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ème - Le Mois du Film Documentaire · Elle est l’objet de mon egad et du egad des pesonnages ue je vais filme. J’ai choisi de egade

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Pour cette 13ème édition du Mois du film documentaire, nous vous proposons une sélection de films déclinée autour de thématiques de programmation ou encore un focus sur Jean-Gabriel Périot et le format court.

VISIONS SOCIALES

«« IInnttééggrraattiioonn//ddééssiinnttééggrraattiioonn »»

NAISSANCE D’UNE MOSQUÉE de Fabrice Marache France – 2011 – L’Atelier documentaire, TV Tours – 59 minutes La ville de Poitiers, symbole de la résistance à l’invasion musulmane du Moyen-âge, accueille la construction d’une grande mosquée. A travers l’histoire de cette édification, le film évoque l’installation durable de l’Islam en France et son rapport à la Cité. Le film propose de suivre pas à pas la sortie de terre de cette « mosquée visible », et de mesurer les ondes de choc qu’elle propage dans une ville moyenne française.

Le personnage principal est cette mosquée qui va se matérialiser sous nos yeux. Elle est l’objet de mon regard et du regard des personnages que je vais filmer. J’ai choisi de regarder l’apparition de la mosquée du point de vue de la ville qui l’accueille. Le film se situe là : dans l’observation des réactions de la société française face à l’émergence d’un lieu visible consacré à l’Islam. A mesure que la mosquée s’élève, la société s’agite autour d’elle et constitue des débats qui extériorisent un sentiment de peur et d’hostilité souvent refoulé mais néanmoins latent. Pourtant ce phénomène ne traduit pas une logique d’opposition mais plutôt une méfiance résignée qui peut être susceptible de laisser poindre une vraie curiosité, voir une possibilité d’ouverture. Note d’intention du réalisateur Fabrice Marache.

PRENDRE SA PART de Damien Mansion France – 2011 – Les Films de la Plume, TV Tours – 48 minutes "La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde ..." Cette célèbre phrase est souvent utilisée pour justifier les fermetures de frontières et les replis identitaires. La phrase continue : "... mais elle doit en prendre fidèlement sa part." À Tours, Damien Mansion rencontre trois personnes qui, comme lui, ne veulent pas en rester à cette phrase tronquée. Ces bénévoles expriment par leur démarche intellectuelle autant que par leurs actes, une idée de la démocratie, des droits de l'homme et de la citoyenneté. Catholique pratiquante, anarchiste, athée de gauche et partageant les mêmes buts, la défense et le soutien aux étrangers sans papiers, le film explore leurs actions et leurs discours : comment et pourquoi tentent-ils d’en prendre leur part?

Par un portrait croisé de ces 3 personnalités, Rose-Marie de Chrétiens-Migrants, Chantal de Réseau Éducation sans Frontières, et Jean-Christophe du Collectif de Soutien aux Demandeurs d'Asile et aux Sans Papiers, Damien Mansion nous fait pénétrer un milieu de dévouement et de luttes au quotidien. Venant en aide aux étrangers sans papiers, ces bénévoles expriment par leur démarche intellectuelle autant que par leurs actes, une idée de la démocratie, des droits de l'homme et de la citoyenneté. Se protéger/accueillir ; ouvrir/fermer. Par les parcours de ceux qui accueillent et soutiennent tous ces « sans visage », les demandeurs d'asile, le film nous met en présence de l’étranger, cet autre par excellence, et questionne le regard que nous portons sur lui. Car "La France ne peut

accueillir toute la misère du monde… mais elle doit savoir en prendre fidèlement sa part." (Michel Rocard 1990). Damien Mansion nous entraîne vers une réflexion sur les droits de l'homme et la fraternité collective et individuelle. Cela grâce à Rose Marie, Chantal et Jean-Christophe.

«« UUnn mmoonnddee eenn ccrriissee »»

AU PRIX DU GAZ de Karel Pairemaure France – 2011 – Kamatomi Films, Kazartprod, TV Tours – 85 minutes En juillet 2009, les ouvriers de l’usine de sous-traitance automobile New Fabris, à Châtellerault, occupent leur usine, menaçant de la faire exploser avec des bonbonnes de gaz. Les médias se précipitent dans la zone industrielle nord. Vivant à quelques pas de l’usine, j’ai décidé d’aller voir de moi-même… Le matin du 15 juillet 2009, en écoutant les informations nationales à la radio, j’apprends

l’ultimatum des ouvriers de l’usine New Fabris, dont je savais qu’elle se situait à quelques kilomètres de chez moi. J’ai décidé de passer les voir et j’ai découvert, sidéré, la situation. J’ai passé la soirée avec eux. *…+ J’ai donc assisté, entre autres, aux assemblées générales, aux conférences de presse qui attireront de plus de plus de journalistes jusqu’au dénouement, à la manifestation dans Châtellerault et au vote final le 31 juillet 2009 déterminant l’issue du conflit : faire exploser l’usine ou accepter malgré tout la proposition du Ministre de l’industrie. J’ai observé les journalistes au travail, cohabitant avec les ouvriers le temps d’une journée dans ce décor pour le moins surprenant. Ils arrivaient nombreux, installaient des plateaux improvisés entre les barricades de palettes. J’étais fasciné par toute leur fébrile activité. Mais j’ai aussi participé à la vie quotidienne de cette usine occupée, ce qui m’a permis de m’entretenir avec les ouvriers et d’assister à leurs discussions et à leurs occupations dans ces moments intenses de leur vie. Maintenant, deux ans se sont écoulés et certains d’entre eux sont devenus des amis, que je vois régulièrement. Je me suis intéressé de plus près au sort réservé aux ouvriers pendant cette période de crise financière. *…+ si souvent, les films qui traitent des conflits sociaux s’arrêtent au dénouement du conflit, je propose ici d’aller à la rencontre des ouvriers deux ans après ce conflit éclair. J’ai voulu savoir en premier lieu ce qu’ils étaient devenus et comment ils avaient vécu « l’après » ? Je suis revenu sur le conflit avec toute la distance que leur donne ces deux années de réflexion. Note d’intention du réalisateur Karel Pairemaure.

LA GUERRE DU GOLF de Lucia Sanchez France – 2010 – Les Films d’Ici, Black Moon Productions, Mara Films, TV Tours – 52 minutes En l’espace de quelques années, Murcia, l’une des régions les plus sèches d’Espagne, est devenue le terrain de golf de l’Europe. Pour les anglais à la retraite, c’est la destination de rêve : soleil garanti et loisirs discount. Pour des centaines d’émigrés aussi, la région est pleine de promesses. Poudre aux yeux ? Sur les pelouses impeccables, les panneaux publicitaires sont rois. Mais qu’est-ce qui se cache donc derrière ces façades aux crépis pastel ?

Un petit air de canular, à première vue : musique synthétique pour une ville en carton-pâte. Et

puis l’on sillonne le green et les ruelles, à la rencontre de touristes de passage, d’ouvriers agricoles et d’habitants : “Moi je n’aime pas le golf, non ! Moi j’aime le cinéma.” Lucia Sanchez s’amuse et pose, avec humour et fantaisie, de vraies questions. Chronique d’un urbanisme

galopant. Quand le tourisme transforme le paysage en décor, toutes les illusions semblent permises... Les escroqueries aussi. Anatomie d’une région défigurée. « La Guerre du golf, de l’espagnole Lucia Sanchez, n’est pas seulement un jeu de mots entre le sport et le Golfe Persique, théâtre de conflits stratégique s’il en est. L’œuvre présente un autre angle de la crise qui a frappé l’Espagne ces dernières années par le biais d’un regard sur la région de Murcie, l’une des plus sèches d’Espagne devenue l’un des terrains de golf les plus prisés d’Europe. L’image d’une balle de golf perdue dans le panier de figues de ces agriculteurs qui se battent pour préserver leurs anciennes exploitations et leur accès à l’eau utilisée pour arroser des terrains de golf, souligne mieux que mille mots la folie suicidaire et le décalage écologique de nos sociétés qui fonctionnent en vase clos ; incapables désormais de faire des liens et de respecter l’équilibre. Ce modèle de développement qui s’est fait, il faut le rappeler, avec la connivence des pouvoirs locaux, forts de l’ancienne loi franquiste permettant l’expropriation forcée des terres en raison « d’utilité publique ». L’utilité publique dans ce cas n’est nulle autre que la force d’attraction d’Anglais à la retraite et à la recherche du soleil du sud pour pratiquer le sport, selon la légende inventée par des bergers écossais. La Guerre du golf met aussi en évidence au milieu de la crise économique, l’émergence d’une autre Europe à deux vitesses sur le Vieux continent, celle d’une classe d’étrangers déconnectés de la réalité locale et les populations autochtones déracinés de leurs activités traditionnelles ou simples employés au service de la machine du business du golf. En d’autres mots, il est impossible de ne pas voir dans « la guerre du golf » le profil d’une situation auparavant inédite en Europe : l’apparition de nouveaux colons et de nouveaux indigènes, des retraités ou personnes fortunés d’Europe du nord en terrain conquis d’une part, et de l’autre des indigènes d’Europe du sud survivant comme ils le peuvent. Nul ne doit se surprendre que le projet européen bat de l’aile : nous sommes à des années-lumière du rêve de Robert Schuman. » Robert Scarcia, Combats Magazine, San Sebastian (Espagne)

PORTRAITS

«« LLee JJee eett ll’’iinnttiimmee »»

PAPA EST COSMONAUTE d’Yvan Petit France – 2012 – Alter Ego Production, Sans Canal Fixe, BIP TV, TV Tours – 62 minutes Un fils va demander à son père ce qu’il faisait le jour de sa naissance. Le père lui répond qu’il est allé dire au revoir à son adolescence. Le fils découvre alors une drôle d’histoire : le père faisait partie d’un groupe de poètes dirigé par un gourou multi-facettes. Et le fils regrette de n’avoir pas connu ce père poète mais seulement l’homme d’affaires qu’il est devenu. Il se dit qu’il est peut-être temps de se parler. Alors le fils se met à courir après un passé déjà passé, mais dont il pense pouvoir encore faire image, territoire de cinéma, et raconter l’histoire.

Lorsque je parle pour la première fois de Micberth avec mon père, il me dit qu’il l’a vu la dernière fois le jour de ma naissance, le 19 Juillet 1969. Micberth vivait depuis peu dans un château des environs de Tours. Premier malentendu : je crois entendre que mon père est allé dire à Micberth qu’il le quittait. Jusqu’à ma naissance, mon père a été poète ; pourquoi a-t-il alors arrêté ? Coïncidence, choix, obligation ? J’ai besoin de savoir si mon père a eu la vie qu’il aurait voulu avoir, comprendre les routes qu’il a prises, comment il a pu passer sans- presque -

aucune transition d’une aventure poétique d’adolescence à la vie d’un chef d’entreprise et de père de famille. J’entrevois une autre facette de lui, jusque-là méconnue, qui crée des résonnances avec mes propres choix : un pan de sa vie avant moi a été une recherche d’expression, par la littérature, la poésie, l’engagement dans un collectif .J’ai besoin qu’il n’ait pas été qu’une machine de guerre industrielle et individualiste, que quelque chose de non-matériel ait pu être un moteur assez puissant pour que le choix entre vie spirituelle et vie matérielle ait été un choix difficile à un moment précis, celui de ma naissance. J’ai besoin d’y croire, même un instant. Le temps d’un film. (…) « Je construis le labyrinthe dont je me propose de sortir » (Martin Winckler, Plumes d’Ange) *…+ Je m’entoure de figures affinitaires, d’une famille de cinéma (ceux qui m’ont donné envie de faire des films, ma compagne, qui devient le temps d’un film co-auteur et même comédienne). J’emprunte, je cite ; des livres, des genres cinématographiques ou littéraires (autobiographie, polar, burlesque), des formes (puzzle, listes, jeu de l’oie). Comme autant de filtres, de protections nécessaires, de détours pour parvenir à une ligne droite : de moi à lui, mon père. Alors, tout au long du film, je trimballe à vélo ma grande silhouette d’inspecteur burlesque et entêté, quêteur obsessionnel d’indices, de preuves, de pistes. Je fouille, me trompe, avance. J’ai une histoire à raconter. Note d’intention du réalisateur Yvan Petit

LE PING d’Anne Faisandier France – 2012 – Alter Ego Production, BIP TV, TV Tours – 63 minutes Klaus, Marion, Jamal, Rolland, Isabelle, Noé et moi jouons au ping-pong. Nous sommes très différents : l'âge, le métier, les raisons pour lesquelles nous sommes là, à jouer. On voit chaque joueur sous toutes les coutures, on entend sa voix, on écoute ses pensées. Un film aux je/jeux multiples.

C'est après la lecture du livre intitulé Ping-pong de Jérôme Charyn que j’ai eu envie de relever un défi : raconter le ping-pong comme il le raconte, mais le raconter en image. J’aurai plus de mal car le ping-pong est très dur à filmer. La balle est petite. Les coups sont rapides. Comment saisir le plaisir intérieur du joueur qui répète et répète le geste de frapper dans cette petite balle, encore et encore. Il manigance des stratégies qui ne se discernent pas, passe par des moments de pure magie ou de pure détresse qui durent un quart de seconde ! Mais je veux essayer. Je vais le filmer et le filmer dans les clubs où je joue trois fois par semaine, dans les rues, dans les maisons. Une balade intérieure dans le ping-pong. Avec des personnages: moi, Klaus, Marion, Jamal et Roland nos professeurs, Noé, et plus légèrement Isabelle, Salima, Martin, etc. Ce sera le ping-pong dans tous ses états, les lieux où il est pratiqué, la technique décortiquée, les mille et une façons de l'aimer, de le jouer, de le vivre à l'intérieur de sa tête et à travers son corps. L’essentiel du dispositif repose sur cette voix off - multiple – à la première personne. Elle ne s'absente vraiment qu'aux moments appelés danse/musique. Elle est la voix intérieure du joueur qui se parle à lui-même, s’engueule, se félicite, se concentre, engueule l’autre, prie, se vide la tête. Elle est aussi l’écho de ses pensées sur le ping-pong. Sa réflexion sur pourquoi il ou elle aime, pourquoi il ou elle joue, pourquoi ça l’amuse tant. Elle est multiple - pleine d’accents, allemand, indien, jeune du quartier Saint Blaise. Les parlers sont différents, les pensées aussi, pas sur le même plan. On est tellement différents - et tellement semblables aussi ! Ma voix est celle du personnage qui parcourt tout le film, que l'on retrouve dans tous les lieux. Note d’intention de la réalisatrice Anne Faisandier

«« LLee JJee :: rraappppoorrtt aauu mmoonnddee eett aauuxx aauuttrreess »»

TOYONG, L’ENTRE-SAISON d’Aurélie Mandon France – 2011 – Kanari Films, TV Tours – 51 minutes Aurélie est amie avec En-Jung, jeune Coréenne doctorante à Séoul. Après deux ans passés en France, En-Jung s’apprête à tirer un trait sur ses souvenirs heureux de l’Occident et son indépendance. Elle espère un travail fixe et honorable. La société coréenne attend d’elle avant tout qu’elle se marie. Aurélie suit En-Jung auprès de son entourage pour comprendre à quel point une tradition confucianiste perdure, régissant encore strictement - mais jusqu’à quand - les relations dans un pays au fait de la modernité. Elle s’interroge aussi sur ses propres aspirations, bousculant ses certitudes sur le féminisme et les cadres de cette société.

Dans ce documentaire, je souhaite dresser le portrait d’une jeune femme coréenne. Mais mon

regard est nécessairement biaisé car je ne suis pas coréenne. J’ai été éduquée avec des valeurs de liberté à défendre, mon pays est celui de la révolution et des droits de l’homme, les femmes d’ici ont cinquante ans de féminisme derrière elles. Ce documentaire doit assumer ce biais. Je filme Séoul avec l’œil émerveillé d’une jeune occidentale touchée par sa poésie et sa vitesse. Je filme En-Jung, les protagonistes et les situations avec l’œil surpris d’une Française qui s’interroge sur cette société de codes, sur sa rigidité. La genèse du projet n’était-elle pas un élan féministe visant à dénoncer une tradition trop stricte ? Ce projet me questionne aussi sur mon attirance pour cette tradition que je souhaitais dénoncer. Il m’invite à ne surtout pas tirer de conclusion. Note d’intention de la réalisatrice, Aurélie Mandon

SIGNER LA VIE de Céline Thiou France – 2011 – Mikiti Production, France Télévisions – 52 minutes Elisabeth est interprète en français et langue des signes française. D'un rendez-vous à l'autre, elle accompagne la vie des gens, traduisant les grands et les petits moments : rendez-vous chez le médecin, le juge, le banquier, entretien d'embauche, visite de musée, mariage, accouchement, enterrement… Entre deux mondes, elle permet la communication entre Sourds et Entendants prêtant sa voix aux uns et ses mains aux autres.

J’ai rencontré Elisabeth dans le cadre d’un atelier théâtre regroupant des comédiens amateurs sourds et entendants, j’intervenais comme metteur en scène, Elisabeth en tant qu’interprète en français et langue des signes française.*…+ C’est en l’écoutant me parler de sa pratique que j’ai eu envie de l’accompagner une journée, « pour voir ». J’ai alors pris la mesure de l’incroyable variété des situations et des personnes qu’elle est amenée à rencontrer. Les demandes d’interventions, lorsqu’elles émanent de particuliers (personnes sourdes, parents d’enfants sourds…), relèvent souvent du champ de l’intime : cérémonies, (baptêmes, mariages, enterrements…) ou de situations sociales qui se jouent habituellement dans un face à face : rendez-vous médicaux, entretiens d’embauche, demandes de prêts immobiliers… Dans ce type de situations, l’intervention d’un interprète facilite la communication entre sourds et entendants, permet un accès complet à l’information des personnes sourdes et une vraie possibilité de prise de parole. Suivre Elisabeth dans l’exercice d’un métier encore méconnu, c’est l’occasion de donner à voir les fils des relations intimes et sociales qui se nouent dans les événements les plus importants et les plus dérisoires d’une vie. C’est évidemment s’interroger sur l’altérité mais sans focaliser sur le handicap, c’est regarder au microscope des espaces où circule une parole entre deux langues, entre deux mondes. Note d’intention de la réalisatrice Céline Thiou

« Portrait d’artiste »

SOUS LES SILENCES DE MARCEL KANCHE de Philippe Gasnier France – 2011 – Girelle Production, TV Tours, BIP TV – 52 minutes Le film fait partie d’une série documentaire intitulée « Salons de musique » qui dresse le portrait d'auteurs, compositeurs et interprètes de la chanson francophone contemporaine. La direction de cette collection et la réalisation du premier film consacré à Marcel Kancheest confiée à Philippe Gasnier (Zanzibar Musical Club). Quand on demande à Marcel Kanche son instrument de prédilection, celui qui lui sert à

composer ses chansons, il répond «la truelle». Ce n’est pas une boutade ni un bon mot, mais la vérité. Du moins, ça l’a été très longtemps. Actif dans le monde de la musique depuis les années 80, avec le groupe d’avant-garde Un Département, puis sous son nom à partir de 1990, l’ami Kanche a assuré l’ordinaire en faisant de la maçonnerie, restaurant des fermes ou bâtissant des pavillons chez lui, du côté de Loches (Indre-et-Loire). Aujourd’hui, il vit près de Niort, dans les Deux-Sèvres. Et s’il a pu lâcher la truelle et le fil à plomb, il ne le doit pas aux ventes de ses sept CD publiés en vingt ans, mais plutôt aux droits d’auteur liés à son compagnonnage avec Matthieu Chedid. Lequel a adopté plusieurs de ses textes (dont le fameux Qui de nous deux) et placé auprès de Vanessa Paradis, dont il produisait le disque, le joli Divine Idylle. Marcel Kanche a aussi écrit pour [Alain Bashung], Emma Daumas, Caroline Loeb… Article de François-Xavier Gomez, Libération, 5 avril 2011.

LA MÉMOIRE

AVEC TOI SANS TOI de Francesca Ragusa France – 2011 – La Vie est belle Films associés, BIP TV, TV Tours – 52 minutes Le film relate la vie tumultueuse de Josette Géraud Hayden, jeune épouse du peintre Henri Hayden, et proche de Samuel Beckett. Une brillante conversation filmée avant sa mort. Ses carnets intimes et sa peinture dessinent le portrait d’une femme moderne et affranchie qui a pourtant vécu tiraillée entre son indépendance, son travail de peintre et le dévouement amoureux, à l’ombre de deux grands artistes, hommes de sa vie. À leur disparition, Josette, personnage à bien des égards beckettien, dérive dans la dépression et l’alcoolisme avant d’atteindre une vieillesse digne et apaisée.

Le film est construit à partir des images du récit de Josette, tournées en 2000. Aujourd’hui, je raconte son histoire en restituant sa parole en deux phases. Celle de la « légende officielle » affichée dans le tournage et celle du « jardin secret » qui émerge de ses cahiers intimes, ses poèmes, de son travail méconnu de peintre. Josette avait 86 ans, c’était une conteuse née : sa manière de raconter, son langage étaient élégants et directs. Épouse dévouée pendant 40 ans d’Henri Hayden, très proche de Samuel Beckett, elle transmettait, témoin et gardien de la mémoire, une image intime des deux artistes. Elle était drôle, enchanteresse, femme née sous le signe de l’excès. Entre nous, la sympathie fut immédiate. De son côté, Josette tenait à raconter la vie d’Henri Hayden, apparemment cela seul lui importait, le faire sortir de l’oubli dans lequel il était tombé et dont elle se sentait responsable. Dans les nuages de sa dose quotidienne de whisky et dans les volutes de ses dizaines de cigarettes, d’autres événements surgissaient en filigrane et le tournage a fini par ressembler à

une longue conversation. J’avais recueilli une légende officielle bien confectionnée, certes, mais à travers laquelle j’entrevoyais une autre vérité, soigneusement dissimulée. *…+ À travers ses œuvres, j’ai découvert un talent négligé, un esprit libre et audace, bien dissimulé à l’ombre de ses deux maîtres. Quand je lui ai parlé de ma découverte, elle m’a répondu en citant une phrase de Beckett « Comme si… jamais été ». Note d’intention de la réalisatrice Francesca Ragusa

LE THÉ OU L’ÉLECTRICITÉ de Jérôme Le Maire France – 2011 – Iota Production, Perspective Films, HKS Production, K Films – 93 minutes Le Thé ou l’Electricité est l’histoire épique de l’arrivée de l’électricité dans un petit village isolé et enclavé au cœur du Haut Atlas marocain. Durant plus de trois années, saison après saison le réalisateur dévoile patiemment les contours de la toile qui se refermera inexorablement sur les habitants d’Ifri. Sous nos yeux se dessine l'image d’une modernité impitoyable à laquelle ce petit village va être relié.

Cette phrase : « le thé ou l’électricité » vient d’une blague que j’ai entendue à plusieurs reprises dans l’Atlas. Elle raconte l’histoire d’un petit village qui vient d’être électrifié et dans lequel un vieil homme, un peu naïf, arrive chez son voisin, le premier du village qui vient de recevoir l’installation. Le vieil homme est accueilli comme il se doit, mais comme il presse un peu trop son hôte par sa curiosité de voir la nouveauté, le voisin agacé lui lance cette phrase : « Ecoute, que veux-tu : le thé ou l’électricité ? ». La chute est que le vieillard, n’ayant pas compris l’ironie de son voisin, a répondu spontanément : « l’électricité! ». L’hôte a alors allumé l’interrupteur et après avoir observé un moment l’ampoule incandescente, le vieux est rentré chez lui sans même avoir bu le traditionnel thé de bienvenue ! Au Maroc, le thé est symbole de tradition. Il symbolise la bienvenue mais aussi l’accueil, la solidarité, l’aumône (un des 5 piliers de l’Islam)…Cette gentille plaisanterie contient en elle une morale révélant une facette plus sombre sur l’arrivée de l’électricité. Ce développement peut-il mettre en péril les valeurs fondamentales de cette microsociété. ? Que va-t-il donc advenir des traditions, des rites et des coutumes qui caractérisent ces populations ? *…+ Je voudrais laisser la parole à ceux qui sont concernés par ces bouleversements. Qu’ils soient acteurs ou spectateurs de cet événement qui va chambouler leur mode de vie, c’est leur discours qui me semble ici important. Et c’est précisément au nom de leur identité menacée que cette décision de rester « sur » eux prend son sens. C’est donc au travers de petits gestes du quotidien et en m’immergeant pendant une longue durée dans l’intimité de cette microsociété que je compte induire un questionnement plus universel sur le sens du mot « développement ». Note d’intention du réalisateur Jérôme Le Maire

LE PROCÈS DE PHNOM PENH, J’AI MON MOT A DIRE de Loan Lam et Didier Fassio France – 2011 – 24 Images, Le Mans Télévision – 52 minutes Trente ans après les crimes de masse perpétrés par les Khmers rouges au Cambodge de 1975 à 1979, qui ont causé la mort de deux millions de personnes environ, un Tribunal spécial internationalisé et parrainé par les Nations unies a été mis en place pour juger les principaux dirigeants à Phnom Penh, la capitale du pays. Ce tribunal ad hoc (à caractère temporaire) innove par rapport aux autres juridictions internationales jugeant les crimes contre l’humanité et de génocide, en permettant aux victimes, pour la première fois depuis Nuremberg, de se porter parties civiles. *…+ La partie est *pourtant+ loin d’être gagnée pour les victimes, en particulier pour celles de la diaspora cambodgienne de France et de Belgique, qui ont pourtant contribué à créer ce tribunal.

Incarné par un magistrat franco-khmer, c’est ce parcours du combattant enduré par les victimes, avec son cortège de doute et d’espoir, auquel s’ajoute la douleur du retour sur le passé, que le documentaire « Procès de Phnom Penh : « J’ai mon mot à dire » se propose de raconter. C’est à travers le parcours du combattant enduré par le juge Hoc Pheng Chhay, président du

Comité des Victimes des Khmers Rouges à Rambouillet (Yvelines), avec son cortège de doute, de découragement et d’espoir, auquel s’ajoute la douleur du retour sur le passé, que nous filmerons cette histoire. Le juge Chhay croisera par ailleurs le chemin de cinq autres victimes exceptionnelles, décidées à se constituer parties civiles, car elles ont leur mot à dire au tribunal de Phnom Penh. Leurs témoignages seront complétés par la parole de leurs avocats, dont certains sont conseillés par le magistrat. Considéré comme un « monument didactique » pour une nation, selon les mots de Pierre Hazan, auteur du livre « Juger la guerre, juger l’Histoire » publié chez PUF, un grand procès est toujours un défi à relever pour un peuple traumatisé par un crime de masse. Au-delà du combat acharné du juge Chhay, et des cinq autres personnages tout aussi exceptionnels, nous chercherons également à comprendre leurs motivations. Comment vont-ils contribuer à l’effort que devront faire les Cambodgiens pour intégrer « un passé qui ne passe pas », afin de reconstituer leur mémoire collective sapée par la tentative révolutionnaire khmère rouge ? Note d’intention de la réalisatrice Loam Lam.

EN ÉTHIOPIE SUR LES TRACES DES PREMIERS CHRÉTIENS de Jean-Louis Saporito France – 2011 – TGA Production – 52 minutes Dans la province du Tigré, au Nord de l’Éthiopie, il existe un territoire fermé et reculé, le Woldeba, entièrement dédié à la vie monastique. Là-bas vivent environ un millier de moines qui mènent une vie d’abstinence, de jeûne et de prière perpétuelle. Près de la moitié des 80 millions d’Éthiopiens sont chrétiens. Ils considèrent que leur église, l’Église orthodoxe éthiopienne, est la plus proche du christianisme des origines.

Comme d’autres nations africaines, l’Ethiopie est un pays chrétien. 50% de sa population totale et près de 95% de celle de la région du Tigré, située au nord du pays, pratique le culte orthodoxe. Mais à la différence des autres pays chrétiens d’Afrique, l’Ethiopie n’a pas été christianisée par des missionnaires. Sa conversion est beaucoup plus ancienne et remonte à 330 après Jésus-Christ. C’est ainsi qu’au milieu du IVème siècle, l’Ethiopie, terre africaine, devient la deuxième nation chrétienne, après l’Arménie en 301 et avant l’Empire romain en 391.A l’intérieur de cette région, il existe un territoire fermé et reculé, le Woldeba, entièrement dédié à la vie monastique. Là-bas vivent environ un millier de moines et d’ermites, à l’abri des regards et loin du monde profane, une vie d’abstinence, de jeûne et de prière perpétuelle. Cette terre, considérée comme sacrée par les religieux, est interdite aux femmes et à tout élément féminin. On y accède très difficilement, il faut plusieurs jours de marche et l’autorisation des autorités religieuses pour y pénétrer. Depuis des siècles, les moines y vivent en vase clos, soustraits aux influences extérieures. *…+ Comment ces pratiques religieuses si singulières ont-elles pu perdurer jusqu’à aujourd’hui ? Le film se propose de répondre à cette question. En partant du présent, de l’observation aujourd’hui de la vie des moines au Tigré et particulièrement au Woldeba, seront évoqués plus de 15 siècles d’histoire du christianisme en Ethiopie. Note d’intention du réalisateur Jean-Louis Saporito.

EN REMONTANT LES VIEILLES ROUTES de Barbara Spitzer France – 2012 – Les Films d’Ici – 73 minutes Le dernier voyage de Jacques, ancien prisonnier de guerre lors de la Seconde Guerre Mondiale qui, à l’aube de sa 100ème année, retourne avec sa fille et sa petite-fille dans le camp où il fut incarcéré en Biélorussie. Ce film nous raconte l’aventure d’un voyage dans l’espace et dans le temps qui nous conduit

d’une petite cuisine du 14ème arrondissement de Paris jusque sur les Vieilles Routes (Staryje Doroghi, en russe) de Biélorussie. Pourquoi retourner à Staryje Doroghi ? Le film autour de cette question. Il suggère intrinsèquement l’intensité du moment historique dans lequel nous nous trouvons : le temps où les derniers témoins disparaissent, sont morts, ou sont déjà trop vieux pour dire. Les coups de gomme que Jacques a jetés sur ses souvenirs font un étrange écho au système étatique de la table rase qui caractérise tous les paysans biélorusses. Le film parle avant tout de transmission et évoque de plein fouet la question de la mémoire générationnelle, aussi bien par le truchement de ses personnages principaux qui font le voyage en Biélorussie et qui appartiennent à trois générations distinctes que par celui des personnages qu’il rencontre dans le pays. Depuis plus d’un an, Jacques m’a choisie pour re-garder ensemble re-défiler sa vie, ce qu’il n’osait auprès de ses onze petits-enfants et vingt-deux arrières, issus de ses cinq enfants vivants. Après soixante-trois années de silence, il en avait peut-être un peu assez de se taire et cette oreille attentive qui ne craignait pas la révélation, qui devait pouvoir entendre la blessure éternelle et irréparable, c’était somme toute une aubaine. Note d’intention de la réalisatrice Barbara Spitzer.

FOCUS « JEAN-GABRIEL PERIOT : DES PAYSAGES, DES FIGURES »

Auteur prolifique et résolument contemporain, Jean Gabriel Périot construit depuis déjà près de 15 ans une filmographie conséquente qui interroge notre rapport à la mémoire, à l’intime et à la violence. Maniant l’art du montage avec maestria, il plonge le spectateur dans un hypnotisme inquiétant. Souvent présenté comme un cinéaste expérimental, il dit ne pas « s’inscrire dans la tradition française du court métrage, qui pense majoritairement, et à tort, que le cinéma s’arrête à la fiction ». Jean-Gabriel Périot aime en effet brouiller les pistes et multiplier les fonctions et les supports en étant là où on ne l’attend pas. Cinéaste, vidéaste, monteur, il travaille à partir d’images d’archives, de foundfootage, de photos récupérées sur le web ou d’éléments de sa propre vie. Avec le documentaire, Nos jours, absolument, doivent être illuminés, il s’intéresse à la rupture du lien de l’homme au monde à travers d’autres types d’images filmées à l’extérieur de la prison d’Orléans. Ses films ont été sélectionnés et primés dans les festivals du monde entier. NIJUMAN NO BOREI (200 000 FANTÔMES) France – 2007 – Envie de Tempête Productions – 10 minutes Hiroshima, 1914-2006. Une méditation expérimentale autour de le A-BombDome, symbole de la destruction

d'Hiroshima par la bombe atomique en 1945. Le A-BombDome est le nom d'un ancien centre d'affaires japonais devenu le symbole de la destruction de la ville d'Hiroshima par la bombe atomique américaine en 1945. Construit en 1915, c'est le seul bâtiment à être resté debout dans l'entourage immédiat du lieu de l'explosion. Le A-BombDome n'a jamais été restauré ;

demeuré tel qu'au jour du bombardement, il est très vite devenu le monument souvenir des centaines de milliers de mort du 6 août 1945.

NOS JOURS, ABSOLUMENT, DOIVENT ÊTRE ILLUMINÉS France – 2011 – Alter Ego Production – 23 minutes Le 28 mai 2011, des détenus chantent depuis l'intérieur de la maison d'arrêt d'Orléans pour le public venu les écouter de l'autre côté du mur. La rupture du lien de l’homme au monde apparaît pour tous comme un bouleversement

profond. En milieu carcéral, ce lien peut parfois subsister, mais toujours de façon très fragile, sous condition, au parloir, dans des lettres…Jean-Gabriel Périot tente de donner une nouvelle forme à ce lien. Une forme directe, universelle: Un concert de détenus retransmis devant l'enceinte sud de la maison d'arrêt d'Orléans.

THE DEVIL France – 2012 – Local Films – 7 minutes Vous ne savez pas qui nous sommes. « Le film tout juste réalisé en 2012 commence par une succession de plans serrés sur des

visages d'enfants noirs, tandis que l'on découvre en boucle l'étrange refrain du chanteur des Boogers : "If you look upon my face, you are watching now the devil" (Si tu regardes mon visage, tu vois le diable)... Puis les petits deviennent grands, et les jeunes hommes et les jeunes femmes grondent de plus en plus fort, pointent du doigt, menacent. Ils sont des monstres, dit-on ? L'insulte qui leur est adressée, ils l'encaissent et en font leur étendard. » (…) Ce n'est bien sûr pas la première fois qu'un film plonge dans l'univers des Black Panthers... Quant aux images, elles sont connues, certaines sont même empruntées à un film d'Agnès Varda, Black Panthers (1968). Pourtant, The Devil réveille le regard, et c'est pour cette raison qu'il a été retenu à Lussas dans la section "Expériences du regard". Ses partis pris formels, sans doute, y sont pour quelque chose. » Le Monde Culture, Clarisse Fabre.