29
Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 1 EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION PARTIE 1. LE COUPLE I. Le mariage A. Evolutions juridiques B. Les conditions légales du mariage 1. Les conditions d’ordre physiologique 2. Les conditions d’ordre psychologique: un consentement libre et éclairé, les autorisations pour mineurs et incapables majeurs. 3. Les conditions d’ordre sociologique : manifestation des exigences sociales et morales (mariage entre parents, pluralité de mariage, licéité du mariage) C. Les conditions de forme du mariage: les formalités préalables, la célébration du mariage D. Les sanctions des conditions de formation des mariages: oppositions au mariage, nullité E. Les effets du mariage: les conséquences financières, les conséquences personnelles du mariage, les liens patrimoniaux entre époux II. Le couple non marié A. Evolutions juridiques B. Le concubinage C. Le Pacte civil de solidarité 1. Les conditions de fond et de forme 2. Les effets du PACS: personnels et patrimoniaux III. La cessation du couple A. Le divorce 1. Evolutions juridiques 2. Les types de divorces 3. Les conséquences du divorce B. La cessation du concubinage C. La rupture du PACS PARTIE 2. LA FILIATION I. L'établissement légal de la filiation A. Evolutions juridiques B. Les moyens de preuve de la filiation C. L'établissement judiciaire de la filiation D. Les droits d'un enfant à défaut de filiation établie II. La filiation adoptive A. Evolutions juridiques B. L'adoption simple C. L'adoption plénière III. Les droits de l'enfant PARTIE 3. LA TRANSMISSION DU PATRIMOINE I. Notion de patrimoine II. La transmission du patrimoine dans les liens du mariage A. Evolutions juridiques B. La transmission du patrimoine III. La transmission du patrimoine dans les liens d'un PACS IV. La transmission du patrimoine dans le cadre d'un concubinage Pour aller plus loin: projet de loi sur la famille (discussion en 2015, 2016?) Compléments: les sources du droit, l'élaboration d'une loi, la responsabilité. Sources

EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 1

EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE

INTRODUCTION PARTIE 1. LE COUPLE I. Le mariage

A. Evolutions juridiques B. Les conditions légales du mariage

1. Les conditions d’ordre physiologique 2. Les conditions d’ordre psychologique: un consentement libre et éclairé, les autorisations pour mineurs et incapables majeurs. 3. Les conditions d’ordre sociologique : manifestation des exigences sociales et morales (mariage entre parents, pluralité de mariage, licéité du mariage)

C. Les conditions de forme du mariage: les formalités préalables, la célébration du mariage D. Les sanctions des conditions de formation des mariages: oppositions au mariage, nullité E. Les effets du mariage: les conséquences financières, les conséquences personnelles du mariage, les liens patrimoniaux entre époux

II. Le couple non marié

A. Evolutions juridiques B. Le concubinage C. Le Pacte civil de solidarité

1. Les conditions de fond et de forme 2. Les effets du PACS: personnels et patrimoniaux

III. La cessation du couple

A. Le divorce 1. Evolutions juridiques 2. Les types de divorces 3. Les conséquences du divorce

B. La cessation du concubinage C. La rupture du PACS

PARTIE 2. LA FILIATION I. L'établissement légal de la filiation

A. Evolutions juridiques B. Les moyens de preuve de la filiation C. L'établissement judiciaire de la filiation D. Les droits d'un enfant à défaut de filiation établie

II. La filiation adoptive

A. Evolutions juridiques B. L'adoption simple C. L'adoption plénière

III. Les droits de l'enfant PARTIE 3. LA TRANSMISSION DU PATRIMOINE I. Notion de patrimoine II. La transmission du patrimoine dans les liens du mariage

A. Evolutions juridiques B. La transmission du patrimoine

III. La transmission du patrimoine dans les liens d'un PACS IV. La transmission du patrimoine dans le cadre d'un concubinage

Pour aller plus loin: projet de loi sur la famille (discussion en 2015, 2016?) Compléments: les sources du droit, l'élaboration d'une loi, la responsabilité. Sources

Page 2: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 2

INTRODUCTION: QU’EST CE QUE LA FAMILLE ? Hegel a dit que « si la société est le règne du droit, la famille est le règne de l’amour ». Cela sous-entend l’idée que les rapports dans la famille ne doivent pas être réglés seulement par des règles juridiques, mais aussi par des règles autres, morales, religieuses, coutumières etc. La famille intéresse la société, c’est pourquoi intéresse le droit. « La famille est une des valeurs essentielles sur laquelle est fondée notre société » (Loi de juillet 1994). La famille est au cœur même de toute société dont elle assure le renouvellement, plaçant ainsi l'enfant au centre de la transmission générationnelle et intergénérationnelle. La sociologie la considère comme un groupe d'individus reliés les uns aux autres par des éléments d'ordre biologiques. Le droit français, les grands textes internationaux n'ont jamais défini la famille. Selon une définition générique large, la famille est un groupe de personnes unies par des rapports de parenté issus de la filiation, ou par des rapports d'alliance issus du mariage. Cette notion peut être affinée par l'évolution des réalités sociétales. En France, la diversité des modes de vie et notamment des modes de conjugalité a conduit à une typologie diversifiée des familles. Il est plus réaliste de parler "des familles" plutôt que de "la famille". L'évolution des modes de vie des cinquante dernières années conduit à envisager la famille au sens étroit, où les pères et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à intéresser le droit des successions et la transmission du patrimoine en l'absence d'ascendance ou descendance directe. Le groupe familial a une vocation naturelle et légale à s'entraider (allongement des études, de la vie...) L'enfant occupe une place centrale dans les évolutions récentes du droit: famille biparentale ou monoparentale, qu'elle soit hétérosexuelle ou homosexuelle, qu'elle soit biologique ou adoptive, unie, séparée ou recomposée. En trente ans, le droit de la famille s'est internationalisé: textes fondateurs de l'Organisation de nations unis, la Déclaration universelle des droits de l'homme (article 8: la famille est l'élément naturel et fondamental de la société et a droit à la protection de la société et de l'Etat), la Convention internationale des droits de l'enfant (reconnaissance et valorisation de ses droits et de son statut. Le droit communautaire a aussi acté l'évolution de la famille. La charte des droits fondamentaux de l'Union européenne affirme le droit de toute personne au respect de sa vie familiale, le droit de se marier et de fonder une famille dans les conditions prévues par les lois nationales, l'égalité homme-femme, les droits de l'enfant et la protection de la famille sur le plan juridique, économique et social. Au fil des années, la famille et son droit ont subi des transformations qui se poursuivent. PARTIE 1. LE COUPLE Le couple peut être de nature diverse. Le couple peut être fondé sur le mariage, sur un pacte civil de solidarité (PACS) ou sur un concubinage. I. Le mariage Jusqu'en 2013, le mariage est défini usuellement comme étant l'union légitime d'un homme et d'une femme. Depuis 2013, le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe. A. Evolutions juridiques du mariage Les fiançailles: Le code civil français de 1804 ne reconnait aucune légitimité à la notion de « fiançailles » (qui n'y est d'ailleurs pas mentionnée). On considère qu'il s'agit là d'une « promesse de mariage » qui serait contraire à la liberté matrimoniale des individus. Ainsi, jusqu'à ce que le mariage soit prononcé, les futurs époux gardent donc l'entière liberté de ne pas se marier, les fiançailles ne créent donc aucune obligation dans ce sens. Les fiançailles ne sont pas des actes juridiques, ce sont des faits juridiques susceptibles de produire des effets de droit. La restitution des cadeaux est régie par l'article 1088 du code civil qui dispose que : « toute donation faite en faveur du mariage sera caduque, si le mariage ne s'ensuit pas ». Ainsi, les cadeaux offerts doivent être restitués, rupture fautive ou non, sauf exceptions.

Page 3: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 3

En France, sous l'Ancien Régime, le mariage religieux était précédé dans certaines familles de ce qu'on appelait abusivement un « mariage devant notaire », acte juridique civil qui n'était qu'une promesse de mariage et qui réglait toutes les questions profanes et patrimoniales par un contrat passé entre les futurs conjoints et leurs familles. Sous cette forme, le mariage n'est qu'une espèce particulière de contrat civil. La loi du 20 septembre 1792 instaure le mariage civil, enregistré en mairie, qui devient le seul valable aux yeux de la loi, malgré une volonté première d'abandon du mot lui-même jugé trop religieux. La famille est patriarcale, placée sous l'autorité du mari. Le mariage est un sacrement, le catholicisme est la religion d'Etat. Le mariage est donc indissoluble. La transmission du nom et du patrimoine reposait sur les liens du sang. Le conjoint survivant n'est qu'un allié et non un parent. Le code noir de 1727 interdit les relations sexuelles et à fortiori le mariage entre blancs et noirs. Le code civil de 1804 rétablit l'autorité du mari. La femme mariée est soumise à une incapacité de gérer ses biens, de prendre des décisions relatives à l'éducation des enfants. Dans les années 1968-70, le mariage entre en concurrence avec d'autres formes de conjugalité. Le concubinage devient une réalité: sa définition est inscrite au code civil en 1999, le pacte civil de solidarité (PACS) est créé. L'existence d'une famille fondée par un homme et une femme est reconnue quelque soit leur mode de conjugalité. A regard du droit et jusqu'en 2013, le mariage est un acte juridique solennel par lequel un homme et une femme établissent une union dont la rupture ne peut être obtenue que dans des conditions déterminées. La loi 17 mai 2013 a ouvert le mariage aux couples de personnes de même sexe en France. Si le mariage est souvent perçu comme une institution sociale, imprégnée de caractères religieux, il ne faut pas oublier qu'il s'agit également d'un acte juridique. En tant que tel, il est soumis à des conditions et va produire des effets parfois mal connus. B. Les conditions légales du mariage 1. Les conditions d’ordre physiologique L’âge des époux : Durant très longtemps cet âge était différent selon que la personne était un homme ou une femme : 15 ans pour les femmes, 18 ans pour les hommes. Dorénavant, la loi du 4 avril 2006 dispose que « L’homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant dix-huit ans révolus. » Cela avait notamment pour but d’éviter les mariages forcés. Cette condition d’âge n’est pas liée à la majorité civile, mais à l’aptitude physiologique à se marier. Lorsque l'un des futurs mariés est mineur, il lui faudra obtenir une autorisation parentale pour pouvoir se marier. Il faut savoir qu’un système de dispense est prévu à l’article 145 du code civil, le mariage pouvant être autorisé avant 18 ans pour « motifs graves », le procureur de la République pouvant autoriser cette dispense d’âge (exemple: en cas de grossesse). Le sexe des époux : En 1804 le Code civil ne prévoyait pas explicitement la condition de différence de sexes car cela allait de soi. Cette condition se déduit très clairement de l’article 144 du code civil qui réglemente l’âge des époux en faisant référence à l’homme et à la femme. Face aux évolutions de la société, le législateur a du prendre en compte le mariage homosexuel et le mariage des transsexuels. Le mariage homosexuel: Le mariage homosexuel est la possibilité pour les couples de personnes de même sexe de contracter un mariage. Des mariages homosexuels ont été pratiqués par certaines civilisations anciennes. Or, durant les XIX

e et XX

e siècles,

l'homosexualité a été généralement criminalisée ou considérée comme une maladie mentale. Au 30 janvier 2015, 20 Etats disposent d'une législation rendant accessible le mariage aux couples de même sexe, dont trois États sur une partie de leur territoire seulement (2001: premier pays à reconnaitre le mariage pour tous: Pays-Bas) En France, après de longs débats, l'assemblée nationale a adopté l'article 143 de la loi de mai 2013 : "le mariage est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe". Le 28 janvier 2015, la Cour de cassation a validé le mariage d'un couple homosexuel franco-marocain, en jugeant que l’article 4 de la convention entre le Maroc et la France qui prévoyait que la loi d’un des deux pays, pouvait être écartée lorsqu’elle est «manifestement incompatible avec l’ordre public».Or le droit marocain interdit le mariage homosexuel. Par cette décision la cour de cassation montre qu’elle «souhaite faire une application large de la loi sur le mariage pour tous».

Page 4: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 4

Le mariage des transsexuels Le transsexualisme peut être défini comme « le sentiment irrésistible est inéluctable d’appartenir à un sexe opposé à celui qui est génétiquement, anatomiquement, et juridiquement le sien avec le besoin prépondérant ou obsédant de changer d’anatomie et d’état » (code civil.) Concernant les transsexuels, la France autorisait uniquement le mariage après le changement de sexe d'une des personnes, changement induit par une opération chirurgicale à la suite de quoi celle-ci pouvait obtenir la modification de la mention de son sexe sur les registres de l'état civil avec une personne de sexe opposé. La Cour européenne des droits de l'homme a reconnu que le sexe « psychologique et social » (le genre) doit primer sur le sexe biologique lorsque certaines conditions sont remplies. Il s'agit notamment de la preuve de la réalité du « syndrome du transsexualisme » chez l'individu ainsi qu'une transformation physique (opération d'ablation ou de constitution des organes génitaux). L'ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe, en mai 2013, permet aux transsexuels de se marier avec une personne de l'autre ou du même sexe. 2. Les conditions d’ordre psychologique

a. Un consentement libre et éclairé, exempt de vices

La volonté des époux est une condition primordiale dans le déroulement du mariage. Il faut donc un consentement personnel, libre et éclairé, afin de permettre le mariage. L’exigence de ce consentement est posée à l’article 146 du Code civil qui dispose «qu’il n’y a pas de mariage lorsqu’il n’y a point de consentement. » Le consentement doit donc être intègre. Le contrat de mariage est exempt de vices si : Les deux parties ont la capacité juridique à contracter : être majeur (18 ans) ou mineur émancipé. Il n’y a pas eu d’erreur sur la personne ou la substance Il n’existe pas de violence physique ou morale Le mariage n’est pas la conséquence d’un dol (manœuvre frauduleuse qui incite à contracter) Le consentement sérieux est l’affirmation des époux de vivre une vraie vie conjugale, mais aussi d’assumer toutes les conséquences personnelles ou matrimoniales que ce consentement engendre. Il arrive que certaines personnes n’aient pas de véritable volonté de se marier, mais entrent dans les liens du mariage dans le but d’obtenir l’un ou tous les avantages liés au mariage (obtention d’un permis de séjour etc.) Il peut s’agir, par exemple, du problème des mariages fictifs, simulés: blancs, gris. Dorénavant l’article 21-2 du Code civil dispose que l’étranger ou l’apatride qui contracte un mariage avec un conjoint de nationalité française pourra, à l’expiration de quatre ans à compter du mariage, obtenir la nationalité française. On doit pouvoir constater de l’effectivité d’une communauté de vie matérielle. La délivrance d’un titre de séjour pour le conjoint d’un français n’est plus octroyée de plein droit. On a fini par considérer que tout mariage fictif était nul dès lors que l’intention matrimoniale faisait défaut. Sont très souvent annulés des mariages, soit sur demande d’un des époux, soit du ministère public, lorsqu’il y a défaut de cohabitation ou défaut de consommation. b. Les autorisations Pendant longtemps, le mariage requérait la signature sur l'acte de mariage des parents des époux, qu'ils soient majeurs ou mineurs. * Les mineurs L’article 148 du code civil exige une autorisation parentale pour les mineurs. Il faut le consentement des deux parents, mais si les parents sont en désaccord : le désaccord vaut consentement. Il suffit donc en principe d’une seule autorisation. Si l’un des deux parents est hors d’état de consentir au mariage, l’autorisation de l’un suffira également. Si les deux parents sont hors d’état de manifester leur volonté, ce sont leurs ascendants qui pourront consentir, si les deux grands-parents sont en désaccord, là encore le désaccord vaut consentement. Enfin, si tout le monde est mort le mineur est placé sous l’autorité d’un conseil de famille qui tranchera. Si l’autorité sur l’enfant est déléguée, c’est au tuteur de décider. L’autorisation est sous la forme un acte authentique (devant un officier d’état civil). * Les majeurs incapables Il s'agit soit d’un régime de tutelle, soit d’un régime de curatelle (parent ou tiers). L’incapable majeur devra obtenir une autorisation pour se marier.

Page 5: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 5

3. Les conditions d’ordre sociologique : manifestation des exigences sociales et morales a. Interdiction du mariage entre parents et alliés Cette interdiction est portée par des raisons eugéniques : si des enfants sont issus d’unions entre proches parents ils pourraient être atteints de maladies et d’infirmités graves. A une époque où le groupe familial était très étendu, on interdisait le mariage entre parents jusqu’au 14ème degré. Cela a donc diminué. Parmi les empêchements subsistants, il faut distinguer les empêchements absolus et ceux pouvant être levés par une dispense. La prohibition absolue concerne la parenté en ligne directe, que la famille soit constituée en mariage ou hors mariage (article 161 du code civil). Elle est étendue aux liens d’alliance puisqu’il est interdit de se marier avec les conjoints de ses ascendants ou de ses descendants (considération guidée par la paix des familles), cette dernière interdiction pouvant être levée après la mort du conjoint créant l’alliance. L’article 162 prohibe le mariage en ligne collatérale entre frères et sœurs. Cette interdiction est absolue et vise les personnes ayant un auteur commun. En revanche, en alliance collatérale il est possible de se marier : avec un beau-frère et une belle-sœur. L’article 163 prohibe le mariage entre oncle et nièce et entre tante et neveu... Dans la famille hors-mariage, on sait parfois que le lien de famille, le lien de parenté naturelle (hors-mariage), n’est pas toujours établi. La difficulté est de prendre en considération la filiation qui n’est pas juridiquement constatée. La prohibition entre alliés en ligne directe pourra être levée par décision du Président de la République qui apprécie la gravité ou non de la circonstance. b. Empêchements du mariage résultants d’une pluralité de mariages L’empêchement de la bigamie L'empêchement du mariage pour bigamie résulte de l’article 147 du code civil qui dispose que l’on « ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier. » La bigamie est aussi un délit au sens pénal, sanctionnée par l’article 433-20 du code pénal pour le marié et pour l’officier d’état civil. Pour prévenir cela, les futurs époux doivent apporter de nombreux papiers, dont un acte de naissance récent (il y figure la notification du mariage). L’article 147 s’applique a priori aux mariages célébrés en France. Un tel mariage serait contraire à l’ordre public. En DIP (droit international privé) se pose la question de savoir le sort d’un mariage polygamique célébré dans un pays tolérant la polygamie. La jurisprudence a fini par admettre la validité de ces mariages célébrés à l’étranger, mais il faut que les personnes engagées dans les liens viennent d’un pays autorisant la polygamie. Un Français ne peut donc pas entrer dans les liens d’un tel mariage. Dès lors qu’il est valablement contracté (femme française qui épouse un polygame originaire d'un pays qui le permet), on autorise les effets d’un mariage polygamique, comme les droits successoraux par exemple. La licéité du remariage Dès que le mariage a été dissout, on va autoriser, en vertu du principe de liberté matrimoniale, le remariage. Il n’y a pas de limites au nombre des unions successives. La loi ancienne (ancien article 228 du code civil) imposait néanmoins un délai de viduité pour son remariage : limite temporelle. La femme ne pouvait se remarier avant 300 jours courant après la dissolution du mariage, afin d’éviter les éventuelles incertitudes relatives à la filiation (grossesse). Cette exigence a été assouplie par la jurisprudence, puis supprimée par la loi du 26 juillet 2004 portant réforme du divorce pour des raisons d’égalité entre époux.

C. Les conditions de forme du mariage 1. Les formalités préalables La publication du projet de mariage : L’idée était de prévenir les tiers, et de les inciter éventuellement à faire connaître les empêchements dont ils auraient connaissance (ils sont frères et sœurs !) C’est l’article 63 du code civil qui prévoit les formes de la publication. On affiche "les bans" dans la mairie du lieu où sera célébré le mariage. Si les époux habitent dans un lieu de résidence différent il faut procéder à la publication aussi dans leurs lieux respectifs de résidence. Cette publication doit durer 10 jours. Le procureur de la république peut en dispenser les époux pour cause grave. Les différents documents à produire sont : * Une copie intégrale récente de l’acte de naissance, ce qui devrait permettre de vérifier leur identité, le fait qu’ils ne soient pas mariés et qu’ils ne sont pas de la même famille.

Page 6: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 6

* Une pièce d’identité officielle, justificatif de domicile. * Pour les mineurs, il faut l’autorisation et la dispense d’âge du Procureur de la République. * Un contrat de mariage si choisi. * Indiquer à l’avance l’identité complète des témoins. * Entre 1942 et 2008, un certificat prénuptial était exigé (examen médical effectué deux mois avant le mariage). L’audition des futurs époux : on impose à l’officier d’état civil de procéder à l’audition commune des époux, sauf lorsqu’il apparaît que les conditions relatives au consentement sont remplies de façon non équivoque. S’agissant des mineurs, leur audition se fait hors de la présence des parents, ce qui constitue une garantie de leur consentement. Si l’on s’aperçoit que les époux ne s’entendent pas, que l’un des deux est vulnérable…cela peut laisser penser qu’il pourrait y avoir un problème de consentement. 2. La célébration du mariage Le mariage est célébré à la marie du lieu de résidence d’au moins un des époux ( à son domicile avec autorisation spéciale du procureur de la république) . La cérémonie est publique, requiert la présence des deux époux et de deux témoins au minimum. Le mariage est toujours célébré par un officier d’état civil. Il doit lire les articles du code civil relatifs aux effets du mariage. Il requiert le consentement des époux (même aphone il faut pouvoir manifester son consentement), il prononce enfin le mariage et donne l’acte de mariage, qui servira dans de nombreuses étapes de la vie matrimoniale (compte en banque, emprunt etc.) En temps de guerre et sous certaines conditions, le mariage par procuration est possible pour les marins, les militaires et les personnes employées à la suite des armées... Toutes ces formalités sont obligatoires en France, quelle que soit la nationalité des époux. Dans certaines hypothèses, quand les époux sont tous deux d’origine étrangère, ils pourront se marier devant l’officier d’état civil représentant son pays en France (consul par exemple). Deux Français pourront aussi se marier à l’étranger. Il faut alors garder à l’esprit l’idée qu’ils doivent conserver les formalités du pays où ils se marient mais pas pour les conditions de fond. 3. Les sanctions des conditions de formation des mariages Les oppositions à mariage Ces oppositions - sanctions se font a priori, de manière préventive. Un officier d’état civil ne doit pas célébrer un mariage s’il existe un empêchement et s’il en a connaissance. Lorsque l’officier d’état civil soupçonne une irrégularité comme un défaut de consentement, il doit saisir immédiatement le ministère public en vertu de l’article 175-2 du code civil, le procureur dispose ensuite de quinze jours pour : - Laisser le mariage se dérouler. - Empêcher le mariage. - Surseoir à statuer afin de commander une enquête. La nullité du mariage La nullité d’un acte a pour effet de sanctionner la formation de l’acte. La nullité entraîne la disparition rétroactive du mariage. On distingue les conditions de validité qui sont des empêchements prohibitifs et celles qui sont des empêchements dirimants. Les empêchements prohibitifs vont permettre de faire obstacle à la célébration du mariage, s’ils sont révélés avant sa célébration. Ils suffisent à y faire obstacle. L’officier d’état civil devra alors ne pas procéder à la célébration du mariage, mais si le mariage était quand même célébré, il serait valable. Les empêchements dirimants vont conduire à la nullité du mariage s’ils ne sont pas observés. Si le mariage est célébré alors qu’une des conditions de validité fait défaut, le mariage est nul. Il faut distinguer entre causes de nullité absolue et causes de nullité relative. - Les nullités absolues visent à protéger l’intérêt général, ordre public. Les cas sont prévus à l’article 184 du code civil. Il s'agit du défaut total de consentement (mariage contracté sous l’empire d’un état de démence, d’un mariage simulé, incompétence de l’officier d’état civil…). - Les nullités relatives protègent les intérêts particuliers. Elles sont fondées sur le vice de consentement d’un époux, c'est-à-dire l’erreur ou la violence, (article 180 du code civil). Il s'agit aussi du défaut d’autorisation lorsqu’elle était requise (mariage pour mineurs ou majeurs incapables). Effet : L’annulation d’un acte juridique, qui sanctionne une condition dans sa formation, produit un effet rétroactif. Cela signifie que le mariage est réputé n’avoir jamais existé. On va donc en principe remettre les époux dans l’état dans lequel ils se trouvaient avant d’être mariés. Cela est une énorme différence avec le divorce. La rétroactivité peut avoir des effets relativement importants, la loi a donc introduit des tempéraments à cette rétroactivité. Le mariage nul produit des effets à l’égard des enfants, même si aucun des époux n’était de bonne foi au moment de la formation du mariage. Les enfants sont considérés comme des enfants légitimes. Le mariage n'est annulé

Page 7: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 7

que pour l'avenir (article 202 du code civil). Si on avait maintenu la rétroactivité de l’annulation à l’égard des enfants, ceux-ci auraient été considérés comme naturels et non légitimes. La prestation compensatoire est parfois utilisée en cas de nullité du mariage. Elle est une institution propre au divorce, c’est une prestation destinée à compenser, autant que possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des ex-époux. D. Les effets du mariage

1. Les conséquences financières du mariage Dans le code de 1804, le mari avait seul le pouvoir de passer les contrats nécessaires à l'entretien du ménage et à l'éducation des enfants. Il engageait ainsi ses biens propres et les biens communs. Si la femme passait un tel contrat, c'était en vertu d'un mandat tacite du mari, elle n'était pas engagée par ses propres actes. En 1942, la loi a donné à la femme le pouvoir de représenter son mari pour les besoins du ménage et de l'engager dans ces limites envers les tiers. Il s'agissait d'un mandat domestique, mais le mari pouvait retirer ce pouvoir à la femme. Désormais, depuis une loi de 1965, chacun des époux peut s'engager en son nom personnel. La portée de cette réforme est de taille car il s'agit d'une dette concernant l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants. Elle engage automatiquement l'autre époux solidairement. La contribution aux charges du mariage

On entend par charges du mariage l'entretien du ménage, l'éducation des enfants et l'ensemble des dépenses nécessaires aux besoins de la vie familiale. Il s'agit des frais de logement, de nourriture, et de toutes les dépenses du train de vie, et même les dépenses dites d'agrément (vacances, voyages...). Les deux époux doivent participer à ces dépenses, quelle que soit leurs situations financières respectives. La règle est que chacun y participe selon ses facultés, soit en argent, soit en nature, c'est à dire par une participation personnelle. Cette obligation est très importante : l'absence de contribution aux charges du mariage est en effet une faute qui constitue une cause de divorce ainsi que le délit pénal d'abandon de famille. Il convient donc de la respecter même en cas de séparation des époux.

Les dettes ménagères

Il s'agit de tous les contrats qui ont pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants (nourriture, chauffage, enseignement...). Chaque époux a le pouvoir d'engager seul ces dépenses mais le principe est que les deux époux seront tenus solidairement de dettes. Il existe cependant des cas dans lesquelles cette règle ne jouera pas :

o en cas de séparation légale des époux o en cas de dépense excessive par rapport aux revenus du ménage...

La protection du logement familial

Le logement familial bénéficie d'une protection particulière : l'accord des deux époux est impératif pour tous les actes le concernant. Il n'est donc pas possible pour un seul époux de résilier le bail sans l'accord de l'autre ou de le vendre, même s'il en est le seul propriétaire. L'autre époux peut alors demander la nullité de la vente ou de la résiliation du bail dans un délai d'un an à compter de la découverte de la vente ou de la résiliation.

L'indépendance financière des époux

Chacun des deux époux dispose d'un droit à son indépendance financière. C'est pourquoi, chaque époux peut librement :

o exercer une activité professionnelle de son choix et disposer librement de ses revenus, après contribution aux charges du mariage.

o ouvrir un compte bancaire à son nom o gérer seul les biens qu'il détient individuellement.

2. Les conséquences personnelles du mariage Le code civil met à la charge des époux trois obligations personnelles, plus connues sous le terme de devoirs conjugaux :

Le devoir de fidélité : En France, l’adultère n’est plus une faute pénale depuis loi du 11 juillet 1975, mais demeure une faute civile. L'adultère n'est depuis lors plus une cause péremptoire de divorce, il appartient au juge de décider, en vertu de sa liberté d'appréciation des faits.

Le devoir de cohabitation : Il implique l'obligation d'avoir des relations charnelles avec son conjoint et le

partage d'un même toit. Le refus de cohabiter avec son conjoint constitue également une cause de divorce, mais peut également

Page 8: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 8

constituer le délit d'abandon de famille (abandon de la résidence familiale sans motif grave pendant plus de deux mois lorsque le couple a un enfant ou si la femme est enceinte). Le refus de cohabiter ne sera pas considéré comme une faute lorsque le conjoint est parti en raison de motifs graves (femme subissant de mauvais traitements, violence envers les enfants...).

Le devoir d'assistance qui impose d'aider son conjoint dans tous les moments de la vie (maladie, difficultés

professionnelles...).

3. Les liens patrimoniaux entre époux Le mariage crée entre les époux des liens patrimoniaux. Le régime matrimonial est l’ensemble des règles qui régissent les liens patrimoniaux entre époux. Le régime matrimonial est gouverné par le principe de la liberté des conventions matrimoniales. Les époux ont donc le loisir de choisir la manière dont seront organisées leurs relations patrimoniales. Le choix du régime matrimonial intervient avant le mariage mais il existe une disposition supplétive de volonté importante : si les époux ne choisissent par de régime matrimonial, ils seront soumis au régime légal, c’est-à-dire au régime de la communauté réduite aux acquêts. Quand les époux choisissent un autre régime matrimonial, on dira qu’ils ont fait un contrat de mariage. Le régime légal

Le régime légal est applicable aux couples qui n'ont pas conclu de contrat de mariage. Il s'agit du régime de la communauté de biens réduite aux acquêts. Trois patrimoines vont coexister : 1. le patrimoine propre du mari : il s'agit de tous ses biens et de toutes les dettes qu'il avait avant le mariage. 2. le patrimoine propre de la femme : composé de la même manière. 3. le patrimoine de la communauté, composé de tous les biens acquis, et de toutes les dettes contractées par les époux après le mariage. Les patrimoines propres restent la propriété exclusive de chacun des époux et seront gérés exclusivement par leur propriétaire. La communauté est gérée à égalité par les deux époux. Chacun d'eux peut faire seul les actes de la vie courante, mais les actes importants devront être faits par les deux époux ensemble. Le régime de la séparation de biens Ce régime est considéré comme étant le plus simple, et assure une indépendance totale des deux époux. Chacun reste propriétaire des biens qu'il apporte et de ceux qu'il va acquérir durant le mariage, et paye ses propres dettes. Ce régime est le plus souvent utilisé lorsque l'un des époux exerce une profession libérale (commerçant, avocat, médecin...), car il permet de protéger les revenus de son conjoint. En cas de faillite, les biens et revenus de l'autre époux ne pourront pas être saisis par les créanciers pour régler les dettes. Les revenus de l'autre conjoint pourront alors permettre d'assurer l'entretien du ménage jusqu'au retour d'une meilleure situation financière. Ce régime pose cependant un problème de preuve lors de la dissolution du mariage. En effet, de nombreux meubles vont parfois être achetés en commun, ou par l'un des époux sans établir de facture. Il convient d'être très vigilant lors des différentes acquisitions. La communauté universelle Ce régime consiste en l'opposé du régime de séparation de biens : tous les biens et toutes les dettes sont inclues dans la communauté. Par exception, certains biens sont exclus de la communauté : - les instruments de travail de l'un des époux, - les vêtements et le linge personnel de chacun des époux - tous les biens et les droits personnels Le régime de la communauté universelle a pour effet de transférer l'ensemble des biens détenus par la communauté dans le patrimoine du conjoint survivant. C'est pourquoi ce régime est le plus souvent choisi dans le cadre d'un changement de régime matrimonial, par des couples âgés désirant protéger leur conjoint en cas de décès. Le régime de participation aux acquêts Ce régime a pour objectif de permettre aux époux d'éviter les inconvénients de la séparation de biens lors de la dissolution du mariage. En cas de décès d'un des époux, le conjoint survivant pourra bénéficier de l'enrichissement de l'autre. Le régime de participation aux acquêts fonctionne donc en deux temps : 1. Pendant le mariage, chacun des époux est seul propriétaire de ses biens, comme dans un régime de séparation de biens 2. À la dissolution du mariage, une communauté de valeur sera reconstituée, et l'époux qui s'est le moins enrichi aura droit à la moitié de la différence.

Page 9: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 9

II. Le couple non marié S’agissant de personnes majeures, le droit français a tout à fait admis le principe de la liberté sexuelle entre majeurs. Hormis les cas de viol, d’agression ou de harcèlement, la relation sexuelle entre personnes majeures n’est jamais constitutive d’une infraction pénale, quand bien même l’une des deux personnes est mariée. En France, la majorité sexuelle est de 15 ans depuis 1945 pour les relations hétérosexuelles et depuis 1982 pour les relations homosexuelles. La relation sexuelle librement consentie d'une personne de 18 ans ou plus avec un mineur de moins de 15 ans est prévue par le code pénal sous le nom d’atteinte sexuelle alors que la relation non consentie entre dans le champ de l’agression sexuelle (sanctions différentes). L’adultère a été dépénalisé en 1975. En revanche, si l’une des personnes est mineure, cela est réprimé pénalement. Auparavant, le concubinage était considéré comme une situation de fait, par opposition au mariage, situation de droit. Le droit ne faisait donc pas produire d’effets au mariage. Mais cela a évolué, en raison de la prise d’importance sociale du concubinage. Il faut aussi noter la création en novembre 1999 du pacte civil de solidarité. A. Le concubinage Hors mariage, le concubinage fut longtemps ignoré. Napoléon disait: "les concubins ignorent la loi, la loi ignore les concubins". Le concubinage était traditionnellement défini comme « le fait pour deux personnes d’entretenir des relations d’une certaine durée et d’une certaine stabilité comme des personnes mariées, mais sans être mariées ». En ce qui concerne le concubinage homosexuel il a fallu attendre la loi du 15 novembre 1999 pour le consacrer. Pour lui faire produire des effets, il faut le prouver, qu’il soit invoqué par les personnes intéressées ou par un tiers. Puisqu’il s'agit d’un fait juridique ( et non d'un acte juridique), il se prouve par tout moyen. Certaines municipalités facilitent les choses en fournissant un certificat de concubinage, qui n’a néanmoins aucune force liante pour le juge. L’union libre n’a jamais fait l’objet d’un statut cohérent. La loi n’a pas opté pour un régime permettant de régler les effets du concubinage. Elle a simplement donné une définition du concubinage dans la loi du 15 novembre 1999 relative au PACS avec l'article 515-8 du code civil : « union de fait caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple ». Les effets du concubinage dans les rapports entre concubins Les concubins ne sont liés par aucun lien de droit. Chaque concubin doit donc supporter les frais qu’il engage, sans possibilité de se retourner contre l’autre pour demander une quelconque solidarité (à défaut d’accord contraire des intéressés, évidemment). Il n’y a pas de droit au nom ni de vocation successorale. Les relations sont donc régies par un principe d’indépendance. En revanche, cette indépendance caractérisant les relations pendant la durée du concubinage devra être nuancée lorsqu’il s'agira d’envisager la rupture du concubinage. Les effets du concubinage dans les rapports des concubins avec les tiers * Le concubinage invoqué à l’égard des tiers Il faut noter que la législation sociale (sécurité sociale) prend de plus en plus en compte les compagnes, les personnes à charge... et leur attribue les mêmes droits qu’aux conjoints mariés. Par exemple, lorsqu’une personne mariée est tuée, le conjoint peut obtenir une réparation du responsable de son préjudice à lui : préjudice par ricochet. Après des années de refus, la jurisprudence admet cette possibilité pour un concubin et a abandonné cette nécessité d'existence d’un lien de droit. * Le concubinage invoqué par les tiers Il se pose le problème de la solidarité des concubins à l’égard des dépenses qu’ils engageraient à propos de l’entretien du ménage. En matière de mariage c’est l’article 220 du code civil qui pose le principe de la solidarité ménagère des époux (une dépense contractée par l’un des époux pour l’entretien du ménage va engager l’autre époux, notamment au regard des créanciers.) La jurisprudence est constante en matière de concubinage et estime que l’article 220 ne s’applique pas aux concubins, et on n’a pas élaboré de règle jurisprudentielle de solidarité entre les concubins…

Page 10: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 10

La reconnaissance tardive du concubinage homosexuel par le droit positif La loi ne prévoyait pas de solution pour le concubinage homosexuel, ne le faisant déjà pas pour le concubinage hétérosexuel. On considérait le concubinage comme l’ombre du mariage, il devait alors emprunter les caractères du mariage. Comme le mariage est hétérosexuel, alors il était admis que le concubinage était hétérosexuel. Avant même que la loi reconnaisse le concubinage homosexuel, certaines modulations ont été opérées. Le législateur a modifié la loi s’agissant de certains avantages sociaux pour que les concubins homosexuels puissent bénéficier des mêmes droits que les concubins hétérosexuels. La règle majeure a été la loi du 15 novembre 1999 relative au PACS. Elle a posé une définition du concubinage (différent du PACS), en se référant au concubinage homosexuel autant qu’au concubinage hétérosexuel. La conséquence pratique est importante puisque grâce à cette reconnaissance légale du concubinage homosexuel, toutes les dispositions législatives faisant référence au concubinage ou parfois à la vie maritale pouvaient dès lors s’appliquer aux concubins homosexuels.

B. Le Pacte civil de solidarité (PACS) Le législateur a été conduit à adopter le PACS car il fallait doter d’un statut légal des couples souhaitant ne pas se marier, qu’ils soient homosexuels ou hétérosexuels. Plusieurs tentatives se sont succédé, et il a fallu dix ans pour mettre en œuvre une telle réforme. 1. Les conditions de fond et de forme Fond: L'article 515-1 du code civil décrit le PACS comme: "Contrat conclu par deux personnes physiques, majeures, de sexes différents ou de même sexe, pour organiser leur vie commune". Concernant les majeurs sous curatelle, le PACS peut être conclu avec l’assistance du curateur. Pour le majeur sous tutelle le PACS pourra être conclu, mais avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille. Pour conclure un PACS on ne doit pas être engagé par un certain nombre de liens: - Entre ascendants et descendants en ligne directe. - Entre alliés en ligne directe (beau-père/belle-fille etc.) - Entre collatéraux jusqu’au troisième degré inclus. La conclusion est également interdite pour toute personne déjà mariée ou liée par un PACS. Formes Les partenaires doivent faire la déclaration conjointe de leur PACS au greffe du tribunal d’instance dans le ressort duquel ils résident. En droit comparé on parle d’ailleurs de « partenariat enregistré. » Pour que cette déclaration produise ses effets, il faut que les partenaires fournissent un certain nombre de pièces. - Convention passée entre les partenaires pour organiser leur vie commune, … - Pièces d’état civil permettant d’établir l’identité et de vérifier qu’il n’y a pas d’empêchement. Une fois que le greffier du tribunal d’instance a reçu la convention et vérifié les conditions de fond et de formes, il va apposer son visa sur la convention, vérifier la date, signer chaque page de la convention, l’enregistrer et la restituer aux désormais partenaires. Le PACS est ensuite mentionné sur l’acte de naissance des partenaires.

2. Les effets du PACS Le PACS a pour objet de permettre l’organisation de la vie commune des partenaires, et la loi de 1999 était essentiellement tournée vers les effets patrimoniaux du PACS. Il ne fallait pas consacrer une institution « trop proche » du mariage, les parlementaires s’étaient alors refusés à lui faire produire des effets personnels. L’évolution législative et jurisprudentielle montre une prise en compte des effets personnels et la loi de 2006 a introduit des effets personnels calqués sur ceux du mariage qui vont régir le PACS. Le PACS de 2006 se rapproche donc du mariage. Les effets personnels du PACS Désormais, le PACS va avoir une incidence sur l’état civil des partenaires, comme le mariage, et va leur imposer des devoirs semblables à ceux qui résultent du mariage. L’état civil des partenaires : Il s'agit du nouvel article 515-3-1 du code civil qui dispose désormais qu’il « est fait mention en marge de l’acte de naissance de chaque partenaire de la déclaration de PACS ainsi que de l’identité de

Page 11: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 11

l’autre partenaire ». Cela se fait en revanche par l’intermédiaire du Greffe du tribunal d’instance, et non de l’officier d’état civil. Les enjeux de cette mention sont la publicité et la preuve. Les devoirs réciproques des partenaires : La loi de 1999 renforcée par la loi de 2006 a tout de même donné naissance à des devoirs réciproques. Ils sont désormais très semblables à ceux des époux, mais cela ne concerne que le contenu des devoirs et non la sanction. * Assistance réciproque morale, pécuniaire, respect, sincérité, courtoisie… * Engagement à une vie commune : Cela implique-t-il une fidélité entre les partenaires ? Les lois de 1999 et 2006 sont muettes sur ce point. Les sanctions en cas de manquement aux devoirs: Le Conseil constitutionnel a déclaré que ces obligations avaient un caractère d’ordre public. Elles sont différentes de la matière matrimoniale. Le législateur n’a néanmoins pas prévu de sanction en cas d’infraction. L’analogie avec le mariage s’arrête puisqu’elle est techniquement impossible. Le divorce ici n’existe pas ! Les effets patrimoniaux du PACS On se rend compte que parmi toutes les dispositions relatives aux effets patrimoniaux du PACS on distingue une différence entre une sorte de régime légal et un régime conventionnel. Le régime « primaire » du PACS Ce régime n’est pas aussi développé qu’en matière de mariage, aucune disposition n’a par exemple pas été prise pour protéger le logement commun. Trois séries de règles vont s’imposer aux partenaires pendant la durée de leur convention. L’aide matérielle : L’article 515-4 de la loi de 2006 prévoit désormais que si les partenaires n’en disposent pas autrement, l’aide matérielle est proportionnelle à leurs facultés respectives (idem mariage). La solidarité pour les dettes ménagères : Cette obligation ne concerne que les dépenses de la vie courante, à l’exclusion dorénavant des dépenses d’investissement (emprunts immobiliers), ainsi que pour les dépenses « manifestement excessives » (idem mariage) (loi 2006). La présomption de pouvoir pour les biens meubles détenus individuellement : C’est un mécanisme que l’on a pu voir en matière matrimoniale (matière bancaire et matière immobilière.) L’idée est de renforcer l’autonomie des partenaires en matière mobilière. Outre cela il existe d’autres effets, le PACS produit des effets en matière fiscale, sociale, ou encore en matière de baux d’habitation. Les partenaires vont faire l’objet d’une imposition commune, alors que de simples concubins vont être imposés séparément. En matière sociale le texte permet également aux partenaires de bénéficier de la qualité d’ayant-droit de l’assuré pour les prestations d’assurance maladie etc. Dans le domaine des baux d’habitation la loi de 1989 sur les droits des locataires a été complétée par la loi de 1999 sur le PACS pour permettre le droit de continuation et pour permettre aux partenaires de bénéficier, soit de la continuation du contrat quand le partenaire abandonne le domicile, soit du transfert du bail d’habitation (il devient le titulaire) en cas de décès du partenaire. Le régime légal Comme dans le cadre du mariage, si les partenaires n’en décident pas autrement, on leur appliquera un régime patrimonial légal. La loi de 2006 a opté pour un régime légal plutôt séparatiste. Chacun est propriétaire des biens qu’il a acquis à titre onéreux au cours du PACS, mais ce régime est assorti d’une présomption d’indivision. Autrement dit, tous les biens pour lesquels aucun des partenaires ne peut justifier qu’il en a la propriété exclusive sont réputés appartenir aux deux. Le régime conventionnel Si le régime légal ne satisfait pas les partenaires, ils peuvent opter pour un régime d’indivision pour tous les biens acquis pendant la durée du PACS, qu’ils aient acquis ces biens ensemble ou séparément. L’article 515-5-2 du Code civil permet néanmoins que, même dans ce régime d’indivision des acquêts, certains biens resteront personnels de par leur nature. Les biens indivis sont soumis à une gestion concurrente, c’est-à-dire que chacun des partenaires a les mêmes pouvoirs que l’autre et peut agir seul à l’égard de ces biens. Toutefois, les partenaires peuvent toujours en décider autrement par leur convention.

Page 12: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 12

CONCLUSION SUR LE COUPLE MARIE ET LE COUIPLE NON MARIE

Entre concubinage et PACS, il existe une profonde différence de nature. Le premier est une situation de pur fait laissée à ce que le couple veut bien en faire et la loi ne lui attache guère d'effets en dehors de certaines dispositions protectrices du logement ou relatives à des droits sociaux. Le second nait d'un contrat écrit entre les partenaires que des effets légaux viennent compléter. Le PACS et le concubinage ne sont pas créateurs de liens d'alliance entre les partenaires, ni entre l'un des partenaire et la famille de l'autre. Chacun de ces deux modes de conjugalité est indifférent au sexe des partenaires. Au contraire, jusqu'en 2013, le mariage était réservé aux couples de sexe opposé. Depuis 2013, les législateurs français ont voté le mariage pour tous, personnes de sexe opposé ou personnes de même sexe. Le mariage est la forme qui procure la protection la plus ample, même si la réforme du PACS de 2006 rapproche peu à peu le statut du mariage à celui des droits et obligations des pacsés.

L'évolution juridique de ces couples traduit des enjeux sociaux, sociétaux, patrimoniaux, filiaux, fiscaux,

politiques.

III. La cessation du couple Pour les personnes vivant en concubinage, la séparation se traduit bien souvent par un simple déménagement. Pour les couples mariés, la mésentente et la volonté de retrouver sa liberté doivent obligatoirement donner lieu à un divorce. La séparation sera plus ou moins difficile en fonction de la volonté de chacun, de la présence ou non d'enfants et des règles du régime matrimonial régissant le patrimoine du couple.. Epreuve douloureuse sur le plan personnel car il est le symbole d'une mésentente dans son couple, le divorce peut également l'être sur un plan financier. A. Le divorce 1. Evolutions juridiques du divorce Aujourd'hui présenté comme un droit, le divorce n'a pas toujours fait l'unanimité car il a été supprimé de 1816 à 1884 (sous la restauration). C'est une loi de 1975 qui régit le divorce actuellement En Grèce antique, le divorce existe sous des formes diverses suivant les cités. À Athènes, il peut être obtenu par consentement mutuel ou sur l'initiative de l'un des conjoints. Quand il est demandé par le mari, il prend la forme d'une répudiation : il suffit au mari de renvoyer sa femme du domicile conjugal, sans qu'il lui soit besoin de se justifier. En pratique, la dot constitue un frein puissant : lorsque le mariage est dissous, la femme récupère sa dot — sauf en cas d'adultère — avec un intérêt. Chez les Romains, le divorce a été pratiqué. Au début, le droit de divorcer était réservé aux hommes, mais très rapidement les femmes obtiennent ce droit. Le mariage qui était dans un premier temps un rituel religieux et social se désacralise comme le reste de la société romaine. Il était codifié dans le droit. À la fin de l'Empire, le divorce devient à peine formel, car pour des raisons de simplification, le mariage est assimilé à un contrat. Les célibataires restant cependant défavorisés par la loi (impôt...). Au début du Moyen Age, le mariage ne permet que de sceller des alliances. Il est donc considéré comme normal de pouvoir rompre le mariage. Certaines lois prévoient: la répudiation de la femme par le mari, avec de nombreux cas possibles, la répudiation du mari par la femme, plus restrictive et le divorce par consentement mutuel. L'Eglise catholique romaine n'est guère favorable au divorce et, considère le mariage comme indissoluble. Pendant longtemps, deux doctrines s'opposent. L'une tend à considérer que le mariage ne peut être rompu dans aucun cas L'autre réserve le divorce au cas d'adultère de la part de l'épouse Le 20 septembre 1792 , une loi permettant aux deux conjoints de rompre leur mariage est adoptée. Le divorce peut être prononcé par consentement mutuel (deux ans de vie commune minimum), pour « incompatibilité d'humeur ou de caractère » ou encore pour des causes imputables à un des époux (préfigurant le « divorce pour faute »). Le divorce devient alors une procédure simple, sans juge, qui n'oblige pas les époux à motiver leur demande. Le divorce peut être proclamé sans aucun motif. Un mariage sur trois est dissous de cette façon à cette époque. En 1804, le code civil français revient sur la réforme précédente : le divorce est judiciaire, prononcé par un tribunal. Le divorce par consentement mutuel est conservé (clause aménagée par Napoléon qui souhaite se séparer à l'amiable de Joséphine), mais à des conditions tellement restrictives qu'il tombe en désuétude (autorisation des parents, cinq comparutions devant le président du tribunal, interdiction de remariage dans les trois ans suivant le divorce...). Seul le divorce pour faute reste appliqué

.

Page 13: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 13

Le 8 mai 1816, le divorce est de nouveau supprimé par la loi Bonald. Il est considéré comme un « poison révolutionnaire ». La royauté veut « rendre au mariage toute sa dignité dans l'intérêt de la religion, des mœurs, de la monarchie et de la famille ». Dans les décennies suivantes, de nombreux débats ont eu lieu à ce sujet. Le rétablissement du divorce sera une des premières revendications des défenseurs des droits de la femme. Après trois veines tentatives de propositions de lois, en juillet 1884, Alfred Naquet réussit à faire accepter une loi sur le divorce. Le divorce est de nouveau autorisé mais seulement en cas de fautes précises graves (adultère, condamnation à une peine afflictive et infamante, excès, sévices et injures graves). Dans les années suivantes, d'autres lois interviennent pour modifier ces dispositions : En 1886, une loi contribue à simplifier la procédure En 1893, une autre loi donne à la femme divorcée pleine capacité. Le 15 décembre 1904 est promulguée une loi autorisant le mariage de l'épouse adultère avec son complice. La

même loi modifie le sort des enfants adultérins : leur légitimation semble plus facile, mais certains craignent une sorte de bigamie qui permettrait au père d'avoir des enfants légitimes nés de plusieurs femmes.

Le 6 juin 1908, une loi permet de rendre obligatoire pour le juge la demande de conversion de séparation de corps en divorce présentée par l'un des deux époux trois ans après le jugement.

Le consentement mutuel n'étant pas admis, deux époux qui ne demanderaient qu'à se séparer à l'amiable sont obligés de s'écrire l'un à l'autre, le plus souvent sous la dictée de leurs avocats, des lettres d'insultes que l'on pourra ensuite produire devant les tribunaux .... Le régime de Vichy est peu favorable au divorce. La loi d’avril 1941 empêche les couples mariés depuis moins de trois ans de divorcer et transforme en délit l'incitation au divorce par un tiers. Avant la réforme de 1975, le divorce-sanction établissait qu’au moins l’un des époux avait manqué à l’un des devoirs auxquels il s’était engagé par le mariage. Les enfants “étaient confiés à l’époux qui a obtenu le divorce”, souvent la mère, à qui était transféré l’exercice de la puissance paternelle, sauf décision contraire du tribunal. L’époux fautif devait s’effacer, même s’il conservait le “droit de surveiller l’entretien et l’éducation de l’enfant et d’y contribuer à proportion de [ses] facultés”, ce qui signifiait qu’il était condamné à continuer d’assurer la sécurité financière de la famille si, cas le plus fréquent, il en était le pourvoyeur. Le 11 juillet 1975 est votée une réforme profonde du divorce. Elle retient trois causes de divorce, énoncées à l'article 229 du code civil : le divorce par consentement mutuel (à l'amiable), la rupture de vie commune, le divorce pour faute (le seul existant déjà). Le divorce pour faute peut être prononcé quand l'un des époux est condamné à une peine infamante (bien qu'en toute logique ce ne soit jamais la peine qui soit infamante, mais bien le crime qui a motivé la condamnation). Avec la promulgation du nouveau Code pénal, la mention des peines infamantes a été remplacée par une référence aux peines criminelles (dix ans de prison au moins). En une trentaine d’années, le divorce s’est banalisé. Les évolutions sociales qui avaient conduit à introduire le consentement mutuel se sont accélérées et ont bouleversé les enjeux du divorce. Trois évolutions ont transformé le divorce:

la montée de l’activité professionnelle des femmes qui atténue l’enjeu financier. la montée de l’enjeu de l’intérêt de l’enfant et l’évolution du contenu de la notion : de la stabilité à la

coparentalité. l’accent mis sur le bonheur, la liberté individuelle et l’authenticité des sentiments

La loi du 26 mai 2004 vise à simplifier les procédures de divorce. L'objectif était d'apaiser les relations entre les époux qui recourent au divorce, tout en maintenant le caractère judiciaire du divorce. Désormais, l'article 229 nouveau du code civil reconnaît quatre cas de divorce : le divorce par consentement mutuel (art. 230) ; le divorce par acceptation du principe de la rupture du mariage (art. 233); le divorce par altération définitive du lien conjugal (art. 237) ; le divorce pour faute (art. 242), en voie de disparition. Cette loi favorise la conciliation entre les époux devant le juge et donne plus de pouvoirs à celui-ci. Les Philippines et le Vatican sont aujourd'hui les deux seuls états qui interdisent le divorce dans leurs législations respectives, après que le Chili en 2004 et Malte en 2011, l'ont autorisé En cours de discussion: le 2 janvier 2014, un rapport soumis à la garde des Sceaux, Christiane Taubira, veut confier au seul greffier la procédure de divorce par consentement mutuel, qui représente plus de la moitié des divorces prononcés en France. Ce rapport sur « le juge du XXI

e siècle » avait pour objectif principal de désengorger les

Page 14: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 14

juridictions. Se pose alors la question fondamentale du statut de ce « super greffier » qui ne dispose pas des mêmes protections que les juges aux affaires familiales. 2. Les différents divorces Contrairement à une idée reçue, il n'existe pas un seul divorce mais le code civil en présente quatre différents selon la situation de chaque couple et l'entente des époux. Le divorce pour faute Une seule faute suffit pour demander le divorce si elle est suffisamment grave. Cependant, l'accumulation de petites fautes peut également conduire le juge à prononcer le divorce. La faute peut être : - l'adultère (violation du devoir de fidélité), - l'abandon du domicile conjugal (violation du devoir de cohabitation), - la condamnation judiciaire à une peine afflictive ou infamante (peine de prison par ex.), - la non consommation du mariage (refus de relations sexuelles) - ou la non contribution aux charges du mariage. Le juge peut également prendre en compte les violences de tous types (coups et blessures ainsi que toutes les violences physiques, injures ou attitude volontairement vexatoire). Il appartient toujours à celui qui demande le divorce de prouver la faute du conjoint. La faute peut se prouver par tout moyen. En conséquence, les époux se livrent parfois à une guerre où tous les coups sont permis. Les preuves peuvent être constituées par le demandeur mais peuvent également émaner de tierces personnes. Ainsi, les preuves peuvent être des certificats médicaux ou des rapports de police (c'est la main courante) en cas de brutalité. L'adultère peut être prouvé par différents moyens tels que des photos, témoignages ou constat d'huissier (constat d'adultère)... Le divorce pour faute n'est pas seulement une simple audience durant laquelle s'affronte les époux mais il se compose de plusieurs phases et la demande de divorce peut ne pas aboutir pour un certain nombre de raisons (manque de preuve, défense du conjoint, etc.). Le divorce par consentement mutuel Le divorce par consentement mutuel présente deux formes différentes: * Soit il y a demande conjointe de la part des deux époux * Soit il y a une demande présentée par l'un et acceptée par l'autre. Lorsque les deux époux sont décidés à se séparer, ils peuvent présenter une demande conjointe de divorce. La principale cause est le consentement libre et persistant des époux (article 230 du code civil). Le consentement doit cependant être total, c'est à dire qu'il doit porter sur le principe du divorce mais également sur les mesures provisoires et sur les conséquences de la séparation. Le juge doit pouvoir apprécier cet accord grâce à la convention que les époux doivent rédiger, par le biais d'un avocat. Le rôle du juge est donc de constater la volonté commune de séparation et d'homologuer la convention de divorce rédigée. Il a également le devoir de protéger les enfants du couple ainsi que les intérêts de chacun des époux. Il peut donc, si ces intérêts sont insuffisamment protégés, refuser l'homologation de la convention et de prononcer le divorce. Concrètement, la requête en divorce doit comporter une convention réglant les conséquences du divorce. Après avoir enregistré la demande de divorce, le juge convoque les époux à une audience au cours de laquelle il examine la demande avec chacun des époux puis avec les deux. Le divorce sera en principe prononcé dès cette première audience devant le juge, si celui-ci considère que la volonté des époux est réelle et que les intérêts de chacun sont suffisamment protégés. En revanche, si la convention préserve insuffisamment les intérêts de chacun, le juge peut refuser de l'homologuer. Dans cette hypothèse, le juge rend une ordonnance d'ajournement qui peut prévoir des mesures provisoires convenues avec les deux époux. Les époux doivent présenter une nouvelle convention dans le délai de 6 mois (à partir de l'ordonnance du juge). A défaut, la demande en divorce est caduque. L'avantage de cette procédure est la rapidité et la grande liberté accordée aux époux dans le règlement de leur divorce. En outre, la loi permet aux deux époux de choisir un seul avocat pour présenter leur demande, ce qui réduit les frais de la procédure.

Page 15: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 15

Le divorce par acceptation du principe de la rupture du mariage Ce type de divorce est conçu pour être utilisé par des époux d'accord sur le principe mais non sur les effets du divorce, dont ils confient le règlement au juge. Les deux époux n'ont pas à présenter une requête conjointe, il suffit que la requête présentée par l'un soit acceptée par l'autre. L'avocat représentant l'époux demandeur dépose la requête à fins de divorce au greffe du Tribunal de Grande Instance. Ce divorce repose sur le simple accord des parties quant à leur rupture sans énonciation des motifs (article 233 Cciv.). Il appartient au tribunal d'informer le second époux de la demande de divorce. Le juge se doit, dans cette procédure, d'opérer une tentative de conciliation entre les époux. Sinon, lors de l'audience, le juge règle les différends qui subsistent entre les époux puis prononce le divorce. Le divorce pour altération définitive du lien conjugal Lorsque des difficultés surgissent, certains couples choisissent de se séparer et cessent toute cohabitation, c'est la séparation de fait. Le divorce pour rupture de la vie commune peut être demandé si les époux ont cessé toute cohabitation et vivent séparés de fait depuis au moins deux ans (article 238 du code civil). La séparation de fait doit comporter trois éléments :

un élément matériel : l'absence de cohabitation un élément intentionnel qui peut être le fait d'un seul époux, c'est ainsi qu'une séparation liée à une mutation

professionnelle ne peut pas être prise en compte un élément temporel : une durée consécutive d'au moins deux ans

La durée doit être continue et une tentative de réconciliation avec reprise de la vie commune annule en principe la séparation antérieure. Cependant, selon les cas, certains juges peuvent accepter la demande, même s'il y a eu une ou plusieurs reprises temporaires de la vie commune. Ces reprises doivent avoir été de très courte durée car la réconciliation met fin à la période de séparation. Il est possible, pour passer outre cette réconciliation, affirmer que ces retrouvailles étaient fictives car liées à la volonté de ne pas troubler les enfants. La décision de retenir ou non la réconciliation n'appartient qu'au juge. Ce divorce représente parfois la seule chance de divorce dans le cas où le conjoint est irréprochable et qu'il refuse obstinément le divorce. Comment divorcer ? + le rôle du juge aux affaires matrimoniales Seul un officier d'état civil (le maire) peut valablement célébrer le mariage de deux personnes. A l'inverse, seul le juge peut dissoudre le lien matrimonial et prononcer le divorce. Il est aujourd'hui impossible de divorcer autrement qu'en obtenant du juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance un jugement de divorce. Le JAF (juge aux affaires familiales) est une création de la loi du 8 janvier 1993, qui a modifié un certain nombre de points du droit de la famille. Ce juge remplace le juge aux affaires matrimoniales (JAM) et obtient un certain nombre de domaines d'intervention supplémentaires. Ce juge est délégué par le Tribunal de Grande Instance pour prononcer le divorce. Le principe est donc le juge unique mais chaque époux peut demander le renvoi de l'affaire à une audience collégiale. Il est seul compétent pour : - prononcer le divorce, - statuer sur les modalités de l'exercice de l'autorité parentale, - statuer sur la modification de la pension alimentaire après le prononcé du divorce. Le recours à un avocat est obligatoire (article 751 du nouveau code de procédure civile). . Le Tribunal de Grande Instance met à la disposition des personnes dépourvues de ressources la possibilité d'accéder gratuitement à la justice grâce à l'aide juridictionnelle. Cette aide permet également aux personnes disposant de faibles revenus d'obtenir une aide de l'Etat. Avant de prendre toute décision réglant le sort des enfants (autorité parentale, droit de visite), le juge peut demander la réalisation d'une enquête sociale (article 287-2 du code civil). 3. Les conséquences du divorce Après le prononcé du divorce par le juge aux affaires familiales, les époux se retrouvent dans la situation d'avant mariage. Aucun lien, sauf ceux qui découlent du jugement de divorce ne subsiste entre les époux. Chacun des époux est donc libre de se remarier, y compris avec son ex-conjoint, en procédant à une nouvelle cérémonie de mariage. Une inégalité entre hommes et femmes a subsisté jusqu'en 2004 encore en ce domaine. L'homme est en effet libre de

Page 16: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 16

se remarier immédiatement après le prononcé du divorce. La femme devait cependant respecter un délai de viduité de 300 jours, avant de pouvoir contracter un autre mariage. (le délai correspond à la période normale de grossesse). Après le divorce, chacun des époux reprend, en principe, l'usage de son nom (article 264 du code civil). Dans tous les cas de divorce, l'autorisation du mari est nécessaire pour que la femme conserve le droit d'usage de son nom. Pour en bénéficier, la femme doit alléguer d'un intérêt particulier. Ce peut être pour que les enfants portent le même nom qu'elle, mais ce peut également être un intérêt professionnel, si la femme est exclusivement connue sous ce nom (professions libérales ou en relation avec de la clientèle). Néanmoins, le juge peut l'accorder même en cas d'opposition du mari. Les droit des époux sur le logement familial varient selon qu'ils en étaient locataires ou propriétaires et que le droit appartenait à l'un d'entre eux ou était en commun ou indivis. - Si le logement était loué à un seul conjoint, le juge peut attribuer le bail à l'un des époux (article 1751 du code civil). - Si le logement est un bien commun, il peut être attribué à l'un des conjoints par le juge (article 832 du code civil). - Si l'un des époux en était propriétaire, le juge peut lui laisser ou l'obliger à consentir un bail à son conjoint qui a la garde des enfants (article 285-1 du code civil). Le juge confie le plus souvent le logement à celui des parents qui à la garde des enfants pour éviter le plus possible de changer leurs habitudes. Le divorce n'emporte d'effets qu'envers les époux et il ne change rien aux droits et devoirs des parents à l'égard des enfants. Le divorce va seulement modifier la manière dont ces droit et devoirs vont s'exercer. Depuis la loi du 8 janvier 1993, l'autorité parentale continue après le divorce d'être exercée en commun par les deux parents. Les parents conservent, après leur divorce, une obligation de contribuer aux frais d'entretien et d'éducation de leurs enfants. En conséquence, le parent chez qui l'enfant n'a pas sa résidence habituelle doit verser à l'autre une pension alimentaire afin d'assurer ses devoirs. La pension définitive est fixée par le jugement de divorce. Il n'y a pas de barème fixé par la loi. Le juge fixe la pension en tenant compte des " facultés contributives des époux ". Il apprécie les besoins des enfants et les ressources des parents. Il répartit ensuite la charge de l'entretien en proportion de ce que chacun des deux parents peut assumer. La révision de la pension est possible en cas de modification des ressources de l'un des parents ou des besoins de l'enfant (chômage, départ de l'enfant en pension dans une autre ville, stage ou école à l'étranger, etc.). Il doit s'agir d'un fait nouveau, sérieux, imprévisible lors de la fixation. La demande de révision se fait par saisine du juge aux affaires familiales. La pension alimentaire à l'égard de l'ex-conjoint(e) correspond à la survie, dans certains cas, du devoir de secours contracté envers son conjoint lors du mariage. Elle est destinée à couvrir les besoins alimentaires du conjoint au cours de la procédure de divorce ou après séparation de corps. Le juge aux affaires familiales saisi d'une demande de divorce, peut attribuer une pension alimentaire en cours de procédure. Cette pension ne peut être accordée que si l'époux demandeur est dans le besoin et non pour indemniser l'époux (se) du départ de son conjoint. Une pension alimentaire peut également être accordée en fin de procédure par le jugement de séparation de corps au profit d'un des époux s'il est dans le besoin (même si des torts ont été relevés à l'encontre de celui qui la demande).

La prestation compensatoire est destinée à compenser, dans tous les cas de divorce, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de la vie matérielle de chacun des époux. En conséquence, elle est attribuée à l'époux qui dispose des revenus les plus faibles. En cas de non paiement, divers moyens sont mis à votre disposition: la procédure de paiement direct, la procédure de saisie, le paiement par la caisse d'allocations familiales. B. La cessation du concubinage La décision de chaque concubin de rompre l'union, doit pouvoir être exercée en toute liberté. Elle n'est pas, à la différence des époux, soumise à l'appréciation du juge aux affaires familiales. La situation est susceptible de se modifier par la seule volonté de l'un des deux concubins quand bon lui semble, sans cause, sans procédure, et sans effets. Si le concubin délaissé veut obtenir réparation, il devra prouver qu'en l'abandonnant, l'autre concubin commet une faute, qu'il en éprouve un dommage direct, actuel et certain, et que son dommage découle de cette faute.

Page 17: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 17

Il a 10 ans pour agir à compter de la rupture de la relation. Le dommage peut être moral (atteinte dans ses affections) ou matériel (avantage matériel retiré de la vie commune, perte du soutien financier que l'auteur de la rupture assurait à son compagnon). Tous les modes de preuve sont admissibles. Le Tribunal de grande instance du domicile du défendeur est le seul compétent pour ce type de litige. Pour la liquidation du patrimoine des concubins dans le cadre de leur vie commune, la preuve du droit de propriété des biens meubles peut être recherchée dans toute sorte d'écrit (factures, bons de commande). En matière immobilière, la preuve est rapportée d'après le titre de propriété établi par le notaire. Aux termes de l'article 815 du Code Civil, nul ne peut être contraint de rester dans l'indivision. Aussi un droit au partage est prévu pour tout indivisaire. Le partage du bien est effectué en fonction des apports de chacun dans l'achat des biens indivis, si la preuve peut en être rapportée. A défaut, les Juges divisent en parts égales la valeur des biens acquis. C. La rupture du PACS Le PACS prend fin soit par rupture volontaire, soit par le mariage de l'un des deux partenaires ou des deux ensembles, soit par le décès. La rupture peut être bilatérale lorsque les partenaires décident d'un commun accord de mettre fin au PACS. Ils remettent une déclaration conjointe écrite au Greffe du Tribunal d'Instance, dans le ressort duquel, l'un d'entre eux au moins a sa résidence. Le greffier inscrit cette déclaration sur un registre, et en assure la conservation. Lorsque l'un des partenaires décide de mettre fin au PACS, il signifie à l'autre sa décision, et adresse copie de cette signification au greffe du Tribunal d'Instance qui a reçu l'acte initial. Les partenaires procèdent eux-mêmes à la liquidation des droits et obligations résultants du PACS. A défaut d'accord, le Tribunal de Grande instance du domicile du défendeur est saisi et statue sur les conséquences personnelles et patrimoniales de la rupture. PARTIE 3. LA FILIATION La filiation est le lien de droit qui unit un enfant à sa mère (filiation maternelle) et/ou à son père (filiation paternelle). Elle repose en principe sur un lien du sang, sans pour autant être réduite au tout biologique. En effet, la filiation peut aussi être fondée sur la réalité sociologique et affective caractérisée par la possession d'état, c'est à dire le fait que l'enfant est traité par telles personnes comme leur enfant, qu'il a la réputation dans l'entourage et le milieu social d'être le leur et qu'il porte généralement leur nom. II. L'établissement légal de la filiation A. Evolutions juridiques de la filiation Pendant longtemps, l'enfant légitime, conçu ou né durant le mariage, fut seul considéré par la loi qui accordait au mari le monopole du désaveu de sa paternité en cas d'adultérinité. L'enfant illégitime est placé dans une situation inférieure. L'enfant naturel simple, né de parents non mariés, pouvait être reconnu tandis que l'enfant adultérin ne pouvait pas l'être par son parent adultère. La loi cherchait à protéger le mariage. Sous l'Ancien Régime, les enfants nés hors mariage (les « bâtards », qu'ils soient naturels ou adultérins n'héritaient ni ne pouvaient laisser d'héritage. Sous la révolution, puis avec le code Napoléon, les droits des enfants adultérins et naturels ont plusieurs fois changés.

La période qui s'étend de 1900 à 1970 voit l'enfant naturel, et donc la filiation par le sang, s'assurer une position toujours plus importante. » La loi du 2 juillet 1907 reconnaît aux parents naturels (la mère seule le plus souvent), quoique avec restrictions, l'exercice de la puissance paternelle. L'enfant adultérin, quant à lui, ne pouvait toujours rien réclamer en justice, ni filiation, ni héritage, ni pension alimentaire, situation qui perdura durant toute l'entre-deux-guerres. La loi du 3 janvier 1972 a assimilé complètement la situation de l'enfant naturel et de l'enfant légitime, en déclarant : « L'enfant naturel a en général les mêmes droits et les mêmes devoirs que l'enfant légitime ; il entre dans la famille de son auteur ».

Page 18: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 18

L'enfant adultérin, quant à lui, a gagné les droits à établir sa filiation, et est considéré à part entière comme un membre de la famille, sauf pour ce qui concerne l'héritage, où il n'a droit qu'à la moitié de ce qu'il aurait eu droit en tant qu'enfant légitime ou naturel

. La loi apporte aussi une plus grande exigence de vérité biologique dans les

filiations. Tout enfant né dans le cadre du mariage bénéficie d'une présomption automatique de paternité : le droit assume que le mari est le père. Toutefois, la loi de 1972 a aussi permis le désaveu de paternité en cas d'impossibilité biologique ; on a aujourd'hui recours aux tests ADN pour vérifier celle-ci, qui n'étaient autorisés qu'en cas de présomptions et d'indices graves selon lesquels il y aurait eu adultère. La loi de 1972 a aussi innové par rapport au Code Napoléon en permettant à la femme de contester la paternité en cas de remariage. Une femme mariée peut aussi déclarer son enfant à son nom, en omettant d'inscrire le nom de son mari, ce qui en fait un « enfant naturel adultérin ». L'évolution du droit sera progressive: tout d'abord pour l'enfant naturel non adultérin puis pour l'enfant adultérin (1972). Ce n'est qu'en 2005, que le droit a supprimé les expressions "enfant légitime" et "enfant naturel" pour traduire dans la législation la pleine égalité entre les enfants quelques soient les circonstances de leur naissance. Il reste les enfants incestueux (enfants issus de parents proches). La filiation ne peut être établie qu'envers le père ou envers la mère. La jurisprudence fonde cet interdit sur la protection de l'ordre public et des bonnes mœurs, sur les valeurs morales de la société et sur l'intérêt supérieur de l'enfant à ne pas être affublé d'une filiation réputée honteuse. Il n'y a de lien légal de filiation que s'il est établi et déclaré dans les conditions prévues par la loi: le lien de filiation maternelle découle de la simple désignation de la mère dans l'acte de naissance de l'enfant. Le lien de filiation paternelle d'un enfant né dans le mariage découle de la désignation du mari dans l'acte de naissance en qualité de père de l'enfant né de son épouse et dont il est présumé le père. A défaut, un lien de filiation maternelle ou paternelle ne pourrait être établi qu'à l'occasion d'une action en justice où il aurait à être prouvé. La filiation est le lien juridique qui unit un enfant à ses parents. Que les parents soient mariés ou non, tous les enfants sont aujourd'hui égaux devant la loi. Les discriminations entre enfants légitimes et naturels ont été abrogées.

C'est la loi du 13 juillet 1965 sur la réforme des régimes matrimoniaux qui consacre l'égalité entre époux, le partage de l'autorité parentale.

Le 27 juin 2014 a été adoptée une proposition de loi pour favoriser l'exercice conjoint de l'autorité parentale et reconnaître des droits aux beaux-parents

Actualité: Les députés britanniques se sont prononcés, mardi 3 février 2015, en faveur de la fécondation in vitro « à trois parents » dans le but d’empêcher la transmission de maladies génétiques grave de la mère à l’enfant, lié à un dysfonctionnement mitochondrial. Avec cette thérapie germinale, on modifie le génome, on introduit 1 % d’un génome qui vient d’ailleurs et on ne sait pas quel impact cela risque d’avoir. Le changement sera permanent et se transmettra de génération en génération. Les parents seraient le couple receveur. Le donneur serait étranger à la vie future de l'enfant. Certaines réactions mettent en garde contre un risque d’eugénisme (dérives possibles).

B. Les moyens de preuve de la filiation Il existe trois moyens pour prouver la filiation : le titre, la possession d'état, la reconnaissance, la présomption de paternité. 1. La possession d'état Elle découle de l'attitude du couple à l'égard de l'enfant : ils l'élèvent comme le leur, s'occupent de son entretien et de son éducation. La possession d'état doit être continue, paisible, publique et non équivoque. Elle doit être constatée par acte de notoriété. 2. La présomption de paternité La présomption de paternité du mari s'applique aux enfants qui sont conçus dans le mariage; aux enfants qui sont nés pendant le mariage, bien qu'ils aient été conçus avant la célébration de celui-ci. L'enfant qui a été conçu après la dissolution du mariage, ne bénéficie plus d'aucune présomption de paternité.

Page 19: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 19

Cependant il existe des restrictions: *Première hypothèse: lorsque l'enfant a été conçu pendant une période de séparation légale, c'est à dire pendant une période où les époux étaient dispensés par une décision de justice du devoir de cohabitation: par exemple, en cas de séparation de corps ou de procédure de divorce. * Deuxième hypothèse est celle où l'enfant a été déclaré à l'état civil sans l'indication du nom du mari. Si ces 2 circonstances écartent la présomption de paternité du mari, il faut bien constater que cette paternité n'est pas totalement cependant impossible. C'est pourquoi la loi a prévu que la présomption de paternité du mari qui ne joue pas de plein droit, peut être rétablie à la vue des circonstances. Deux cas prévus par la loi: - La présomption de paternité est rétablie de plein droit, si l'enfant a la possession d'état à l'égard des deux époux et si la filiation n'est pas déjà établie à l'égard d'un autre homme que le mari - Elle peut également être rétablie par un jugement La présomption de paternité du mari n'est pas une présomption irréfragable et elle peut être contestée par différentes actions. Les conditions dans lesquelles cette preuve peut être rapportée diffèrent selon que l'enfant a ou non possession d'état. 3. La déclaration de naissance Déclarer la naissance est une obligation légale. C'est le simple constat qu'un être humain vient de naître. C'est au père de l'enfant de déclarer la naissance à la mairie du lieu de naissance, où l'officier d'état civil écrira sur le registre, le jour, l'heure, le lieu de naissance, le sexe de l'enfant et les prénoms donnés, dans les trois jours, non compris le jour de l'accouchement ; si le troisième jour tombe un samedi, dimanche ou férié, le délai est reporté au jour ouvrable suivant. Toutefois, à défaut de père, la mère peut faire déclarer l'enfant par un préposé de la maternité, ou le déclarer elle même. La déclaration qui mentionne la femme en tant que mère ne suffit pas. Il faut donc en plus, reconnaître cet enfant. Ainsi, un acte de reconnaissance est indispensable pour créer le lien de filiation entre l'enfant et les parents. 4. La reconnaissance La reconnaissance est différente de la déclaration de naissance. La reconnaissance est l'acte volontaire par lequel un parent déclare être l'auteur de l'enfant et vouloir établir le lien de filiation. C'est un acte juridique. Il n'y a pas de formule rituelle à prononcer. Acte essentiellement personnel, la reconnaissance ne peut émaner que du parent lui-même. La reconnaissance peut se réaliser de diverses manières : - Par déclaration devant l'officier d'état civil dans l'acte de naissance ou par acte séparé. - Par acte notarié: Cela peut être fait ainsi par testament lorsqu'un parent ne veut pas que sa paternité ou sa maternité soit connue de son vivant. - Par reconnaissance en justice, résultant d'une déclaration faite devant un juge, lors d'une comparution personnelle par la mère et le père. La reconnaissance peut se faire avant ou après la naissance. La reconnaissance peut être attaquée si la preuve est rapportée de son caractère mensonger. Ainsi, son auteur a pu agir par intérêt, par complaisance, par générosité ou par erreur (art 339 du Code Civil), si cette reconnaissance s'accompagne ou non d'une possession d'état de 5 ans. C. L'établissement judiciaire de la filiation Cette action concerne les enfants nés hors mariage. 1. L'action en recherche de paternité L'action en recherche de paternité, n'appartient qu'à l'enfant. Néanmoins, bien qu'elle lui appartienne, elle est plus souvent intentée pendant sa minorité, et il doit être représenté par sa mère. Si l'enfant est majeur, il agira lui-même. L'action est exercée contre le père prétendu, ou contre ses héritiers s'il est décédé. La preuve peut être faite par tout moyen. L'action peut aboutir soit à la déclaration de la paternité, soit au rejet de la demande. Lorsque la demande est accueillie, la paternité est établie avec toutes les conséquences qui en découlent. Si l'action est rejetée, les Juges peuvent néanmoins allouer des subsides à l'enfant, dès lors qu'ont été démontrées les relations intimes entre la mère de l'enfant et le défendeur.

Page 20: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 20

2. L'action en recherche de maternité Cette action est extrêmement rare car elle concerne très peu d'enfant. Cette action peut être intentée lorsque le nom de la mère n'est pas mentionné sur l'acte de naissance de l'enfant, ou dans le cas d'un enfant adopté simple par une autre femme, ou pour les enfants abandonnés. L'enfant adopté plénier ( cf. II. B.) ne peut en aucun cas intenter une action en recherche de maternité. L'action en recherche de maternité doit être intentée par l'enfant avant son 28ème anniversaire devant le Tribunal de Grande instance du défendeur (de la mère présumée). Elle ne peut être intentée que s'il existe des indices graves de sa maternité. L'enfant devra apporter la preuve : de l'accouchement de la mère le jour de sa naissance, et prouver qu'il est son enfant. En cas de succès de l'action, le jugement établira la filiation naturelle de l'enfant à l'égard de sa mère et sera inscrit en marge de l'acte de naissance. Cas particulier des accouchements sous X: L'accouchement sous X est traditionnellement défini comme la possibilité pour une femme d’abandonner son nouveau-né aux services de l’État et le droit de demeurer anonyme aux yeux de la société. Cette fiction juridique du droit français permet à une femme d'accoucher puis d'abandonner le nouveau-né sans que soit relevé son identité, ni sa responsabilité engagée (délit de délaissement d'enfant, art. 227-1 du code pénal). L'accouchement n'est pas censé avoir eu lieu. La parturiente peut laisser son nom dans une enveloppe scellée en papier, ce qui, en cas de décès durant l'accouchement, facilite la rédaction de l'acte de décès. 3. Les effets de la filiation établie L'attribution du nom de l'enfant Lorsque la filiation d'un enfant est établie à l'égard des deux parents au plus tard le jour de la déclaration de sa naissance ou par la suite mais simultanément, ces derniers peuvent choisir le nom de famille : * soit le nom du père * soit le nom de la mère * soit les deux noms accolés dans l'ordre choisi par eux dans la limite d'un nom pour chacun d'eux. L'autorité parentale Il s'agit de l'ensemble des droits et des devoirs des parents vis-à vis de leur enfant. L'enfant est placé par la loi sous l'autorité de ses parents jusqu'à sa majorité ou son émancipation. Les parents sont investis vis-à-vis de leurs enfants d'un devoir d'éducation, d'entretien, se surveillance. L'enfant a également un devoir de respect envers ses parents. Il ne peut quitter le domicile familial ou se marier sans leur accord..... (cf. le mariage, le divorce) Les enfants, les petits enfants, les gendres et les belles-filles sont tenus vis-à-vis de leurs parents d'une obligation qui leur impose de leur porter assistance en cas de besoin. Si l'enfant refuse de verser une aide, les parents pourront demander au juge aux affaires familiales le versement d'une pension alimentaire. L'autorité parentale est exercée conjointement par les deux parents. En cas de décès de l'un des parents, le second exercera seul l'autorité parentale. Le décès des deux parents donne lieu à l'ouverture d'une tutelle. L'autorité parentale et la garde de l'enfant seront alors confiées à un tuteur, sous la surveillance du conseil de famille. Sans pour autant créer un statut particulier pour les beaux-parents, la loi sur l'autorité parentale du 4 mars 2002 précise que le beau-parent peut bénéficier d'une délégation d'autorité parentale. Il peut en outre se voir confier l'enfant par décision judiciaire ou encore intervenir indirectement dans la saisine du juge aux affaires familiales. Parallèlement la loi affirme le droit de l'enfant à avoir ou maintenir des relations personnelles avec les tiers, dont les grands-parents ou le beau-parent.

Le 27 juin 2014 a été adoptée une proposition de loi pour favoriser l'exercice conjoint de l'autorité parentale et reconnaître des droits aux beaux-parents. Il pose le principe de la double domiciliation de l'enfant d'un couple séparé, sans préjuger du temps passé chez l'un et l'autre. En outre, le texte prévoit la création d'un mandat d'éducation quotidienne pour les beaux-parents, moyennant l'accord des deux parents (concubin, partenaire de Pacs ou conjoint). Il permettra au beau-parent d'accomplir les actes de la vie quotidienne de l'enfant. Mais ce texte encourage aussi la médiation familiale pour résoudre les différends entre parents.

Page 21: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 21

C. Les droits d'un enfant à défaut de filiation établie L'enfant qui n'a pas de filiation maternelle établie, sera très souvent également dépourvue de filiation paternelle. Il pourra alors être déclaré pupille de l'état. Lorsque l'enfant n'a de filiation établie qu'envers sa mère, la loi de 1972 lui permet de réclamer des subsides à celui qui a eu des relations avec sa mère pendant la période légale de conception. Ce n'est pas un fondement biologique, la vraisemblance ou la certitude de la paternité n'étant pas nécessaire. Elle doit seulement être possible. C'est un fondement indemnitaire. La preuve des relations peut être faite par tout moyen, y compris par une expertise sanguine, rendant la paternité probable, ou même par le refus systématique du défendeur de s'y soumettre. Elle est difficile à établir du fait même de l'intimité des rapports. En cas de succès de l'action, les subsides sont des versements effectués pour subvenir à l'entretien et l'éducation de l'enfant. Les subsides se calculent en fonction des besoins du créancier, des ressources du défendeur, et de la situation familiale de ce dernier. Cela prend la forme d'une pension. II. La filiation adoptive

L’adoption est une mesure de protection de l’enfance destinée à permettre à des enfants qui se trouvent dans une situation d’abandon de retrouver ou d’acquérir une filiation au sein d’un foyer où ils pourront s’épanouir et se développer.

Un enfant adopté a toujours une histoire qui lui appartient et qui, plus ou moins complexe, est marquée par le traumatisme de l’abandon. Aux particularités qui s’attachent à la parentalité adoptive, il convient bien entendu d’ajouter celles qui marquent parfois l’adoption d’un enfant né dans un pays ou au sein d’une culture différente de celle de ses parents adoptifs.

L'adoption est un lien de filiation juridique entre un enfant et des parents qui ne sont pas du même sang. Il existe deux types d'adoption : l'adoption simple et l'adoption plénière. L'adopté devient l'enfant de l'adoptant (lien de filiation) et obtient donc des droits et des devoirs moraux et patrimoniaux. A. Evolutions juridiques de l'adoption Sous l'antiquité, l'adoption concerne donc généralement des adultes qui sont adoptés par un autre adulte n'ayant pas de descendance à qui transmettre leur patrimoine. Avec la fin de l'Antiquité, l'adoption disparait en Europe, elle est même interdite dans certaines conditions. Le code civil de 1804 ne prévoyait que l'adoption de majeurs. Avant l'adoption dite moderne, telle qu'on la connaît depuis la seconde moitié du XX

e siècle, il a existé plusieurs formes

d'adoption. En France, l'adoption moderne, dans le sens de la création d'un lien de filiation, prend son essor au terme de la Première Guerre mondiale. Il s'agissait alors de " faire face aux pertes de guerre ".

La loi du 11 juillet 1966 a fixé les règle de l'adoption.

La législation évolue, toujours dans le sens de la facilitation de l'adoption, jusqu'en 1976 où est définitivement inscrite dans la loi la finalité de « faire famille ».

La loi de 1966, modifiée et complétée par la loi du 6 février 2001 relative à l’adoption internationale et la loi du 4 juillet 2005 portant réforme de l'adoption régissent aujourd'hui l'adoption.

L'adoption est régie par plusieurs textes internationaux de portée et de nature différente. Certains textes cherchent à organiser l'adoption, à protéger les droits de l'enfant ; d'autres ont pour but de faciliter la coopération entre pays pour faciliter l'adoption internationale et lutter contre le trafic d'enfants. Toute adoption doit (dans l'ordre) : répondre à l'intérêt supérieur de l'enfant, en d'autres termes c'est l'enfant qui doit être bénéficiaire des effets de

l'adoption, et non un quelque tiers pour une quelque raison que ce soit ; être autorisée par les « autorités compétentes » ; avoir été vérifiée quant à sa faisabilité par les dites autorités ; faire l'objet du consentement éclairé de ceux qui représentent juridiquement l'enfant. La vérification de ce

consentement éclairé appartient aux mêmes « autorités compétentes ».

Page 22: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 22

Les déclinaisons de ces quatre obligations varient profondément selon les États. Elles constituent cependant, normalement, un socle commun à l'ensemble des procédures nationales mises en œuvre par les pays ayant ratifié la Convention internationale des droits de l'Enfant. Selon les pays, les candidats à l'adoption peuvent être soumis à l'obtention d'un agrément préalable à l'engagement des démarches en vue d'adopter. Les règles relatives à cette démarche relèvent du droit national de chaque pays. Le 29 mai 1993, un traité multilatéral de droit privé, la convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, pose le cadre général de coopération internationale en matière d'adoption internationale. Il décline les principes de la Convention internationale des droits de l'enfant et énumère une série de règles visant à protéger l'enfant lorsqu'est envisagée une adoption internationale et à faciliter la coopération entre les États parties. En décembre 2012, il réunit 89 pays. Le droit français a dû prendre en considération les récentes évolutions du droit de la famille, notamment sur le mariage. En France, l'adoption par un couple de personnes de même sexe relève du régime général de l'adoption depuis la promulgation de la loi du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe. Jusqu'en 2014, la jurisprudence n'a pas admis que l'adoption puisse servir à créer une famille homosexuelle, y voyant un détournement de la loi qui n'autorise que l'adoption par un époux de l'enfant de son conjoint, de sorte qu'un partenaire concubin ou pacsé n'est pas autorisé à adopter l'enfant de l'autre. Cas particuliers : Enfants nés d’une procréation médicalement assistée (PMA) : Également appelée assistance médicale à la procréation et procréation assistée médicalement, la PMA s’entend des pratiques cliniques et biologiques permettant la conception d’un enfant par insémination artificielle, conception in vitro et transfert d’embryons, ainsi que toute technique d’effet équivalent permettant la procréation en dehors du processus naturel. En ce qui concerne la filiation des enfants issus d’une assistance médicale à la procréation avec donneur, les règles de filiation appliquées sont celles du droit commun, à savoir que l’enfant de la femme mariée est présumé avoir pour père le mari de celle-ci. Pour les couples non mariés il faudra procéder à une reconnaissance de paternité. Par ailleurs, avant la réalisation de l'AMP, le couple doit donner son consentement devant un juge ou un notaire. Ce consentement empêche ensuite toute action en contestation de la filiation (en principe la paternité). La loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe constitue une véritable révolution puisqu'elle leur a ouvert l'accès à une filiation partagée par le biais de l'adoption. Auparavant, seul un des membres du couple homosexuel pouvait en effet voir sa filiation établie envers un enfant, même s'il était issu d'un projet commun. Il n'était pas possible d'adopter l'enfant de son partenaire ou de son concubin de même sexe, même si la délégation partage de l'autorité parentale permettait au parent biologique de partager avec son compagnon le simple exercice de l'autorité parentale. Enfants nés d’une Gestation pour autrui (GPA) : Le 26 juin 2014, deux arrêts de la Cour européenne des Droits de l’homme (CEDH) ont condamné la France parce qu’elle a refusé de reconnaître dans son droit la filiation légalement établie à l’étranger d’enfants nés par Gestation Pour Autrui (GPA). Ces arrêts, référés à l’intérêt supérieur de l’enfant, n’obligent pas la France à se diriger vers la légalisation de la GPA. Au contraire, ils précisent que chaque Etat est souverain sur ce sujet. C’est ce qu’a très bien compris l’Espagne, qui a été le premier pays à suivre la CEDH et transcrire les filiations des enfants, bien que n’autorisant pas la GPA sur son sol. Le gouvernement français s’est engagé à ne pas faire appel de cette décision qui prendra effet dans les 47 pays cosignataires de la Convention Européenne des droits de l’homme. Grâce à ces arrêts, les enfants nés par GPA à l’étranger de parents français obtiendront un livret de famille où leurs parents seront reconnus par la France comme ils l’étaient déjà dans le pays de naissance de l’enfant. Ils cesseront d’être traités comme des étrangers dans leur propre pays La France possède un régime sur l'adoption inscrit à l'article 343 et suivant du code civil. C'est un régime séparé en deux possibilités : adoption simple et adoption plénière. B. L'adoption simple L'adoption simple maintient les liens de l'enfant avec sa famille d'origine et crée un nouveau lien avec les adoptants. Peuvent être adoptés simples: - les enfants pour lesquels le père, la mère ou le conseil de famille a consenti à l'adoption - les enfants abandonnés - les pupilles de l'Etat L'adopté simple peut être mineur ou majeur, il n'y a pas de limite d'âge. L'enfant de plus de 13 ans doit consentir lui-même à son adoption.

Page 23: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 23

L'enfant peut être adopté par un parent seul ou par un couple marié. Il existe des conditions d'âge de l'adoptant, qui doit avoir plus de 28 ans et avoir au moins 15 ans de plus que l'adopté. Pour les époux, chacun doit avoir plus de 28 ans ou être mariés depuis 2 ans. L'adoption simple doit être prononcée par jugement. La demande doit être adressée au greffe du Tribunal de Grande Instance ou au Procureur de la République près le Tribunal. La demande se fait par voie de requête aux fins d'adoption simple. Le jugement prononçant l'adoption simple ne met pas fin à la filiation d'origine de l'enfant. Le jugement d'adoption sera inscrit en marge de son acte de naissance. L'enfant adopté porte le nom de l'adoptant soit seul, soit en l'ajoutant à son nom d'origine. L'autorité parentale est dévolue à l'adoptant. L'adopté conserve ses droits de succession dans sa famille d'origine : il peut hériter aussi bien de ses parents adoptifs que de ses parents originels. C. L'adoption plénière Par l'adoption plénière, un enfant perd tout lien avec sa famille d'origine. Les enfants pouvant bénéficier d'une adoption plénière sont les mêmes que ceux pouvant être adoptés simples : - les enfants pour lesquels le père, la mère ou le conseil de famille ont donné leur consentement - les pupilles de l'Etat - les enfants abandonnés Lorsqu'un enfant dispose d'une filiation établie, son adoption doit faire l'objet d'un accord de ses parents : - des deux parents si la filiation de l'enfant est établie vis à vis des deux parents, et qu'ils sont tous deux en vie. - d'un seul si l'autre est décédé, inconnu, ou s'il ne dispose pas de l'autorité parentale. - du conseil de famille si les deux parents sont décédés ou déchus de l'autorité parentale. Le consentement à l'adoption de l'enfant doit être donné devant un notaire ou devant le greffe du Tribunal d'Instance du domicile de la personne consentante, ou aux services d'aide à l'enfance si l'enfant est placé chez eux. L'adoption d'un enfant est possible pour toute personne, célibataire, mariée ou vivant en concubinage âgée de plus de 28 ans. La différence d'âge entre l'adopté et l'adoptant soit être au moins de 15 ans. L'adoption par deux parents n'est cependant possible que pour les couples mariés. En cas de concubins, l'enfant ne pourra être adopté que par un seul. Les parents désirant adopter un enfant doivent obtenir un agrément, destiné à garantir qu'ils peuvent prendre un enfant en charge. La demande d'agrément se fait par dossier, aux services d'aide à l'enfance de son département. Une enquête très poussée des motivations, de l'état psychologique des candidats est ensuite menée pour attester des capacités des candidats à prendre en charge un enfant. L'agrément est accordé pour 5 ans. Le placement est l'installation de l'enfant chez ses futurs adoptants. Il doit durer au moins 6 mois et est obligatoire. Il empêche toute restitution de l'enfant à sa famille d'origine. L'adoption définitive de l'enfant intervient à l'expiration du délai de placement par jugement. Le jugement d'adoption doit être retranscrit sur les registres de l'état civil de l'enfant. Le jugement d'adoption plénière a pour effet d'annuler l'acte de naissance de l'enfant et en crée un nouveau avec les nouveaux noms et prénoms de l'enfant. La filiation initiale de l'enfant disparaît entièrement au profit de sa filiation adoptive. Il est parfaitement possible d'adopter un enfant étranger. Cependant, il faudra pour ce faire respecter la législation française et celle du pays d'où vient l'enfant. L'agrément est donc indispensable, même pour l'adoption d'un enfant étranger. Il existe en France des organismes qui sont chargés d'aider les parents adoptifs à effectuer les formalités auprès des Etats étrangers. III. Droits de l'enfant La convention internationale des droits de l'enfant 1989 proclame un ensemble de droits fondamentaux reconnus à tous enfant mineur. Les droits civils garantissent : le droit à la vie, le droit d’avoir un nom et une nationalité, le droit à la vie privée, le droit d’accéder à la justice, le droit à la protection des enfants handicapés, le droit à la non-discrimination. Les droits économiques garantissent : le droit à un niveau de vie suffisant, le droit à la protection contre l’exploitation au travail (le travail forcé), le droit à la sécurité sociale. Les droits politiques garantissent : le droit d’avoir des opinions et de les exprimer (liberté d’association et de réunion, liberté d’expression, liberté de pensée, de conscience et de religion), le droit à la protection contre les mauvais

Page 24: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 24

traitements (mauvais traitements et torture), le droit à la protection contre la privation des libertés, le droit à la protection contre la séparation d’avec les parents. Les droits sociaux garantissent : le droit d’être nourri et soigné par des médecins, le droit à la protection contre toutes les formes d’exploitation (notamment l’exploitation sexuelle), l’enlèvement et la drogue, le droit à la protection en cas de guerre (interdiction d’être soldat avant 15 ans). Les droits culturels garantissent : le droit d’être éduqué (l’enseignement primaire doit être gratuit et obligatoire pour tous), le droit à une information appropriée - le droit aux loisirs (jeux, culture, activités artistiques). Cette convention conduit à transposer en droit national les droits reconnus à tous mineurs et garantir la protection de sa personne, quelles que soient les circonstance de sa naissance, qu'il soit né en mariage ou hors mariage dans le contexte de l'égalité entre enfants. La loi veille à l'égalité des droits et devoirs entre le père et la mère, en vertu d'un principe d'égalité et de coparentalité qu'ils vivent en commun auprès de l'enfant ou séparément. Le couple parental a vocation à subsister au couple conjugal qui se sépare. L'enfant a le droit de conserver des relations personnelles avec chacun de ses deux parents, avec ses frères et sœurs, ses grands parents et de façon générale avec sa famille paternelle et maternelle. Il existe des normes internationales pour garantir à l'enfant le maintien de ses relations avec chacun de ses parents lorsqu'ils sont de nationalité différente et que l'un d'eux procède à un enlèvement international de mineur. Pour protéger les relations entre les fratries, le législateur a adopté au code civil: " l'enfant ne doit pas être séparé de ses frères et sœurs sauf si cela n'est pas possible ou si son intérêt commande une autre solution. En cas de désaccord des parents, lorsqu'ils se séparent, le juge aux affaires familiales peut intervenir ou les parents peuvent se mettre d'accord et faire homologué leur accord par le juge qui vérifie la conformité de l'intérêt de l'enfant. Dans les familles recomposées, le nouveau conjoint est de fait associé à la vie quotidienne de l'enfant. Pour faciliter l'organisation de la vie quotidienne, tenir compte des liens affectifs de l'enfant avec cette tierce personne, il est possible de saisir le JAF d'une demande de délégation-partage de l'autorité parentale dans l'intérêt de l'enfant et pour les besoin de son éducation (possible aussi dans les couples homosexuels). Les parents doivent associer l'enfant aux décisions qui le concernent en fonction de son âge et de sa maturité, de sa capacité de discernement. L'enfant n'a pas le droit d'agir personnellement en justice dans les procédures qui le concernent sauf à saisir le JAF lorsqu'il est en danger pour réclamer une mesure de protection au titre de l'assistance éducative. En cas d'atteinte portée à ses droits, un enfant peut saisir une autorité indépendante: le Défenseur des droits, institution qui a remplacé depuis 2011 celle du défenseur des enfants. PARTIE 3. LA TRANSMISSION DU PATRIMOINE I. Notion de patrimoine Le patrimoine n'a jamais été défini par la loi. Il réunit l'ensemble des rapports de droits pécuniaires et qui constituent des valeurs, pour son actif, et des dettes, pour son passif, se rapportant une personne. Le patrimoine est juridiquement qualifié d'universalité de droit. Cela signifie que tout l'actif répond du passif, c'est-à-dire que le paiement de toutes les dettes est assuré aux créanciers de la personne par l'ensemble de ses biens et créances La notion juridique de patrimoine est, elle, restreinte à une dimension essentiellement patrimoniale, économique, c'est-à-dire limitée aux seuls éléments évaluables en argent. Il existe donc aujourd'hui des « droits patrimoniaux » et des « droits extra-patrimoniaux ». Les premiers sont directement compris dans le patrimoine de son titulaire, puisqu'ils sont évaluables en argent (une dette, un bien, une créance) tandis que les seconds sont relatifs à la personne même du titulaire du patrimoine. Sont ainsi considérés comme extra-patrimoniaux, c'est-à-dire situés en dehors du patrimoine, le droit de vote, le droit d'aller et venir, le droit de se marier, la dignité, l'image...Ces droits ne sont pas des biens. On ne peut donc pas les céder, les transmettre, ni les louer, les prêter. Mais s'ils ne sont pas évaluables en argent, l'atteinte portée à ces droits peut engendrer une compensation pécuniaire (qui n'est qu'une compensation par équivalent). Ainsi, lorsqu'un tiers porte atteinte à ces droits à la personnalité, il engage sa responsabilité civile et devient débiteur de dommages et intérêts. Exemple: affaire du préfet Erignac et du respect du droit à l'image du défunt.

Page 25: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 25

II. Transmission dans les liens du mariage A. Evolutions juridiques L'héritage est le patrimoine qu'une personne laisse à son décès. Il concerne tous types d'objets : héritage culturel (religion, patronyme, filiation, mœurs, etc.), et héritage des biens (maison, argent). Au cours des siècles, l'héritage a toujours été un moyen de reproduction des élites. Le droit des successions a dû prendre en compte l’évolution du droit de la famille sur le mariage, le pacs, le concubinage, la filiation, le divorce. Il est un enjeu familial, financier, fiscal... L'héritage est régi par les articles 720 et suivants du code civil. B. La transmission du patrimoine actuellement Le patrimoine n'est pas cessible entre vifs. Il ne peut transmis que du fait de son décès. Parfois, un testament, établi chez un notaire, précise l'héritage. En cas d'absence de testament, la plupart des pays ont mis en place des lois qui s'appliquent alors. Les bénéficiaires sont en général des personnes proches (conjoint, enfants, petits-enfants, frères, cousins, etc.) de la personne qui lègue son patrimoine. Les bénéficiaires peuvent aussi être des personnes morales (entreprises, associations), selon la volonté du défunt. Les donations ou les legs sont limités par le droit français des successions et ne doivent pas dépasser le montant de la quotité disponible de la succession. A défaut, les héritiers pourront demander en justice l'annulation du testament ou de la donation. Au décès d'une personne, ses héritiers recueillent son patrimoine, ensemble de ses droits et de ses dettes. Ils sont réputés être les continuateurs de la personne du défunt. Ils peuvent renoncer à la succession, notamment lorsque les dettes sont supérieures à l'actif transmissible. Il existe deux types de successibles: les héritiers ab intestat qui tiennent de la loi elle même leur vocation successorale les légataires qui peuvent être des tiers sans lien de famille avec le défunt, qui tiennent leurs droits d'un testament.

Celui-ci ne peut pas prévoir des droits qui empiètent sur la part attribuée aux héritiers ab intestat. C'est le notaire qui réalise la succession. Dans les successions ab intestat (sans testament), la loi classe les successibles:

par ordre: les enfants et les descendants, les ascendants privilégiés et les collatéraux privilégiés, les ascendants ordinaires, les collatéraux ordinaires.

par degré: selon la proximité des liens du sang par rapport au défunt. Le conjoint vient s'intercaler dans l'ordre des successibles, avec des droits plus ou moins étendus selon la composition de la famille laissée par le défunt: plus les liens de parenté sont éloignés, plus les droits du conjoint survivant sont étendus. La loi permet à toute personne de disposer de ses biens par testament ou par donation: les héritiers réservataires et les autres. La réserve héréditaire est la part des biens et des droits successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charge aux héritiers réservataires appelés à la succession et qui l'acceptent. Les héritiers réservataires sont traditionnellement des descendants (avant 2006, il y avait aussi les ascendants, cela a été supprimé pour éviter les conflits, notamment en cas de secondes noces...). Le conjoint survivant a été élevé au rang d'héritier réservataire, s'il n'est pas en concours avec les descendants. La réserve consiste en une fraction de la succession dont les titulaires ne peuvent pas être dépossédés: la moitié des biens du défunt en présence d'un enfant aux deux tiers en présence de deux enfants aux trois quarts en présence de trois enfants et plus. Le conjoint survivant non divorcé a des droits concurrents à ceux des enfants communs et peut choisir entre le quart des biens en pleine propriété ou l'usufruit (la jouissance ) de l'ensemble des biens, les enfants n'ont alors que la nue propriété c'est à dire le titre de propriété sans le pouvoir de disposer des biens.

Page 26: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 26

En l'absence d'enfant du défunt, la réserve du conjoint survivant porte sur un quart des biens successoraux. Le reste de la succession reste la quotité disponible dont une personne dispose librement et qu'elle peut donner ou léguer par donation de son vivant ou par testament à qui bon lui semble. A défaut d'héritier réservataire et de conjoint survivant, une personne peut librement disposer par donation et testament de la totalité de ses biens. III. Transmission dans les liens d'un PACS Les personnes liées par un Pacs sont considérées comme des tiers par rapport à la succession. De ce fait, en l'absence de testament, elles n'ont aucun droit dans la succession. S'il n'y a pas d’héritier, il est possible par testament de faire un legs au pacsé survivant. Mais il ne peut dépasser la " quotité disponible ", c'est-à-dire la part dont peut librement disposer le testateur . En cas d'abandon du domicile ou du décès du partenaire qui a signé seul le contrat de bail, le contrat continue automatiquement au profit de celui qui reste dans les lieux. Peu importe que le PACS ait été signé tout récemment, avant ou après la conclusion du bail. Il n'y a pas de délai d'une année applicable, comme en matière de concubinage. Par ailleurs, le propriétaire bailleur qui signe un PACS, peut en fin de bail, exercer son droit de reprise pour loger son partenaire, les parents ou les enfants de son partenaire. Depuis le 1er janvier 2007, le partenaire survivant alors même qu'il n'est pas propriétaire du logement a de plein droit pendant une année la jouissance gratuite de ce logement ainsi que du mobilier compris dans la succession. IV. Transmission dans le cadre d'un concubinage Le droit français ne reconnaît pas le concubin comme un héritier. En l'absence de testament, le concubin du défunt ne pourra prétendre à aucun héritage. Le concubin survivant bénéficiant d'un don ou d'un legs de son partenaire défunt est très fortement imposé et ne bénéficie d'aucun statut préférentiel. Il est en effet considéré comme un étranger à la succession. L'Etat n'a pas la qualité d'héritier mais à vocation à recueillir les successions vacantes.

Page 27: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 27

POUR ALLER PLUS LOIN: PROJET DE LOI SUR LA FAMILLE

Le controversé projet de loi sur la famille fera finalement l'objet de discussions à l'Assemblée Nationale à partir

2015, 2016?

Son point de départ, un rapport de 350 pages intitulé "Filiation, origines, parentalité: le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle", commandé par l’ancienne ministre déléguée à la Famille, Dominique Bertinotti. Dedans, des propositions qui auront le droit au débat... du moins pas pour l'instant. Sans surprise, parmi elles, on retrouve entre autres la question de la PMA. Focus sur ces propositions qui divisent.

L'adoption

Parce que la famille a changé, le droit doit prendre en compte "la grande métamorphose de la filiation, et plus généralement de la famille et de la parenté, dans les sociétés occidentales contemporaines", estiment les auteurs du texte. Ainsi, l'adoption est au cœur des réformes. Le groupe de travail, composé de 25 spécialistes et dirigé par la sociologue Irène Théry, préconise de: - Rendre l'adoption possible à tous les couples (mariés, pacsés ou vivant en concubinage) - Rendre égales les deux voies d'adoption, la plénière et la simple - Ne pas remplacer l'acte de naissance de l'enfant adopté plénièrement. L'adoption devrait ainsi être valorisée "pour elle-même" et non comme "imitation de la procréation". - Conserver le prénom de l'enfant adopté

L'accès aux origines

Autre sujet délicat: l’accès aux origines des enfants nés d’engendrement avec un tiers donneur dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation (AMP) et ceux nés sous X. Dans le premier cas de figure, pour les enfants conçus en AMP, le rapport recommande: - La valorisation de ce mode de conception. "Le don, au lieu d’être dissimulé comme c’est le cas aujourd’hui, devrait être valorisé pour son altruisme, sa générosité. L’engendrement avec tiers donneur en AMP ne peut être assimilé ni à une procréation charnelle, ni à une adoption", est-il écrit. - La déclaration commune anticipée de filiation pour tous les couples - La fin de l'anonymat des donneurs de gamètes - Un droit d’accès aux origines à partir de l’âge de la majorité - L'ouverture de la PMA aux couples de femmes Dans le second cas de figure, pour les enfants nés sous X, les spécialistes de la famille proposent également: - Un droit d’accès aux origines à partir de l’âge de la majorité. "Un droit à la communication de l'identité n'est pas un droit à la rencontre", précise-t-on.

La gestation pour autrui (GPA)

Sur le sujet, aucun consensus n'a été trouvé sur l’ouverture et l’encadrement de la GPA en France. Tant du côté du groupe de travail que du gouvernement: François Hollande avait assuré l'an dernier que la gestation pour autrui resterait interdite tant qu'il serait président de la République. En revanche, le groupe de travail propose: - L'établissement de la filiation en France des enfants nés à l'étranger par GPA

Le droit à mourir (euthanasie)

Page 28: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 28

COMPLEMENT: LES SOURCES DU DROIT, L'ELABORATION D'UNE LOI, LA RESPONSABILITE.

LES SOURCES DU DROIT

ELABORATION DE LA LOI

Page 29: EVOLUTIONS JURIDIQUES DE LA FAMILLE INTRODUCTION …...et les mères entourés de leurs enfants ne vivent plus en commun avec les ascendants. Cependant la famille large continue à

Evolutions juridiques de la famille 11/02/2015 Danièle GUILLEMOT 29

RESPONSABILITE CIVILE, RESPONSABILITE PENALE ET RESPONSABILITE ADMINISTRATIVE

SOURCES

http://www.justice.gouv.fr/organisation-de-la-justice-10031/ http://www.legifrance.gouv.fr/ http://vosdroits.service-public.fr/

http://www.lagbd.org/index.php/Accueil

Droit et grands enjeux du monde contemporain édition la documentation française, 2012

Cours de droit de Danièle Guillemot