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Kystes et fistules congénitaux de la face et du cou. Bull Soc Pathol Exot, 2005, 98, 2, 109-113 109 Introduction L es kystes et fistules congénitaux de la face et du cou sont un groupe de malformations relativement fréquentes en oto-rhino-laryngologie (ORL), dont l’origine est la per- sistance d’un reliquat embryonnaire excédentaire ou d’une structure embryonnaire transitoire (6). Bien que toujours présents à la naissance, leur découverte peut se faire plus ou moins tardivement, souvent à l’occasion d’épisodes infectieux ou inflammatoires. A partir d’une analyse rétrospective, cette étude se propose d’apprécier les aspects épidémiologiques, cliniques, les moda- lités de prise en charge thérapeutiques et l’évolution de cette pathologie en pratique ORL à Brazzaville. Kystes et fistules congénitaux de la face et du cou. À propos de 78 cas. Summary: Cysts and congenital fistulas of the face and the neck. About 78 cases. The cysts and congenital fistulas of the face and neck induce frequent malformations in Oto-Rhino- Laryngology. A retrospective study on these malformations has been carried out from January 1986 to December 2001 in the Oto-Rhino-Laryngology unit of the Brazzaville Teaching Hospital. This study considered the epidemio-clinical aspects, the modes of therapeutic treatment and the evolution of these con- genital pathologies. The cysts and congenital fistulas represented 2% of the consultations in the service. Patients were aged of 10 months to 50 years (average age: 21± 5 years) among them 49 men (63%) and 29 women (37%). The pathology appeared in childhood in 41% of the cases and during adult age in 59% of the cases. The main circumstances of discovery were: cystic swelling (72%), infectious com- plication (18%) and productive fistula (10%). The clinical forms have been dominated by the cysts of the thyreoglossal tractus (72%), followed by the pre-auricular fistulas (10%), the amygdaloid (9%), dermoid (6%) and nasopalatine (3%) cysts. The treatment was in any case surgical. A good embryo-pathogenic knowleldge should contribute to a complete surgical exeresis, a neces- sary condition to avoid recurrence. Résumé : Les kystes et fistules congénitaux de la face et du cou réalisent des malformations fréquentes en oto-rhino-laryngologie. Une étude rétrospective portant sur ces malformations a été réalisée de janvier 1986 à décembre 2001 dans le service d’oto-rhino-laryngologie du centre hospitalier et universitaire de Brazzaville. Cette étude se proposait d’apprécier les aspects épidémio-cliniques, les modalités de prise en charge thérapeutiques et l’évolution de ces pathologies congénitales. Les kystes et fistules congénitaux ont représenté 2 % des consultations dans le service. Il s’agissait de patients âgés de 10 mois à 50 ans (moyenne d’âge : 21 ± 5 ans) répartis en 49 hommes (63 %) et 29 femmes (37 %). La pathologie s’est exprimée dans l’enfance dans 41 % des cas et à l’âge adulte dans 59 % des cas. Les principales circonstances de découverte ont été les suivantes : tuméfaction kystique (72 %), complication infectieuse (18 %) et fistule productive (10 %). Les formes cliniques ont été dominées par les kystes du tractus thyréoglosse (72 %), suivis par les fistules pré-auriculaires (10 %), les kystes amygdaloïdes (9 %), dermoïdes (6 %) et naso-palatins (3 %). Le traitement a été chirurgical dans tous les cas. Une bonne connaissance embryologique et anatomique permet d’espérer une exérèse chirurgicale complète, condition indispensable pour éviter une récidive. G. Ondzotto (1), F. Ehouo (2), J. F. Peko (3), T. Fouemina (1), F. Bissiko (1), D. Akolbout (1) & M. Mokebe (1) (1) Service ORL. BP : 13356 CHU de Brazzaville, Congo. (2) Service ORL. CHU de Treichville, Abidjan, Côte-d’Ivoire. (3) Service d'anatomo-pathologie. BP : 32 CHU de Brazzaville, Congo. *Correspondance : Docteur Gontran Ondzotto. BP : 13356 Brazzaville, Congo. E-mail : ondzotto@voilà.fr, [email protected] Manuscrit n° 2479. “Thérapeutique”. Reçu le 15 octobre 2002. Accepté le 29 mars 2005. cyst fistula congenital face neck hospital Brazzaville Congo Sub-Saharan Africa kyste fistule congénital face cou hôpital Brazzaville Congo Afrique intertropicale THÉRAPEUTIQUE

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Kystes et fistules congénitaux de la face et du cou.

Bull Soc Pathol Exot, 2005, 98, 2, 109-113 109

Introduction

Les kystes et fistules congénitaux de la face et du cou sont un groupe de malformations relativement fréquentes

en oto-rhino-laryngologie (ORL), dont l’origine est la per-sistance d’un reliquat embryonnaire excédentaire ou d’une structure embryonnaire transitoire (6).

Bien que toujours présents à la naissance, leur découverte peut se faire plus ou moins tardivement, souvent à l’occasion d’épisodes infectieux ou inflammatoires.A partir d’une analyse rétrospective, cette étude se propose d’apprécier les aspects épidémiologiques, cliniques, les moda-lités de prise en charge thérapeutiques et l’évolution de cette pathologie en pratique ORL à Brazzaville.

Kystes et fistules congénitaux de la face et du cou. À propos de 78 cas.

Summary: Cysts and congenital fistulas of the face and the neck. About 78 cases.

The cysts and congenital fistulas of the face and neck induce frequent malformations in Oto-Rhino-Laryngology.A retrospective study on these malformations has been carried out from January 1986 to December 2001 in the Oto-Rhino-Laryngology unit of the Brazzaville Teaching Hospital. This study considered the epidemio-clinical aspects, the modes of therapeutic treatment and the evolution of these con-genital pathologies.The cysts and congenital fistulas represented 2% of the consultations in the service. Patients were aged of 10 months to 50 years (average age: 21± 5 years) among them 49 men (63%) and 29 women (37%). The pathology appeared in childhood in 41% of the cases and during adult age in 59% of the cases. The main circumstances of discovery were: cystic swelling (72%), infectious com-plication (18%) and productive fistula (10%). The clinical forms have been dominated by the cysts of the thyreoglossal tractus (72%), followed by the pre-auricular fistulas (10%), the amygdaloid (9%), dermoid (6%) and nasopalatine (3%) cysts. The treatment was in any case surgical. A good embryo-pathogenic knowleldge should contribute to a complete surgical exeresis, a neces-sary condition to avoid recurrence.

Résumé :

Les kystes et fistules congénitaux de la face et du cou réalisent des malformations fréquentes en oto-rhino-laryngologie.Une étude rétrospective portant sur ces malformations a été réalisée de janvier 1986 à décembre 2001 dans le service d’oto-rhino-laryngologie du centre hospitalier et universitaire de Brazzaville. Cette étude se proposait d’apprécier les aspects épidémio-cliniques, les modalités de prise en charge thérapeutiques et l’évolution de ces pathologies congénitales.Les kystes et fistules congénitaux ont représenté 2 % des consultations dans le service. Il s’agissait de patients âgés de 10 mois à 50 ans (moyenne d’âge : 21 ± 5 ans) répartis en 49 hommes (63 %) et 29 femmes (37 %). La pathologie s’est exprimée dans l’enfance dans 41 % des cas et à l’âge adulte dans 59 % des cas. Les principales circonstances de découverte ont été les suivantes : tuméfaction kystique (72 %), complication infectieuse (18 %) et fistule productive (10 %). Les formes cliniques ont été dominées par les kystes du tractus thyréoglosse (72 %), suivis par les fistules pré-auriculaires (10 %), les kystes amygdaloïdes (9 %), dermoïdes (6 %) et naso-palatins (3 %). Le traitement a été chirurgical dans tous les cas.Une bonne connaissance embryologique et anatomique permet d’espérer une exérèse chirurgicale complète, condition indispensable pour éviter une récidive.

G. Ondzotto (1), F. Ehouo (2), J. F. Peko (3), T. Fouemina (1), F. Bissiko (1), D. Akolbout (1) & M. Mokebe (1)(1) Service ORL. BP : 13356 CHU de Brazzaville, Congo.(2) Service ORL. CHU de Treichville, Abidjan, Côte-d’Ivoire.(3) Service d'anatomo-pathologie. BP : 32 CHU de Brazzaville, Congo.*Correspondance : Docteur Gontran Ondzotto. BP : 13356 Brazzaville, Congo. E-mail : ondzotto@voilà.fr, [email protected]

Manuscrit n° 2479. “Thérapeutique”. Reçu le 15 octobre 2002. Accepté le 29 mars 2005.

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G. Ondzotto, F. Ehouo, J. F. Peko et al.

Matériels et méthodes

Nous avons revu les dossiers des malades ayant consulté dans le service d’ORL du centre hospitalier et univer-

sitaire de Brazzaville entre janvier 1986 et décembre 2001, pour un kyste ou une fistule de la face ou du cou de nature congénitale.Le diagnostic, orienté par les arguments cliniques, a été étayé par les examens complémentaires (échographie : 70 cas, soit 90 % ; fistulographie : 8 cas, soit 10 %), les constatations per-opératoires (compte rendu opératoire) et confirmé par l'exa-men anatomo-pathologique des pièces d'exérèse.Les informations ont été recueillies sur une fiche d'enquête portant les paramètres suivants : âge, sexe, circonstances de découverte, formes anatomo-cliniques, traitement et évolu-tion. L'évolution a été évaluée avec un recul d'au moins 2 ans après la chirurgie.Le logiciel Epi Info du CDC-Atlanta-OMS (version 5 - ENSP - Rennes, France) a été utilisé pour la saisie et l'analyse des données. La comparaison des pourcentages a été faite par le test du χ2, le seuil de signification des calculs statistiques étant fixé à 5 %.

RésultatsDonnées épidémiologiquesDurant la période d’étude, le service a enregistré 4 001 con-sultants, dont 91 malformations congénitales cervico-faciales (2,3 %). Les kystes et les fistules (78 cas) ont représenté 2 % des consultations et 86 % des malformations congénitales cervico-faciales.Nos patients étaient âgés de 10 mois à 50 ans (âge moyen : 21 ± 5 ans). Dans 32 cas (41 %), il s’agissait d’une population pédiatrique et dans 46 cas (59 %) d’adultes (différence statis-tique significative, p < 0,05). La répartition selon l’âge figure sur le tableau I.

Il s’agissait de 49 malades (63 %) de sexe masculin et de 29 malades (37 %) de sexe féminin (différence statistique signi-ficative, p = 0,001).

Données cliniquesLes circonstances de découvertes ont été les suivantes :- tuméfaction indolore : 56 cas (72 %), dont 2 faciaux (3 %) et 54 cervicaux (69 %) ;- complication infectieuse (surinfection d’une tuméfaction cervicale médiane) : 14 cas (17 %) ;- fistule productive intermittente pré-auriculaire : 8 cas (10 %).

La tuméfaction indolore a été la circonstance de découverte la plus représentative (p < 0,05).Les lésions étaient de localisation cervicale dans 68 cas (87 %) et faciale dans 10 cas (13 %) : la différence statistique était significative (p < 10-4).Nous avons relevé des malformations latérales (15 cas ; 19,2 %) et médianes (63 cas ; 81 %) avec une différence sta-tistique significative (p < 10-4).Les différentes formes anatomo-cliniques diagnostiquées de façon isolée ont été présentées sur le tableau II.

Répartition des patients selon l’âge.Distribution of patients according to age.

âge (an) nb %0-5 9 116-10 10 1311-15 13 1716-20 21 2721-25 10 1326-30 9 1131-35 1 136-40 1 141-45 3 446-50 1 1total 78 100

Tableau I.

Répartition des kystes et fistules congénitaux de la région cervico-faciale.Distribution of the cysts and congenital fistulas of the cervico-facial area.

malformation n %médiane

- kyste du tractus thyréoglosse 56 72(photo 1)- kyste dermoïde adhyoïdien 5 6(photo 2)- kyste naso-palatin 2 3

latérale- fistule péri-auriculaire 8 10- kyste amygdaloïde 7 9(photo 3)

total 78 100

Tableau II.

Photo 1

Kyste du tractus thyréoglosse.Cyst of the thyreoglossal tractus.

Kyste dermoïde adhyoïdien.Dermoid cyst.

Photo 2

Kystes et fistules congénitaux de la face et du cou.

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La taille des tuméfactions kystiques variait de 2 à 20 cm de diamètre, avec une moyenne de 6 cm sur leur grand axe. Les kystes dermoïdes étaient les plus volumineux avec une moyenne de 15 cm de diamètre.Dans les cas de fistules péri-auriculaires, aucune manifestation associée n’a été retrouvée. Dans 6 cas, le trajet fistuleux était filiforme, de 10 à 15 mm de long, de direction oblique en bas et en avant.

Données thérapeutiquesL’attitude thérapeutique a consisté dans l’exérèse chirurgicale des différents kystes et fistules, en dehors d’une poussée infec-tieuse. Dans 14 cas (18 %) de surinfections du kyste du tractus thyréoglosse, une antibiothérapie antistaphylococcique et un drainage chirurgical de collection a été nécessaire avant l’exé-rèse chirurgicale. Parmi les kystes du tractus thyréoglosse, 2 (3 %) ont eu une kystectomie et 54 (69 %) ont été opérés selon la technique de Sist r unk. L’exérèse des kystes naso-palatins a été faite par la voie transpalatine.

Données évolutivesL’évolution a été favorable dans 76 cas (97 %) et défavorable dans 2 cas (3 %) pour récidive kystique du tractus thyréo-glosse suite à une kystectomie (exérèse incomplète).Aucune lésion ou transformation maligne n’a été retrouvée.

Discussion

La fréquence exacte des kystes et fistules congénitaux de la région cervico-faciale est mal connue (9). Elle est évaluée

à 2 % dans la présente étude, à 0,5 % par OUOBA et coll. (9). Il est évident qu’un nombre important de cas ne parviennent pas à l’ORL :- soit du fait qu’ils sont pris en charge dans d’autres services : stomatologie et chirurgie maxillo-faciale, chirurgie pédia-trique ;- soit qu’ils sont asymptomatiques et n’ont pas motivé de consultation.Dans la série de OUOBA et coll. (9), il s’agissait essentiellement d’enfants (95 % des cas), le plus jeune des malades avait 3 jours de vie, le plus âgé 56 ans ; 63 % des patients avaient moins de 4 ans. Notre étude est constituée particulièrement d’adultes jeunes (59 %). La présence de ces kystes et fistules à

la naissance n’est donc pas toujours visible et leur découverte peut se faire tardivement (1,7).La prédominance de ces malformations chez les sujets de sexe masculin est remarquable dans notre série (63 % des cas).

La tuméfaction cervico-faciale est le principal motif de con-sultation, suivie de complication infectieuse (surinfection) et de fistule productive. A ces circonstances, OUOBA et coll. (9) trouvent également des cas de découverte fortuite et de récidive après un acte chirurgical antérieur (ponction, exérèse incomplète).Les différentes malformations retrouvées dans cette étude prédominent au niveau du cou. Les formes médianes sont les plus importantes, dominées par les kystes. Ouoba et coll. (9) par contre relèvent une prédominance des kystes fistules latérales (108 cas ; 67,5 %) par rapport aux médianes (52 cas ; 32,5 %).

Les kystes du tractus thyréoglosse sont fréquents et représen-tent 72 % (56 cas en 16 ans) des malformations cervicales con-génitales dans notre étude. OUOBA et coll. (10) rapportent 17 cas en 7 ans, VODOUHE (20) 24 cas en 11 ans et RIGHINI (14) 99 cas en 20 ans. Ces kystes résultent d’un défaut de résorp-tion du tractus thyréoglosse et peuvent se situer sur tout le trajet du tractus, de la base de la langue à la pyramide de Lallouette. Ils surviennent volontiers au cours de la première décennie de la vie dans 40 à 70 % des cas (8, 10), le reste se développant chez l’adulte jeune souvent avant 30 ans, excep-tionnellement beaucoup plus tard. La présentation clinique habituelle est une tuméfaction cervicale antérieure médiane ou para médiane, de volume variable pouvant atteindre la taille d’un œuf de pigeon, arrondi, ferme, indolore, fixé en profondeur mais mobile sur le plan superficiel, le plus souvent dans la région hyoïdienne. Parfois, il existe des manifestations fonctionnelles à type de gêne à la protraction de la langue, de dysphagie (2). Trois signes sont classiques :- la mobilisation de ce kyste est plus facile dans le sens trans-versal que dans le sens vertical ;- la protusion de la langue entraîne son ascension ;- l’expression du kyste peut le faire diminuer de volume alors qu’apparaît un goût amer dans la bouche. Ce signe traduit la perméabilité du tractus au niveau du foramen de caecum.Dans les formes cliniques, il faut connaître l’existence de kystes superficiels ou au contraire hauts situés vers la base de la langue. Ils peuvent être latéralisés, inflammatoires. La fistule peut être le second tableau, apparaissant soit d’une façon primitive, soit le plus souvent secondaire à l’infection d’un reliquat kystique après chirurgie partielle.Les complications sont dominées par la surinfection du kyste quasi inéluctable, même en l’absence d’une chirurgie partielle préalable, avec augmentation du volume du kyste parfois dys-pnéisante chez le nourrisson (7). La dégénérescence maligne est exceptionnelle à partir des parois du kyste, mais il peut exister une dégénérescence du tissu thyroïdien ectopique. Ceci justifie l’examen anatomo-pathologique systématique de la pièce opératoire.L’échographie cervicale est le premier examen complémentaire à demander avant d’opérer un kyste du tractus thyréoglosse (14). Elle vise à vérifier la présence et la position de la glande thyroïde et à confirmer la nature kystique de la collection.D’autres diagnostics sont à écarter :- un lipome, plus superficiel ;- un kyste dermoïde, plus ferme ;- une adénopathie sous-mentale en cas de tuméfaction sus-hyoïdienne ;

Photo 3

Kyste amygdaloïde.Amygdaloid cyst.

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G. Ondzotto, F. Ehouo, J. F. Peko et al.

- un hémangiome, un lymphangiome, rares dans cette situa-tion ;- une laryngocèle externe en cas de kyste latéralisé, éliminée par la radiographie ;- un hygroma de la bourse séreuse de Boyer dont la ponction retire un liquide muqueux ;- surtout une thyroïde ectopique ou accessoire par la palpa-tion de la glande en position normale et la scintigraphie.Le traitement du kyste du tractus thyréoglosse est l’exérèse chirurgicale, effectuée en dehors d’une poussée infectieuse. La technique de Sist r unk (16) reste la technique chirurgicale de référence, avec un taux de rechute compris entre 1 et 10 % (14). Les causes d’échec sont une rupture du kyste lors de la dissection, l’insuffisance de résection du corps de l’os hyoïde, la présence de multiples tractus accessoires dans les muscles de la base de la langue, une résection insuffisante.

Les kystes adhyoïdiens tirent leur origine du sillon de coa-lescence qui sépare la tête du deuxième arc du champ méso-branchial et se développent sous les téguments au contact de l’os hyoïde.Cliniquement, ils se présentent comme une masse relative-ment molle, mais non fluctuante (peu liquidienne à l’écho-graphie), appréciables par la palpation bidigitale, un doigt étant endobuccal, opaques à la transillumination. Le principal aspect dans notre série est leur volume important au moment du diagnostic (photo 2).L’éventualité d’une infection secondaire qui peut aboutir à la fistulisation est l’une de ses caractéristiques. Ils entraînent les mêmes symptômes que les kystes du tractus thyréoglosse avec lesquels ils sont souvent confondus.Le traitement est essentiellement chirurgical avec résection de la partie centrale de l’os hyoïde à laquelle ils adhèrent souvent par des tractus fibreux.

Les kystes naso-palatins sont les plus fréquentes formations kystiques du palais non odontogènes (19). Il s’agit d’une pathologie malformative rare, méconnue, souvent diagnos-tiquée à l’âge adulte (15, 18, 19). Quelques cas ont été décrits chez l’enfant (3). Le diagnostic est fait à l’occasion d’une poussée inflammatoire. L’examen clinique retrouve généra-lement une masse inflammatoire plus ou moins fluctuante dans la partie médiane et antérieure du palais et parfois de la partie antérieure des fosses nasales. Les critères radiologiques du diagnostic sont (11) : la localisation médiane, les contours réguliers (ronds ou ovalaires) de la masse et le refoulement des racines dentaires. Le diagnostic différentiel se fait essen-tiellement avec le kyste apico-dentaire. Le traitement est chi-rurgical, constituant en une énucléation du kyste. La voie trans-palatine est préconisée par la plupart des auteurs (15). Le diagnostic est confirmé par l’analyse anatomo-pathologique qui retrouve un épithélium pluristratifié non kératinisant. Après traitement, le taux de rechute est inférieur à 5 % (17). La rechute est due à l’ablation incomplète de la paroi du kyste (15).

Les fistules pré-auriculaires situées en avant du bord antérieur de l’hélix sont les fistules congénitales les plus fréquentes de la face et du cou. Ils résultent embryologiquement de la fusion incomplète des six colliculi de His entrant dans la constitution de l’oreille.Leur prévalence exacte est difficile à établir (4, 13) du fait que les patients leur portent habituellement peu d’intérêt, car elles sont asymptomatiques. Ces fistules, bilatérales dans plus d’un tiers des cas, sont plus fréquemment rencontrées chez les sujets noirs et les Asiatiques (22 pour 1 000 naissances) que

chez les sujets blancs (0,6 à 2,6 pour 1 000 naissances) (5) et sont parfois familiales.Elles sont souvent borgnes, se présentant sous la forme d’une simple dépression punctiforme. Parfois, elles correspondent réellement à un trajet filiforme de 10-15 mm de long, oblique en bas et en avant, d’où sourd un liquide séreux ou de caséum à la pression. Le plus souvent, l’orifice fistuleux est découvert dès la naissance par les parents, mais c’est parfois un épisode de surinfection avec écoulement purulent par l’orifice externe ou un abcès pré-auriculaire qui révèle l’anomalie.L’examen otoscopique doit s’assurer de la normalité du tym-pan. L’audiogramme permet d’éliminer une aplasie mineure.D’autres malformations ou fistules associées doivent être recherchées systématiquement. OUOBA et coll. (9) retrou-vent dans leur série trois fentes labio-palatines associées aux fistules pré-auriculaires.Certaines fistules sans complications ne justifient qu’une sur-veillance. L’intervention est nécessaire pour une fistule avec écoulement ou épisodes de surinfection, mais à distance de ceux-ci. En cas de surinfection, une antibiothérapie antista-phylococcique est nécessaire ; un drainage chirurgical peut s’imposer en cas de collection. L’indication opératoire sera purement esthétique ou dans un but préventif des infections. L’exérèse complète de la fistule est réalisée à distance de l’épi-sode infectieux. Une incision losangique circonscrit l’orifice fistuleux, puis l’exérèse est réalisée en monobloc jusqu’au plan de l’aponévrose temporale en dedans, emportant au besoin un peu de périchondre de la racine de l’hélix pour mettre plus sûrement à l’abri d’une récidive.

Les kystes amygdaloïdes sont ainsi appelés du fait de leur ressemblance au point de vue histologique au tissu amygda-lien. Ils sont désignés parfois kystes du 2e arc pour rappeler leur origine embryologique. Le kyste siège dans la région haute du cou le plus souvent, près du bord antérieur du mus-cle sterno-cléido-mastoïdien à la hauteur de l’os hyoïde. La tuméfaction est rénitente, tendue, peu sensible à la palpa-tion. La ponction confirme la nature kystique de la tumeur en ramenant un liquide plus ou moins épais. Certains kystes peuvent se révéler par une poussée infectieuse aiguë au cours d’une infection amygdalienne. Le tableau clinique est alors celui d’un adéno-phlegmon du cou avec un léger torticolis. La mise en route d’un traitement antibiotique par voie générale permet de réduire la surinfection. Si un drainage chirurgical est effectué par erreur, la récidive sera de règle. Il faut savoir reconnaître, en cas d’adéno-phlegmon du cou récidivant, la possibilité d’un kyste amygdaloïde drainé.La transformation maligne est discutée depuis de nombreu-ses années, c’est le problème du branchiome malin de VEAU (12).Devant un kyste amygdaloïde, on discutera une adénite tuber-culeuse, une adénopathie cancéreuse kystique, une métastase cryptique des carcinomes amygdaliens ou des voies aéro-digestives supérieures, surtout chez un sujet alcoolo-tabagi-que de plus de 40 ans.Le traitement est exclusivement chirurgical. L’exérèse de la poche kystique doit être complète.

Conclusion

Les kystes et fistules congénitaux de la région cervico-faciale représentent une pathologie assez fréquente en

oto-rhino-laryngologie au CHU de Brazzaville. La sympto-matologie et l'évolution sont aggravées par les risques infec-tieux. Si les fistules posent peu de problèmes diagnostiques,

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les kystes par contre sont difficiles à distinguer des autres masses cervicales. L'analyse anatomo-pathologique doit être systématique, confirmant le diagnostic. Leur traitement est l'exé-rèse chirurgicale à froid, qui peut être rendue particulièrement délicate du fait des remaniements inflammatoires locaux. Seule une exérèse complète, orientée par des connaissances embryo-logiques et pathologiques, met à l'abri de récidives.

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