Enseignement Vipassana Par Le Vénérable Sayadaw Jatila

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  • Enseignements sur

    vipassan par le Vnrable

    Saydaw Jaila

    dhammadna

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    Enseignements sur

    vipassan par le Vnrable

    Saydaw Jaila

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    Enseignements sur

    vipassan par le Vnrable

    Saydaw Jaila

    Compils par U Hla Kyaing Traduits par le moine Dhamma Smi

    dhammadna

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    Srie d'enseignements dlivrs au centre de mditation Mahs de Yangon (Myanmar) par le Vnrable Saydaw Jaila, compils par U Hla Kyaing, (prsident de l'organisation Buddha Ssana Nuggaha) et traduits du birman par le moine Dhamma Smi.

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    Table des matires

    Brve biographie du Vnrable Saydaw Jaila ................................... 11

    La mthode Mahs du dveloppement de vipassan........................... 13 Ce qu'un yog doit faire et ne pas faire ................................................. 20 La plus importante chose qui soit dans la vie ....................................... 27 La contemplation par les six portes sensorielles................................... 34 Qui cherche le dhamma le trouve dans son corps................................. 41 Les quatre catgories de personnes....................................................... 47 Le kynupassan sampajaa............................................................. 51 Les bnfices du satipahna ............................................................... 58 L'importance de l'quilibre des facults dans vipassan....................... 65 Les principes de base pour tout bouddhiste.......................................... 71 Les trois sortes de personnes ................................................................ 78 Les cinq qualits d'un yog ................................................................... 84 Les rsultats ne surviennent que lorsqu'ils arrivent maturit ............. 91 Le Slavanta sutta.................................................................................. 97 Les quatre lments ............................................................................ 105 Celui qui discerne entre la cause et l'effet est un ca sotpana ......... 111 La thrapeutique du dhamma.............................................................. 117 Les quatre chemins de prfrence (1re partie).................................... 120 Les quatre chemins de prfrence (2e partie) ..................................... 126 Les quatre chemins de prfrence (3e partie) ..................................... 133 Les quatre chemins de prfrence (4e partie) ..................................... 138 sla visuddhi (la puret de la conduite) ............................................... 145 citta visuddhi (la puret du mental) .................................................... 152 dihi visuddhi (la puret de la vue) .................................................... 158 kakhvitaraa visuddhi (la puret de l'affranchissement du doute) . 165 Les trois sortes de maggaga.............................................................. 172 propos de nibbna ........................................................................... 177 Les quatre roues propices ................................................................... 183

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    Brve biographie du Vnrable Saydaw Jaila

    Le Vnrable Saydaw Jaila est n le mardi 26 novembre 1935 dans le village de Kadau, dans le nord du Myanmar. Ses parents sont U Mya Kyi et Daw Phwa Thit.

    l'ge de sept ans, il reu une ducation basique au monastre Dakkhirma, auprs du Saydaw U Uttara. l'ge de dix ans, en devenant smaera, il prend le nom de Jaila.

    En 1953, il demeura sur la fameuse colline de Sagaing, connue pour tre un haut lieu de la littrature bouddhique. Il tudia le pali auprs du Vnrable Saydaw Vicrinda et d'autres clbres enseignants. Durant cette anne, il russit l'examen gouvernemental primaire d'abhidhamma, et l'anne suivante, les examens moyen et suprieurs d'abhidhamma, ainsi que l'examen gouvernemental de vinaya.

    Le 24 juillet 1955, le Vnrable Jaila fut admis dans le sagha. En tant que bhikkhu, il poursuivit ses tudes sous les auspices du ministre des affaires religieuses. Il russit avec grand succs des examens parmi les plus hauts, touchants aux textes canoniques, remportant le titre de Ssanadhaja Sripavaradhammcariya (vinaya pi prag) de 1959 1961.

    En 1966, il vint Yangon, au centre de mditation Mahs, pour s'y entraner intensivement au satipahna, sous les instructions du Vnrable Saydaw Pandita. Aprs avoir achev son entranement avec succs, il retourna sur la colline de Sagaing pour y enseigner le pali l'universit durant trois ans.

    En 1969, le trs Vnrable Mahs Saydaw lui confia la tche d'tablir un centre de mditation Mahs Pyinmana, ville situe environ 300 kilomtres de Yangon. Il devint alors Kammahncariya Nyaka, dlivrant les instructions de mditation de nombreux yog.

    Durant 15 ans, il fut le prsident de l'organisation des instructeurs Mahs (au niveau national). Il a t lu secrtaire du Mahs sagha travers tout le pays en 1988.

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    Aujourd'hui, le Vnrable U Jaila remplit des fonctions essentielles parmi les principales organisations structures autour des centres Mahs.

    En plus de cela, son devoir majeur est l'enseignement du dhamma aux trangers, soit ceux qu'il rencontre en se rendant dans des pays trangers, soit ceux qui viennent au Myanmar pour y pratiquer le dhamma.

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    La mthode Mahs du dveloppement de vipassan

    Le sujet de l'enseignement d'aujourd'hui est la mthode du dveloppement de vipassan, par le Mahthera Aggamahpaita Mahs Saydaw (Vnrable Sobhana).

    Aprs une tude approfondie des textes palis du tipiaka (les critures de l'enseignement de Bouddha), le Vnrable Mahs Saydaw en a extrait les lments ncessaires pour l'laboration d'une mthode simple et facile de dveloppement de la vipassan.

    Pour permettre une comprhension facile toute personne ordinaire, le Vnrable Saydaw a expos un ensemble de questions et rponses propos de vipassan.

    La premire question est la suivante : Qu'est ce qui doit tre observ pour dvelopper vipassan ?

    Le mot vipassan est devenu trs la mode. vipassan signifie le fait d'tre capable d'observer les phnomnes qui apparaissent et qui disparaissent. Il existe dix connaissances de vipassan (vipassan a) : 1. sammasana a ; 2. udayabbaya a ; 3. bhaga a ; 4. bhaya a ; 5. dnava a ; 6. nibbid a ; 7. mucitu kamyat a ; 8. paisakh a ; 9. sakhrupekkh a ; 10. anuloma a.

    La question qui se pose est de savoir o se classent nma rpa pariccheda a et paccaya pariggaha a, les deux connaissances que les yog exprimentent au dbut de leur entranement. D'un certain point de vue, on pourrait les classer avec les dix autres vipassan a. C'est comme pour le mot vipassan, on explique parfois que la particule passan signifie fait de noter , sans donner la dfinition de la particule vi . nma rpa pariccheda a est la connaissance qui fait la distinction entre la conscience et la matire, c'est--dire entre l'objet observ et la conscience qui observe. paccayapariggaha a est la connaissance qui distingue les causes des effets. sammasana a est la connaissance qui peroit anicca, dukkha et anatta travers les phnomnes. udayabbaya

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    a est la connaissance qui peroit clairement l'apparition et l'anantissement des phnomnes. Selon la manire de classer les vipassan a, nous pouvons directement passer de pariccheda a anuloma a. Les noms et les classifications ne sont pas importants. Ce qui l'est, c'est d'tre capable de matriser la mthode de vipassan.

    Ainsi, la rponse la question qu'est-ce qui doit tre observ pour dvelopper vipassan ? est : les cinq agrgats de l'attachement (updnakkhandh) . C'est--dire qu'il convient de contempler ces cinq agrgats, qui, lorsqu'ils ne sont pas observs au moment de leur apparition, sont assujettis l'attachement.

    Les cinq updnakkhandh (agrgats de l'attachement) sont : 1. rpakkhandh (agrgat de la matire) 2. vedanakkhandh (agrgat des sensations) 3. sakkhandh (agrgat des perceptions) 4. sakhrakkhandh (agrgat des volitions mentales) 5. viakkhandh (agrgat de la conscience)

    Si les yog ne ralisent pas qu'un tre humain n'est rien d'autre qu'un groupe de cinq agrgats, il sera convaincu que les phnomnes physiques et mentaux sont atta, c'est--dire : je suis MOI, lui est un homme, elle est une femme, etc. Il risquera alors d'tre trs attach cette vue incorrecte qu'on appelle sakkya dihi. Pour cette raison, il convient de s'entraner vipassan jusqu' dvelopper une comprhension juste des cinq agrgats.

    Comment convient-il de contempler les phnomnes avec une vue juste ? Comme le font les yog ici et maintenant, en notant durant la marche pas gauche, pas droit ou lever, poser ou lever, avancer, poser , etc. Nous procdons exactement comme il est indiqu dans le mah satipahna sutta : gacchanto v gacchmti pajnti .

    Pendant la marche, lorsque le yog note le mouvement du pas gauche : le mouvement lui-mme est l'agrgat de la matire ; le fait qu'il soit agrable ou dsagrable est l'agrgat des sensations ; le fait de le noter est l'agrgat des perceptions ; le fait d'effectuer ce pas est l'agrgat des volitions mentales ; la conscience qui le connat est l'agrgat de la conscience.

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    Cela constitue donc les cinq agrgats de l'attachement. Le yog qui n'observe pas le mouvement des pas durant la marche pensera : c'est MOI qui avance, c'est MON pied qui avance , etc. Cette vue, qui a pour caractristique de croire que ceci est moi , est prcisment l'attachement des cinq agrgats.

    Pendant l'assise, lorsque le yog note assis, toucher : le corps assis est l'agrgat de la matire ; le fait que ce soit agrable ou dsagrable est l'agrgat des sensations ; le fait de le noter est l'agrgat des perceptions ; l'effort de noter est l'agrgat des volitions mentales ; la conscience qui connat est l'agrgat de la conscience.

    Lorsque le yog note : monter, descendre , ce gonflement et ce dgonflement de l'abdomen sont l'agrgat de la matire ; le fait que ce soit agrable ou dsagrable est l'agrgat des sensations ; le fait de noter ces mouvements est l'agrgat des perceptions ; l'effort de les noter est l'agrgat des volitions mentales ; la conscience qui les connat est l'agrgat de la conscience.

    Cela constitue donc les cinq agrgats de l'attachement. Le yog qui n'observe pas le mouvement des pas durant la marche pensera : c'est MOI qui avance, c'est MON pied qui avance , etc. Cette vue, qui a pour caractristique de croire que ceci est moi , est prcisment l'attachement des cinq agrgats.

    Cela est considr comme la contemplation des cinq agrgats de l'attachement avec la vue juste. Il est donc correct de noter : pas gauche , pas droite , lever , avancer , poser , monter , descendre , assis , toucher , voir , entendre , etc. C'est--dire, noter correctement les cinq agrgats de l'attachement dans le but de les connatre. Il est correct de noter les mouvements du corps au moment o ils sont effectus et les sensations du corps au moment o elles apparaissent. En revanche, il est incorrect de noter matire , conscience , anicca , dukkha , anatta , etc. Il ne faut pas se proccuper de cela, ni mme du fait que cela apparaisse ou disparaisse. Il faut seulement noter les phnomnes physiques et mentaux l'instant o ils se manifestent, au fur et mesure o ils se manifestent.

    La seconde question est la suivante : Dans quel but et quand contempler les agrgats ?

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    La premire partie de cette question est : Pourquoi les yog doivent-ils noter les agrgats (les phnomnes physiques et mentaux) ? La seconde partie de cette question est : Quand est-ce que les yog doivent noter ces agrgats ?

    La rponse est : Pour empcher l'attachement, la contemplation doit tre effectue au moment de leur apparition. Si le yog note le gonflement, le dgonflement, le mouvement, la vision, le son, la consommation de nourriture, etc., au moment mme de l'apparition de chacun de ces phnomnes, l'attachement peut tre vit.

    Dans le mah satipahna sutta, il est dit : kye kynupass viharati, tp sampajno satim vineyya, loke abhijjh domanassa . Cela signifie que lobha (l'avidit) dosa (l'aversion) et l'attachement peuvent surgir si les yog ne notent pas les phnomnes physiques et mentaux au moment o ils apparaissent. Ces phnomnes doivent donc tre nots dans le prsent, au moment mme de leur apparition.

    De la mme manire, il faut noter les sensations au moment mme de leur apparition.

    C'est pourquoi, la question Dans quel but et quand contempler les agrgats ? , il est rpondu : Pour empcher l'attachement, la contemplation doit tre effectue au moment de leur apparition.

    Si un phnomne n'est pas observ au moment de son apparition, l'attachement peut natre. Par exemple, en entendant un son agrable, s'il n'est pas not, l'attachement surgira et ce son sera peru comme une mlodie, un son plaisant. De la mme faon, en percevant une vision agrable, si elle n'est pas note, l'attachement surgira et cette vision sera perue comme un beau paysage, une vision plaisante.

    Ensuite, on peut supposer que ces agrgats sont bons, beaux et permanents. On peut aussi affirmer : les sons que je perois m'appartiennent, c'est MOI qui les perois , les visions que je perois m'appartiennent, c'est MOI qui les perois , etc.

    Pour viter de telles illusions, chaque yog doit contempler dans la mesure du possible tous les phnomnes physiques et mentaux qu'il peroit. Ainsi, en dveloppant cet entranement sans relche, il comprendra que tout ce qui apparat est condamn sanantir, et qu'il n'y a donc pas de raison de s'y attacher. Le yog pourra alors se dfaire

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    des vues errones quant l'existence du MOI et de la personnalit (sakkya dihi).

    En poursuivant assidment le dveloppement de la vipassan, le yog comprendra par lui-mme que tout est assujetti la souffrance et que rien n'est permanent. Il comprendra aussi les caractristiques naturelles de tout ce qui apparat dans le corps, telles que les tensions, les irritations, les douleurs, les fourmillements, etc.

    En notant une douleur, le yog connatra les caractristiques de la douleur. S'il ne la note pas, il ne pourra pas la connatre. Une fois que ces caractristiques seront connues, le yog verra clairement sakhata lakkha. C'est--dire que les phnomnes se dcomposent en trois parties : le dbut (l'apparition), le milieu (la dure), et la fin (l'anantissement).

    Plus tard, il verra les caractristiques danicca, dukkha et anatta.

    Quand un yog aperoit une file de fourmis de loin, il ne voit qu'une ligne noire. S'il s'en approche, il peut distinguer les insectes un un. En tant tout prs, il peut voir que chaque insecte est constitu d'une tte, d'un thorax et d'une queue. De la mme manire qu'au dbut de son entranement, un yog ne voit que des objets grossiers. Une fois que l'attention se dveloppe et que les observations deviennent plus nombreuses, il commence percevoir les conditions changeantes d'instant en instant.

    En poursuivant toujours s'entraner au dveloppement de la vipassan, le yog percevra distinctement l'apparition et la disparition des phnomnes. Cela conduit la connaissance de la caractristique danicca, autrement dit, que rien n'est durable. En mme temps, le yog ralise, que, du fait que tout phnomne qui apparat s'anantit aussitt, rien ne peut tre plaisant. Il comprend ainsi que tout est assujetti l'insatisfaction et la souffrance. Il s'agit de la connaissance de la caractristique de dukkha.

    Une autre ralisation que le yog fera est que les choses ne se produisent pas selon sa volont, que rien n'est jamais prvisible l'avance. Cette connaissance est celle de la caractristique danatta. ce moment, le yog comprendra par lui-mme que les principales caractristiques inhrentes toutes choses sont anicca, dukkha et anatta.

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    La dernire partie de la rponse ( la seconde question) est : Si l'attachement a t extirp, la voie de la connaissance s'ouvre et finalement, nibbna est ralis. Une fois que le yog a clairement ralis la connaissance des caractristiques danicca, dukkha et anatta, il approuve le fait qu'il ny a pas de personnalit ou d'entit propre. Il sait que tout cela n'est qu'un ensemble d'agrgats constamment changeants.

    En poursuivant toujours son dveloppement de la vipassan, le yog s'apercevra qu'une intention prcde chaque mouvement. Il verra nettement, qu'avant d'effectuer le pas gauche, une intention de le faire apparat ; que la volont de s'asseoir est, elle aussi, prcde d'une intention de le faire, etc. Cela est la connaissance qui distingue entre la cause et l'effet.

    Aprs cette connaissance, le yog verra l'anantissement des phnomnes chaque note, ce qui provoque une forte instabilit. Il verra donc que tous les phnomnes se meurent d'eux-mmes. Cette connaissance est bhaga a. Ensuite, il exprimentera les trois connaissances suivantes : bhaya a, la connaissance de la peur, durant laquelle des frayeurs sont exprimentes ; dinava a, la connaissance de la misre, o des sensations de misre sont exprimentes ; nibbid a, la connaissance du dgot, o des sensations de rpulsion sont exprimentes.

    Cela incite, plus que jamais, le yog obtenir la dlivrance. De ce fait, il s'entrane plus en profondeur au dveloppement de la vipassan, ce qui le mne l'tape suivante : sakhrupekkh a. Il s'agit de la connaissance de l'quanimit ; les phnomnes sont perus avec quanimit.

    ce stade, le yog doit tendre les points de touche noter. Ceux-l s'attnueront peu peu, et pourront mme disparatre totalement. Dans ce cas, le yog n'aura plus tenter de les suivre, ni les chercher. S'il n'y a plus d'objet noter, il conviendra de noter la conscience elle-mme : connatre, connatre . ce moment, la conscience qui note peut s'acclrer et soudainement, la cessation des phnomnes physiques et mentaux peut se produire.

    Bouddha a dit : tout ce qui apparat s'anantit de lui-mme . Aprs s'tre longuement et assidment entran la contemplation de l'apparition et de l'anantissement des phnomnes physiques et

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    mentaux, le yog parvient la cessation de ce processus. Par consquent, il exprimente la connaissance de la voie : magga a.

    Ainsi, lorsque le yog a ralis l'extinction de l'attachement aux agrgats (updnakkhandh), il parvient finalement, par le biais de la connaissance de la voie (magga a), nibbna.

    tant donn que vipassan bhvan est le seul moyen de se dlivrer de la souffrance et de la misre pour parvenir la paix de nibbna, chacun devrait l'tudier, la mettre en pratique et la dvelopper durant toute la vie si ncessaire. Le Vnrable Mahs Saydaw, lui aussi, a indiqu dans ses enseignements, que l'entranement vipassan devrait tre mis en pratique et dvelopp chaque fois que possible, chaque fois que l'occasion se prsente.

    Suivant les nobles instructions du Vnrable Mahs Saydaw, parvenant la cessation de tous les sakhra (volitions mentales) grce un entranement assidu au dveloppement de vipassan, puissent tous les yog se dlivrer de la souffrance et de la misre pour parvenir la paix de nibbna. C'est ainsi qu'avec mett, se conclut cet enseignement.

    sdhu ! sdhu ! sdhu !

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    Ce qu'un yog doit faire et ne pas faire

    Le sujet de l'enseignement d'aujourd'hui est : Ce qu'un yog doit faire et ne pas faire , autrement dit, la pratique que chaque yog est tenu de suivre et ce dont il est tenu d'viter de faire. Le but de l'entranement vipassan est de parvenir nibbna. Grce la sagesse de vipassan, le sotpana a dfinitivement radiqu les trois attachements suivants :

    1. sakkyadii (croyance dans l'existence de la personnalit) 2. vicikicch (doute sceptique quant la validit du dhamma) 3. slabbataparmsa (croyance en l'efficacit des rites et des

    rcitations de prires)

    Pour pouvoir parvenir au stade de sotpana, les quatre conditions suivantes sont requises.

    1. La premire condition est d'avoir un instructeur de vipassan comptent et expriment. L'objectif de l'entranement vipassan n'est pas simplement d'tre heureux pour une ou deux vies, mais de se librer de la souffrance de toutes les existences du sasar, et donc, de se librer du sasar lui-mme. C'est pourquoi il est essentiel, pour parvenir au stade de sotpana, de bnficier d'un instructeur qualifi dans le pariyatti (tude du dhamma) et le paipatti (pratique du dhamma), qui soit comptent pour guider sur la voie de vipassan.

    2. La seconde condition est d'couter respectueusement et suivre avec dtermination et tnacit les instructions et les enseignements qui sont dlivrs, afin de dvelopper la sagesse de vipassan. Si le yog coute convenablement les instructions qu'il reoit et les met srieusement en application, sa saddh (foi envers le dhamma) ne cessera de s'accrotre. De cette faon, il ne pourra pas aboutir des voies errones. Dans tout bon enseignement, il y a une partie thorique et une partie pratique.

    Concernant la partie thorique, le yog doit s'efforcer de contempler tous les phnomnes physiques et mentaux apparaissant durant l'assise, la marche et les activits. Il doit aussi avoir une bonne

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    comprhension thorique de ce qu'il fait. Par exemple, Bouddha enseigne que tout n'est que matire et conscience, produites par une suite de causes et d'effets. Seule, la lecture ne peut mener une comprhension claire. Ce n'est qu'en dveloppant les deux aspects (thorique et pratique) qu'il est envisageable de dvelopper une comprhension juste. Pour comprendre le dhamma en profondeur, le yog doit couter attentivement les enseignements qui lui sont dlivrs et les mettre convenablement en pratique. Alors, la sagesse de la vipassan pourra se dvelopper.

    3. La troisime condition est d'tre simple et honnte en rapportant ses expriences l'instructeur, durant les entrevues. Dans sa pratique, le yog a de bons moments comme de mauvais moments. Pendant les entrevues avec l'instructeur, il doit rapporter tous ces moments. Ne rapportant que les choses qu'ils approuvent, certains yog se gardent de dvoiler leurs expriences ngatives. Ce qu'un yog croit tre mauvais et sans intrt peut s'avrer tre un signe de progression ou de ralisation d'une connaissance, donc, tre une information trs utile l'instructeur afin qu'il puisse guider convenablement le yog.

    L'entranement vipassan n'est jamais constant, sans asprits. Puisqu'il s'agit d'une chose tout fait inhabituelle pour chaque dbutant, cet entranement prsente invitablement des difficults. C'est seulement aprs un certain temps, une fois que la concentration s'est bien tablie, que l'observation des phnomnes devient habile. Aprs cela, les expriences ngatives peuvent cependant se produire nouveau ; ce qui peut rendre le yog pessimiste. En fait, ce n'est que vers la fin de l'entranement que tout entre dans l'ordre. Lorsque le yog se trouve dans une phase difficile, l'instructeur s'attend ce qu'il le lui en fasse part, avec l'esprit de rechercher ses encouragements. Ce n'est qu'ainsi que l'instructeur pourra l'encourager et le guider convenablement et avec prcision sur la voie de la connaissance. C'est pourquoi il est trs important que le yog rapporte avec exactitude et franchise ses expriences, tant les bonnes que les mauvaises.

    4. La quatrime condition est de s'entraner avec effort et diligence. Ds l'instant du rveil, le matin, le yog doit se mettre noter continuellement, sans relche, avec courage et effort. Durant l'assise, durant la marche, et durant toutes les autres activits du corps, le seul devoir du yog est de noter les phnomnes physiques et mentaux. Il

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    doit noter attentivement et en dtail tous les phnomnes qui se prsentent la conscience, mme les plus petits. Il doit s'efforcer de noter avec vigilance afin de ne pas en manquer. Quoiqu'il fasse et quels que soient ses dplacements et ses mouvements, le yog doit appliquer le satipahna : pendant qu'il mange, pendant qu'il dfque, pendant qu'il urine, pendant qu'il se vtit, pendant qu'il se lave, pendant qu'il se sche, etc. Aucun mouvement ne devrait tre pargn. Tous les phnomnes physiques et mentaux devraient tre observs sans relche.

    Si ces quatre conditions sont scrupuleusement appliques, l'aide d'un effort soutenu, le stade de sotpana peut tre atteint sans difficult. Pour aider les yog dans leur entranement intensif, en plus des conditions principales respecter, le Vnrable Mahs Saydaw a galement tabli des points suivre et des points viter :

    1. Le premier point est de restreindre la parole, la consommation de nourriture et le sommeil au minimum, durant l'entranement vipassan. L'idal est de ne jamais user de la parole. Quand cela est invitable, avant de parler, il faut noter l'intention de parler. En parlant, il convient de limiter ses paroles au strict ncessaire, tout en demeurant vigilant.

    Pareillement, il convient de ne pas manger jusqu' remplir compltement son estomac. Bouddha recommandait de stopper son repas quatre ou cinq bouches avant le remplissage complet de l'estomac, et de finir de se rassasier l'aide de liquide (eau, soupe, th, caf, etc.) Le yog devrait toujours faire preuve de prudence pour manger raisonnablement, car cela favorise grandement la qualit de son entranement vipassan.

    Le sommeil, lui aussi, devrait tre rduit au minimum. Les yog srieux se contentent de quatre heures de sommeil par nuit, et consacrent le reste du temps au dveloppement de vipassan. Certains argumentent que cela n'est pas suffisant pour la sant. tant donn que les yog demeurent la moiti du temps assis et respirent toujours rgulirement, tranquillement, et qu'ils sont pargns d'activits lourdes, cela peut tre considr comme du temps de repos. Lorsque leur sance d'assise est bonne, certains yog parviennent mme rcuprer autant que durant une sieste bnfique. C'est

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    pourquoi il n'y a aucune raison de s'inquiter pour la sant en limitant ses nuits quatre heures de sommeil.

    Au temps de mon entranement intensif vipassan, il m'est d'ailleurs arriv de demeurer exactement quinze jours d'affile sans dormir du tout. Cela m'a alors donn la conviction qu' l'aide d'un samdhi (concentration) bien tabli, il est possible de rester plus de dix jours sans dormir, sans qu'il y ait de danger pour la sant. Ici, au centre Mahs, on peut trouver plusieurs yog qui sont rests plusieurs jours sans dormir (tout en conservant une pleine nergie), durant leur entranement intensif.

    2. Le second point est l'effort. Dans son entranement intensif, le yog doit avoir une dtermination inbranlable, et prendre fermement la rsolution suivante : Puiss-je persvrer sans relche dans cet entranement au satipahna, mme si ma chair et mon sang devaient scher de sorte ne laisser que les tendons et la peau sur les os !

    Le yog qui souhaite s'entraner au dveloppement de vipassan bhvan avec succs doit renoncer toute forme d'attachement son corps. Si, au contraire, il accorde trop de soin ou dveloppe de l'attachement son corps, la progression vers les connaissances suprieures sera trs longue et difficile.

    la veille de sa libration, lorsque Bouddha eut termin de manger la bouillie de riz que la fille du riche Sujt lui a offert, il prit une ferme rsolution. Prs de la rivire Nerajar, sous l'arbre de la Bodhi, le Bienheureux eut cette dtermination : Quoiqu'il advienne ce corps, que la chair et le sang schent de sorte ne laisser que les os, la peau et les tendons, puiss-je ne pas me lever de cet endroit tant que je ne serai pas parvenu l'tat de buddha !

    Il s'est alors absorb dans un entranement intensif. l'issue de la premire partie de la nuit, il ralisa pubbenivsa a (la connaissance suprme qui permet de voir les existences passes). l'issue de la partie centrale de la nuit, il ralisa dibbacakkhu a (la connaissance suprme qui permet de tout voir). Enfin, l'issue de la dernire partie de la nuit, il ralisa savakkhaya a, qui correspond l'radication dfinitive des kiles (impurets mentales). Parvenant ainsi l'tat de buddha, il devint un bouddha omniscient.

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    Pour cette raison, les yog souhaitant mettre en pratique l'enseignement de Bouddha, en suivant la voie qu'il a dcouverte, doivent s'entraner en respectant les quatre conditions essentielles exposes prcdemment.

    3. Le troisime point est de se dterminer fortement demeurer tout moment dans le satipahna (tablissement de l'attention). Le yog doit faire preuve d'effort et de volont continuels pour rester toujours attentif, de sorte ne laisser aucune occasion aux kiles pour merger. Par exemple, si un son n'est pas not, l'attachement sera dvelopp s'il est peru comme plaisant, et l'aversion sera dveloppe s'il est peru comme dplaisant. Le yog doit donc, en accord avec les indications fournies par l'instructeur, se contenter de noter le son tel qu'il est peru, au moment prcis o il est peru. Ainsi, ni l'attachement, ni l'aversion ne pourra apparatre, car ce son sera connu pour ce qu'il est rellement, c'est--dire seulement un son, rien de plus.

    De la mme manire, en notant les sensations perues par les six portes sensorielles, les kiles ne peuvent pas apparatre dans le corps et le mental. Dans ces instants, le yog est considr comme un tre au cur noble et l'esprit pur, tout comme Bouddha et les arahanta. Il mrite de bnficier des affaires des quatre ncessits (le logement, la nourriture, le vestimentaire et l'hygine) que les bienfaiteurs offrent avec respect. Pour maintenir ce statut, le yog est tenu d'observer continuellement les phnomnes physiques et mentaux, en profondeur et avec persvrance.

    Si le yog, parfois note, parfois ne note pas, la concentration galement, parfois se dveloppe, parfois retombe. Durant les entrevues, l'instructeur parvient trs facilement valuer le yog (avant mme qu'il rapporte ses expriences). Un mdecin hsitera faire des efforts pour soigner un malade de longue dure qui, ne respectant pas ses prescriptions, nglige tout le temps de prendre ses mdicaments. De la mme manire, un instructeur de vipassan perdrait toute motivation pour guider un yog qui nglige ses instructions.

    Pour cette raison, tous les yog devraient observer du mieux qu'ils puissent les phnomnes physiques et mentaux, en s'vertuant les

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    noter ds l'instant du rveil, sans relche, jusqu' l'instant de s'endormir le soir.

    4. Le quatrime point est de toujours se comporter comme un malade. Quels que soient les mouvements qu'il est amen faire, le yog devrait toujours tre trs lent : lorsqu'il mange, lorsqu'il boit, lorsqu'il se dplace, lorsqu'il change de posture, lorsqu'il parle, etc. Ce n'est que de cette faon qu'il parviendra noter tous les phnomnes physiques et mentaux, sans en omettre.

    Au dbut de l'entranement, le yog ayant facilement tendance faire des mouvements rapides, il ne peut pas noter tous les phnomnes. Au bout de quelques jours, une fois l'habitude de l'observation attentive prise, il ne connatra plus de difficult noter. l'extrieur, il y a de nombreux facteurs, comme la circulation routire ou le travail, qui nous poussent parfois agir rapidement. En revanche, lors d'une retraite vipassan dans un centre de mditation, le fait d'observer attentivement et en dtail tout ce qui est peru est la chose essentielle. Dans ces conditions, le yog doit alors agir comme s'il tait un malade. Avec attention, ses moindres gestes, paroles, dplacements, et mouvements doivent tre produits avec calme, lenteur et douceur. Ce n'est qu'au prix d'un tel entranement que les connaissances de vipassan pourront tre dveloppes.

    5. Le cinquime point est de noter de faon continue, en vitant toute coupure. Le yog doit se rsoudre noter sans manquement et sans relche, ds l'instant du rveil, jusqu' l'instant de s'endormir le soir. Il doit s'y efforcer jusqu' ce qu'il y parvienne. Par consquent, il convient de noter chaque instant, tout au long de la journe, aussi bien durant l'assise, que durant la marche et durant les activits diverses.

    En persistant ainsi, le khaika samdhi (la concentration rpte moment aprs moment ; c'est--dire celle qui est requise pour vipassan), deviendra vite bon. Le yog sera alors en mesure de dvelopper les connaissances de vipassan avec succs dans un temps raisonnable.

    Pour conclure l'enseignement d'aujourd'hui, j'invite tous les yog suivre les instructions du bienfaiteur et trs Vnrable Mahs Saydaw. Par leur mise en pratique, je souhaite de tout mett que vous puissiez

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    tous tres capables de remplir les quatre conditions conduisant au stade de sotpana.

    Ainsi, puissent tous les yog s'entraner avec volont et persvrance, en accord avec les points qui viennent d'tre exposs, afin de se dlivrer de la souffrance et de la misre pour parvenir la paix de nibbna, le plus aisment et le plus rapidement possible !

    sdhu ! sdhu ! sdhu !

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    La plus importante chose qui soit dans la vie

    Le sujet de l'enseignement d'aujourd'hui est : La plus importante chose qui soit dans la vie .

    D'ordinaire, chacun a des tches et des obligations diverses dans la vie. Certaines obligations sont importantes, d'autres le sont plus encore, et d'autres, enfin, sont ce qu'il y a de plus important. L'enseignement d'aujourd'hui porte sur la tche la plus importante dans la vie, ou nous pouvons dire aussi : le devoir le plus important. Tous les tres vivants ont des tches accomplir. Pour chacun d'entre eux, leurs tches sont importantes.

    Si nous examinons les situations travers le monde, nous constaterons que certains pays s'activent la runification parce qu'ils ont t diviss la suite d'une guerre ; cela est leur priorit. D'autres pays travaillent la rforme de leur systme politique ; cela est leur priorit. D'autres pays svertuent consolider leurs forces militaires pour avoir plus de chances de vaincre l'ennemi en cas de guerre ; cela est leur priorit. D'autres pays essayeront de ngocier des pactes de paix avec des nations trangres ; cela est leur priorit. D'autres pays s'efforceront de faire prosprer leur conomie ; cela est leur priorit.

    Dans la socit, chaque chef de famille a diverses obligations envers sa famille, comme l'ducation, la sant, l'alimentation, le logement, et l'habillement. Pour chacun d'entre eux, cela est important.

    De la mme manire, les yog, qui sont ici en retraite, ont des tches importantes dans leur propre foyer. Aux yeux de chacun d'entre eux, ces choses sont ce qu'il y a de plus important. Cependant, nous ne pouvons pas considrer que c'est ce qu'il y a plus important.

    Dans l'un de ses enseignements, Bouddha illustre, de la faon suivante, la plus importante tche pour les tres humains :

    moines ! Pour une personne dont la poitrine est transperce par une lance, le plus important sera de la retirer et d'obtenir des soins au plus

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    vite. Pour une personne dont les cheveux sont enflamms, le plus important sera d'teindre ce feu et de se soigner le crne au plus vite.

    On peut dire que ces questions de vie ou de mort sont les choses les plus importantes pour cette vie.

    Nanmoins, si nous considrons l'exprimentation de nouvelles existences travers la continuit du sasar, la plus importante tche est d'radiquer le sakkyadihi. Le sakkyadihi est la croyance errone qui consiste concevoir la personnalit.

    Si, dans une famille, surgissent des problmes d'ducation, de sant ou de logement, le chef de famille les considrera comme la tche la plus importante rsoudre. Cependant, si ses cheveux prennent feu ou s'il reoit une lance travers la poitrine, il laissera trs certainement de ct les problmes de famille, estimant que ce n'est plus la chose la plus importante. teindre le feu ou retirer la lance, et recevoir les soins qui s'imposent deviendra, pour lui, la priorit. Il s'agit l des choses phmres de la vie prsente.

    Bouddha dit : La plus importante chose qui soit dans la vie est de se dbarrasser du sakkya dihi, qui entrane sans cesse les tres dans le tourbillon continuel des naissances et des morts qu'est le sasar.

    La dfinition du mot sakkya ncessite d'tre explique. Ce mot se divise en deux particules : sa , qui veut dire propre en-soi et kya qui veut dire groupe de nma et rpa . Autrement dit, sakkya signifie existence propre en-soi de phnomnes physiques et mentaux . Cela dit, qu'est-ce que l'existence non propre en soi de nma et rpa ? Ce que nous appelons tre humain n'est pas pourvu d'existence propre en soi. Par exemple, peut-on dire que les cheveux sont un tre humain ? Peut-on dire que les os sont un tre humain ? Peut-on dire que la chair est un tre humain ? Aucune partie du corps ne peut tre dsigne comme tel. C'est pourquoi l'on ne peut pas dire qu'un tre humain est pourvu d'une existence propre en soi.

    D'aprs ce que Bouddha nous enseigne, il n'existe pas d'tre humain. Il y a seulement un ensemble de phnomnes physiques et mentaux qui apparaissent et disparaissent d'eux-mmes. la question les cheveux sont-ils rpa (matire) ? , la rponse est oui . la question Les os, la chair, les veines, le cur, et les autres organes sont-ils rpa ? , la rponse est oui, tout est rpa .

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    La conscience qui peroit ces choses est appele nma. On peut dire aussi l'esprit . Ainsi, en analysant une personne avec la logique du dhamma, on ne dira pas qu'il y a l un homme ou une femme, mais on dira qu'il y a seulement des nma et des rpa.

    D'aprs ce que Bouddha nous enseigne, il n'existe pas d'atta, c'est--dire qu'il n'y a pas de personnalit, ni de je , ni de moi , ni de mien(ne)(s) . Il n'y a rien d'autre que des agrgats de la matire et des agrgats de la conscience. Il n'existe donc aucune entit propre, aucune me individuelle (encore moins collective). Nous ne pouvons donc pas dire qu'un tre humain ait une me, que c'est MOI, ou que ceci est le MIEN (ou la mienne).

    Dans les relations humaines, nous dsignons toutefois les gens en tant que personne, moi, lui, homme, femme, etc., afin de permettre leur identification. Cela constitue une manire conventionnelle de parler. Toutefois, du point de vue du dhamma, il n'y a aucun MOI, ni de LUI, ni d'homme, ni de femme. Il n'y a rien d'autre que des nma et des rpa.

    sakkya se dfini donc comme groupe propre en soi . Bouddha et les ariy ont le sakk, tout comme les yog qui sont ici, ainsi que tous les tres. Cela signifie que nous sommes un groupe de nma et de rpa.

    Lorsque le mot sakkya est combin avec le mot dihi , il devient sakkyadihi , la croyance errone en l'existence de la personnalit, c'est--dire, la croyance qu'il y a un moi , une entit, un atta. En fait, quand on sait que notre corps et notre mental ne sont que des nma et des rpa, on ne peut pas dire qu'ils sont moi , qu'ils sont MIENS ou qu'ils m'appartiennent . Ne suivant la volont de personne, ces agrgats (les nma et les rpa) apparaissent et disparaissent d'eux-mmes. Si vraiment ces agrgats taient nous, selon notre propre volont, nous pourrions dire : Que mon corps ne vieillisse pas, qu'il ne tombe pas malade, qu'il ne meurt pas ! Or, ils ne se plieront jamais notre volont ; nous ne matrisons rien. C'est pourquoi nous ne pouvons pas dire que cela est notre corps, notre me ou notre entit propre.

    Les personnes qui n'acceptent pas de croire ou qui ne comprennent pas ce processus naturel des agrgats croiront alors que cela est leur propre corps. Par consquent, ils ne craindront pas de danger. Ne se souciant que du confort de leurs corps, de leur profit personnel et de leur famille, ils pourront alors tre amens commettre toutes sortes d'akusala, c'est--dire des actes draisonnables, malsains, malveillants, gnrateurs de

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    souffrance pour les autres. En raison de ces akusala dvelopps en consquence de cette conception errone du moi , ces tres pourront rencontrer une multitude de problmes au sein de cette mme vie, comme tomber en prison ou sombrer dans la misre. De plus, travers le cycle du sasar, ils pourront renatre dans les mondes infrieurs, o ils rencontreront des situations encore plus pnibles et plus misrables.

    C'est pourquoi Bouddha nous a enseign que le fait de se dbarrasser du sakkyadihi est pour quiconque, et de loin, la tche la plus importante.

    L'unique moyen de parvenir se dfaire du sakkyadihi est de noter ! Autrement dit, c'est prcisment ce que font les yog ici, en s'entranant au satipahna, dveloppement de la vipassan. Lorsqu'ils observent le gonflement et le dgonflement de l'abdomen durant l'assise, la leve, l'avance et la pose du pied durant la marche, etc., cet entranement a pour but essentiel l'radication du sakkyadihi.

    La premire chose faire pour dissiper la croyance errone de l'existence du moi est de parvenir distinguer clairement le nma du rpa. Lorsqu'ils dbutent dans leur entranement, les yog pensent que le gonflement et le dgonflement de l'abdomen sont MOI , qu'ils sont moi . Ils pensent : JE lve, J'avance, JE pose, JE mange, J'entends, etc. , c'est--dire : c'est MOI qui fait, cela est MOI, cela est MOI.

    Ce n'est que lorsque la concentration se dveloppe, et que le yog commence tre un peu expriment, qu'il ralisera par lui-mme qu'il n'y a aucun moi , aucune me, aucun atta. Il acceptera donc le fait que tout n'est que conscience et matire (nma et rpa).

    L'explication est simple : Quand un yog note le pas gauche, il voit que le mouvement du pied gauche est physique, c'est--dire rpa, et il voit que ce qui note est la conscience, c'est--dire nma. Ainsi, il voit directement, par lui-mme, qu'il n'y a pas de moi , pas d'ego, pas d'atta. De la mme manire, durant l'assise, les mouvements de gonflement et de dgonflement de l'abdomen sont rpa, et le fait de noter ces mouvements, comme monter , descendre , sont nma. Ainsi, le yog saura qu'il n'y a que des nma et des rpa.

    Le mouvement du gonflement de l'abdomen est provoqu par l'air, qui, pendant qu'il est inspir, pousse la peau de l'abdomen. Cela est rpa. Si ce mouvement est not, c'est parce que la conscience l'observe. Cela est nma. Il y a donc deux choses diffrentes : le mouvement de

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    dgonflement de l'abdomen, qui est un phnomne physique ; et la conscience qui note ce mouvement, qui est un phnomne mental. Une fois que le yog a fait la diffrence entre ces deux choses, il parviendra distinguer nma et rpa.

    Pour que le yog puisse noter entendre , trois lments sont ncessaires : l'oreille, un son, et la conscience auditive (la conscience qui connat le son). L'oreille et le son sont rpa, la conscience auditive est nma. Lorsque le yog est en retraite vipassan, s'il note les perceptions qui apparaissent par les six portes sensorielles, il verra qu'il n'y a que des nma et des rpa, et voyant qu'il n'y a pas d'tre, ni de personne, ni de moi , il pourra se dbarrasser du sakkyadihi. Cela dit, la conviction ne suffit pas pour dissiper compltement le sakkyadihi. Ce n'est qu'en ralisant le sotpatti magga phala (le stade de sotpana, obtenu grce un bon entranement noter les phnomnes physiques et mentaux) que le sakkyadihi sera totalement et dfinitivement radiqu.

    Une fois que Bouddha commena tre connu, un brahm vint lui rendre visite. Aprs lui avoir rendu hommage, il s'adressa ainsi lui : Vnrable Bouddha, de faon aussi urgente que celui qui vient de se faire transpercer la poitrine d'une lance doit retirer au plus vite cette lance, de faon aussi urgente que celui dont les cheveux s'enflamment soudainement doit teindre au plus vite ce feu et se soigner, les tres devraient se dbarrasser au plus vite du kmarga (les plaisirs des sens). Pour ce faire, ils devraient faire comme nous, les brahm : s'efforcer dvelopper les jhna.

    Il existe deux moyens de se dbarrasser du kmarga. Il y a le moyen provisoire, qui est l'exprience du jhna sampatti, et le moyen dfinitif, qui est la ralisation du stade d'angmi, obtenu par l'entranement vipassan. Le moyen l'aide du jhna n'empche pas, par la suite, la production d'akusala et de ce fait, la renaissance dans les apya (mondes infrieurs). En revanche, le moyen l'aide du sotpatti magga, le sakkyadihi tant radiqu, empche les gros akusala de se produire. De ce fait, la porte des apya est dfinitivement ferme. C'est pourquoi Bouddha eut de la compassion envers ce brahm, dont le discours est bien loin de la vrit du dhamma.

    Bien qu'tant un brahm, il n'tait pas un ariy, mais seulement un puthujjana. De ce fait, il tait toujours susceptible de commettre des

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    kusala et des akusala, et par consquent soumis aux causes qu'ils entranent. Il pouvait donc, une fois le rsultat de ses kusala puis, retomber dans l'un des quatre mondes infrieurs (les animaux, les peta, les asura et les enfers) et en subir toute la misre et toute la souffrance qui leur sont inhrentes. Comme nous l'avons expliqu, c'est seulement une fois qu'il aura limin le sakkyadihi, grce au sotpatti magga, qu'il sera dfinitivement pargn des apya.

    Bouddha rpondu alors au brahm que tant que le sakkyadihi n'avait pas t supprim, nul ne pouvait esprer vivre indfiniment dans des conditions heureuses dans le monde humain, dans celui des deva ou dans celui des brahm. Pour dissiper intgralement et irrvocablement le sakkyadihi, il est indispensable de s'entraner satipahna, pour dvelopper vipassan.

    La premire connaissance que le yog dveloppe durant son entranement est nma rpa pariccheda a, qui est la distinction entre la conscience et la matire. En poursuivant son entranement, le yog peut parvenir franchir les vipassan a les unes aprs les autres, jusqu' la ralisation du sotpatti magga.

    Lors de sa retraitre, le yog note : monter, descendre, etc. durant l'assise, pas gauche, pas droit, lever, avancer, poser, etc. durant la marche, et tirer, contracter, saisir, tirer, pousser, baisser, etc. durant les activits. Tous ces mouvements du corps sont rpa, et toutes les notes de ces mouvements sont nma. C'est en notant tous ces mouvements que le yog parvient la connaissance qui distingue entre les nma et les rpa.

    Il existe trois types de connaissance : 1. la connaissance livresque 2. la connaissance gnrale 3. la connaissance exprimentale (qui est la connaissance obtenue

    l'aide du dveloppement de la pratique)

    La connaissance livresque est obtenue par la lecture des textes, comme le fait qu'il existe 28 rpa, 89 consciences, 52 cetasika, etc.

    La connaissance gnrale est obtenue par ou-dire, c'est--dire par ce que nous entendons dire des autres, comme le fait que les choses sont rpa et que la conscience est nma.

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    La connaissance exprimentale est obtenue, comme il a t expliqu prcdemment, par le fait de porter son attention sur les phnomnes physiques et mentaux, c'est--dire ce que font les moines et les yog ici, en notant durant l'assise, la marche et les activits.

    C'est l'instant mme o une note est effectue qu'on vient connatre prcisment que l'objet peru et la conscience qui l'observe apparaissent de paire. Quelles que soient les perceptions qui apparaissent par les six organes sensoriels l'il, l'oreille, le nez, la langue, le corps, et le mental , chaque fois que l'une d'entre elles est note, le fait que le phnomne physique et le phnomne mental adviennent par couple est clairement peru.

    Sur la base de cette connaissance, lorsque le yog observe les visions, les sons, les odeurs, les gots, les touchers (dont les douleurs font partie) et les objets mentaux (dont les motions font partie), il ne dveloppe plus d'attachement (tah updna) sur ces sensations. Par consquence, il dveloppe cette comprhension directe de la ralit, qu'il n'y a pas de moi , ni de le mien, la mienne , ni de personne, ni d'me, ni d'atta. Il comprend qu'il n'y a que des rpa et des nma, et, progressant travers les vipassan a, il arrive se dfaire totalement et dfinitivement de la croyance errone qu'est le sakkyadihi. En se dbarrassant du sakkyadihi, il parvient exprimenter la cessation des phnomnes physiques et mentaux. De ce fait, il acquiert le sotpatti magga.

    Puissent tous les yog s'entraner, avec rsolution et persvrance, la plus importante chose qui soit dans la vie , tel Bouddha nous l'a enseign. En s'entranant ainsi, puissent-ils se dlivrer de la souffrance et de la misre pour parvenir la noble paix de nibbna, dans un intervalle de temps le plus bref possible !

    sdhu ! sdhu ! sdhu !

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    La contemplation par les six portes sensorielles

    Le sujet de l'enseignement d'aujourd'hui est : La contemplation par les six portes sensorielles . Les personnes qui s'entranent vipassan bhvan concentrent leur attention sur les perceptions qui se manifestent par les six portes sensorielles. Les six portes sensorielles sont : l'il, l'oreille, le nez, la langue, le corps et le mental. L'objet principal qui est not durant l'assise est le mouvement de gonflement et de dgonflement de l'abdomen, la posture assise et les points de touche. Pour prvenir les vagabondages de l'esprit, selon la concentration et les besoins, la note du toucher sera rpartie sur un, trois, cinq ou, tout au plus, dix points de touche.

    En plus de cet objet principal, il convient de noter les autres perceptions susceptibles d'apparatre par les six portes sensorielles. L'objet principal qu'est le mouvement de l'abdomen est comme le fait d'tre chez soi, dans sa maison. Quand nous sommes l'cole ou au lyce, une fois les cours finis, nous rentrons la maison. Quand nous allons faire des courses, une fois les achats termins, nous rentrons la maison. Quand nous allons sur notre lieu de travail, une fois la journe de travail acheve, nous rentrons la maison.

    De la mme manire, pendant l'assise, quand on est amen noter d'autres perceptions, une fois qu'elles ont t notes, on revient sur la note du mouvement de l'abdomen.

    Si par l'il apparat une vision (mme les yeux ferms, des visions peuvent apparatre), on note voir, voir , sans y demeurer longtemps et sans accorder le moindre intrt au contenu de cette vision. Une fois que cette perception visuelle a t note, on revient sur l'objet principal le mouvement de l'abdomen en le notant.

    Si par l'oreille apparat un son, on note entendre, entendre , ensuite, on revient noter le mouvement de l'abdomen.

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    Si par le nez apparat une odeur manifeste (agrable, dsagrable ou neutre), on note sentir, sentir , ensuite, on revient noter le mouvement de l'abdomen.

    Si par la langue apparat un got, on note goter, goter , ensuite, on revient noter le mouvement de l'abdomen.

    Si par le corps apparaissent des sensations corporelles, telles que des piqres d'insectes, des douleurs, des coups de chaleur, des sensations de froid, etc., on note dmangeaison , douleur , chaud , froid , etc., ensuite, on revient noter le mouvement de l'abdomen.

    Si par le mental apparaissent des penses, si l'esprit se disperse, on note dispers, dispers ou penser, penser , ensuite, on revient noter le mouvement de l'abdomen.

    Lorsque des sensations physiques insupportables sont prouves, on peut envisager de modifier sa posture, tout en notant trs attentivement chaque geste. Avant de commencer le premier mouvement, il convient de noter l'intention de le faire. Une fois qu'on a not volont de changer la posture , en ouvrant les yeux, on note soigneusement tous les mouvements qui sont effectus pendant la rectification de la posture. Cela fait, ds que la nouvelle posture est adopte, on revient sur l'objet principal en le notant.

    Lorsque rien de particulier n'apparat, on note le mouvement de l'abdomen. Nanmoins, il faut galement noter toutes les perceptions visuelles, auditives, olfactives, gustatives, tactiles et mentales qui apparaissent la conscience. Le yog peut se demander pourquoi il faut noter les perceptions des six portes sensorielles. Le but de vipassan bhvan est d'radiquer l'avidit, l'aversion et l'ignorance (qui sont la racine de tous les kiles) afin de ne plus permettre ces trois poisons de se manifester travers les six portes sensorielles.

    Dans le mah satipahna sutta, il est dit : vineyya loke abhijjh domanassa . Cette phrase palie signifie que ce n'est qu'en contemplant chaque phnomne apparaissant la conscience qu'on peut empcher lobha, dosa et moha (racines de tout kiles) de se manifester travers les updanakkhandh (agrgats de l'attachement) et de nous perscuter.

    Une personne est dote d'yeux, d'oreilles, d'un nez, d'une langue, d'un corps et d'un mental. Tout comme pour entrer dans une maison

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    plusieurs portes, les perceptions (visuelles, auditives, olfactives, etc.) se manifestent par ces six portes sensorielles, appeles dvra en pali.

    Si les portes d'une maison ne sont pas bien fermes, des voleurs, des brigands, des insectes, des chiens, des serpents ou d'autres tres indsirables peuvent entrer. Pour que cela ne puisse pas se produire, il faut fermer correctement toutes les portes de la maison. De la mme faon, pour que l'avidit, l'aversion et l'ignorance (lobha, dosa et moha) ne puissent pas se manifester, le yog doit imprativement fermer les six portes sensorielles. Pour boucher ces six portes, il n'y a qu'un moyen : contempler toutes les perceptions qui s'y manifestent.

    Lorsqu'un son apparat, si le yog note entendre, entendre , cet instant, lobha, et dosa ne peuvent pas se manifester par la porte auditive. En revanche, lorsqu'il ne note pas ce son, s'il est agrable, il va dvelopper de l'attirance ou de la convoitise, qui est lobha, s'il est dsagrable, il va dvelopper du rejet ou de l'irritation, qui est dosa. lobha et dosa incitent toujours commettre des actes malsains ou des paroles nuisibles. Toutes les intentions et tous les tats d'esprit qui sont produits sous l'avidit, l'aversion ou l'ignorance sont akusala.

    Il en est de mme pour les autres portes sensorielles...

    Pour la porte visuelle, lorsqu'une vision n'est pas note, si elle est plaisante, lobha sera dvelopp, si elle est dplaisante, dosa sera dvelopp. Quelle que soit la vision que le yog peroit, il devrait noter voir, voir .

    Pour la porte olfactive, lorsqu'une odeur n'est pas note, si elle est dlicieuse, lobha sera dvelopp, si elle est rpugnante, dosa sera dvelopp. Quelle que soit l'odeur que le yog peroit, il devrait noter sentir, sentir .

    Pour la porte gustative, pendant le repas, lorsqu'un got n'est pas not, s'il est succulent, lobha sera dvelopp, s'il est dgotant, dosa sera dvelopp. Quel que soit le got que le yog peroit, il devrait noter goter, goter .

    Pour la porte tactile, lorsqu'une sensation physique n'est pas note, si elle est confortable, lobha sera dvelopp, si elle est inconfortable, dosa sera dvelopp. Quelle que soit la sensation physique que le yog peroit, il devrait noter en consquence sensation , douleur , chaud , froid , dmangeaison , lgret , etc.

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    Pour la porte mentale, lorsqu'un objet mental n'est pas not, s'il est plaisant, lobha sera dvelopp, s'il est dplaisant, dosa sera dvelopp. Quelle que soit l'objet mental que le yog peroit, il devrait noter en consquence penser , rflchir , projets , dcouragement , motivation , ennui , etc.

    Comme dit le proverbe Mieux vaut prvenir que gurir . Dans cette mme ide, pour se prvenir de toute production ngative (lobha, dosa, etc.), il faut noter tous les phnomnes. En percevant une vision, un yog doit noter voir, voir . S'il note ainsi chaque vision aussitt qu'elle apparat, l'avidit et l'aversion n'auront jamais le temps de se manifester, et il n'y aura pas de place non plus pour des commentaires futiles. Seule, demeurera la conscience qui connat l'objet visuel, tel qu'il est rellement.

    Si le yog ne note pas ainsi, il s'attachera cette vision, qu'elle soit plaisante et dplaisante et, en consquence, lobha ou dosa natra.

    dihe diha matta bhavissati . Cela signifie que si un objet visuel est not aussitt qu'il apparat, il restera seulement une perception visuelle, ne provoquant aucun attachement.

    sute suta matta bhavissati . Cela signifie que si un objet auditif est not aussitt qu'il apparat, il restera seulement une perception auditive, ne laissant aucune place une sensation, ni plaisante, ni dplaisante. Donc, aucun attachement de nature lobha ou dosa ne peut apparatre.

    De la mme manire, les objets des six portes sensorielles doivent tre nots aussitt qu'ils apparaissent.

    En mangeant, il convient de noter tous les mouvements impliqus durant le processus du repas, ainsi que les objets gustatifs. De cette faon, lobha et dosa ne pourront pas se manifester.

    Les objets tactiles doivent aussi tre nots au moment o ils apparaissent et tels qu'ils apparaissent. Ainsi, il n'y aura pas de distinction entre sensation agrable et sensation dsagrable, et de ce fait, lobha et dosa ne pourront pas se manifester.

    mute muta matta bhavissati . Si un objet olfactif, un objet gustatif ou un objet tactile est not aussitt qu'il apparat, il restera seulement une perception olfactive, gustative ou tactile, ne laissant aucune place

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    une sensation, ni plaisante, ni dplaisante. Donc, aucun attachement de nature lobha ou dosa ne peut apparatre.

    vi te vi tamatta bhavissati . La conscience qui connat peut tre pargne par lobha, dosa et moha si elle est note telle qu'elle est et au moment mme de son apparition.

    C'est pourquoi chaque yog doit noter tous les phnomnes susceptibles d'apparatre par les six portes sensorielles. Il ne doit pas se contenter de l'observation du mouvement de l'abdomen. Le fait de contempler tous les phnomnes qui se manifestent par les six portes sensorielles est appel la tradition Pohila .

    Du temps de Bouddha, vivait un moine rudit, trs vers dans le pariyatti (la thorie de l'enseignement du dhamma), nomm Pohila. C'tait un moine qui enseignait le dhamma travers dix-huit sectes diffrentes. Il tait trs respect par ses nombreux lves. Un jour, le mahthera se rendit auprs de Bouddha. Lorsqu'il arriva auprs du Bienheureux, ce dernier s'adressa ainsi son visiteur : Viens par ici, Grand Pohila l'inutile ! Prosterne-toi, Grand Pohila l'inutile ! Assieds-toi, Grand Pohila l'inutile ! Vas-t-en, Grand Pohila l'inutile !

    l'issue de cette visite, le mahthera Pohila s'est dit : Moi qui enseigne le dhamma de nombreux lves avec succs, comment se fait-il que Bouddha m'interpelle-t-il comme "Pohila l'inutile" ? Se mettant rflchir par lui-mme, il se rendit compte qu'il a consacr l'exclusivit de son temps au pariyatti, et nglig le paipatti (pratique du dhamma), le kammahna (la mditation) et la vipassan bhvan (entranement au dveloppement de la connaissance directe de la ralit).

    Pour remdier cela, il a dcid d'arrter l'enseignement afin de faire comme le faisaient traditionnellement les nobles tres. Autrement dit, il s'est seulement empar de son bol et de ses trois robes, et partit la recherche d'un centre de paipatti, avec la ferme rsolution de s'efforcer au satipahna jusqu' l'accomplissement complet des devoirs de moine , c'est--dire le stade d'arahanta.

    Cela est la dcision juste. Pour celui qui a besoin d'tudier les textes du dhamma, le mieux est d'aller dans un centre de pariyatti, o il y a des enseignants rudits et tous les livres ncessaires. Pour celui qui a besoin de s'entraner au dveloppement de la vipassan, le mieux est d'aller

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    dans un centre de mditation, o il y a de comptents instructeurs de vipassan et toutes les conditions ncessaires un tel entranement.

    Le mahthera Pohila parvint au clbre monastre paipatti du grand abb Padhna, o tous les moines et tous les novices sont arahanta. S'approchant du mahthera Padhna, il lui demanda respectueusement de le prendre comme lve afin de lui enseigner la vipassan bhvan. Le grand abb lui rpondit : Vnrable Pohila, je n'oserai point vous accepter comme mon lve, vous qui tes un clbre mahthera enseignant du dhamma, ayant de si nombreux lves. Ce refus avait en fait pour but de dissiper le mna (la vanit) du mahthera Pohila due au fait d'avoir comme instructeur quelqu'un de clbre , qui peut tre une entrave la pratique.

    Ensuite, le mahthera Pohila a demand tre accept comme lve auprs des moines suivants, par ordre d'anciennet. S'appuyant sur le mme prtexte, ceux-l ont galement refus, jusqu'au plus jeune moine. Le mahthera Pohila s'est alors adress aux novices, essuyant les mmes refus, jusqu' parvenir, finalement, auprs du plus jeune novice, dj arahanta, en dpit de son jeune ge. Lorsque le mahthera adressa sa demande au novice, elle fut tout d'abord refuse, pour la mme raison que les autres.

    D'une manire hautement respectueuse, le mahthera Pohila a alors implor nouveau le jeune novice de l'accepter sous ses instructions. Comme ce dernier refusait toujours, le mahthera a insist une de fois de plus, lui promettant d'obir ses instructions la lettre. Pour mettre l'preuve la sincrit du mahthera, lui dsignant un tang, le novice lui a demand d'y entrer, jusqu'au fond. Soucieux d'obir respectueusement au novice, le mahthera s'est aussitt excut.

    Finalement convaincu de son humilit et de sa volont, il le rappela, lui annonant qu'il l'acceptait comme son lve. Pour persuader le mahthera Pohila de l'importance de noter les phnomnes apparaissant par les six portes sensorielles, le jeune novice lui posa la question suivante : Comment vous y prendriez-vous pour attraper un iguane qui se trouve dans un monticule pourvu de six orifices ? Le mahthera rpondit : Je boucherai cinq orifices et n'aurai plus qu' attendre qu'il sorte par l'orifice restant pour l'attraper .

    Le jeune novice expliqua alors son lve qu'il faut contempler tous les phnomnes physiques et mentaux qui se manifestent par les six orifices

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    que sont l'il, l'oreille, le nez, la langue, le corps et le mental. En procdant de cette faon, tout yog peut se purifier le mental en parvenant l'radication des kiles, grce aux connaissances de magga et phala, l'objectif final de tout yog.

    Saisissant le sens de ces paroles, le mahthera se mit, sans plus attendre, observer attentivement toutes les perceptions se manifestant travers ses six portes sensorielles. Grce cet entranement correct, il atteignit rapidement le stade d'arahanta.

    C'est pourquoi la contemplation des perceptions des six portes sensorielles est appele aujourd'hui la tradition Pohila .

    Ainsi, je souhaite de tout cur que tous les moines et tous les yog suivront l'exemple du mahthera Pohila, en contemplant avec persvrance les visions, les sons, les odeurs, les gots, les touchers et les penses perues, jusqu' l'accomplissement de magga et phala (la voie et le fruit).

    Puissent tous les yog tre capables de mettre convenablement et activement en application les indications qui viennent d'tre donnes, et de parvenir ainsi, le plus facilement et le plus rapidement possible, l'aboutissement final qu'est nibbna.

    sdhu ! sdhu ! sdhu !

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    Qui cherche le dhamma le trouve dans son corps

    Le sujet de l'enseignement d'aujourd'hui est : Qui cherche le dhamma le trouve dans son corps . Il a t expos par Bouddha dans le texte pali aguttara, du Rohitassa sutta. Il enseigne que chacun peut trouver les quatre nobles vrits dans son propre corps.

    1) dukkha sacc est la noble vrit de la souffrance. La naissance est souffrance, l'loignement des personnes aimes est souffrance, la proximit avec les personnes non aimes est souffrance, ne pas obtenir ce qu'on dsire est souffrance. De manire gnrale, tous les phnomnes physiques et mentaux susceptibles de provoquer de l'attachement ou de l'aversion sont souffrance.

    2) samudaya sacc est la noble vrit de l'origine de la souffrance. tah est cette soif qui nous fait obtenir une autre vie. C'est la fois ce qui nous fait apprcier les choses et nous accaparer des choses. On distingue trois sortes de tah, toutes l'origine de la souffrance : kma tah, la soif de satisfaire ses dsirs et ses plaisirs sensoriels ; bhava tah, la soif d'une vie aprs la mort ; vibhava tah, la soif de ne plus connatre de vie (de s'auto- annihiler) aprs la mort.

    bhava tah, cette croyance en l'existence d'une entit qui perdure aprs la mort, (d'une me ou d'une personnalit qui existe indpendamment du processus physique et mental constituant l'existence et qui continue ternellement) est cause par sassata dihi.

    vibhava tah, la croyance en la non-existence de vie aprs la mort, ou auto annihilation, est cause par uccheda dihi. Cette croyance encourage les gens produire de mauvaises actions, car ils pensent qu'il ne peut y avoir la moindre consquence aprs la mort.

    3) nirodha sacc est la noble vrit de l'extinction de la souffrance. C'est l'extinction de la soif (samudaya sacc) et de la souffrance (dukkha sacc) qui entrane la ralisation de nibbna. Quiconque souhaite parvenir ce but doit donc s'entraner avec effort.

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    4) magga sacc est la noble vrit de la voie permettant de parvenir l'extinction de la souffrance. L'entranement qui permet d'arriver l'extinction de dukkha sacc, l'extinction de samudaya sacc et la ralisation de nirodha sacc c'est--dire l'lment teint nibbna sont les huit nobles voies (ariy maggaga).

    Les huit nobles voies : 1. samm dihi (la vue juste) 2. samm sakappa (la pense juste) 3. samm vc (la parole juste) 4. samm kammanta (l'action juste) 5. samm jva (le moyen d'existence juste) 6. samm vyma (l'effort juste) 7. samm sati (l'attention juste) 8. samm samdhi (la concentration juste)

    Il convient de s'efforcer dvelopper chacune de ces huit nobles voies. Les bhikkhu et les yog qui s'entranent au dveloppement de la vipassan, dveloppent par la mme occasion les huit nobles voies.

    Lorsque, durant la marche, on connat le mouvement du pied gauche au moment o le pas gauche s'effectue, cela est samm dihi. Le fait de noter mentalement ce mouvement, cela est samm sakappa. L'effort fourni pour observer chaque pas, cela est samm vyma. Le fait de porter son attention sur le mouvement de chaque pas, cela est samm sati. La vigilance qui permet la conscience de demeurer de faon continue en phase avec les phnomnes observs, cela est samm samdhi. Ceci sont les cinq pubbabhga magga. Ds lors qu'un yog est en retraite vipassan, tant donn qu'il est tenu aux huit prceptes, les trois ariy maggaga suivants sont dj inclus : samm vs, samm kammanta, et samm jva.

    C'est pourquoi chaque yog dveloppe les huit nobles voies, lorsqu'il note le mouvement de ses pas durant la marche, lorsqu'il note le mouvement de son abdomen durant l'assise et lorsqu'il note les mouvements de son corps durant les activits. Ainsi, en notant successivement les phnomnes qui apparaissent les uns aprs les autres, les huit nobles voies se dveloppant chaque note, dukkha sacc est dcompos et connu, samudaya sacc est cart et, parvenant nirodha

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    sacc, nibbna peut tre expriment. Qui cherche le dhamma le trouve dans son corps signifie qu'on peut accomplir la connaissance des quatre nobles vrits en consacrant toute son nergie noter les phnomnes physiques et mentaux qui apparaissent dans son propre corps.

    Dans la recherche du dhamma, il est trs important d'appliquer la mthode correcte. Le buddha ssan (l'application de l'enseignement de Bouddha) se dcoupe en trois parties : le pariyatti (tude du dhamma) le paipatti (mise en pratique du dhamma) et le paivedha (ralisation du dhamma). Sans un minimum de pariyatti, le paipatti ne peut tre clair. Sans le paipatti, le paiveda ne peut pas tre accompli. Le pariyatti est comme une digue, le paipatti comme de l'eau, et le paivedha comme une fleur de lotus. Sans la prsence de la digue, l'eau ne peut rester en place. Sans eau, le lotus ne peut fleurir.

    Autre exemple : Le pariyatti est comme une mthode de prparation mdicale, le paipatti comme l'utilisation d'un mdicament, et le paivedha comme la gurison d'une maladie. Si on ne connat pas la mthode de prparation du mdicament, il ne sera pas possible de l'utiliser. Sans ce mdicament, la maladie ne peut tre traite. Par consquent, il est indispensable de suivre convenablement la voie du pariyatti, du paipatti, et du paivedha.

    Ensuite, en accord avec cette juste voie, il convient de s'efforcer avec persvrance et vigilance, l'aide d'une nergie bien tablie.

    Qu'est-ce que le corps ? C'est l'ensemble des agrgats physiques et mentaux (nma et rpa), y compris leurs perceptions (saa). Un corps humain a des dimensions d'environ 1,80 mtre de long sur 30 centimtres de large. Qui cherche le dhamma le trouve dans son corps signifie qu'on peut accomplir la connaissance des quatre nobles vrits en notant avec prcision et justesse les phnomnes physiques et mentaux qui apparaissent dans son propre corps. Cet enseignement est issu du texte pali aguttara.

    Lorsque Bouddha demeurait au royaume de Svatthi, dans le monastre de Jetavana, un brahm nomm Rohitassa est venu lui rendre visite. Il arriva vers minuit, le corps rayonnant, s'agissant d'un brahm. Aprs s'tre prostern trois fois devant Bouddha, s'tant assis une place convenable, joignant respectueusement les mains, le brahm interrogea le Bienheureux l'aide de ces paroles : Vnrable Bouddha, est-il

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    possible de parvenir pied au bout de l'univers, l o il n'y a pas de naissance, ni de maladie, ni de vieillesse, ni de mort ?

    Bouddha rpliqua : Rohitassa, au bout de l'univers, l o il n'y a pas de naissance, ni de maladie, ni de vieillesse, ni de mort, c'est nibbna ; et on ne peut y parvenir pied, c'est impossible.

    Dans sa question, le brahm Rohitassa fait rfrence la fin du oksa loka alors que Bouddha, dans sa rponse, fait rfrence la fin du sakhra loka. Cependant, cette question et cette rponse ne se contredisent pas, car la fin du oksa loka peut trs bien tre pris pour la fin du sakhra loka.

    ce moment-l, Rohitassa dit Bouddha : Vnrable Bouddha, dire qu'il n'est pas possible de parvenir pied nibbna, je trouve cette rponse est vraiment trs tonnante ! Permettez-moi de vous relater une anecdote de mon pass.

    Dans une ancienne vie, je fus le fils d'un chasseur, du nom de Rohitassa. En renonant la vie de famille, je partis dans la fort pour y mener une vie d'ermite en plein cur de la fort. En pratiquant la mditation sans relche et avec dtermination, je parvins exprimenter des jhna et dvelopper des abhia (pouvoirs psychiques). cette poque, il me restait une centaine d'annes vivre. Je fus capable de faire le tour de l'univers durant le mme temps que la flche tire par un archer habile traverse l'ombre d'un palmier. Je pus franchir l'ocan de la rive est la rive ouest, en un seul pas.

    J'avais un profond dsir de parvenir la fin de l'univers. Ne pouvant taire cette soif de voyager, je mis de ct tout le temps ncessaire l'alimentation et la djection, et consacrai la totalit du temps parcourir l'univers. Je voyageai une vitesse vertigineuse, grce mes pouvoirs psychiques, en esprant trouver la fin de l'univers. Sans y parvenir, je mourus et repris naissance dans le monde des brahm, o je suis prsent.

    Vnrable Bouddha, vous confirmez compltement mon exprience lorsque vous dites : "au bout de l'univers, l o il n'y a pas de naissance, ni de maladie, ni de vieillesse, ni de mort, c'est nibbna ; et on ne peut y parvenir pied, c'est impossible" .

    Bouddha dclara : Rohitassa, si la fin de l'univers n'a pas t atteinte, cela signifie que la souffrance (dukkha) n'a pas t teinte. Pour

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    l'teindre, il faut trouver les quatre nobles vrits (dukkha sacc, samudaya sacc, nirodha sacc et magga sacc) dans le corps. Pour y parvenir, la seule voie correcte est de chercher dans le corps.

    En bref, dukkha sacc (la noble vrit de la souffrance) se rsume aux cinq agrgats. C'est prcisment ce que notent les yog lorsqu'ils portent leur attention sur le mouvement de chaque pas, sur le mouvement du gonflement et du dgonflement de l'abdomen, sur les visions, sur les sons, etc. Avant que les yog s'entranent vipassan, ils ne savent pas qu'il s'agit de dukkha sacc (la noble vrit de la souffrance). Aveugls par le tah, ils pensent que cela est agrable ou plaisant. Les visions, les sons et les autres sensations sont perus comme des plaisirs.

    Les attachements, l'avidit envers les sensations plaisantes sont justement samudaya sacc (la noble vrit de l'origine de la souffrance). Pour se dbarrasser de dukkha sacc et de samudaya sacc, les yog doivent dvelopper le magga sacc. C'est en s'entranant vipassan bhvan, c'est--dire noter tous les phnomnes physiques et mentaux qui apparaissent la conscience, que le magga sacc se dveloppe. En notant avec persvrance tous ces phnomnes, tout yog parviendra progressivement dvelopper vipassan (la vision intrieure), et finalement, parvenir au stade o tous les phnomnes physiques et mentaux n'apparaissent mme plus ; cela s'appelle nibbna. C'est pour cette raison que Bouddha nous a enseign : Qui cherche le dhamma le trouve dans son corps .

    Nous devons faire preuve de prudence, car beaucoup de commentateurs se mprennent sur cette phrase. Ils prtendent que Bouddha affirme que les quatre nobles vrits se trouvent dans le corps de chacun, et que de ce fait, il n'est nul besoin de fournir le moindre effort pour trouver le dhamma. Cette opinion est totalement incorrecte. Le dhamma dcouvert par Bouddha est trs subtil. Certains enseignements ncessitent une bonne interprtation.

    Premier exemple : une fort constitue de tecks est appele une fort de tecks. Nanmoins, cela ne signifie pas pour autant qu'on y trouve que des tecks, qu'il ne peut y avoir d'autres espces d'arbres.

    Second exemple : lorsqu'on dit que le prsident Untel a effectu une visite tel endroit, cela ne signifie pas qu'il se soit dplac tout seul. Il tait accompagn de ses gardes du corps, de ses secrtaires, et de toute sa suite. Cependant, on ne dsigne que la personne principale. Ce

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    moyen de parler s'appelle padhna en pali. Un autre, qui s'appelle phalnumna, consiste la dduction d'une cause par la connaissance de son effet. Lorsque le niveau d'un fleuve dborde soudainement, inondant les alentours de ses eaux, nous en dduisons que c'est parce qu'il y a de violentes pluies qui arrosent la rgion de la source du fleuve. L'inondation est l'effet et la violente pluie la cause.

    Troisime exemple : le moyen de parler qui s'appelle atthpanna. Ne mangeant rien le jour, Devadatta avait l'estomac plein. Dans cette affirmation, sachant que Devadatta avait l'estomac plein, nous en dduisons qu'il mangeait durant la nuit.

    Aussi, lorsque Bouddha nous dit que les quatre nobles vrits se trouvent dans notre propre corps, cela ne veut pas dire qu'elles se prsentent comme un bloc solide, log dans le corps. Ce n'est qu'en svertuant dvelopper magga sacc (la voie qui mne nibbna) que dukkha sacc peut tre connu, et ainsi, samudaya sacc peut tre extirp. Autrement dit, c'est en dveloppant la cause qu'est la contemplation des phnomnes physiques et mentaux que se produit l'effet qu'est nibbna, leur cessation.

    Ainsi, comme l'indique Bouddha dans son enseignement (qui cherche le dhamma le trouve dans son corps), puisse chaque yog tre capable de trouver les quatre nobles vrits en observant son propre corps, et parvenir alors nibbna, la cessation dfinitive de toute souffrance.

    sdhu ! sdhu ! sdhu !

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    Les quatre catgories de personnes

    L'enseignement d'aujourd'hui, qui s'intitule les quatre sortes de personnes , est un sermon qui fut dlivr par Bouddha l'empereur Pasenadkosala, roi de Svatthi dans l'actuelle Inde du Nord. Dans ce sermon, Bouddha nonce qu'il y a des personnes qui vont :

    1. de l'obscurit vers l'obscurit 2. de l'obscurit vers la lumire 3. de la lumire vers l'obscurit 4. de la lumire vers la lumire

    Ensuite, il expliqua en dtail ces quatre catgories de personnes.

    1. Celui qui fait partie de la premire catgorie de personnes est n au plus bas niveau de la misre, dans des conditions trs infrieures. Son apparence est laide, et sa sant dfectueuse ; il peut tre aveugle, sourd, crtin, chtif. Il n'a pas les moyens de subvenir ses besoins ; il ne se nourrit pas sa faim, il n'a pas de domicile convenable, il n'a pas de quoi se vtir, il ne peut pas se laver rgulirement et n'obtient pas les soins ncessaires pour rpondre ses besoins de sant.

    Bien que n dans la misre, il demeure sans regret et se livre des actes malsains, tels que le meurtre, le vol, la mconduite sexuelle, le mensonge, il consomme des boissons enivrantes, et produit divers autres akusala. Une fois qu'une telle personne meurt, elle renat dans les mondes infrieurs ; les enfers, les peta, les asra, ou les animaux. Une telle personne est une personne qui va de l'obscurit vers l'obscurit.

    2. Celui qui fait partie de la seconde catgorie de personnes est, tout comme celui de la premire catgorie, n dans la plus grande misre, avec tous les dfauts physiques et toutes les peines de l'existence. Conscient que les conditions misrables qu'il subit sont le rsultat de ses mauvaises actions d'une vie passe, il regrette cette situation malheureuse.

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    De ce fait, il s'engage avec dtermination s'entraner activement dvelopper des kusala : des actions saines, bnfiques et gnreuses. Il sabstient totalement de tuer, de voler, de mauvaises conduites sexuelles, de mensonges et de consommation d'alcool et autres drogues. Il s'efforce du mieux qu'il peut user d'actes, de paroles et de penses qui soient saines, constructives et bnfiques. Une telle personne, tant parvenue ainsi amliorer graduellement sa situation, renatra dans les conditions les plus favorables, dans le monde des deva ou comme un homme riche, bnficiant d'une excellente qualit de vie. Une telle personne est une personne qui va de l'obscurit vers la lumire.

    3. Celui qui fait partie de la troisime catgorie de personnes est n dans des conditions trs favorables, dans une famille trs aise, de haut rang, o il mne une existence luxueuse. De ce fait, il obtient nourriture, logement, vtements et soins mdicaux sans la moindre inquitude. Cependant, il ignore la loi de causes et effets, il ignore ce qui est bon et ce qui est mauvais.

    Ainsi, il est dpourvu de toute vertu et n'a aucune considration ni aucune compassion pour les autres. Sans honte et sans retenue, ne visant que son profit personnel, il commet toutes sortes d'actes malveillants, comme le meurtre, le vol, la mconduite sexuelle, le mensonge et la consommation d'alcool et autres produits intoxicants. Une telle personne, ayant graduellement dtrior sa situation, tombera, aprs la mort, dans les plus basses existences, parmi les quatre mondes des apya. Une telle personne est une personne qui va de la lumire vers l'obscurit.

    4. Celui qui fait partie de la quatrime catgorie de personnes est, tout comme celui de la troisime catgorie, n dans des conditions trs favorables, dans une famille riche, o il obtient tout ce dont il a besoin avec grande facilit. Pourvu de sagesse, il est conscient que l'excellente qualit de vie dont il bnficie est la consquence d'actions saines et positives produites lors d'une existence prcdente.

    De ce fait, il s'engage avec dtermination s'entraner activement dvelopper des kusala l'aide du corps, de la parole et de l'esprit. Il sabstient totalement de tuer, de voler, de mauvaises conduites sexuelles, de mensonges et de consommation d'alcool et autres drogues. Il s'efforce du mieux qu'il peut user d'actes, de paroles et

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    de penses qui soient saines, constructives et bnfiques. Faisant preuve d'amour et de compassion, il demeure toujours bienveillant l'gard des autres. Adoptant une conduite de vie aussi pure, sa situation ne cesse de s'amliorer. En mourant, il accdera aux plus hauts niveaux de l'existence, dans le monde des deva ou dans celui des humains. Une telle personne est une personne qui va de la lumire vers la lumire.

    J'invite maintenant tous les yog qui sont ici analyser leur situation. Si aujourd'hui ces yog disposent de tout ce dont ils ont besoin, s'ils sont en bonne sant, et s'ils sont intelligents, c'est grce aux kusala actes sains et constructifs qu'ils ont produit durant la vie passe. S'ils se retrouvent aujourd'hui au centre Mahs, dans un centre o ils ont la possibilit de s'entraner convenablement au satipahna, au moyen des instructions d'enseignants comptents, et d'tre capables de dvelopper vipassan, c'est pour les mmes raisons.

    C'est pourquoi nous pouvons dire que vous, les yog, tes des personnes qui viennent de la lumire et qui vont la lumire. Afin de demeurer jusqu' la fin de la vie au rang le plus noble de l'existence, il convient de persvrer sans relche produire des kusala. En produisant des actions saines comme des actions malsaines, nous ne pouvons jamais savoir avec certitude si nous nous destinons la lumire ou l'obscurit.

    Lorsqu'une feuille se dtache du haut d'un arbre, nul ne peut savoir si elle va tomber sur la terre, sur l'eau, dans un buisson pineux ou dans la boue. De la mme manire, celui qui n'est pas encore ariy (quelqu'un qui a expriment nibbna) ne peut jamais tre sr de ses prochaines existences. Seul, un ariy peut tre certain d'aller toujours vers la lumire.

    Dans l'introduction du mah satipahna sutta, Bouddha expose les quatre tablissements de l'attention :

    1. kynupassan satipahna (tablissement de l'attention sur les mouvements et la matire du corps)

    2. vedannupassan satipahna (tablissement de l'attention sur les sensations)

    3. cittnupassan satipahna (tablissement de l'attention sur les tats de conscience et les penses)

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    4. dhammnupassan satipahna (tablissement de l'attention sur les phnomnes tels que les visions, les sons, les odeurs, les gots et les touchers)

    Il nous enseigne que les yog qui s'entranent avec effort et persvrance jusqu'au dveloppement complet de vipassan par la mise en application des quatre satipahna pourront accomplir avec succs la connaissance du magga (nibbna) dans cette vie prsente. Pour cette raison, il est convenable que chaque yog s'entrane avec zle et l'aide d'un effort et d'une dtermination soutenus, jusqu' la connaissance du magga.

    Les yog ne devraient surtout pas ngliger cette occasion rarissime d'avoir pu rencontrer le ssana (l'enseignement de Bouddha) et toutes les conditions ncessaires pour s'entraner vipassan jusqu' la connaissance du magga.

    Ce n'est qu'en parvenant la connaissance de magga que le yog ne peut plus produire d'actes malsains, et que par consquent, il acquiert la certitude de renatre dans la lumire des mondes suprieurs. Dans ces conditions, seuls, des actes sains et positifs peuvent tre produits, c'est pourquoi le yog aboutira tt ou tard nibbna, la cessation complte et dfinitive de toute souffrance.

    Ainsi, ce n'est qu'en tant dot d'une foi solide envers le dhamma (saddh), et en faisant preuve d'un effort colossal et d'une puissante dtermination que le yog pourra se dlivrer de toute mauvaise production d'action, de parole et d'intention. Il franchira alors les connaissances de la vipassan, jusqu' magga a, la connaissance qui mne irrmdiablement l'exprience de nibbna.

    Puissent tous les yog s'entraner avec effort, persvrance, dtermination vipassan satipahna bhvan, de faon soutenue, en vitant toute interruption, et parvenir alors, dans les plus brefs dlais, la noble paix de nibbna.

    sdhu ! sdhu ! sdhu !

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    Le kynupassan sampajaa

    Aujourd'hui, nous allons tenter d'expliquer le kynupassan sampajaa, expos dans le mah satipahna sutta, qui est la contemplation des phnomnes physiques et mentaux en pleine conscience, l'aide de l'exprience personnelle.

    L'lment essentiel du satipahna est l'attention (sati). Toutefois, il y a quatre divisions, quatre caractristiques, et quatre mthodes de dissipation.

    Les quatre divisions de l'attention sont : 1. kynupassan satipahna (tablissement de l'attention

    sur le corps) 2. vedannupassan satipahna (tablissement de l'attention

    sur les sensations) 3. cittnupassan satipahna (tablissement de l'attention

    sur la conscience) 4. dhammnupassan satipahna (tablissement de l'attention

    sur les phnomnes physiques et mentaux)

    En d'autres termes : 1. Le fait de noter attentivement les mouvements et la matire du

    corps est kynupassan satipahna. 2. Le fait de noter attentivement les sensations agrables et les

    sensations dsagrables est vedannupassan satipahna. 3. Le fait de noter attentivement les rflexions et les penses est

    cittnupassan satipahna. 4. Le fait de noter attentivement les phnomnes physiques et

    mentaux tel que les visions, les sons, les odeurs, les gots et les touchers est dhammnupassan satipahna.

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    Les quatre caractristiques de la contemplation sont : 1. anicca, la caractristique de la fugacit 2. dukkha, la caractristique de la misre 3. anatta, la caractristique de non-matrise 4. asubha, la caractristique de la dplaisance

    Les quatre mthodes de dissipation sont : 1. dissipation de nicca l'aide de la caractristique d'anicca 2. dissipation de sukha l'aide de la caractristique de dukkha 3. dissipation d'atta l'aide de la caractristique d'anatta 4. dissipation de subha l'aide de la caractristique dasubha

    Bouddha divise les kyanupassan en 14 parties :

    1. npna pabba ; 2. iriypatha pabba ; 3. sampajaa pabba ; 4. paiklamanasikra pabba ; 5. dhtumanasikra pabba ; 6. navasivathika pabba, qui se divise en 9 parties. Le total est donc de 14 parties.

    1. npna pabba est la contemplation de l'air qui entre et qui sort. 2. iriypatha pabba est la contemplation des quatre postures : en

    marche, debout, assise, allonge.

    3. sampajaa pabba est la contemplation de tous les phnomnes physiques et mentaux de sorte les connatre clairement.

    Remarque : La mthode vipassan du Vnrable Mahs Saydaw se base essentiellement sur les parties 2 et 3.

    4. paiklamanasikra pabba est la contemplation sur les 32 parties du corps (les 32 kohsa) : les cheveux, les poils, les ongles, les dents, la peau, la chair, les tendons, les os, la moelle, les reins, le cur, le foie, les membranes, la rate, les poumons, les intestins, l'intestin grle, la gorge, les excrments, le cerveau, la bile, le mucus, le pus, le sang, la sueur, la graisse dure, les larmes, la graisse fluide, la salive, la glaire, la synovie et l'urine.

    5. dhtumanasikra pabba est la contemplation sur les quatre lments : l'lment terre, l'lment eau, l'lment feu et l'lment air.

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    6. navasivathika pabba est la contemplation sur les cadavres rpugnants (ce pabba se divise en 9 sortes).

    Ainsi, kyanupassan se divise en 14 parties.

    L'enseignement d'aujourd'hui porte sur sampajaa pabba, la troisime partie. C'est--dire la contemplation de tous les phnomnes physiques et mentaux l'aide d'une conscience claire.

    Cela consiste observer clairement, en profondeur, de faon connatre chaque phnomne, tel qu'il apparat rellement. Cette contemplation doit tre applique sur tous les phnomnes, quelles que soient les activits. Il faut noter en marchant, en stationnant, en regardant devant soi, en regardant derrire soi, en s'asseyant, en courbant son corps, en tendant des membres, en mangeant, en buvant, en mchant, en lchant, en dfquant, en urinant, en marchant, en tant debout, en tant assis, en tant allong, en s'endormant, en se rveillant, en parlant, en demeurant silencieux, etc. Bouddha a expliqu en dtail comment noter tous les mouvements du corps.

    Lorsqu'un yog effectue un mouvement en avant ou en arrire, il doit le noter trs attentivement. Il ne doit jamais faire un seul geste sans le connatre avec pleine attention. Il doit toujours connatre avec prcision le mouvement qu'il est en train de faire. Faisant ainsi, il note avancer, avancer lorsqu'il avance et reculer, reculer lorsqu'il recule, et ainsi de suite, pour chaque mouvement effectu. En regardant devant lui, il doit noter regarder devant, regarder devant , en regardant de ct, il doit noter regarder de ct, regarder de ct . En pliant et en tendant le corps, il doit noter plier, tendre . Pendant les activits quotidiennes et les repas, il y a de nombreux mouvements. Il faut tous les noter, de manire dtaille.

    Lorsque les moines mettent leur robe ou lorsque les yog lacs s'habillent, ils doivent le faire en notant attentivement tous les dtails. Durant un dplacement, si une pice vestimentaire ncessite d'tre retire ou remise correctement, il faut avant tout s'arrter. Ce n'est qu'une fois immobilis que la robe ou le vtement doit tre retir ou remis, en notant soigneusement chaque mouvement effectu. Pendant les repas, le yog doit noter tous les vnements, s'efforant de ne pas en manquer : le fait de s'asseoir la table, de regarder sur la table, de saisir la cuillre, de prparer une cuillre ou une bouche de nourriture, le fait d'apporter la cuillre ou la main la bouche, le fait d'insrer de l