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Ezzedine El Mestiri « Cet ouvrage est un hymne à la vie, une invitation à vivre pleinement et joyeusement ! » Préface de Thierry Janssen L'art de vieillir dans la Sous la direction d’Anne Ghesquière

Ezzedine El Mestiri Sous la direction d’Anne …multimedia.fnac.com/multimedia/editorial/pdf/9782212564464.pdf · Nous apprivoisons chacun à notre manière l’inéluctable passage

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Ezzedine El Mestiri

Donner plus d'années à la vie et plus de vie aux années !

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Studio Eyrolles © Éditions Eyrolles

11,90 €

« Cet ouvrage est un hymne à la vie, une invitation à vivre pleinement et joyeusement ! »

Préface de Thierry Janssen

Nous apprivoisons chacun à notre manière l’inéluctable passage du temps. Loin des recettes miracles et toutes faites pour bien vieillir, Ezzedine El Mestiri vous propose de prendre les chemins de traverse, ceux qui mènent à vous-même et à votre épanouissement personnel à cette étape charnière de votre vie.

Comment faire de votre retraite une période riche et pleine de projets ? Quel sens donner à ce temps disponible ? Quels nouveaux talents souhaitez-vous laisser éclore ? Vieillir est avant tout une aff aire intime : c’est à chacun de cultiver son jardin intérieur pour redessiner peu à peu les contours de sa maison du bonheur.

Dans cet ouvrage, de nombreux témoignages montrent qu’il existe autant de façons de vieillir que de personnes. Exercices à l’appui, l’auteur vous aide à vivre cette période avec optimisme. Bien vieillir rime alors avec prendre du plaisir et resplendir.

Ezzedine El Mestiri est journaliste, auteur et ancien rédacteur en chef pour diverses publications.

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Sous la direction d’Anne Ghesquière

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Ezzedine El Mestiri

Donner plus d'années à la vie et plus de vie aux années !

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ri« Cet ouvrage est un hymne à la vie,

une invitation à vivre pleinement et joyeusement ! »

Préface de Thierry Janssen

Nous apprivoisons chacun à notre manière l’inéluctable passage du temps. Loin des recettes miracles et toutes faites pour bien vieillir, Ezzedine El Mestiri vous propose de prendre les chemins de traverse, ceux qui mènent à vous-même et à votre épanouissement personnel à cette étape charnière de votre vie.

Comment faire de votre retraite une période riche et pleine de projets ? Quel sens donner à ce temps disponible ? Quels nouveaux talents souhaitez-vous laisser éclore ? Vieillir est avant tout une aff aire intime : c’est à chacun de cultiver son jardin intérieur pour redessiner peu à peu les contours de sa maison du bonheur.

Dans cet ouvrage, de nombreux témoignages montrent qu’il existe autant de façons de vieillir que de personnes. Exercices à l’appui, l’auteur vous aide à vivre cette période avec optimisme. Bien vieillir rime alors avec prendre du plaisir et resplendir.

Ezzedine El Mestiri est journaliste, auteur et ancien rédacteur en chef pour diverses publications.

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Sous la direction d’Anne Ghesquière

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L’art de vieillir dans la joie !

Groupe Eyrolles61, bd Saint-Germain

75240 Paris Cedex 05

www.editions-eyrolles.com

Création de maquette : Hung Ho ThanhAdaptation de maquette et mise en pages : STDI

Ouvrage dirigé par Anne Ghesquière, fondatrice du magazine FemininBio.com, pour mieux vivre sa vie !

En application de la loi du 11 mars 1957, il est interdit de reproduire intégralement ou partiellement le présent ouvrage, sur quelque support que ce soit, sans autorisation de l’éditeur ou du Centre français d’exploitation du droit de copie, 20, rue des Grands-Augustins, 75006 Paris.

© Groupe Eyrolles, 2016ISBN : 978-2-212-56446-4

Préface de Thierry Janssen

L’art de vieillir dans la joie !

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Table des matièresIX RemerciementsXI Préface1 Introduction

5 Chapitre 1Vieillir n’est pas une maladie !

7 L’invention de la vieillesse8 Une planète de cheveux blancs9 France : l’espérance de vie recule10 Un vieillissement mal vu ! 12 Vivre un siècle ! 15 Vieillir, c’est avancer dans la vie21 L’âge d’or des seniors

25 Chapitre 2Un supplément de vie pour agrandir notre maison

31 Et si l’on dessinait sa nouvelle maison du bonheur !32 Continuer à monter l’escalier de la vie35 Une bougie irradie sa lumière jusqu’au bout37 Les années où l’on sait récolter39 Vivre poétiquement sa retraite

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44 Se libérer des mauvaises habitudes du passé…

45 Ce qui ne vieillit pas en nous

49 La vie vive quand il reste moins de temps !

55 Chapitre 3Se libérer de l’inutile pour vivre plus léger

57 Simplifier son rapport au monde

58 Vieillir est une aventure

60 Se réconcilier avec le passé

62 Du positif dans la tête… la vie du bon côté

65 Ne jamais se plaindre car la vie est bien faite

66 Découvrir le trésor de ses souvenirs

67 Colorier le grand livre d’images de sa vie

71 Allégez-vous la vie, le matériel vous submerge !

75 Chapitre 4Dépêche-toi de t’approcher de tes rêves !

77 Qu’est-ce que je me souhaite pour l’avenir ?

78 Sois ce que tu es et où tu es

80 Le temps pour faire ce que l’on aime

81 Les cinq saisons des anciens de mon village

84 Les couleurs du soleil couchant

85 La musique du vent dans les arbres et le bruit de la mer

87 La végétale attitude… Et cultiver sa nourriture

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91 Chapitre 5Le bien-être ne diminue pas avec les années !

93 Accéder à de nouvelles joies94 Être heureux dans la lenteur 95 Vivre avec des gratifications simples97 Préserver la capacité à l’émerveillement de nos jeunes années103 La spiritualité, le chemin du bonheur104 L’amour encore ! Et il n’y a pas d’âge !

107 Chapitre 6Transmettre le bon et le beau entre générations

109 Le sens des autres… Se dévouer à son prochain et s’ouvrir au monde

111 Une belle vie est construite avec de belles relations 112 Comment éviter le conflit des générations113 Chouchouter ses proches maintient en bonne santé114 Transformer l’espace de son expérience en espérance118 Diffuser les bonnes manières

121 Chapitre 7Des initiatives solidaires et heureuses

123 Donner aux anciens l’envie de créer125 Aider des jeunes démunis à retrouver foi en la vie127 Un bâtiment unique pour l’école et la maison de retraite

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131 Chapitre 8Voilà pourquoi notre monde a besoin de ses anciens !

133 Les vieux ont des choses à dire au monde133 Nos sages aînés à travers les cultures137 Le secret des centenaires en bonne santé139 Des belles images de vieilles personnes140 La vraie vie consiste aussi à mourir…

147 Pour conclureApprécier à chaque âge le chemin de la vie et savourer le moment présent

151 Bibliographie157 À propos de l’auteur

À AnnetteAux générations futures

À mes filles, Myriam et MalikaÀ mes petits-enfants, Tristan et Nolwenn

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RemerciementsMerci à ma mère dont la philosophie de vie m’inspire chaque jour.

Merci aux personnes âgées que j’ai rencontrées et qui m’ont donné l’envie de leur ressembler.

Merci à Anne Ghesquière et Gwenaëlle Painvin qui ont défendu et soutenu ce projet et m’ont guidé et accompagné dans sa réalisation.

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PréfaceLors d’un colloque de médecine anti-âge, le dirigeant d’un important groupe pharmaceutique me dit qu’il est très fier des « immenses progrès de la science qui, à terme, permettront de vaincre cette terrible maladie qu’est la vieillesse ». Je lui réponds aussitôt que je ne partage ni son enthousiasme ni sa fierté. Car, s’il est vrai que les innovations rendues possibles par la recherche scien-tifique font vivre un plus grand nombre de gens plus longtemps, ces « progrès » consistent le plus souvent à réparer ce qui est abîmé et, beaucoup trop rarement, à préserver ce qui maintient en bonne santé. Chercher des solutions pour lutter contre les maladies, produire des remèdes et des technologies pour pallier les manques et corriger les défauts, inciter à consommer ces innovations pour pouvoir financer la recherche de nouvelles solutions et la production d’encore plus (de toujours plus) de remèdes et de technologies. L’économie de nos sociétés industrialisées repose sur une logique sans limites. Nous nous réjouissons de pouvoir bénéficier d’un formidable « système de santé ». Il faudrait plutôt qualifier ce dernier de « système de mala-dies » : un système qui est en bonne santé tant qu’il y a des malades à soigner. Il n’est donc pas étonnant d’entendre un dirigeant de l’industrie du médicament parler de la vieillesse comme d’un mal à guérir. Ce genre de discours est d’autant plus facile à tenir que, dans nos sociétés habituées à une augmentation croissante du niveau de confort, les limitations, les renoncements et les désagréments liés au grand âge sont souvent vécus comme d’insupportables frustrations. Pourtant, n’en déplaise aux personnes qui s’enrichissent en propor-tion du nombre de malades à traiter : le phénomène du vieillissement n’est pas une pathologie et le grand âge n’est pas une maladie.

La vieillesse est un temps de la vie, une période de l’existence à laquelle, si nous avons la chance de vivre longtemps, nous serons confrontés. Cette expérience est l’opportunité de mieux comprendre

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ce qu’est la vie. Elle fait prendre conscience des changements et de l’impermanence qui président aux destinées du vivant. Elle enseigne la nécessité de s’adapter et de se réinventer. Car notre capacité d’adaptation aux circonstances de l’existence – notre créativité psychique et physique – est le signe de ce que nous appelons la « bonne santé ». La bonne santé n’est pas l’absence de maladie ou d’infirmité, elle est la vitalité : l’aptitude à trouver un nouvel équilibre et à maintenir notre élan de vivre dans une situation modifiée ou perturbée. Dans ce sens, les changements liés au phénomène du vieillissement sont un véritable défi, une formidable occasion de se transformer et de révéler la vitalité qui est au fond de chaque être humain.

C’est de ce défi dont nous parle le beau livre d’Ezzedine El Mestiri. Cet ouvrage est un hymne à la vie, une invitation à vivre pleinement, généreusement et joyeusement. Car la joie est l’expression de notre vitalité. Cette émotion tout à fait particulière surgit des profondeurs de l’être. Au contraire du contentement, elle n’est pas conditionnée par les circonstances de notre existence. Elle dit simplement notre connexion à la vie, notre capacité à créer et à nous adapter, notre aptitude à dire « Oui » à ce qui est. La joie reflète notre degré de bonne santé.

En lisant L’art de vieillir dans la joie !, je me suis souvenu de plusieurs enquêtes de la psychologie positive (une discipline dédiée à l’étude scientifique des conditions qui permettent d’accéder au bonheur) qui montrent que le sentiment d’être heureux dépend à la fois de la capacité à éprouver du plaisir et de la possibilité de donner du sens aux expériences. En totale résonance avec ce que nous dit Ezzedine El Mestiri, ces enquêtes insistent sur le fait que le besoin de plaisir et le besoin de sens ne se conjuguent pas forcément aux mêmes temps. L’urgence du premier est immédiate ; celle du second accepte d’être différée. Dès lors, attribuer un sens aux expériences déplaisantes permet d’y faire face avec beaucoup plus de sérénité et d’efficacité. Cela permet même de rester heureux malgré l’adversité. Il apparaît

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également que plus on avance en âge, plus le besoin de trouver un sens devient prépondérant. Car, le nombre des années s’accumulant, on prend du recul et on éprouve souvent la nécessité de donner une signification au chemin déjà parcouru ; cela procure un précieux sentiment d’accomplissement. Et, de la même manière, le nombre des années qui restent à vivre diminuant, on attache généralement une plus grande valeur au temps qui passe ; de ce fait, on ressent davantage l’importance de choisir une direction pour le chemin qui peut encore être parcouru. Signification et direction définissent le sens d’une existence.

Les enquêtes de la psychologie positive confirment ce que les sages nous enseignent depuis la plus haute Antiquité : indépendamment de l’appartenance ethnique, de la culture, de la religion et des conditions socio-économiques, ce qui donne le plus de sens à la vie des êtres humains c’est leur capacité à exprimer le meilleur d’eux-mêmes, en lien avec les autres, au service de plus grand qu’eux-mêmes. Cela revient à se laisser inspirer par le « bon génie » qui est en chaque être humain – celui-là même que les anciens Grecs nommaient eudaimon – et de mener ce qu’Aristote appelait une « bonne vie » – une vie vertueuse au service de la vie en soi et autour de soi. Apprendre à connaître notre Moi – cet ego apeuré et agité qui permet d’exister – et, progressivement, ne plus le laisser occuper toute la place. Prendre le temps d’écouter le silence et de goûter la paix tout au fond de l’être – ce silence et cette paix qui étaient là avant que nous existions et qui seront encore là après que nous aurons cessé d’exister. Devenir calmes et silencieux. Ne plus tant vouloir faire et posséder. Ne plus tant chercher à exister, mais éprouver la joie d’être, tout simplement. Le processus du vieillissement n’est-il pas une invi-tation à dégonfler l’ego pour laisser la place à l’essence de la vie en nous – cette essence que nous partageons tous, l’essentiel que nous sommes tous : le silence et la paix ?

À travers les changements biologiques qui s’y produisent, notre corps vieillissant nous oblige à ralentir et à simplifier. Le mouvement

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naturel de la vie nous aide donc à retrouver la quiétude essentielle. Carl Gustav Jung décrivait l’apaisement de l’ego et le retour à l’es-sentiel comme un processus d’individuation où notre Moi laisse la place au Soi – non pas « notre Soi » mais « le Soi », cette dimen-sion commune à tous les êtres vivants qui nous met en connexion avec plus grand que nous, la vie en nous et autour de nous. Vouloir continuer à accomplir toujours plus de performances, se battre pour gommer les effets du temps, nier la réalité du vieillissement à l’aide d’une médecine anti-âge, nous priveraient d’une partie absolument capitale de l’expérience humaine. Vieillir est un cadeau, la cerise sur le gâteau de l’existence, l’occasion de trouver en soi la ressource fondamentale – je devrais dire : la source – de la vie. De tels propos ne font pas l’affaire des marchands de remèdes qui nous font croire que nous devrions rester jeunes pour échapper aux affres du temps.

En refermant ce livre, je n’ai pu m’empêcher de penser qu’il serait tellement plus profitable pour chacun de nous de bénéficier des précieux conseils d’une médecine pro-âge – une médecine qui, tout en nous aidant à préserver le maximum de nos capacités le plus longtemps possible, valoriserait l’expérience de vieillir. Comme nous le montre si bien Ezzedine El Mestiri, nous pourrions alors accepter la vie comme elle est, avec ses phases de croissance et de décroissance, avec ses temps d’existence et de mort. Nous serions encouragés à développer davantage d’intériorité. Et, loin de nous résigner, nous comprendrions que, tant que nous sommes vivants, la vie vaut non seulement la peine d’être vécue mais, surtout, la joie d’être aimée.

Thierry Janssen

Chirurgien devenu psychothérapeute spécialisé dans l’accompagne-ment des patients atteints de maladies physiques, Thierry Janssen est l’auteur de plusieurs livres consacrés à une approche globale de l’être humain, au développement de ce que l’on appelle la « méde-cine intégrative » et à une vision plus spirituelle de la société (www.thierryjanssen.com). Il est le fondateur de l’École de la présence thérapeutique (www.edlpt.com).

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1Introduction

Et si vieillir était une bonne nouvelle ?écrire sur la vieillesse à l’âge de 62 ans est une gageure. Il aurait fallu peut-être attendre encore deux décennies avant d’y succomber pour avoir la juste mesure de ce qui nous attend dans ce voyage inévitable vers la fin.

L’idée de cet ouvrage s’est imposée à moi lors d’une marche quoti-dienne dans les rues de Paris. Ce jour de printemps, je venais d’avoir 60 ans et, assis dans le jardin du Luxembourg, le temps d’une halte, j’ai réalisé que je me dirigeais vers ce pays, inconnu, appelé « la retraite », et que, dans les mois à venir, rien ne serait plus comme avant. Après un petit moment d’an-goisse, je me suis confié à mon imaginaire et aux interrogations de ma petite voix intérieure : quel vieux monsieur voudrais-tu être ? Comment imagines-tu ce supplé-ment de vie, ce cadeau qui t’est offert ? Je voyais le rocher de la mer, habité durant l’enfance, une frimousse pleine de rides, un horizon apaisé sur les vagues, un récital de poésie dans la tête, une grande écharpe caressant le cou, une main serrée pleine de tendresse… Et le sourire de mes deux filles, les rires de mes petits-enfants… La vie qui coule encore plus délica-tement, lentement comme dans un film… Bref, je suis encore capable de continuer à écrire des bribes de scénario, d’imaginer des scènes

1 Lewis Carroll, Alice au pays des merveilles , Le Livre de Poche, 2006.

“ « Qui es-tu ? demanda la chenille. – Je ne sais pas très bien en ce moment, répondit timidement Alice ; disons que je sais qui j’étais quand je me suis levée ce matin, mais je pense que j’ai changé plusieurs fois depuis ce moment-là1. ” Lewis Carroll

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à venir, de rêver d’autres idéaux tout en gardant un bel optimisme de vie… Un désir de renaître au milieu de tout ce que l’on a connu, vécu, approché... Et, surtout, ne rien confier à la consigne du temps qui passe, ne pas ranger ses souvenirs dans une cave !

Il est vrai qu’il n’existe pas de recettes pratiques et superposables pour bien vieillir. Vieillir, c’est avoir ce rendez-vous avec soi-même et préparer « cet être en nous » qui va vieillir. Me voilà donc à ce rendez-vous de découverte de soi. Sans être un spécialiste du sujet de la vieillesse, je suis intéressé… parce que je suis concerné.

Dans un monde où nous n’avons jamais vécu aussi longtemps, la question de savoir vieillir, le « bien-vieillir », n’a jamais été aussi éludée. Nous vivons de plus en plus vieux et pourtant notre société n’en continue pas moins à sacrifier au paradigme de la jeunesse. Les idées reçues sont légion, l’une des plus fréquentes étant de consi-dérer les personnes âgées comme des êtres inaptes et diminués.

Alors, me direz-vous, vieillir, oui, mais dans quel état et pour quoi faire ? Personne ne peut nier les difficultés et les diminutions liées au grand âge. La littérature est pleine, et à juste raison, de témoignages et d’inspirations évoquant ce passage de la vie sous l’angle des contingences, des conjonctures économiques, et le décrivant comme un naufrage et un fardeau pour la solidarité nationale.

Et pourtant, vieillir n’est pas seulement ce que nous renvoie quoti-diennement la résonance médiatique : des dépenses de santé en augmentation et un niveau de retraite en baisse… On ne s’intéresse malheureusement à la vieillesse qu’en termes de soins et de coûts.

Permettez-moi de porter, à travers cet ouvrage, un regard qui va à l’encontre du discours dominant sur la vieillesse. Et si vieillir était une bonne nouvelle ? Alors, comment faire de ce grand âge un moment de vie riche et passionnant ? Vieillir est un voyage intérieur qui permet de découvrir en soi de nouvelles ressources. C’est aussi garder un certain état d’esprit et une vie sociale vivante, fondée sur l’opti-misme et l’attention aux autres. Vieillir, c’est cheminer en conscience

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3et vivre avec son temps et le temps qui nous reste ; réfléchir au sens que l’on donne à sa vie afin de transformer toute la richesse de son expérience en espérance.

Le grand âge, ce supplément d’existence, est peut-être le moment de se poser des questions essentielles : qu’est-ce que je me souhaite pour l’avenir ? Comment aimerais-je vivre les nombreuses années à venir ? Puis-je trouver en moi de nouveaux talents et de nouveaux désirs ? Quelles terres m’est-il encore permis de découvrir ? C’est aussi le moment d’être plus disponible aux autres. L’être humain n’a jamais fini de grandir.

Chacun de nous a la possibilité de penser son vieillissement et d’agir à la recherche d’une tonalité positive. Oui, nous pouvons vieillir dans des conditions favorables, avec des implications heureuses sur notre bien-être et en complémentarité entre générations. Découvrir la douceur des instants qui passent, vivre des formes nouvelles de plaisir et de bonheur, mieux voir, mieux aimer…

« Et l’on voit de la flamme aux yeux des jeunes gens, mais dans l’œil du vieillard on voit de la lumière2. » Comme le disait Victor Hugo, apprendre à vieillir, c’est aussi passer de la flamme à la lumière.

Les centenaires de la vallée de Vilcabamba en équateur ont affiché une pancarte à la sortie de leur village : « Donner plus d’années à la vie et plus de vie aux années. »

Peu importe que nous vivions des années trop longues. L’essentiel est de vivre avec joie et sérénité le temps qui nous reste en lui donnant plus de vie…

2 Victor Hugo, La légende des siècles, Le Livre de Poche, 2003.

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Vieillir n’est pas une maladie !

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L’invention de la vieillesseLe monde n’a pas toujours été peuplé de personnes âgées. Certes, il y en a eu dans l’égypte ancienne, en Grèce, à Rome ou au Moyen Âge, mais les documents dont disposent les historiens n’y font que rarement allusion.

Avant le xvie siècle, les sociétés anciennes ne découpaient pas l’exis-tence humaine en tranches de vie. Une vie commençait au travail et se terminait avec la mort. Le vieux n’était qu’un adulte âgé. Et l’aversion de ces sociétés traditionnelles pour les chiffres nous prive le plus souvent de connaître l’âge précis des indi-vidus. Au Moyen Âge par exemple, personne ne savait son âge à dix ans près2 ! Jusqu’à l’apparition d’un âge légal pour la retraite, il n’y a pas eu de vieillesse reconnue en tant que telle. C’est à partir du xviie siècle que des chiffres, des récits médicaux et des enquêtes sociales sont venus compléter et éclairer cette vision.

Aujourd’hui, alors que nous vivons de plus en plus vieux, le grand âge est devenu une étape décisive de la vie. Pour autant, tout le monde ne l’aborde pas de la même manière : certains y voient une fatalité, d’autres une formidable opportunité.

1 Sophie Swetchine, Lettres de Madame Swetchine, Nabu Press, 2013.2 Georges Minois, Histoire de la vieillesse en Occident, Fayard, 1987.

“ « Si la jeunesse est la plus belle des fleurs, la vieillesse est le plus savoureux des fruits1. ” Sophie Swetchine,

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Une planète de cheveux blancs

Depuis le xviiie siècle, l’espérance de vie a triplé. L’amélioration des conditions de vie a largement contribué à l’allongement de la durée de l’existence. La longévité, une des plus grandes révolutions univer-selles du dernier siècle, ne cesse de s’accroître. En 1750, l’espérance de vie était de 25 ans, contre 82 ans aujourd’hui (79,2 ans pour les hommes et 85,4 ans pour les femmes). Et selon les derniers chiffres 2015 de l’Insee, l’espérance de vie moyenne dès le début de la retraite s’élève à 23,1 ans pour les hommes et 27,7 ans pour les femmes. Ainsi, le vrai âge d’entrée dans la vieillesse est aujourd’hui aux environs de 85 ans.

Le xxe siècle a offert à l’humanité la longévité. En un siècle, nous avons ainsi gagné trente ans d’espérance de vie. On peut désormais croiser cinq générations dans une seule et même famille !

Bon à savoir

Un milliard, c’est le nombre des personnes de plus de 50 ans dans le monde. Les plus de 60 ans représentent aujourd’hui 11 % de la population de la planète. Ils seront 21 % en 2040. Les plus de 60 ans, 14,5 millions de per-sonnes aujourd’hui, soit 23 % de la population française, seront 17 millions en 2020. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), un enfant sur quatre nés aujourd’hui pourra célébrer son anniversaire dans l’année 2100. Un quart des enfants nés aujourd’hui vivra centenaire.

L’espérance de vie progresse presque partout dans le monde, sauf en France en 2015. Elle dépasse aujourd’hui les 80 ans dans la plupart des pays. D’après l’OMS, dès 2020, notre planète comptera davan-tage de personnes âgées de plus de 60 ans que d’enfants de moins

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de 5 ans ! Et entre 2000 et 2050, le monde passera de 500 millions à 2 milliards de personnes de plus de 60 ans.

L’humanité prend des rides. Ce grand changement démographique n’est pas propre à la France ou à l’Europe, il concerne le monde entier. La seule certitude est que l’allongement de la vie et l’augmentation du nombre des personnes âgées influeront lourdement sur les décisions économiques et politiques de ce xxie siècle.

France : l’espérance de vie recule

Le bilan démographique de la France publié en janvier 2016 par l’Insee indique que le nombre de décès est au plus haut depuis l’après-guerre. Ainsi, 599 000 personnes sont décédées en 2015, soit 41 000 de plus qu’en 2014. Un chiffre qui est le résultat du vieillisse-ment de la population et de trois épisodes exceptionnels (canicule en juillet, vague de froid en octobre, épidémie de grippe en début d’année). Dans le même temps, les naissances ont diminué : 791 000 bébés sont nés, soit 19 000 de moins qu’en 2014. Autre nouvelle préoccupante : le recul de l’espérance de vie, une première depuis 1969. En France, l’espérance de vie à la naissance a diminué en 2015, de 0,3 an pour les hommes et de 0,4 an pour les femmes, pour s’éta-blir respectivement à 78,9 ans et 85 ans.

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Un vieillissement mal vu ! Il est dommageable que notre société continue à considérer le vieil-lissement sous l’angle de la dépendance et souvent de l’impotence. Or, dans la réalité, la vieillesse est un très bel âge de la vie. Comment éviter une stigmatisation du vieillissement qui considère que le nombre croissant de personnes âgées est un fardeau pour les géné-rations futures ? Tous les chiffres prouvent le contraire.

Il est peut-être temps de développer une culture de la vieillesse et de nous atteler à changer le regard qui accompagne si mal aujourd’hui le vieillissement.

Bon à savoir

Contrairement à certaines idées reçues, la grande majorité des plus de 60 ans est en bonne santé. En France, seulement 8 % sont en grande perte d’autonomie ; 70 % des plus de 85 ans vivent à domicile et de manière relativement autonome. En France, sur les 17 millions de vieux, 15 millions sont en bonne santé.

Le sociologue Serge Guérin s’interroge sur la signification du secré-tariat d’état chargé des Personnes âgées, toujours placé sous la coupe du ministère de la Santé : « Comme si la longévité ne relevait que du médico-social ! Au nom de quoi n’y aurait-il pas un ministère de l’Allongement de la vie et de l’Intergénération ? Un ministère de la Transition démographique3 ? »

Nos attitudes par rapport aux personnes âgées sont souvent marquées par l’incompréhension. Les personnes âgées seraient pauvres et auraient besoin d’aide : fausse idée quand on sait que la plupart de nos aînés sont en bonne santé et apportent une contribution valable à

3 Serge Guérin, Silver génération, Michalon, 2015.

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la société. À l’inverse, nos aînés sont parfois décrits comme jouissant d’une confortable sécurité financière, disposant d’un certain pouvoir et imposant un fardeau financier aux générations futures. Ces idées fausses ne peuvent qu’exacerber le conflit entre les générations.

Il est important de repenser la vieillesse, de lui redonner sa place en tant qu’étape de mûrissement, une étape pendant laquelle l’être humain, après avoir remonté le cours de sa vie, en retient l’essentiel et devient un phare pour les générations qui viennent.

Cela passe peut-être par l’acceptation par chacun d’entre nous de sa vieillesse. Être vieux ne signifie-t-il pas que nous avons réussi à survivre à des épreuves et avons fait appel à des forces remarquables qui méritent le respect ?

Les citoyens vieillissants, loin d’être un fardeau, sont surtout des éclaireurs actifs. Nous avons besoin de nos anciens et de leur sagesse pour garder le sens de la juste mesure dans notre vie.

Bon à savoir

Le vieillissement dans une société n’est pas vu par certains économistes comme une catastrophe économique mais plutôt un enrichissement. La longévité est un facteur de prospérité et fait augmenter le PIB. En Norvège où l’espérance de vie atteint plus de 80 ans, le PIB par habitant est de 55 600 dollars. Au Zimbabwe, le PIB par habitant est de 500 dollars avec une espérance de vie de 37 ans !

Irène, 89 ans, ancienne professeure de français « Vieillir, c’est aussi apprendre à être plus bienveillant à l’égard de l’autre. »

« Je n’ai pas vraiment préparé ma retraite ; je savais que j’aurais plus de temps pour voyager, visiter les exposi-tions et fréquenter les spectacles ; de plus, investie dans

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des associations, je savais que je ne cesserais pas d’être active. À la retraite, on peut découvrir, ou plutôt développer des passions existantes et des activités d’émerveillement. Exemple, renouer avec des amitiés laissées en sommeil à cause des exigences de la vie, mais surtout, il y a eu, pour moi, la découverte de la grand-maternité qui fut une source de joies qui nourrissent encore mon grand âge.

Nous devons changer notre regard parfois dévalorisant sur la vieillesse à qui l’on doit, comme à tout être, reconnaissance et respect (ni moins, ni plus, car il ne faut pas tomber dans une espèce de discrimination infantilisante). En conséquence, il faut que la participation des vieux (ce mot n’est pas une injure) dans toutes les structures d’une société soit consi-dérée comme normale. Ils apportent leur histoire et leur expé-rience, différentes des autres générations qui leur apprennent aussi à renouveler leur regard. Sans échange, chacun vit dans une forteresse qui épuise ses ressources.

Vieillir, c’est continuer à s’enrichir, affectivement, intellectuel-lement, moralement, parfois manuellement quand on en a le goût, rester ouvert à la vie, ce bien si précieux. C’est aussi apprendre à être plus indulgent, plus bienveillant à l’égard de l’autre. Garder le souvenir de ceux qui vous ont aimés pour continuer avec eux. Être autant que possible au milieu des autres, tous les autres, regarder, écouter, sentir, aider comme on peut, ne pas trop regarder en arrière. »

Vivre un siècle ! Dans Le meilleur des mondes dépeint par Aldous Huxley, il n’y a pas de vieux, chaque humain garde une apparence parfaite jusqu’à la mort. Le mythe ancestral de la jeunesse éternelle projeté dans la science-fiction nous revient aujourd’hui en force. Les gains de

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longévité se veulent des gains de jeunesse prolongée tandis que la vieillesse est repoussée aux confins de la marginalité.

Les cultures sont pleines de figures de grands vieillards. Le plus emblématique est Mathusalem : une figure biblique censée avoir atteint l’âge de 969 ans ! Ces patriarches bibliques sont souvent proposés comme modèles d’identification religieuse pour glorifier l’âge, gage de longévité, de fécondité et de richesse.

« Une mystique nouvelle semble venir soutenir la résurrection du vieux Mathusalem : la religion de la santé et le culte du corps, nouvelles valeurs de la société occidentale, renvoient les maladies, le vieillissement et la vieillesse au rang des injustices que la science et les technologies permettent désormais de combattre4», constate Jean-Pierre Bois.

Cette quête mystique se traduit aujourd’hui par une idéologie qui lutte contre l’âge et qui voudrait en gommer les signes et les effets. Elle s’exprime à travers des ouvrages, des recettes, des modes de vie, des exercices pour se maintenir jeune et lutter contre le vieillissement. Elle est devenue omniprésente dans une société marchande où tout se vend. La longévité est désormais pensée comme un mythe pour fuir la vieillesse. Des scientifiques mènent actuellement des recherches expé-rimentales sur l’animal pour comprendre les processus de dégradation et tenter de retarder l’heure de la mort, et – pourquoi pas – atteindre, dans un futur « biotechnologique », l’immortalité. Le mythe de Faust et la légende de la fontaine de jouvence sont plus que jamais à l’ordre du jour dans une société individualiste qui, bien que vieillissante (ou à cause de cela), idéalise le corps jeune et sain.

Aujourd’hui, les géants de la technologie financent à coups de millions de dollars les recherches les plus pointues sur la longévité dans l’es-poir d’inventer des outils qui augmenteraient les ressources du corps humain. Objectif : repousser la mort le plus longtemps possible. Ces

4 Jean-Pierre Bois, Le mythe de Mathusalem, Fayard, 2001.

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initiatives (greffes de neurones, tissus imprimés en 3D, cellules régéné-rées…) menées particulièrement aux états-Unis manquent cruellement de procédures de contrôle et ces nouveaux traitements sont destinés aux riches. Désirer rester jeune, freiner au maximum le vieillissement sont aujourd’hui les objectifs affichés d’une société marchande.

Et surtout, cette course scientifique nous fait croire que nous pour-rions repousser toujours plus loin l’âge de la vieillesse. Certains généticiens estiment que nous serions programmés pour atteindre un âge maximum autour de 120 ans… Pour peu, il est vrai, que les conditions de vie soient favorables. Aujourd’hui déjà, les centenaires ne sont plus une rareté ; leur nombre a été multiplié par cinq au cours des vingt dernières années.

Il est temps de réhabiliter la vieillesse et de se défier de la longévité. Vieillir n’est pas que durer, c’est faire l’expérience de la durée ; vieillir, c’est transformer son rapport au monde, aux autres et à soi-même.

Quelle personne âgée êtes-vous ?

Mature : vous êtes une personne aimable qui profite bien de la vie, s’estime et se maintient active. Vous êtes spontanée sans être impulsive ; autonome et tolérante. En plus, vous regardez l’avenir avec optimisme. Parfait, vous êtes la mieux adaptée pour la retraite ! Pantouflarde : vous vous adaptez bien à la vieillesse, mais d’une façon passive et dépendante. Vous aimez les chaises berçantes et vous êtes très peu active socialement. Heureuse de ne pas prendre de responsabilités et d’éviter des conflits avec les autres. Et face à votre passé, vous n’avez pas de regrets. Endurcie : vous êtes souvent stricte et centrée davantage sur le devoir que sur le plaisir. Toutes vos défenses sont orientées pour maîtriser votre peur du déclin et de la dépendance. Vous contrôlez rigidement vos émotions et toute occasion est bonne pour affirmer que vous ne vieillissez pas. Bien évi-demment, vous êtes fière de votre passé et de votre réussite professionnelle.

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Mal adaptée : vous êtes mécontente de votre âge, colérique, hostile, néga-tive, amère. Vous passez votre temps à blâmer vos proches en les accusant de vous empêcher de vous épanouir… Aigrie et méfiante, vous n’acceptez pas votre vieillesse, ce qui entraîne une faible estime de soi, des regrets et un sentiment d’inutilité. Vous vivez la vieillesse comme une déchéance en attendant la mort comme une délivrance.

Ces portraits sont inspirés de l’excellent ouvrage de Denise Dubé, Humaniser la vieillesse, MultiMondes, 2006.

Vieillir, c’est avancer dans la vie

L’âge, c’est le résultat d’un rapport au temps au terme duquel chacun de nous se trouve changé, tant sur le plan physique que sur le plan émotionnel, affectif, culturel, spirituel… On sait quand commence la jeunesse et l'on ne peut pas dire quand elle se termine, mais à l’inverse, on ne peut dire quand commence la vieillesse mais on sait quand et par quoi elle se termine. « On commence à vieillir quand on finit d’apprendre », dit un proverbe japonais. L’âge fait partie de la vie, tous les âges font partie de la vie et tous les âges valent d’être vécus. « L’un des privilèges de la vieillesse, c’est d’avoir, outre son âge, tous les âges », observait Victor Hugo.

Leur vieillesse : « Le temps qui reste »« Je l’aime tant, le temps qui reste... Je veux rire, courir, pleurer, parler, Et voir, et croire,

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Et boire, danser, Crier, manger, nager, bondir, désobéir J’ai pas fini, j’ai pas fini ».

La chanson de Reggiani « Le temps qui reste » (2002) résume par-faitement toute la richesse accumulée par l’âge et le désir encore d’exister. Une conception optimiste de la vieillesse !

Une vieillesse heureuse, elle se prépare en amont et il est impor-tant de ne pas trop attendre pour y réfléchir. Chacun peut trouver en soi un chemin propre et singulier pour vivre le temps qui passe avec son expérience. Et rien n’est plus judicieux et délectable que de faire appel aux philosophes, nombreux d’ailleurs à avoir réfléchi sur la vieillesse, avec plus ou moins d’optimisme, pour nous éclairer. Beaucoup d’entre eux y ont vu une régression irréversible des capa-cités physiques et mentales. Aristote fixe la limite de notre faculté d’esprit à 49 ans environ. Montaigne, évoquant sa propre vieillesse dans ses Essais, estime que c’est à l’âge de 30 ans qu’il aurait entamé sa vieillesse : « Depuis cet âge, et mon esprit et mon corps ont plus diminué qu’augmenté. » Et la charge la plus raide nous est offerte par Nietzsche, qui dénie tout sens de sagesse aux personnes âgées : « On a tort de permettre au soir de juger le jour, car trop souvent alors la fatigue se fait juge de la force5. »

En revanche, d’autres philosophes verront dans le fait de vieillir une opportunité pour mieux s’accomplir. Ce qui signifie que l’être humain continue de s’accomplir jusqu’à la fin de sa vie. Rousseau évoque, dans ses Rêveries d’un promeneur solitaire, que « la jeunesse est le temps d’étudier la sagesse ; la vieillesse est le temps de la pratiquer ». Nous accumulons de l’expérience pendant l’âge adulte pour pouvoir jouir un jour des avantages de notre ancienneté. Il s’agit d’une vision

5 Friedrich Nietzsche, Le gai savoir, Gallimard, 1964.

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optimiste de la vieillesse, vécue comme une libération à l’égard des soucis de la vie active, permettant de mieux vivre son existence pure-ment spirituelle. Une vieillesse qui nous éloigne des préoccupations de l’âge adulte et de ses responsabilités pesantes. Une vieillesse plus avantageuse que la jeunesse et une chance pour qui sait en cueillir le fruit. Le philosophe Gilles Deleuze ne la décrivait-il pas comme l’« âge splendide rempli par la joie d’y être arrivé » ?

Thierry, 68 ans, ancien cadre dans la banque « Je m’efforce de trouver la place la plus juste et la plus perti-nente au sein des “forces bienfaisantes”… tout en sacrifiant à un certain épicurisme. »

« J’ai eu un itinéraire scolaire d’abord en zigzag qui m’a souvent fait me poser la question “Qui suis-je ?”. J’ai été bizarrement un excellent, puis un médiocre élève. Humilié par l’apparition de l’échec scolaire, j’ai arrêté mes études initiales avant le bac. Mon père avait une petite agence immobilière, il m’a pris avec lui. J’allais encaisser les loyers. Il est mort comme je n’avais pas encore 22 ans. J’ai continué, faute de savoir quoi faire d’autre, mais ce métier n’était pas fait pour moi et j’ai connu l’échec professionnel dans ce qu’il a de destructif. J’ai eu la chance de rencontrer mon pygmalion en la personne d’une graphologue qui m’a parlé de ce qu’il y avait en moi. Dans la foulée, j’ai repris le chemin de l’école et j’ai passé un BTS de gestion puis, tout en travaillant, un diplôme de niveau I-II : la machine avait redémarré ! Dès lors, ma vie a changé, j’ai connu la passion professionnelle, l’épanouissement intellectuel et relationnel. Cela m’a conduit à être responsable de la formation des dirigeants, au sein d’une banque, au plan national. Cette vie de hauts et de bas m’a amené à réfléchir beaucoup à la plasticité de notre personnalité, au rôle sur notre bonheur et notre destin, de ce que nous nous racontons en bien ou en mal sur nous-mêmes.

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Je n’ai pas préparé ma retraite, mais j’avais observé très tôt un certain nombre de phénomènes qui marquaient l’entrée en retraite de personnes que je connaissais. Je me souviens en particulier d’un ingénieur qui avait terminé sous-directeur d’une usine et qui avait été heureux d’arriver enfin à l’âge de la retraite : il a plongé dans une dépression qui le surprenait lui-même. On peut donc désirer une chose et, quand on l’a, être déçu, voire pis. J’en ai d’ailleurs tiré un programme de préparation à la retraite que j’ai baptisé “Cap Senior” et qui continue à tourner ici et là. En ce qui me concerne, je ressen-tais un besoin de liberté et, pour moi, la retraite a surtout été l’accès à la liberté. Besoin de liberté pour accueillir dans ma vie d’autres choses que j’avais déjà en moi mais en attente derrière la porte.

Être à la retraite, c’est être libre et disposer de son temps. Il se trouve que j’étais passionné par mon travail – imaginer, conce-voir, organiser des séminaires innovants – et que j’ai gardé une petite activité professionnelle. La liberté, c’est aussi de vivre où l’on aime. J’ai aimé Toulouse, Paris, mais depuis longtemps, j’aspirais à vivre près de la mer. Excessivement sédentaire, j’ai découvert l’envie de marcher et je fais des randonnées. J’ai le projet aussi d’apprendre la voile, d’écrire des livres, des histoires, d’apprendre le jardinage, etc. Je peux m’occuper davantage de ma revue Commencements...

La retraite est-elle le temps de tous les possibles ? Tous les possibles, c’est peut-être beaucoup. De plus de possibles, sûrement. De l’improbable aussi, au sens que, soudain, une bifurcation peut se présenter que l’on va oser prendre. En termes d’occupation et de gestion de mon temps, ma liberté est grande. Mais on peut vivre aussi – et je l’ai vécu – la déso-rientation qui vient de l’absence d’obligations imposées de l’extérieur. C’est un nouvel art de vivre que de s’appuyer sur soi-même plus que sur des obligations extérieures.

En découvrant de nouvelles passions, j’ai l’impression que ce que je fais, c’est faire germer des graines qui étaient déjà en moi. C’est comme si, de mon jardin, je n’avais cultivé jusque-là

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qu’un bout de terrain et qu’il m’attendait pour que je m’oc-cupe du reste. La prospective, qui fait partie des sources de mes séminaires, m’a amené à prendre conscience depuis des années de la problématique dans laquelle est engagée l’humanité. Je m’efforce de trouver la place la plus juste et la plus pertinente au sein des forces bienfaisantes… tout en sacrifiant à un certain épicurisme.

Il y a vieillesse et vieillesse. Entre l’âge de l’entrée en retraite et un nonagénaire, il y a une trentaine d’années. On appelle tout cela “vieillesse”. Ma fille travaille dans le maintien à domicile des personnes âgées. Qu’ai-je en commun avec ses clients, sinon la perspective de devenir éventuellement comme eux ? La vieillesse, je dirais que c’est d’abord la peur de vieillir. J’avais un cousin qui est mort à 101 ans. Jusqu’à quelques mois de son départ, il s’occupait encore de son jardin. Il avait ce plaisir. C’était un petit homme à l’œil vif et même un tantinet coquin. Il y a vieillesse et vieillesse. Vieillir, c’est quand le corps vous lâche. Pire, c’est quand l’esprit vous quitte. C’est quand, comme le disait Teilhard de Chardin, “je m’appartiens de moins en moins à moi-même”. Il faut reculer cette échéance en étant vieux le plus tard possible. Tu me diras : on n’est pas toujours maître de ce qui nous arrive, et j’en suis d’accord, d’autant que notre monde avec ses diverses pollutions est délétère. C’est une chose à gérer en veillant sur notre hygiène physique et morale, et spirituelle.

Je pense qu’il faut se méfier de la pente de la facilité. En cari-caturant : “Je n’ai plus l’obligation de faire quoi que ce soit, alors je ne fais plus rien !” Or, moins j’en ferai, moins j’aurai envie d’en faire, et moins j’aurai d’énergie, etc. Un cercle vicieux qui vient du fait que, tout au long de leur vie, la plupart d’entre nous ont le sentiment d’avoir agi par obligation. Du coup, la terre promise, c’est l’inaction. Non, la terre promise, c’est l’action choisie.

Se méfier aussi des histoires que l’on se raconte sur la vieil-lesse, des images que l’on a de la vieillesse, des compor-tements que l’on devrait avoir parce que l’on a tel âge.

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Quand j’avais 30 ans, quelqu’un de 60 me paraissait vieux. Maintenant que j’approche les 70, je n’ai pas l’impression d’être aussi vieux que cela. Un de mes amis avait fait une liste des comportements qu’il voyait se développer chez les personnes plus âgées – comme traîner les pieds, ne pas se raser certains matins, prendre moins soin de soi, traîner au lit, etc. – et avait demandé à son entourage de le prévenir afin qu’il puisse se ressaisir. La posture physique, indéniablement, jette son ombre – ou sa lumière – sur le mental.

Faire vivre des relations avec les autres, avec nos états d’âme et nos humeurs, me paraît aussi fondamental. Françoise Dolto a montré qu’un bébé en bonne santé physique, mais privé de contacts, s’étiole. Il peut même en mourir. Nous avons besoin de partager, IRL comme disent les geeks ! In real life. Dans la vraie vie. La télévision nous montre des images d’êtres humains, mais elle est l’un des pièges du retraité. L’Internet nous procure des interactions, mais numérisées. Les revues nous proposent des jeux d’intelligence, le sudoku, etc., mais ce n’est pas la vie. La vie, c’est les autres et, le mieux, c’est lorsque c’est un projet avec les autres.

Puis, il y a le rêve. Nous vivons dans une société qui nous assassine moralement avec son principe de précaution et son “pragmatisme”. Le raisonnable tue. Se traiter comme une porcelaine fragile parce que l’on a un certain âge, vivre entre le médecin, les boîtes de pilules qu’il prescrit et le laboratoire d’analyses, entre la peur de la grippe et celle d’attraper une turista, c’est se mettre derrière les barreaux.

Vivre la vie, c’est prendre des risques. C’est partir sur les chemins si l’on en a envie. C’est déménager à l’autre bout du monde si l’on en a envie. C’est écouter les rêves d’enfant que l’on avait mis sous le boisseau et en faire quelque chose avant de quitter ce monde. Comme l’écrit avec humour Jean-François Vézina, un psychologue québécois : “Tout se passe avant 100 ans”. Et il prône de laisser entrer le hasard, de l’inviter même, alors que notre premier réflexe est de tout avoir sous contrôle ! »

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L’âge d’or des seniors« Les vieux aujourd’hui le sont de moins en moins et ne corres-pondent plus du tout à l’image que l’on s’en fait. Ils sont consomma-teurs, connectés, mieux informés que le reste de la population et très impliqués dans la vie sociale6 », explique Serge Guérin, sociologue.

On dénombre aujourd’hui 15 millions de personnes de plus de 60 ans et la France en comptera 20 millions en 2030. Mais attention, les seniors d’aujourd’hui ne ressemblent en rien aux vieux d’avant. Ralph Hababou constate que « Cette génération, née entre 1945 et 1960 dans l’euphorie de l’après-guerre, qui a bénéficié de la paren-thèse enchantée des Trente Glorieuses : mai 1968, le travail sans le chômage, la consommation sans aucune contrainte, la sexualité sans le sida, le boom de l’immobilier, etc. Une fois devenus seniors, ils continuent donc à travailler, divorcent, se remarient, voyagent, surfent sur Internet, font du sport7... ».

Bon à savoir

Nombre de personnes âgées maîtrisent les nouvelles technologies et aiment les utiliser. Au xxie siècle, les mamies skypent avec leurs petits-enfants et envoient des photos par e-mail à leurs proches. Elles utilisent les nouvelles technologies dans la vie quotidienne. Les seniors sont de plus en plus pré-sents sur les réseaux sociaux : c’est aujourd’hui un sur cinq qui y est actif. Plus de 2,4 millions de seniors sont titulaires d’une page Facebook®, pour seulement plus d’un demi-million de tweets. C’est ainsi que 49 % des seniors considèrent qu’Internet est important pour leur vie sociale.

Enquête Credoc, « Seniors et catégories modestes investissent les réseaux sociaux », décembre 2015.

6 Op. cit.7 Ralph Hababou, S comme seniors, First, 2014.

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Loin d’être le début de la fin, les visages de la vieillesse sont aussi des êtres qui cultivent la sociabilité, l’humour et l’optimisme. La personne âgée n’est pas qu’un corps à soigner ou qu’un budget à récupérer pour ladite consommation senior ! C’est un être en allongement psychologique et spirituel, préoccupé par la réalisation de lui-même et ouvert sur le monde. Il est temps que notre société découvre et célèbre dignement ces êtres qui ont traversé des épreuves, acquis de la richesse et de l’expérience à transmettre, découvert des chemins pour parvenir à la sérénité et à la paix du cœur.

Prendre enfin conscience que ces personnes qui nous ont précédés dans l’histoire ont quelque chose à nous dire sur la manière de donner un sens à notre vie.

Un vocabulaire pour voiler les mots « vieux » et « vieille » !

Dans le dictionnaire, le verbe « vieillir » a deux sens : le premier, « prendre de l’âge », et le second, « perdre de son actualité ». Vieillir, c’est « prendre de l’âge », dit le dictionnaire Le Robert. On vieillit donc à tout âge. Il n’y a pas vraiment d’âge déterminé pour entrer dans le vieillissement, et l’âge en chiffres peut ne pas correspondre du tout à notre vécu réel. « Tout le monde veut vivre longtemps, mais personne ne veut devenir vieux », notait Jonathan Switt, tellement cette appellation « vieux » est associée, dans un sens péjoratif, à l’image d’une personne inactive et malheureuse.

Pour voiler le mot « vieux », notre imaginaire a fait appel à tout un arsenal de synonymes. Survient dans les années 1980 ce mot « senior », aseptisé, qui désignait dans la Rome antique les citoyens « de réserve », les vétérans dans le domaine sportif, et aujourd’hui une classe sociale et commerciale pour les « plus de 50 ans ». Quant à l’expression « personne âgée », elle ne cesse de courir dans toutes les sphères institutionnelles pour enfermer des êtres dans une catégorie en liaison avec l’âge. Une appellation teintée de politiquement correct !

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C’est en 1985 que le gouvernement français a banni des textes adminis-tratifs des mots et des appellations à connotation négative à propos de la vieillesse, pour préférer « personne âgée », dont la vraie définition est « personne plus âgée que la moyenne des autres personnes de la popu-lation dans laquelle elle vit8 ». D’ailleurs, cette expression est dénuée de tout sens car, en réalité, nous sommes tous des personnes âgées, et depuis notre naissance ! Alors, pourquoi a-t-on masqué ces mots respectables : « vieux » ou « vieille » ?

8 Gérard Badou, Les nouveaux vieux, Le Pré aux Clercs, 1989.