pas parfaitement connue. L’hypothèse la plus probableerait un défaut de vacuolisation [1]. Lors de la sixièmeemaine de développement, une prolifération épithélialecclut totalement le tube digestif. Puis des vacuoles seéveloppent et fusionnent pour recanaliser complètementes anses à la neuvième semaine. Ainsi, l’existence d’uneuplication pourrait être liée à la persistance d’une vacuole.es duplications correspondent ainsi à une malformation seroduisant au cours le la phase embryonnaire. En consé-uence, elles peuvent être identifiées lors de la premièrechographie à 12 semaines d’aménorrhées sous la forme’un kyste, bien qu’en pratique la découverte de l’imageystique soit plus classique au deuxième trimestre.

La duplication peut communiquer ou non avec la lumièreu tube digestif adjacent. Les formes non communicantesont les plus fréquentes (80 % des cas) et sont kystiques

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t arrondies, alors que les formes communicantes sontlassiquement tubulaires. Les duplications sont souventécouvertes devant une image kystique en anténatal. La plu-art des duplications sont symptomatiques (vomissements,ouleurs) dans la première année de vie. Les duplicationseuvent être obstructives par compression directe de laumière du tube digestif adjacent mais également par inva-ination ou volvulus [2]. Les duplications peuvent également’infecter, saigner voire se perforer. L’hémorragie et la per-oration sont classiquement liées à une ulcération peptiqueecondaire à une hétérotopie de muqueuse gastrique au seine la duplication. La résection chirurgicale est la règle, yompris en l’absence de symptomatologie, compte tenu desisques de complications [3].

Chez l’enfant, une image kystique intrapéritonéaleu sous-péritonéale doit faire évoquer principalement unyste ovarien, une duplication digestive, un lymphangiomeystique, un diverticule de Meckel kystique, un kystemphalo-mésentérique, un kyste de l’ouraque ou un kysteiliaire. La clinique ainsi que la localisation permettent uneremière orientation. En cas de découverte anténatale, leerme est un élément d’orientation fondamental. En effet,es kystes ovariens qui sont les kystes intra-abdominaux leslus fréquents chez le fœtus n’apparaissent qu’au troisièmerimestre, contrairement aux autres formations kystiquesntra ou sous-péritonéales qui peuvent être présents quelue soit le trimestre. L’échographie est l’examen clé, per-ettant dans la grande majorité des cas de caractériser une

mage kystique intra-abdominale en duplication digestive.n effet, les parois du kyste correspondent à une paroi diges-ive, donc épaisse et stratifiée. La muqueuse interne estyperéchogène et la musculeuse est hypoéchogène, d’où unspect de « double paroi » ou de « couronne musculaire ».et aspect très évocateur est néanmoins non spécifique car

l peut parfois être observé en cas de kyste mésentérique,e kyste ovarien compliqué ou de diverticule de Meckel4,5]. Une paroi composée de cinq couches (muqueusenterne hyperéchogène, muqueuse externe hypoéchogène,ous muqueuse hyperéchogène, musculeuse hypoéchogènet séreuse hyperéchogène) est plus évocatrice mais plusarement observée [6]. L’étude du kyste avec une sondeaute fréquence prend ici tout son intérêt en post-natalomme en prénatal. Enfin, un péristaltisme des parois estgalement très évocateur, bien que rarement retrouvé enratique [6,7]. Par ailleurs il n’est pas toujours évident deistinguer de facon indiscutable un péristaltisme vrai dea paroi du kyste de mouvements péristaltiques de proxi-ité. En cas d’image kystique iléale, l’aspect stratifié de laaroi en cinq couches et le péristaltisme peuvent également’observer en cas de diverticule de Meckel. Un kyste parai-éal situé sur le bord mésentérique de l’anse est évocateur

e duplication alors qu’un diverticule de Meckel est toujoursur le bord antimésentérique de l’iléon.

Si la localisation est œsophagienne ou si le patient esteu échogène, un scanner ou une IRM pourront mettre en

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P.-H. Vivier et al.

vidence une image kystique para digestive, dont le signaliquidien peut être modifié par un contenu hémorragique ourotéique [3,8]. La paroi du kyste se rehausse. L’infiltratione la graisse périphérique est en faveur d’une infection. Enevanche, la présence d’un nodule intrakystique se rehaus-ant doit faire évoquer une transformation maligne [9].’IRM peut également être utile en anténatal lorsque l’imagest supracentimétrique, en précisant les rapports étroitsntre la duplication et la paroi digestive adjacente, notam-ent en cas d’examen échographique difficile.

onclusion

evant un kyste intra-abdominal l’échographie est l’examenlé, notamment chez l’enfant. L’utilisation d’une sondeaute fréquence facilite la mise en évidence d’une paroitratifiée qui permet d’évoquer le diagnostic de duplica-ion digestive. Le traitement est toujours chirurgical enaison des risques obstructifs, infectieux, hémorragiques ete dégénérescence.

éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

éférences

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