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Faculté des Sciences Exactes et Naturelles Année 2011 N° attribué par la bibliothèque / / / / / / / / / / / THESE Pour obtenir le grade de docteur de l’Université des Antilles et de la Guyane, Discipline : Sciences de la vie Evaluation de marqueurs génétiques du complexe Mycobacterium tuberculosis combinée à l’utilisation d’outils bioinformatiques : apport en épidémiologie et phylogénie de la tuberculose Présentée et soutenue publiquement le 7 juin 2011 par Julie MILLET JURY : Président : Professeur Thérèse MARIANNE-PEPIN Rapporteur : Professeur Isabel PORTUGAL Rapporteur : Docteur Philip SUPPLY Examinateur : Professeur Max LOUIS Examinateur : Docteur Antoine TALARMIN Directeur de thèse : Docteur Nalin RASTOGI

Evaluation de marqueurs génétiques du complexe Mycobacterium

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  • Facult des Sciences Exactes et Naturelles

    Anne 2011 N attribu par la bibliothque / / / / / / / / / / /

    THESE Pour obtenir le grade de docteur de lUniversit des Antilles et de la Guyane,

    Discipline : Sciences de la vie

    Evaluation de marqueurs gntiques du complexe

    Mycobacterium tuberculosis combine lutilisation doutils bioinformatiques :

    apport en pidmiologie et phylognie de la tuberculose

    Prsente et soutenue publiquement le 7 juin 2011 par Julie MILLET

    JURY :

    Prsident : Professeur Thrse MARIANNE-PEPIN Rapporteur : Professeur Isabel PORTUGAL Rapporteur : Docteur Philip SUPPLY Examinateur : Professeur Max LOUIS Examinateur : Docteur Antoine TALARMIN Directeur de thse : Docteur Nalin RASTOGI

  • 1

    Remerciements

    Je tiens remercier lensemble des membres du jury davoir accept de prendre le temps de participer

    lexamen de mon travail de thse.

    Un trs grand merci Nalin Rastogi, mon directeur de thse et guru dans le bon sens du terme. Je salue son

    incroyable nergie contagieuse et bnfique et sa motivation sans faille. Merci pour tout ce que jai pu

    apprendre de prcieux durant ces annes passes au sein de lunit des mycobactries.

    Mes remerciements sadressent aussi aux directeurs successifs de lInstitut Pasteur de la Guadeloupe, qui

    ont soutenu et ainsi contribu au bon droulement de ce travail de thse, Monsieur Jean-Louis Cartel,

    Monsieur Ronald Perraut et Dr. Antoine Talarmin.

    Je suis trs reconnaissante lensemble des membres lquipe de lunit des mycobactries pour tous les

    bons moments passs ensemble au laboratoire. Merci beaucoup lquipe actuelle : Docteur Thierry et

    Vronique Hill pour leur disponibilit, Mylne pour tous ces moments de partage, Fred pour ses chants

    tonitruants qui nous font rappeler que lon est vivant et David pour tous les coups de pouce donns ! Je

    noublie pas tous ceux qui, un temps, ont fait partie de notre quotidien avant de voguer sur dautres mers

    je pense tout particulirement Chdem, Jessica et Thomas.

    A mes amis et collgues de lInstitut Pasteur de Guadeloupe, merci pour votre bonne humeur et pour tout ce

    que vous apportez de bon et de joyeux dans nos journes de travail passes ensemble. Je remercie tout

    spcialement Stphanie G., Stphanie B., Tony, Marie-Odile, et Jeannette pour leur soutien et leurs

    encouragements prcieux.

    A Pierre et Gaspard, les plus importants mon monde, et leur amour infini. A mes parents, pour la beaut,

    la gnrosit de leur don.

  • 3

    Table des matires

    Liste des abrviations 9

    Liste des tableaux 10

    Liste des figures 11

    Introduction 13

    1. La tuberculose dans le monde, un problme de sant publique 13 1.1. Epidmiologie globale de la maladie 13 1.2. Facteurs expliquant cette propagation et moyens de lutte 14

    1.2.1. Lpidmie de VIH/Sida 14 1.2.2. Lmergence et la propagation de souches rsistantes aux antituberculeux 15 1.2.3. Autres facteurs 15

    1.3. Moyens de lutte 16 1.3.1. DOTS et Halte la tuberculose 16 1.3.2. BCG 17 1.3.3. Traitements 18

    2. Pathogense et volution de la maladie 18 2.1. Agent responsable 18 2.2. La maladie 21

    3. Diagnostic et traitement de la maladie 23 3.1. Dmarche diagnostique 23 3.2. Lexamen radiologique 24 3.3. Lintradermo-raction la tuberculine (Test de Mantoux) 24 3.4. Confirmation du diagnostic : lexamen bactriologique 25

    3.4.1. Lexamen direct 25 3.4.2. La culture 26 3.4.3. Lidentification 26 3.4.4. Antibiogramme 28

    3.5. Traitement 28 3.5.1. Chimio-prophylaxie 28 3.5.2. Traitement de la tuberculose maladie 30 3.5.3. Traitement de la tuberculose bacilles rsistants et multirsistants 30

    4. Rsistance et multirsistance aux antituberculeux 30 4.1. Mcanismes de rsistance aux antibiotiques de premire ligne 30

    4.1.1. Isoniazide 30 4.1.2. Rifampicine 31 4.1.3. thambutol 31 4.1.4. Pyrazinamide 33

  • 4

    4.2. Mcanismes de rsistance aux antibiotiques de deuxime ligne 33 4.3. Dtection des rsistances aux antituberculeux de M. tuberculosis 34

    5. Marqueurs gntiques pour le typage molculaire des isolats du complexe M. tuberculosis

    35

    5.1. Le gnome des souches du complexe M. tuberculosis 35 5.2. Marqueurs gntiques pour le typage molculaire des isolats du complexe M. tuberculosis

    36

    5.2.1. Les squences dinsertion 36 5.2.2. Les courtes squences dADN rptes 36

    5.2.2.1. Le locus DR 36 5.2.2.2. Les minisatellites 38

    5.2.3. Rgions de diffrence (RD) et Single Nucleotide Polymorphism (SNP) 40 5.3. Buts et applications du typage molculaire 41

    5.3.1. Slection de marqueurs molculaires et proprits requises 41 5.3.2. Structure de la population et volution des souches du complexe M. tuberculosis 42

    5.3.2.1. Structure de la population de souches du complexe M. tuberculosis 42 5.3.2.2. Evolution du complexe M. tuberculosis 45

    5.3.3. Application du gnotypage pour le suivi et la prise en charge des patients tuberculeux 46 5.3.3.1. Dtermination des cas de transmission rcente 47 5.3.3.2. Identification des cas de rechute et de rinfection 47 5.3.3.3. Rsistance aux antituberculeux 48 5.3.3.4. Contaminations croises au laboratoire 48

    Intrt et objectifs de notre recherche 51

    Matriel et Mthodes 55

    1. Gnotypage 55 1.1. Extraction dADN 56 1.2. IS6110-RFLP 56

    1.2.1. Prparation de la sonde de dtection de lIS6110 56 1.2.2. Digestion de lADN gnomique 56 1.2.3. Electrophorse des produits de digestion 57 1.2.4. Transfert sur membrane (Southern Blot) 57 1.2.5. Hybridation et dtection des IS 57

    1.3. Spoligotypage 57 1.3.1. Prparation de la membrane 58 1.3.2. Lamplification 59 1.3.3. Lhybridation 59

    1.4. MIRU-VNTR 60 1.4.1. Amplification 60

    1.4.1.1. 5 ETR et 12 MIRU-VNTR 60 1.4.1.2. QUB 11a, 11b, 18, 26, 1451, 1895 et 4156 60 1.4.1.3. Mtub 04 et 21, 29 et 34, 30 et 39 60

    1.4.2. Dtermination du nombre de copies 62 1.5. Etude de la rgion NTF 62

    2. Exploitation des donnes pidmiologiques et des profils de gnotypage obtenus 63 2.1. Analyses statistiques 63

  • 5

    2.2. Calcul du pouvoir de discrimination ou index de Hunter-Gaston (HGDI) 63 2.3. Calcul des taux de souches en grappes et de transmission rcente 63 2.4. Les bases de donnes de gnotypage du bacille tuberculeux : SpolDB4 et SITVIT2 64

    2.4.1. Prsentation gnrale 64 2.4.1.1. SpolDB4 64 2.4.1.2. SITVIT2 64

    2.4.2. Entre, analyse et exploitation des donnes 65 2.4.2.1. Entre de donnes 65 2.4.2.2. Analyse et exploitation des donnes 65

    2.4.3. Autres bases de donnes de gnotypage 67 2.5. Arbres phylogntiques 67

    Chapitre I : Epidmiologie molculaire 69

    1. Epidmiologie classique et pidmiologie molculaire 69 1.1. Epidmiologie classique 69

    1.1.1 Prvalence 69 1.1.2. Taux dincidence 70 1.1.3. Mortalit / Morbidit 70

    1.2. Epidmiologie molculaire 70 1.2.1. Principe 70 1.2.2. Dfinition dune grappe 71 1.2.3. Taux de transmission rcente et taux de souches en grappe 71 1.2.4. Dynamique de transmission de la tuberculose 72 1.2.5. Epidmiologie molculaire et programmes de lutte contre la tuberculose 72

    2. Le modle des DFA : un modle insulaire faible incidence vs un modle continental forte incidence

    73

    2.1. Ltude de lpidmie de 2004 2005 et apport des nouveaux marqueurs de typage (Article 1) 74

    2.1.1. Prsentation de ltude 74 2.1.2. Rsultats 75

    2.1.2.1. Incidence 75 2.1.2.2. Sex-ratio et ge des patients 75 2.1.2.3. Pays dorigine et taux de co-infection VIH/tuberculose 76 2.1.2.4. Rsistances aux antibiotiques 76 2.1.2.5. Profils de spoligotypage 76 2.1.2.6. Profils 12-locus MIRU-VNTR 77 2.1.2.7. Combinaison du spoligotypage et des profils 12-locus MIRU-VNTR 78

    2.1.3. Conclusion et perspectives 81 2.2. Le suivi de lpidmie de tuberculose en Guadeloupe (Articles 2 et 3) 82

    2.2.1. Prsentation de ltude 82 2.2.2. Rsultats 82

    2.2.2.1. Sex-ratio, ge, origine et profils de rsistance aux antituberculeux 82 2.2.2.2. Caractristiques socio-conomiques 83 2.2.2.3. Informations mdicales et dlais de prise en charge des patients 84 2.2.2.4. Gnotypage 86 2.2.2.5. Facteurs de risque de transmettre la tuberculose 87

    2.2.3. Conclusion et perspectives 89

  • 6

    3. Le modle continental europen : cas dun pays faible endmicit (la Sude) (Article 4)

    89

    3.1. Prsentation de ltude 89 3.2. Rsultats 90

    3.2.1. Origine des patients 90 3.2.2. ge et sexe des patients 90 3.2.3. Manifestations cliniques de la maladie 91 3.2.4. Origine des patients, manifestations cliniques et profils de gnotypage des souches 91 3.2.5. Rsistance aux antituberculeux 95

    3.3. Conclusion et perspectives 95

    Chapitre II : Marqueurs gntiques des souches de la famille Beijing 97

    1. Prsentation de la famille Beijing 97

    2. Slection de marqueurs gntiques pour une meilleure discrimination des souches de la famille Beijing

    101

    2.1. Slection de marqueurs gntiques pour les souches de la famille Beijing circulant au Japon (Article 5) 101

    2.1.1. Prsentation de ltude 101 2.1.2. Rsultats 102

    2.1.2.1. Donnes pidmiologiques et profils de rsistance 102 2.1.2.2. Spoligotypage 103 2.1.2.3. Gnotypage des souches nappartenant pas la famille Beijing 103 2.1.2.4. Gnotypage des souches de la famille Beijing 105

    2.1.3. Conclusion et perspectives 105 2.2. Slection de marqueurs gntiques pour les souches de la famille Beijing circulant en Russie (Article 6)

    106

    2.2.1. Prsentation de ltude 106 2.2.2. Rsultats 107

    2.2.2.1. Gnotypage du premier chantillon de souches 107 2.2.2.2. Gnotypage du deuxime chantillon de souches 107

    2.2.3. Conclusion et perspectives 108

    3. Structure de la population de souches de la famille Beijing au Japon 109 3.1. Structure de la population de souches de la famille Beijing Kobe base sur 12-locus MIRU-VNTR

    109

    3.2. Structure de la population de souches de la famille Beijing Okinawa base sur 12, 15 et 24-locus MIRU-VNTR (Article 7) 116

    Chapitre III : Une premire tude de la biodiversit gnotypique de la tuberculose dans la Carabe et les pays limitrophes

    119

    1. La Carabe 119 1.1. Prsentation de lespace cariben 119 1.2. Epidmiologie de la tuberculose dans la Carabe et en Amrique latine (Article 8) 123

    1.2.1. Prsentation de ltude 123 1.2.2. Rsultats 123

    1.2.2.1. Echantillons, culture, identification 123

  • 7

    1.2.2.2. Donnes dmographiques, pidmiologiques et profils de rsistance des isolats de M. tuberculosis

    124

    1.2.2.3. Gnotypage 126 1.2.3. Conclusion et perspectives 128

    2. Trinidad-et-Tobago 129 2.1. Prsentation de Trinidad-et-Tobago 129 2.2. Etude de lpidmie de tuberculose Trinidad-et-Tobago (Articles 9 et 10) 130

    2.2.1. Prsentation de ltude 130 2.2.2. Rsultats 131

    2.2.2.1. Caractrisation des patients tuberculeux de Trinidad-et-Tobago. 131 2.2.2.2. Gnotypage des isolats cliniques de Trinidad-et-Tobago 131

    2.2.3. Conclusion et perspectives 134

    Conclusion et perspectives 135

    Rfrences bibliographiques 141

  • 9

    Liste des abrviations Franais Anglais

    ADN : Acide Dsoxyribonuclique AEC : Association des tats de la Carabe AMK : Amikacine ARN : Acide Ribonuclique BAAR : Bacilles Acido-Alcoolo Rsistants BCG : Bacille de Calmette et Gurin BET : Bromure dEthidium CD4+ : Cluster de diffrentiation 4 (Glycoprotine) CPM :Capreomycine CSHPF : Conseil Suprieur dHygine Publique de France CTAB : ctyl-trimthyl-ammonium-bromide (N-ctyl-N,N,N,-trimthyl-ammonium bromide) DFA : Dpartements Franais dAmrique DMSO : Dimthylsulfoxyde dNTP : Dsoxyribonucloside triphosphate EDTA : Acide thylne-diamine-ttra-actique EMB : Ethambutol ETH : Ethionamide FQ : Fluoroquinolone IDR : Intradermoraction INH : Isoniazide INSEE : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques IPG : Institut Pasteur de Guadeloupe KM : Kanamycine ODESSA : Observatoire Dpartemental Social et Sanitaire OMS: Organisation Mondiale de la Sant ORSaG : Observatoire Rgional de la Sant de Guadeloupe Pb : Paires de bases PIB : Produit Intrieur Brut PIT : Primo-infection Tuberculeuse PZA : Pyrazinamide RIF : Rifampicine SM : Streptomycine TB : Tuberculose TBE : Tris-Borate-EDTA UV : Ultra-Violets VIH : Virus de lImmunodficience Humaine

    CAS : Central-Asian DOTS : Directly Observed Treatment, Short-course DR : Direct Repeat EAI : East-African-Indian ETR : Exact Tandem Repeat Ipl : Insertion Preferential Locus IS : Insertion Sequence LAM : Latin-American-Mediterranean LSP : Large Sequence Polymorphism MAC : M. avium-M. intracellulare complex MDR : MultiDrug-Resistant MGIT : Mycobacteria Growth Indicator Tube MLVA : Multiple Locus VNTR Analysis MOTT : Mycobacteria Other Than Tuberculosis MTbC : Mycobacterium tuberculosis Complex NTM: Nontuberculous Mycobacteria NTP: National Tuberculosis control Program PCR : Polymerase Chain Reaction PGG : Principal Genetic Group QUB : Queens University Belfast RFLP : Restriction Fragment Length Polymorphism TbD1: M. tuberculosis specific deletion 1 VNTR : Variable Number of Tandem Repeats XDR : Extensively Drug-Resistant

  • 10

    Liste des tableaux Tableau 1: Schmas thrapeutiques prconiss par lOMS Tableau 2: Gnes de rsistance des bactries du complexe M. tuberculosis et principales mutations

    identifies

    Tableau 3: Dfinition des trois Groupes Gntiques Principaux (PGG) selon le polymorphisme du codon 463 du gne katG et du codon 95 du gne gyrA

    Tableau 4: Les 62 lignes identifies par spoligotypage

    Tableau 5 : Liste des marqueurs minisatellites (locus et nom) tudis pour le gnotypage de M. tuberculosis Tableau 6: Grappes identifies lors du gnotypage des 54 isolats de M. tuberculosis collects en Guadeloupe

    par combinaison du spoligotypage et des profils 12-locus MIRU-VNTR en 2004-2005

    Tableau 7: Grappe identifie lors du gnotypage des 32 isolats de M. tuberculosis collects en Martinique par combinaison du spoligotypage et des profils 12-locus MIRU-VNTR en 2004-2005

    Tableau 8: Grappe identifie lors du gnotypage des 90 isolats de M. tuberculosis collects en Guyane franaise par combinaison du spoligotypage et des profils 12-locus MIRU-VNTR en 2004-2005

    Tableau 9: Grappe identifie lors du gnotypage des 176 isolats de M. tuberculosis collects dans les trois DFA par combinaison du spoligotypage et des profils 12-locus MIRU-VNTR en 2004-2005

    Tableau 10: Profils de spoligotypage obtenus pour les 129 isolats cliniques de M. tuberculosis de ltude et comparaison avec la base de donnes SITVIT2

    Tableau 11: Prsentation des diffrents minisatellites et des combinaisons de locus utiliss pour ltude des souches de M. tuberculosis isoles Okinawa

    Tableau 12: volution phylogntique probable de spoligotypes dont les profils MIRU sont identiques Tableau 13: Liste des 1002 souches de la famille Beijing slectionnes dans SITVIT2 pour la ralisation du

    MST et leur origine gographique

    Tableau 14: Profils de spoligotypage obtenus pour les 1255 souches de M. tuberculosis en grappe de Kobe Tableau 15: Profils de spoligotypage obtenus pour les 136 souches de M. tuberculosis collectes Okayama Tableau 16: Profils de spoligotypage obtenus pour les 101 souches de M. tuberculosis collectes Okinawa Tableau 17: Diversits allliques observes pour les souches de la famille Beijing par spoligotypage Tableau 18: Donnes gographiques, dmographiques et conomiques concernant les 38 tats et territoires

    composant lespace cariben

  • 11

    Liste des figures Figure 1: Incidence de la tuberculose estime par pays en 2009 Figure 2: Classification des mycobactries Figure 3: Mycobactries du complexe Mycobacterium tuberculosis en microscopie lectronique

    balayage (MEB) Figure 4: Formation et progression du granulome lors dune infection M. tuberculosis Figure 5: Frottis faisant apparatre des BAARs par coloration lAuramine O (A) ou selon la mthode de

    Ziehl-Nelsen (B) Figure 6: Le locus DR (M. bovis BCG) Figure 7: Schma reprsentant la position des 41 locus MIRU-VNTR dcrits par P. Supply et al. (2000)

    [253] sur le chromosome de la souche de rfrence H37Rv de M. tuberculosis Figure 8: Comparaison de quatre phylognies globales de M. tuberculosis bases sur: (A) une

    combinaisons de sSNP tels que dfinie par Backer et al., 2004 [16] ; (B) les marqueurs LSP (Gagneux et al., 2006 [101]) ; (C) le polymorphisme nuclotidique du codon 493 du gne katG et du codon 95du gne gyrA (Sreevatsan et al., 1997 [240]), une combinaison de SNP telle que prsente par Filliol et al., 2006 [95]

    Figure 9: Distribution phylogographique des souches du complexe M. tuberculosis Figure 10: Chemin volutif des bacilles tuberculeux propos par Roland Brosch et al. (2002) [33] bas sur

    la prsence ou labsence de rgions de dltions et le polymorphisme de 5 gnes spcifiques Figure 11: Reprsentation du chromosome de M. tuberculosis avec la localisation de trois principaux

    marqueurs de gnotypage : les squences dinsertion IS6110, le locus DR, et les minisatellites MIRU-VNTR (daprs Barnes et al., 2003 [18])

    Figure 12: tapes du spoligotypage mis au point par Kamerkeek et al. (1997) [144] Figure 13: Etapes dobtention de numrisation et dexploitation des donnes de gnotypage Figure 14: Dfinition des dlais de diagnostic de la tuberculose [90] Figure 15 Sex-ratios observs travers le monde pour tous les nouveaux cas de tuberculose frottis

    positifs notifis en 2007 daprs les chiffres publis par lOMS [201] Figure 16a: Proportions de tuberculoses pulmonaires et extrapulmonaires (P/E ratio) observes par clade

    pour les patients originaires dEurope et dAfrique

    Figure 16b: Proportions de tuberculoses pulmonaires et extrapulmonaires (P/E ratio) observes par clade pour les patients originaires du Moyen orient et dAsie

    Figure 17: Phylognie des souches de la famille Beijing. La rgion de dltion RD105 dfinit la ligne Est-Asiatique au sein de laquelle la famille Beijing se caractrise par la dltion RD207, correspondant la perte des espaceurs n1 34 du locus DR

    Figure 18: Schma descriptif de la rgion NTF du gnome de M. tuberculosis avec localisation des couples damorces utilises (MDR-6 et MDR-7) pour lamplification des sites potentiels dinsertion des squences IS6110 (daprs Plikaytis et al., 1994 [213])

    Figure 19: Arbre dcisionnel pour linterprtation des rsultats lors de lamplification des sites potentiels dinsertion des squences IS6110 dans la rgion NTF du gnome de M. tuberculosis

    Figure 20: Localisation dOkinawa dans larchipel des Ryky au Japon Figure 21: Carte du Japon Figure 22: Distribution gographique des diffrents clades observs au Japon dans les villes de Kobe,

    dOkayama et dOkinawa Figure 23: MST tabli partir des profils 12-locus MIRU-VNTR de 1002 souches de la famille Beijing Figure 24: Les 38 tats et territoires de lespace Carabe Figure 25: Localisation gographique de Trinidad et Tobago

  • 13

    Introduction

    1. La tuberculose dans le monde, un problme de sant publique

    1.1. Epidmiologie globale de la maladie

    Eleve par lOMS en 1993 au rang durgence mondiale, la tuberculose est, avec le virus de

    limmunodficience humaine (VIH) et le paludisme, lune des premires causes mondiales de mortalit par

    maladie infectieuse. En 2009, le bacille tuberculeux, Mycobacterium tuberculosis, a t responsable de la

    mort de plus de 1,7 millions de personnes, soit 4700 dcs par jour [296]. Cette mme anne, lOMS a

    dnombr plus de 9,4 millions de nouveaux cas de tuberculose. La distribution mondiale des cas de

    tuberculose montre que la grande majorit dentre eux survient en Asie (55%) et en Afrique (30%) ; lInde,

    la Chine, lAfrique du Sud, le Nigria, et lIndonsie comptant eux seuls prs de la moiti des cas de

    tuberculose estims en 2009 (4,7 millions ou 49,8% des cas ; Figure 1).

    Figure 1 : Incidence de la tuberculose estime par pays en 2009 [296]

    53Afghanistan65Cambodge

    * Incidence estime exprime en nombre de cas en milliers [296]

    80Tanzanie

    87Brsil

    93Zimbabwe

    93Thalande94Mozambique

    96Uganda

    120Kenya

    150Russie

    180Vietnam

    200Myanmar250RD du Congo

    260Philippines300thiopie

    360Bangladesh

    420Pakistan

    430Indonsie

    460Nigria490Afrique du sud

    1300Chine

    2000Inde

    INCIDENCE*PAYS

    53Afghanistan65Cambodge

    * Incidence estime exprime en nombre de cas en milliers [296]

    80Tanzanie

    87Brsil

    93Zimbabwe

    93Thalande94Mozambique

    96Uganda

    120Kenya

    150Russie

    180Vietnam

    200Myanmar250RD du Congo

    260Philippines300thiopie

    360Bangladesh

    420Pakistan

    430Indonsie

    460Nigria490Afrique du sud

    1300Chine

    2000Inde

    INCIDENCE*PAYS

  • 14

    En 2009, les taux de tuberculoses rsistantes aux traitements antituberculeux sont les plus importants jamais

    rapports avec 3,3% de souches multirsistantes (MDR) parmi les nouveaux cas de tuberculose, soit

    440 000 cas, et un taux record de 28,3% de souches MDR atteint en Russie [296]; la tuberculose

    multirsistante se dfinissant comme une tuberculose rsistant lisoniazide et la rifampicine, les deux

    mdicaments les plus importants utiliss pour le traitement de cette maladie. Quatre-vingt-six pourcent des

    souches MDR provenaient de 27 pays dont 15 pays europens [296] et lOMS a par ailleurs estim que

    5,4% dentre elles taient extrmement rsistantes (XDR) ; la tuberculose XDR se dfinissant comme une

    tuberculose MDR rsistant une fluoroquinolone ainsi qu au moins un des trois antituberculeux de

    seconde intention injectables (capreomycine, kanamycine et amikacine).

    1.2. Facteurs expliquant cette propagation et moyens de lutte

    1.2.1. Lpidmie de VIH/Sida

    Lpidmie de VIH/Sida a t lorigine de la rmergence de la tuberculose dans les annes 1980,

    notamment dans les pays africains [59, 81], linfection par le VIH favorisant lvolution dune tuberculose

    latente en tuberculose maladie active et donc contagieuse, et M. tuberculosis stimulant les rplications du

    virus VIH et lvolution naturelle du sida [59, 189]. De plus, les patients porteurs du VIH semblent

    prsenter un risque accru dtre infects et/ou rinfects par une souche de M. tuberculosis par comparaison

    avec une tuberculose simple [64, 273, 274]. La co-infection VIH/ tuberculose est dautant plus

    problmatique que le diagnostic de la tuberculose par injection de drivs de protines purifies

    (intradermoraction) nest pas fiable chez les patients porteurs du VIH dont le taux de lymphocytes T

    CD4+ est infrieur 200/l et que coexistent chez ces patients deux formes de tuberculose, pulmonaire et

    dissmine [189].

    Enfin, lexistence dinteractions mdicamenteuses entre les traitements utiliss contre ces deux maladies,

    notamment entre la rifampicine, antituberculeux majeur, et de nombreux antirtroviraux, vient compliquer

    le traitement de ces patients [241]. Actuellement, laugmentation du nombre de cas de co-infection

    VIH/tuberculose aggrave considrablement la situation de la tuberculose dans le monde en favorisant

    notamment lmergence et la circulation de bacilles tuberculeux MDR. On estime quen 2009 12% des

    nouveaux cas de tuberculose (soit 1,1 millions de cas) taient VIH-positifs, majoritairement localiss en

    Afrique (80%) [296].

  • 15

    1.2.2. Lmergence et la propagation de souches rsistantes aux

    antituberculeux

    Parmi les facteurs ayant favoris lpidmie actuelle de tuberculose, lapparition puis la circulation de

    bacilles tuberculeux rsistants aux traitements mdicamenteux a jou un rle important. Les facteurs

    pouvant expliquer lmergence et la propagation des souches rsistantes sont lutilisation de traitements

    inappropris, la mauvaise observance de ces traitements ou encore lutilisation de mdicaments de

    mauvaise qualit [302]. Peu de temps aprs la dcouverte et lutilisation des premiers antituberculeux, des

    cas de tuberculoses rsistantes ont t dcrits conduisant la mise en place de traitements bass sur

    lassociation de plusieurs molcules.

    Malgr cette mesure, et du fait de la rmergence des cas de tuberculose dans les annes 1980, la

    proportion de souches rsistantes est de nos jours un problme majeur dans la lutte contre la maladie. En

    effet, lincidence moyenne mondiale des souches rsistantes au moins un antituberculeux est estime

    11,1% et varie de 0% en Islande 22,3% en Azerbadjan [305]. Les souches MDR sont plus complexes

    traiter et ncessitent des traitements plus longs (jusqu 2 ans), plus onreux (jusqu 100 fois le prix dun

    traitement dune souche sensible) et defficacit rduite par comparaison aux souches sensibles

    (http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs104/fr/print.html).

    On estime ainsi que les patients infects par une souche MDR ont un risque plus lev de mourir de leur

    tuberculose que ceux porteurs dune souche sensible aux antituberculeux, des taux de gurisons variant de

    11% 60% ayant t dcrits pour des tuberculoses MDR contre 63% 90% de gurison pour des

    tuberculoses dclares comme sensibles [84].

    1.2.3. Autres facteurs

    Laccroissement dmographique, laugmentation de la pauvret, le manque daccs aux soins, le manque de

    moyens financiers, logistiques et humains, labsence ou la dsorganisation des programmes de contrle de

    la maladie, le dsengagement des pouvoirs publics sont autant de facteurs qui ont contribu la

    transmission et la propagation de la tuberculose dans le monde et dont certains figurent parmi le plan de

    lutte Halte la tuberculose mis en place par lOMS.

  • 16

    1.3. Moyens de lutte

    1.3.1. DOTS et Halte la tuberculose

    En 1995, soit 2 ans aprs avoir reconnu la tuberculose comme urgence mondiale, et devant

    lampleur de lpidmie, lOMS met en place une stratgie de lutte contre la tuberculose reposant sur le

    traitement chimio-prophylactique standardis de courte dure des patients ou stratgie DOTS (Directly

    Observed Treatment, Short-course). Les objectifs principaux annoncs de ce plan de lutte taient la

    dtection de 70% des cas de tuberculose maladie et la gurison de 85% dentre eux dici lan 2000 lequel

    reposait sur 5 principes :

    - Lengagement des gouvernements et des pouvoirs public

    - Un dpistage de qualit reposant sur lexamen direct de frottis

    - Un traitement normalis des patients avec surveillance directe de la prise du traitement

    - Lapprovisionnement ininterrompu en antituberculeux de qualit

    - Le suivi et lvaluation des effets de la mise en place du programme DOTS

    En 2001, aprs des rsultats encourageants obtenus avec la stratgie DOTS mais face la dgradation de la

    situation pidmique dans certains pays dAfrique et dEurope de lest notamment, lOMS dcide de

    renforcer la stratgie DOTS et lance le plan mondial halte la tuberculose visant un monde sans

    tuberculose et dont lobjectif principal est de rduire drastiquement lincidence de la maladie dans le

    monde dici 2015. La tuberculose sera considre comme radique lorsque son incidence passera en

    dessous du seuil de un cas pour 1 000 000 dhabitants par an [303]. Ainsi, le programme propose de lutter

    contre les principaux facteurs favorisant la propagation de la maladie et sorganise en six lignes directrices:

    - Poursuivre lextension du programme DOTS,

    - Lutter contre les cas de co-infection tuberculose/VIH et les tuberculoses multirsistantes aux

    traitements mdicamenteux,

    - Contribuer au renforcement des systmes de sant

    - Impliquer lensemble des soignants

    - Donner des moyens dagir aux malades et aux communauts,

    - Renforcer la recherche

    Enfin, la tuberculose est une maladie sociale refltant souvent la dgradation des conditions de vie dune

    population. De ce fait, une tude rcente a suggr que les plans de lutte contre cette pidmie intgrent

    aussi, et cest l une difficult, la lutte contre les facteurs de risque de contracter et de dvelopper la

  • 17

    maladie, incluant les conditions de vie et de travail dgrades, la malnutrition, le tabac, le diabte,

    lalcoolisme, et la pollution de lair [59, 164].

    1.3.2. BCG

    Mis au point entre les annes 1908 et 1921, le vaccin prpar partir du Bacille de Calmette et Gurin

    (BCG) est, encore actuellement, le seul disponible contre la tuberculose humaine. La vaccination par le

    BCG consiste injecter par voie intradermique des bacilles tuberculeux bovins attnus par 230 passages

    successifs sur un milieu base de pomme de terre glycrine, de manire stimuler une raction

    immunitaire mdiation cellulaire et humorale de lorganisme sans pour autant provoquer la maladie [3].

    Inject ds la naissance ou pendant lenfance, il protge lindividu pendant 50 60 ans mais avec une

    efficacit dcroissante au cours du temps et extrmement variable selon la zone gographique considre et

    la localisation de la maladie [10, 14].

    Le vaccin BCG confre une meilleure protection contre les formes graves de tuberculose (milliaire,

    extrapulmonaire ou mninge) que contre les formes pulmonaires. Il nempche pas la survenue dune

    primo-infection tuberculeuse, et encore moins la ractivation dune tuberculose pulmonaire latente. Son

    effet sur la transmission du bacille tuberculeux est par consquent limit. Nanmoins lOMS maintient ses

    recommandations concernant la vaccination systmatique des enfants ds la naissance dans les pays forte

    prvalence de tuberculose du fait de leffet protecteur avr du vaccin BCG contre la mningite

    tuberculeuse et la tuberculose dissmine chez lenfant [292].

    En France, depuis juillet 2007 et sur avis du Comit Suprieur dHygine Publique de France (CSHPF) du

    9 mars 2007, la vaccination des enfants et adolescents par le vaccin BCG nest plus obligatoire mais reste

    fortement recommande pour les enfants les plus exposs et rpondant au moins lun des critres suivants

    (http://www.sante.gouv.fr/vaccinations-par-le-bcg-nouvelles-recommandations.html) :

    - enfant n dans un pays de forte endmie de tuberculose (selon les chiffres publis par lOMS),

    - enfant dont au moins l'un des parents est originaire de lun de ces pays,

    - enfant devant sjourner au moins un mois daffile dans lun de ces pays,

    - enfant ayant des antcdents familiaux de tuberculose,

    - enfant rsidant en le-de-France ou en Guyane franaise,

    - enfant dans toute situation juge par le mdecin risque d'exposition au bacille tuberculeux

    notamment enfants vivant dans des conditions de logement dfavorables (habitat prcaire ou

    surpeupl) ou en contact rgulier avec des adultes originaires dun pays de forte endmie.

  • 18

    1.3.3. Traitements

    Les objectifs principaux du traitement par chimiothrapie de la tuberculose sont :

    - de gurir le malade,

    - dviter quil ne dcde dune tuberculose volutive ou de ses effets tardifs,

    - dviter les rechutes,

    - de rduire la transmission de la tuberculose dautres personnes,

    - dviter lapparition dune rsistance acquise aux antituberculeux.

    Pour atteindre ces objectifs, le traitement de la tuberculose repose sur lassociation de plusieurs

    antibiotiques antituberculeux, les principaux tant lisoniazide (INH), la rifampicine (RIF), la pyrazinamide

    (PZA), lthambutol (EMB), et la streptomycine (SM). Lassociation de plusieurs antituberculeux permet

    en effet de runir 3 proprits essentielles au traitement : un effet bactricide (INH, RIF, PZA, SM), un

    effet strilisant (RIF) et la capacit de prvenir lapparition dune rsistance [298].

    LOMS a par ailleurs dfini des schmas thrapeutiques normaliss adapts en fonction du type de

    tuberculose rencontr mais aussi en fonction des systmes de sant des pays qui auront les appliquer et de

    leurs moyens financiers disponibles. Ces schmas normaliss prsentent lavantage de :

    - rduire le risque derreur de prescription et par consquent, celui de lapparition dune

    pharmacorsistance,

    - faciliter lestimation des besoins en mdicaments ainsi que lachat, la distribution et la surveillance

    des mdicaments,

    - simplifier la formation du personnel,

    - rduire les cots,

    - favoriser un approvisionnement rgulier en mdicaments lorsque des patients se dplacent dune

    rgion une autre.

    2. Pathogense et volution de la maladie

    2.1. Agent responsable

    Lhistoire de la tuberculose est troitement lie celle de lhomme puisque la maladie est dj mentionne

    par les textes des mdecines grecque, chinoise, gyptienne et indienne plus de 2000 ans auparavant [65, 66].

    Trois formes principales de tuberculose ont t identifies par les historiens : le mal de Pott dont les

    squelles caractristiques au niveau des vertbres ont t retrouves chez des momies en Egypte, les

  • 19

    scrofules correspondant des ganglions infects au niveau du cou avec coulement de pus, mentionns

    dans des textes du Moyen ge, et la tuberculose pulmonaire dont lpidmie commena au XVIIme sicle

    pour devenir la principale cause de dcs chez les adultes au XVIIIme. La maladie actuellement appele

    tuberculose pulmonaire portait au XVIIme et XVIIIme sicle les noms de phtisie pulmonaire ou de

    consomption, les deux appellations, dorigine grecque et latine respectivement, signifiant un

    amaigrissement excessif, un dcharnement.

    Au cours du temps, diffrentes thories ont t mises pour expliquer la survenue dune phtisie pulmonaire

    dont lune supposait dj ds le XVIme sicle le caractre contagieux de la maladie. Ainsi, la tuberculose

    pulmonaire tait une maladie dclaration obligatoire Venise partir du milieu du XVIIIme sicle. Une

    autre thorie impliquait la faible nature, ltat maladif, les dispositions hrditaires, les comportements des

    patients tuberculeux mais aussi le climat dans le processus dapparition de la tuberculose pulmonaire. Ce

    nest finalement quen 1882, que le microbiologiste allemand Hermann Heinrich Robert Koch mit en

    vidence le lien existant entre la tuberculose humaine et lagent pathogne Mycobacterium tuberculosis

    quil nomme alors bacille de Koch (BK) [65, 66].

    Selon la classification actuelle, le genre Mycobacterium appartient la famille des Mycobacteriaceae, de

    lordre des Actinomycetales [105]. Ce genre regroupe plus de 120 espces diffrentes [263], classes en

    mycobactries atypiques (ou mycobactries non tuberculeuses) ou en mycobactries du complexe

    Mycobacterium tuberculosis (MTbC) (Figure 2). De nouvelles espces sont identifies chaque anne : entre

    2003 et 2006, plus de 30 nouvelles espces ont t dcrites [263]. Les mycobactries atypiques, si elles ne

    sont gnralement pas pathognes pour lhomme, peuvent tre sources dinfections chez les personnes

    immunodprimes. Elles se diffrencient du MTbC par leur moindre virulence et labsence de transmission

    dhomme homme. Une distinction particulire est cependant faite pour M. leprae, et M. ulcerans,

    responsables respectivement de la lpre et de lulcre de Buruli, puisque tout en tant pathognes elles

    nappartiennent pas au MTbC.

    La tuberculose chez lhomme est cause par les mycobactries du MTbC, principalement par M.

    tuberculosis mais aussi par M. africanum et M. bovis. Les cas de tuberculose M. africanum sont quasi-

    exclusivement rpertoris en Afrique de louest o ils peuvent reprsenter plus de la moiti des cas [27, 71,

    72, 73, 74, 119, 181]. M. bovis est responsable de la tuberculose bovine et peut contaminer dautres

    mammifres (chvres, moutons, chiens, chats, ) ainsi que lhomme [15, 75, 205]. Parmi les autres sous-

    espces du MTbC, M. caprae, M. microti et M. pinnipedii ont t isols respectivement chez les caprins [13,

    155], les rongeurs [47] et les mammifres marins [60], mais leur spcificit pour un hte dfini nest que

    relative puisque des souches de ces sous-espces ont t isoles chez certains autres mammifres, ainsi que

    chez lhomme [159, 202, 215, 280]. Enfin, M. canettii, est une sous-espce trs rare, majoritairement isole

    chez des patients originaires ou ayant sjourn en Afrique de lest [277]. En 2002, une nouvelle

  • 20

    classification des sous-espces du MTbC propose par Brosch et al., place M. canetti en position ancestrale,

    proche de lanctre commun du complexe [33].

    Figure 2 : Classification des mycobactries

    Les bactries du genre Mycobacterium sont arobies strictes, non sporulantes, et non motiles, en forme de

    btonnet ou lgrement incurves (Figure 3). Elles se caractrisent par leur acido-alcoolo-rsistance, la

    composition en acides mycoliques de leur paroi cellulaire ainsi que la proportion de cytosine et guanine de

    leur gnome (de 61 71% du gnome chez toutes les mycobactries lexception de M. leprae). Dune

    taille comprise entre 2 5 m sur 0,3 0,5 m, elles fixent difficilement la coloration de Gram et sont

    considres par dfaut comme bactries Gram positives.

    Rgne Bactries

    Genre Mycobacterium

    Famille Mycobacteriaceae

    Sous-ordre Corynebacterineae

    Ordre Actinomycetales

    Sous-classe Actinobacteridae

    Classe Actinobacteria

    Embranchement Actinobacteria

    Mycobactries atypiques

    Complexe M. tuberculosis

    (MTbC)

    M. lepraeM. ulcerans

    Rgne Bactries

    Genre Mycobacterium

    Famille Mycobacteriaceae

    Sous-ordre Corynebacterineae

    Ordre Actinomycetales

    Sous-classe Actinobacteridae

    Classe Actinobacteria

    Embranchement Actinobacteria

    Mycobactries atypiques

    Complexe M. tuberculosis

    (MTbC)

    M. lepraeM. ulcerans

  • 21

    Figure 3: Mycobactries du complexe M. tuberculosis en microscopie lectronique balayage (MEB)

    2.2. La maladie

    La tuberculose est une maladie contagieuse dont la transmission est interhumaine et se fait par voie

    arienne. Les poumons sont la fois la porte dentre des bacilles tuberculeux et lorgane de prdilection

    pour le dveloppement de la maladie. La contamination se fait par inhalation de gouttelettes infectantes, ou

    gouttelettes de Flgge, de taille infrieure 5 l, mises sous forme darosol par un patient contamin

    lorsque celui-ci tousse, crache ou ternue.

    Si les quelques bacilles contenus dans ces gouttelettes parviennent au niveau des alvoles pulmonaires, ils

    peuvent alors se multiplier et tre lorigine dune primo-infection tuberculeuse (PIT). Lors dune PIT, les

    bacilles tuberculeux ayant atteint les alvoles pulmonaires sont phagocyts par des macrophages dans

    lesquels ils vont survivre et pouvoir se multiplier. Aprs quelques jours de multiplication, les macrophages

    migrent passivement vers les ganglions satellites du foyer primaire par les vaisseaux lymphatiques. Il y a

    alors dissmination des bacilles tuberculeux dans lorganisme et activation des lymphocytes T. Une

    immunit cellulaire retarde se dveloppe, perceptible par le test cutan la tuberculine ou

    intradermoraction (IDR). Au niveau des alvoles pulmonaires, il se forme alors un granulome ou tubercule

    constitu dun noyau de macrophages infects dgnrs (pithliodes) ou fusionns, entour de

    lymphocytes T et dune couronne fibroblastique [225] (Figure 4). Au centre du granulome, contenant des

    bacilles tuberculeux quiescents, il peut apparatre une ncrose riche en lipides ou casum. Cette lsion nest

    gnralement pas reprable cliniquement (asymptomatique) ou par radiographie mais peut nanmoins tre

    dtecte par IDR.

    Source: http://phototheque.pasteur.fr (Mary Jackson et Stphanie Guadagnini, Microscopie ultrastructurale, 2004)

  • 22

    Pour les patients immunocomptents, on estime que dans 5% des cas, la PIT peut voluer en tuberculose

    maladie ou tuberculose patente dans les 2 ans qui suivent la primo-infection et que dans 5 autres pourcents,

    cette volution ne se fera que plusieurs annes plus tard [9, 80]. De nombreux facteurs influencent cette

    transition tels que lge du patient infect (enfants de moins de 15 ans et personnes ges) ou son statut

    immunitaire (personnes immunodprimes) [193]. Chez des patients immunodprims, cette volution est

    beaucoup plus frquente puisquon estime que 50% des patients immunodprims infects par M.

    tuberculosis dvelopperont une tuberculose maladie dans les deux ans suivant leur infection [9]. De plus, il

    a t montr quun taux de 5 10% des patients porteurs dune tuberculose latente et contractant le VIH

    dveloppent une tuberculose maladie par an [52, 80], soulignant ainsi la complexit de lassociation

    existant entre le VIH et M. tuberculosis. Certains autres facteurs, lis aux conditions de vie et aux pratiques

    addictives des patients infects, peuvent favoriser cette transition, tels que la malnutrition, lalcoolisme, le

    tabagisme, la prcarit, la toxicomanie, ou le diabte [9]. Enfin, la charge bactrienne, la pathognicit et la

    virulence de la population bactrienne, et les facteurs gntiques de susceptibilit de lhte pourraient aussi

    intervenir dans lvolution de la primo-infection la tuberculose maladie [153].

    Figure 4: Formation et progression du granulome lors dune infection M. tuberculosis (daprs Russel, 2007 [225])

    Macrophage alvolaire

    Mycobacteriumtuberculosis

    Macrophages alvolaires infects

    Vaisseau sanguin

    Monocytes

    Macrophage infectLymphocyte

    Macrophage fusionn

    MacrophageVaisseaux sanguins

    Macrophagefusionn

    Lymphocyte

    Macrophage

    Couronne fibroblastique

    Mycobactries libresGranulome ncrotique caseux

    Macrophage alvolaire

    Mycobacteriumtuberculosis

    Macrophages alvolaires infects

    Vaisseau sanguin

    Monocytes

    Macrophage infectLymphocyte

    Macrophage fusionn

    MacrophageVaisseaux sanguins

    Macrophagefusionn

    Lymphocyte

    Macrophage

    Couronne fibroblastique

    Mycobactries libresGranulome ncrotique caseux

  • 23

    Lors de la transition de la tuberculose latente en tuberculose pulmonaire, il y a volution du granulome par

    liqufaction du casum et cration dune cavit trs riche en bacilles tuberculeux viables. Les bacilles

    retrouvent des conditions favorables leur volution (prsence doxygne), et reprennent leur

    multiplication. Ils envahissent alors lensemble des bronches entranant une raction inflammatoire intense

    provoquant toux et expectoration chronique. Cest ce stade que le patient est le plus contagieux [148].

    Aprs dissmination via la circulation sanguine et lymphatique de bacilles tuberculeux, ceux-ci peuvent se

    dvelopper et provoquer des lsions dans de nombreux autres organes tels que les os (mal de Pott), les

    mninges (mningite tuberculeuse), les reins, etc. On parle alors de tuberculose extra-pulmonaire.

    3. Diagnostic et traitement de la maladie

    La suspicion dune tuberculose chez un patient, suite laltration gnrale de son tat de sant ou dans le

    cadre dun contexte pidmiologique favorable, conduira la mise en place dune dmarche diagnostique,

    la ralisation dexamens cliniques et bactriologiques puis, dans un certain nombre de cas, la mise sous

    traitement du patient.

    En France, la tuberculose est une maladie dclaration obligatoire, ainsi les cas probables ou confirms de

    tuberculose maladie chez ladulte ainsi que les cas dinfection tuberculeuse chez lenfant de moins de 15

    ans devront tre notifis

    (http://www.invs.sante.fr/surveillance/tuberculose/index.htm).

    3.1. Dmarche diagnostique

    Le diagnostic dune tuberculose doit tre voqu lors dune situation pidmique favorable ou en prsence

    dune personne prsentant des signes gnraux vocateurs de la maladie. Ainsi, le diagnostic de tuberculose

    sera privilgi pour les personnes en provenance dune zone forte prvalence de tuberculose, infectes par

    le VIH, ou encore sous traitement immunosuppresseur, ainsi que celles vivant dans lentourage dun patient

    tuberculeux. Nanmoins, quel que soit le contexte pidmiologique, laltration de ltat gnral dune

    personne avec perte de poids, asthnie, et fivre modre doit orienter le diagnostic vers une tuberculose,

    surtout si lensemble de ces signes persiste au-del de trois semaines. Ces signes gnraux peuvent aussi

    saccompagner de manifestations respiratoires telles quune toux persistante et de plus en plus frquente,

    une hmoptysie ou encore une dyspne [58].

    Dans le cas dune tuberculose latente, celle-ci ne saccompagne gnralement ni de symptmes, ni de

    signes cliniques, ni de signes radiologiques. Son diagnostic seffectue le plus souvent dans le cadre dun

  • 24

    contexte pidmiologique favorable (arrive en provenance dune pays forte endmicit de tuberculose,

    personnes infectes par le VIH, ) ou dune enqute de dpistage effectue dans lentourage dun patient

    ayant une tuberculose avre, et repose essentiellement sur lintradermo-raction (IDR) ou test de Mantoux.

    Plus rcemment, des tests bass sur la dtection in vitro du taux dinterfron gamma aprs stimulation des

    lymphocytes T par des antignes de M. tuberculosis ont t dvelopps, tels que T-SPOT.TB test (Oxford

    Immunotec Ltd) ou encore QuantiFERON-TB GOLD (Cellestis Ltd).

    Pour une tuberculose maladie, les signes cliniques viennent orienter le diagnostic, qui repose alors sur la

    radiographie des poumons, et sera confirme par des examens bactriologiques.

    3.2. Lexamen radiologique

    La radiographie pulmonaire permet dtablir le bilan initial des lsions thoraciques pouvant tre de

    morphologie et dtendue variable, sans rapport avec lintensit de la maladie. On retrouve trois types de

    lsions lmentaires : le nodule, linfiltrat et la caverne.

    Dans sa forme pulmonaire, la tuberculose se manifeste par la prsence dinfiltrats et de nodules

    principalement localiss dans les sommets des poumons et parfois associs des cavernes.

    3.3. Lintradermo-raction la tuberculine (Test de Mantoux)

    Lintradermo-raction (IDR) la tuberculine est une raction cutane dhypersensibilit retarde provoque

    par lafflux de lymphocytes T et de macrophages au niveau du site dinjection intradermique de tuberculine

    (antignes mycobactriens). Cette raction tmoigne de lexistence dune immunit mdiation cellulaire

    vis--vis des mycobactries chez le patient, induite soit par une vaccination pralable par le BCG, soit par

    un contact antrieur avec le BK ou certaines mycobactries atypiques.

    LIDR consiste injecter 0,10 ml de solution liquide de tuberculine dans le derme de la face antrieure de

    lavant bras et mesurer le diamtre de linduration induite aprs 72 heures. Le test sera positif si ce

    diamtre est suprieur 5 mm et trs positif sil est suprieur 10 mm. Dans ce deuxime cas, il y aura

    prsomption de tuberculose maladie.

    On parle de virage tuberculinique si quelques mois dintervalle (2 3 mois) le rsultat de lIDR

    initialement ngatif (10 mm). Ce cas de

    figure se rencontre gnralement lors denqute autour dun cas de tuberculose, et correspond alors un cas

    dinfection rcente.

    Il peut cependant arriver que lIDR reste ngative mme en cas de tuberculose maladie. Cest le cas chez

    les personnes ges, immunodprimes et les patients porteurs du VIH.

  • 25

    .

    Source: http://ntcc.ucsd.edu (Margaret A. Bartelt, Ph.D., MT(ASCP)SM, Diplomat A.B.M.M., Medical Technology Program, University of Arkansas for Medical Sciences).

    A B

    3.4. Confirmation du diagnostic : lexamen bactriologique

    La mise en vidence de la prsence de M. tuberculosis dans des prlvements biologiques constitue le

    vritable diagnostic de tuberculose. En cas de tuberculose pulmonaire, les examens bactriologiques seront

    pratiqus avant tout traitement sur lexpectoration du malade trois jours de suite. Ils peuvent aussi tre

    pratiqus sur des tubages gastriques (scrtions bronchiques dgluties) ou des aspirations bronchiques. Pour

    les patients chez lesquels une localisation extra-pulmonaire de la tuberculose est souponne, les

    prlvements seront faits en fonction de la localisation de la maladie.

    3.4.1. Lexamen direct

    Un frottis, ou talement du prlvement biologique sur lame mince est effectu, puis color afin de mettre

    en vidence la proprit spcifique des mycobactries : leur acido-alcoolo rsistance. Pour cela, deux

    mthodes peuvent tre utilises, la mthode de Ziehl-Neelsen, ou celle de lauramine (fluorochrome). La

    coloration de Ziehl-Neelsen fait apparatre les Bacilles Acido-Alcoolo-Rsistants (BAAR), sous forme de

    petits btonnets rouges isols ou en petits amas sur fond bleu, tandis quils apparatront comme de petits

    btonnets jaunes-verts brillants sur fond sombre avec la coloration lauramine (Figure 5).

    Figure 5: Frottis faisant apparatre des BAARs par coloration lAuramine O (A) ou selon la mthode de Ziehl-Nelsen (B)

    Il est important de souligner que lexamen direct de BAAR dans un prlvement biologique ne permet pas

    de faire la distinction entre M. tuberculosis et les autres mycobactries. De plus, cette mthode ne permet

    pas de dtecter la prsence de BAAR dans un prlvement biologique pauci bacillaire puisquil a en effet

    t montr que lexamen direct ne dtectait la prsence de BAAR qu partir de 0,5 1,1 bactries par

    microlitre de prlvement biologique [226].

  • 26

    3.4.2. La culture

    Seule une culture positive M. tuberculosis constitue une preuve formelle du diagnostic dune tuberculose.

    Celle-ci est pratique quelque soit le rsultat de lexamen microscopique. Elle seffectue, aprs une tape de

    dcontamination par homognisation des prlvements biologiques, sur milieu de culture enrichi, solide

    ou liquide. Ltape dhomognisation permet dobtenir un prlvement plus fluide et de dcontaminer

    lchantillon avant ensemencement des milieux de culture, afin que des bactries nappartenant pas au

    genre Mycobacterium ne contaminent la culture.

    Si la mise en culture sur milieu de Lwenstein-Jensen constitue la mthode la plus couramment utilise du

    fait de son faible cot et de sa grande sensibilit, les cultures sur milieux liquides tendent se dvelopper

    car ils permettent de rduire sensiblement les dlais de diagnostic. Lidentification des colonies

    bactriennes se dduit de la combinaison de proprits macroscopiques avec plusieurs outils dinvestigation,

    tels que les tests biochimiques, les sondes nucliques, et les tests bass sur lamplification gnique par PCR.

    Sur milieu de culture solide, les principales caractristiques macroscopiques tudies sont la vitesse

    dapparition de la colonie, le nombre de colonies, leur aspect rugueux ou lisse, la prsence ou non dune

    pigmentation, tandis que sur milieu liquide, cest laspect du frottis qui permet dorienter lidentification.

    Ainsi, sur milieu solide de Lwenstein-Jensen, les colonies de M. tuberculosis apparaissent en quatre six

    semaines, sont daspect rugueux dit en chou-fleur , de couleur crme et eugoniques, tandis que le frottis

    ralis partir de cultures en milieu liquide montre des colonies en corde ou en moustache avec trs peu de

    bactries isoles.

    3.4.3. Lidentification

    * Les tests biochimiques.

    Ils valuent la thermosensibilit de la catalase, la production de niacine, la rduction des nitrates, la

    croissance en prsence dacide thiophne-2-carboxylique (TCH), lactivit arylsulfatasique, lhydrolyse du

    Tween, lactivit -glucosidasique et lactivit urasique. Mycobacterium tuberculosis a une catalase

    thermolabile, produit de la niacine (ou acide nicotinique), rduit les nitrates, et pousse en prsence de TCH.

    Les autres tests biochimiques ont t dvelopps pour lidentification des mycobactries atypiques. Si

    lidentification nest toujours pas formelle ou par mesure de contrle, des outils supplmentaires existent

    tels que les sondes nucliques ou les tests bass sur la PCR.

  • 27

    * Les sondes nucliques.

    Le systme AccuProbe (Gen-Probe, San Diego, USA) est une technique dhybridation dune sonde

    molculaire sur une rgion cible situe au niveau du gne codant pour lARN 16S des mycobactries. Cette

    technique sutilise sur culture en milieu solide ou liquide. Il existe des sondes pour lidentification des

    mycobactries du complexe M. tuberculosis (MTbC), du complexe M. avium-M. intracellulare (MAC)

    ainsi que des espces M. kansasii et M. gordonae.

    * Tests bass sur lamplification gnique par PCR.

    Des tests ralisables partir de cultures liquides ou solides permettent la dtection lidentification de

    nombreuses espces mycobactriennes en trois tapes : une tape dextraction dADN, une tape

    damplification par PCR de rgions dintrt et une tape dhybridation inverse. Le test INNO-LiPA

    MYCOBACTERIA (Innogenetics) permet la dtection des bactries du genre Mycobacterium et

    l'identification de 16 espces mycobactriennes diffrentes. Lamplification gnique concerne la rgion

    codant lespace 16S-23S de lARN ribosomal et lidentification se fait par hybridation inverse des produits

    de PCR avec des sondes dADN biotinyles et immobilises sur des bandelettes. Le test Hain utilise lui

    aussi les principes de lhybridation inverse mais lamplification concerne des rgions diffrentes en

    fonction de lidentification souhaite : les sous-espces du complexe M. tuberculosis (GenoType MTBC),

    les mycoabctries atypiques communes (GenoType Mycobacterium CM (Common Mycobacteria)) ou les

    autres mycobactries atypiques (GenoType Mycobacterium AS (Additional Species)).

    * Autres dveloppements :

    - Les tests immuno-chromatographiques : permettent la dtection de lAntigne MPT64, protine

    uniquement secrte par les souches du MTbC ( S.D. BioLINE TB MPT64 Rapid , Standard Diagnostic

    et Capilia TB Neo , Tauns laboratories). Utilisables partir de colonies provenant de cultures sur milieu

    solide ou liquide, ils permettent une distinction rapide (en quelques minutes) entre les souches du MTbC et

    les mycobactries atypiques,

    - Les tests de dtection et didentification des mycobactries partir de prlvements biologiques :

    bass sur lamplification dADN (COBAS TaqMan MTB Test, Roche Diagnostics) ou dARN

    (AMPLIFIED MTD, Gen-Probe ; GenoType Mycobacteria Direct, Hain Lifescience), ils permettent

    didentifier les bactries du MTbC dans les prlvements examen direct positif en quelques heures.

    Cependant, ces tests restent moins sensibles que la mthode de rfrence qui ncessite la mise en culture

    des prlvements biologiques et seront donc principalement employs en premire intention pour un

    nombre restreint de situations qui auront t pralablement dfinies [48].

  • 28

    - GeneXpert MTB/RIF Assay (Cepheid) : mthode didentification des mycobactries du complexe

    MTbC et de dtection de la rsistance RIF par real-time PCR multi-colorimtrique. Lensemble de

    ractifs tant contenu sous forme lyophilise dans une cartouche prte lemploi, cette mthodologie rduit

    notablement les risques de contamination et de faux positifs inhrents aux outils de biologie molculaire

    [25, 26, 125].

    3.4.4. Antibiogramme

    Lantibiogramme ne constitue pas en lui-mme un acte de diagnostic de la tuberculose mais peut aider la

    dtermination de lespce incrimine en cas de prsence dune mycobactrie atypique.

    3.5. Traitement

    La tuberculose est une maladie dont on gurit si un traitement appropri est prescrit et que celui-ci est

    scrupuleusement respect par le malade.

    En fonction du cas de tuberculose rencontr (tuberculose maladie ou tuberculose latente), de sa localisation

    et de son degr de gravit, du rsultat du frottis (positif ou ngatif), des antcdents de traitement du patient,

    quatre schmas thrapeutiques distincts ont t dfinis par lOMS. Ces schmas tiennent par ailleurs

    compte de lge et de ltat de sant des patients tuberculeux (associations dautres maladies telles que le

    VIH), ainsi que du contexte global de prise en charge des patients tuberculeux (Tableau 1) [297].

    3.5.1. Chimio-prophylaxie

    On entend par chimio-prophylaxie le traitement prventif de patients ne prsentant pas les symptmes

    dune tuberculose mais ayant fait un virage tuberculinique rcent ou prsentant une IDR positive ainsi que

    de patients prsentant un risque accru de dvelopper une tuberculose (patients immunodprims par

    exemple) [8]. Le traitement prventif classique consiste en une prise quotidienne dINH en monothrapie

    pendant six neuf mois. Ce traitement a prouv son efficacit avec un taux de gurison suprieur 90%

    mais reste cependant associ de srieux effets indsirables tels que lhpatotoxicit [163].

  • 29

    Tableau 1: Schmas thrapeutiques prconiss par lOMS [298]

    Schmas thrapeutiques normaliss spcialement conus ou schmas individualiss

    Cas de tuberculose chronique ( frottis positif aprs retraitement sous surveillance) ; TB multirsistante avre ou suspecteix

    IV

    Optionnel4 (HR)3 ou 6 HE

    Optionnel2 (HRZE)3 ou 2 HRZE

    De prfrence4 (HR)4 (HR)3

    De prfrence2 HRZEviii

    Nouveaux cas de TBP frottis ngatif (autres que ceux de la catgorie I) ; formes de tuberculose extra-pulmonaire sans caractre de gravit

    III

    Optionnel5 (HRE)3

    Optionnel2 (HRZES)3/1 HRZE3

    De prfrence5 HREvi

    De prfrence2 HRZES /1 HRZEvi

    Dans les conditions suivantes : donnes reprsentatives de la surveillance des rsistances montrant une faible proportion de TB-MR ou tests de sensibilit tablissant la sensibilit du cas ou dans les conditions suivantes : mauvaises performances du programme absence de donnes reprsentatives de la surveillance des rsistances ressources insuffisantes pour instaurer des traitements de la catgorie IV

    Des schmas thrapeutiques normaliss spcialement conus ou des schmas individualiss sont souvent ncessaires pour ces patients

    Echec thrapeutique de la catgorie Ivii

    dans les conditions suivantes : bonnes performances du programme donnes reprsentatives de la surveillance des rsistances montrant une forte proportion de TB multirsistante et/ou moyens de faire des preuves de sensibilit individuelles disponibilit de schmas thrapeutiques de la catgorie IV

    Optionnel5 (HRE)3

    Optionnel2 (HRZES)3/1 HRZE3

    De prfrence5 HREvi

    De prfrence2 HRZES /1 HRZEvi

    Cas de TBP frottis positif prcdemment traits :- rechute- traitement aprs interruption

    II

    Optionnel4 (HR)3 ou 6 HEv

    Optionnel2 (HRZE)3 ou 2 HRZEiv

    De prfrence4 (HR)4 (HR)3

    De prfrence2 HRZEiii

    Nouveaux cas frottis positifs ; nouveaux cas de TBP frottis ngatif avec lsions parenchymateuses tendues ; Grave infection VIH concomitante ou formes svres de TB extrapulmonaireii

    I

    Phase de continuationPhase initiale

    Schmas thrapeutiquesi

    Cas concernsCatgorie

    de diagnostic

    Schmas thrapeutiques normaliss spcialement conus ou schmas individualiss

    Cas de tuberculose chronique ( frottis positif aprs retraitement sous surveillance) ; TB multirsistante avre ou suspecteix

    IV

    Optionnel4 (HR)3 ou 6 HE

    Optionnel2 (HRZE)3 ou 2 HRZE

    De prfrence4 (HR)4 (HR)3

    De prfrence2 HRZEviii

    Nouveaux cas de TBP frottis ngatif (autres que ceux de la catgorie I) ; formes de tuberculose extra-pulmonaire sans caractre de gravit

    III

    Optionnel5 (HRE)3

    Optionnel2 (HRZES)3/1 HRZE3

    De prfrence5 HREvi

    De prfrence2 HRZES /1 HRZEvi

    Dans les conditions suivantes : donnes reprsentatives de la surveillance des rsistances montrant une faible proportion de TB-MR ou tests de sensibilit tablissant la sensibilit du cas ou dans les conditions suivantes : mauvaises performances du programme absence de donnes reprsentatives de la surveillance des rsistances ressources insuffisantes pour instaurer des traitements de la catgorie IV

    Des schmas thrapeutiques normaliss spcialement conus ou des schmas individualiss sont souvent ncessaires pour ces patients

    Echec thrapeutique de la catgorie Ivii

    dans les conditions suivantes : bonnes performances du programme donnes reprsentatives de la surveillance des rsistances montrant une forte proportion de TB multirsistante et/ou moyens de faire des preuves de sensibilit individuelles disponibilit de schmas thrapeutiques de la catgorie IV

    Optionnel5 (HRE)3

    Optionnel2 (HRZES)3/1 HRZE3

    De prfrence5 HREvi

    De prfrence2 HRZES /1 HRZEvi

    Cas de TBP frottis positif prcdemment traits :- rechute- traitement aprs interruption

    II

    Optionnel4 (HR)3 ou 6 HEv

    Optionnel2 (HRZE)3 ou 2 HRZEiv

    De prfrence4 (HR)4 (HR)3

    De prfrence2 HRZEiii

    Nouveaux cas frottis positifs ; nouveaux cas de TBP frottis ngatif avec lsions parenchymateuses tendues ; Grave infection VIH concomitante ou formes svres de TB extrapulmonaireii

    I

    Phase de continuationPhase initiale

    Schmas thrapeutiquesi

    Cas concernsCatgorie

    de diagnostic

    i Les chiffres prcdant les schmas thrapeutiques indiquent la dure du traitement (en mois) avec les antibiotiques de premire ligne suivants : isoniazide (H), rifampicine (R), pyrazinamide (Z), thambutol (E), streptomycine (S). Les chiffres en indice indiquent la frquence de l'administration (nombre de jours par semaine). Leur absence signifie que les mdicaments doivent tre pris tous les jours. La supervision directe de l'ingestion des mdicaments est toujours requise au cours de la phase initiale du traitement, elle est fortement recommande pendant la phase d'entretien si celle-ci comporte de la rifampicine et elle est requise en cas d'administration intermittente du traitement. Les associations doses fixes sont fortement recommandes, pour la phase initiale comme pour la phase d'entretien.ii Une TB extrapulmonaire est juge svre sil en rsulte une menace aigu pour la vie du sujet, un risque de grave handicap, ou les deux (ex. TB mninge).iii On peut utiliser SM la place dEMB. En cas de tuberculose mninge, remplacer EMB par SM.iv On ne recommande pas le traitement intermittent pour la phase initiale, si l'on prvoit de prescrire INH et EMB pour la phase d'entretien.v On peut envisager ce schma thrapeutique dans le cas o le schma de prfrence ne peut tre administr suivant les recommandations. Ce schma s'associe nanmoins un taux plus lev d'checs et de rechutes, par rapport au schma 4HR pour la phase d'entretien. Le traitement intermittent n'est pas recommand pour la phase initiale s'il est suivi de 6HE pour la phase d'entretien.vi On prfre les traitements quotidiens. Toutefois, le traitement trihebdomadaire pendant la phase d'entretien ou pendant les deux phases est une option envisageable. vii Les checs thrapeutiques entranent une augmentation du risque de tuberculose multirsistante, en particulier si RIF a t prescrite pour la phase d'entretien. Pour ces cas, on recommande de procder des preuves de sensibilit si on en a la possibilit. Les cas d'checs prsentant une de tuberculose multirsistante connue ou suspecte doivent tre traits avec un schma thrapeutique de la catgorie IV.viii On peut omettre EMB pendant la phase initiale pour les patients VIH ngatifs prsentant une tuberculose pulmonaire limite, non cavitaire, frottis ngatif, les patients prsentant des formes de tuberculose extrapulmonaire sans caractres de gravit et les jeunes enfants prsentant une tuberculose primaire.ix On recommande de procder des preuves de sensibilit pour les patients en contact avec des cas de TB multirsistante.

  • 30

    3.5.2. Traitement de la tuberculose maladie

    Le traitement standardis de la tuberculose maladie, quelle soit pulmonaire ou extra-pulmonaire, dune

    dure de six mois, comporte deux phases. Pendant les deux premiers mois le traitement est une

    quadrithrapie associant INH, RIF, PZA, et EMB. Il sen suit une bithrapie dune dure de quatre mois

    alliant RIF et INH. Si la PZA ne peut tre administre, la phase de continuation sera prolonge de trois

    mois portant alors la dure totale du traitement neuf mois.

    3.5.3. Traitement de la tuberculose bacilles rsistants et multirsistants

    En dpit de sa toxicit, cest la dure du traitement, le plus souvent suprieure six mois, qui est lorigine

    de la mauvaise observance par les patients. Ce phnomne est le principal mode de slection des souches

    MDR voire XDR et ncessitera lemploi dantituberculeux de seconde ligne lors de la prise en charge du

    patient. Ces antituberculeux de seconde ligne (aminoglycosides, fluoroquinolones, acide para-

    aminosalicylique, thioamides) sont moins efficaces ou plus toxiques que les antituberculeux de premire

    intention rendant le traitement bien plus compliqu quen prsence dune souche tuberculeuse sensible [42,

    311].

    4. Rsistance et multirsistance aux antituberculeux

    4.1. Mcanismes de rsistance aux antibiotiques de premire ligne

    4.1.1. Isoniazide

    Lisoniazide (INH) est lantibiotique le plus largement utilis pour le traitement de la tuberculose maladie

    aussi bien que de la tuberculose latente, les souches de M. tuberculosis tant naturellement sensibles

    lINH [313]. LINH ncessite dtre active par une catalase peroxydase (code par le gne katG) pour tre

    efficace. Une fois active, elle inhibe alors la synthse des acides mycoliques de la paroi en interagissant

    avec lenzyme enoyl-ACP rductase code par le gne inhA, et favorise ainsi laccumulation de radicaux

    libres par la bactrie. Les mutations ponctuelles du gne katG, en empchant lactivation de lINH, sont un

    mcanisme principal de rsistance cet antibiotique et concernent de 50 95% des souches rsistantes

    INH [313]. Bien que de nombreuses mutations aient t dcrites pour le gne katG [234, 282], cest la

    mutation du codon 315 qui prdomine avec une occurrence comprise entre 60 et plus de 90% des souches

    rsistantes lINH [174, 175, 186, 197] (Tableau 2). Certains autres gnes de rsistance ont t identifis,

  • 31

    tels que inhA, ahpC, kasA, ndh, efpA ou encore la rgion promotrice de lopron mabA/inhA, notamment

    la mutation -15C/T, et la rgion promotrice du gne ahpC [20, 123, 197, 219, 220, 231, 243, 282, 309]. Ces

    mutations additionnelles, ne semblent pas confrer elles seules une rsistance INH, et pourraient

    permettre aux bactries de compenser le cot biologique de la rsistance INH [123].

    4.1.2. Rifampicine

    Utilise depuis 1966, la rifampicine (RIF) est avec lisoniazide un des antibiotiques majeurs du traitement

    de premire intention de la tuberculose. Lessentiel de la rsistance RIF est associ des mutations

    ponctuelles intervenant dans une rgion cible de 81 paires de bases (pb) ou rgion RRD (RIF Resistance

    Determining) du gne rpoB codant pour la sous-unit de lARN polymrase [312] (Tableau 2). En effet,

    plus de 95% des souches rsistantes RIF montrent une mutation dans cette rgion RRD [259, 309]. Les

    mutations les plus frquentes interviennent au niveau des codons 531, 526 et 516 et sont gnralement

    associes de hauts niveaux de rsistance tandis que celles intervenant au niveau des codons 511, 516, 518,

    et 522, ont t associes de faibles niveaux de rsistance [313].

    4.1.3. thambutol

    Lthambutol (EMB) inhibe la croissance bactrienne en interrompant la synthse darabinogalactane,

    composant indispensable de la paroi bactrienne [255]. Les mutations de lopron embCAB, codant pour

    une arabinosyl transfrase implique dans la synthse darabinogalactane, sont les principaux mcanismes

    actuellement identifis de rsistance EMB, notamment la mutation du codon 306 dembB [245, 260]

    (Tableau 2). Cette mutation a en effet t retrouve chez 47 68% des souches de M. tuberculosis

    prsentant de forts taux de rsistance EMB [245, 260, 312]. Cependant chez 25 35% des souches

    prsentant une faible rsistance EMB aucune rsistance na pu tre dtecte au sein de lopron embCAB,

    ce qui suggre lexistence dautres mcanismes de rsistance [5, 260].

  • 32

    Tableau 2: Gnes de rsistance des bactries du complexe M. tuberculosis et principales mutations identifies

    (a) daprs http://www.tbdreamdb.com/index.html, Pierre-Audigier C & Gicquel B. 2010. The contribution of molecular biology in diagnosing tuberculosis and detecting antibiotic resistance. (disponible sur http://www.eumednet-tb.org) et Zhang et al., 2009 [313]. (b) la rgion RRD (Rifampicine Resistance DeterminingRegion) est une zone de 81pb entre les codons 507 et 533 du gne rpoB. (c) la rgion QRD (Quinolones ResistanceDetermining Region) est une zone de 39pb entre les codons 67 et 106 du gne gyrA. ND : non disponible car les mutations identifies sont trop nombreuses ou non significativement associes une rsistance phnotypique.

    Antibiotique Gne cible Fonction du gne

    Position des mutations les plus

    frquemment dtectes (a)

    Antibiotiques de premire ligne

    INH katG Catalase peroxydase S315T inhA Enoyl-ACP rductase -15C/T -16A/G -8T/C -8T/A

    RIF rpoB Sous-unit de lARN polymrase C531T

    Rgion RRD (b)

    C531G C526T C526G A526G AC526TG T511C T511G C511G A516T G516T A518C C522T

    EMB embB arabinosyltransfrase G306A G306C G306T

    PZA pncA Amidase ND

    Antibiotiques de deuxime ligne

    SM rpsL Protine ribosomale S12 A43G A88G rrs ARN 16S ND

    AMK/KM rrs ARN 16S A1401G C1402T G1484T

    CPM rrs ARN 16S A1401G C1402T G1484T tlyA methyltransfrase ND

    FQ gyrA Sous-unit de lADN gyrase A94G Rgion QRD (c)

    A94C gyrB Sous-unit de lADN gyrase A510C

    ETH inhA Enoyl-ACP rductase ND ethA Mono-oxygenase ND

    (a)

  • 33

    4.1.4. Pyrazinamide

    La PZA, un analogue de la nicotinamide, est une pro-drogue ncessitant dtre convertie par une

    pyranizamidase en en acide pyrazinoique pour tre effective [147]. Cet antibiotique est actif sur les bacilles

    tuberculeux semi-dormants ou persistants, et son inclusion au traitement de premire ligne de la tuberculose

    a ainsi permis den rduire la dure 6 mois [68, 287, 310]. Plthore de mutations du gne pncA, codant

    pour la pyrazinamidase, a t associe la rsistance PZA, ce qui complique notablement la mise au point

    de tests de dtection de rsistance cet antibiotique [244] (Tableau 2). On estime quentre 72% et 97% des

    souches rsistantes PZA prsentent au moins une mutation du gne pncA rparties sur lensemble du gne

    et de sa rgion promotrice [165, 214, 228, 313].

    4.2. Mcanismes de rsistance aux antibiotiques de deuxime ligne

    Les aminoglycosides (streptomycine, SM ; kanamycine, KM ; amikacine, AMK ; capreomycine, CPM)

    sont des inhibiteurs de la synthse protique des mycobactries et interagissent avec les protines

    ribosomales [312]. Des mutations au niveau des gnes rpsL et rrs codant respectivement pour les protines

    ribosomales S12 et 16SrRNA constituent lessentiel des mcanismes de rsistance SM. Elles sont

    retrouves chez 50% et 20% des souches rsistantes SM [96, 130, 198, 312]. Les rsistances AMK et

    KM sont associes des mutations au niveau des codons 1401, 1402 et 1484 du gne rrs tandis que la

    rsistance CPM a t associe des mutations des gnes rrs et tlyA [177].

    Les fluroquinolones (FQ) agissent en inhibant lADN gyrase des mycobactries [313]. Les mutations des

    codons 74, 83, 87, 88, 90, 91, 94 au sein dune rgion QRD (Quinolones Resistance Determinant) du gne

    gyrA ont t identifies comme majeures dans le phnomne de rsistance des bacilles tuberculeux aux

    fluoroquinolones [4, 50, 209, 219, 249, 256]. Des mutations au sein du gne gyrB ont aussi t identifies

    mais ne semblent pas confrer elles seules une rsistantes aux FQ, elles pourraient complmenter les

    mutations en gyrA et permettre la bactrie de dvelopper de hauts niveaux de rsistance aux FQ.

    Lthionamide (ETH), de mme que lINH, agit en inhibant la production dacides mycoliques,

    indispensables la construction de la paroi de M. tuberculosis [17]. Les mutations du gne inhA et de sa

    rgion promotrice confrent la fois une rsistance ETH et INH tandis que les mutations du gne ethA

    confrent une rsistance ETH et autres thioamides [21, 69, 190].

  • 34

    4.3. Dtection des rsistances aux antituberculeux de M. tuberculosis

    On peut distinguer deux types et donc deux mthodes de dtermination des rsistances aux antituberculeux

    des mycobactries du complexe M. tuberculosis : une rsistance phnotypique et une rsistance gntique.

    La mthode des proportions est la mthode de rfrence pour la dtermination de la rsistance

    phnotypique des bactries du complexe M. tuberculosis aux antituberculeux [46]. Elle seffectue

    gnralement sur milieu de culture solide contenant les antibiotiques tester, par inoculation dune

    suspension bactrienne et comparaison de la croissance bactrienne avec un milieu de culture sans

    antibiotique. Une souche sera dclare rsistante lisoniazide (INH), la rifampicine (RIF), la

    streptomycine (SM) ou lthambutol (EMB), si la proportion de bacilles rsistants, donc se dveloppant sur

    milieu avec antibiotique, est suprieure 1% de la population bacillaire totale. Il est aussi possible de

    dterminer la rsistance phnotypique des bacilles du complexe M. tuberculosis sur milieu de culture

    liquide en y ajoutant lantibiotique tester la concentration critique (ou concentration dfinie comme

    tant la plus faible concentration minimale inhibitrice, CMI, permettant de diffrencier les souches

    rsistantes des souches sensibles).

    La dtection de la rsistance gntique aux antituberculeux implique la mise en vidence de mutations au

    niveau de la squence de gnes codant pour la cible des principaux antibiotiques (Tableau 2). Diffrents

    outils de dtection de ces mutations ont t mis au point, et se basent sur lamplification par PCR puis

    lhybridation inverse des produits de PCR avec une sonde pralablement fixe sur une bandelette (INNO-

    LiPA Rif TB Assay, Innogenetics ; GenoType MTBDRPlus et GenoType MTBDRsl, Hain Lifescience), la

    real-time PCR (GeneXpert MTB/RIF Assay, Cepheid), le squenage des gnes de rsistance, ou encore les

    puces ADN [268]. Le squenage des gnes de rsistance reste la mthode molculaire la plus fiable

    puisquelle permet didentifier lensemble des mutations au sein des gnes tudis et de dtecter les

    mutations silencieuses ou synonymes ne confrant priori pas de rsistance la bactrie [268].

    Une souche sera dclare multirsistante (MDR) si elle prsente une rsistance la fois INH et RIF, et

    extrmement rsistante (XDR) si en plus dtre MDR elle a dvelopp une rsistance une fluoroquinolone

    quelle quelle soit, et au moins un antituberculeux injectable sur les trois utiliss pour le traitement de la

    tuberculose (CPM, KAN, AMK) [297].

  • 35

    5. Gnome et marqueurs gntiques pour le typage molculaire des

    souches du complexe M. tuberculosis

    5.1. Le gnome des souches du complexe M. tuberculosis

    Les gnomes complets de neuf organismes du complexe M. tuberculosis (1 M. africanum, 2 M. bovis, et 6

    M. tuberculosis) ainsi que ceux de 24 mycobactries non-tuberculeuses sont actuellement disponibles

    (http://genome.tbdb.org/annotation/genome/tbdb/GenomesIndex.html).

    Le gnome de la souche de rfrence M. tuberculosis H37Rv, premier gnome mycobactrien avoir t

    squenc, est constitu de 4 411 529 pb, dont 3989 gnes, et se caractrise par un contenu en guanine et

    cytosine (G+C) lev estim 65.6% [54]. La relative homognit du pourcentage de G+C sur lensemble

    du gnome de la souche de rfrence H37Rv laisse supposer que le phnomne de transfert horizontal de

    matriel gntique est quasi-absent chez M. tuberculosis [242]. Par ailleurs, le transfert horizontal de gne

    na probablement pas t lorigine des proprits de pathognicit dveloppes par le bacille tuberculeux

    puisque aucun des gnes localiss dans les rgions du gnome prsentant des variations significatives de

    densit de G+C na t identifi comme gne de virulence [34]. Parmi les rgions prsentant une variation

    significative de la teneur en G+C, un groupe de gnes spcifique aux mycobactries, trs fort pourcentage

    de G+C (>80%), et codant pour les protines PE ou PPE a t identifi. A linverse quelques gnes

    relativement faible pourcentage de G+C (

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    attribus. En effet, des lettres ont t attribues aux numros pralablement existants (par exemple Rv3724a,

    Rv3724b, et Rv3724d) afin dintgrer les nouveaux gnes identifis la nomenclature en place. On notera

    que lors de la r-annotation du gnome en 2002, suite lidentification de 4 erreurs de squenage, la taille

    du gnome de H37Rv et le nombre de gnes identifis sont passs de 4 411 529 pb 4 411 532 pb et de

    3989 4009 respectivement [44] (http://genolist.pasteur.fr/TubercuList/).

    5.2. Marqueurs gntiques pour le typage molculaire des isolats du complexe

    M. tuberculosis

    5.2.1. Les squences dinsertion

    Les squences dinsertion (IS) font partie de la famille des lments gntiques transposables prsents chez

    de nombreuses bactries. Les IS ne contiennent aucune information gntique si ce nest celle utile leur

    transposition (transposase). Suite au squenage du gnome de la souche de rfrence M. tuberculosis

    H37Rv, de nombreux IS ont t dcouverts et lon dnombre 56 squences dinsertion intactes ou tronques

    dans le gnome de H37Rv, dont les IS1081, IS1547, IS6110, ou encore llment IS-like [54, 55, 88, 173,

    262]. LIS6110 est le plus tudi (1361 pb) et nest par ailleurs retrouv que chez les souches du complexe

    M. tuberculosis [128, 261]. Le nombre de copies dIS6110 au sein du gnome de M. tuberculosis varie de

    zro chez quelques rares bacilles tuberculeux 26 [156, 179] et leur distribution est plus ou moins alatoire

    malgr lexistence de squences prfrentielles dinsertion (ipl: insertion preferential locus [89]). Les

    squences dinsertion IS6110 sont analyses par Restriction Fragment Length Polymorphism (RFLP)

    permettant de destimer le nombre de copies prsentes dans un gnome ainsi que leur position. En 1993,

    une standardisation de la mthode dIS6110-RFLP permettant la comparaison de profils obtenus dans des

    laboratoires diffrents a t mise au point [271].

    5.2.2. Les courtes squences dADN rptes

    5.2.2.1. Le locus DR

    En 1993, PM Groenen tudia en premier le locus DR (Direct Repeat) du complexe M. tuberculosis [115],

    dcrit prcdemment par Hermans et al. (1991) chez M. bovis BCG [127], tandis que la mthode de

    gnotypage de ce locus ou spoligotypage fut mise au point en 1997 par Kamerbeek et al. [144]. Le locus

    DR est un CRISPR (Clustered Regularly Interspaced Short Palindromic Repeats) identifi chez un nombre

    croissant de bactries. Chez les mycobactries, il nest retrouv quau sein du complexe M. tuberculosis et

    se compose dun nombre variable de rptitions directes (DRVs) dune squence conserve de 36 pb,

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    spares les unes des autres par des rgions non rptitives, les espaceurs ou inter-DR (IDR) dont la taille

    varie entre 35 et 41pb (Figure 6). Lvolution des profils obtenus ou spoligotypes est unidirectionnelle et se

    fait dans le sens de la perte despaceurs par recombinaison homologue des DRVs ou suite des

    rarrangements aprs transposition de squences dinsertion comme lIS6110 [77, 115].

    Figure 6 : Le locus DR (M. bovis BCG) (Source : Hill V. et al, donnes non publies)

    Dans un premier temps, 43 espaceurs ont t identifis et slectionns pour le spoligotypage, 37 partir du

    gnome de M. tuberculosis H37Rv et 6 partir de celui de M. bovis BCG [144]. Depuis, 61 espaceurs

    supplmentaires ont t dcrit chez dautres sous-espces du complexe M. tuberculosis [40, 267, 272].

    Ainsi lutilisation du spoligotypage 43 espaceurs permet de distinguer certaines sous-espces du

    complexe M. tuberculosis, telles que M. bovis caractrise par labsence des espaceurs 39 43 et la

    prsence des espaceurs 33 36, ou M. africanum par labsence des espaceurs 8, 9, 39 et par la prsence des

    espaceurs 33 36. Lutilisation du spoligotypage avec 61 espaceurs augmenterait le pouvoir discriminant

    La position sur le gnome est indique en paires de bases (pb). Sur le cercle jaune le plus externe figure la numrotation des espaceurs sur le gnome (position relle), sur le cercle jaune intermdiaire la numrotation selon Kamerbeek et al. [133], sur le cercle jaune le plus au centre la numrotation de van Embden et al. [247]

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    de la mthode et permettrait didentifier dautres sous-espces du complexe M. tuberculosis. Cest le cas

    des espaceurs n69 94 qui ne sont retrouvs que chez M. canettii [272]. Les espaceurs ntant pas

    dupliqus lexception des espaceurs 25, 33, et 52, et leur ordre tant conserv dune souche lautre, il a

    t possible didentifier et dtablir les signatures spcifiques des grandes lignes gntiques de M.

    tuberculosis [36, 247, 283] ultrieurement confirmes par lutilisation dautres marqueurs gntiques tels

    que les SNPs. Du fait son volution unidirectionnelle, le locus DR peut tre tudi pour des analyses

    phylogntiques ainsi que pour retracer lhistoire volutive des bacilles tuberculeux du complexe M.

    tuberculosis.

    5.2.2.2. Les minisatellites

    Les minisatellites sont de courtes squences dADN rptes (entre 10 et 1000 pb) et conscutives,

    retrouves chez tous les organismes procaryotes et eucaryotes. Un locus contenant des squences rptes

    en tandem en nombre variable de type minisatellite a t dcrit pour la premire fois dans le gnome des

    mycobactries en 1994 simultanment par Zhang et al. [314] et Goyal et al. [114]. A la suite de ces travaux,

    Supply et al. [252] dcrivent, en 1997, un ensemble dautres locus similaires contenant des squences

    rptes en tandem et homologues sur le gnome de M. tuberculosis, alors dnomms MIRU

    (Mycobacterial Interspersed Repetitive Units), le terme de VNTR (Variable Number of tandem Repeats)

    tant employ pour la premire fois en 1998 par Frothingham, R. et W.A. Meeker-O'Connell [99] pour

    dsigner les squences rptes dont certaines avaient prcdemment t dcrites par Supply et al. [252]. La

    variabilit du nombre de copies dun seul locus a dans un premier temps t montre [169, 170, 252], suivie

    de celle dun ensemble de 12 et de 41 locus MIRU [253]. Depuis, le dveloppement du MLVA (Multiple

    locus VNTR Analysis) a permis de mettre en vidence et dintgrer aux stratgies de gnotypage de

    nombreux locus VNTR susceptibles dtre utiliss pour des analyses pidmiologiques ou phylogntiques.

    Le gnotypage des souches de M. tuberculosis par la mthode des minisatellites MIRU-VNTR repose sur

    lanalyse du nombre dexemplaires des squences rptes pour chacun des loci tudis. Ces squences

    tant retrouves sur lensemble du gnome, leur mthode danalyse porte gnralement sur plusieurs loci

    simultanment. Pour ltude des mycobactries, plusieurs minisatellites VNTR ont t identifis notamment

    depuis le squenage du gnome de la souche de rfrence H37Rv : les ETR (Exact Tandem Repeat) [99],

    les QUB (Queens University Belfast) [224, 233], les Mtub [162], les MIRU [250, 251] ou encore les locus

    Hyper-Variables (HV) [141, 224, 237, 250] (http://minisatellites.u-psud.fr/).

    Si ltude des 5 ETR (identifis de A E) pour la distinction des cas pidmiologiquement lis montre une

    bonne reproductibilit (97%) [152], la mthode prsente un pouvoir discriminant infrieur celui de la

    mthode de rfrence IS6110 (83% vs. 97%) [94] et a t remplace par celle des 12-locus MIRU,

    introduite par Supply et al. [253]. Les MIRU sont des squences rptes de 50 111 pb rparties dans les

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    rgions intergniques du gnome de M. tuberculosis. Le chromosome de M. tuberculosis H37Rv comporte

    41 MIRU-VNTR, numrots de 1 41 et rpartis sur lensemble du gnome dont 12 ont t retenus pour

    leur variabilit (Figure 7) permettant de distinguer les cas pidmiologiquement distincts [178, 251] tout en

    restant stables pour les cas lis pidmiologiquement [122, 157, 227].

    Figure 7: Schma reprsentant la position des 41 loci MIRU-VNTR dcrits par P. Supply et al. (2000) [253] sur le chromosome de la souche de rfrence H37Rv de M. tuberculosis

    La mthode de gnotypage base sur les 12-locus MIRU prsente une trs bonne reproductibilit (100%)

    [251] en faisant une mthode de choix pour les tudes dpidmiologie molculaire en association avec le

    spoligotypage. Nanmoins, le recours la mthode de rfrence IS6110-RFLP, dans un certain nombre de

    cas, afin de distinguer les cas non lis pidmiologiquement des souches de la famille Beijing ou au sein de

    la famille M. bovis par exemple, a montr lutilit de la mise au point doutils de gnotypage bass sur

    lutilisation de nouveaux sets de marqueurs minisatellites intgrant les QUB ou les Mtubs. Ainsi en 2006,

    29 marqueurs minisatellites ont t valus pour des tudes dpidmiologie molculaire et de phylognie,

    dont 12 correspondent aux MIRU-VNTR dcrits par Supply et al. prcdemment [251]. Aprs valuation, il

    a t propos deux sets de gnotypage, lun bas sur 15-loci MIRU-VNTR prconis pour les tudes

    dpidmiologie molculaire, et lautre comportant 24-loci MIRU-VNTR pour les tudes de phylognie

    [250].

    Les chiffres en gras indiquent le numro du locus, la lettre c correspond aux loci dont lorientation est inverse par apport au sens dfinit par Cole et al., (1998), les chiffre romains indiquent le type de MIRU-VNTR (I, II ou III) et la position exacte sur le gnome est donn par les chiffres apparaissant aprs les chiffres romains.Les ronds noirs indiquent les 12-loci MIRU-VNTR initialement slectionns parmi les 41 dcrits pour le gnotypage de M. tuberculosis.

  • 40

    5.2.3. Rgions de diffrence (RD) et Single Nucleotide Polymorphism (SNP)

    A partir de lobtention de la squence des gnomes complets des souches de M. tuberculosis (H37Rv et

    CDC1551) [54, 97] et M. bovis (AF2122/97 et BCG Pasteur) [32, 104], des tudes de gnomique

    comparative ont t entreprises permettant la mise en vidence de polymorphismes de squences (LSP :

    Large Sequence Polymorphism) entre les souches tudies [129, 265]. Le polymorphisme de ces squences

    reposant principalement sur des phnomnes de rarrangements conscutifs des dltions [35], ils

    reprsenteraient des vnements uniques et irrversibles permettant ainsi leur utilisation en phylognie du

    complexe M. tuberculosis [33, 112, 265]. Un total de 14 rgions de diffrences (RD ; RD1-RD14) ont t

    identifies dans le gnome de H37Rv et se sont avres tre absente de celui de la souche avirulente M.

    bovis BCG Pasteur [22, 113]. De mme, 5 rgions de dltions spcifiques de la souche de rfrence

    H37Rv ont t identifies (RvD1-5) ainsi que la rgion de dltion TbD1 (M. tuberculosis specific deletion

    1) qui permet une distinction entre les souches M. tuberculosis anciennes , pour lesquelles la squence

    TbD1 est prsente, et les souches modernes , pour lesquelles la rgion TbD1 est absente [33]. Ltude

    des LSP a permis la distinction de 6 lignes gntiques au sein du compl