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Extrait de la publication

Extrait de la publication… · pas la noblesse de certaines cathédrales de ver-dure.Jel'aimeparcequ'ilestdiscretetcurieux. De loin je reconnais un noyer, pendant trois jours il

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C O L L E C T I O N F O L I O

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René Frégni

La fiancéedes corbeaux

Gallimard

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© Éditions Gallimard, 2011.

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Né le 8 juillet 1947 à Marseille, René Frégni a déserté l'arméeaprès de brèves études et vécu pendant cinq ans à l'étrangersous une fausse identité. De retour en France, il a travaillédurant sept ans comme infirmier dans un hôpital psychiatriqueavant de faire du café-théâtre et d'exercer divers métiers poursurvivre et écrire.Depuis plusieurs années, il anime des ateliers d'écriture dans

la prison d'Aix-en-Provence et celle des Baumettes.Il a reçu en 1989 le prix Populiste pour son roman Les chemins

noirs (Folio no 2361), le prix spécial du jury du Levant et le prixCino del Duca en 1992 pour Les nuits d'Alice (Folio no 2624), leprix Paul Léautaud pour Elle danse dans le noir en 1998, le prixAntigone pour On ne s'endort jamais seul en 2001, et le prix NiceBaie des Anges pour Tu tomberas avec la nuit en 2008.

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Pour Lili qui est parti planterdes arbres dans les nuages

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« L'amour est une main douce quiécarte lentement le destin. »

S I EGFR IED S IWERTZ

« Le soleil n'est jamais aussi beauqu'un jour où l'on se met en route. »

J EAN G IONO

«— Ta beauté est une souffrance, ditLouis à Marion.

— Hier, tu disais que c'était une joie.— C'est une joie et une souffrance. »

La sirène du MississippiFRANÇOI S TRUFFAUT

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Fin octobre

27 octobre

Le silence est entré dans la ville. Il est descendudes collines, s'est glissé sous les porches. Il a filédans les ruelles courbes, contourné les fontainesoù s'ébrouent les pigeons. Le silence encorechaud des pinèdes est entré dans cette villed'ombre, il s'est assis sur les bancs de pierre der-rière les églises.

Ma fille est partie vivre dans une autre ville,vivre sa vie. Dix-huit ans avec ma fille, dans cetappartement au milieu des tuiles, des cheminéeset des oiseaux. Maintenant je vis avec le silence.

Jusqu'en octobre nous allions nous baignerdans l'eau verte d'un petit lac, au bout de longuesrangées de vignes. Aujourd'hui j'y suis allé seul.Les après-midi sont encore torrides et les nuits nesuffisent pas à refroidir l'eau et les pierres.J'ai nagé jusqu'au milieu du lac et j'ai fait la

planche en fermant les yeux. J'entendais le batte-ment sourd de mon cœur dans mes oreilles, mes

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paupières étaient vermillon. Je suis revenum'étendre sur les galets noirs de la rive. Ma fillecollectionnait ceux qui sont rayés de blanc, ilsétincellent dans l'eau peu profonde, sur la bergele soleil éteint les éclairs demarbre.

J'aime cette odeur de rivière et d'enfance, cesilence d'arrière-saison loin des écoles et l'ortigré des peupliers entre la vigne et l'eau.

28 octobre

Comme presque tous les mercredis j'ai fran-chi deux rivières et je suis allé garder Félix. Toutle monde l'appelle Lili dans ce petit village au-dessus du Verdon, depuis l'école primaire. Lili aquatre-vingt-quinze ans, il a oublié son visage etson nom.

Isabelle, la fille de Lili, est institutrice à lamaternelle du village. Le mercredi elle va fairede grosses courses en ville. Pendant trois heuresje marche à petits pas autour de leur maison entenant Lili par la main, ou bras dessus, bras des-sous lorsqu'il bascule en avant.

Tout l'étonne, le ciel, les arbres et moi qu'ilscrute toutes les cinq minutes comme la pre-mière fois.

Jusqu'après la guerre c'était le cordonnier duvillage, il faisait des souliers de travail, les sandaleslégères et les ballons de foot puis l'industrie de lachaussure l'a emporté, comme tant d'autres. Ila acheté trois hectares de vieilles vignes au bord

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de la colline et il est devenu paysan. Il n'y a pasun arbre ici qu'il n'ait planté, greffé, un muretqu'il n'ait reconstruit. Tous les secrets du cuir illes tient de son père, il a grandi dans l'atelier aumilieu des alènes, du fil, des tranchets, de l'odeurforte des peaux qu'on allait chercher à Barjols etdes jolis pieds de femme.

Les secrets de la terre il les a découverts au fildes années, seul en tâtonnant, en observant, ense réveillant chaque nuit parce que le ciel gronde,les branches craquent sous le gel.

Il y a cinq ans il a tourné pendant une journéedans son petit champ sur son tracteur orange, ilne savait plus comment on l'arrêtait. Le lende-main sa fille donnait le tracteur, discrètement, àun collectionneur.

Pour promener Lili autour d'une maison,octobre est un mois féerique. Je casse une noixentre deux pierres, encore fraîche, et nous lapartageons, un peu âpre… Quelques petits paset nous passons du brou à l'odeur incomparabledes figuiers. Bleues, lourdes de sucre, bourdon-nantes, j'ouvre deux ou trois figues que nous par-tageons aussi.

Lili en raffole. «C'est bon, Fernand ! » me dit-il, ravi sous sa petite casquette. Il y a cinq minutesil m'appelait Lucien. Encore quelques pas et jecoupe une grappe de raisin noir, moins sucréque les figues. Il n'y a plus que quelques pieds devigne ici, à l'abri des murs qui soutiennent lesbancaous ; Lili a planté des arbres partout.Nous allons nous asseoir à l'ombre du noyer,

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sur l'un de ces murets, et nous nous partageonsles grains à la peau épaisse. Lili me dit que sessix filles ne viennent jamais le voir. Il n'en aqu'une, Isabelle, l'institutrice qui fait ses coursesà Manosque. Je suis amoureux du calme de sesyeux. Des yeux gris-vert, semblables aux clochesde bronze des vieilles abbayes.

Est-ce que je franchirais deux rivières pourvenir garder Lili au milieu des collines s'il n'yavait pas la beauté calme de ces yeux ?…

Le petit cordonnier a planté des arbres durantla deuxième partie de sa vie, les a soignés entoute saison et il ne sait plus ce qu'est un olivier,un pêcher, une noix.

« Et Kakou ? dit-il, où il est passé ? Il y a unmoment que je l'ai pas vu. »

Ce qu'il a préféré jadis c'est la chasse, encoreplus que la terre et les arbres. Il a rôdé depuis sonenfance dans tous ces vallons, avec des chiens etdes furets, par tous les temps après des journéeséreintantes de travail jusqu'à la nuit noire. Kakoufut son dernier chien. Il l'a enterré à côté de tousles autres, à l'endroit de son terrain qui touchepresque le cimetière. Il a oublié ce que signifientle mot fusil, le mot lapin.

Toutes les cinq minutes il me dit : « Bon, on yva, Henri ? » Il veut rentrer chez lui, chez sa mère,à l'autre bout du village, dans la maison où il estné. Il ne sait pas chez qui on est ici, il y a pourtantpassé sa vie, déplacé chaque pierre, retournéchaque motte de terre. « Elle va m'attendre pour

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souper, on y va ! » Il y a cinquante ans qu'elle estau cimetière, sa mère.

Ce qu'il dit me rend triste, lui ne l'est pas dutout, il est contrarié que nous ne rentrions pasplus vite chez lui. « Alors, on y va, Fernand !Qu'est-ce qu'on fabrique ici ? » Je suis redevenuFernand.

Il a passé sa vie sur tous ces chemins qui partentderrière sa maison. Quand son dernier chien estmort il a cherché des champignons, puis desasperges sous les trois gros chênes devant nous,puis les poireaux sauvages devant sa porte.

Maintenant il cherche sa mère toute la jour-née. J'ai l'impression de garder un enfant, il estaussi menu et léger qu'un enfant, seules sesmains sont épaisses et tordues comme des racinesde genévriers. Parfois il est trop fatigué et je leprends sur mon dos. En quelques secondes sesyeux perdent toute couleur. Ils sont gris soudainpuis transparents comme sa mémoire, ses jambess'effondrent. Je le charge sur mon dos et je lerentre à la maison.

Isabelle est revenue des courses. Avant de laconnaître je n'aimais pas vraiment ce prénom,Isabelle, je le trouvais désuet. Quand je regardele visage de cette femme il m'arrive de le trouvertrès doux et même sensuel à force de douceur.Nous avons bu tous les trois un chocolat sur la

toile cirée de la cuisine avec une tranche de paind'épice et je suis allé brûler les meules d'herbe etde broussaille que je coupe et entasse tout aulong de l'été et qui attendent en noircissant le

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15 octobre, jusque-là le moindre feu est interdit.Je garde Lili et j'entretiens ces trois petits hec-tares que les genêts et les ronces menacent dèsqu'on tourne le dos. J'adore ces premiers feuxd'automne après un chocolat. Les danseursrouges des flammes, courts, nerveux, les longsdanseurs bleus de la fumée. Je vais d'un talus àl'autre avec ma boîte d'allumettes, la fourche, unvieux journal. J'aime les soirs d'octobre dans cepetit vallon, l'odeur de la fumée dans mes che-veux, ma chemise et ces petits danseurs partoutqui égratignent la nuit.

À travers le feuillage encore très vert deschênes je vois s'allumer la cuisine de la petite mai-son. Je sais qu'Isabelle prépare comme chaquesoir la soupe de Floraline pour son père et qu'elleécrase les cachets dans un petit bol bleu avec lepilon en bois d'olivier pour l'aïoli.

Presque tous les vieux meurent seuls dans unemaison de retraite, un hôpital. Elle l'aide à man-ger, à se coucher. Elle lui parle comme à unenfant, le gronde gentiment ainsi qu'elle a faitdurant toute la journée avec trente vrais enfants.Elle ajoute un ou deux gestes de tendresse pourson enfant du soir. Elle rit des quelques motsinsensés qui traversent la tête desséchée de cethomme perdu. Dès que la nuit tombe il parle enpatois, à ses amis d'autrefois, à tous les chena-pans des collines avec qui il tendait des lacets etsurtout à sa mère qu'il cherche dans tous lesrecoins de la maison.

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29 octobre

Les parkings ne sont beaux que dans les romansnoirs. J'ai grandi après la guerre dans une ban-lieue de Marseille qui sentait le raisin, le feu debroussaille et la fumée de charbon. Je suis revenuvers les jardins et les collines.

J'aime arrêter ma voiture le soir à la sortie den'importe quel petit village, dans ces déserts de lahaute Provence, et filer devant moi sur le premierchemin que je ne connais pas. Des acacias accom-pagnent la plupart de ces chemins, leur feuillageest aussi léger que leur ombre l'été. C'est très ras-surant de s'engager dans un chemin pailleté delumière. L'acacia aime l'homme, il suit les voiesferrées, les routes étroites, se hisse sur les pontsde pierre. Dès que l'homme a posé son sac, l'aca-cia est venu voir ce qui se passait. Il ne possèdepas la noblesse de certaines cathédrales de ver-dure. Je l'aime parce qu'il est discret et curieux.

De loin je reconnais un noyer, pendant troisjours il est bouton-d'or. L'or des érables et celuides tilleuls est plus gris. Les troncs blancs desbouleaux tachés de noir ressemblent à des che-vaux indiens groupés autour d'un étang.

Je traverse des prés, longe des champs de maïsqui froissent l'air du soir, comme un peupleserré d'écrivains froisserait sous la brume toutesles pages d'un été au moindre coup de vent.

Je devine quelques fermes écartées, d'autreshameaux, à la silhouette noire des cyprès dont lapointe ultime dessine les nuages.

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À la sortie d'un virage je retombe sur desjardins. On dirait que les abricotiers sont encorecouverts de fruits, ce sont les feuilles qui rous-sissent du côté du couchant. Les cerisiers sesont embrasés d'un coup, maintenant ils sontnus.

Quand la nuit tombe les coings sont sous lesarbustes comme des poussins dans l'herbe quiéclairent les vergers et la céramique orangéed'un plaqueminier luit aumilieu d'un champ.

30 octobre

Ce matin, à travers les vitres de mon apparte-ment, j'ai vu arriver sur la place un étrange mille-pattes de couleurs. Il progressait de manièresinueuse sous les platanes. C'était des enfants detrois ans qui s'accrochaient en file indienne à unruban.

J'ai reconnu Jeanine en tête et à l'autre boutdu ruban Jacky, son aide maternelle. Il y a quinzeans j'avais vu ce même cortège déboucher sousmes fenêtres, ma fille venait d'entrer à la mater-nelle, elle tenait le ruban.

J'ai eu l'impression de reconnaître Marilouparmi ces bébés tant la scène était identique, lamême maîtresse, la même aide, les cheveux unpeu plus gris…

Jeanine s'est arrêtée devant la fontaine, com-me il y a quinze ans, ses paroles étaient couvertespar le bruit de l'eau et elle devait raconter l'his-

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toire mystérieuse de cette eau qui a voyagé long-temps sous les montagnes, les forêts, les herbes.

Un pigeon s'est envolé en claquant et tous lesenfants ont regardé l'oiseau. Il était plus vivantque la fontaine. Les visages étaient tournés versle ciel et ils n'écoutaient plus leur maîtresse. Lecortège est reparti à petits pas, comme il étaitvenu, les petits pas prudents et étonnés de ceuxqui découvrent le monde.

Je me suis souvenu que ma fille pleurait der-rière la vitre lorsque je la laissais chaque matindans cette classe en préfabriqué branlante etsurchauffée. Et chaque matin j'hésitais à fairedemi-tour pour la reprendre avec moi et revenirjouer à la maison. Mais Jeanine me faisait unsigne furtif de la main pour que je m'éloigne rapi-dement.

Aujourd'hui c'est moi qui suis derrière la vitre.Ma fille ne pleure plus. Elle est dans un café deMontpellier à cette heure, dans un tramway, sansdoute en retard ou très amoureuse. Quinze ansqui sont passés sur nous comme un vol de pi-geons au-dessus de la ville, laissant un vaste cielimmobile et silencieux.

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Novembre

3 novembre

Si d'un côté mon appartement s'ouvre surla place, la fontaine et au loin, par-delà les toitsde la ville, les territoires bleus de Valensole, ildonne de l'autre côté sur une étroite et profonderuelle.

De ma cuisine je peux voir vivre à chaque étagede la maison d'en face toutes sortes de gens. Lafenêtre la plus intéressante est celle du troisièmeétage. C'est une ouverture rectangulaire pluslarge que haute, j'ai tout de suite pensé à un écrande télévision. Les programmes que j'y découvreau fil des jours sont beaucoup plus captivants quel'eau tiède du petit écran. Programmes que je nepeux connaître à l'avance et dont je suis l'uniquespectateur.

Comme j'habite au quatrième mes regardsplongent par cette ouverture, à quelques mètresseulement de ma cuisine, dans une salle de baincabinets.

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DU MÊME AUTEUR

Aux Éditions Denoël

LES CHEMINS NOIRS, 1988 (Folio no 2361). Prix Populiste 1989

TENDRESSE DES LOUPS, 1990 (Folio no 3109). Prix Motta del'Académie française 1990

LES NUITS D'ALICE, 1992 (Folio no 2624). Prix spécial du jury duLevant 1992

LE VOLEUR D' INNOCENCE, 1994 (Folio no 2828)

OÙ SE PERDENT LES HOMMES, 1996 (Folio no 3354)

ELLE DANSE DANS LE NOIR, 1998 (Folio no 3576). Prix PaulLéautaud 1998

ON NE S 'ENDORT JAMAIS SEUL, 2000 (Folio no 3652). PrixAntigone 2001

L 'ÉTÉ, 2002 (Folio no 4419)

LETTRE À MES TUEURS, 2004 (Folio Policier no 428)

MAUDIT LE JOUR, 2006 (Folio no 4810)

TU TOMBERAS AVEC LA NUIT, 2008 (Folio no 4970). Prix NiceBaie des Anges 2008 et prix Montecristo 2009

Aux Éditions Gallimard

LA FIANCÉE DES CORBEAUX, 2011 (Folio no 5476). Prix JeanCarrière 2011

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La fiancée des corbeaux

René Frégni

Cette édition électronique du livre La fiancée des corbeaux de René Frégni a été réalisée le 07 septembre 2012

par les Éditions Gallimard. Elle repose sur l’édition papier du même ouvrage

(ISBN : 9782070448289 - Numéro d’édition : 243161). Code Sodis : N52775 - ISBN : 9782072471599

Numéro d’édition : 243163.

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