25
E B q v F F = q E + q v B. E = ρ ε 0 B = 0 E + B ∂t = 0 B - ε 0 μ 0 E ∂t = μ 0 j ε 0 μ 0 ρ C.m -3 j A.m -2 ∂ρ ∂t + j =0. c = 299792458m.s -1 μ0 =4π10 -7 kg.m.A -2 .s -2 ε0 =10c 2

Éléments de théorie de la relativité - lpsm.paris · Éléments de théorie de la relativité 1.1 Mise en défaut du principe de relativité galiléen Nous présentons ici deux

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Page 1: Éléments de théorie de la relativité - lpsm.paris · Éléments de théorie de la relativité 1.1 Mise en défaut du principe de relativité galiléen Nous présentons ici deux

Éléments de théorie de la relativité

1.1 Mise en défaut du principe de relativité galiléen

Nous présentons ici deux mises en contradiction élémentaires du principe de re-lativité galiléen. La première est liée aux équations de Maxwell qui prescrivent lavitesse de lumière et sont invariantes sous l'action du groupe de Lorentz. Nous met-tons ensuite en évidence l'impossibilité de la dé�nition d'une notion de simultanéitéen mécanique classique, ce qui vient contredire la notion de temps absolu du modèlegaliléen/newtonien.

1.1.1 La relativité galiléene confrontée à l'électromagnétisme

Commençons par quelques rappels d'électromagnétisme. Le cadre géométriquesous-jacent est ici celui de la physique de Newton introduit dans le premier exposédu groupe de travail.

Équations de Maxwell et vitesse de la lumière

L'électrodynamique classique nous dit qu'en présence d'un champ électrique Eet d'un champ magnétique B, une particule de charge q se déplaçant à vitesse v estsoumise à une force F :

F = qE + q v ∧B.

Les équations de Maxwell précisent l'évolution des champs électromagnétiques :

divE =ρ

ε0

divB = 0

curlE +∂B

∂t= 0

curlB− ε0µ0∂E

∂t= µ0 j

� ε0 est la permittivité diélectrique du vide ;� µ0 est la perméabilité du vide ;� ρ est la densité de charge (unité C.m−3) ;� j est densité de courant (unité A.m−2).

1

Les deux densités ne sont pas indépendantes, précisément elles sont reliées par larelation de conservation de la charge :

∂ρ

∂t+ div j = 0.

1. Dans le système internationnal d'unités, on dé�nit le mètre en imposant c = 299792458m.s−1

et l'ampère en imposant µ0 = 4π10−7kg.m.A−2.s−2. La constante électrique est alors dé�nie parε0 = 1/µ0c

2.

1

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2

Dans le vide, les équations de Maxwell impliquent

curl curlE = − ∂

∂tcurlB = −ε0µ0

∂2

∂t2E.

Or la formule usuelle curl curlE = ∇ divE−∆E donne simplement ici

curl curlE = −∆E,

d'où (∆− ε0µ0

∂2

∂t2

)E = 0,

qui en dimension 1 + 1 s'intègre en

E(t, x) = E−

(x− 1√ε0µ0

t

)+ E+

(x+

1√ε0µ0

t

),

où E+ et E− ne dépendent pas du temps t. Autrement dit, E est une onde qui sepropage à la vitesse c = 1/

√ε0µ0.

Morale 1 � Les équations de Maxwell prescrivent donc la vitesse de la lumière : sielles sont vraies dans tous les référentiels galiléens, deux observateurs en translationuniforme voient la lumière se propager à la même vitesse.

Relativité galiléenneloi d'addition des vitesseséquations de Maxwell

forment un ensemble contradictoire.

Invariance lorentzienne des équations de Maxwell

On normalise les équations de Maxwell en fonction de la célérité c. Les équationsdeviennent :

divE = ρ

divB = 0

curlE +1

c

∂B

∂t= 0

curlB− 1

c

∂E

∂t=

1

cj.

Le fait que le champ B soit de divergence nulle indique qu'il est le rotationnel d'uncertain champ A :

B = curlA.

Par ailleurs, le fait que curl(E− c−1∂tA

)= 0 indique que E−c−1∂tA est le gradient

d'une fonction φ :

E +1

c

∂A

∂t= −∇φ.

Le choix de (φ,A) n'est naturellement pas unique ; pour toute fonction régulière χ,la transformation suivante (

φA

)7−→

(φ+ c−1∂tχA−∇xχ

)

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1.1. MISE EN DÉFAUT DU PRINCIPE DE RELATIVITÉ GALILÉEN 3

laisse les champs E et B inchangés. Le choix d'une telle fonction χ est appelé choixde jauge, une condition usuelle pour un tel choix étant la condition de Lorentz :

divA +1

c

∂φ

∂t= 0.

Une fois le choix de jauge e�ectué, les équations de Maxwell peuvent se réécrire enterme des champs A et φ. Précisément, si l'on introduit le d'alembertien � :

� =1

c2∂2

∂t2−∇2,

les équations de Maxwell prennent la forme sympathique :

�φ = ρ, �A = j.

À travers cette reformulation, on voit que les équations de Maxwell sont invariantessous l'action de toute transformation qui laisse invariante le d'alembertien.

Morale 2 � Sous le principe de relativité galiléen, les équations de Maxwell sontinvariantes sous l'action d'un groupe d'isométries qui n'est pas celui attendu, enl'occurence, le groupe O(1, 3).

Une reformulation �relativiste�

En prenant un peu d'avance, on peut reformuler les équations de Maxwell sousforme tensorielle et �relativiste�. Dans R4, introduisons les coordonnées x0 = ct etx = (x1, x2, x3) = (x, y, z) et la matrice lorentzienne

gµν = gµν = diag(−1, 1, 1, 1).

On monte / descend les indices / exposants grâce à la matrice g :

xµ = gµνxν , pµ = gµνpν .

Dans ce cadre, les dérivations ∂µ = ∂/∂xµ s'écrivent avec les coordonnées usuelles :

(∂0, . . . , ∂3) = (c−1∂t,∇x), (∂0, . . . , ∂3) = (c−1∂t,−∇x),

et le d'alembertien s'écrit :

∂2 = ∂20 − ∂21 − ∂22 − ∂23 = c−2∂2t −∇2x.

Introduisons le potentiel A, le tenseur de champ électromagnétique F et le tenseurde courant j :

Aµ = (φ,A), i.e. Aµ = (φ,−A),

Fµν = ∂µAν − ∂νAµ, i.e. Fµν = ∂µAν − ∂νAµ,

jµ = (ρ, j) i.e. jµ = (ρ,−j).

La condition de jauge et la relation de conservation de charge deviennent

∂µAµ = 0, ∂µj

µ = 0,

et les équations de Maxwell s'écrivent alors∂κFµν + ∂µFνκ + ∂νFκµ = 0,

∂2Aµ = jµ.

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4

1.1.2 Abandon du principe de simultanéité

Dans l'exposé précédent, nous avons vu que la physique galiléenne / newtoniennesuppose l'existence d'un temps absolu, l'espace-temps s'écrivant comme un produitd'espaces a�nes (ou plutôt comme un �bré) de la forme A1 × A3. L'existence d'untemps absolu permet de parler de la simultanéité de deux évènements. Une fois unréférentiel galiléen �xé, deux évènements A = (tA,xA) et M = (tM ,xM ) sont simul-tanés si et seulement si tA = tM . Cependant, considérons un nouvel observateur en

Figure 1.1 � Simultanéité dans le monde newtonien.

translation uniforme par rapport au premier. Du point de vue de ce nouvel observa-teur, les évènements A et M sont-ils simultanés ? Si comme le suggère l'expérience,la vitesse de la lumìere dans le vide est une constante absolue, il est assez facile dese convaincre que la réponse à cette question est non en général, comme le montrela fameuse expérience du train d'Einstein.

Figure 1.2 � Mise en défaut de la notion de simultanéité.

Dans l'expérience du train, si l'on admet le principe de relativité galiléen et laconstance (�nie) de la vitesse de la lumière dans le vide, deux évènements simultanéspour l'un des protagonistes ne le seront pas pour l'autre et vice versa.

Morale 3 � La dé�nition de la simultanéité pose problème. Deux évènements si-multanés pour un observateur ne le sont pas forcément pour un observateur en trans-lation uniforme. Le temps ne s'écoule donc pas forcément de la même manière pourdeux observateurs : il faut abandonner la notion de temps absolu.

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1.2. ESPACE-TEMPS DE LA RELATIVITÉ RESTREINTE 5

1.2 Espace-temps de la relativité restreinte

La formulation du principe de relativité qui a conduit à la théorie de la relativitérestreinte a une histoire complexe que l'on pourra lire dans l'excellent [Dar06]. Onattribue cependant généralement sans conteste la paternité de la théorie à Einsteindans l'article fondateur [Ein05d].

1.2.1 Principe de relativité d'Einstein

Voici une traduction des premières lignes de l'article [Ein05d] :

On sait que l'électronique de Maxwell − telle qu'on la conçoit habituellement aujour-d'hui − conduit, lorsqu'on l'applique à des corps en mouvement, à des symétries, quine semblent pas inhérentes aux phénomènes. [il donne l'exemple d'un aimant et d'unconducteur]. Des exemples du même genre, ainsi que les vaines tentatives en vue demettre en évidence un mouvement de la Terre relativement au �milieu lumineux�,conduisent à conjecturer qu'au concept de repos absolu ne correspond aucune pro-priété des phénomènes, non seulement dans le domaine de la mécanique mais aussidans celui de l'électrodynamique ; plus même, dans tous les systèmes de coordonnéesoù les équations de la mécanique sont valables, ce sont également les mêmes lois del'optique et de l'électrodynamique qui sont valables − comme cela a été démontré pourles quantités du premier ordre. Nous allons élever cette conjecture (dont le contenusera dans la suite appelé �principe de relativité�) au rang de postulat, et au surplusintroduire le postulat, qui n'est qu'apparemment incompatible avec le précédent, selonlaquelle la lumière se propage dans le vide toujours avec une vitesse V bien déter-minée, indépendante de l'état de mouvement du corps émetteur. Ces deux postulatssu�sent pour parvenir à une électrodynamique des corps en mouvement simple etexempte de contradictions, fondée sur la théorie de Maxwell pour les corps au repos.[...]

En d'autres termes, Einstein postule que :

1. les lois de la physique sont les mêmes dans tous les référentiels inertiels ;

2. la vitesse de la lumière dans le vide est la même pour tout observateur, peutimporte la vitesse relative du référentiel inertiel dans lequel la mesure est faite.

Conséquences géométriques des postulats d'Einstein

Le temps n'étant a priori pas une donnée absolu, on suppose ici simplementque l'espace-temps est un espace a�ne de dimension 4. Voici comment les postulatsd'Einstein préscrivent la géométrie de l'espace-temps, ou plus précisément commentils prescrivent les transformations permettant le passage d'un référentiel inertiel àun autre :

i) Soient (t, x, y, z) et (t′, x′, y′, z′) deux systèmes de coordonnées relatifs à deuxréférentiels inertiels R et R′ de l'espace-temps. Le premier postulat assure queles lois de la physique sont les mêmes dans R et R′. En particulier, la trajectoirerectiligne uniforme d'une particule ponctuelle libre de toute force décrite dansR doit aussi être rectiligne uniforme dans R′. Autrement dit, un changement deréférentiel préserve les droites : c'est une application a�ne de l'espace-temps.

ii) La vitesse de la lumière est la même dans R et R′. En particulier, on a

c = V =dr

dt=dr′

dt′, où

dr2 = dx2 + dy2 + dz2

dr′2 = dx′2 + dy′2 + dz′2.

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6

La dernière relation s'écrit encore

−c2dt2 + dx2 + dy2 + dz2 = −c2dt′2 + dx′2

+ dy′2

+ dz′2

= 0.

Autrement dit, les changements de référentiels autorisés préservent la formequadratique minkowskienne

q((t, x, y, z)) = −c2t2 + x2 + y2 + z2.

Étant donné un référentiel R et un système de coordonnées (t, x, y, z), les transla-tions spatio-temporelles ainsi que les rotations de l'espace (x, y, z) laissant t inchangésont des exemples de telles transformations. C'est aussi le cas de la transformationsuivante appelée boost, si 0 ≤ v < c :

t′

x′

y′

z′

=

γ(t− vx

c2

)γ(x− vt)

y

z

où γ :=

1√1− v2

On montre que le groupe de transformations a�nes qui préservent la forme min-kowskienne q est précisément engendré par les rotation spatiales et les boost, suivisde translations spatio-temporelles.

1.2.2 L'espace-temps de la relativité restreinte

En 1908, suivant des travaux antérieurs de Planck, Minkowski a proposé le for-malisme suivant pour la dynamique dans un espace-temps relativiste. C'est le cadregéométrique naturel de la théorie de la relativité restreinte d'Einstein.

Le formalisme minkowskien

L'espace-temps de la relativité restreinte M est un espace a�ne ordinaire dedimension 4. Cet espace possède des systèmes de coordonnées privilégiés

(ct = x0, x = x1, y = x2, z = x3), (tc′, x′, y′, z′) etc.,

appelés référentiels inertiels. La coordonnée t est appelée temps. Les point de Msont appelés des évènements. On peut choisir les unités de sorte que la vitesse c dela lumière dans le vide soit égale à 1.

L'espace-temps M est muni de la (pseudo)-métrique de Minkowski, qui dans toutréférentiel inertiel est donnée par

ds2 = −|dx0|2 + |dx1|2 + |dx2|2 + |dx3|2 = −dt2 + |dx|2.

Les vecteurs deM s'écrivent de la façon suivante en coordonnées :

A = A0 ∂

∂x0+A1 ∂

∂x1+A2 ∂

∂x2+A3 ∂

∂x3.

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1.2. ESPACE-TEMPS DE LA RELATIVITÉ RESTREINTE 7

Le produit scalaire minkowskien entre deux vecteurs A = (A0,A)t et B = (B0,B)t

est donné par

A.B := −A0B0 +A1B2 +A2B2 +A3B3 = −A0B0 + A.B = gµνAµBν

où la matrice g est le �tenseur métrique� minkowskien : g = diag(−1, 1, 1, 1) etoù on a utilisé la convention de sommation d'Einstein. Un vecteur A de normenégative (gµνAµAν < 0) est appelé vecteur de genre temps, un vecteur A de normenulle (gµνAµAν = 0) est appelé vecteur de lumière, un vecteur A de norme positive(gµνAµAν > 0) est appelé vecteur de genre espace.

Une courbe paramétrée régulière x(λ) dansM admet un champ tangent dx/dλ. Sicette courbe est la trajectoire d'un photon, alors on a ds2 = 0 le long de celle-ci etle champ tangent est constitué de vecteurs de lumière gµν dx

µ

dλdxν

dλ = 0. Par extension,une courbe paramétrée dont le champ tangent est de genre temps (resp. de genreespace) sera dite de genre temps (resp. de genre espace).

Si dans le référentiel (t, x, y, z), une courbe de genre temps est paramétrée par letemps t, alors le vecteur dx/dt est le vecteur vitesse classique et on a la relation :

ds2

dt2= −1 +

∣∣∣∣dxdt∣∣∣∣2 = −1 + |v|2,

et v = |v| est la vitesse classique. Une trajectoire de genre temps peut toujours êtreparamétrée par son temps propre τ , i.e. par sa longueur d'arc, dé�ni à un changementd'origine près par ds2 = −c2dτ2 = −dτ2, c'est-à-dire :

dτ =√−ds2 =

√1− v2dt.

Étant donnée une trajectoire de genre temps x(τ) paramétrée par son temps propre,le vecteur tangent unitaire u = dx/dτ est appelé la 4−vélocité. En coordonnées, ilest donné par

u =

dt

dx

= γ

1

v

, où γ :=1√

1− v2=dt

dτ.

Mécanique lagrangienne et hamiltonienne

On cherche une formulation lagrangienne de la cinématique d'une particule dansle cadre de la relativité restreinte. On veut que l'action soit invariante par les trans-formations lorentziennes et qu'elle redonne la théorie classique newtonienne lorsquela vitesse de la particule en question est faible devant la vitesse de la lumière. La pre-mière quantité invariante disponible est l'intervalle ds =

√c2dt2 − dx2 − dy2 − dz2

qui, une fois un référentiel �xé s'écrit :

ds =

√1− |v|

2

c2cdt.

On essaie donc le lagrangien :

L(x,v) = L(v) = ac

√1− |v|

2

c2,

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8

où a est une constante à déterminer. Lorsque |v| << c, on a

L(v) ≈ ac− a|v|2

2c.

La constante additive ne joue aucun rôle pour les équations du mouvement. Pourretrouver la limite classique, on fait donc le choix a = −mc, c'est-à-dire

L(v) = −mc2√

1− |v|2

c2.

Le moment correspondant est

p = ∇vL =mv√

1− |v|2

c2

.

Dans la limite classique, on retrouve le moment usuel mv. En général, le moments'écrit Mv avec

M = M(v) =m√

1− |v|2

c2

.

Autrement dit, la masse e�ective d'une particule évolue selon sa vitesse. Les solu-tion des équations d'Euler-Lagrange ci-dessous correspondent bien à un mouvementrectiligne uniforme comme attendu

0 =d

dt∇vL−∇xL =

dp

dt.

De façon plus générale, si des forces sont présentes, on retrouve bien les lois deNewton si ma est remplacé par dp/dt. Dans le cas classique, i.e. non-relativiste, laquantité E = p.v−L , vu comme fonction de v, est une constante du mouvement :c'est l'énergie totale de la particule. Dans le cas relativiste

E = p.v − L =m|v|2√1− |v|

2

c2

−mc2√

1− |v|2

c2=

mc2√1− |v|

2

c2

= Mc2,

qui est la fameuse formule d'Einstein pour l'énergie d'une particule. Quand v estpetit, on retrouve

E ≈ mc2 +1

2m|v|2.

On peut aussi écrire E comme une fonction du moment p :

E2

c2− |p|2 = m2c2,

de sorte queE = c

√|p|2 +m2c2.

Vu comme fonction de p, E est naturellement l'hamiltonien d'une particule ponc-tuelle relativiste.

Remarque 1.1 � Le moment p et l'énergie E di�èrent dans des référentiels reliéspar une transformation lorentzienne, en revanche le vecteur (E/c,p) se transformecomme un 4−vecteur, appelé le moment relativiste ou moment-énergie.

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1.2. ESPACE-TEMPS DE LA RELATIVITÉ RESTREINTE 9

1.2.3 Retour sur la simultanéité

Nous insistons ici sur l'aspect géométrique de la théorie de la relativité restreinteen revenant sur la notion de simultanéité. Selon Einstein, dans la �gure ci-dessous,l'évènement M est simultané à A pour l'observateur O si et seulement si

t =t1 + t2

2,

où t1 est le temps propre (vis-à-vis de O) d'émission par O d'un photon qui at-teint l'évènement M et est ré�échi (sans délai) en M pour atteindre de nouveaul'observateur O au temps propre t2.

Plaçons dans le cas où le point de re�exion est proche de la ligne d'univers de Oauquel cas, cette dernière est approximativement à une droite. On a naturellement−−→AA1 = −c(t− t1)−→u et

−−→AA2 = −c(t− t2)−→u .

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10

La trajectoire ré�échie étant celle d'un photon, on a par ailleurs g(−−→A1B,

−−→A1B) = 0

c'est-à-dire

0 = g(−−→A1B,

−−→A1B)

= g(−−→A1A+

−−→AB,

−−→A1A+

−−→AB)

= g(−−→A1A,

−−→A1A) + 2g(

−−→A1A,

−−→AB) + g(

−−→AB,

−−→AB)

= c2(t− t1)2 + 2c(t− t1)g(−→u ,−−→AB) + g(

−−→AB,

−−→AB),

De même, on a

0 = c2(t− t2)2 + 2c(t− t2)g(−→u ,−−→AB) + g(

−−→AB,

−−→AB).

Pour t, t1, t2 �xé, on a alors nécessairement :g(−→u ,

−−→AB) = c

(t− t1+t2

2

)g(−−→AB,

−−→AB) = c2(t− t1)(t− t2).

Autrement dit, on a l'équivalence entre la simultanéité et l'orthogonalité :

t =t1 + t2

2⇐⇒ g(−→u ,

−−→AB) = 0⇐⇒

−−→AB ⊥ LO,

et dans ce cas, la longueur d'intervalle

dAB :=

√g(−−→AB,

−−→AB) = c

√(t− t1)(t− t2)

est simplement donnée pardAB = c(t2 − t1).

Morale 4 � Pour mesurer des distances, pas besoin de règle, des photons su�sent !

1.2.4 Retour sur les formalismes de l'électrodynamique

Le formalisme lagrangien

On cherche une formulation lagrangienne de l'électromagnétisme compatible avecla théorie de la relativité restreinte ; l'invariance lorentzienne réduit largement le choixpour la fonctionnelle d'action. Essayons une fonctionnelle du type suivant :

S =

∫ (t1,x1)

(t0,x0)(−mds+ qAµdx

µ) ,

où l'élément de longueur ds =√dt2 − dx2 est bien invariant (c = 1 ici), ainsi que

le produit scalaire de A et dx. On choisit un système de coordonnées de sorte quedx/dt = v, alors

S =

∫ t1

t0

(−m

√1− v2 + qA.v − qφ

)dt,

de sorte que le Lagrangien associé est :

L = −m√

1− v2 + qA.v − qφ.

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1.2. ESPACE-TEMPS DE LA RELATIVITÉ RESTREINTE 11

On distingue le moment p du moment mécanique pκ :

p = ∇vL =mv√1− v2

+ qA = pκ + qA.

Les équations d'Euler-Lagrange s'écrivent :

dp

dt= ∇xL = q∇x(A.v)− q∇φ

ici x et v sont vues comme indépendantes donc :

∇x(A.v) = (v.∇x)A + v ∧ curlA,

d'autre partdA

dt=∂A

∂t+ (v.∇x)A,

donc les équations d'Euler-Lagrange se réduisent à :

dpκdt

=d

dt(p− qA) = q

(−∇φ− ∂A

∂t

)+ qv ∧ curlA,

c'est-à-diredpκdt

= qE + q v ∧B

On retrouve la loi de Lorentz, notre choix d'action semble correct !

Le formalisme hamiltonien

L'hamiltonien correspondant H = p.v − L s'écrit en terme de la vitesse v :

H =m|v|2√1− v2

+m√

1− v2 + qφ.

Comme (H − qφ)2 = m2 + |pκ|2, en terme du moment p, on a

H =√m2 + |p− qA|2 + qφ.

Quand v est petit, on trouve

L ≈ −m+1

2m|v|2 + qA.v − qφ,

H ≈ m+1

2m|p− qA|2 + qφ.

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12

1.3 Vers la théorie de la relativité générale

1.3.1 Formulation de la théorie

L'idée qui se trouve à la base de la théorie de la relativité générale consisteà remplacer un espace-temps plat muni d'un champ gravitationnel par un espace-temps courbe sans champ gravitationnel. Dans la théorie classique, toute distributionde matière ρ∗ est associée à un potentiel gravitationnel Φ via l'équation de Poisson :

∆Φ = −4πGρ∗.

Dans la théorie de la relativité générale, une distribution de matière ne crée plus dechamp gravitationnel comme de la théorie newtonienne de la gravitation, mais elle�courbe� l'espace-temps. Le cadre mathématique qui permet de rendre compte de cetidée est celui de la géométrie di�érentielle. Ainsi, dans la théorie de la gravitationd'Einstein, l'espace-temps est modélisé par une variété lorentzienne de dimensionquatre (M, g). La distribution de matière et d'énergie dans l'univers est décrite parun champ de formes bilinéaires symétriques de divergence nulle, noté Tµν et appelétenseur énergie-impulsion. La géométrie de l'espace-temps est quant à elle codée parun second tenseur, appelé tenseur d'Einstein, noté Gµν :

Gµν := Rµν −1

2Rgµν , (1.1)

lui même dé�ni à partir du tenseur de Ricci Rµν :

Rµν :=∂Γσµν∂ξσ

−∂Γσµσ∂ξν

+ ΓρµνΓσρσ − ΓρµσΓσρν , (1.2)

et de la courbure scalaire R := gµνRµν . La façon dont la matière �courbe� l'espace-temps est décrite par les équations d'Einstein qui relient le tenseur énergie-impulsionau tenseur d'Einstein :

Gµν = 8πTµν − Λgµν , (1.3)

ou plus simplement, lorsque Λ = 0 :

Gµν = 8πTµν . (1.4)

Si T désigne la contraction du tenseur Tµν , l'équation (1.3) s'écrit encore :

Rµν − Λgµν = 8π

(Tµν −

1

2T gµν

).

Les physiciens a�rment que, dans les modèles classiques, le tenseur Tµν véri�e lacondition de suivante : pour tout vecteur X de genre temps,(

Tµν −1

2Tgµν

)XµXν ≥ 0.

Pour cette raison, il est généralement admis que les espaces-temps physiques sa-tisfont l'hypothèse suivante, baptisée condition forte sur l'énergie (�strong energycondition�) :

RµνXµXν ≥ 0, pour tout vecteur X de genre temps.

Cette condition joue un rôle déterminant dans la preuve de certains théorèmes d'exis-tence de singularités, citons par exemple le théorème de Penrose :

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1.3. VERS LA THÉORIE DE LA RELATIVITÉ GÉNÉRALE 13

Théorème 1.1 ([Pen65]) � Soit (M, g) une variété lorentzienne telle que :

� M satisfait la condition forte sur l'énergie ;� il existe un surface piégée dansM ;� M admet une hypersurface de Cauchy non compacte.

Alors,M possède une géodésique de lumière incomplète.

Remarque 1.2� La condition forte sur l'énergie peut être vue comme une traductiondu fait que la gravitation est �attractive�. En e�et, si X est un vecteur tangent à unegéodésique ξ de genre temps dansM, la positivité du tenseur de Ricci RµνXµXν ≥0 implique que les géodésiques au voisinage de ξ ont tendance, en moyenne, à serapprocher de ξ.

Remarque 1.3 � Dans l'équation (1.3), le terme Λ est un scalaire arbitraire : c'estla fameuse constante cosmologique. Cette constante a une histoire remarquable :Einstein l'a ajouté en février 1917 à l'équation (1.4) établie en 1915, dans le but derendre sa théorie compatible avec l'idée qu'il avait alors d'un univers statique. Aprèsla découverte en 1929 du décalage vers le rouge par Edwin Hubble impliquant ununivers en expansion, Einstein est revenu sur l'introduction cette constante, la qua-li�ant de �plus grande bêtise de sa vie�. Néanmoins des découvertes et observationsrécentes ont provoqué un regain d'intérêt pour ce paramètre, qui est par ailleurscompatible avec l'ensemble de la théorie de la relativité générale.

1.3.2 Heuristique des équations d'Einstein

Le passage de l'équation de Poisson pour le champ gravitationnel classique auxéquations d'Einstein de la théorie de la relativité générale peut sembler magique, etil l'est ! Nous essayons ici de montrer que si magie il y a, tout ne tombe pas pourautant du ciel. Nous suivons le raisonnement de [Fra74] et [Fra79].

On se place dans un univers vide de matière à l'exception d'une petite boule de�uide. L'état d'équilibre du système est supposé être une boule sphérique de rayonr0 dans laquelle le �uide est au repos : la gravitation tient les molécules de �uideensembles et la pression au sein du �uide l'empèche de s'e�ondrer sur lui même. Onsuppose qu'une fois l'équilibre atteint, la métrique qui décrit l'univers est statique,de la forme :

ds2 = g00(x)dt2 − dσ2,

où les composantes de la métrique ne dépendent pas du temps t. On s'attend à ce queles sections t = cste soient topologiquement des copies de R3 et que la première com-posante de la métrique g00 tende vers 1 à l'in�ni. Notre point de départ est l'équationde Poisson qui, comme on l'a vu précédemment relie le potentiel gravitationnel Φ àla densité de matière ρ∗ :

∆Φ = −4πGρ∗. (1.5)

Décrivons le potentiel de matière associé à notre boule de �uide. Pour ce faire, on serappelle que �moralement�, le potentiel gravitationnel en un point P est la quantitéde travail, ou le transfert d'énergie, nécessaire pour amener une masse d'une unité del'in�ni en au point P . Imaginons donc une particule de masse au repos m∞, qu'onamène depuis l'in�ni au bout d'un élastique jusqu'au point P , et lachons l'élastiqueà un certain temps t = 0.

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14

Dans le référentiel liée à la particule, son �énergie instantanée� est m∞ds. Vu d'unréférentiel où P est �xe, si t est la coordonnée temporelle dans le référentiel où le�uide est au repos, cette énergie est s'écritm(P )dt pour une certaine constantem(P ).Cependant, au temps t = 0, on a ds =

√g00dt dont on déduit :

m(P ) = m∞√g00(P ).

Autrement dit, le potentiel gravitationnel Φ en P est donné, par

m∞Φ(P ) = m∞ −m(P ) = m∞

(1−

√g00(P )

),

i.e.Φ(P ) := 1−

√g00(P ) =

√g00(∞)−

√g00(P ).

D'après Levi-Civita, on a alors :

∆Φ = −∆√g00 = −R0

0

√g00.

Autrement dit, l'équation de Poisson (1.5) se transforme en

R00

√g00 = 4πGρ∗. (1.6)

Dans le cas d'un �uide parfait, l'énergie / masse totale peut s'écrire sous la forme∫ρ∗√gV dx =

∫q

(1− 1

)√gV dx,

où q est la densité d'énergie au repos, et√gV est l'élément de volume dans la section

t = cste. Comme Φ = 1−√g00, on écrit ensuite :∫ρ∗√gV dx =

∫q(1− 1

2Φ)

1− Φ

√g00√gV dx, (1.7)

≈∫q(1 + 1

2Φ)√

g00√gV dx. (1.8)

L'approximation avec le cas classique montre que si p est la pression du �uide :

1

2

∫qΦ√g00√gV dx ≈

∫3p√g00√gV dx. (1.9)

En e�et, si on assimile√g00 à 1 et

√gV à la mesure de Lebesgue, on a en coordonnées

sphériques :1

2

∫qΦ√g00√gV dx ≈

1

2

∫qΦr2 sin(θ)drdθdφ

qui n'est autre que l'opposé du potentiel newtonien, c'est-à-dire

1

2

∫qΦr2 sin(θ)drdθdφ =

∫GMrdMr

r=

∫rGMrdMr

r2,

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1.3. VERS LA THÉORIE DE LA RELATIVITÉ GÉNÉRALE 15

où Mr désigne la masse de �uide dans la boule de rayon r. Comme la boule de �uideest à l'équilibre, la force gravitationnelle GMrdMr

r2est exactement compensée par la

force de pression, i.e. : ∫rGMrdMr

r2=

∫r × 4πr2dp.

En intégrant par parties, comme la pression est nulle à la surface de la boule de�uide, on obtient bien :∫

rGMrdMr

r2=[4πr3p

]r00

+∫ r00 3p× 4πr2dr

≈∫

3p√g00√gV dx

Finalement en combinant les approximations (1.8) et (1.9), on obtient :∫ρ∗√gV dx ≈

∫(q + 3p)

√g00√gV dx, (1.10)

et on ose l'identi�cationρ∗ ≈ (q + 3p)

√g00.

L'analogue (1.6) de l'équation de Poisson se transforme �nalement en :

R00 = 4πG (q + 3p) . (1.11)

Le membre de gauche de (1.11) est la première composante du tenseur de Ricci : ilest tentant d'identi�er également le membre de droite à la première composante d'untenseur. On reconnaît en fait la première composante du tenseur énergie-impulsiond'un �uide parfait de densité q, de pression p et de vélocité U :

Tµν = (p + q)UµUν − pgµν , i.e. T νµ = (p + q)UµUν − pδνµ.

Précisément, on a T 00 = q et T := T κκ = q− 3p de sorte que :

2T 00 − T = (q + 3p) .

Autrement dit, l'analogue de l'équation de Poisson (1.11) n'est autre que la premièrecomposante des équations d'Einstein !

Rνµ = 8πG

(T νµ −

1

2δνµT

).

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16

1.3.3 Éléments de cosmologie

La théorie de la relativité générale permet une modélisation précise de nombreuxphénomènes de l'échelle d'une planète, d'un trou noir, à celle de l'univers tout entier.À titre d'illustration, nous donnons quelques éléments de cosmologie, et les modèlesusuels de la théorie du Big-Bang.

Principe cosmologique et recherche de symétrie

Le point de départ de la théorie du Big-Bang est la formulation du �principe cosmo-logique�. Grossièrement, ce postulat exprime le fait que tous les points dans l'universsont �équivalents�. Plus précisément, il a�rme que l'univers est spatialement homo-gène et isotrope en tout point. Le terme �spatialement� a une importance non né-gligeable : si l'on admet le principe cosmologique, implicitement, on fait l'hypothèsede l'existence d'une coordonnée privilégiée unidimensionnelle t dans l'espace-temps(M, g), telle que les hypersurfaces correspondant à t = constante sont des variétéshomogènes et isotropes.

Sur une variété pseudo-riemannienne (M, gM ), les notions d'homogénéité et d'iso-tropie 2 sont des propriétés géométriques qui peuvent être interprétées en termesde vecteurs de Killing associés à la métrique gM . Faire l'hypothèse que la variétéet homogène et isotrope en tout point revient à dire que (M, gM ) est à symétriemaximale, c'est-à-dire que l'espace vectoriel des vecteurs de Killing de gM est dedimension maximale (n(n + 1)/2 si M est de dimension n). Le résultat suivant estclassique.

Proposition 1.1 ([Wei72] p. 381)� Si (M, gM ) est une variété pseudo-riemannienneà symétrie maximale, alors M est à courbure constante.

La proposition ci-dessus permet d'établir une classi�cation des variétés pseudo-riemanniennes à symétrie maximale : celles-ci sont classées selon leur courbure etla signature de leur métrique. De la même façon, il est possible de classi�er les va-riétés pseudo-riemanniennes admettant des sous-variétés à symétrie maximale. Onmontre ainsi le résultat suivant :

Proposition 1.2 ([Wei72] p. 395-404) � Soit (M, g) est une variété lorentziennede dimension n + 1. S'il existe une coordonnée t à valeurs dans un intervalle I deR, telle que les hypersurfaces t = constante sont des variétés riemanniennes dedimension n à symétrie maximale de courbure kt, alorsM est nécessairement de laformeM = I ×αMn où

� l'intervalle I est muni de la métrique −dt2 ;� (Mn, gM

n) est variété riemannienne de courbure constante k ;

� la fonction α(t) est donnée par kt = k/α2(t).

Autrement dit, si l'on se place sous l'hypothèse du �principe cosmologique�, l'espace-temps a nécessairement une structure de produit tordu dont la base est une variétéunidimensionelle (un intervalle ouvert) et la �bre est une variété riemannienne dedimension trois à courbure constante.

Dé�nition 1.1 � On appelle espace de Robertson-Walker une variété lorentzienneM du type =I ×α M où (I,−dt2) est un intervalle ouvert de R, (M, gM ) est une

2. Voir [Wei72] p. 378-379 pour des dé�nitions précises de l'homogénéité et de l'isotropie.

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1.3. VERS LA THÉORIE DE LA RELATIVITÉ GÉNÉRALE 17

variété riemanienne de courbure constante, et la fonction α est une fonction régulièrede I dans R∗+.

Remarque 1.4 � Une variété riemannienne (M, gM ) complète, simplement connexe,de dimension trois et de courbure constante k est isométrique à

� l'espace euclidien R3 si k = 0 ;� la sphère S3 si k > 0 ;� l'espace hyperbolique H3 si k < 0.

Sans perdre en généralité, nous nous limiterons donc dans toute la suite aux espacesde Robertson-Walker du type =I ×α R3,M = I ×α S3, etM = I ×α H3, selon quek = 0, k = 1 ou k = −1.

Explicitons les composantes non nulles du tenseur de Ricci dans un espace de Robertson-Walker, ce sont les composantes diagonales :

R00 = −3α′′

α, R11 = (αα′′ + 2α′2 + 2k),

R22 = (αα′′ + 2α′2 + 2k)f2(χ), R33 = (αα′′ + 2α′2 + 2k)f2(χ) sin2(φ).

Un calcul direct montre que la courbure scalaire R est alors donnée par :

R := gµνRµν = −6

(α′′(t)

α(t)+α′2(t)

α2(t)+

k

α2(t)

).

On voit ici que la courbure scalaire d'un espace de Robertson-Walker s'exprime sim-plement comme une fonction du facteur d'expansion et de la courbure k de sa �bre. Enparticulier, les propriétés géométriques de la fonction α se traduisent directement surla courbure de l'espace-temps. Par exemple, un espace de Robertson Walker de �breeuclidienne, associé à un facteur d'expansion strictement convexe est nécessairementde courbure scalaire négative. Autre exemple : à un facteur d'expansion polynomialsur R+ est associé un espace-temps dont la courbure tend vers zéro lorsque t tendvers l'in�ni.Par ailleurs, les hypothèses physiques naturelles portant sur le tenseur de Riccicomme la condition forte sur l'énergie introduite ci-dessus, induisent des contraintessur le facteur d'expansion. Par exemple, en regardant simplement la composante R00

du tenseur de Ricci, on voit que si un espace de Robertson-Walker satisfait cettecondition, nécessairement, le facteur d'expansion qui lui est associé est une fonctionconcave : α′′ ≤ 0.

Espaces de Robertson-Walker et �uides parfaits

Dans l'interprétation physique des espaces de Robertson-Walker, la coordonnée t ∈ Ijoue le rôle d'un temps absolu, appelé temps cosmique, qui mesure l'âge de l'univers.L'origine des temps t = 0 correspond au Big-Bang dans la théorie du même nom.La �bre M décrit quant à elle la géométrie spatiale de notre univers. Celui-ci peutêtre in�ni : lorsque T = +∞, M = R3 ou H3 par exemple, ou clos lorsque T < +∞et M = S3. La fonction de torsion permet de modéliser l'expansion/contraction del'univers lorsque celui �vieillit�. Par exemple, une fonction de torsion α(t) dé�nie surtout R+, qui croît avec t modélise un univers éternel en expansion. Une fonctionde type sinusoïdal sur une demi période, issue de zéro, qui croît vers un maximumpuis décroit vers zéro décrit un univers qui croît puis s'e�ondre sur lui-même (Big-Crunch).

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Dé�nition 1.2 � Soit M une variété lorentzienne et soit Tµν le tenseur énergie-impulsion dé�ni de facto par les équations d'Einstein (1.11) surM. On dit que Tµνest associé à un �uide parfait s'il existe un triplet (U, p, q) tel que

Tµν := (p + q)UµUν + p gµν , où

� U est un champ de vecteurs unitaires orientés vers le futur surM ;� les fonctions p et q sont des fonctions scalaires surM.

Physiquement, le champ de vecteurs Uµ représente la quadri-vitesse du �uide. Lesfonctions q et p représentent quant à elles les densités d'énergie et de pression du�uide respectivement. Dans le référentiel où le �uide est au repos, le champ Uµ s'écritUµ = (1, 0, 0, 0) et le tenseur énergie-impulsion :

Tµν =

q 0 0 000 p gij0

.

Proposition 1.3 ([O'N83]) � SoitM = I×αM un espace de Robertson-Walker etU = ∂t le champ de vecteur associé au temps cosmique t. Considérons les fonctionsde densité d'énergie et de pression dé�nies par

8πq/3 :=

(α′2(t)

α2(t)+

k

α2(t)

), −8πp :=

(2α′′(t)

α(t)+α′2(t)

α2(t)+

k

α2(t)

), (1.12)

alors le tenseur Tµν dé�ni par les équations d'Einstein (1.4) s'écrit

Tµν = (p + q)UµUν + p gµν .

Démonstration. En coordonnées sphériques ξµ = (t, χ, φ, ψ), les seules composantesnon nulles du tenseur d'Einstein sont les composantes diagonales :

G00 = 3

(α′2(t)

α2(t)+

k

α2(t)

), G11 = −(2αα′′ + α′2 + k),

G22 = −(2αα′′ + α′2 + k)f2(χ), G33 = −(2αα′′ + α′2 + k)f2(χ) sin2(φ).

Un calcul direct permet de conclure.

En fonction des densités de pression et d'énergie p et q, le tenseur de Ricci s'écrit :

R00 = T00 − 12Tg00 = 1

2(q + 3p),R11 = T11 − 1

2Tg11 = 12(q− p),

R22 = T22 − 12Tg22 = 1

2(q− p)f2(χ),R33 = T33 − 1

2Tg33 = 12(q− p)f2(χ) sin2(φ).

Lorsque les physiciens modélisent l'univers, ils cherchent bien entendu à rendrecompte des propriétés de la matière, et émettent naturellement des hypothèses sursa densité d'énergie et de pression. Ces densités s'exprimant en fonction du facteurd'expansion α, implicitement, ils font donc des hypothèses sur celui-ci. Par exemple,si l'on suppose que la géométrie spatiale de l'univers est hyperbolique (k = −1) etque la densité d'énergie est positive q ≥ 0, implicitement on suppose que le facteurd'expansion véri�e α′ ≥ 1, i.e. α est surlinéaire.

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1.3. VERS LA THÉORIE DE LA RELATIVITÉ GÉNÉRALE 19

Une hypothèse couramment admise est la positivité des densités d'énergie et depression : q ≥ 0 et p ≥ 0. Quelque soit la nature de la �breM , si les densités d'énergieet de pression sont toutes deux positives, alors on a R00 = 1/2(q + 3p) ≥ 0. D'aprèsl'expression de R00, on a donc nécessairement α′′ ≤ 0, i.e. la facteur d'expansion estune fonction concave. On retrouve ainsi la même condition de convexité que celle liéeà la condition forte sur l'énergie.

Quelques modèles cosmologiques usuels

Dans ce paragraphe, en précisant les équations d'état couplant les densités d'énergieet de pression dans le �uide dans di�érents régimes, nous exhibons les solutionsexactes des équations d'Einstein (1.3) et (1.4) les plus fréquemment utilisées encosmologie. La première équation de (1.12) et l'équation R00 = 1/2(q + 3p) sontconnues sous le nom d'équations de Friedmann. Pour obtenir des solutions explicitesaux équations d'Einstein, il faut préciser une équation d'état couplant les densitésd'énergie et de pression. La plupart des modèles utilisés en cosmologie sont gouvernéspar des équations d'état du type p = w× q, où w est une constante indépendante dutemps t.

Modèles dominés par la matière

Lorsque w = 0, c'est-à-dire lorsque p = 0, le modèle cosmologique décrit un espaceque l'on dit dominé par la matière. On véri�e facilement que dans ce cas, la den-sité d'énergie q est proportionnelle à α(t)−3. Si l'on pose C := (8π/3)× qα3 ≡ cste,lorsque la �breM est euclidienne, le facteur d'expansion solution des équations d'Ein-stein est α(t) = (9C/4)1/3t2/3. Dans les cas hyperbolique et sphérique, les graphes(t, α(t)) sont des cycloïdes qui s'expriment facilement comme des courbes paramé-trées par un scalaire λ :

α = C2 (coshλ− 1)

t = C2 (sinhλ− λ)

lorsque k = −1,

α = C2 (1− cosλ)

t = C2 (λ− sinλ)

lorsque k = 1.

Figure 1.3 � Expansion dans les modèles dominés par la matière.

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Parmi ces trois premiers exemples, les fonctions de torsion correspondant aux �breseuclidiennes et hyperboliques décrivent un univers éternel en expansion, la fonc-tion de torsion associée à une �bre sphérique décrit quant à elle un phénomène deBig-Crunch, i.e. un univers qui s'e�ondre sur lui-même en un temps �ni. On véri-�e facilement que dans ces trois exemples, le facteur d'expansion est une fonctionconcave.

Modèles dominés par les radiations

Dans le cas où la constante w vaut 1/3, c'est-à-dire lorsque p = q/3, le modèle cosmo-logique décrit un univers dit dominé par les radiations. Cette fois, la densité d'énergieq est proportionnelle à α(t)−4. On pose maintenant C := (8π/3)× qα4 ≡ cste. Dansle cas d'un �bre euclidienne, le facteur d'expansion solution des équations d'Einsteinest donné par :

α(t) = (4C)1/4 t1/2.

Dans le cas hyperbolique, on montre que α s'écrit :

α(t) =√C

((1 + t/

√C)2− 1

)1/2

.

En�n, dans le cas sphérique, on trouve

α(t) =√C

(1−

(1− t/

√C)2)1/2

.

Dans ces trois nouveaux exemples, le facteur d'expansion est toujours une fonctionconcave.

Figure 1.4 � Expansion dans les modèles dominés par les radiations.

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1.3. VERS LA THÉORIE DE LA RELATIVITÉ GÉNÉRALE 21

Modèles avec constante cosmologique

Nous nous intéressons maintenant aux modèles cosmologiques les plus célèbres, so-lutions des équations d'Einstein avec constante cosmologique. Le fait d'ajouter uneconstante cosmologique aux équations d'Einstein est équivalent à attribuer de l'éner-gie au vide. En e�et, si l'on pose

T (v)µν := − Λ

8πgµν ,

les équations (1.11) se réécrivent :

Gµν = 8π(Tµν − T (v)

µν

).

Les deux modèles envisagés ici ne contiennent pas de matière en dehors de celle�cachée� dans la constante cosmologique, ils sont dits dominés par le vide ; le tenseurT(v)µν est alors naturellement associé à un �uide parfait où les densités d'énergie et de

pression véri�ent

q = −p = − Λ

8π.

L'équation d'état couplant énergie et pression est donc à nouveau de la forme p =w× q avec w = −1. Là encore, on peut déterminer les facteurs d'expansion solutionsdes équations de Friedmann. Si Λ < 0, la seule valeur possible pour la courbure estk = −1 et le facteur d'expansion est donné par

α(t) =

√3

|Λ|sin

(√|Λ|3t

). (1.13)

Lorsque Λ > 0, les solutions sont

α(t) = cste× exp

(±√

Λ

3t

)lorsque k = 0,

α(t) =

√3

Λsinh

(√Λ

3t

)lorsque k = −1,

α(t) =

√3

Λcosh

(√Λ

3t

)lorsque k = 1.

(1.14)

L'espace-temps obtenu lorsque le facteur d'expansion est donné par l'équation (1.13)est connu sous le nom d'espace anti de Sitter. Les di�érents choix de facteurs d'ex-pansion du système (1.14) conduisent tous au même espace-temps, appelé l'espacede de Sitter, vu dans di�érents systèmes de coordonnées. A titre d'exemple, nousdonnons plus bas les changements de coordonnées permettant de passer du facteurd'expansion obtenu lorsque k = 0 à celui obtenu avec k = 1.

Remarque 1.5 � Parmi les espaces de Robertson-Walker que nous présentons ici àtitre d'exemples et qui sont les espaces les plus fréquemment utilisés en cosmologie,l'espace de de Sitter est le seul dont le facteur d'expansion n'est pas une fonctionconcave. En revanche, c'est une fonction log−concave au sens large puisque log(α)′′ =0 lorsque α(t) = et.

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