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I.U.F.M. de l'Académie de Montpellier
Centre de Mende
ESSAI DE DEPISTAGE DES ENFANTS ESSAI DE DEPISTAGE DES ENFANTS
DYSLEXIQUES PAR LES ENSEIGNANTSDYSLEXIQUES PAR LES ENSEIGNANTS
DU PRIMAIRE.DU PRIMAIRE.
Laure AUGADE
M. Daniel THYSS
Année 1999/2000.
2
RESUME
L'échec scolaire est au cœur des préoccupations et le maître mot en la matière est
dyslexie. Ce trouble du langage touche environ 5 à 10% d'enfants. Le plus dur reste de
repérer les enfants dyslexiques et ce, le plus tôt possible, pour mettre en place une rééducation
adéquate. Or, il n'existe aucun dépistage systématique effectué par l'éducation nationale.
Alors, quels moyens pourraient être mis en place pour y remédier au niveau de l'enseignement
primaire ?
Failure at school is a very central worry for all of us and the keyword is dyslexia.
About 5 to 10% of children are concerned by these speak difficulties. The most difficult is
thinking out these dyslexics children as soon as possible to reeducate them in the most
appropriate way. Therefore, no systematic kind of detection exists in the french educational
system.
So, witch means could be set up to remedy this problem at the primary school level ?
MOTS CLES :
• Echec scolaire.
• Dyslexie
• Lecture.
• Troubles du langage.
• Conscience phonologique.
• Dépistage.
4
SOMMAIRE
Introduction…………………………………………………..………………………… p1
La dyslexie qu'est-ce que c'est?……….………...……………...……… p2
1. Définitions et historique…………….…………………………...………….... p2
v Définitions………………………………………………...………………... p2
v Historique……………………………………………...…………………… p2
2. La ou les dyslexies ?……………..……….…………...……….……………. p3
3. Les caractéristiques……………...…………………..………….…………… p5
v Les causes de la dyslexie………………………....………...…………… p5
v Les symptômes…………….…………..………..………………………… p7
La dyslexie à l'école…...……………………………………………………………. p8
1. Le dépistage des enfants dyslexiques……………………………………… p8
v Quand ?……………………………………………………………….…… p8
v Comment ?………………………………………………………………… p9
2. Exemples pris sur le terrain…………………………..……….…………… p11
Quelles solutions possibles…………………...…..…………….…………….. p15
1. Des exemples de tests……………………….……..………………………. p15
v Les épreuves de lecture………………………………………………… p15
v La batterie de Satz…………………………….………………………… p16
v La batterie de Høien et Lundberg…………...…………………………. p17
5
2. Leur réelle efficacité………………………..………………………………... p18
3. Et la prévention ?………………………..…………………………………… p21
v L'entraînement visuel………………………………………………….… p21
v L'entraînement phonologique…………………………………………... p22
Conclusion…………………………………………………………….…… p25
Lexique…………………………………………………………………………………. p26
Bibliographie………………………………………………………...……….………. p27
Annexes :
Document n°1 : "Exemples d'erreurs produites par Fatima."
Document n°2 : "Périodes et calendrier de l'entraînement visuel lecteur."
Document n°3 : "Exemple d'exercices sur la poursuite visuelle."
Document n°4 : "Exemple d'exercices sur la discrimination visuelle."
Document n°5 : "Exemple d'exercices sur la reconnaissance de lettres."
Document n°6 : "Test d'évaluation de développement de la conscience
phonologique lecteurs."
6
INTRODUCTION.
L'échec scolaire est devenu un phénomène de société, un symptôme qui se banalise.
Actuellement, il est une des préoccupations majeures de l'éducation nationale, L'enfant en
difficulté est au centre des débats, il commence à être pris en considération.
A propos d'échec scolaire en matière d'apprentissage de la lecture, un mot clé fait fortune,
c'est dyslexie. Souvent très mal connue des non-professionnels, la dyslexie est devenue un
terme passe partout : "Il ne sait pas lire, alors il est dyslexique", "Il confond les -p- et les -b-, il
est dyslexique"… La dyslexie devient ainsi le mal vedette de la fin du XXème et du début du
XXIème !
Le problème est donc de repérer les enfants réellement atteints de dyslexie pour leur proposer
une rééducation appropriée. Cependant, dépister un dyslexique n'est pas chose facile car les
études sur les symptômes de la dyslexie sont toujours en cours et suscitent de vives
polémiques. Il est donc difficile aux enseignants de signaler ces enfants. De plus,
actuellement, les enseignants ne disposent d'aucun moyen fiable pour repérer ces enfants.
Alors qu'est-ce que la dyslexie ? , Comment sont dépistés aujourd'hui les enfants ? , Et
Comment pourraient-ils l'être demain ?
7
LA DYSLEXIE, QU'EST-CE QUE C'EST ?
1. Définitions et historique :
v Définitions :
D'après le dictionnaire du Larousse, la dyslexie est définie comme étant une difficulté
spécifique d'apprentissage de la lecture courante chez un enfant ne présentant pas de déficit
intellectuel ou sensoriel et qui est normalement scolarisé.
Pour le Robert, la dyslexie se caractérise par des troubles de la capacité de lire ou des
difficultés à reconnaître et à apprendre le langage écrit.
La fédération mondiale de la neurologie préfère parler de désordre manifesté par une
difficulté dans l'apprentissage de la lecture en dépit d'un enseignement conventionnel, d'une
intelligence adéquate et d'une opportunité socioculturelle (c'est à dire que l'enfant bénéficie
d'un entourage propice à un bon épanouissement).
Ces trois définitions présentent des similarités, des mots récurrents : difficulté dans
l'apprentissage de la lecture, intelligence normale, scolarité conventionnelle.
On peut donc définir la dyslexie par : "Troubles spécifiques de l'apprentissage de la
lecture qui apparaissent chez des enfants d'une intelligence normale, sans aucun déficit
sensoriel et poursuivant une scolarité conventionnelle.".
v Historique :
La dyslexie a été découverte voilà environ un siècle par le corps médical.
Le terme "dyslexie" est inventé en 1887 par Rudolf Berlin.
En 1895, James Hinselwood, ophtalmologiste, donne la description d'un jeune garçon de
14 ans intelligent, scolarisé depuis l'âge de 7 ans et incapable de lire. Il baptise ce phénomène
8
: la cécité verbale ou alexie. Terme employé à tort, puisqu'il est habituellement employé pour
des gens qui ont perdu la lecture après un accident.
Le 7 novembre 1896, le docteur Pingle Morgan décrit dans le British Médical Journal le
cas d'un garçon dont les aptitudes en mathématiques étaient bonnes, mais dont la lecture et
l'orthographe étaient sévèrement défaillantes. D'après son instituteur, il serait le meilleur élève
de l'école, si l'instruction était entièrement orale.
En cette fin du XIXème siècle, l'incapacité d'apprendre à lire et à écrire chez un enfant
intelligent est donc appelée : cécité verbale congénitale. Curieusement, jusqu'au début du
XXème siècle, les éducateurs demeurent muets sur le sujet. Des psychologues (Bronner-1917-
, Hollingworth) vont bientôt commencer à s'intéresser au phénomène, ainsi que des
pédagogues. Ces différents courants rendent compte des hypothèses mises en avant pour
expliquer les causes de la dyslexie : médicales, psychologiques et pédagogiques. Nous
reviendrons sur ce point ultérieurement.
2. La ou les dyslexies ? :
Au début, on parlait de dyslexie en général, puis on distingua rapidement la dyslexie
développementale de la dyslexie acquise. La dyslexie acquise touche des personnes ayant subi
une lésion cérébrale (comme un accident vasculaire), alors que la dyslexie développementale
est un trouble linguistique qui fait suite à une difficulté dans le développement du système
d'analyse du langage écrit. Nous nous limiterons ici à l'étude des dyslexies développementales
qui touchent les enfants au cours de l'enseignement primaire.
L'enfant dyslexique peut-être atteint à des degrés divers : de la difficulté à la lecture
jusqu'à l'incompréhension totale. De ce fait, il ne peut exister une seule et unique dyslexie. Ce
terme renferme toute l'ampleur des problèmes que peut engendrer l'apprentissage de la
lecture. L'approche neuropsychologique des troubles de la lecture chez les enfants a montré
9
qu'il existait plusieurs sortes de dyslexies. Certains auteurs comme Frith (1986) se basent sur
les phases d'apprentissage de la lecture (phase logographique, alphabétique et orthographique)
pour classer les dyslexies. D'autres se fondent sur la description des stratégies de lecture
utilisées par les enfants, Boder (1973) isole trois types de dyslexies :
- Les dyslexies dysphonétiques (les plus fréquentes) qui résultent d'une mauvaise
analyse auditive mais d'une bonne perception visuelle formelle. Ici, la stratégie de
conversion grapho-phonémique ne peut s'automatiser, en d'autres termes, l'enfant
ne fait pas l'association entre le graphème et le phonème correspondant;
- Les dyslexies dyséidétiques, plus rares, résultent d'une bonne analyse auditive mais
d'une mauvaise perception visuelle formelle. La difficulté se situe au moment
d'utiliser un stock de représentations globales des mots visuels, il n'y a pas de
reconnaissance visuelle automatique, même pour un mot déjà rencontré ;
- Les dyslexies mixtes qui traduisent une incapacité à la fois auditive et visuelle.
Bakker et son équipe (1986) proposent une autre classification. Leurs travaux ont
permis de distinguer deux sous-types de dyslexies :
- La dyslexie de type P qui se traduit par une lecture lente, fragmentée et comportant
peu d'erreurs. Une stratégie analytique visuelle grapho-phonémique est employée
par l'enfant.
Exemple : pour lire BANANE, l'enfant va décomposer le mot en graphèmes et les
transformer ensuite en phonèmes. Ce qui donnera : B et A "BA", N et A "NA", N
et E "NE".
- La dyslexie de type L qui aboutit à une lecture rapide et comportant de nombreuses
erreurs par omission ou substitution. Elle privilégie une approche sémantique-
10
lexicale et morphosyntaxique. Elle fait référence à un enseignement global où la
phase logographique est prédominante.
Comme le démontre les quelques exemples ci-dessus, on parle couramment de "La
dyslexie", mais en réalité, ce terme générique renferme plusieurs formes de dyslexie. Il serait
donc plus juste de dire "Les dyslexies". Cependant au niveau du dépistage des enfants
dyslexiques par les enseignants du primaire, le but n'est pas de spécifier si l'enfant souffre de
telle ou telle forme de dyslexie, mais plutôt de relever les signes d'une probable dyslexie
(quelle qu'elle soit !).
Pour cela, il serait intéressant de voir quelles sont les caractéristiques, les troubles, les
symptômes d'une possible dyslexie.
3. Les caractéristiques :
Avant de détailler les troubles de la dyslexie développementale, il serait utile de dire
quelques mots au sujet de ses causes.
v Les causes de la dyslexie :
Ce sujet est plus que jamais d'actualité, car personne n'est en mesure de dire quelles sont
les causes réelles de la dyslexie. En France comme dans le reste de l'Europe, on l'a longtemps
attribuée à des troubles psychologiques ou affectifs (problèmes relationnels avec les parents,
conflits familiaux…). Ceci vient du fait que certains dyslexiques présentent des troubles du
comportement : ils sont agités, ils ont du mal à fixer leur attention. Mais c'est prendre la
conséquence pour la cause d'après les défenseurs d'une origine neurologique.
La thèse psychologique a de moins en moins de partisans et la communauté internationale
penche d'avantage aujourd'hui pour une explication neurologique et génétique. Les techniques
11
modernes d'imagerie médicale montrent que lorsqu'ils lisent, les dyslexiques ne mobilisent
pas tout à fait les mêmes zones de leur hémisphère gauche que les personnes "normales" (voir
le document ci-dessous).
Une origine neuro-biologique ?
Pour distinguer des sons voisins,
un enfant dyslexique utilise une
zone beaucoup plus réduite de son
cerveau que les autres personnes.
(Seul les hémisphères gauches sont représentés.)
(tiré de science & vie junior - mars 1998 - n°102 )
Les causes de la dyslexie restent encore mal connues, et les deux écoles s'affrontent encore,
même si la cause neurologique commence à prévaloir.
Abdelhamid Khomsi (linguiste, professeur de psychologie et spécialiste de la dyslexie) insiste
sur le fait que "les incertitudes sur les causes de la dyslexie posent avec acuité le problème de
son dépistage et de sa prise en charge".
Ce dépistage et cette prise en charge nécessitent de connaître les symptômes de la dyslexie.
12
v Les symptômes :
Bien qu'il existe plusieurs sous-types de dyslexie, les signes qui les caractérisent sont
identiques.
Selon Zorman (médecin de l'Education Nationale), les symptômes sont : "inversions,
omissions, confusions auditives des sourdes et sonores (ch/j, f/v, c/g, t/d, s/z, p/b), confusion
visuelle (n/m, b/d, p/q), simplification des sons consonantiques complexes (ill, gn, gr, sp…),
lire un mot pour un autre ayant un rapport de sens (lion/tigre) ; à condition de différencier les
troubles qui relèvent d'une véritable inaptitude à maîtriser la langue, de ceux qui relèveraient
d'un manque de stimulation linguistique". La dernière phrase de Zorman est importante car
elle recentre le problème des dyslexiques et évite d'étiqueter trop rapidement les enfants
comme dyslexiques. En effet, il semble évident qu'un enfant dont l'entourage proche ne lit
pas, ne communique pas, où la nécessité et le plaisir de lire ne sont pas présents, ne
développera pas de motivation qui est le maître mot en matière d'apprentissage.
Certains chercheurs évoquent aussi des difficultés de mémorisation comme l'ordre de
l'alphabet, les notes de la gamme, les jours de la semaine…, d'autres des difficultés
d'orientation spatio-temporelle (bien que des expériences sur des enfants aient démontré le
contraire !) .
Enfin il faut savoir que le dyslexique se caractérise par un écart important entre son Q.I
(normal) et sa performance en lecture (faible).
Il semble que les symptômes de Zorman soient les plus fidèles !
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LA DYSLEXIE A L'ECOLE
Deux millions de personnes sont concernées en France par la dyslexie. Ce handicap
toucherait 8 à 10 % de population scolaire et 1 à 2 % des enfants seraient sévèrement atteints.
D'autre part, il a été prouvé que la dyslexie frappait plus les garçons que les filles (trois fois
plus). Comme il a été dit plus haut, mal pris en charge, ce trouble du langage provoque un
retard scolaire important chez des enfants qui disposaient pourtant au départ de toutes les
chances de réussites! On voit donc toute l'importance que revêt un dépistage de la dyslexie
pour donner toutes les chances aux élèves.
Quels sont les moyens dont disposent les enseignants du primaire pour repérer ces enfants ?
Sont-ils réellement efficaces ?
1. Le dépistage des enfants dyslexiques :
Tout le problème des dyslexiques est résumé dans ce titre. Actuellement on sait
rééduquer les enfants atteints de ce handicap, d'ailleurs de nombreuses personnalités ont vécu
ou vivent avec comme Auguste Rodin, Winston Churchill, Albert Einstein, Steven
Spielberg…, le plus dur est de le repérer ! Il ne faut pas oublier que le succès de la
rééducation dépend de la précocité du diagnostic. Alors, quand faut-il faire ce dépistage et
comment ?
v Quand ?
Habituellement, on ne peut parler de dyslexie avant que l'enfant commence à lire et à
écrire. Autrement dit, le Cours Préparatoire (CP) est le lieu de dépistage. Certains spécialistes
estiment qu'il faut constater un retard d'apprentissage d'au moins dix-huit mois pour poser un
14
diagnostic fiable. En deçà de ce délai, ce retard pourrait simplement être dû à des aléas
normaux de l'apprentissage, comme par exemple le manque de motivation cité plus haut.
D'autre part, certains spécialistes estiment qu'à partir de la Moyenne Section (MS), on
peut détecter l'existence de facteurs de risques. Dans ce cas, on ne détecte pas de dyslexie
mais on détecte des enfants à risque.
Le dépistage précoce des troubles de l'apprentissage divise les chercheurs : pour certains,
c'est seulement au début de l'apprentissage qu'il est possible de dépister, pour d'autres, il faut
se situer en amont de l'apprentissage et étudier les troubles précoces qui seront prédictifs des
défaillances.
A ce sujet, dans le bulletin d'une mutuelle daté du 2 avril 2000, les associations de parents
d'enfants en difficulté d'apprentissage du langage déplorent l'inexistence d'un dépistage
précoce véritablement organisé. Car comme le souligne A.Khomsi, pour prendre en compte
un retard de lecture d'au moins dix-huit mois, cela signifie qu'il faut attendre le niveau Cours
Elémentaire 1 (CE1) pour établir de façon certaine une dyslexie.
Comme on vient de le voir, la question du "quand ?" est loin d'être résolue. Il est certain
que des dépistages précoces par les enseignants de maternelle permettraient de mettre en
évidence les enfants à risque, qui seraient alors suivis plus particulièrement au primaire et
notamment au CP. Afin de confirmer ou de démentir une éventuelle dyslexie, des tests
pourraient être mis en place au CE1. Les deux avis peuvent être complémentaires!
v Comment ?
Les symptômes de la dyslexie n'étant pas clairement établis (les recherches sont toujours
en cours), il paraît difficile de proposer des moyens de repérage fiables à cent pour cent.
Actuellement, le dépistage précoce en maternelle n'existe pas. Cependant, en fin de
Grande Section (GS), une évaluation est mise en place, ce qui peut permettre de relever les
15
enfants à risque comme il a été précisé plus haut. Mais le plus grand travail de repérage reste
celui effectué par les enseignants. Bien qu'ils ne soient pas formés pour, c'est par leur
vigilance, leurs observations sur le travail mené par chaque enfant que sont signalés la plupart
des élèves en difficulté. Bien sûr, il ne faut pas négliger la part importante que jouent les
parents d'élèves dans ce repérage précoce. Mais il n'existe pas à ce niveau un dépistage
systématique des enfants en difficulté ou susceptibles de l'être.
En ce qui concerne le primaire, les mêmes remarques peuvent être faites. Il n'existe pas de
moyen officiel de repérer les enfants dyslexiques. Comme précédemment, la vigilance et la
prévenance des enseignants et des parents sont primordiales pour signaler les enfants
présentants des troubles dans l'apprentissage de la langue. Les évaluations en début de Cours
Elémentaire 2 (CE2) sont, elles aussi, révélatrices des difficultés que peuvent rencontrer
certains élèves et permettent de signaler ces enfants. Mais ici revient la question du "quand
?"!, car plus tôt l'enfant est repéré, plus tôt la rééducation sera mise en place. Si l'enfant n'est
remarqué qu'en début de CE2, il aura déjà accumulé un certain retard qui l'aura plus ou moins
gêné dans sa scolarité ! D'autres ne seront pris en charge que bien plus tard faute d'un
dépistage systématique, car il faut rappeler que la finalité des évaluations nationales n'est pas
de repérer les enfants dyslexiques mais d'évaluer leurs acquis.
Le problème auquel nous sommes confrontés ici, c'est qu'il existe en réalité des degrés de
dyslexie. Le repérage en est d'autant plus difficile. En effet, les enfants les plus gravement
atteints sont dépistés plus vite que les autres, car chez eux les symptômes sont clairement
apparents dés leur plus jeune âge. En revanche, le problème se pose pour les enfants les moins
touchés : ils passeront de classe en classe avec un petit retard qui deviendra au fil des ans de
plus en plus gênant, qui les freinera et risquera même de les "dégoûter" de l'école. On se
retrouve donc dans le cadre typique de l'échec scolaire.
16
En conclusion, on peut dire que la question du "comment ?" est, elle aussi, très complexe
et qu'elle n'est toujours pas résolue ! Pour illustrer l'ampleur de la chose appuyons-nous sur
quelques exemples d'enfants.
2. Exemples pris sur le terrain :
- Fatima est une élève de CP âgée de six ans. Elle est l'aînée de trois garçons et a
des problèmes de santé gênants (elle doit subir une opération importante dans le
courant de l'année). Elle a déjà fait un CP anticipé l'année dernière et elle le redouble
donc actuellement. Fatima semble présenter quelques troubles du langage qui
perdurent malgré son redoublement ! Pour les illustrer, prenons des exemples :
Au cours d'une leçon sur le son [g], le maître donne aux enfants comme
consigne orale :"Ecrivez sur votre ardoise un mot où on entend le son [g]." La réponse
de Fatima a été : cadeau. Le maître lui demande alors de dire ce qu'elle a écrit et elle
répond :"cadeau". Il lui propose ensuite de venir l'écrire au tableau et d'entourer la
partie du mot où elle entend le son [g]. Fatima commence à écrire son mot puis elle
s'arrête à -ca- et dit :" Je me suis trompée j'ai écrit cadeau et en plus il n'y a pas de g
dans mon mot !". Il faut noter qu'au tableau une liste de mots comportant le son [g]
était écrite.
Un jeu visuel sur la reconnaissance de mots (tirés d'un texte connu des enfants)
est proposé. L'enseignant écrit un mot au tableau en le cachant, puis il le leur montre
pendant un laps de temps très court et leur demande de l'écrire sur leur ardoise. Ici, le
mot est CRABE écrit tel quel au tableau. Sur l'ardoise de Fatima on lit :"CARBE",
alors qu'elle a identifié le mot du tableau comme étant crabe ! Comme le démontrent
les pages extraites du cahier de Fatima (document n°1), ces deux exemples ne sont pas
des cas isolés.
17
En début d'année scolaire, une leçon sur le repérage dans l'espace avait été
menée et Fatima avait éprouvé quelques difficultés pour certaines activités, aussi bien
sur un plan tracé au sol où elle devait diriger un camarade d'un point à un autre, que
sur une feuille où l'enseignant dicte le trajet à suivre, ou sur le jeu du "Jacques a
dit…". Le vocabulaire spatial n'est pas encore très bien maîtrisé (gauche, droite, en
haut, en bas…).
De plus, Fatima présente également des troubles du rythme. En effet, elle est
incapable de suivre le rythme d'une chanson aussi simple soit-elle ! Elle ne sait ni
frapper le rythme ni marcher dessus.
En conclusion, on peut dire que Fatima présente quelques symptômes qui
pourraient s'apparenter à ceux de la dyslexie. Mais peut-on dire pour autant qu'elle soit
dyslexique ? Car en réalité la majorité des symptômes s'apparentent à de la
dysorthographie. Mais la non maîtrise du rythme ainsi que les troubles de latéralisation
qui touchent Fatima peuvent laisser penser à une forme de dyslexie. Son professeur
souligne que malgré son redoublement, elle se situe dans un niveau très moyen par
rapport au reste de la classe et par rapport à ce que l'on peut attendre d'un enfant en fin
de CP. Rien pour le moment ne permet d'affirmer ou d'infirmer les hypothèses posées.
Il est certain que Fatima présente des troubles qui la gênent dans sa progression
scolaire et que si rien n'est fait pour lui venir en aide, elle risque de se décourager.
Faut-il la signaler au RASED (Réseau d'Aide Spécialisé aux Enfants en Difficulté),
pour qu'il lui fasse passer des tests ? Ce qui est sûr, c'est qu'il faut surveiller Fatima de
près et voir où elle en sera en fin de CP.
L'exemple de Fatima illustre très bien la complexité du dépistage d'une dyslexie. Les
symptômes qui paraissent si évidents, si faciles à identifier quand on les lit, le deviennent
beaucoup moins dans la réalité, sur le terrain. L'avenir d'un enfant est entre nos mains !
18
- Thomas est un élève de CM1 âgé de neuf ans. Il est très brillant en
mathématique, en sciences, il est également très inventif lorsqu'il s'agit d'imaginer une
histoire et doué dans les jeux de déduction. Cependant, il est incapable de tenir un
cahier correctement, il est toujours plein de ratures, de "gribouillages", ce qui lui vaut
de mauvaises appréciations. D'autre part, il lit de façon très découpée et cette activité
lui est pénible, il a honte. Quand le maître demande qui veut lire, Thomas se fait tout
petit. De ce fait, il intervient de moins en moins devant toute la classe.
Sur ses cahiers, on observe de temps en temps des inversions de lettres, de
chiffres, il arrive fréquemment que les mots d'une phrase soient mal fragmentés,
certaines phrases sont même incomplètes quand il s'agit de recopier un exercice.
Exemple : "Maméson est surla place du vilage."
L'enseignant a rapidement remarqué les différents problèmes de Thomas. Plus
il avançait dans l'année, plus les troubles se précisaient. Sa mère s'inquiétait, elle se
demandait si la classe de CM1 n'était pas trop dure et envisageait même le
redoublement du CE2. C'est par une concertation entre les parents de Thomas et son
maître que la signalisation au RASED fut décidée. Car, même si Thomas avait des
difficultés à suivre, ce n'était pas à cause de ses capacités intellectuelles et donc un
redoublement n'aurait pas été la meilleure solution ! Ainsi, Thomas est suivi par un
maître spécialisé du RASED pour trouble du langage.
Ici, on a l'exemple d'une prise en charge tardive qui a certainement gêné Thomas dans sa
scolarité. Ce retard peut s'expliquer par le fait que la maman est très présente et disponible.
Ayant remarqué les difficultés de son enfant, elle le faisait travailler tous les soirs en rentrant
de l'école et ce depuis le CP. La dyslexie de Thomas n'étant pas trop "grave", la ténacité de sa
mère a suffit à masquer les symptômes pendant quelques années.
19
Ces deux exemples démontrent toute la difficulté du "quand ?" et du "comment ?"
cités plus haut. Un facteur important à été mis à jour avec ces exemples, c'est celui de
l'entourage aussi bien parental que scolaire. Il faut favoriser le dialogue, de façon à envisager
la ou les meilleures solutions pour l'enfant. Mais comme on le voit ici, la question du
dépistage reste entière ! Les enseignants ne disposent d'aucun moyen, d'aucun test pour
repérer ces enfants. Pourtant, il existe de nombreux tests élaborés par les divers partis
(psychologues, médecins, pédagogues…). Dans cette troisième partie, nous allons en passer
quelques-uns en revue et discuter de leur efficacité. Nous allons voir également quels moyens
peuvent être mis en place pour limiter les symptômes de la dyslexie.
20
QUELLES SOLUTIONS POSSIBLES ?
Il existe des batteries de test depuis la "découverte" de la dyslexie ! Mais là aussi, on
se retrouve confronté au même problème : les symptômes de la dyslexie. Ainsi, chaque école
met au point sa propre batterie rivalisant celle des autres ; et quand ils ne sont pas occupés à
l'élaboration d'un nouveau test, ils mettent à l'épreuve celui d'une autre école. Au fil des
années et grâce aux nouvelles techniques médicales, les symptômes se précisent et les
épreuves proposées deviennent de plus en plus précises. En voici quelques exemples.
1. Des exemples de tests :
v Les épreuves de lecture :
Ces épreuves mettent en jeu trois types de tâche :
- Les épreuves de logatomes et de pseudo-mots qui font appel à la voie phonologique
et non pas à la mémoire visuelle.
Exemples : dapier, lateur, mélane, sivane.
- Les épreuves de lecture de mots qui font appel soit à la voie visuelle, soit à la voie
phonologique. Ici, les erreurs produites par l'enfant sont analysées en fonction de la
relation qu'elles entretiennent avec le mot cible (voir le tableau page suivante).
- Les épreuves de compréhension à partir de mots, d'énoncés ou de textes.
Ces épreuves de lecture sont celles proposées à des élèves en fin de CP ou plus âgés.
Nous discuterons de leur efficacité en matière de dépistage dans le prochain paragraphe.
21
Nature des erreurs Exemples
Visuelle globale (inversion)
Visuelle latéralisée
Sémantique
Visuo-sémantique
Dérivationnelle
Auditive globale
Visuo-auditive
Visuo-auditive
Omission (élision de son)
assimilation
Sol Õ slo
Vision Õ télévision
Bicyclette Õ vélo
Divan Õ canapé
Femme Õ fèm
Garçon Õ karçon
Noyade Õ moyade
Pantalon Õ bantalon
Fil Õ fi
Berceau Õ berko
(tiré de "Le langage de l'enfant. Aspects normaux et pathologiques" )
v La batterie de Satz (1970) :
Satz a mis au point une batterie qui contribue au relevé d'indices prédictifs et donc à établir un
pronostic. Cette batterie s'adresse à des enfants de moins de cinq ans.
Elle comporte un ensemble de cinq épreuves :
- Une épreuve d'identification de mots. Ces mots sont extraits du lexique courant des
enfants.
- Une épreuve de coordination visuomotrice fine qui met en jeu à la fois la vue et le
geste (ajuster le mouvement à la situation).
Exemple : attraper un petit objet, saisir un objet fragile sans le casser…
- Une épreuve de praxies constructives qui consiste en un jeu de construction
réglementé.
- Une épreuve de mémoire à court terme qui se traduit soit par la reproduction d'un
dessin très simple, soit par une écoute musicale.
Tableau d'analyse de la nature des erreurs
22
Exemple : redessiner un rond dans un carré, frapper sur un tambour un rythme
préalablement entendu…
- Une épreuve de gnosies digitales où l'enfant est amené à découvrir avec ces doigts
un objet plus ou moins usuel.
Exemple : jeu du "kim-toucher" où on doit reconnaître un objet rien qu'en le touchant
en ayant les yeux bandés.
Ces épreuves rentrent dans le cadre d'un dépistage précoce des troubles de l'apprentissage.
v La batterie de Høien et Lundberg (1991) :
La batterie de Høien et Lundberg est un outil d'évaluation à visée diagnostique.
Elle est composée de quatre épreuves :
- Une épreuve de décodage du mot comprenant deux listes de soixante dix mots,
avec en plus évaluation du temps de réaction.
- Une épreuve orthographique comprenant une liste de mots homophones.
Exemples : son/sont, mon/mont, et/est…
- Une épreuve phonologique comprenant une liste de logatomes.
Exemples : baline, soline, loute…
- Une épreuve d'assemblage phonologique comprenant des évaluations de l'analyse
visuelle, de l'identification de lettres, du recodage phonologique, et de l'assemblage
phonologique.
Exemple : Y a-t-il un F dans CAFE ? Combine CH/A/P/EAU. Quel son entendu dans
BŒUF manque dans ŒUF ?
Cette batterie est plus scolaire que la précédente et s'appuie sur les symptômes de la dyslexie.
23
2. Leur réelle efficacité :
Les trois batteries présentées plus haut s'appuient sur des épreuves très différentes : celle de
Høien et Lundberg est basée exclusivement sur les symptômes de la dyslexie, à l'opposée de
celle de Satz qui privilégie une évaluation des fonctions générales. Quant aux épreuves de
lecture, elles n'ont pas une visée de dépistage mais plutôt d'évaluation.
Les épreuves de lecture s'adressent à des enfants de sept ans et plus, c'est à dire à partir
du CE1. Il paraît évident qu'un enfant dyslexique rencontrera des difficultés pour effectuer les
trois épreuves proposées. On peut d'ailleurs rapprocher les deux premières (épreuve de
logatomes et épreuve de lecture de mots) des épreuves trois et une de la batterie de Høien et
Lundberg (épreuve phonologique et décodage de mots).
Ce qui fait la particularité de ces épreuves de lecture c'est la présence d'une épreuve de
compréhension. C'est elle aussi qui pose problème, car elle implique de nombreuses
compétences comme les acquis antérieurs, le vocabulaire et la vitesse d'exécution qui rendent
son évaluation d'autant plus difficile. La validation de cette épreuve dépend de trop de
facteurs pour être prise en compte. Par ailleurs, les recherches portant sur l'évaluation de la
lecture de mots et la compréhension montrent que les enfants dyslexiques présentent des
difficultés significatives concernant la lecture des mots, le décodage phonologique,
syntaxique la mémoire à court terme et la mémoire du travail (étude menée par comparaison à
des enfants contrôles). Par contre, les enfants ayant des résultats faibles aux épreuves de
compréhension et de bons résultats aux épreuves de lecture de mots ont des performances
phonologiques et syntaxiques comparables à celles des enfants contrôles (Siegel et Ryan,
1989). Ce qui tend à prouver que les épreuves de compréhension ne sont pas révélatrices pour
les enfants dyslexiques. C'est pourquoi les recherches contemporaines sur la dyslexie
privilégient le niveau de lecture du mot sur celui de la compréhension du texte.
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Pour Satz, les anomalies du développement de certaines fonctions sont associées à une
probabilité élevée de troubles d'apprentissage spécifiques de la lecture, de l'orthographe et du
calcul. Ces fonctions sont celles testées dans sa batterie, soit : les gnosies digitales, le
maintien de l'attention, la mémoire de travail et la mémoire séquentielle. Elles permettent de
déceler les signes annonciateurs de troubles futurs. A l'encontre de beaucoup d'autres, Satz
accorde moins d'attention aux troubles du langage, de la latéralité, de l'orientation spatiale, de
la mesure du Quotient Intellectuel (QI).
Cette batterie est utilisée avec succès. Ceci s'explique par le fait que les épreuves sont courtes
, attrayantes et ludiques. De plus, elles n'impliquent pas de contraintes instrumentales trop
lourdes, ce qui la met à la portée de tous. Ainsi les enfants se prêtent facilement au jeu car il
faut rappeler que cette batterie a été mise au point pour des enfants non lecteurs (de moins de
cinq ans) !
Malgré quelques modifications apportées, la batterie de Satz est encore utilisée par les
professionnels car elle permet un dépistage précoce des troubles d'apprentissage. Elle ne
décèle pas les enfants dyslexiques (car il est trop tôt !), mais renseigne les enseignants sur les
enfants susceptibles de rencontrer des problèmes au cours de leur scolarité.
La batterie de Høien et Lundberg est la seule présentée qui ait une visée diagnostique.
Ici, la compréhension du texte est laissée au second plan au profit des mécanismes de
décodage des mots sur lesquels butent la plupart des enfants dyslexiques. Ainsi, les épreuves
deux et trois s'intéressent aux stratégies lexiques, en l'occurrence la procédure d'adressage
(analyse globale) et la procédure d'assemblage (analyse phonologique). La dernière épreuve
porte sur la conscience phonologique qui joue un rôle important dans la maîtrise des règles de
correspondance graphèmes-phonèmes. Il a été mis en évidence que les enfants dyslexiques
présentent des difficultés à accéder à certaines informations phonologiques (Lecocq, 1991).
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Le principe de cette épreuve est d'observer l'influence combinée d'un ou plusieurs facteurs
supposés jouer un rôle dans les procédures d'accès à la phonologie.
Cette batterie tente de révéler chez l'enfant qui la passe les symptômes d'une dyslexie. Elle
permet ainsi de poser un diagnostic et donc de repérer un enfant dyslexique.
Cependant, cette méthode est lourde car elle nécessite de faire passer les enfants les uns après
les autres, ainsi que l'utilisation d'un ordinateur pour mettre en relation tous ces facteurs et
élaborer des tableaux ou des graphiques comparatifs.
De ce fait, cette batterie s'adresse à des professionnels qui seront plus à même qu'un
enseignant du primaire pour lire et interpréter les données !
En conclusion, on peut dire que le test le plus abordable pour des enseignants du
primaire reste les épreuves de lecture. Non pas que les compétences des enseignants soient
remises en cause, mais la mise en place de la batterie de Høien et Lundberg par exemple serait
trop coûteuse en temps de formation (des maîtres), ainsi qu'en temps scolaire (par rapport à
une programmation annuelle). Les épreuves de lecture, et même l'épreuve de compréhension,
sont utiles pour repérer des enfants présentant des troubles caractéristiques d'une dyslexie. Ici,
bien entendu, on parle de dépistage d'enfants dyslexiques et non pas d'enfants présentant des
difficultés ou susceptibles d'en avoir. Dans cette situation, la batterie de Satz semble toute
indiquée, cependant elle nécessite quand même auparavant une connaissance des épreuves et
des résultats attendus.
Quoi qu'il en soit, il paraît indispensable, avant de mettre au point des batteries prédictives ou
diagnostiques, que les enseignants soient sensibilisés au problème que représente la dyslexie
et qu'ils soient intégrés de façon plus active au processus de dépistage.
Ces dernières années, de nouvelles idées ont vu le jour et notamment celle de la
prévention au niveau de l'enseignement. L'idée est simple, ne sachant pas dépister assez tôt les
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enfants dyslexiques, autant mettre en place un enseignement qui limite le développement des
symptômes de la dyslexie ! Voyons en quoi consiste cette prévention.
3. Et la prévention ?
Cette prévention peut-elle aider à dépister les enfants dyslexiques en mettant en place,
par exemple, des exercices, des entraînements qui leur permettraient d'éclaircir certains
symptômes ? Qui aideraient ces symptômes à s'affirmer le plus tôt possible ?
Voici un exemple de prévention :
On a pu observer que certains enfants dyslexiques présentaient des troubles visuels et
phonologiques qui les freinaient dans leur apprentissage de la lecture.
C'est pour améliorer ces performances que Michel Zorman et Monique Jacquier-Roux ont
élaboré des batteries d'entraînement visuel et phonologique. Ces entraînements n'ont pas pour
vocation de rééduquer les enfants dyslexiques mais s'adressent à tous les élèves, car ces
exercices peuvent améliorer la vitesse de lecture et sont un bon entraînement pour les lecteurs.
Cette batterie est donc composée de deux types d'entraînement :
v L'entraînement visuel : Il peut-être mis en place en fin de GS en préparation à
la lecture, mais il concerne surtout les enfants de CP. Il est suivi par les enfants durant
toute l'année scolaire.
L'entraînement comporte deux périodes (document n°2) :
- La première est consacrée à des exercices de poursuite visuelle.
Exemple : exercice n°6 (document n°3).
- La deuxième est consacrée à des exercices de discrimination et de
reconnaissance des lettres.
Exemple : exercice n°7 et exercice n°11 (documents n°4 et n°5).
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Chaque exercice dure environ quatre à cinq minutes et est commun à toute la classe.
Les séances se déroulent le matin avant de commencer le travail, comme un
échauffement.
v L'entraînement phonologique : il est conçu pour des enfants lecteurs ou pré-
lecteurs, il s'adresse donc à des élèves de GS et plus. Contrairement à l'entraînement
visuel, les enfants travaillent par groupes de niveau homogènes. Pour cela, M.Zorman
et M.Jacquier-Roux ont mis au point un test d'évaluation de la conscience
phonologique, inspiré des travaux de P.Lecocq (document n°6).
Chaque exercice d'entraînement est pratiqué pendant une semaine, ils sont au nombre
de six : -1- segmenter la phrase en mots,-2- trouver des mots qui riment,-3- segmenter
le mot en syllabes,-4- fusionner les syllabes,-5- conscience et identification de
voyelles,-6- conscience et identification de consonnes.
Chacun des six exercices comporte trois jeux : les deux premiers utilisent des planches
de dessins ou des cartes représentant des dessins, le dernier est entièrement oral. Ici
aussi, leur contenu s'appuie sur les travaux de P.Lecocq. Une séance dure environ
vingt minutes.
Il est important de noter qu'il existe les mêmes types d'exercices et de tests de
conscience phonologique pour les pré-lecteurs.
Le test de conscience phonologique lecteur a été proposé à la classe de CP de Fatima au mois
d'avril. Non pas pour suivre les exercices de l'entraînement phonologique, mais pour situer les
compétences de Fatima en la matière par rapport au reste de la classe.
Fatima a obtenu un score de 19/23, ce qui la situe parmi les moyens de la classe comme le
montre le graphique ci-dessous.
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On remarque aisément que Fatima n'est pas la seule à présenter un déficit de la conscience
phonologique. Sur dix-huit élèves, seulement huit ont obtenus le score maximum. Lorsqu'on
analyse les résultats par épreuve, on s'aperçoit que c'est la planche n°4 qui a posé le plus de
problème où il s'agissait de trouver l'image du mot qui ne commençait pas comme les deux
autres.
Cependant, les autres enfants ayant un score inférieur à vingt ne présentent pas les mêmes
symptômes que Fatima en matière d'apprentissage de la lecture, bien qu'ils aient eux aussi
quelques difficultés à lire. Par exemple, l'élève qui a obtenu 14/23 (le plus petit score), lit avec
aisance. Attention, tous les enfants présentant un déficit phonologique ne sont pas pour autant
dyslexiques ! Il serait dangereux de faire l'amalgame.
On ne peut donc pas considérer ce test comme un dépistage possible des enfants dyslexiques,
mais il peut dans une certaine mesure y contribuer. A ce sujet, Jacques Fijalkow, professeur
en psychologie, dénonce : "le déficit de conscience phonologique est souvent identifié comme
prédictif de futures difficultés. Mais personne ne peut le prouver, bien au contraire."
0
2
4
6
8
10
notes
no
mb
re d
'en
fan
ts
14 18 19 20 21 22 23
Résultats obtenus par la classe de Fatima au test de conscience phonologique.
29
Il faut savoir que ces entraînements ne dépendent pas d'une éducation spécialisée et qu'il est
libre à chaque enseignant de le mettre en place ou non dans sa classe. Ils ne rentrent pas non
plus dans le cadre d'une rééducation, mais dans celui de la prévention ! D'après une étude
menée par M.Zorman et M.Jacquier-Roux auprès de plusieurs classes, les enseignants ont
noté l'effet important de ces exercices sur l'amélioration des performances de lecture.
Une question reste cependant en suspens, ces exercices ne vont-ils pas masquer les
symptômes de la dyslexie ? Peut-être freinent-ils leur apparition, mais est-ce qu'ils les
"éliminent" ? Ne risquent-ils pas de réapparaître plus tard et peut-être trop tard ?
Ou au contraire, aideraient-ils à repérer les enfants dyslexiques en s'appuyant sur le degré de
difficulté rencontré par certains au cours de ces entraînements ?
Les réponses à toutes ces questions restent encore en suspens et des études sont actuellement
en cours sur plusieurs classes pilotes, ainsi que sur des enfants dyslexiques.
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CONCLUSION
Depuis l'identification, au XIXième siècle , de la dyslexie, beaucoup de questions,
beaucoup de problèmes ont été soulevés et très peu ont trouvé une réponse. En premier lieu,
les symptômes de la dyslexie, ensuite les causes (qui pour certains sont des conséquences !),
et surtout le dépistage. Devant tant d'incertitudes, comment lutter contre ce handicap ? Car le
danger serait d'étiqueter comme dyslexiques tous les enfants un peu plus lents et de vulgariser
la dyslexie. Le plus dur reste, sans nul doute, de repérer les dyslexiques !
Les enseignants du primaire ne sont pas intégrés activement dans le système de
dépistage, ce qui est regrettable, car ils sont les mieux placés pour évaluer les capacités de
leurs élèves. Il serait utile de repérer les enfants présentant des difficultés ou susceptibles d'en
avoir dés la maternelle afin d'avoir un suivi. Par la suite, au primaire, en fin de CE1, un
dépistage des élèves pourrait être mis en place, pour signaler les enfants dyslexiques au
RASED qui leur proposerait alors une rééducation adaptée.
Seulement, les moyens financiers, les contenus des tests (des recherches sont encore en cours)
et le manque de formation des enseignants sur le sujet, rendent impossible pour le moment
toute investigation.
En ce début de XXIème siècle, certains auteurs proposent de nouvelles hypothèses à
propos de la dyslexie : si nous traitions les dyslexiques comme des gens possédant un don au
lieu de les considérer comme des handicapés ? Alors peut-être, reprendraient-ils confiance en
eux et cela permettrait de dédramatiser la situation !
Un nouveau débat est ouvert : la dyslexie peut-elle être un don ?
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LEXIQUE
CONSCIENCE PHONOLOGIQUE : capacité d'analyser les composantes de la parole
(mots, rimes, sons, phonèmes) et d'effectuer sur elles des opérations complexes.
GNOSIE : reconnaissance d'un objet par l'intermédiaire de l'un des sens.
GRAPHEME : unité contrastive minimale dans un système d'écriture.
LOGATOMES : séquence de lettres ou de phonèmes qui, n'ayant pas de signification, ne
constitue pas un mot, mais respecte les séquences habituelles de la langue et pourrait par
conséquent devenir un mot si une signification lui était attribuée. (voir pseudo-mots ou non-
mots).
PHONEME : le plus petit élément constitutif de la chaîne parlée permettant des distinctions
sémantiques.
PRAXIE : fonction permettant l'organisation spatiale et temporelle des gestes en fonction
d'un but. Action ordonnée en vue d'un résultat.
PROCEDURE D'ADRESSAGE : identification globale du mot ou du morphème.
Exemple : les homophones.
PROCEDURE D'ASSEMBLAGE :identification par le biais d'un mécanisme de décodage
phonologique, des lettres ou des groupes de mots.
Exemple : lecture de logatomes.
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BIBLIOGRAPHIE
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cours, n°184 , février 2000, p10-15.
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et pathologiques." -- éditions Masson. Paris. 427p.
FARGIER, Marie-Odile. (1998) : "Dyslexie, le méli-mélo des lettres.", dans Science & vie
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HURE, Fabienne. (02/04/2000) : "La dyslexie : comment lutter contre l'échec scolaire." --
http://www.les mutuelles-de-loire-atlantique.fr/Actualites/Le_mutualiste/S…
/p-dyslexie.ht
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JACQUIER-ROUX, M, ZORMAN, M. (1998) : "Entraînement phonologique prélecteurs."
-- éditions de la Cigale. Grenoble.
JACQUIER-ROUX, M, ZORMAN, M. (1998) : "Entraînement visuel." -- éditions de
la Cigale. Grenoble.
LECOCQ, Pierre. (1991) : "Apprentissage de la lecture et dyslexie." -- éditions Mardaga.
Liège. 352 p.