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Association Revue Française de Sociologie École publique, école privée Comparaison des trajectoires et de la réussite scolaires Author(s): Chloé Tavan Source: Revue française de sociologie, Vol. 45, No. 1 (Jan. - Mar., 2004), pp. 133-165 Published by: Sciences Po University Press on behalf of the Association Revue Française de Sociologie Stable URL: http://www.jstor.org/stable/3323184 . Accessed: 11/07/2014 08:41 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Sciences Po University Press and Association Revue Française de Sociologie are collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Revue française de sociologie. http://www.jstor.org This content downloaded from 5.198.113.170 on Fri, 11 Jul 2014 08:41:16 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

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Association Revue Française de Sociologie

École publique, école privée Comparaison des trajectoires et de la réussite scolairesAuthor(s): Chloé TavanSource: Revue française de sociologie, Vol. 45, No. 1 (Jan. - Mar., 2004), pp. 133-165Published by: Sciences Po University Press on behalf of the Association Revue Française deSociologieStable URL: http://www.jstor.org/stable/3323184 .

Accessed: 11/07/2014 08:41

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R.frang. sociol., 45-1, 2004, 133-165

Chloe TAVAN

Ecole publique, ecole priv e

Comparaison des trajectoires et de la reussite scolaires*

RISUMt

Ce texte propose, sur la base d'une exploitation du panel 1989 de l'Fducation nationale, de poursuivre l'entreprise de comparaison de la reussite scolaire entre le secteur priv6 et le secteur public initiee par G. Langouat et A. Leger dans leur ouvrage Ecole publique ou ecole prive'e ? Trajectoires et re'ussites scolaires publi6 en 1994. Apres avoir present6,

' tra- vers un 6tat des lieux des recherches americaines, l'importance potentielle des biais de s1lection et la n6cessit6 de les prendre en compte, cet article compare les deux secteurs selon deux axes : celui de 1'efficacit6 de chaque secteur, c'est-a-dire sa capacit6 & produire un r6sultat global, et celui de son 6quit6, c'est-a-dire sa capacit6 'a r6duire en son sein les in6galit6s sociales de r6ussite. L'avantage apparent d'une scolarisation continue dans le priv6 mis en evidence par G. Langoudt et A. L6ger ne se maintient pas toujours lorsque l'on raisonne sur des 61'ves rendus comparables. Le fait de frequenter un 6tablissement priv6 est ainsi au mieux sans influence sur le parcours effectu6 dans le cadre du college. Cet effet global varie selon la position relative du secteur priv6 dans l'offre scolaire locale : dans les territoires de forte implantation du priv6, les trajectoires scolaires des e61ves, de m6me que leur recrutement social, different peu entre les deux secteurs. Enfin, conform6ment aux r6sultats 6tablis par G. Langoudt et A. L6ger, le secteur priv6 semble connaitre en son sein des 6carts sociaux de r6ussite moindres.

L'6cole priv6e a 6t6 et reste encore un facteur important de changement de l'institution scolaire. Paradoxalement, le double systeme d'enseignement qui existe aujourd'hui est n6 avec les lois scolaires de la IIIe R6publique (de 1882, 1886 et 1889). En effet, si ces dernieres instaurent l'6cole publique, gratuite et obligatoire, elles ne mettent pas pour autant fin au systeme scolaire ant6rieur et permettent le maintien, sinon le d6veloppement, de l'6cole priv6e (Tanguy, 1972, p. 326, p. 332). Le caractere partiel et inabouti de ces r6formes, qui ne concernent que l'enseignement primaire, est ainsi au fondement de ce qu'il convient d'appeler, "a la suite de L. Tanguy, la << dualit6 scolaire >>. Cette coexistence a souvent suscit6 des d6bats passionn6s illustr6s notamment par les grandes manifestations de defense de l'enseignement libre de 1984 - suite

* Je tiens ' remercier vivement Louis- Andre Vallet pour ses critiques et ses encoura- gements tout au long de ce travail, ainsi que le Lasmas-Institut du Longitudinal (CNRS) pour

avoir mis a ma disposition les donn6es du panel national 1989 d'l61ves du second degr6 suivi par le ministere de l'Education nationale.

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Revue franpaise de sociologie

au projet de crier un << grand service public unifi6 et laique >> - ou par les mobilisations des partisans de l'6cole lai'que contre le projet de revision de la loi Falloux en 1994.

Bien qu'6tant au coeur de la << querelle scolaire >>, l'6cole privee n'a fait l'objet, en France, que de rares etudes, aux orientations disciplinaires et theo- riques diverses. Trois approches peuvent globalement &tre distinguees: 1) Une approche historique et institutionnelle s'attachant a decrire les condi- tions d'6mergence du secteur priv6 tel qu'on le connait aujourd'hui (Tanguy, 1972 ; Prost, 1982) ; 2) Une analyse du choix du secteur de scolarisation par les familles considerees comme des agents rationnels et strategiques (Ballion, 1980) dont les choix restent cependant largement soumis aux contraintes culturelles (Heran, 1996 ; Tournier, 1997) ; 3) Une comparaison de l'effica- cite des deux secteurs illustree essentiellement par l'ouvrage de G. Langouet et A. L6ger, Ecole publique ou &cole privie ? Trajectoires et rdussites scolaires, publi6 en 1994.

Dans cet ouvrage, G. Langouet et A. Leger concluent & une plus grande efficacit6 du secteur prive (1). Plus precisement, ils constatent que si les el1ves tirent globalement benefice d'une scolarisation ininterrompue dans le priv6, l'avantage final est essentiellement acquis au cours de la premiere moiti6 du premier cycle. En effet, les 6lves du priv6 atteignent plus souvent et plus rapidement le niveau de la quatrieme, mais leurs chances d'acces en seconde et en terminale sont relativement proches de celles des lyceens du public. La diff6rence de composition sociale entre les deux secteurs ne suffit pas, selon les auteurs, a rendre compte totalement de ces 6carts : lorsque l'on se place au sein de groupes sociaux homogenes (2), l'avantage apparent du priv6 se maintient, notamment pour les employes. Cette plus grande efficacit6 du secteur priv6 s'accompagne selon eux d'une plus grande 6quit6. I1 leur apparait en effet <<incontestable que l'enseignement priv6 a globalement r'duit en son sein les 6carts de reussite selon l'origine sociale. A l'exception des enfants d'agriculteurs qui semblent patir d'une scolarisation dans le priv6, les enfants des classes populaires y reussissent mieux >> (1994, pp. 94-95). C. Ben-Ayed (1998), dans sa these consacree a la diff6rence sectorielle de reussite des enfants issus des classes populaires, confirme, sur la base de donnees plus recentes (le panel 1989 du ministere de l'Education nationale), le maintien d'un benefice propre aux 6l'ves de milieux populaires A &tre scolarises dans le secteur priv6 (p. 541).

On peut cependant s'interroger sur la portee des resultats 6tablis par G. Langou&t et A. Leger. Certes, ils designent une realit6, mais, en se restrei- gnant aux seules diff6rences dans l'origine sociale des 6lkves, ils ne peuvent pas rendre compte des 6carts reels de reussite scolaire entre les deux secteurs, c'est-i-dire des 6carts qui existent au-dela des disparites de recrutement.

(1) Leurs analyses s'appuient sur une exploitation du panel 1972-1973-1974 de l'Education nationale.

(2) Le groupe social est ici d6fini par la cat6gorie socioprofessionnelle du chef de famille.

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Aussi, nous nous proposons de poursuivre le travail de comparaison entre public et priv6 entrepris par G. Langou&t et A. Leger, mais en adoptant une demarche methodologique visant a prendre veritablement en compte l'ensemble des sources d'heterogeneit6 individuelle entre les deux secteurs. L'avantage global du priv6 persiste-t-il lorsque l'on raisonne sur des 6lkves rendus comparables en tous points (c'est-"-dire au-del" de la seule origine sociale) ?

Par ailleurs, G. Langou&t et A. Leger n'identifient pas clairement les bases sur lesquelles une comparaison des deux secteurs doit se fonder : ils confon- dent en particulier les notions d'efficacit6 et d'6quit6. Pour prouver la plus grande reussite dans le priv" & structure sociale comparable et d6montrer que les 6carts sociaux y sont plus tenus, ils ne regardent qu'une seule et meme chose : les diff6rences sectorielles de reussite a origine sociale donnee. Or les notions d'efficacit6 et d'6quit6, qui sous-tendent leur raisonnement, doivent &tre clairement distinguees et mesurees a l'aide d'outils diff6rents. La notion d'efficacite doit &tre entendue comme la capacit6 moyenne a produire un resultat global ou A& lever le niveau d'acquisition des 6lves, tandis que celle d'dquite renvoie a la capacit6 du systeme scolaire, ou plus precisement d'un systeme scolaire (dans le cas present, il s'agit du secteur priv6 d'une part, et du secteur public d'autre part), a reduire les 6carts de performances scolaires entre des 6lkves issus de milieux sociaux diff6rents (3). Dans ce dernier cas, la question est donc de savoir si les secteurs public et priv6 traitent de la meme fagon les caracteristiques sociales et culturelles de leurs 6lves. Autrement dit, public et priv6 produisent-ils les memes inegalites sociales ?

Enfin, nous introduirons une dimension originale dans l'analyse, celle de la position relative de l'6cole privee dans l'offre scolaire locale. Les fortes variations dans l'implantation geographique de l'enseignement priv6 - tres minoritaire dans certains departements, il est majoritaire dans d'autres, notamment en Vendee oii il accueille 54,3 % des 6lves du second degr6 - nous invitent en effet "& mettre l'hypothese que les contextes de scolarisation dans le priv6 prennent des formes diff6rentes selon son influence locale. On peut en effet s'attendre a ce que le recrutement soit plus < democratique >> dans un departement oui le priv6 est tres fortement implants que dans un departement oii il n'accueille qu'une faible part des 6lkves, mais aussi & ce que l'enseignement priv6 ne remplisse pas la meme << fonction>> selon ces territoires : une fonction proche de celle de l'enseignement public dans les d6partements oi il est fortement implants et une fonction plus specifique 1 oi il est moins present.

(3) A. Mingat (1988) la d6finit ainsi : o L"'6quit6" s'attache [...] aux caract6ristiques person- nelles des individus et a la fapon dont 1'6cole traite de ces caract6ristiques. ))

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Revue frangaise de sociologie

Public, priv'-: des biais de selection importants

La coexistence de deux systemes de scolarisation n'est pas propre a la France, ni meme le d6bat sur la < sup6riorit6 >> de l'un sur l'autre. Cependant, alors qu'aux Etats-Unis ce d6bat a donn6 lieu " une abondante litt6rature sociologique - notamment a la suite de la publication du rapport Public and private school de J. Coleman, T. Hoffer et S. Kilgore (1981) -, en France, il en est largement rest6 au niveau des querelles partisanes. Les recherches americaines ne peuvent certes pas servir de base de comparaison des r6sultats, tant les contextes scolaires frangais et americains sont dissemblables, mais elles pr6sentent l'inter&t ind6niable de montrer comment, dans ce pays, le d6bat public/priv6 a 6t6 investi par la r6flexion sociologique, et de faire appa- raitre les problemes methodologiques que pose la comparaison des deux secteurs. Les publications ulterieures au rapport Coleman ont ainsi mis en evidence non seulement la n6cessit6 de tenir compte de l'effet de sel1ection du priv6, bien au-del& de l'origine sociale, mais aussi la sensibilit6 des r6sultats obtenus aux caract6ristiques individuelles introduites dans les modeles.

Le cas amiricain : dibat social et controverses mithodologiques

Dans leur rapport Public and private school (1981) (4), ainsi que dans leurs articles posterieurs qui en reprennent les principales conclusions, J. Coleman, T. Hoffer et S. Kilgore concluent " une plus grande efficacit6 apparente des 6coles du secteur priv6 catholique, au regard du niveau atteint par les e61ves. Les analyses effectu6es pour tenir compte de l'effet de selec- tion du secteur priv6 tendent certes & r6duire les 6carts, mais ne les annulent pas totalement : meme si plus de la moiti6 des diff6rences brutes observees entre les deux secteurs sont en realit6 dues " des diff6rences initiales de composition de la population, une part non n6gligeable de ces diff6rences reste inexpliqu6e par les biais de selection et peut &tre attribu6e, selon les auteurs, a des diff6rences de <<traitement >> entre les deux secteurs (1982a, p. 71). Par ailleurs, J. Coleman, T. Hoffer et S. Kilgore avancent que les

6coles priv6es ne pr6sentent pas seulement une plus grande efficacit6 moyenne, mais ont, pour des niveaux scolaires et revenus des parents compa- rables, un effet moins discriminant que les 6coles publiques sur les r6sultats des enfants des minorit6s ethniques et des milieux sociaux modestes (1982b). L' cole privee apparait ainsi plus 6galitaire car elle produit des resultats plus homogenes en son sein, malgr6 des origines sociales diverses.

Ces conclusions ont cependant 6t6 remises en cause par de nombreuses recherches. Ainsi, K. L. Alexander et A. M. Pallas (1983), qui ont men6 des

(4) Ce rapport se fonde sur 1'enqu&e a High School and Beyond >> (HSB) suivie par le National Center for Educational Statistics aupres

d'environ 60000 e61ves de deuxieme et de demiere annee scolaris6s dans environ 1 000 lyc6es du secteur public et du secteur priv6.

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analyses similaires sur un autre ensemble de donnees - le National Longitu- dinal Study de 1972 -, aboutissent " des conclusions diffirentes. S'ils recon- naissent qu'une approche simple et purement descriptive met effectivement en lumiere une meilleure r6ussite des 6lkves scolarises dans le secteur priv6, ils considerent que l'avantage net des 6coles priv6es, c'est-&-dire une fois les variables individuelles et de localisation de l'6cole contr6les, est trop faible pour pouvoir &tre affirms avec certitude (5). De meme, J. D. Willms (1985) conclut a l'absence d'effet univoque en faveur du secteur priv6 : les 1elves scolarises dans les 6coles publiques reussissent mieux en science et en instruction civique (meme si cet effet n'est pas significatif) tandis que ceux des lycees prives presentent globalement des resultats l6gerement superieurs en mathematiques, lecture, vocabulaire et 6criture. Enfin, J. Noell (1982) fait ressortir les effets de quatre variables qui n'ont pas 6t6 prises en consideration dans les travaux de J. Coleman, T. Hoffer et S. Kilgore (le sexe, le handicap eventuel de l'el1ve, le lieu de residence et les attentes scolaires) et qui, susceptibles d'etre associees a des biais de selection, sont potentiellement responsables d'une part de l'impact de l'6cole privee sur la reussite scolaire. Ainsi, quand l'auteur introduit ces quatre variables supplementaires dans le module de Coleman et al., I'effet associd au secteur priv6 diminue, voire s' annule.

Mais la principale critique adressee aux travaux de J. Coleman et de son equipe repose sur le fait que la prise en compte d'un ensemble de variables socio-demographiques ne suffit pas a 6carter complktement le- problkme du biais de selection puisque celui-ci reside notamment dans la disparit6 des niveaux initiaux et que les variables de contexte familial et social ne peuvent qu'imparfaitement remplacer une mesure directe des acquisitions a l'entr'e (Goldberger et Cain, 1982, 1983 ; Alexander et Pallas, 1985). Si les 6lves du secteur priv6 sont, ce qui semble &tre le cas, dotes de plus de facilites des le depart, alors les resultats de J. Coleman, T. Hoffer et S. Kilgore sont, au moins en partie, des artefacts (Alexander et Pallas, 1983, p. 171). Une exploi- tation de la seconde vague du HSB de 1982, qui contient I'information sur le niveau initial, conduit a nouveau K. L. Alexander et A. M. Pallas (1985) a conclure que les diff6rences entre les deux secteurs sont trop faibles pour pouvoir affirmer la <<superiorit >> de l'un sur l'autre.

Effets bruts, effets nets

Si l'on revient a la France, la connaissance des taux bruts de passage ou de reussite dans chaque secteur, malgr6 un interet descriptif evident, ne permet pas de conclure, sans precaution, a une plus ou moins grande efficacit6 d'un secteur par rapport a l'autre. En effet, si la comparaison des taux bruts offre une mesure precise du ph6nomene 6tudid lorsque les deux sous-populations

(5) J. San Segundo (1987) trouve lui aussi que l'effet du secteur priv6 sur la r6ussite ne diffrre pas significativement de celui du public.

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sont homogenes, il n'en est rien quand les populations sont caracterisees par des distributions diff6rentes. Or d'importantes differences de composition existent entre les deux secteurs : outre un heritage social favorable, les 6lves du secteur priv6 beneficient globalement d'un environnement 6conomique et familial plus propice que leurs condisciples du secteur public (Tableau I). Ainsi, il devient des lors impossible de faire la part entre ce qui, dans le diff&- rentiel constat6, relive d'un effet de composition ou de selection, et ce qui relive d'un strict effet de secteur.

TABLEAU I. - Comparaison des ilves du public et du prive

Tout public Tout prive Indice de N=14 084 N= 3 128 dissimilarit6* (en %) (en %) (en %)

Agriculteur 2,8 6,3 Artisan, commerqant 6,8 10,5 Chef d'entreprise, profession liberale 3,5 8,7 Cadre 12,0 17,7

PCS du chef Profession interm6diaire 9,6 9,9 18,4 de famille Technicien, contremaitre 10,9 10,0

Employe 12,7 10,5 Ouvrier qualifie 27,9 20,3 Ouvrier non qualifie ou agricole 10,9 4,7 Inactif, chomeur 2,9 1,5

Nombre de Moins de 0,8 22,5 30,5 Entre 0,8 et 1 (exclus) 18,2 22,0 11,9

personnes par Entre 1 et 1,2 (exclus) 33,0 33,1 piece 1,2 et plus 26,3 14,4 Pas de dipl6me 17,9 8,3 CEP 19,9 18,3 CAP 13,2 15,6

de la me BEP, BEPC 15,5 17,7 13,3 Baccalaureat 11,5 14,6 Superieur 12,8 18,4 Inconnu 9,2 7,1

Activit Travaille a temps plein 40,4 46,2 de la mere Travaille A temps partiel 15,7 19,1 9,2

Autre 43,9 34,7 Biparentale 81,6 85,8

Structure Biparentale recompos6e 6,0 4,4 4,2 familiale Monoparentale 9,8 8,0

Autre situation et non-r6ponse 2,5 1,8 Un enfant 10,0 12,0 Deux enfants 40,8 43,4

famille Trois enfants 28,9 29,8 5,0 Quatre enfants 10,2 10,0 Cing enfants et plus 10,0 4,8

Rang dans Premier 45,1 45,4 0,3 la fratrie Sexe Masculin 49,7 49,3 0,4

Nationalit6 Franqaise 90,5 97,8 7,3

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TABLEAU I (suite)

Tout public Tout priv6 Indice de N=14 084 N= 3 128 dissimilarite* (en %) (en %) (en %)

Niveau Faible 19,1 13,7 d'aspiration Moyen 25,7 20,8 10,3 des families Fort 55,2 65,5

Nul 5,7 1,5 Niveau Faible 18,4 12,3

d'implication Moyen 46,6 44,8 12,2 des families Moyen fort 18,7 30,1

Fort 10,5 11,4 Faible 16,7 12,2

Comportement Moyen 58,9 63,6 8,1 de l'61eve Fort 17,3 20,7 Ne sait pas et non-r6ponse 7,1 3,5

Source: Panel 1989, ministere de l'liducation nationale, DEP. Champ :

El?lves ayant effectu6 leur scolarit6 du college entierement dans le priv6 ou entierement dans le

public. * L'indice de dissimilarit6 est 6gal a la demi-somme des 6carts, en valeur absolue, entre les modalit6s ( a, priv6 -ai publicl) d'une meme variable (a). Il s'interprete comme la proportion d'61'lves qui devraient changer d'etat pour que la distribution de a soit la meme dans les deux secteurs. Plus l'indice est 61ev6, plus les distributions des deux secteurs sont 61oign6es. Lecture : I1 faudrait que le chef de famille de 18,4 % des 61ves de l'un des secteurs change de cat6gorie socioprofessionnelle pour que la distribution de l'origine sociale des e61ves soit la meme dans les deux secteurs.

Aussi, peut-on se demander si l'apparente plus grande efficacit6 du secteur priv6 mise en evidence par G. Langouet et A. L6ger se maintient quand on tient compte des diff6rences de composition entre les deux secteurs. C'est pourquoi nous menerons des analyses multivari6es, lesquelles permettent justement de maintenir constant un ensemble de variables dites de contr6le. Ces analyses s'inscrivent dans une d6marche de type marginaliste puisqu'il s'agit d'6valuer l'effet propre, c'est-a-dire toutes choses 6gales par ailleurs, de chaque variable explicative, et notamment de celle d6signant le secteur de scolarisation. En outre, l'introduction progressive des variables de contr6le permet de d6composer les diff6rences brutes de r6ussite entre les deux secteurs et de voir quels sont les facteurs qui expliquent le plus cet 6cart. Enfin, le module global permet de voir si, au-del" des diff6rences observables et mesurables de composition des publics, des diff6rences subsistent (6).

Population et variables : silection et construction

L'analyse que nous menons prend appui sur un panel repr6sentatif d'entrants au collkge construit par le ministere de l'E'ducation nationale en 1989. Les donn6es dont nous disposons permettent de suivre l'61've sur une

(6) Les diffdrents modules sont present6s en Annexe II.

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periode d'au plus six ans apres son entree en sixieme, c'est-a-dire jusqu'd l'ann'e scolaire 1995-1996 (7) et de connaitre en particulier, annie apres annee, la classe dans laquelle il est scolaris6 et le secteur de l'etablissement qu'il frequente. L'ddition de 1989 perpetue une tradition relativement ancienne de panels d'6lkves, mais presente, par rapport aux editions ante- rieures, l'interet majeur d'etre la premiere edition a etre associde a une enquete aupres des families. Cette derniere, realis~e lors de la deuxieme annie d'observation, permet d'avoir de nombreuses informations sur l'environne- ment familial de l'6lkve, son attitude et celle de ses parents, ainsi que sur son parcours scolaire lors du primaire (de fagon retrospective) ; autant d'informa- tions qui sont indispensables pour contr6ler les biais de selection entre les deux secteurs (8).

Dans l'analyse que nous developpons ici, seuls seront consideres les enfants qui, en septembre 1989, entraient en sixieme dans un etablissement de France metropolitaine. Les redoublants de sixi me, les 6lves de SES (Section d'6ducation specialisee) et les collegiens des departements d'Outre-mer en sont done exclus. En outre, nous ne retiendrons que les 6lves dont les parents ont repondu au questionnaire << Famille ? en raison de la richesse des informa- tions contenues dans ce dernier (9).

Une difficult6 fondamentale lorsque l'on souhaite apprecier les diff6rences entre secteur public et secteur priv6 reside dans le fait que l'appartenance a un secteur n'est pas, contrairement aux autres caracteristiques habituellement 'tudi'es (sexe, origine sociale, rang dans la fratrie, etc.), un attribut perma- nent de l'6lkve, mais est susceptible d'6voluer au cours de la carriere scolaire. Que signifie des lors &tre 6lkve du priv6 ou du public ? Afin de rendre complktement exogene la question du choix des familles et des transferts (10) et de pouvoir determiner avec assurance a quel secteur attribuer le resultat observe, nous avons choisi de considerer une population encore plus restreinte. 11 s'agit de deux cohortes < pures >, redefinies lors du changement de degre (11): celle des 61'ves ayant effectu6 toute leur scolarit6 dans le

(7) Le nouveau panel de collegiens mis en place en 1995 n'a atteint la m&me profondeur temporelle qu'd la rentree 2001-2002 et n'est pas encore disponible pour la recherche. En outre, la stabilit6 de la part du priv6 au cours de la decennie 1990 ne laisse pas presager d'importants changements dans les rapports entre priv6 et public entre 1989 et 1995.

(8) Les diff6rentes variables utilisees pour controler les diff6rences de recrutement entre les deux secteurs ainsi que les variables depen- dantes sont presentees de fagon detaillke en Annexe I.

(9) Le questionnaire << Famille >>, qui 6tait auto-administr6, a 6t6 retourn6 par 80,7 % des families. II a 6t6 verifi6 que la restriction 'a ses seuls repondants n'introduit pas de biais

importants. (10) La question de l'influence des change-

ments de secteur sur la reussite scolaire ulterieure a done 6te 6cartee. M me si G. Langoudt et A. Leger soulignent l'augmen- tation du nombre de < zappeurs >, ces derniers restent largement minoritaires : seuls 3,1 % des '61ves du panel n'ont pas realis6 l'ensemble de leurs annees de college dans le meme secteur.

(11) Ce changement de population nous a paru necessaire en raison des nombreux trans- ferts qui se produisent 'a ce moment de la scolarite. 11 n'est pas genant dans la mesure oii l'on tient compte des trajectoires scolaires passees : on est ainsi certain de ne pas mesurer au coll~ge des effets qui seraient dus au secteur de scolarisation en primaire.

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public et celle des 6lves ayant effectu6 toute leur scolarite dans le priv6. Dans un premier temps, on comparera done la reussite et les trajectoires scolaires en primaire des 6lves ayant effectu6 tout leur premier degr6 dans le secteur public a celle des 6lves ayant effectue tout leur premier degr6 dans le secteur priv6 ; dans un deuxieme temps, on comparera la reussite et les trajec- toires scolaires en premier cycle du secondaire des 6lkves ayant 6te fiddles au secteur public

" celle des 6lkves ayant 6t6 fiddles au secteur priv6 sur toute la duree du collkge (12). La Figure I illustre les changements qui interviennent entre les deux sous-populations. I1 apparait que la cohorte << tout public >> est relativement stable alors que la cohorte << tout priv? >> se trouve profondement modifiee lors du passage en sixieme.

FIGURE I. - Composition des cohortes a pures ) et changement de cohortes

Primaire << tout public > 14709

1719 12990 1094

14084 College << tout public >

Primaire << tout priv6 > 2315

592 1723 1405

3128 College << tout priv >>

Lecture : Parmi les 14 709 61'ves du panel qui ont effectu6 toute leur scolarit6 primaire dans le public, 12 990 ont poursuivi leur scolarit&du college entierement dans le public et 1 719 l'ont effectu6e soit dans le priv6 de fagon continue, soit dans les deux secteurs.

Analyse comparee de l'efficacit6 des deux secteurs

Comparons d'abord les deux secteurs du point de vue de leur efficacit6, c'est-a-dire de leur capacit6 a amener le plus grand nombre d'e61ves jusqu'" un palier donn6 ou 61lever le niveau moyen de leurs acquisitions. Plus qu'une evaluation ponctuelle des diff6rences entre les deux secteurs, il apparait int6- ressant d'adopter un point de vue dynamique afin d'appr6cier le r81e respectif de chacune des 6tapes de la scolarit6 dans la construction de ces diff6rences.

(12) Les exploitations ont 6galement 6t6 men6es sur d'autres definitions afin de s'assurer de la robustesse des r6sultats obtenus.

Il en ressort que les resultats sont globalement stables et peu sensibles 'a la definition de la population retenue.

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Les 6carts de reussite entre les deux secteurs sont-ils de meme ampleur aux diffdrents moments du cursus ? Observe-t-on une difference entre le primaire et le collge ?

Le primaire une cole privwe au moins aussi efficace que l'cole publique

Des le primaire, des diff6rences sectorielles de r6ussite apparaissent : alors que 83,5 % des 616ves du priv6 ont accompli une scolarit6 616mentaire sans heurt, ils ne sont que 75,2 % dans le public a avoir connu le meme parcours. A situation sociale et familiale, passe scolaire et attitude a l' gard de l'6cole iden- tiques, les e61ves du priv6 ont encore un avantage sur leurs condisciples du public puisqu'ils ont encore 1,2 fois plus de chance de ne pas avoir redouble plut6t que d'avoir redouble au cours de leur scolarit6 dans le primaire (Tableau II). II convient toutefois de relativiser cette importance en la compa- rant aux diff6rences cr66es par d'autres caract6ristiques. L'6cart sectoriel de r6ussite est ainsi de l'ordre des 6carts qui peuvent exister entre un enfant d'ouvrier qualifie et un enfant d'ouvrier non qualifie, ou entre un e61ve dont la mere est titulaire du CEP et un autre dont la mere possede un CAP. I1 reste donc mineur par rapport aux 6carts que peuvent cr6er le dipl6me (le contraste logis- tique entre un 616ve dont la mere est titulaire du CEP et un autre dont la mere est dipl6m6e du sup6rieur vaut, toutes choses 6gales par ailleurs, 1,171).

TABLEAU II. - Ne pas avoir redouble au cours du primaire

Coefficient (13) 1 cart Significativit6 Odds ratio

M1 0,5061 - *** 1,659 Transformation logistique du tri crois6 M2

0,3499 -0,1562 1,419 MI + PCS du chef de famille

M3 M2 + caract6ristiques familiales 0,224 -0,1259 1,251

et individuelles M4 0,2303 0,0063 *** 1,259

M3 + pass6 scolaire M5

M4 + aspirations et implication 0,1858 -0,0445 ** 1,204 des families, comportement des 61 ves

Source: Panel 1989, ministere de l'Education nationale, DEP. Remarque : *** indique que le coefficient est significatifau seuil de 0,1 % et ** qu'il est significatifau seuil de 1%. Lecture : Dans un module simple ne comprenant que la variable de secteur comme variable explicative (M 1), le coefficient associ6 au secteur priv6 vaut 0,5061 ce qui signifie que les 6~1ves du priv6 ont 1,659 fois plus de chance de ne pas avoir redoubl6 plut6t que d'avoir redoubl6 au cours de leur scolarit6 dans le primaire. Lorsque l'on introduit comme variable de contr6le suppl6mentaire l'origine sociale (M2), le coefficient associ6 au secteur priv6 vaut 0,3499 c'est-a-dire 0,1562 de moins que dans le module M1.

(13) Sauf mention contraire, les coefficients pr6sent6s correspondent A l'6cart du priv6 par rapport au public (retenu comme r6f6rence).

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En ce qui concerne le niveau a l'entr6e en sixieme, si des diff6rences brutes de r6ussite existent, l'avantage apparent du priv6 disparait une fois que l'on tient compte de l'ensemble des caract6ristiques sociales et familiales des e61ves, de leur passe scolaire et du comportement des familles (Tableau III). Toutes choses 6gales par ailleurs, les 6lves du priv6 ont donc atteint, a la fin du primaire, un niveau d'acquisition sensiblement 6gal a celui de leurs condis- ciples du public.

TABLEAU III. - Niveau i l'entrie en sixi ime

Coefficient I cart Significativit6 Odds ratio

M1 Transformation logistique du tri crois 0,3156 - *** 1,371 Transformation logistique du tri croise M2 M + PCS du chef de famie 0,1709 -0,1447 *** 1,186

M1 + PCS du chef de famille M3

M2 + caract6ristiques familiales 0,0912 -0,0797 * 1,096 et individuelles

M4 0,0544 -0,0368 Ns 1,056 M3 + passe scolaire

M5 M4 + aspirations et implication 0,0499 -0,0045 Ns 1,051

des families, comportement des 616ves Source: Panel 1989, ministere de l'lducation nationale, DEP. Remarque : *** indique que le coefficient est significatifau seuil de 0,1 %, * qu'il est significatifau seuil de 5 % et Ns qu'il n'est pas significatif au seuil de 5 %. La variable d6pendante est une variable poly- tomique ordonnie : il s'agit de la variable de score a l'entree en sixieme reconstruite et discretis6e (voir Annexe I).

Ainsi, a situation sociale et familiale, passe scolaire et attitude des families a l'gard de l'6cole identiques, les ~16ves du priv6 accident plus souvent au collkge sans avoir redouble au cours du primaire, tout en ayant acquis un niveau sensiblement equivalent a leurs condisciples du public. Le priv6 se caracterise done par une pratique de passages moins selective qui n'implique pas pour autant des r6sultats moindres aux 6preuves d'6valuation a l'entr6e en sixieme.

Le collage: a un bilan qui s'inverse

Contrairemnent au primaire, la r6ussite au college ne peut etre appr6hend6e qu'& travers des analyses de trajectoire (14). Nous 6tudierons plus pr6cise- ment les deux principaux paliers d'orientation que sont la fin de cinquieme et la fin de troisieme. La population d'intre"t est d6sormais celle des e61ves ayant 6t6 fiddles a l'un des deux secteurs depuis leur entree en sixieme jusqu'& leur sortie de college.

(14) En effet, nous ne disposons pas d'6valuations similaires a celles a l'entr6e en sixieme pour la fin de college et les donnees

concernant le brevet ont 6t6 particulibrement mal renseign6es et n'ont de ce fait pas pu tre exploit6es.

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Si globalement les 616ves scolaris6s dans le secteur priv6 acc6dent plus souvent en quatrieme g6n6rale apres deux ans de scolarit6 au collbge que leurs condisciples du public, le seul fait de contr6ler l'origine sociale des e61ves suffit presque a annuler cet avantage (Tableau IV). Autrement dit, les diff6- rences dans l'origine sociale des 616ves des deux secteurs expliquent en tota- lit6 l'avantage des e61ves du priv6 sur leurs condisciples du public. Plus surprenant, dans le modele complet (M5), le coefficient estim6 pour le secteur priv6 est n6gatif et significativement diff6rent de zero. Toutes choses 6gales par ailleurs, les e61ves du priv6 ont donc finalement 0,818 fois plus de chance (ou, de fagon 6quivalente, 1,22 fois moins de chance) d'acc6der plut6t que de ne pas acc6der en quatrieme g6n6rale sans avoir redoubl6 au collkge.

TABLEAU IV. - Accider en quatrieme gendrale aprhs deux ans de scolaritd au collige

Coefficient IEcart Significativit6 Odds ratio

M1 Transformation logistique 0,2424 - ** 1,274

du tri crois6 M2

M1 + PCS du chef 0,0391 -0,2033 Ns 1,04 de famille

M3 M2 + caract6ristiques -0,0746 -0,1137 Ns 0,928

familiales et individuelles M4

-0,121 -0,0464 * 0,886 M3 + passe6 scolaire

M5 M4 + aspirations et -0,2003 -0,0793 ** 0,818

implication des families, comportement des e61ves

Source: Panel 1989, ministere de l'Education nationale, DEP. Remarque : *** indique que le coefficient est significatif au seuil de 0,1 %, ** qu'il est significatif au seuil de 1 %, * qu'il est significatif au seuil de 5 % et Ns qu'il n'est pas significatif au seuil de 5 %.

Si l'on considere a present le fait plus g6n6ral et moins selectif d'acceder en quatrieme g6nerale quel que soit le temps mis pour atteindre ce niveau, l'avantage brut du priv6 est encore plus marque puisqu'il correspond alors a un contraste logistique brut de 0,4438 contre 0,2424 pr6c6demment (Tableau V). Cependant, au fur et a mesure des contr1les successifs, le contraste logistique associd au secteur priv6 se r6duit jusqu'& devenir non significativement diff6rent de zero. A situation sociale et familiale, niveau scolaire initial et attitude des familles a l'6gard de l'6cole identiques, il ne subsiste plus de diff6rences de parcours entre les e61ves des deux secteurs.

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TABLEAU V. - Accider en quatrieme gendrale apris deux, trois ou quatre ans de scolaritd au collkge

Coefficient J cart Significativit6 Odds ratio

M1 Transformation logistique 0,4438 *** 1,559

du tri crois6 M2

0,2306 -0,2132 *** 1,259 M1 + PCS du chef de famille

M3 M2 + caracteristiques familiales 0,0912 -0,1394 Ns 1,095

et individuelles M4

M+0,0749 -0,0163 Ns 1,078 M3 + pass6 scolaire M5

M4 + aspirations et implication -0,0544 -0,1293 Ns 0,947 des families, comportement

des 6lkves

Source: Panel 1989, ministbre de l'Fducation nationale, DEP. Remarque : *** indique que le coefficient est significatif au seuil de 0,1 % et Ns qu'il n'est pas significa- tif au seuil de 5 %.

N6gatif quand on se restreignait g l'acces en quatrieme sans redoublement, le coefficient associ6 au secteur priv6 devient nul des lors que l'on autorise un ou plusieurs redoublement(s) avant l'entree en quatrieme. Les diff6rences entre les deux secteurs ne se fondent done pas tant sur le fait d'atteindre le niveau de la quatrieme g6ndrale, mais sur le temps mis pour y acc6der : toutes choses 6gales par ailleurs, les 6lves du secteur priv6 accident aussi souvent que leurs condisciples du public en quatrieme generale, mais mettent en g6neral plus de temps pour atteindre ce niveau. La meme structure de r6sultats se degage lors de l'6tude du palier d'orientation vers la seconde (Tableaux A-I et A-II en Annexe III).

L'analyse comparee de l'efficacit6 des deux secteurs met en avant, de fagon systematique, un avantage brut lie au fait d'etre scolaris6 dans le prive, mais conduit, lorsque l'on raisonne sur des 6lkves rendus comparables, a des conclu- sions distinctes selon le degr6 consid6r6. Ainsi, les 6lkves du secteur priv6 acquierent, lors du primaire, un avantage sur ceux du public puisque meme s'ils ont atteint a la fin du primaire un niveau d'acquisition sensiblement equivalent, ils sont plus souvent entr6s au college sans avoir redouble auparavant. En revanche, la situation s'inverse au college : quel que soit le palier d'orientation considr6e, acces en quatrieme generale ou acces en seconde generale ou profes- sionnelle, les 6lves du priv6 l'atteignent aussi souvent que leurs condisciples du public, mais mettent generalement plus de temps. Raisonner sur des publics rendus comparables ne corrobore donc pas les resultats 6tablis par G. Langoudt et A. Leger : loin de presenter un avantage < incontestablement >> acquis (1994, p. 81), les coll6giens du priv6 connaissent au mieux une situation comparable a celle de leurs condisciples du public.

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Disparites territoriales de r'offre scolaire et diff6rences sectorielles

Les a territoires de l'dcole privie ) (15)

Se poser la question de la comparaison entre secteur public et secteur priv6 a l'6chelle nationale semble a la fois necessaire et insuffisant. L'ecole privee, tout comme l'6cole publique, n'est pas unique, mais multiple et nous pouvons esperer rendre compte, en partie au moins, de cette multiplicit6 en considerant les diffdrents << territoires de l'6cole privee >>. En effet, l'influence plus ou moins forte du priv6 - mesuree par la proportion d'6l1ves scolarises dans le secteur prive - joue comme un facteur important de structuration du territoire. Comme ce n'est pas tant chaque departement, pour ce qu'il a de singulier, qui nous interesse ici, mais plut6t la definition de territoires presentant des taux de scolarisation dans le priv6 proches, nous avons regroup6 ces departements en quatre classes (16) : la classe 1 est celle oi0

le priv6 est le moins implants ; la classe 4 est, au contraire, celle qui presente les taux de scolarisation dans le priv6 les plus 6leves (17) (Figure II-a).

FIGURE II. - Typologie des departements selon le taux de scolarisation dans le prive

a - Imporaaa da sectear prid b. - Proporion de wmlssaltsm

I = don I

I 4 l Ic.m

iium on . - ' - W

Figure a : Source: Reperes et r6f6rences statistiques (1991) Lecture : Classe 1 : part de l'enseignement priv6 tres faible ; Classe 4 : part de l'enseignement priv6 tres forte. Figure b: Source: F.-A. Isambert et J.-P. Terrenoire, Atlas de la pratique religieuse (1980). Definition : Le mot << messalisants >>, 6tabli par F.-A. Isambert et J.-P. Terrenoire, d6signe les personnes assistant habituellement a la messe le dimanche ou qui y assisteraient si elles n'6taient pas empech6es par la maladie ou par des raisons d'ordre familial ou professionnel.

(15) Cette expression fait directement r6f6rence a l'article de J.-B. Champion et N. Tabard (1996).

(16) Les d6partements ont 6t6 regroup6s sur la base d'une classification ascendante hierarchique consolid6e par agr6gation autour

des centres mobiles effectu6e sur les taux de scolarisation du premier et du second degr6.

(17) Voir Tableau A-III en Annexe III pour plus de d6tails sur les caract6ristiques de ces classes.

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Se d6tachent ainsi des zones de forte implantation, nettement delimitees, parmi lesquelles on compte la Bretagne, les Pays de Loire, le sud du Massif central et, dans une moindre mesure, le Pays Basque et le Nord. A l'exception notable des d6partements concordataires de l'Alsace-Lorraine (18), au statut scolaire singulier, les pays de l'6cole libre correspondent aux << forteresses de l'esprit clerical )) (Siegfried, [1913] 1995, p. 483) telles qu'elles ont 6t6 mises en evidence dans l'Atlas de la pratique religieuse (1980) de F.-A. Isambert et J.-P. Terrenoire (Figure II-b). De meme, ces territoires sont, a quelques nuances pres, les bastions des partis de droite. On red6couvre ainsi, pros d'un siecle apres, la triple correspondance cartographique entre pratique religieuse, vote a droite et frequentation de l'6cole priv6e mise en evidence par A. Siegfried en 1913 (19). On retrouve 6galement, au niveau agr6g6 du d6parte- ment, la relation qu'avait mise au jour F. H6ran (1996) et V. Tournier (1997) a l'6chelle des comportements individuels entre appartenance politique, pratique religieuse et choix du secteur. Contrairement " A. Siegfried, qui voit dans cette < coincidence )) une <<relation de cause a effet )) ([1913] 1995, p. 483), l'6cole lui apparaissant comme le moyen par lequel le clerg6 devient le <<maitre des ames )) (ibid., p. 481), nous nous garderons de voir dans cette triple correl1ation une simple causalit6. La causalit6 est en effet plut6t double : ? La presence des 6coles religieuses est sans doute une cause, mais c'est encore plus sfirement un effet : elles sont install6es dans les regions ouf elles sont sfres de trouver une clientele. )) (Bois, 1960, p. 109).

TABLEAU VI. - Indices de dissimilariti intra-classe (en %)

Classe 1 Classe 2 Classe 3 Classe 4

PCS du chef de famille 23,8 24,4 20,3 11,3 Nombre de personnes par piece 17,0 15,1 15,2 4,3

Dipl6me de la mere 18,4 17,2 16,4 6,7

Activit6 de la mere 16,8 6,9 8,6 4,0 Niveau d'aspiration des families 17,6 13,1 9,5 0,8 Niveau d'implication des families 14,3 14,5 11,9 9,2

Comportement des dl6ves 9,4 8,6 8,0 2,1

Source: Panel 1989, ministere de l'Education nationale, DEP. Lecture : Au sein de la classe 1, il faudrait que le chef de famille de 23,8 % des 61eves de l'un des secteurs change de cat6gorie socioprofessionnelle pour que la distribution de l'origine sociale des 61eves soit la meme dans les deux secteurs.

Ces disparit6s dans l'offre scolaire locale renvoient a des diff6rences de recrutement : 61ves du priv6 et 616ves du public different davantage dans les

(18) Ainsi que d'autres exceptions plus isol6es comme le Doubs et la Haute-Sa6ne qui, bien qu'6tant des terres tres catholiques, sont scolaris6es depuis longtemps de sorte que << le r6seau d'6coles publiques 6tait [d6ji] achev6 quand les r6publicains arriverent au pouvoir >>

(Prost, 1982, p. 420). (19) D'autres auteurs ont par la suite

renouvel6 ce constat, parmi lesquels F.-A. Isambert et J.-P. Terrenoire (1980, p. 12) et H. Le Bras (1995, p. 63, p. 338).

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zones of le priv6 est peu influent (classe 1) que dans celles of il est tres influent (classe 4) (Tableau VI). Les enfants de cadres sont ainsi pr6s de deux fois plus nombreux dans le priv6 que dans le public dans les d6partements ofi le priv6 est largement minoritaire dans l'offre scolaire, alors que leur part dans les deux secteurs est proche dans les zones de forte influence du priv6. Plus pr6cis6ment, non seulement les 6carts se r6duisent dans les d6partements ofi le secteur priv6 est tres implant6, mais on y observe meme des situations plus d6favorables pour les e61ves du priv6 : si la part d'enfants de cadres scolaris6s dans le public ne varie guere selon la classe de departements consi- d6r6e (12 % environ), celle des enfants de cadres fr6quentant le priv6 passe de 21,8 % pour la classe 1 "i 8,5 % pour la classe 4. De meme, alors que la proportion d'l61ves dont la mere est diplom6e du sup6rieur est plus 61ev6e pour les 616ves du priv6 lorsque ce secteur est faiblement implant6, la situa- tion s'inverse des lors que le priv6 est influent (Tableau VII).

TABLEAU VII. - Leprive : un recrutement diffdrent selon son importance dans l'offre scolaire locale

Classe 1 Classe 4

Public Priv6 Public Priv6 N = 4676 N= 473 N= 1144 N= 888

PCS du chef de famille

Agriculteur 2,3 3,8 5,5 10,9 Artisan, commergant 6,1 10,6 6,5 11,7 Chef d'entreprise, profession lib6rale 3,5 9,3 3,8 4,2 Cadre 11,9 21,8 10,8 8,5 Profession interm6diaire 9,0 8,5 10,6 10,2 Technicien, contremaitre 11,0 13,1 11,4 7,9 Employ6 13,3 11,4 11,0 11,3 Ouvrier qualifi6 28,7 17,3 27,5 27,1 Ouvrier non qualifi6 ou agricole 11,4 3,6 10,5 6,9 Inactif, ch6meur 2,8 0,6 2,5 1,4

Dipl6me de la mere

Pas de dipl6me 19,2 7,6 14,2 11,0 CEP 20,6 15,9 21,0 22,3 CAP 14,3 19,2 13,3 17,3 BEP, BEPC 15,0 14,6 19,8 19,7 Baccalaurdat 10,9 16,1 12,8 12,2 Sup6rieur 11,2 19,5 12,4 9,5 Inconnu 8,8 7,2 6,6 8,0

Source: Panel 1989, ministere de l'Education nationale, DEP. Lecture : 2,3 % des 61kves du public de la classe 1 (c'est-&-dire celle oui le priv6 est le moins implant6) sont fils d'agriculteurs, contre 3,8 % pour ceux du priv6 de la meme classe.

Les diff6rences de composition entre les deux secteurs et leur ampleur rendent done 16gitime le fait de penser que les trajectoires scolaires des 1~lves ont elles aussi une expression diff6rente selon les territoires. Cette approche spatiale devrait permettre d'examiner s'il existe un <<modele du priv6 uniforme dans l'espace frangais ou non.

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Une efficaciti diffirente selon les territoires

Des modeles visant " 6clairer l'efficacit6 nette de chaque secteur reproduits separement sur des territoires contrastes (20) indiquent que l'effet apparent du priv6 sur les trajectoires scolaires diffbre selon les territoires : dans les depar- tements oi l'enseignement priv6 accueille proportionnellement peu d'elves (classe 1), celui-ci se distingue positivement et significativement du public en permettant a ses 6lves d'atteindre des niveaux scolaires plus 6leves et de connaitre de meilleures trajectoires scolaires ; en revanche, dans les d6parte- ments ouf le priv6 est fortement implants (classe 4), si le fait de frequenter un etablissement priv6 semble constituer un avantage au cours du primaire, ceci n'est plus le cas lors de la scolarit6 au collkge (Tableau VIII). Ces diff6rences ne semblent pas tenir uniquement aux diff6rences de composition mises en evidence. En effet, meme si l'influence nette du priv6 mesur6e dans le module complet est non significativement diff6rente de zero quel que soit le territoire consider6 (excepts pour le non-redoublement en primaire, ofi elle est positive et significative dans les territoires ofi le priv6 est fortement implants), les resultats presentent une certaine structure : a caracteristiques sociales et fami- liales, passe scolaire et attitude des familles a l'6gard de l'6cole identiques, l'effet du priv6 est nul dans les territoires de forte influence et negatif dans les territoires de faible influence (Tableau VIII) (21).

TABLEAU VIII. - Ecarts sectoriels de rdussite selon les territoires

Classe 1 Classe 4

Ne pas avoir redoubl6 Modele simple (MI) 0,3282 ** 0,3107 *** en primaire Modele complet (M5) -0,195 Ns 0,2956 **

Bon niveau & l'entr6e Modele simple (MI) 0,282 ** 0,2012 ** en sixieme Modele complet (M5) -0,1221 Ns -0,00261 Ns

Acces en quatrieme apres Modele simple (MI) 0,3373 *** 0,1066 Ns deux ans de scolarit6 au college Modele complet (M5) -0,2146 Ns 0,0298 Ns

Acces en seconde apres quatre Modele simple (M1) 0,315 *** 0,1022 Ns ans de scolarit6 au collkge Modele complet (M5) -0,2114 Ns 0,0982 Ns

Source: Panel 1989, ministere de l'Education nationale, DEP. Remarque : *** indique que le coefficient est significatif au seuil de 0,1 %, ** qu'il est significatif au seuil de 1 % et Ns qu'il n'est pas significatif au seuil de 5 %.

(20) Pour la lisibilit6 des r6sultats, seules les classes extremes, c'est-a-dire 1 et 4, ont 6t6 retenues.

(21) La variation des coefficients entre le module simple (M 1) et le modele complet (M5) est conforme aux diff6rences de composition

mises en evidence: le coefficient associ6 au secteur priv6 diminue davantage pour les d6par- tements de la classe 1 oii les e61ves du priv6 pr6sentaient des caract6ristiques individuelles nettement plus favorables par rapport a leurs condisciples du public (Tableau VII).

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Ces conclusions, a prendre avec precaution en raison de la faiblesse des effectifs au sein de chaque classe, tendent toutefois a t re confirmees par un module complet (M5) augment6 d'une variable traduisant l'appartenance a une classe de d6partements et d'une autre mesurant l'interaction entre cette derniere et le secteur de scolarisation. L'effet du priv6 est alors syst6matique- ment n6gatif pour les zones de faible influence alors qu'il est positif au primaire et nul au college pour les zones de forte influence (Tableau A-IV en Annexe III).

Inegalites sociales et culturelles, in6galites sectorielles

De nombreux travaux mettent en avant l'existence de fortes inegalites sociales de r6ussite scolaire. On peut d6s lors se demander si le principe de diff6renciation sociale, constat6 au niveau global, joue avec la meme intensit6 dans les deux secteurs. Comparer les deux secteurs de scolarisation que sont le priv6 et le public, ce n'est en effet pas seulement porter un regard global sur leur efficacit6 respective, mais c'est aussi s'interroger sur leur capacit6 a r6duire les 6carts sociaux de r6ussite qui existent en leur sein. Observe-t-on, pour des e61ves de meme origine sociale, des diff6rences de r6ussite selon le secteur de scolarisation ? Le lien entre origine sociale et r6ussite scolaire joue-t-il avec la meme force dans les deux secteurs ?

Une premiere approche descriptive de l'6quit6 consiste " utiliser un modle multivarid comportant comme variables explicatives le secteur, la PCS du chef de famille (ou le dipl6me de la mere pour l'analyse des in6galit6s cultu- relles) et l'interaction entre ces deux variables. Nous utiliserons ce modele de deux fagons compl6mentaires : d'une part, a la suite de G. Langouet et A. Leger, nous sommes invites & raisonner & origine sociale ou culturelle fix6e et a regarder s'il existe, au sein de ces categories, des diff6rences de reussite selon le secteur fr6quent6 ; d'autre part, nous pouvons adopter une approche duale en fixant le secteur et en observant l'ampleur des 6carts sociaux ou culturels en son sein. Ces deux d6marches pr6sentent un int6ret descriptif certain puisqu'elles permettent de donner une mesure des inegalites sociales et culturelles qui existent dans chacun des deux secteurs, mais elles ne peuvent pas suffire pour r6pondre v6ritablement a la question. En effet, il existe, au sein meme des categories socioprofessionnelles, des diff6rences secondaires qui tendent a favoriser les e61ves du priv6, notamment lorsque ces derniers sont issus des classes << populaires >> (Tableau IX). Les familles des el6ves du priv6 poss6dent plus souvent des formes de capital social, culturel et 6conomique habituellement atypiques en milieu <<populaire>> (Ben-Ayed, 1998). L'6ventuel constat d'une meilleure reussite des enfants issus des classes << populaires >> dans le priv6 ou d'6carts sociaux et culturels moindres au sein du priv6 peut des lors s'expliquer par le fait que la distance, en termes de caract6ristiques individuelles ou familiales, entre les enfants des classes << populaires ? et les enfants de cadres est elle-m~me moins grande dans le priv6.

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Chloed Tavan

TABLEAU IX. - Differences

secondaires entre ilives du secteur public et ilives du secteurprivd

Employe Ouvrier qualifi6 Ouvrier non qualifi6 Public Priv6 Public Priv6 Public Priv6

N=I 793 N=328 N=3 926 N=636 N=I 536 N=146

Formation post-scolaire 37,8 43,0 28,4 34,4 15,6 23,3 Moins de 0,8 personne 23,1 29,6 13,8 20,1 11,7 17,8 par piece Mere diplom6e du bac 15,8 20,4 8,1 10,4 3,9 7,5 ou du sup6rieur Aspirations 6lev6es 50,1 57,6 41,7 45,9 34,0 41,8

Implication forte 8,8 9,5 5,2 6,0 2,8 4,8

Comportement des 6l6ves 18,3 19,8 17,0 18,9 14,0 22,6 << 'lev' >>

Source: Panel 1989, ministere de l'Education nationale, DEP. Lecture: 37,8 % des enfants d'employ6s scolaris6s dans le public ont des parents qui ont suivi une formation post-scolaire.

Il s'avere done necessaire, une fois encore, de tenir compte de ces diff&- rences secondaires et de raisonner << toutes choses 6gales par ailleurs >>. Nous estimerons done, sur l'ensemble de la population d'int6r&t, un module complet (M5) augment6 d'une variable traduisant l'interaction entre le secteur et la PCS du chef de famille. Nous proc6derons de meme pour le dipl6me de la mere, pris ici comme indicateur du milieu culturel d'origine.

Des diffirences de re'ussite au sein de catigories homogenes

Une analyse des diff6rences sectorielles brutes de r6ussite met au jour non seulement un avantage des enfants issus des classes dites << populaires >> (employes, ouvriers qualifies et non qualifies, inactifs et ch6meurs) a tre scolarises dans le secteur priv6 - avantage qui semble plus marque dans le primaire -, mais aussi un handicap des enfants des classes favorisees (de cadres notamment) lie & la frequentation d'un collge priv6 (Tableau X). Ces diff6rences brutes subsistent lorsque l'on raisonne sur des publics rendus en tous points comparables. Un modele complet (M5) augments de l'interaction entre origine sociale et secteur de scolarisation tend en effet & indiquer qu'il existe bien des expressions diff6rentes de l'origine sociale selon le secteur (22) : situation familiale, passe scolaire et attitude & l'agard de l'cole identiques, les enfants d'employes, d'ouvriers qualifies et de ch6meurs r6ussissent mieux leur scolarit6 primaire lorsqu'ils sont dans le priv6. La conclusion est en revanche moins nette pour le college puisque si les enfants de cadres se voient penalis6s par un parcours dans le priv6, les enfants d'ouvriers qualifids le sont 6galement.

(22) Les variables d'interaction sont globalement significatives pour le niveau & l'entr6e en sixieme et l'acces en quatrieme apres une scolarit6 de deux ans au college.

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TABLEAU X. - Diffrrences sectorielles de rdussite brutes selon l'origine sociale

Public Priv6 Diff6rence priv6/public

Agriculteur 0,9078 1,2599 0,3521 Ns Artisan, commerqant 0,5836 0,5026 -0,0810 Ns Chef d'entreprise, profession liberale 1,4847 1,4863 0,0016 Ns Cadre 1,9561 2,336 0,3799 Ns

Non-redoublement Profession intermediaire 1,2926 1,2556 -0,037 Ns au primaire Technicien, contremaitre 0,9269 1,2166 0,2897 Ns

Employe 0,3529 1,1077 0,7548 *** Ouvrier qualifie 0 0,3778 0,3778 *** Ouvrier non qualifi6 ou agricole -0,3617 0,1111 0,4728 *

Inactif, ch6meur -0,5671 0,6891 1,2562 **

Agriculteur 0,5989 0,6751 0,0762 Ns Artisan, commergant 0,4452 0,6062 0,1610 Ns Chef d'entreprise, profession liberale 1,3206 1,2548 -0,0658 Ns Cadre 1,6234 1,5963 -0,0271 Ns

Niveau & l'entr6e Profession intermndiaire 1,1532 0,8663 -0,2869 * en sixi'me Technicien, contremaitre 0,8694 1,0182 0,1488 Ns

Employe 0,3074 0,7758 0,4684 *** Ouvrier qualifi6 0 0,3795 0,3795 *** Ouvrier non qualifi6 ou agricole -0,3497 0,0410 0,3907 *

Inactif, ch6meur -0,5716 0,1179 0,6895 *

Agriculteur 0,6889 0,6975 0,0086 Ns Artisan, commergant 0,3980 0,5501 0,1521 Ns Chef d'entreprise, profession liberale 1,6077 1,3270 -0,2807 Ns

Acces en Cadre 2,0030 1,3148 -0,6882 *** quatrieme apres Profession intermediaire 1,2190 1,0026 -0,2164 Ns deux ans de dscolarit au

Technicien, contremaitre 0,9200 0,8875 -0,0325 Ns

collge Employe 0,2698 0,4839 0,2141 Ns Ouvrier qualifie 0 0,1793 0,1793 Ns Ouvrier non qualifi6 ou agricole -0,2782 0,0074 0,2856 Ns Inactif, ch8meur -0,3893 -0,0139 0,3754 Ns

Agriculteur 0,7995 0,6889 -0,1106 Ns Artisan, commergant 0,3792 0,5348 0,1556 Ns Chef d'entreprise, profession liberale 1,6823 1,5502 -0,1321 Ns

Acces en seconde Cadre 1,9839 1,6030 -0,3809 *** apres quatre ans Profession intermediaire 1,3626 1,2099 -0,1527 Ns de scolarite au Technicien, contremaitre 0,9799 0,9499 -0,0300 Ns college Employe 0,3330 0,5470 0,2140 Ns

Ouvrier qualifie 0 0,1670 0,1670 Ns Ouvrier non qualifi6 ou agricole -0,2762 0,0159 0,2921 Ns Inactif, chomeur -0,6177 0,3567 0,9744 **

Source : Panel 1989, ministere de l'Education nationale, DEP. Remarques : *** indique que la diff6rence est significative au seuil de 0,1 %, ** qu'elle est significative au seuil de 1 %, * qu'elle est significative au seuil de 5 % et Ns qu'elle n'est pas significative au seuil de 5 %. Le modele mis en ceuvre est un modele comprenant, comme variables explicatives, le secteur de scolarisation, la PCS du chef de famille et une interaction entre ces deux variables.

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Chloe' Tavan

De meme que pour l'origine sociale, d'importantes diff6rences sectorielles brutes de r6ussite existent a niveau de diplome de la mere fix6. Ainsi, alors que les enfants dont la mere possede une faible qualification (aucun diplome, CEP, CAP) tirent profit,

" tout moment de leur cursus scolaire, d'une scolari- sation continue dans le priv6, ceux dont la mere est fortement dipl8m6e semblent davantage p6nalis6s par un tel parcours. Ce constat brut est, en partie au moins (23), confirm6 par des analyses de type << toutes choses 6gales par ailleurs >>: a situation sociale et familiale, passe scolaire et attitude a l'6gard de l'6cole identiques, les 61'ves dont la mere est sans dipl6me ou titu- laire du CEP r6ussissent mieux leur scolarit6 primaire dans le priv6 que dans le public.

Ineigalitis sociales et culturelles: des diffrrences selon le secteur

Si l'on regarde " present les inegalites sociales et culturelles au sein de

chacun des secteurs, il apparait que l'ampleur de ces 6carts diffbre fortement d'un secteur a l'autre : la distance qui s6pare les enfants issus des classes favoris6es de ceux issus' de milieux ouvriers, tout comme celle qui s6pare les 61'ves dont la mere possede un diplOme du sup6rieur de ceux dont la mere n'est pas dipl6m6e, est syst6matiquement inf6rieure dans le priv6

" ce qu'elle est dans le public (Tableau XI). L'6cole publique apparait donc, comme l'avaient d6ji note G. Langou&t et A. L6ger, <<moins d6mocratique [que l'6cole priv6e] par les 6carts sociaux de r6ussite qu'elle cr6e en cours de scolarit6 >> (1994, p. 142). Ce r6sultat se maintient, au moins en ce qui concerne la distance entre les enfants de cadres et d'ouvriers qualifies, lorsque l'on tient compte de l'environnement familial, des caract6ristiques indivi- duelles et du comportement des familles.

TABLEAU XI. - Inigalitis sociales et culturelles brutes

Public Priv6 Difrence prive/public

Ecart chef de famille cadre/ chef de famille ouvrier qualifi 1

Non-redoublement Amplitude maximale des 6carts 2,5232 2,2247 -0,2985 Ns au primaire sociaux Ecart mere dipl6m~e du casuprieure sansm dipl6me 2,6571 2,0242 -0,6329 * superieur/me're sans diplome

(23) Ce constat est en effet v6rifi6 pour le primaire, mais ne 1'est pas aussi nettement pour le secondaire.

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Revue frangaise de sociologie

TABLEAU XI (suite)

Difference Public Priv f nec prive/public

Ecart chef de famille cadre/ chef de famille ouvrier qualifi 1,6234 1,2169 -0,4065 *

Niveau i l'entr6e Amplitude maximale des 6carts 2,195 1,5554 -0,6396 * en sixieme sociaux

Ecart mere dipl6m~e du casuprieure sansm dipl6me 2,2178 1,6356 -0,5822 *** superieur/mere sans diplome Ecart chef de famille cadre/ chef de famille ouvrier qualifi 2,003 1,1355 -0,8675 Accs den quatrieme Amplitude maximale des 6carts apres deux ans de sociaux 2,3923 1,3409 -1,0514 ** sociaux scolarit6 au college Ecart mere dipl6mne du suprieur/mre sansdipl diplme 2,589 1,9533 -0,6357 ** superleur/me're sans dipl me Ecart chef de famille cadre/ chef de famille ouvrier qualifi 1,9839 1,436 -0,5479

Acceus en sec nde Amplitude maximale des 6carts 2,6016 1,5871 -1,0145 aprs quatre ans de sociaux 2,6016 15871 1,0145 scolarit6 au college

Eucart mere diplam6pe du 2,4793 2,0191 -0,4602 * superieur/mere sans dipl8me

Source: Panel 1989, minist&re de l'Education nationale, DEP. Remarques : *** indique que la diff6rence est significative au seuil de 0,1 %, ** qu'elle est significative au seuil de 1 %, * qu'elle est significative au seuil de 5 % et Ns qu'elle n'est pas significative au seuil de 5 %. Les coefficients sont issus de l'estimation de deux modeles : l'un ne comportant que la variable de secteur, la PCS du chef de famille et l'interaction entre ces deux variables, I'autre la variable de secteur, le dipl6me de la mere et l'interaction entre ces deux variables.

Analyses individuelles et analyses de contexte

La persistance 6ventuelle d'un 6cart de reussite entre les deux secteurs et la r6duction des 6carts sociaux de r6ussite dans le priv6 nous invitent a r6fl6chir sur les raisons de tels 6carts. Comment expliquer que, dans certains cas, des e61ves rendus comparables en de nombreux points r6ussissent diff6remment selon le secteur qu'ils fr6quentent ? Comment expliquer que des diff6rences de r6ussite subsistent au sein de groupes sociaux homogenes ?

Deux grands types d'explications peuvent &tre avanc6s : le premier se situe dans la lign6e des critiques adress6es aux travaux de J. Coleman et al. et consiste " dire qu'au-delh des variables de contr1le, les 6lves des 6coles priv6es different de leurs condisciples du secteur public par des caract6risti- ques inobservables (intelligence, motivation, etc.) susceptibles d'affecter la reussite scolaire; le second considere qu'une analyse strictement individuelle ne peut suffire des lors que l'on reconnait que public et priv6 d6finissent deux contextes de scolarisation diff6rents qui influent sur le parcours scolaire des eleves.

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Chloe' Tavan

Des explications individuelles...

Comme le rappelle I. G. G. Kreft (1993), les 61'ves du secteur priv6 ne sont pas un 6chantillon al6atoire de l'ensemble des e61ves, mais constituent une population pr6alablement s61ectionn6e. Les diff6rences observ6es au niveau de la r6ussite scolaire peuvent des lors &tre attribu6es, en partie au moins, "a des diff6rences de selection entre les secteurs. Des mod61isations statistiques fond6es sur des analyses multivariees, comme celles utilis6es par les sociolo- gues americains pour analyser la diff6rence de r6ussite scolaire entre les deux secteurs, permettent de tenir compte de cet effet de selection. Cependant, les variables introduites dans l'analyse ne peuvent pr6tendre A l'exhaustivit6 et, au-deli de l'identit6 sur les variables de contr1le, des diff6rences peuvent encore exister.

Par ailleurs, contr6ler une variable n'a de sens que si les modalit6s de celle-ci renvoient & une seule et meme r6alit6. Or, A la suite de G. Langoudt et A. L6ger, il convient de << se demander si, au-del& d'une identit6 apparente de la CSP, des diff6rences, touchant par exemple les enfants d'ouvriers frequen- tant le public et ceux fr6quentant le priv6, ne pourraient pas expliquer a elles seules les 6carts observes >> au sein de chaque origine sociale (24) (1994, p. 96). Plus pr6cis6ment, << ne peut-on penser, par exemple, que les familles populaires consentant l'effort financier que repr6sente pour elles une scolari- sation dans le priv6 sont plus soucieuses 4e r6ussite scolaire et de promotion sociale, plus attentives A la scolarit6 de leurs enfants, plus attach6es a l'6cole et aux valeurs qui y sont actuellement enseign6es : m6ritocratie, ambition individuelle, sens de la competition ? > (ibid., p. 97). C. Ben-Ayed apporte une r6ponse a cette question et constate en effet que les familles des classes populaires ayant recours au priv6 << se distinguent par des ressources finan- cieres et des compositions de m6nage atypiques, [...] des investissements dans la scolarit6 plus importants que la population t6moin [et] [...] surtout par une continuit6, une proximit6 culturelle importante avec le syst6me 6ducatif >> (1998, p. 542). Si certaines de ces caract6ristiques peuvent &tre mesurees (implication, niveau de fin d'6tudes souhait6, etc.), d'autres 6chappent certai- nement l'observation (attachement aux valeurs de l'6cole, croyance en ses capacites de promotion sociale, etc.).

... a l'influence du contexte li1 au secteur

Si les recherches sur les in6galit6s face a l'6cole se sont pendant longtemps int6ress6es aux in6galit6s sociales et, plus g6n6ralement, aux determinants individuels de la r6ussite scolaire, depuis les annees quatre-vingt s'est d6ve- lopp6e l'id6e que les structures scolaires participent 6galement A la compr6- hension des comportements individuels. On peut des lors supposer que les

(24) G. Langoudt et A. L6ger 6voquent cette heterogeneit6 du milieu d'origine, mais, contrai- rement a ce que nous avons fait, n'en tiennent pas compte dans leurs analyses.

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6tablissements du secteur priv6 partagent des caract6ristiques propres qui les diff6rencient des 6tablissements du secteur public, et que ces caract6ristiques sont susceptibles d'avoir une influence sur le d6roulement des scolarit6s indi- viduelles. A la suite de M. Duru-Bellat et A. Mingat (1988), on est amen" & distinguer l'effet sp6cifique de la concentration dans une unite collective donn6e de caract6ristiques particulibres - au-del& des stricts effets de compo- sition - et la dimension institutionnelle du contexte (25). Le secteur de scola- risation est alors pergu comme une << organisation qui possede un style particulier, des modes de relations sociales specifiques et une capacit6 de mobilisation de ses acteurs et de ses ressources qui lui est propre >> (Cousin, 1993, p. 395).

Ainsi, la concentration d'l61ves issus de milieux sociaux favoris6s ou de familles porteuses de certaines valeurs (valorisation des etudes, implication, aspirations) peut crier un environnement qui affecte positivement les compor- tements individuels. Par ailleurs, ce qui fonde l'originalit6 de l'organisation des 6tablissements priv6s, c'est le principe de << volontarisme >> qui y r6git les relations (Salganik et Karweit, 1982). Ce volontarisme se manifeste notam- ment a travers la sel1ection mutuelle entre e61ves et direction (prospection des families, d'une part, et prise en compte de la volont6 du nouvel 61"ve et de sa famille d'adherer au projet 6ducatif de l'6tablissement, d'autre part), mais aussi entre enseignants et chefs d'6tablissement. M. Duru-Bellat et A. van Zanten (1999) remarquent en effet que le concours, impersonnel et anonyme, qui prevaut dans le public, est remplac6, dans le secteur priv6, par un entretien avec le personnel de direction de l'6tablissement, dont le r61le est de << d6tecter les qualit6s psychologiques, professionnelles et morales des futurs ensei- gnants >> (ibid., p. 154). C. Ben-Ayed constate 6galement que << les 6tablisse- ments priv6s imposent des conditions de recrutement des enseignants, notamment d'adh6sion au projet 6ducatif>> (1998, p. 536). Cette selection mutuelle assure le consensus et la confiance (Salganik et Karweit, 1982) entre les diff6rents intervenants de l'6cole priv6e (enseignants, personnel de direc- tion, parents et e61ves) et permet l'mergence d'une << communaut6 scolaire >>, pour reprendre l'expression de J.-L. Derouet (1987, p. 99) (26). F. Dubet, O. Cousin et J.-P. Guillemet, dans le cadre d'une etude comparative, en 1989, de trois colleges populaires de la banlieue d'une grande ville de province, observent les effets de cette mobilisation sur l'acquisition des connaissances et concluent que << le college qui connait la plus forte participation de ses acteurs autour des objectifs pr6alablement d6finis est aussi celui qui s'avyre le moins s6lectif tant scolairement que socialement [...] [et qu'] au contraire, dans le college qui ne connait aucune cohesion, la s61ection sociale joue libre-

(25) Cette distinction est 6galement pr6sent6e par P. Bressoux, P. Coustere et C. Leroy-Audouin (1997) qui considerent d'une part des variables issues du <<regrou- pement de caracteristiques individuelles >> mesurant un <<effet d'interaction sociale>> et, d'autre part, des variables << globales>> qui

renvoient au << destin commun >> des e61ves. (26) Selon lui, ce module reste un << ideal

diffus >> dans l'6cole publique alors qu'il est << spontan6ment d6velopp6 par l'enseignement priv6, dont un des arguments est la sup6riorit6 de l'6ducation sur l'instruction >>.

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Chloe Tavan

ment dans l'univers atomise de l'6tablissement, les enfants des classes popu- laires se trouvant &tre les plus penalises >> (Cousin, 1993, p. 412). Les diff6rences au niveau des relations entre les principaux acteurs scolaires peuvent done expliquer les plus faibles 6carts sociaux mesur6s pour le priv6. L'in6gale concentration de certaines caracteristiques individuelles (position sociale des parents, niveau d'implication et d'aspiration des parents, etc.) dans le public et dans le priv6 ainsi que les diff6rences quant a leur organisation interne sont done susceptibles de peser sur les trajectoires individuelles (27).

Si la frequentation d'un 6tablissement priv6 est apparemment associee, aux diff6rents niveaux de la scolarit5, ia une meilleure reussite scolaire (28), il convient d'une part de relativiser l'ampleur des 6carts cre6s par le secteur (ils sont par exemple mineurs par rapport a ceux qui existent entre e61ves d'origines sociales ou culturelles extremes), et d'autre part, de se garder d'interpr6ter cette liaison en termes de causalit6 : cette diff6rence sectorielle de reussite tient-elle & autre chose qu'aux conditions objectives plus favora- bles que partagent les e61ves du prive ? Une analyse visant a d6gager l'influence specifique du secteur de scolarisation sur les performances et les trajectoires scolaires nous conduit alors a des conclusions diff6rentes selon le degr6 consid6r6. Dans le premier degr6, l'6cole priv6e apparait comme au moins aussi efficace que l'6cole publique puisque, si les 6coliers du priv6 ont atteint ~ la fin du primaire un niveau d'acquisition sensiblement equivalent a celui des 6coliers du public, ils sont plus souvent entres au college sans avoir redouble auparavant ; a l'inverse, dans le second degr6, l'incidence propre du secteur de scolarisation est a l'oppos6 de ce que les 6carts bruts laissaient pr6sager : le fait de frequenter un 6tablissement priv6 est au mieux sans influence sur le parcours effectu6 dans le cadre du college. Le handicap dont patissent les coll6giens du priv6 semble tenir non pas & des pratiques d'orien- tation plus s6lectives - e61ves du public et du priv6 sont, ceteris paribus, egalement maintenus dans la filibre longue d'enseignement -, mais a des pratiques de passage plus strictes. L'effet net li6 & la frequentation exclusive du secteur priv6 est int6ressant non tant par son ampleur, mais par son signe. En effet, une fois les diff6rents biais de selection observables pris en compte, les r6sultats que nous obtenons pour le college vont a l'encontre de ceux 6tablis par G. Langouet et A. Leger qui, restant & un niveau purement descriptif, concluent qu'<< incontestablement [...] les "el1iminations" au cours de la premiere moiti6 du premier cycle concernent un moins grand nombre d'6lves du "tout priv6" que du "tout public" >> (1994, p. 81).

(27) Les analyses contextuelles n6cessitant des donnees particulibres ainsi que des infor- mations non seulement sur l'61eve, mais aussi sur l'6tablissement frequent6, nous ne pouvons utiliser ici le panel 1989 que dans le seul cadre

d'une approche individuelle. (28) Ce constat brut est d'ailleurs en accord

avec les r6sultats obtenus A partir du panel 1972-1973-1974 par G. Langoudt et A. L6ger.

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Les 6carts sectoriels de reussite s'expriment diff6remment selon l'influence locale du secteur priv&: lorsque l'enseignement priv6 est minoritaire, les trajectoires des 6l6ves qui le frequentent se distinguent de celles des 6lves du public, alors que dans les territoires oiA public et priv6 accueillent des propor- tions relativement proches d'6lves, on n'observe peu ou pas de diff6rence. Plusieurs hypotheses peuvent &tre avancees, mais aucune ne peut etre vrai- ment v6rifiee : cela peut tenir aux diff6rences de profil des 6lkves du priv6 entre les territoires de forte et de faible influence (29), a un mode d'organisa- tion ou & une fonction particulibre de l'enseignement priv6 1 ofi il est moins present. La position de l'enseignement priv6 dans l'offre locale d'enseigne- ment aurait donc une incidence sur ses fonctions et ses caracteristiques et in fine sur le parcours scolaire de ses 6lves.

Si l'on regarde d6sormais non pas les diff6rences globales de reussite entre les deux secteurs, mais les diff6rences propres a chacune des categories sociales, l'6cole privee apparait, notamment au cours de la scolarit6 C1Cmen- taire, comme un lieu de meilleure r6ussite pour les 6lkves issus des classes sociales modestes ainsi que pour ceux dont la mere est peu ou pas dipl6mo e. Cet avantage brut dej~ mis en evidence par G. Langoudt et A. Leger subsiste lorsque l'on considere des 6lkves rendus en tous points comparables. De plus, meme apres contr6le de l'environnement familial, du pass' scolaire et de l'atti- tude des familles a l'6gard de l'6cole, on conclut a l'existence d'6carts sociaux et culturels de reussite scolaire plus faibles dans le priv6 que dans le public.

Ces conclusions nous amenent finalement a voir dans les inegalites face a l'cole non seulement le resultat d'inegalites herit6es de l'environnement familial (inegalites sociales, culturelles, etc.), mais aussi le fruit de diff&- rences liees au contexte de scolarisation. En effet, la prise en consideration des caract6ristiques individuelles et familiales ne parvient pas toujours & annuler l'influence specifique au priv6. De plus, I'ampleur des effets nets, positifs ou negatifs, qui subsistent apres les nombreux contr6les introduits dans les modules, laisse supposer que ces 6carts ne peuvent pas tenir seule- ment a des effets de composition non pris en consideration, mais relkvent bien d'< effets de secteur >>.

Chloe TAVAN Insee

Timbre F 110 - 18, boulevard Adolphe Pinard - 75675 Paris cedex 14

chloe. [email protected]

(29) Au-deli des effets de composition des publics dont on tient compte, on peut penser, Ai la suite des travaux sur les effets de contexte,

que la concentration d'6l1ves aux caracteris- tiques diff6rentes a une incidence sur les trajec- toires individuelles des 6l1ves.

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ANNEXES

ANNEXE I. - Les variables

Afin de comparer l'efficacit6 des deux secteurs de scolarisation au cours du primaire et du college et d'observer le processus de construction des inega- lit6s entre les deux secteurs, nous avons construit plusieurs indicateurs de r6ussite ou de trajectoire scolaire. Il s'avyre en effet indispensable de ne pas se limiter "a un seul indicateur pour plusieurs raisons : d'une part, les diff6- rences entre les secteurs sont susceptibles d'6voluer au cours du cursus. Or ce n'est pas tant leur 6tat "a un moment donn6 que leur dynamique qui est int6res- sante. D'autre part, l'6chec et la r6ussite scolaires peuvent revetir des formes diff6rentes selon le secteur consid6r6 - notamment celles du redoublement et de l'orientation pr6coce vers des filibres technologiques ou professionnelles. En effet, selon M. Duru-Bellat et A. van Zanten,

<< des in6galit6s dans le fait

de rester ou non au college pendant tout le premier cycle, se sont substituees des in6galit6s plus qualitatives de reussite (probabilit6 in6gale de redoubler) et d'orientation>> (1999, p. 44). Les indicateurs retenus sont donc les suivants :

- Ne pas avoir redouble au cours du primaire; - Le niveau & l'entr6e en sixieme, qui resume le niveau d'acquisition

atteint a la fin du premier degr6. Cet indicateur composite est construit sur la base de plusieurs variables: le score aux evaluations a l'entree en sixieme (disponible pour a peine plus de la moiti6 des e61ves de l'6chantillon) et les evaluations du niveau des e61ves d6clar6es par les chefs d'6tablissement (30). Un score continu est ainsi reconstruit. Il est ensuite scind6 en quatre moda- lit6s;

- Etre parvenu en quatrieme g6n6rale apres deux ans de scolarit6 au college ;

- Etre parvenu en quatrieme g6n6rale apres deux, trois ou quatre ans de scolarit6 au college;

- Etre parvenu en seconde g6n6rale ou technologique apres quatre ans de scolarit6 au college;

- 1tre parvenu en seconde g6n6rale ou technologique apres quatre ou cinq ans de scolarit6 au college.

Le choix des variables explicatives ne vise pas l'exhaustivit6, mais n'entend pas non plus se limiter a la seule origine sociale, comme c'est le cas dans les travaux de G. Langoudt et A. L6ger (1994). De nombreuses recher-

(30) La construction de cet indicateur est la meme que celle adopt6e par L.-A. Vallet et J.-P. Caille (1996).

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ches ont en effet mis en avant le r6le plus g6n6ral de la famille - de son capital scolaire et de l'activit6 professionnelle de la mere (Estrade, 1995), de son lien "a la migration (Vallet et Caille, 1996), de sa structure (Archambault, 2001), de ses attentes -, mais aussi celui de la carriere scolaire pass~e (Duru-Bellat, Jarousse et Mingat, 1993). Les variables introduites sont les suivantes :

- Le secteur de scolarisation; - La categorie socioprofessionnelle (PCS) du chef de famille; - Des variables individuelles et familiales :

- Le nombre de personnes par piece (utilis6 ici comme une approxima- tion du revenu),

- Le dipl6me le plus 6lev6 de la mere, - L'activit6 de la mere, - La structure familiale, - Le nombre d'enfants dans la famille, - Le rang dans la fratrie, - Le sexe, - La nationalit6 de l'F61ve;

- Des variables de trajectoire scolaire passe : - La dur6e de frequentation de la maternelle pour l'6tude du primaire, - La dur6e de frequentation de la maternelle et le redoublement lors du primaire pour l'6tude du niveau " l'entr6e en sixieme,

- L'age a l'entr6e en sixieme et le niveau " l'entr6e en sixieme pour l'6tude de la trajectoire scolaire au college ;

- Des variables d'attitude de la famille et de l'e61ve: - Le niveau d'aspiration. Cet indicateur est fond6 sur la r6ponse de la

famille a deux questions: l'une concernant l'age de fin d'6tudes souhait6, I'autre le dipl6me jug6 le plus utile pour trouver un emploi. Elle possede trois modalit6s allant d'un niveau d'aspiration faible a un niveau d'aspiration 61ev6.

- Le niveau d'implication des parents. Cet indicateur est fond6 sur un score qui attribue un point pour chacun des cinq comportements suivants : aider son enfant dans son travail a% la maison (ou ne pas l'aider s'il n'en a pas besoin), avoir rencontr6 un professeur lors des rencontres parents-professeurs, avoir rencontr6 un professeur sur sa propre initiative, adherer " une association de parents d'6lkves, parti- ciper au conseil de classe. Le score, qui va de zero a cinq points, a ensuite 6t6 scind6 en cinq modalit6s : implication nulle (score 6gal A 0) ; implication faible (score 6gal

' 1) ; implication moyenne (score

6gal i 2); implication moyenne forte (score 6gal i 3); implication forte (score 6gal i 4 ou 5).

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- Le comportement de l'6l1ve. La seule variable disponible concernant le comportement de l'6l1ve est le temps consacr6 au travail a la maison (rien n'est dit quant a son assiduit6, a son attitude en classe, etc.). On a ainsi distingu6 quatre modalites selon que la famille declare que l'l61ve consacre moins de cinq heures par semaine pour ses devoirs a la maison, entre cinq et dix heures, plus de dix ou que la famille ne connait pas le temps consacre aux devoirs.

ANNEXE II. - Description des modles

Nous utilisons ici plusieurs modeles embofits selon la sequence suivante: - Le modcle 1 (MI) n'est rien d'autre que la transformation logistique du

tri croise < variable dcpendante * secteur de scolarisation > et permet d'appr6hender les 6carts bruts entre les deux secteurs, autrement qu'en ayant recours a une diff6rence ou a un rapport de pourcentages comme il est souvent fait.

- Le modcle 2 (M2) ajoute comme variable explicative la catigorie socio- professionnelle (PCS) du chef defamille et permet donc de mesurer un even- tuel effet associ6 au secteur priv6

" origine sociale contr616e. La diff6rence de

niveau ou de signe du coefficient relatif au secteur de scolarisation entre Ml et M2 est donc " attribuer a la PCS : si le coefficient s'annule, cela revient a dire que l'ensemble des diff6rences constat6es 6taient en fait dues " des diff6- rences de composition sociale entre les deux secteurs.

- Le modcle 3 (M3) complete M2 par un ensemble de variables indivi- duelles et familiales.

- Le modcle 4 (M4) reprend M3 et y ajoute des variables retragant la trajectoire scolaire passee.

- Le modcle 5 (M5) enfin introduit par rapport " M4 un controle suppl6-

mentaire : celui du niveau d'implication et d'aspiration de la famille et du comportement des e61ves.

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ANNEXE III. - Resultats complkmentaires

TABLEAU A-I. - Accider en seconde gendrale ou technologique apres quatre ans de scolarite au college

Diffirences nettes entre les deux secteurs

Coefficient LEcart jSignificativit6[ Odds ratio

M10,2468 - *** 1,28 Transformation logistique du tri crois 0

M2 0,0293 -0,2175 Ns 1,03

M1 + PCS du chef de famille M3

M2 + caract6ristiques familiales -0,0735 -0,1028 Ns 0,929 et individuelles

M4

M3 + pass scolaire -0,092 -0,0185 Ns 0,912 M3 + passe scolaire

M5 M4 + aspirations et implication des -0,1422 -0,0502 ** 0,867 families, comportement des 6lves

Source: Panel 1989, ministere de l'Education nationale, DEP. Remarque : *** indique que le coefficient est significatif au seuil de 0,1 %, ** qu'il est significatif au seuil de 1 % et Ns qu'il n'est pas significatif au seuil de 5 %.

TABLEAU A-II. - Accider en seconde generale ou technologique apres quatre ou cinq ans de scolariti au college

Diffirences nettes entre les deux secteurs

Coefficient Ecart {SignificativitI Odds ratio

M1 M10,3715 - *** 1,45

Transformation logistique du tri crois 0

M2 0,1545 -0,217 *** 1,167

M1 + PCS du chef de famille M3

M2 + caracteristiques familiales 0,0449 -0,1096 Ns 1,046 et individuelles

M4 0,0485 0,0036 Ns 1,05 M3 + passe scolaire

M5 M4 + aspirations et implication des -0,0155 -0,064 Ns 0,985 families, comportement des &l1ves

Source: Panel 1989, ministere de l'iducation nationale, DEP. Remarque : *** indique que le coefficient est significatifau seuil de 0,1 % et Ns qu'il n'est pas significa- tif au seuil de 5 %.

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TABLEAU A-III. - Description des classes selon le taux de scolarisation dans leprivd du premier et du second degrd

Taux de scolarisation dans le priv6

Premier degre Second degr _

Min. Q1 Med. Q3 Max. Min. Q1 Med. Q3 Max.

Classe 1 3,0 5,2 6,3 7,5 8,7 3,1 9,2 11,3 12,4 14,6 (33)

Classe 2 7,4 9,0 9,9 11,6 13,9 13,7 15,3 16,5 18,4 22,6 (38)

Classe 3 15,3 17,1 18,4 20,0 22,5 21,6 24,3 25,8 28,0 34,9 (13)

Classe 4 28,5 33,1 36,9 39,3 56,4 35,4 38,3 42,2 49,5 54,3 (12)

Source des donnees : Reperes et reftrences statistiques, 1991. Lecture : Le taux median de scolarisation dans le premier degre dans un etablissement prive est de 6,3 % pour la classe 1.

TABLEAU A-IV. - Le privd a-t-il le mime effet selon les territoires ?

Distance classe 4/ Coefficientclasse 1 classe 1

Non-redoublement Effet du priv6 classe 1 -0,2117 Ns 0,4989 (*) en primaire Effet du priv6 classe 4 0,2872 *

Niveau a l'entr6e Effet du priv6 classe 1 -0,1037 Ns 0,3441 (*) en sixieme Effet du priv6 classe 4 0,2404 **

Acces en quatrieme Effet du priv6 classe 1 -0,3822 Ns apres 2 ans de scolarit6 0,3481 (Ns)

au college Effet du priv6 classe 4 -0,0341 Ns

Acces en seconde aprbs Effet du priv6 classe 1 -0,2087 Ns 4 ans de scolaritC au 0,2103 (Ns)

college Effet du priv6 classe 4 0,0016 Ns

Source: Panel 1989, ministere de l'Education nationale, DEP. Remarque : ** indique que le coefficient est significatifau seuil de 1 %, * qu'il est significatifau seuil de 5 % et Ns qu'il n'est pas significatif au seuil de 5 %.

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