Expérience D' Intégration D' Un Elève Asperger

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  • 7/31/2019 Exprience D' Intgration D' Un Elve Asperger

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  • 7/31/2019 Exprience D' Intgration D' Un Elve Asperger

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    De lcole primaire au CO

    La question du passage au CO deBryan a t aborde ds le mois denovembre prcdent la rentre. Cetlve - alors en 6P - a suivi le cursusscolaire ordinaire, sans redoublement,moyennant un accompagnement ci-bl et personnalis. Lensemble des

    partenaires ayant pris part au projet(parents, enseignants, thrapeutes,autorits scolaires, ainsi que Bryan)sont satisfaits des rsultats obtenus.La rflexion portera surtout sur lechemin parcouru avec cet lve du-rant ces 5 dernires annes; sa margede progression est incontestable. Il estalors vident pour tous, quun projetdans la continuit, mais en tenantcompte des spcificits de la nouvellestructure qui va laccueillir (CO) doittre cr pour cet lve.

    Plusieurs tapes prparatoires avec lesdiffrents protagonistes ont t che-lonnes sur 10 mois avant le dbut delanne scolaire:

    Lautorit scolaire (service de len-seignement spcialis)Ces rencontres ont t le point de d-part qui a permis de prsenter la situa-tion de cet lve. Bien quil soit djconnu par lOES, il tait important dereprciser les ressources et les difficul-ts de Bryan et de dfendre lide decontinuer le soutenir dans sa scola-rit. Il ne faut pas oublier quau-delde laspect humain, lautorit com-ptente dtient galement le pouvoirdattribuer les ressources matriellesncessaires un tel projet!

    La familleLes parents doivent aider leur enfant quitter un systme dans lequel ilsavaient confiance et qui a permis Bryan dvoluer favorablement. Lin-

    connu est galement pour eux unesource de stress, quil faut absolumentviter de transmettre au principal in-tress. Il est donc important de lesrassurer en leur proposant une conti-nuit dans la prise en charge, tout enles informant des contraintes lies aufonctionnement dun CO.

    LlveLes discussions ont t frquentes en-tre llve et lenseignante spcialise.Les questions revenaient de faon r-

    currentes. Rpondre avec patience etempathie a permis de diminuer sen-

    siblement les angoisses formules parBryan.De manire plus pragmatique, le di-recteur du nouvel tablissement nousa reus, afin de visiter lensemble deslocaux. De plus, nous avons eu loc-casion dintgrer durant une demi-journe un groupe-classe et de suivre

    les cours qui taient dispenss. Cesdmarches ont permis de donner desrponses concrtes aux soucis concretsque rencontrent les personnes Asper-ger, savoir: peur de linconnu, fortersistance aux changements...

    Les professeurs du COLensemble du corps enseignant se-condaire tait inquiet lannonce delintgration dun lve diffrentdans leur tablissement. La dnomi-nation syndrome dAsperger leur

    tant totalement inconnue, leur soucitait palpable. Lors dune runion decentre, une information leur a donct donne sur les particularits lies ce syndrome, ainsi que sur le projetmis en place.

    Les lves de la classeIl nous a paru essentiel dintgrer auprojet un autre partenaire: les lvesde la classe dans laquelle allait vivreBryan. En effet, ses interactions socia-les particulires, sa communicationdiffrente, lintervention dune ensei-gnante spcialise allaient probable-ment les interpeler. Dans un souci detransparence et afin de protger Bryande toute intervention malveillante,ces lves ont reu une informationadapte leur ge sur laccueil dunlve diffrent. Lenjeu tant de lesconsidrer comme des allis, en leurdemandant un rle sapparentant celui dun grand frre bienveillant.

    Amnagements, adaptations etinterventions eectues au CO

    Le projet peut alors entrer dans sa pha-se pragmatique. Les 5 priodes hebdo-madaires accordes pour cet lve ontt utilises de la manire suivante:

    Prises en charge pour la di-renciationLenseignante spcialise intervientdans la classe raison de 2 priodes: 1en maths et 1 en allemand. Ces temps

    sont trs utiles pour observer le fonc-tionnement de llve, pour laider

    se concentrer, pour rpondre sesquestions chaud, pour laccompa-gner dans les tches demandes parlenseignant de branche.Autre aspect non ngligeable: rcol-ter des informations concernant lesexigences, les tches domicile, leschances des examens, les matires,

    afin de structurer llve Aspergerpour quil puisse rpondre lensem-ble des demandes scolaires.Finalement, il est galement intres-sant dtre prsente dans le groupe-classe afin davoir une comparaisonavec la norme dont font partie lesautres lves.Les 3 priodes restantes, sont des pri-ses en charge individuelles. Les inter-ventions sont de 3 ordres:

    social et affectif: couter, rassu-rer, expliquer les codes sociaux et les

    rgles implicites;organisationnel: tablir des routi-

    nes, classer et ranger le matriel, vri-fier que toutes les tches soient notescorrectement dans lagenda, expliquerclairement toute activit qui sort de laroutine habituelle (sorties culturelleset sportives, visite mdicale,);

    cognitif: reprendre les notionsscolaires pour lensemble des branches(essentielles et secondaires), dtecterce qui pose problme dans la compr-hension de la matire ou des consi-gnes, reformuler, crer des supportsvisuels facilitant les apprentissages.

    EvaluationsNous partons du principe quil estimportant de rester en lien avec lesobjectifs scolaires dfinis pour len-semble des lves. Or, comme citplus haut, lune des difficults ma-jeures lies au syndrome dAspergerest la comprhension et le traitementdu langage, entre autre des consignes

    crites ou orales. Une part importantedu travail de lenseignante spcialiseest alors deffectuer des modificationssur les preuves, afin de les rendre ac-cessibles Bryan pour quil puisse d-montrer ses comptences cognitives.Il sagit en fait dintervenir un peucomme une traductrice: employerune formulation qui permet dtrecomprise par linterlocuteur.Concrtement, il faut travailler surplusieurs plans: smantique, structu-rel, prsentation, tout en gardant

    les objectifs valuer. Ce processus vapasser par des tapes successives.

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    Les direntes tapes du processus daccompagnement

    Les enseignants font parvenir lpreuve lenseignante spcialise quelques jours avant;celle-ci propose Bryan chaque consigne (mais la plupart du temps il ne voit pas lexercice);soit Bryan a une comprhension correcte et dmontre quil pourra entrer dans lactivit dvaluation et on passe

    plus loin; soit sa comprhension est errone, voire nulle ce qui va lempcher de dmontrer ses connaissances;dans ce 2e cas de figure, il sagit pour lenseignante spcialise dentamer un entretien dexplicitation qui va lui per-

    mettre de comprendre ce qui bloque Bryan afin de dgager les lments quil faudra modifier;

    ensuite, il faudra remettre en forme la consigne en tenant compte des informations rcoltes auprs de llve;enfin, lpreuve modifie est retransmise lenseignant de branche qui fait passer le test Bryan dans les mmesconditions que le reste de la classe.Au fil du temps, lorsquon avance dans la connaissance du fonctionnement de llve Asperger, il devient possible din-tervenir sur les consignes sans lintervention de ce dernier.

    Bibliographie

    ASPERGER, H. (1998). Les psychopathes autistiques pen-dant lenfance. Paris :Institut Sythlabo.

    ATTWOOD, T. (2003). Le Syndrome dAsperger et lautis-me de haut niveau.Paris : Dunod.

    ATTWOOD, T (2008). Le Syndrome dAsperger Guidecomplet. Bruxelles : DeBoeck.HADDON, M. (2003). Le bizarre incident du chien pen-dant la nuit.ISABELLE, A. (2004). Il tait une fois le syndrome dAs-

    perger. Tmoignage

    dune mre. Paris : Editions de lOfficine.

    La consigne: un lment de russite

    Tout enseignant est conscient que la bonne comprhension de la consigne est un lment central dans la russitescolaire. Elle lest encore plus pour un lve Asperger. Voici deux exemples qui illustrent les difficults que peuventrencontrer ces lves face des demandes banales pour tout autre colier:

    Premier exemple:

    Deuxime exemple:

    Au terme dun long travail sur limparfait et le conditionnel prsent, lenseignant propose un exercice trous desplus conventionnels avec la consigne suivante:Choisis entre limparfait et le conditionnel prsent, puis complte laide des verbes entre parenthsesLors de la correction, Bryan nobtient que 5 points sur 12. Lenseignante spcialise qui la suivi durant cet appren-tissage est certaine quil possde parfaitement les connaissances lies ce thme. De plus, elle constate que tous lesverbes ont t mis limparfait. Surprise par ce rsultat qui ne correspond pas ce quil sait, elle engage avec son lve,la discussion suivante:- Bryan, peux-tu me dire quel temps tu as mis les verbes de cet exercice?- A limparfait!- Est-ce que tu saurais les crire au conditionnel?- Oui.- Est-ce que tu connais la rgle pour savoir lequel des 2 temps tu dois employer dans les phrases?- Oui. (il la rcite parfaitement).- Alors comment se fait-il que tu aies mis tous les verbes de cet exercice limparfait?- Cest crit: Choisis entre limparfait et le conditionnel, alors moi jai choisi limparfait, parce que cest plus facile!

    Limportant nest pas de vivre comme les autres, mais parmi les autresPour conclure, je reprends et souligne cette phrase dj cite en intro-duction. Lcole a un rle jouer dans la mise en pratique de cette d-claration de Daniel Tammet.Dans le cas qui nous occupe, cela passe par la reconnaissance des lvesavec un syndrome dAsperger et de leurs spcificits, mais aussi par desinteractions cibles. Limage de lenseignant spcialis dans un rle detraducteur est sans doute trs reprsentative du travail effectu auprsde ces jeunes.Par ailleurs, permettre chaque lve de pouvoir vivre parmi les autres,nest-ce pas lambition affiche par lautorit scolaire et politique?Cette exprience a permis, pour linstant, Bryan de faire partie de no-

    tre monde et comme chaque fois quune nouvelle couleur vient enrichirune palette le monde a tout y gagner.