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LES GRANDS PERSONNAGES DU PALAIS-ROYAL Lucie-simplice-camille-Benoît desmoulins dénommé caMiLLe desMouLins avocat, journaliste, homme polique 18 e 17 e 16 e 18 e 19 e 21 e 20 e 1760 1794 L e lien entre camille desmoulins et le Palais-royal s’établit le 12 juillet 1789 par une déclaraon (mo- on) qui a lancé l’insurrecon aboussant à la prise de la Baslle deux jours plus tard. camille desmoulins a fait ses études au collège Louis Le grand à Paris en compa- gnie de robespierre. avocat comme ce dernier, il a 29 ans lorsqu’il est élu député pour représenter le tiers-etat aux etats-généraux convoqués par Louis XVi le 5 mai 1789. il milite au club des cordeliers avec danton dont il sera le secrétaire et ami. Le recru- tement de ce club est plus populaire que celui des jaco- bins où milite robespierre. Le 12 juillet 1789, de retour de Versailles, il monte sur une chaise à la terrasse du café de foy (situé aux n os 57 à 60 de la galerie de Mont- pensier) afin d’exhorter les citoyens à prendre les armes suite au renvoi du premier ministre necker par le roi. sonnant le glas des réformes, le renvoi de ce ministre très populaire inquiète le tiers- etat quant aux intenons royales. camille desmoulins mera le feu aux poudres en incitant le peuple à prendre les armes : «citoyens, il n’y a pas un moment à perdre. j’arrive de Versailles. Monsieur necker (ministre de Louis XVi) est renvoyé. ce renvoi est le tocsin d’une saint-Barthélemy des patriotes. ce soir, tous les bataillons suisses et allemands (qui com- posent la garde royale) sorront du champ-de-Mars pour nous égorger. il ne nous reste qu’une ressource, c’est de courir aux armes et de prendre les cocardes pour nous reconnaître ». il aurait alors demandé aux au- diteurs quel signe de reconnais- sance ils préféraient : le bleu de la révoluon américaine ou le vert de l’espoir. dans l’enthousiasme de la réponse, camille décrocha, se- lon les versions, une feuille de marronnier, et la brandit comme signe de ralliement. cee co- carde civile permeait aux insur- gés de se reconnaître pour aller piller les armureries parisiennes et invesr les invalides pour y prendre des armes. c’est dans la nuit du 13 au 14 juillet 1789 que la cocarde tricolore bleu-blanc- rouge (les trois couleurs succes- sives de la royauté française) incarnant à la fois l’alliance des trois états (la noblesse, le cler- gé et le tiers) et celle de Paris (bleue-rouge) et de la france (blanche) fut officiellement adoptée par arrêté. Le vert fut rapidement abandonné car il rappelait la livrée du comte d’artois, frère de Louis XVi et futur charles X. c’est dans la foulée du discours de camille que le peuple prit la Baslle le 14 juillet 1789 (fête naonale française depuis le 6 juillet 1880). camille desmoulins - jean-sébasen rouillard Peuple on te trompe, on tue tes amis ! Mon seul crime n’a jamais été que d’avoir versé des larmes !. déclaraon aribuée à camille desmoulins dans la charree qui le mène à la guillone le 5 avril 1794

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Lucie-simplice-camille-Benoît desmoulins dénommé caMiLLe desMouLins avocat, journaliste, homme politique

18e

20e17e16e 18e 19e 21e20e1760 1794

le lien entre camille desmoulins et le Palais-royal s’établit le 12 juillet 1789 par une déclaration (mo-tion) qui a lancé l’insurrection aboutissant à la prise

de la Bastille deux jours plus tard.

camille desmoulins a fait ses études au collège Louis Le grand à Paris en compa-gnie de robespierre. avocat comme ce dernier, il a 29 ans lorsqu’il est élu député pour représenter le tiers-etat aux etats-généraux convoqués par Louis XVi le 5 mai 1789. il milite au club des cordeliers avec danton dont il sera le secrétaire et ami. Le recru-tement de ce club est plus populaire que celui des jaco-bins où milite robespierre.

Le 12 juillet 1789, de retour de Versailles, il monte sur une chaise à la terrasse du café de foy (situé aux nos 57 à 60 de la galerie de Mont-pensier) afin d’exhorter les citoyens à prendre les armes suite au renvoi du premier ministre necker par le roi. sonnant le glas des réformes, le renvoi de ce ministre très populaire inquiète le tiers-etat quant aux intentions royales. camille desmoulins mettra le feu aux poudres en incitant le peuple à prendre les armes : «citoyens, il n’y a pas un moment à perdre. j’arrive de Versailles. Monsieur necker (ministre de Louis XVi) est renvoyé. ce renvoi est le tocsin d’une saint-Barthélemy des patriotes. ce soir,

tous les bataillons suisses et allemands (qui com-posent la garde royale) sortiront du champ-de-Mars pour nous égorger. il ne nous reste qu’une ressource, c’est de courir aux armes et de prendre les cocardes

pour nous reconnaître ».

il aurait alors demandé aux au-diteurs quel signe de reconnais-sance ils préféraient : le bleu de la révolution américaine ou le vert de l’espoir. dans l’enthousiasme de la réponse, camille décrocha, se-lon les versions, une feuille de marronnier, et la brandit comme signe de ralliement. cette co-carde civile permettait aux insur-gés de se reconnaître pour aller piller les armureries parisiennes et investir les invalides pour y prendre des armes. c’est dans la nuit du 13 au 14 juillet 1789 que la cocarde tricolore bleu-blanc-rouge (les trois couleurs succes-sives de la royauté française) incarnant à la fois l’alliance des trois états (la noblesse, le cler-gé et le tiers) et celle de Paris (bleue-rouge) et de la france

(blanche) fut officiellement adoptée par arrêté. Le vert fut rapidement abandonné car il rappelait la livrée du comte d’artois, frère de Louis XVi et futur charles X.

c’est dans la foulée du discours de camille que le peuple prit la Bastille le 14 juillet 1789 (fête nationale française depuis le 6 juillet 1880).

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Peuple on te trompe, on tue tes amis ! Mon seul crime n’a jamais été que d’avoir versé des larmes !.

déclaration attribuée à camille desmoulins dans la charrette qui le mène à la guillotine le 5 avril 1794

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rendons hommage au Palais-royal sans lequel cet épisode héroïque n’aurait peut-être pas eu lieu.

en effet, l’interdiction d’accès aux jardins à toute garde autre que celle du duc d’orléans, propriétaire des lieux, permit à camille de prendre la parole dans un lieu d’expression libre. de plus la présence de tables et chaises facilita son geste spontané de cueillette devenant la fameuse cocarde verte.

a l’origine de cette terrasse, un privilège du duc d’orléans qui venait y déguster des sorbets et admirer la propriétaire, Madame joussereau, surnom-mée La Belle Limonadière. elle obtint pour son mari l’autorisation exclusive de vendre des rafraîchisse-ments et des glaces dans la grande allée ombragée du jardin du Palais-royal. La mode des « terrasses » était ainsi née vers 1775.

camille desmoulins, d’abord proche de Mirabeau puis de robespierre, évolua vers le mouvement des indulgents, dont le chef de file est danton. il s’opposera à la terreur conduite par robespierre en réclamant un comité de clémence mais en sera finalement victime puisqu’il sera guillotiné, comme danton, le 5 avril 1794. son dernier mot avant que le coupe-ret ne tombe aurait été le prénom de sa femme :« Lucile ! ».

cette dernière, ayant écrit à robespierre pour plaider l’indul-gence pour camille sera soupçonnée de complicité et guilloti-née huit jours après son mari.

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La statue de camille desmoulins (dite Bronze de Boverie) grimpant sur

une chaise pour haranguer la foule, était placée dans les jardins

du Palais-royal jusqu’en 1941. elle fut descellée par les allemands puis fondue pour utiliser le bronze

dans la fabrication d’armes.réda

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jean CoCteAu Poète, écrivain, reporter, graphiste,

metteur en scène, académicien

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20e17e16e 18e 19e 21e20e1889 1963

l’appartement où vécut jean cocteau de 1939 à 1963 est situé au 36 rue Montpensier au Palais-royal. ce logement de 96 m2 aujourd’hui (entre le rez-

de-chaussée et l’étage noble) n’a plus la même phy-sionomie que du temps où cocteau vivait dans 50 m2 : le lot contigu appartenait à l’époque à emmanuel Berl, ami de Bertrand de jouvenel (qui inspira Le Blé en Herbe narrant sa liaison avec colette) et mari de Mireille du Petit conservatoire qui, elle, vivait au dernier étage. cette partie a été annexée en 1996 à l’appartement de cocteau. de son aveu même, l’appartement qu’il décrivait comme un « tun-nel bizarre », plutôt sombre, avait tout d’une garçonnière très théâtrale.

cocteau et son irrépressible désir d’être l’âme sensible du monde s’est réfugié au Palais-royal à l’orée de la seconde guerre mondiale, désireux de continuer à inventer, recevoir, regarder le monde, même enserré dans l’enclos quasi parfait d’un jardin. il y partageait sa vie avec jean Marais et trois chattes entre deux aller-retour dans sa propriété de Milly-la-forêt et ce, inspiré par un besoin de quiétude dès juillet 1946. toute la journée, il était assailli de coup de fils et de visites plus ou moins opportunistes. sa bonne Madeleine se débattait pour filtrer toutes ces demandes et inscrivait les rendez-vous sur des ardoises ornant chacune des portes.

La cuisine était devenue un cabinet de lecture car cocteau, d’un appétit frugal, avait sa table réser-vée au grand Véfour, à gauche de l’entrée afin de ne manquer aucune venue. chaque matin il prenait dans son entresol un petit-déjeuner composé le plus

souvent d’une simple tartine « Le vrai écrivain est celui qui écrit mince, musclé. Le reste est graisse ou maigreur » écrivait-il.

il passa la période d’occupation au Palais-royal. détesté jusqu’à être molesté, en raison de son homosexualité, par le régime collaborationniste de Vichy, il se lia d’amitié avec l’occupant arno Breker, sculpteur fétiche d’adolf Hitler (salut à Breker dans la revue comoedia, 23 mai 1942). il fréquenta Karl Hepting, directeur de l’institut allemand et ernst jünger. Parallèlement, il témoigna en faveur de jean genet en cour d’assises (1942). inquiété à la Libération, il sera défendu par genet, éluard et aragon.

son œuvre sur place fut prolifique et protéiforme : Les Parents terribles (1938, pièce de théâtre interdite sous l’occupation por-tée à l’écran par cocteau, 1949) ; Le Bel indifférent (1940, pour édith Piaf) ; Les Monstres sacrés (1940) ; La Machine à écrire (1941); L’éternel retour (1943, scénario et dialogues avec jean delannoy) ; renaud et armide (1943, tragédie en vers) ; La Belle et la Bête (Prix Louis delluc, 1946, avec jean Marais et josette day ;

j’ai loué cette cave minuscule en 1940 […]. je m’y soigne à présent par fatigue, à cause de l’impossibilité de trouver un logement convenable, à cause aussi d’un charme que le Palais-royal exerce sur certaines âmes.

jean cocteau - La difficulté d’être (1947)

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Pourquoi faites-vous des pièces ?, me demande le romancier.Pourquoi faites-vous des romans ?, me demande le dramaturge.Pourquoi faites-vous des films ?, me demande le poète.Pourquoi dessinez-vous ?, me demande le critique.Pourquoi écrivez-vous ?, me demande le dessinateur.oui, pourquoi ?, je me le demande.sans doute pour que ma graine s’envole partout.jean cocteau

L’aigle à deux têtes (1946, pièce de théâtre et mélodrame porté à l’écran par cocteau, 1948) ; La difficulté d’être (1947) ; Bacchus (1952) ; journal d’un inconnu (1953) ; clair-obscur (1954, recueil de poésie) ; Le testament d’orphée (1960, film poétique) ; décoration de fresques : Villefranche-sur-Mer (1957, chapelle saint-Pierre : «Mon sarcophage, mon masque d’or») ; Menton (1957, salle des mariages de l’Hôtel deVille), saint-jean-cap- ferrat (1950, villa santo-sospir de Mme alec Weisweiller ; 1962, Hôtel de Ville) ; requiem (1961, recueil de poésie) ; Le cordon ombilical(1962).

reçu à L’académie française le 20 octobre 1955 il fit traduire son discours de réception en argot des prisons et dessina lui-même son épée d’académicien offerte par ses amis selon la tradition. Les grilles du Palais-royal sont présentes à la base du fourreau.

Le 11 octobre 1963, c’est dans sa retraite de la Maison du Bailli à Milly-la-forêt que ce « passeur du mythique » apprend la mort de sa grande amie édith Piaf qu’il

avait fait débuter au théâtre dans sa pièce «Le Bel in-différent» (1940). Peu de personnes savent en ré-alité que, déjà victime de deux crises cardiaques et trop ému, il vient de déclarer à son proche entourage : « c’est le bateau qui achève de couler. c’est ma dernière journée sur cette terre. »

Quelques heures après, sous le coup de l’émotion, il s’éteint à son tour. il repose dans la chapelle st-Blaise-des-simples de Milly-la-forêt, décorée par ses soins.

Par une curieuse similitude, triste propos d’une mort annoncée : Edwige Feuillère « monstre sacré » selon Jean Cocteau, ne survivra que quelques jours à la mort de Jean Marais. « Comment vais-je faire sans mon Jeannot ? », avait-elle avoué évoquant son célèbre partenaire de «L’Aigle à deux Têtes».

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