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LICENCE 3 - UE5RE - ENSAL 2012 Coline VINÇON Enseignant référent : Yannick Hoffert Écoblanchiment nouvelles esthét[h]iques

Écoblanchiment - DoYouBuzz · la cité-jardin d’Ebenezer Howard, dont l’une des ambitions étaient de rétablir un équilibre entre la ville et la nature, et où la

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LICENCE 3 - UE5RE - ENSAL 2012Coline VINÇON Enseignant référent : Yannick Hoffert

Écoblanchiment nouvelles esthét[h]iques

SommaireINTRODUCTION

Petite histoire de la verdôlatrie

Naissances de nouvelles images à l’aube du XXIième siècle

Rencontre entre l’iconographie et le développement durable : vers une verdôlatrie contemporaine ?

La communication, 4ième pilier du développement durable

Le pouvoir de l’image

Images et usages

Greenwashing et architecture

L’effet « Boomerang » du greenwashing

Les dangers d’une éventuelle dérive : assimilation entre esthé-tique et éthique

Greenwashing : lever le mythe pour avancer

CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE

PARTIE 1 HISTOIRE DE LA REPRÉSENTATION ICONOGRAPHIQUE DE LA NATURE

PARTIE 2 IMAGES, ESTHÉTIQUES ET GREENWASHING

PARTIE 3 ÉCOBLANCHIMENT : VALEURS ESTHÉTIQUES, VALEURS ÉTHIQUES

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Introduction

‘‘Écoblanchiment’’ est la traduction française de Greenwashing. Ce dernier est issu du mélange du mot ‘‘green’’ (vert) avec l’expression ‘‘brain washing’’ (lavage de cerveau). Il désigne l’attitude d’une organisation (entreprise, gouverne-ment...) qui consiste à se donner une image écologique respon-sable par un simple ‘‘verdissement’’ de façade. C’est en quelque sorte de la publicité mensongère au titre d’un engagement pour l’environnement et le développement durable douteux voire inexistant. Le mot ‘‘greenwashing’’ apparaît pour la première fois dans le magazine Mother Jones de mars 1991. Mais c’est seulement depuis une dizaine d’années que ce phénomène a réellement pris de l’ampleur. Aujourd’hui, c’est devenu un fait avéré, reconnu par la société.

En la période de crise économique que nous vivons, à l’heure où la consommation de masse est remise en cause, le discours écologique tombe à pic pour réenchanter une sphère économique alors décriée. Le greenwashing en est la consé-quence directe. Elle a aujourd’hui littéralement contaminé tous les milieux de l’économie, de la politique et de la culture.

D’après Bruno Latour, « La notion d’ ‘‘environnement’’ a émergé dans le discours public juste au moment où l’environ-nement disparaissait . »1

C’est au travers de l’image, et notamment de la publicité que s’exprime l’écoblanchiment. Ce « vernis écologique » est l’aboutissement d’une lente esthétisation de l’environnement et de la Nature, impulsée en partie par le monde de l’Art. L’éco-blanchiment est né de la rencontre entre cette iconographie florissante et les enjeux environnementaux actuels. C’est cette dichotomie entre esthétique et éthique qui a engendré le phé-nomène de l’écoblanchiment. Le greenwashing illustre parfaitement comment icono-graphie et idéologie se suivent et se complètent, jusqu’à sou-vent former un tout indissociable.

Mais cette assimilation entre esthétique et éthique n’est pas sans conséquences et nous pousse à nous questionner: quand l’écoblanchiment est-il apparu, et où prend-il racine ? Quel est le rôle de l’iconographie dans son utilisation et sa dif-fusion ? Enfin, comment est-il perçu, utilisé, et quelles peuvent en être les conséquences ?

1. « It’s Developpement, stupid », or « how to modernize modernization ? », Bruno Latour, article consultable sur le site de l’auteur : www.bruno-latour.fr

Fig.1 Premier article sur le Greenwashing, issu du magazine ‘‘Mother Jones’’ de mars 1991.

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Petite histoire de la verdôlatrie

S’il est aujourd’hui admis que le paysage est une com-posante indissociable de l’environnement, cette conception du paysage est toutefois relativement récente. Elle prend sa source de la notion d’écologie, qui tient du domaine de la science, alors que le paysage a une racine plus ancienne, et se rapproche plutôt de l’ordre du sensible que du rationnel. Pourtant, on fait aujourd’hui une ellipse entre ces deux termes : préserver le paysage entre dans la même logique que la pré-servation de l’environnement, et arbore donc un sens « éco-logique ».

Il faut alors revenir aux origines des deux termes pour prendre un peu de recul et constater que la vision actuelle du paysage est contestable, bien que partant d’un bon sentiment. Le paysage a d’abord été expérimenté par les peintres flamands du XVième et XVIième siècle. Le terme « Landschap » désignait alors un tableau, ne faisant pas exclusivement men-tion d’un site naturel, mais le décrivant comme la perception unitaire et esthétique d’une portion de pays. Jean Molinet lui attribuera sa première définition française en 1493 : « le pay-sage désigne un tableau représentant une vue champêtre ou un jardin »1. C’est donc d’abord à travers l’art (la peinture, puis la littérature) qu’est née cette notion, bien avant d’imprégner notre regard.

Si la notion de paysage est d’origine artistique, le concept d’environnement est, quant à lui, d’origine scientifique. Ce mot apparaît au XVième siècle. Bernard Palissy, écri-vain et artisan de l’école française de la Renaissance, le définit comme un « circuit ». Haeckel donne lui cette définition : « Par Oekologie nous entendons la totalité de la science des relations de l’organisme avec l’environnement, comprenant, au sens large, toutes les conditions d’existence »2. Aujourd’hui, on défini l’environnement à travers la lentille de l’écologie comme l’« Ensemble des éléments (biotiques ou abiotiques) qui entourent un individu ou une espèce, et dont certains contribuent directement à subvenir à ses besoins »3.

PARTIE 1 HISTOIRE DE LA REPRÉSENTATION ICONOGRAPHIQUE DE LA NATURE

1. Définition issue du dictionnaire de Robert Estienne de 1549.2. Ernst Haeckel, Generelle Morphologie der Organismen, Berlin, 1966, vol. II, p. 286.3. Grand Dictionnaire Encyclopédique Larousse 2012.

Fig.2 Paysage avec les collines d’Alban et le Monte Cavo, Simon Denis, 1797

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La théorie des écosystèmes de Tansley tentait de défi-nir l’environnement de manière scientifique en englobant la définition même du paysage. De ce concept est issu la notion d’« écologie du paysage », selon laquelle l’esthétique est une science. Or, le paysage n’est absolument pas un terme scien-tifique. À force de mélanger des termes qui n’ont pas la même origine, on assiste à une sorte « d’artialisation » du paysage. Bernard Lassus, paysagiste, écrivit à ce sujet :

« Il y a une différence, une irréductibilité d’une eau propre à un paysage. On peut très facilement imaginer qu’un lieu pollué fasse un très beau paysage, et qu’à l’inverse un lieu non pollué ne soit pas nécessairement beau »1. “Dissocier paysage et environnement nous aide à pré-ciser la demande d’ordre sensible qui disparaît sous le souci de l’environnement. [...] L’invention du paysage est la meilleure préservation de l’environnement.”1

Ainsi apparaît le phénomène de la verdôlatrie. À l’heure de l’urbanisation et l’industrialisation massives du XIXième siècle se développe un véritable culte pour le végétal et le paysage naturel. Cette « idôlatrie du vert » se manifeste à cette période notamment au travers du travail de grands jardiniers paysagistes du Second Empire (Alphand, Barillet-Deschamps) ou encore la création de « musées vert » à destination des habitants des villes comme la forêt de Fontainebleau dans la banlieue de Paris.

Plus tard, la verdôlatrie trouvera son interprétation dans la cité-jardin d’Ebenezer Howard, dont l’une des ambitions étaient de rétablir un équilibre entre la ville et la nature, et où la végétation était omniprésente : maisons pavillonnaires entou-rées d’un jardin, ville contenue par une ceinture végétale... Ce modèle présente d’ailleurs d’étranges similitudes avec les très à la mode des écoquartiers qui font beaucoup parler d’eux aujourd’hui.

Ce phénomène était déjà vivement critiqué au XIXième

siècle par quelques intellectuels comme Baudelaire qui trou-vait que « la nature est « épouvantable », « je voudrais des prairies peintes en rouge, des rivières jaunes d’or et des arbres peints en bleu. La nature n’a pas d’imagination. ». Mirbeau, Cros, les Goncourt étaient tout aussi cirtiques, et Carmontelle affirmait déjà en 1779 qu’un « vert trop immense et du même ton attristerait notre âme, qui ne désire que des impressions douces, vives et gaies. »2.

Fig.4 «Cosmic balance», représentation de la Cité-jardin d’Ebenezer HOWARD, 1898

Fig.3 Le Peintre Jules Le Cœur dans la forêt de Fontainebleau, Renoir, 1886

1. Bernard Lassus, 1992, Les Continuités du paysage, in Urbanisme et Archi-tecture, No 250, p. 64/66 et 250/252.2. Le jardin de Monceau, Carmontelle, 1779.

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La verdôlatrie est d’autant plus critiquable qu’elle tente par tous les moyens de faire corréler valeurs esthétiques et valeurs biologiques, valeurs écologiques et valeurs paysa-gères. Car si l’écologie prend sa source à travers sa justification scientifique, l’adoration du vert à laquelle nous assistons n’est quant à elle justifiable en rien, puisque relevant d’une qualité purement esthétique, et donc tout à fait subjective.

Il semblerait que l’on assiste aujourd’hui au même phé-nomène : notre société occidentale développe actuellement une idolâtrie contemporaine du « vert », au sens le plus large et le plus flou du terme. Cette fois, ce phénomène est étroitement lié avec des questions d’idéologie et d’éthique fondamentales.

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Naissances de nouvelles images à l’aube du XXI ième siècle

Il convient d’essayer d’expliquer la réapparition de la verdôlatrie dans notre société occidentale actuelle. Comme dans la plupart des cas, nous avons vu que ce phénomène a tout d’abord été véhiculé par le monde de l’art avant d’être introduit dans l’économie, la politique, et d’une manière géné-rale, d’être vulgarisé et intégré par notre société.

Cette renaissance soudaine n’est pas sans rappeler un mouvement artistique au nom significatif : le Land Art . Né dans les années 60, ce concept avait pour volonté de faire sortir l’Art des musées, supprimant ainsi sa valeur monétaire, et d’utiliser l’environnement naturel comme cadre et support de l’œuvre. Il s’agissait de relier l’art et la vie, et de briser les grands principes réducteurs du Modernisme. Ce mouvement contestataire a pourtant acquis une valeur symbolique environnementale forte, illustrant sans le savoir le mouvement naissant des hommes visant à retisser à tout prix des liens avec la nature.

Plus tard, Mai 68 a également été l’occasion pour la so-ciété de revendiquer son lien avec la Nature avec le mouvement hippie. Dans leur quête de la Nature absolue, ses militants ont fait naître (ou renaître) un véritable culte au milieu naturel grâce à des actes pacifiques, dont l’arme de cette guerre idéologique était d’ailleurs appelée le « Flower power ». Ce mouvement a fait naître des images aujourd’hui profondément ancrées dans la mémoire collective. Ce mouvement était d’ailleurs fortement caractéristique sur le plan esthétique : tenue vestimentaire et aspect physique codifiés (cheveux longs, vêtements en ma-tières naturelles), graphismes et typographies particulières... Ces images cultes, drainées par le festival Woodstock, et par de nombreux films par la suite (notamment « Zabriskie Point » de l’italien Michelangelo ANTONIONI sorti en 1970), font partie intégrante de ce mouvement révolutionnaire, et se confondent avec leur idéologie. Les engagements étaient multiples : contestation de la violence, refus de la guerre du Vietnam, de la société de consommation, mais aussi forte aspiration à la nature, et début des préoccupations environnementales. En effet, c’est aussi la première fois que sont dénoncés la pollution et les pro-blèmes environnementaux. Le mouvement prône notamment la consommation bio, les énergies renouvelables et le recyclage. Ce mouvement, à travers les images qu’elle véhicule toujours, a donc une symbolique environnemental qui continue aujourd’hui de fasciner.

Fig.5 Robert Smithson, Spiral Jetty, 1970, Great Salt Lake, Utah, USA.

Fig.6 Festival Woodstock

Fig.7 Van Volkswagen aux couleurs hippies

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Rencontre entre l’iconographie et le développement durable : vers une verdôlatrie contemporaine ?

Nous assistons à un retour (esthétique du moins) de ce mouvement politique et culturel de la fin des années 60, qui se traduit par la réutilisation de la tenue vestimentaire d’époque dans le monde de la mode notamment, mais également par un attrait important pour les vans Volkswagen utilisés par les hip-pies, ou encore un retour en force de « l’appel de la Nature ». Cette tendance est confirmée par d’autres marqueurs, comme le cinéma, avec la sortie en 2007 du film « Into the wild », produit par Sean Penn, et tiré de l’histoire vraie d’un jeune américain révolté contre la société qui décide de partir seul en Alaska pour un « retour aux sources » radical. Ce film fut un véritable succès avec seize millions d’entrées rien qu’aux États Unis.

Tout le monde a en tête les photos révolutionnaires de Yann Arthus Bertrand. Son livre, « La Terre vue du ciel », paru pour la première fois en 1999 et vendu à plus d’un million d’exemplaires, est un recueil de photos qui ont conquis des générations et ont profondément marqué la mémoire collec-tive. Ses clichés ont fait naître des images tellement fortes qu’elles sont quasiment devenues des icônes. Ces prises de vue aériennes, véritable recul sur notre société et ses maux, affichaient déjà clairement un souci de sensibilisation aux pro-blèmes de l’environnement, effaçant sans complexe les condi-tions scandaleuses dans lesquelles elles avaient été prises.

Plus récemment, on ne peut se passer d’évoquer le film « Home ». Dans la continuité de nombreux films de sensibi-lisation sur la faune et la flore en danger (« Microcosmos » en 1996, « Oceans » en 2009, et plus récemment « Pollen » en 2011...), ce film de Yann Arthus Bertrand, produit par Luc Besson, est un véritable phénomène mondial. Diffusé gratui-tement à la télévision et sur internet de façon simultanée dans 181 pays du monde le 5 juin 2009 à l’occasion de la Journée Mondiale de l’Environnement, il a été regardé de façon quasi-religieuse par plus de 400 millions de téléspectateurs à travers le monde. On constate que ces films ont de plus en plus de succès auprès du Grand public, ce qui illustre le phénomène de la « vague verte » à laquelle nous assistons aujourd’hui.

Fig.11 Affiche du film « Home », de Yann Arthus Bertrand, sorti en 2009

Fig.8 Kate moss dans un style «gipsy chic», ou «boho-chic» pour V magazine, sept. 09

Fig.9 Affiche du film « Into the wild » de Sean Penn, 2007

Fig.10 Couverture du livre « LaTerre vue du ciel », de Yann Arthus Bertrand, 1999

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L’écologie telle que nous la voyons actuellement est ainsi baignée d’images. De nombreux architectes visionnaires perpétuent cette création iconographique à travers leur archi-tecture futuriste, comme Luc Schuiten, qui crée un véritable imaginaire pictural autour de la ville végétale qui va bien au-de-là de sa réflexion sur le développement durable. Le phénomène se retrouve également dans le design, où réapparaissent des formes traditionnelles, des matériaux naturels, du recyclage ou encore des objet à la morphologie végétale comme la « vege-tal chair » des frères Bouroullec ...

« Chaque époque a son port, son regard et son sourire, formant un tout d’une complète vitalité […] une esthétique se cristallise également peu à peu dans les esprits : façades bardées de bois, cœurs d’îlots verts, toits recouverts de pan-neaux solaires et grandes baies vitrées orientées plein sud. » Aujourd’hui, on semble assister à la naissance d’une nouvelle esthétique : celle de la « vague verte ».1

1. Olivier Namias et Jean-Louis Violeau, novembre 2010, Écoquartier : de l’angélisme à l’expectative, d’architectures, n°195, p. 35 à 59.

Fig.12 La « Vegetal city » de Luc Schuiten

Fig.13 La « Vegetal chair » des frères Bouroullec, produite par Vitra

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PARTIE 2 IMAGES, ESTHÉTIQUES ET GREENWASHING

La communication, 4 ème pilier du développement durable

Le vocabulaire du développement durable est aujourd’hui utilisé à outrance, passant d’une utilisation militante à un voca-bulaire institutionnalisé, ce qui lui fait perdre peu à peu toute sa signification. Développement durable est un concept qui veut tout et rien dire à la fois. La représentation qu’on s’en fait est à la fois très subjective, et suit pourtant un schéma qui fait aujourd’hui l’unanimité. Celle des trois sphères constitutives du développement durable tel qu’on le définit aujourd’hui, le social, l’économique et l’environnemental ; trois sphères égales complémentaires et dont l’équilibre suffirait à rétablir l’ordre sur la planète. Ce système paraît pourtant omettre un élément sans le-quel il n’existerait pas, et qui pourtant est indispensable à faire le lien entre les trois sphères : la communication. La communi-cation est-elle un simple outil du développement durable ? Un élément constitutif? Ou encore, un concept fédérateur ? Cer-tains théoriciens, comme Thierry Libaert, (directeur du Labora-toire des Systèmes de Communication d’Organisation, LASCO) n’hésitent pas à avancer que le développement durable est une pure invention de la communication.

« On n’a jamais autant parlé de communication que dans une société qui ne communique plus avec elle-même ». 1

C’est au travers de la publicité que les industriels et pro-fessionnels du bâtiment parviennent à tirer profit de ce phéno-mène. Ils investissent d’ailleurs généralement plus d’argent en communication qu’en développement et en innovation, réin-terprétant ainsi la célèbre phrase de Bill Benbach, patron de l’agence de publicité DDB : «Gardez-les simples et stupides et ils deviendront de bons consommateurs».

Si on observe l’évolution de la fréquence d’utilisation des mots de la langue française, on constate que les mots « éco-logie », « durable », « vert », et autres mots du vocabulaire du développement durable sont de plus en plus utilisés dans la presse, les médias, et de manière générale dans le langage courant, tant en France qu’à l’étranger. Actuellement, force est de constater que le développement durable est le thème prin-cipal traité en communication.

Fig.14 Représentation institutionnelle du développement durable

1. Lucien Sfez, Information, savoir et communication, Paris, Galilée, 1992, p.26

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Le pouvoir de l’image

Des études scientifiques ont montré que les jeunes générations ont un champ de vision relativement restreint par rapport aux générations passées. Celui-ci se limite maintenant à une distance d’environ 5m au-delà duquel l’environnement n’atteint pas ou peu l’individu. Cet « immobilisme » de l’œil est peut-être dû à la proliférations d’écrans dans notre vie quo-tidienne. On constate aussi que le média de la lecture est de plus en plus délaissé, et que l’image a beaucoup plus d’impact au niveau idéologique.

L’importance qui est aujourd’hui donnée à l’image s’ex-plique en partie par le fait qu’avant de proliférer, d’être omni-présente et banale dans notre quotidien, elle a tout d’abord été un produit rare.

« En onde sur les écrans qui en une seule minute sont aptes à montrer plus d’images que celles qu’aurait pu contenir en plusieurs vies une riche maison flamande du XVIIe siècle ».1

C’est avec les évolutions technologiques comme l’impri-merie et l’informatique qu’elle s’est banalisée. Mais il n’y a pas si longtemps, l’image était un produit rare, donc précieux. Elle a ainsi conservé son effet d’étonnement, d’attirance voire de choc au regard de l’être humain, d’autant plus qu’elle était généralement liée au culte et à la religion, ce qui lui conférait un statut sacré et un puissant pouvoir idéologique.

«Il viendra un jour où les images remplaceront l’homme et celui-ci n’aura plus besoin d’être, mais de regarder. Nous ne serons plus des vivants mais des voyants.»

André Breton, poète

De plus, elle est capable de contenir en elle-seule une très grande quantité d’informations et de faire appel à de nombreuses références plus ou moins conscientes, et ce en quelques secondes, là où les mots sont généralement beau-coup moins immédiats et demandent malgré tout un certain nombre de clés de déchiffrage.

On se laisse assez facilement séduire par l’iconogra-phie, accessible à tous et qui ne demande pas dans l’immédiat de compétence de lecture particulière. L’image parle à tous, quelque soit sa nature, et quels que soient le langage, la culture ou le statut social de son lecteur.

1. Todd Gitlin, Sommersi dai media, Milan, Etas., 2003, p.3

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Il faut aussi souligner le fait que l’image s’offre directe-ment au lecteur, voire s’impose à lui contre sa volonté (c’est notamment le cas des panneaux publicitaires dans la rue), et est souvent issue d’une posture passive. Tandis que les mots nécessitent une lecture active et volontaire sans quoi ils ne sont pas accessibles. L’image possède donc ce caractère insidieux, à savoir celui de s’imposer à un regard qui n’est pas toujours demandeur. Cette visibilité immédiate lui procure un pouvoir sans égal.

De plus, l’image, au travers de ses qualités esthétiques, transmet à son lecteur des émotions qui interfèrent malgré lui avec son jugement. On tolère en fait l’inexactitude de l’image et on accorde moins d’importance au détail qu’à la lecture d’un texte. On a en fait l’impression que l’image est limpide et montre tout. Le « soft power » de l’image n’est alors plus à démontrer.

« L’image dans les médias audiovisuels, par ses effets et son utilisation (plans rapides, montage alterné...), implique des réponses biologiques (comme la réponse d’orientation de l’œil attiré par le mouvement) et provoque l’hypnose. »1

Conscients des enjeux économiques que représente le développement durable, il est donc normal que l’éco-blan-chiment s’appuie sur l’iconographie pour prospérer. Ainsi, au travers des différents vecteurs iconographiques, le « grand public » a synthétisé les informations et ainsi sont nées des images quasi-indétrônables sur le sujet du développement durable. Si on devait aujourd’hui attribuer à l’« écologie » une couleur, ce serait sans conteste le vert, couleur du végétal. Une matière ? Le bois. Un animal ? L’ours polaire. Une image ? La terre vue du ciel. Des concepts ? Viable, vivable, équitable. Des maux : le réchauffement climatique et le « trou » dans la couche d’ozone. Des responsables : les grands groupes pétro-liers et les industriels. On est même allé jusqu’à « iconographier » le déve-loppement durable : tout le monde a en tête sa célèbre repré-sentation de trois sphères égales qui s’interpénètrent de façon harmonieuse : l’économique, le social, et l’environnemental. Ce schéma n’est pas moins que l’esthétisation du développe-ment durable. Il en donne une image d’équilibre parfait, quasi céleste, qu’il faut rétablir pour « sauver la planète »...

Le rôle de l’image est donc primordial dans la naissance de la « verdôlatrie contemporaine », et dans sa diffusion. Nous verrons par la suite que c’est là le principal support du Greenwashing.

1. Joris Sulivan, La société de l’image, résumé de conférence sur la rela-tion de l’homme à l’image : des peintures primitives à la télévision, l’image fascine et façonne l’humanité, article consulté sur internet le 15 mars 2012 :

http://www.tricycle.marsnet.org/spip.php?article41

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Images et usages

En architecture comme ailleurs, toutes les stratégies commerciales sont à présent tournées vers cette nouvelle « mode du vert », que véhiculent la publicité et les médias et qui est dans la bouche de tous les politiques et industriels.

Mais cet engouement soudain pour des changements en profondeurs de nos habitudes, de consommation notamment, sont à double tranchant. En effet, si l’enjeu initial partait d’un bon sentiment pour l’intérêt commun, et semblait rassembler des milieux bien différents autour d’une cause commune, il apparaît aujourd’hui que ce premier enthousiasme a très vite été saisi par l’empire du capitalisme qui y a rapidement vu une stratégie commerciale hors paire. Le monde capitaliste d’au-jourd’hui tente de faire croire que l’on peu continuer à consom-mer autant, puisque tout est « plus vert ». Il déresponsabilise la population en le séduisant par un « vert » de façade, et qui donne l’impression que consommer est une bonne action en faveur du développement durable. Bien souvent, ce qui est prôné comme vertueux pour la nature est inefficace, voire totalement faux. Parfois même, les innovations n’en sont pas, et on fait passer pour écologique quelque chose de banal voire de néfaste pour l’environnement. Les labels qui voient chaque année le jour servent aussi ce système pervers. En effet, face à une population qui, depuis plusieurs générations, est littéralement bombardée d’images (via internet, la télévision, la publicité...), et y présente donc une forte sensibilité, le média de la publicité visuelle est largement utilisé. Aujourd’hui, une grande partie des publicités mettent en avant leur engagement pour la cause environnementale, de sorte qu’on arrive à nous faire croire que conduire un 4x4 est « écolo ».

Le système est aussi perverti par la création intempes-tive de labels, dits « éco-labels », qui sont pourtant souvent décidés et créés directement par les industriels, qui sont peu, voire pas du tout contrôlés, et qui sont difficiles à comprendre pour la population. Même les labels environnementaux natio-naux ou internationaux présentent de larges failles. C’est le cas du label national HQE, qui malgré son statut obligatoire et très réglementé, est assez facilement contournable par divers pro-cédés bien connus des concepteurs. Les labels ne sont donc pas l’assurance d’un engagement, car ils ne responsabilisent pas, et ne sont pas assez contraignants pour avoir un impact vraiment fort sur le parc immobilier mondial ou sur la produc-tion industrielle.

Fig.15 Logo Mc Donald avant no-vembre 2009

Fig.15 Logo Mc Donald après novembre 2009

Fig.16 Publicité Syngenta, 2009

Fig.17 Publicité Tetrapack, 2009

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Ils ont donc un effet négatif, car les entreprises s’en servent non pas pour justifier d’un savoir particulier, mais pour fleurir la vitrine de leur entreprise, et pour « faire vendre ». A l’heure où la surconsommation est pointée du doigt, le phénomène « vert » tombe à pic pour les firmes commerciales, car il soulage la conscience du consommateur en détournant son attention et qu’il redonne un souffle nouveau, encore plus puissant, au système capitaliste du XXIième siècle.

Fig.18 Publicité LeChat, 2012

Fig.21 Publicité Renault, 2009

Fig.19 Publicité Peugeot 206, 2009

Fig.20 Publicité Leroy Merlin 2009

Fig.22 Publicité Volvo Fig.23 et 24 Publicités Total

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Greenwashing et architecture

Face à ce système qui marchait si bien pour les trusts de la grande distribution, l’écoblanchiment ne tarda guère à contaminer les domaines de l’architecture et de l’urbanisme. Aujourd’hui, l’architecture est présentée dans un « écrin de verdure », qui parfois la recouvre et l’occulte parfaitement. On assiste par exemple à la prolifération de toitures et de murs végétalisés. En outre, on assimile trop souvent le développe-ment durable à des moyens techniques ou technologiques, qui sont pourtant rarement des solutions radicales et ne peuvent faire la base d’un projet de développement durable, mais seule-ment venir comme accessoire complémentaire. C’est pourtant aujourd’hui le principal argument avancé par les concepteurs pour justifier d’un statut HQE par exemple, alors que la dura-bilité d’un bâtiment ne tient pas tant à ce qui est visible, mais plutôt à une conception intelligente, qui prend en compte un contexte particulier mais n’essaie pas d’appliquer un modèle d’écologie (par exemple une maison avec panneaux solaire, puits canadien, fermée au nord, et ouverte au sud).

Le premier centre d’intérêt des constructeurs fut l’an-nonce du manque imminent d’énergie. Face aux politiques du renouvellement du parc énergétique mondial, le monde du bâtiment s’est laissé entraîner. Ainsi a-t-on vu fleurir de nombreuses entreprises qui se disaient expertes en énergies « renouvelables », « écologiques » et « durables », comme le panneau photovoltaïque, la géothermie, et même les éo-liennes. Ces nouveaux appareils ultra perfectionnés étaient d’autant plus alléchants qu’ils étaient en partie subventionnés par l’État et constituaient alors un marché de tous les pos-sibles. Le soufflé est bien vite retombé.

Mais le milieu de l’architecture n’était pas en reste et ne manquait pas de ressources pour continuer à « vendre du vert ». Contraint par les nouvelles réglementations éner-gétiques, qui imposent l’isolation par l’extérieur afin de lutter contre les ponts thermiques, l’architecte est aujourd’hui forcé de simplifier au maximum la volumétrie des bâtiments pour obtenir une compacité optimale. Les balcons et éléments en saillie des façades sont eux aussi proscrits à moins d’être des éléments indépendants. Le champs de la production architecturale est en voie de se réduire considérablement, d’autant plus que les réglemen-tations incendie et PMR se durcissent elles aussi. Il ne reste plus qu’à l’architecte que la façade pour exprimer un langage architectural déjà bien amputé.

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Aussi voit-on apparaître d’ingénieux dispositifs de « fa-çadisme » : des résilles, des doubles peaux, des murs de panneaux photovoltaïques, des murs végétalisés, etc... On voit ainsi apparaître de nouvelles figures en architecture, où le vert, synonyme de végétal, est largement mis à l’honneur. Dans la plupart des projets qui concourent aujourd’hui, les balcons sont maintenant recouverts d’épaisses couches végétales. Ce végétal qui est devenu un véritable outil d’écri-ture architecturale, contribue dans un même temps à bonifier l’architecture : végétaliser son bâtiment permet d’apporter de la fraîcheur, de créer de l’ombrage naturel, d’encourager la bio-diversité, de recréer un équilibre entre l’homme et la nature... Les arguments ne manquent pas. Le végétal fait accepter les projets les plus controversés.

Les architectes (et les commanditaires) ont bien intégré ce système : l’acceptation d’un projet passe par la communi-cation, et cette communication passant essentiellement par l’image, il est normal que les perspectives de rendu se parent de vert. Il suffit de comparer des planches de rendu d’il y a dix ans et d’aujourd’hui : la différence est frappante. Aujourd’hui, un projet qui n’affiche pas un visage « écolo » par la couleur verte est probablement beaucoup moins bien reçu. Il suffit de comparer les deux perspectives ci-contre et de se projeter dans chacune d’elles pour comprendre le pouvoir persuasif de l’image.

Certaines agences d’architecture l’ont bien compris, et affichent sans complexe ce simple verdissement de l’image de l’architecture. C’est le cas de l’agence X-Tu, qui joue avec cette nouvelle vague sans pour autant revendiquer une quelconque vertu environnementale.

Il faut dire que cette tendance est largement encouragée par les règles d’urbanisme : à Paris, chaque construction doit impérativement intégrer 20% de terre plantée. Si cette surface n’est pas disponible au sol, elle doit être reportée sur la façade.

Fig.25 Deux images identiques, mais la seconde est baignée dans un environnement fortement

végétalisé

Fig.26 Perspective du projet X SEA TY de l’agence d’architecture X-Tu

Fig.27 Perspective du projet de refuge bioclima-tique à Macch Picchu par l’agence Soa Architectes

Fig.28 Perspective du projet de construction et de réhabilitation de l’agence d’architecture atelier

Robain Guieysse

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Patrick blanc, botaniste de renommée internationale, a su tirer partie de ce nouvel engouement pour le végétal en architecture, en déposant un brevet de mur végétalisé. Il a su imposer son concept partout à travers le monde.

« […] La plupart des écritures architecturales se prêtent allè-grement à la ‘‘réécriture verte’’ »1.

D’après Michel Pastoureau dans son Dictionnaire des couleurs de notre temps, le vert est « la plus hygiénique des couleurs contemporaines avec le blanc ».2

Massimo Venturi Ferriolo a écrivit à ce sujet : « Le vert, couleur employée dans les plans des urbanistes, n’est qu’un terme dévoyé et stérile, qui ne possède pas du tout les mêmes contenus que le jardin et le paysage. [...] tous les lieux ont un caractère et c’est dans cette optique qu’il faut oeuvrer. On tend de plus en plus à parler de « vert » au lieu de jardin et de paysage »3.

En parallèle, les labels nationaux et internationaux se sont imposés dans le milieu de la construction. Malgré leur statut obligatoire souvent édicté par la loi, toutes les cam-pagnes publicitaires vantaient malgré tout le respect de ces nouvelles normes énergétiques, à en juger par les campagnes publicitaires des constructeurs ou le discours des politiques à ce sujet. « Bâtiment HQE », « Éco-label BBC »...

« Parfois, il n’est même plus nécessaire de mettre grossièrement en scène l’écoblanchiment. Des mots de passe suffisent. ».1

« Verdir » les façades afin de rendre un projet éthique, ( aussi aberrant que soit son programme ) : voici un exemple typique qui illustre parfaitement comment le greenwashing est utilisé en architecture par les politiques. Fin 2008, un projet de Formule1 « écolo » a bien failli voir le jour dans les Yvelines. Ce projet, censé développer une « vallée de l’automo-bile et de la mobilité durable », (outre la volonté de recréer de l’emploi et de valoriser l’activité automobile ) avait pour objectif de préserver l’environnement, de favoriser la biodiversité, de mettre en valeur le paysage et les bords de Seine. Paradoxale-ment, il devait s’implanter sur un site réservé pour l’agriculture biologique en île de France, un site inondable et également site de captage d’aeau potable pour quelques 300 000 personnes.

Fig.29 Façade végétale du Musée des arts premiers à de Jean Nouvel à Paris, conçue par

Patrick Blanc

1. Olivier Namias et Jean-Louis Violeau, novembre 2010, Écoquartier : de l’angélisme à l’expectative, d’architectures, n°195, p. 35 à 59.2. Michel Pastoureau, 2007, Dictionnaire des couleurs de notre temps, coll. Symbolique et société, Christine Bonneton, 192p.3. Le refl et de la beauté absolue : l’éthique de la contemplation, Massimo Venturi Ferriolo, Retour au jardin, Rosario Assunto, Milano, Guerini e Associati, 2006, p. 163.

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Le discours de l’architecte Jean-Michel Wilmotte est tellement en décalage avec la réalité du projet qu’il est difficile de ne pas voir que l’argument écologique n’est qu’une énorme supercherie. Les dispositifs mis en place sont notamment des cap-teurs et des écrans naturels censés atténuer les nuisances so-nores, l’implantation un espace verdoyant au milieu de la piste, et la création d’une promenade végétal pour magnifier la Seine. Le projet prévoyait également la création d’une immense dalle totalement étanche censée empêcher les hydrocarbures de contaminer la nappe phréatique... L’architecte dira à propose de ce projet baptisé « Le paysage comme écrin du circuit » : « L’ensemble de ces mesures contribuent donc à une amélioration et un enrichissement de la biodiversité locale. L’effet de l’aménagement paysager permet aux espèces à large espace de vie d’emprunter le secteur pour circuler entre des biotopes qui leur sont favorables […] En s’appuyant sur les caractéristiques bio-géographiques locales et en développant la diversité, surtout au niveau de la flore, pour attirer un maxi-mum d’espèces animales, l’aménagement paysager cherche à garantir la biodiversité écosystémique. » .

Jean-Michel Wilmotte, architecte urbaniste

Les perspectives de rendu du concours collent parfai-tement avec ce discours : le circuit est présenté comme un gigantesque parc naturel où règnent la faune et la flore. De quoi faire oublier que des courses de bolides bruyants et polluants devaient s’y dérouler. Face à la réticence des association éco-logistes et des habitants, le projet a finalement été abandonné.

On pourrait citer un tas d’autres exemples de la sorte tout aussi aberrants, comme certains aspects du projet du Grand Paris, ou encore les très nombreux projets d’écoquartiers qui fleurissent à travers l’Europe et qu’il est parfois difficile de distinguer de simples lotissements...

En outre, on peut se demander si l’architecture éco-logique est une réelle innovation, puisqu’on assiste actuelle-ment au retour d’anciens modes de construction bien connus de nos grands-parents, et de matériaux d’antan (la chaux ou le chanvre, etc...). D’autre part, certaines civilisations font de l’écologie depuis plusieurs centaines d’années sans pourtant s’en vanter. L’architecture écologique, n’est-ce pas finalement l’architecture [éco]logique ? C’est à dire issue d’une conception basée sur le « bon sens » ? Pour l’architecte Daniel Pearl, associé-fondateur de l’ŒUF (Office de l’éclectisme urbain et fonctionnel), « La notion de bâtiment durable va bien au-delà de la simple efficacité éner-gétique. Il s’agit d’un concept beaucoup plus large qui s’appuie sur trois piliers complémentaires, mais indissociables. À savoir la solidarité sociale, l’efficacité économique et la responsabilité écologique ».

Fig.30 Perspective de rendu du projet de F1 de l’agence d’architecture Wilmotte

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PARTIE 3 ÉCOBLANCHIMENT : VALEURS ESTHÉTIQUES, VALEURS ÉTHIQUES

L’effet «Boomerang» du greenwashing

En juin 2011, l’IFOP (Institut Français d’Opinion Publique) publie les résultats d’une enquête nationale sur le thème « Les français et le greenwashing ». L’objectif de cette enquête est de comprendre quel regard portent les français sur la « vague écologique » qui envahi la sphère économique du pays. Sur l’échantillon des 1006 personnes interrogées, 85% considèrent le critère du développement durable et du respect de l’environnement dans la consommation comme quelques chose d’important à leurs yeux. Cette proportion est en baisse par rapport à 2009, ce qui montre bien qu’il y a un dés-engoue-ment progressif pour ce mouvement. A propos de la publicité présentant des arguments éco-logiques, 83% considèrent qu’elle n’est pas assez contrôlée, et plus de la moitié pense qu’elle est trop moralisatrice et qu’elle va trop loin dans son discours sur les vertus de l’environne-ment. On peut alors se demander si il n’existe pas un lien direct entre ces deux constats. Le fait que la publicité soit de plus en plus tournée vers l’argument environnemental est-il la cause du « désenchantement » de la population envers ces probléma-tiques ?

La population semble être de plus en plus lucide face aux vertus « écolos » vantées par la publicité. Plutôt que d’essayer de faire la part des choses entre ce qui est vrai et ce qui est faux (chose qui nécessite par ailleurs quelques connaissances et compétences en la matière), elle a tendance à nier en bloc ce qu’elle considère comme pure stratégie commerciale. Les campagnes publicitaires qui avancent des arguments écolo-giques, quelles que soient leurs réelles préoccupations envi-ronnementales, sont dès lors totalement discréditées à ses yeux. Cette méfiance est donc le principal dommage causé par l’écoblanchiment. Si ce dernier profite à un petit nombre, il nuit à tous ceux qui tentent vainement de faire changer les choses. C’est en cela qu’il freine directement les avancées de la « lutte écolo ». Car face à cet épineux débat, les industriels et les constructeurs battent en retraite de peur de se tirer eux-même une balle dans le pied en communiquant sur l’environnement.

Or, il faut encourager toute entreprise de démarche environnementale, aussi balbutiante soit-elle.

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L’autre effet pervers du greenwashing, c’est que le consommateur n’a pas non plus confiance dans les structures comme les associations ou les labels, puisqu’elle tiennent mot pour mot le même discours que les industriels et sont parfois eux aussi entâchés par le phénomène. En définitive, la popula-tion ne sait plus qui croire, et elle finit par ne plus croire. Cela se traduit par un refus systématique de toute tentative de la part des industriels et des constructeurs. Aujourd’hui, les objectifs ont changés : il ne s’agit plus seulement de sensibiliser la population aux enjeux du déve-loppement durable et au respect de l’environnement. Il s’agit maintenant de communiquer sur le greenwashing et d’aider le consommateur à réguler sa critique et son jugement. L’objectif des années à venir va certainement être d’œuvrer au rétablis-sement de l’équilibre entre esthétique et éthique.

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Les dangers d’une éventuelle dérive : assimilation esthétique/éthique

Comme nous l’avons constaté jusque là, la sphère éco-nomique autant que la sphère politique, parfois se confondant, ont su s’emparer de la « vague verte » au nom de différents enjeux. Nous avons également pu observer que pour une grande partie de la population, la cause environnementale est quelque chose d’intégré (ou en voie d’être intégrée) aux modes de vie. Or, alors que la majorité des scientifiques s’accordent sur l’état précaire de notre planète, les enjeux du développe-ment durable et du respect de l’environnement portent une si-gnification éthique tellement forte qu’on ne pense absolument pas à la remettre en question. Autant que possible, il « faut » acheter bio et équitable, construire durable, économiser les énergies, acheter un vélo électrique... Il serait absurde de pen-ser le contraire étant donné que la science parle d’elle même et que son verdict est irréfutable.

Tous ces changements idéologiques s’opèrent très rapi-dement, presque dans la précipitation face aux enjeux qui sont indiscutables : la dégradation imminente de notre milieu. La pression face à ce nouveau besoin de « sauver la planète » pour le bien de tous est entretenue par les très nombreux films qui traitent de ce sujet et les campagnes de sensibilisation qui dramatisent parfois la situation. Il n’est pas question ici de remettre en cause cette soudaine prise de conscience ( plus que nécessaire ) qui a mis bien du temps à éclore dans la société que nous connaissons. Cependant, nous devons nous questionner sur le cours du déroulement de ces changements soudains. Car cette précipitation pause problème.

D’un côté, l’histoire a souvent montré que ce genre de situations pouvaient être extrêmement productives. Par exemple, les guerres mondiales ont souvent été de très forts vecteurs d’innovations technologiques et sociales. Durant la guerre de 1914, la recherche en armement a fait un bond phé-noménal. Il aurait certainement fallu plusieurs années de paix pour le franchir. Durant la guerre froide, la course à l’espace qui opposa les États Unis et l’URSS a permis à l’homme de faire des découvertes inédites ; on a même réussi à envoyer l’Homme sur la Lune, chose qui même aujourd’hui paraît impossible. Ces guerres ont également été le siège d’évolutions sociales histo-riques, comme les prémices de l’émancipation féminine liée à l’absence des hommes.

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Dans des situations extrêmes, l’Homme est ainsi capable de l’impossible, surtout lorsque sa vie est en danger. Mais l’absence de temps est aussi parfois la cause de dérapages, d’erreurs ou de débordements. La peur fait tout accepter et en temps de crise importante, la population a besoin de valeurs sûres, d’une éthique forte à laquelle se raccrocher. Actuellement, à l’heure de la crise économique mon-dialisée que nous vivons, des sociologues ont mis en lumière le fait que dans une telle situation, la population a besoin de repères, souvent d’ordre esthétique, et que les marques, par exemple, qui ont su conserver leur image, leur logo depuis des années, qui maintiennent leur charte graphique et le look de leurs emballages résistent mieux à la crise. C’est notamment le cas de la marque Nutella, Apple, ou Coca Cola. Ce qui ne change pas rassure et fait référence.

La cause est acceptée d’autant plus facilement que les valeurs prônées se prétendent universelles et tendent à ras-sembler la population.

En politique, on constate également qu’en période de grand bouleversement, la population a tendance à durcir son jugement et à s’orienter vers un extrême. Dans tous les cas, l’esthétique joue généralement un grand rôle dans l’imaginaire collectif. Elle est souvent partie intégrante du phénomène. C’est un formidable outil de transmission idéologique. Dans toutes les grandes dictatures, elle sert à faire « passer la pilule ». On peut ici faire mention des portraits de Mao Zedong, ou de Staline trônant dans toutes les salles de classes et de leurs affiches de propagante les mettant en scène durant des bains de foules joyeux, affichant un visage paternaliste et ras-surant. L’image a une force communicationnelle indéniable, et les dictateurs ou autres politiciens l’ont bien compris et l’ont largement expérimenté par la propagande. C’est ainsi que dans toutes les dictatures, l’image est très contrôlée par la censure, et les artistes sont entièrement au service de l’autorité.

Ainsi, l’architecture constitue-t-elle un formidable outil politique, sorte de « soft power », puisqu’elle représente, en plus d’une image, une réalité matérielle qui lui apporte une grande force symbolique. Ce média a toujours été largement utilisé, en Égypte avec les pyramides, en Union soviétique avec l’architecture stalinienne, par les rois de France avec leurs places royales à leur image, etc... On pourrait encore citer de très nombreux exemples, comme Ceaucescu avec sa maison du peuple en Roumanie.

La couleur a également beaucoup de force symbolique ; elle est depuis toujours utilisée dans le milieu politique et culturel. Là non plus les exemples ne manquent pas : chaque parti politique, chaque enseigne en possède une. L’utilisation de la couleur n’est généralement pas ano-dine, et se réfère toujours à l’histoire et à la culture.

Fig.33 Affiche de propagande du parti commu-niste chinois vantant la victoire de Mao durant la

guerre civile de chine, 1949

Fig.34 « Le grand Staline est le drapeau de l’amitié des peuples », affiche de propagande de Staline, dit « le petit père des peuples », années

50’

Fig.35 Palatul Parlamentului, Bucarest, Roumanie, édifié sous Ceausescu, 1984

Fig.31

Fig.32

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Aujourd’hui, la situation est comparable : période de crise, de troubles, de peur, d’incertitude, perspective pessi-miste pour le futur... Nous avons vu que l’écologie et le déve-loppement durable ont leurs propres images, leurs propres symboles. La couleur est toute trouvée : le vert. Les valeurs prônées apparaissent comme universelles, et surtout, elles affichent une valeur éthique incontestable et évidente. Ainsi, il est difficile de ne pas être d’accord avec ces nouveaux enjeux. Le danger réside donc dans le fait que l’écologie est quelque chose que personne n’ose remettre en question. La population suit le phénomène de l’écologie avec la plus grande attention. Les politiques l’ont bien compris et s’en servent déjà pour leur propre compte. En ces temps de campagne présidentielle, quel candidat n’affiche pas clairement dans son programme une volonté (plus ou moins prononcée) de parer à la destruction de l’environnement ? A la manière des industriels qui ont su tirer parti de cette « mode », n’est-il pas alors pré-visible que le milieu politique s’en empare à son tour ?

Il convient de rester attentif à un éventuel glissement entre esthétique (affiches, beaux discours, images univer-selles...) et éthique, puisque celui-ci n’est pas à exclure. Il faut être méfiant, développer un esprit critique acerbe afin d’éviter la radicalisation d’un mouvement, aujourd’hui plus phénomène de mode que réelle idéologie, au risque de la voir se transfor-mer en croyance quasi religieuse.

Fig.36 Cité impériale (dite « Cité interdite ») de Chine, Pékin, 1420

Fig.37 Casa del Fascio, de Giuseppe Terragni, Côme, Italie, 1936

Fig.38 Kongresshalle commandité par Hitler, dessiné par Albert Speer en 1935

Fig.39 Le centre Georges Pompidou, ou palais Beaubourg, conçu par R.Rogers et R.Piano, sous

la présidence de Pompidou en 1977

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Greenwashing : lever le mythe pour avancer

Si le greenwashing présente des dangers assez directs et évidents, on ne peut toutefois oublier qu’il est également un moteur indispensable aux avancées en matière d’écologie. En ce sens, il n’est pas seulement mensonge et illusion, mais que sous son aspect esthétique arrangeant et attrayant, il promeut ouvertement le développement durable et tient un rôle de sen-sibilisation hors paire.

Il ne faut pas nier en bloc un phénomène qui constitue un formidable outil de communication qu’il est nécessaire d’ex-ploiter. Comme dans de nombreux domaines, il faut se rendre à l’évidence : tout le monde n’est pas apte à comprendre les tenants et les aboutissants de systèmes scientifiques, socio-économiques ou politiques complexes. La diffusion et l’expres-sion des idées par l’image est bien entendu le biais le plus accessible pour la majorité des gens. Il faut également faire attention à ne pas taxer d’écoblanchiment toute tentative de communication sur le développement durable, car même si la « vague verte » a su profiter à de nombreuses institutions, il ne faut pas oublier que certaines d’entre elles ont pris de réels engagements en matière d’environnement et de développe-ment durable.

En outre, il semble que la cause environnementale ap-paraisse aux yeux du plus grand nombre comme un combat éthique, qui concerne tout le monde, et qui a donc le pouvoir de rassembler des personnes différentes autour d’un intérêt com-mun. Et même si cette idée peu paraître naïvement utopique, elle n’en reste pas moins intéressante à l’heure où la population manque de repères et accumule les désillusions. Quoi de plus beau sur le plan humain que d’avoir le sentiment commun que nous somment « tous sur le même bateau » au sens propre du terme, et que nous allons devoir ensemble, main dans la main, collaborer pour reconstruire un monde meilleur ? Car la science a parlé, et son verdict est sans appel. Et malgré les derniers sceptiques, il est aujourd’hui acquis qu’une tâche faramineuse reste à accomplir : sauver la planète d’une mort programmée. C’est justement cette énergie positive, aussi infime soit-elle qu’il faut encourager plutôt que de générer la frustration et la désillusion.

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Fort heureusement, le phénomène du greenwashing est aujoud’hui connu par tous les protagonistes de la chaîne du développement durable, et des organisations publiques et pri-vées travaillent déjà à lutter contre les effets néfastes de ce phénomène grandissant.

Ce fut en premier lieu le cas des labels (dits éco-la-bels), qui avaient pour objectif de réguler les revendications des industriels en matière de respect de l’environnement et de développement durable. Ces labels furent assez vite discrédi-tés par la création de labels par les industriels eux-mêmes au design communicatif et leur éthique plus que douteuse. Les labels nationaux et internationaux, quant à eux contrôlés, ont ainsi très vite perdu en efficacité car noyés dans un flot illisible de labels de toutes sorte précédés par le préfixe « éco » et créés de toute pièce par les industriels.

Face à ce brouillage d’information, des chercheurs de l’université de Montréal sont actuellement en train de chercher des solutions afin de mieux contrôler les appellations et les valeurs prônées par les labels, en tentant de mieux les fédérer. Recyc-Québec est ainsi en train de développer une certification de type ISO, qui vise à faire référence sur le plan international.

Dans le domaine du bâtiment, il existe de nombreux systèmes qui visent à mesurer et évaluer la conception et la construction des bâtiments durables. C’est notamment le cas de LEED® Canada, Green Globes et BREEAM.

De nombreuses associations de consommateurs tentent aussi de sensibiliser à population à l’écoblanchiment en les aidant à décrypter les information délivrées par les industriels et les promoteurs. Certains sites internet permettent ainsi de communiquer et d’échanger autour de ce phénomène comme le site GreenwahingIndex.com ou le site de l’Observatoire Indé-pendant de la Publicité.

Le prix pinocchio est décerné tous les ans à l’enseigne qui a le plus eu recours au greenwashing dans ses campagnes de publicité, et récompense ainsi ses lauréats en leur attribuant le mérite du plus gros mensonge commercial de l’année.

Fig.40 Couverture du livre de Romain Felli, 2008, Les deux âmes de l’écologie, L’Harmattan.

Fig.41

Fig.42

Fig.43

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Enfin, le groupe de design STAR strategies + architec-ture participe grandement à cette lutte anti-greenwashing en produisant des images satiriques de bâtiments grossièrement repeints en vert pour signifier leur engagement « écolo ». Il crée des images fortes en reprenant des monuments d’archi-tecture mondialement connus qu’il détourne avec humour pour provoquer une interrogation. Le projet cénotaphe pour Newton de Boullée devient ainsi une sphère recouverte d’une impeccable pelouse verte. Ou encore, le camp de concentration d’Auschwitz devient par-faitement éthique une fois recouvert sous une épaisse couche végétale...

Le message est simple : l’humour plutôt que la peur pour remédier au greenwashing.

Fig.44 à 47 Quelques images du travail « O’ Mighty Green » de STAR strategies + architecture, 2010-2011

Fig.44 Fig.45

Fig.46 Fig.47

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Conclusion L’écoblanchiment est né d’une lente maturation esthé-tique. L’histoire a fait naître des images de l’environnement et de la Nature de plus en plus fortes, et un vocabulaire icono-graphique bien particulier jusqu’à faire resurgir un phénomène passé : celui de la verdôlatrie. Cette ‘‘verdôlatrie contempo-raine’’, bercée par de nombreuses images du passé, est soudain entrée en collision avec le discours environnemental alarmiste des scientifiques. L’image est alors devenue support de l’idée « écologique » à tel point qu’elle a même contribué à façonner cette dernière en la simplifiant : schématisation du développe-ment durable, synthèse du problème, utilisation du vert comme couleur emblématique...

Cette idolâtrie du végétal et du naturel fut bientôt re-jointe par les politiques et les industriels. Face à cet engoue-ment soudain, cet « appel de la Nature » ( entre phénomène de mode et profonde idéologie ), les sphères économiques et politiques se sont immédiatement emparées de cette nou-velle opportunité de déculpabiliser et de déresponsabiliser le consommateur. Ils ont utilisé l’image pour communiquer sur un phénomène déjà fortement marqué sur le plan iconographique. Le développement durable est ainsi devenu le premier sujet de communication, et un formidable argument de vente à fort caractère moral. Ce rapprochement entre esthétique et éthique, de la même manière que l’assimilation entre paysage et environne-ment, est un procédé de persuasion qui n’est pas sans rappeler les grandes dictatures de notre monde. D’autant plus que la cause environnementale a la prétention de rassembler tous les hommes autour d’une cause commune. Face à l’évidence de la destruction de notre milieu, difficile alors de ne pas être aveuglé par un discours écologique bien huilé. C’est ce en quoi réside le plus gros danger de l’écoblanchiment : il agit de façon insidieuse, et il est difficile à repèrer et à dénoncer. Ainsi, il ne paraît pas aberrant d’imaginer qu’une assimilation totale entre esthétique et éthique soit possible. Celle-ci conduirait alors plutôt à une croyance plus qu’à une idéologie.

Toutefois, cette dérive commence lorsque s’installe la paranoïa. Être conscient du problème de l’écoblanchiment est une chose. Mais il faut également prendre conscience que toute communication sur l’environnement n’est pas focément coupable d’écoblanchiment. Le fait d’en parler et déjà le signe d’une prise de conscience générale plutôt encourageante. Enfin, le greenwashing est aujoud’hui un phénomène bien connu qui a plutôt tendance à nuire à celui qui l’utilise qu’au consommateur. Et de nombreuses organisations se sont attelées à lutter contre ces pratiques.

Il faut maintenant veiller à ce que l’esthétique, au travers de l’iconographie, soit un outil pour promouvoir le développe-ment durable et le respect de l’environnement, et non plus pour « écoblanchir » quelques riches industriels.

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IconographieImage de couverture : retouche de l’image ini" ale libre de droit et de détour-

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pagande/

Illustra! ons : La plupart des image sont issues du moteur de recherche Google

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Fig.3The Yorck Project: 10.000 Meisterwerke der Malerei.

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Fig.4Couverture du livre «The Garden City Utopia: a Cri! -

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1085481-woodstock-csg024-1-_jpg.html

Fig.7Hopper’s Hippie Art : h� p://hoppersart.com/

Fig.8Iain McKell, V magazine n°61

Fig.9Affi che du fi lm, © PATHE DISTRIBUTION : h� p://

www.allocine.fr/

Fig.10Photo de Yann arthus Bertrand, Couverture du livre

«La terre vue du ciel», paru en 1999 aux édi! ons de

la Mar! nière

Fig.11Affi che : Pascal LESOING pour YDEO, Concep! on

: YDEO, Photos : © Yann Arthus-Bertrand / fi lm

«HOME»

Fig.12Dessins de Luc Schuiten disponibles sur le site de

l’auteur: h� p://vegetalcity.net/

Fig.13Photos de Paul Tahon and R & E Bouroullec. Dispon-

ble sur le site des frères Bouroullec : h� p://www.

bouroullec.com/

Fig.14h� p://kwanzaamillenium.wordpress.com/2011/06/

Fig.15Site de Mc Donald’s : h� p://www.mcdonalds.fr/

Fig.16Site de Syngenta : h� p://www3.syngenta.com/

country/fr/fr/Pages/home.aspx

Fig.17Site de Tetra Pack : h� p://www.tetrapak.com/fr/

Pages/default.aspx

Fig.18Site de Le Chat : h� p://www.lechat.fr/index.php

Fig.19Site de Peugeot : h� p://www.peugeot.fr/

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Fig.21Site de Renault : h� p://www.renault.

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Fig.22Site de Volvo : h� p://www.volvocars.com/fr/Pages/

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Fig.23 et 24Site de Total : h� p://www.total.fr/

Fig.25Laurent Brixius, 5 mai 2007, Pouvoir de l’image et ma-

nipula! on, ar! cle consultable librement sur : h� p://

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pouvoir-de-l-image-et-manipula! on-1ere-par! e/

Fig.26Site de l’agence X-Tu : h� p://www.x-tu.com/

Fig.27 et 28Concours d’architecture pour la construc! on de

nouveaux logements à Paris septembre 2008 - sep-

tembre 2009, exposi! on au Pavillon de l’Arsenal du

13.10.2009 au 15.11.2009

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Fig.29h� p://barbe4.free.fr/Wordpress/?p=30

Fig.30Site internet de l’architecte Wilmo� e : h� p://www.

wilmo� e.fr/

Fig.31Site internet de Coca-Cola : h� p://www.coca-cola-

entreprise.fr/

Fig.32Site internet de Ferrero : h� p://www.ferrero.fr/nos_

marques/nutella

Fig.33h� p://www.photographersdirect.com/buyers/stock-

photo.asp?imageid=2537135

Fig.34Sur le site : h� p://lesimagesdesdictateurs.center-

blog.net/

Fig.35Photo de Georges M. Groutas, le 6 février 2010 à

Ghencea, Bucarest, Roumanie. Photo disponible sur

Flickr.com

Fig.36h� p://namhao.com/Details.aspx?ID=206&DID=9

Fig.37The Terragni Atlas: Built Architectures Daniel Libes-

kind et A! lio Terragni (Relié – mai 2004)

Fig.38Anonyme, Google images : h� p://www.onelarge-

prawn.co.za/2009/02/18/totalitarian-architecture-

of-the-third-reich/

Fig.39Photo du © Musée na" onal d’Art moderne

Fig.40Couverture du livre de Romain Felli, 2008, Les deux

âmes de l’écologie, L’Harma� an.

Fig.41Logo du site Greenwashing Index : h� p://www.

greenwashingindex.com/

Fig.42Logo du site de l’Observatoire indépendant de la pu-

blicité : h� p://observatoiredelapublicite.fr/

Fig.43Logo du site du prix Pinocchio : h� p://www.prix-pi-

nocchio.org/

Fig.44 à 47Site internet de l’agence STAR strategies + architec-

ture : h� p://st-ar.nl/

Fig.48Cécile Dufl ot lors d’un discours sur l’Europe d’Eva

Joly le 12 novembre dernier à l’occasion du Congrès

du Par" vert européen (PVE). En sou" ent à la candi-

date, les écologistes arborent ses fameuses lune� es,

mais en cartons vert.

Ce document est imprimé sur du papier non recyclé, non recyclable et issu de forêts non renouvelables qui participent grandement à la déforestation.

Fig.48

Mots clé : greenwashing, écoblanchiment, écologie, développement durable, environnement,

esthétique, éthique, image, communication, iconographie, marketing, publicité

Résumé :

Actuellement, il semblerait que l’on assiste à une verdolâtrie contemporaine.

Dans une société baignée d’images, ce phénomène se traduit par l’esthétisation

d’une idéologie naissante : celle du respect de l’environnement.

Face à cet engouement soudain, les sphères politiques et économiques se

sont emparées de cette « vague verte » et s’en servent à des ! ns idéologiques et

économiques pour redorer leur image : c’est le greenwashing.

Cette rencontre et assimilation entre valeurs esthétiques et valeurs éthique

nous pousse à nous questionner : quelles conséquences pour demain ?

Nowadays, it seems as if we are spectator of a contemporary « verdolâtrie

». In a society of pictures, that phenomenon is showing a new ideology by icono-

graphy : respecting environnement.

In front of that sudden craze, politic and economic environnements have

seized of this « green wave », using it for their own account and restore their

image : this is greenwashing.

This meeting and assimilation between esthetics and ethics values makes us

ask ourselves questions : what are the consequences for tomorrow?

Écoblanchiment nouvelles esthét[h]iques