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Journal des Travailleurs des Industries du Livre, du Papier et de la Communication N° 137 Juin 2007 Prix 1,54 Commission paritaire 2999 D 73 S L’ACTION SYNDICALE Smic, heures sup’, TVA sociale, licenciements, déremboursements contrats de travail L’ACTION SYNDICALE face à la casse sociale face à la casse sociale Smic, heures sup’, TVA sociale, licenciements, déremboursements contrats de travail

face à la casse sociale · élaboré un projet de réindustria-lisation à partir d’un process innovant (la fabrication de sacs à base de chan-vre), appuyé sur des essais scientifiques,

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Journal des Travailleurs des Industries

du Livre, du Papier et de la Communication

N° 137Juin 2007

Prix 1,54 €Commission paritaire 2999 D 73 S

L’ACTION

SYNDICALE

Smic, heures sup’, TVA sociale,licenciements, déremboursements

contrats de travail

L’ACTION

SYNDICALE

ffaaccee àà llaa ccaassssee

ssoocciiaallee

ffaaccee àà llaa ccaassssee

ssoocciiaallee

Smic, heures sup’, TVA sociale,licenciements, déremboursements

contrats de travail

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édito Jean Gersin

Pendant l’été,

Sarkozy n’oubliera personne

2 - JUIN 2007

Pendant les congés payés, Sarkozy va s’occuper de nous, même si les remousélectoraux provoqués par la TVA « sociale » ont marqué le deuxième tour desélections législatives. Une plainte, en effet, s’est élevée des rangs bleu horizon :la simple évocation de cette maudite TVA « sociale » aurait fait perdre60députés, selon un ex-premier ministre, à ce camp-là. Les troupiers sarkozyensparlaient à l’unisson d’«erreur de communication», d’«effet démobilisateur» et«désastreux», de «gaffe collective». Sans doute…Mais enfin : cette TVA sociale, si lourde à porter, est-elle dans le programme decelui qui fait ce qu’il dit (et vice versa) ? Oui ! Et la commission de la TVA«sociale» continuera ses travaux jusqu’à fin juillet.

Alors ?Si la simple annonce de cette TVA entame la belle image médiatique de l’Elu,nous voilà dans une drôle de situation :Sitôt la présidentielle passée, la face antisociale du bonhomme se dévoile et joueun rôle de repoussoir. C’est dire à quel point nombre de salariés ont voté dansle… bleu, charmés sans doute par le numéro de prestidigitateur de l’homme deNeuilly. S’il est vrai que l’évocation de cette TVA a influé sur la composition de laChambre des députés, alors les questions sociales sont bien au centre de lasituation, de façon hypersensible et hypertendue.

Des yeux se déssillent. Tant mieux. Mais tout reste à faire.

Le bilan du premier gouvernement Sarkozy-Fillon est, déjà, éloquent : blocagedu SMIC (2%, une misère), annexion d’heures affectées au supplément de travailcontre les cotisations sociales et les sans-emploi, préparation de baissesnouvelles des remboursements et hausse des frais de santé à la charge desmalades. Pas mal, en quelques jours.L’axe majeur de l’offensive Sarkozy-Fillon vise en priorité un édifice socialfondamental : la Sécurité sociale. Basée sur le principe de répartition desrichesses afin que toutes et tous soient à l’abri des incertitudes du lendemain,elle est une insulte à la face des libéraux. Pour eux, l’individu doit payer seul,selon son revenu. Pour les pauvres ? La couverture sociale universelle.

Commis du libéralisme, Sarkozy, l’est et l’assume. C’est précisément sur ceprogramme libéral qu’il a conquis l’Elysée et la majorité de la députation. Encaptant, au passage, nombre de suffrages des salariés. C’est pourquoi sa batteriede contre-réformes tous azimuts appelle à porter plus haut l’action syndicale, lerassemblement majoritaire, fondé sur l’intérêt du plus grand nombre.Dès maintenant, il nous faut batailler pied à pied contre l’illusion libérale,expliquer et démonter son caractère toxique. La confrontation que rechercheSarkozy sur la question centrale de la protection sociale doit être préparée toutde suite par la conquête de l’opinion des salariés. Cette tâche est devant nous.C’est à cet égard qu’il n’y aura pas de vacances cet été, car le gouvernement neva pas chômer. La vigilance mobilisée s’impose, dès la première session duParlement.

Journal des travailleurs des industries du Livre, du Papier et de laCommunication263, rue de Paris 93514 Montreuil CedexTéléphone : 01 48 18 80 24Fax : 01 48 51 99 07Site : http://www.filpac-cgt.frE-mail : [email protected]

Comité de rédactionResponsable : Jean Gersin

Equipe rédactionnelle : Eric Birger, David Dugué,Yvon Huet, Jean-Pierre Ghiotto, Thierry Lanchon, Antoine PeillonFlorence Peyronneau, Correspondant :David Roussel

Montage :Madeleine Fougères

Révision : Michèle Marquis-Pardo

Imprimerie Alliages115, avenue Raspail94250 Gentilly

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3 - JUIN 2007

DOSSIER Fillon-SarkozyLa vile entreprisede destructionsocialpage 7 à 13

LES LUTTESProjet chanvreMarequelpage 3

Le Monde page 5

LES ACTIVITESREVENDICATIVESLe nouvel évangilelibéralpage 15

ET AUSSI...Assembléegénéraledu labeurpage 17

Comité exécutifnationalpage 18

PapierPapier

YvonHuet I L N’EST PAS RARE d’apprendre,

dans la routine des comptesrendus de délocalisations, debanqueroutes en tout genre, lafermeture d’une entrepriseindustrielle, souvent commen-tée par les médias comme laénième fatalité des effets de lamondialisation avec son cortègede drames sociaux et humains.Mais c’est sans compter avec ladétermination de salariés pape-tiers de Maresquel qui, avec leursyndicat Cgt, ont pris le partinon seulement de la résistancemais aussi de la contre-offensivepropositionnelle.

De nombreux mois de lutte Les salariés de Maresquel n’ensont pas à leur premier rendez-vous. La Voix du Nord avait déjàrelaté leur esprit de résistance le14 décembre 2005 : «… Ladirection de la papeterieInternational Paper deMaresquel (62), séquestrée parles salariés en colère…Enfermées dans un local, les sixpersonnes en question, dont ledirecteur du site, étaient encontact téléphonique avec lapréfecture, tandis que les gen-darmes appelés en renfort, ten-taient de négocier la libérationdes captifs. Ce mouvement decolère qui a cessé en fin de jour-née s'est déclenché suite auxpropositions d'indemnisationsfaites par le groupe papetier auxfuturs 230 licenciés de l'usine.»En février 2006, le groupe sué-

dois Klippan qui, en janvier, s'estmontré intéressé par la reprisedes Papeteries de Maresquel,décidait de se désengager. Dansle même temps, le groupeInternational Paper, invoquant la«crise généralisée qui touchel’industrie du papier dans lemonde entier», continue sapression pendant toute l’annéepour annoncer la fermeturedéfinitive du site alors que lessyndicalistes maintiennent lamobilisation et multiplientcontacts politiques et juridiquespour ne pas laisser les salariés sefaire broyer par l’inéluctableannoncé.

De la démission patronale à la mobilisation socialeAinsi, la Voix du Nord annoncedébut avril : «Les papeteries deMaresquel viennent de fermerleurs portes. Sonoco àMarquette s’apprête à le faire.Stora Enso (Corbehem) aannoncé l’année dernière lasuppression de 400 postes sur700. Et le plan de reprise d’unepartie de l’activité par les sala-riés, qui permettrait la sauvegar-de de 200emplois, est sérieuse-ment compromis. Les sociétésde la région produisaient1098234tonnes de papier en1998. Elles en ont fabriqué1076085 en 2005. Stable. Maisde 2878 salariés en 1998, l’in-dustrie papetière est passée à1973 en 2005. Le Nord - Pas-de-Calais, deuxième région

De Maresquel, petite ville du Pas-de-Calais de 900 habitants, àParis, il y a environ 230 kilomètres, autant que le nombre de sala-riés de la papeterie mis sur le pavé par le groupe InternationalPaper en avril 2007. Le 6 juin 2007, anniversaire du Débarquement,ils ont pris l’autobus tôt le matin pour aller à Bercy, chez M. Borloo,entre autre, ministre chargé de l’Industrie, par une belle journée deprintemps… et pas pour des prunes !

Projet pour

chanvrechanvreMaresquelMaresquel

ERRATUMRendons à....Loïc Daniel la paternité de son articleLoi Bichet du dernier Impac

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4 - JUIN 2007

papetière de France aprèsRhône-Alpes, est chiffonné. »La Filpac Cgt, dans ce cadrepour le moins d’urgence écono-mique et sociale, propose auxindustriels papetiers ainsi qu’auxpouvoirs publics un moratoiredes licenciements et proposeune charte papetière définissantles grandes lignes d’une relancede l’activité dans ce secteur. Côté politique, dans sa séancedu 22 février, le conseil régionaldu Nord - Pas-de-Calais affirmeson soutien aux salariés pape-tiers en réponse à une questionécrite de Myriam Cau, conseillè-re régionale dont voici unextrait : «Nous assistons à larépétition du désengagement degrandes multinationales papetiè-res de sites industriels régionaux: Stora Enzo à Corbehem il y apeu, et International Paper àMaresquel près d’Hesdin en cemoment.» «Les Géants depapier solidaires», associationdes salariés de Corbehem, ontélaboré un projet de réindustria-lisation à partir d’un processinnovant (la fabrication de sacs àbase de chan-vre), appuyé surdes essais scientifiques, uneétude de marché et un business-plan. Malgré le soutien d’éluslocaux, régionaux ou nationaux,rien n’a pu faire fléchir la multi-nationale, qui après moult tergi-versations, n’a pas accepté larevente de ses machines…

Une démarche novatriceMaresquel voit l’histoire se répé-ter, 230 salariés papetiers seretrouvent sur le carreau dansun secteur rural déserté de sesindispensables PME industrielles.Le projet des «Géants depapiers solidaires» pourrait êtremené sur ce site papetier, l’asso-ciation de Corbehem a rencon-tré pour cela les salariés deMaresquel qui ont eux-mêmesconstitués une association,«Chœurs de papiers». Unemachine adaptée à la produc-tion de sacs à base de chanvreexiste, mais la multinationale,pourtant tenue par convention àfavoriser la réindustrialisation dusite, ne semble pas favorable àune cession de machine. La production de sacs à base dechanvre est une véritable oppor-tunité de développement pournotre région, dans un contexteréglementaire favorable qui pré-

voit la fin de l’utilisation des sacsde caisse en plastique… Avec sabiodégradabilité, sa qualité derésistance, la sobriété énergé-tique du process de fabrication,la minoration totale des intrantschimiques, et enfin la garantied’une production agricole assu-rée aux paysans, on ne voit que

les impacts bénéfiques pour ledéveloppement durable d’un telprojet. Et l’emploi n’en est pas lemoindre...

Le projet Chanvre à Bercy !Le projet Chanvre est donclancé (pour un potentiel de 150à 250 emplois) sur le site deMaresquel. Ce projet est lié àl’agriculture et à l’environne-ment, techniquement réalisable.Mais pour qu’il soit entendu, lesmotions et les bonnes intentionsaffichées dans une période élec-torale ne suffisent pas. Ceux quiconnaissent déjà le goût amerde l’exclusion ne veulent pasattendre les vagues promesses.Ils demandent rendez-vous auministre chargé de l’Industrie,M. Borloo, avec leur syndicatFilpac Cgt, avec les élus régio-naux, avec les associationsGéant de papier solidaires etChœurs de papiers, afin queleur démarche soit soumise à laréflexion des décideurs, notam-ment International Paper.La date du 6 juin est arrêtée.Toutes les organisations syndica-les de la papeterie sont préve-nues et participeront au rassem-blé prévu à Paris à 11 heuresdevant le ministère. Toutes lesorganisations de la Filpac Cgt,notamment les syndicats pari-siens du livre et de la presse

seront de la fête. Quatre joursavant le premier tour des élec-tions législatives, M. Borloo adéjà du grain à moudre. Lemouvement social s’invite auconcours d’imagination, à la«révolution culturelle» tant sou-haitée par le président Sarkozy.

Mobilisation unitaire 11 heures. Les papetiers, soute-nus par les imprimeurs, les sala-riés de la presse, se rassemblent

à Bercy. Les responsables fédé-raux font état de la situation àl’ensemble des 300 salariés pré-sents. Après quelques momentsde suspense, ils apprennentqu’une délégation sera effecti-vement reçue pendant le ras-semblement.La délégation est composée dePatrick Bauret et de Jean Gersinpour la Filpac Cgt, SébastienSjekowsky et Jean-ClaudeDolliger, délégués syndicaux despapetiers de Maresquel, deMar i e -Chr i s t i ne B l and in ,conseillère régionale (verts) duNord - Pas-de-Calais, de MyriamCau, conseillère générale duPas-de-Calais (verts), de VincentLenas (PS), d’Antonio Canta etThierry Payen pour les Géantsdu papier solidaires deCorbehem, anciens salariés deStora Enzo à Corbehem, acteursdu projet Chanvre.Elle est reçue par M. AlainSmith, directeur de cabinet, etNicolas Deniau, son adjoint pourles questions industrielles. Aprèsun bref tour de table, ils ontexposé le projet techniqueChanvre et la situation deMaresquel soutenue par tous lespolitiques locaux et régionaux.La position d’InternationalPaper, qui souffle le chaud et lefroid et ne respecte pas ses réso-lutions et sa signature quant audémontage de l’usine. La délé-gation demande au ministre de

faire pression sur le groupe IPpour qu’il tienne ses engage-ments au moins jusqu’à la finali-sation de l’étude de faisabilitéfinancée par le Conseil régional.Elle demande une rencontrepour faire le point sur la situa-tion globale de l’activité papieren France pour la seconde quin-zaine de juin.

Fraternité et détermination Après une heure et demie d’en-trevue, la délégation se dirigevers le siège de la Cgt à Mont-reuil où les salariés papetiers,imprimeurs, distributeurs et édi-teurs de presse se rassemblentpour un après-midi de convivia-lité et de fraternité. Sébastien,Antoine et Patrick exposent auxconvives le déroulement de ladiscussion, avec le sentimentcertes du devoir accompli maisaussi la détermination sans faillepour aller jusqu’au bout de lalutte pour l’emploi qu’ils ontengagée. Ils considèrent qu’ilsont été écoutés, mais pour êtrevraiment entendus, il faudracontinuer le combat.

Michel Muller confirme le carac-tère exemplaire de cette luttequi n’est pas seulement celle dela résistance mais aussi laconcréti-s a t i o nsur le ter-rain de lac h a r t epapetièrequi, plusq u ’ u nd o s s i e ren cours,doit ani-mer lesl u t t e ssyndicales présentes et futures,bien au-delà de la situationlocale de chacun. Il ajoute quela Fédération est un outil dontils peuvent se servir sans réservepour faire avancer leurs revendi-cations et gagner sur le terrain.Dans un contexte de tous lesdangers où le recul social sem-ble à l’ordre du jour pour unpatronat ultralibéral un peu tropsûr de lui, la mobilisation unitai-re, l’utilisation de ce contre-pouvoir concret et efficacequ’est le syndicalisme, ne peutque faire mentir les chantres dufatalisme ambiant.

L’UNI APPORTESON SOUTIENAU PROJETCHANVRE

Large rassemblement de soutien des syndicats, des politiques et du courant associatif

La délégation se regroupe avant d’être reçue au ministère.

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5 - JUIN 2007

PressePresse

CONSTITUÉ aujourd'hui de cinq pôles(presse quotidienne nationale, pres-

se quotidienne régionale, presse maga-zine, Internet et les régies publicitaires),le groupe Le Monde est dans une crisequi peut être lourde de conséquences,sur les activités existantes et donc surl'emploi. Loin de rester passifs, cettesituation est pour nous l'occasion desensibiliser les salariés et leur permettrede s'approprier les enjeux auxquels lapresse et le groupe sont confrontés.Ainsi, nous avons édité un quatre pageset un tableau comparatif des projetsdes prétendants à la succession deM. Jean-Marie Colombani. Ces sup-ports ont permis d'engager le débatavec les salariés et de contribuer à cequ'ils se fassent une opinion, avant lesvotes du nouveau directoire qui doiventintervenir d'ici à la fin du mois de juin.En substance, notre expression porte unmessage clair pour affirmer que l'indé-pendance, chère aux confrères etconsœurs des rédactions, à laquellenous souscrivons pleinement, ne peutse construire qu'en ayant une stratégied'ensemble, intégrant des projets édito-riaux, industriels et commerciaux. Cestrois piliers permettront de maintenir etde garantir, à terme, l'indépendance dugroupe en s'appuyant notamment surle développement du bimédia (presse etweb) des titres existants, mais aussi depromouvoir de nouveaux titres, de nou-veaux projets dans les cinq pôles dugroupe.

Que pensez-vous de la dette, que l'ondit importante au Monde, des choixstratégiques et des investissementsentrepris ces dernières années ?La question de la dette n'est pas unsujet aussi simple qu'il y paraît. Lesmécanismes sont nombreux et compli-qués. C'est peut-être paradoxal, mais,aujourd'hui, une partie de l'endette-ment sert et servira à dégager des mar-ges financières dans le futur.Pour illustrer notre propos, prenonsdeux exemples :

- le premier, c'est lafiliale du Mondeinteractif (MIA).Après dix ans d'in-vestissements et derésultats négatifs,elle vient, pour lapremière fois, dedégager un résultatopérationnel trèspositif (+3millionsd'euros en 2006). Etce n'est pas un résul-tat conjoncturel.- Le deuxième : l'ac-quisition de Midi

Libre. Lorsde sonacquisitionen 2000,Le Monde,qui n'étaitpas encoreun groupe, n'avait pas d'argent. Il a dûs'endetter et c'est aujourd'hui une par-tie des bénéfices de Midi Libre qui per-met de faire vivre le quotidien national.Ces expériences montrent que l'objectifde construire un groupe de presse per-met de faire face aux concentrations etappétits financiers de groupes beau-coup plus riches et aux valeurs bien dif-férentes de celles du Monde.L'expérience récente de Libération quin'a pas voulu s'adosser à un groupe _etqui était, il y a dix ans, un titre phare dela presse quotidienne nationale commeLe Monde _ a montré une destinéebien différente. M. Rothschild a fini parimposer sa loi à un titre qui n'a pasd'autres choix que de s'y soumettre.

Quel est le but syndical que vous vousêtes assigné au journal et dans la pres-se en général ?La capacité d'Info'Com-Cgt est dedéfendre les doits individuels et collec-tifs, de pérenniser les acquis, de répon-dre aux attentes des salariés et aux nou-veaux besoins qu'ils expriment tout entraitant des questions stratégiques oudes évolutions de nos secteurs. Du quo-tidien jusqu'au groupe, des filiales où ily a peu de syndiqués, à la forte implan-tation syndicale dans la presse quoti-dienne nationale, nous construisonsdes convergences qui démontrent querester dans son pré carré n'offre pasd'avenir si ce n'est de finir en «villagegaulois». De ce point de vue, le projetsyndical que nous mettons en œuvre,en redéployant nos forces, permet deconstruire la Cgt de demain… Et pasque dans les bastions existants. Etre«utile» à tous les salariés, quels quesoient leurs statuts, n'est pas un vainmot, mais une nécessité et une réalité.

Pourquoi l'action d'Info'Com-Cgt etSIP-Cgt n'est-elle pas partagée pard'autres organisations syndicale ?Comment l'analysez-vous ?Nous resterons fidèles à notre démar-che qui, depuis le début, n'a pas pourobjectif de critiquer ou de prendre posi-tion contre un syndicat, de surcroît lors-qu'il est de la Cgt. Nous constatonssimplement que l'activité principale decertains syndicats consiste à discréditeren permanence l'activité d'autres etplus particulièrement Info'Com-Cgt.Cela en dit long sur leur objectif quicache en fait un manque de perspecti-

Crise etnouvellessolidaritésau groupeLe Monde

M. Jean-Marie Colombani a récemment été démis

de ses fonctions de directeur de la rédaction et de président

du Directoire du groupe Le Monde. Quelles peuvent

être, pour vous, les conséquences pour ce groupe

de presse et pour ses salariés ?Nous pensons que derrière

la non-reconduction, par les sociétés de personnels,

de Jean-Marie Colombani à la présidence du directoire,

se posent en fait d'autres questions, comme celles de l'avenir du périmètre

du groupe ou des priorités de développement

et d'investissement.

Romain Altmannet Bruno Lanteri

Françoise Henny, déléguée Info'Com-Cgt

de Publicat

Rassemblement des salariés du pôle magazine du groupe Le Monde le 11 juin dernier

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6 - JUIN 2007

ves, de propositions syndicales etprofessionnelles. Nous laissons lessalariés juger et décider de laconduite à tenir face à cette situa-tion d'exclusion.

Un arrêt de travail a fait débat auMonde lors des négociations sala-riales annuelles au Syndicat de lapresse quotidienne nationale(SPQN). Qu'en est-il pour vous ?Avec les autres syndicats de PQN,Info'com-Cgt vient de signer unaccord qui acte la fin, dans les siè-ges éditoriaux, de deux négocia-tions séparés : ouvriers, cadres,employés d'un côté et journalistesde l'autre. Nous en sommes satis-faits car il va permettre de revendi-quer ensemble des taux d'aug-mentation égaux pour tous. C'estune évolution majeure dans lesrelations sociales en presse qui esten parfaite adéquation avec nosobjectifs.Concernant la grève, nous n'yavons pas pris part et ce pour plu-sieurs raisons :- Premièrement, parce que l'orga-nisation d'une négociation endeux temps (centres d'impressionsd'une part puis centres éditoriauxd'autre part) n'étaiet pas pournous un tabou. Nous pouvonstous constater que les sièges édi-toriaux et les imprimeries sontséparés depuis de nombreusesannées. L'imprimerie du Monden'est plus avec la rédaction depuisplus de quinze ans ! L'importantest de porter ensemble des reven-dications tout en tenant comptedes spécificités. En effet, les per-sonnels travaillant dans les siègeséditoriaux sont sous différents sta-tuts et les inégalités salariales -comme la disparité hommes fem-mes - sont criantes. C'est pourcette raison que l'ouverture denégociations annuelles obligatoi-res (NAO) dans l'entreprise est

nécessaire. Elle doit être complé-mentaire à l'augmentation régio-nale.- Deuxièmement, parce que lesnégociations ne remettaient pasen cause, comme cela a pu êtredit dans les entreprises, lesconventions collectives de la PQNou le paritarisme.- Troisièmement, parce que lagrève a été décidée par un seulsyndicat, sans concertation avecles autres structures de la Cgt.- Enfin, sur la méthode : nousconsidérons que s'il doit y avoirune grève, elle doit être décidéeavec les syndiqués et non en«appuyant sur un bouton». Unmouvement de grève, ça se cons-truit avec le plus grand nombre, àpartir du lieu de travail. Il ne sedécrète pas seul.

L'actualité du groupe, c'est aussiun plan social dans une filiale dugroupe, Publicat, où la directionveut licencier 7 salariés sur les 52que compte cette entreprise… oùen êtes-vous ?L'expérience de Publicat est inté-ressante. Publicat est la régie

publicitaire de plusieurs magazi-nes du groupe (Télérama, Courrierinternational, La Vie, Danser,Ulysse…). Parmi ses activités, elleassurait la régie publicitaire dedeux titres extérieurs au groupeRustica et Famille & éducationdont la direction voulait visible-ment se débarrasser. Après unenégociation infructueuse, les édi-teurs ont «plié bagage». Septpersonnes étaient affectées à cesdeux titres et la direction souhai-tait, «simplement» et au plus vite,les licencier. Nous sommes doncintervenus rapidement pour exi-ger que les salariés de cette régiepublicitaire bénéficient desmêmes droits que les salariés duMonde _ comme nous avions pul'obtenir lors des négociations surla cessation du magazine TopFamille. Ainsi, un expert compta-ble a été nommé et des mesuressociales d'accompagnement _ quin'étaient pas obligatoires dans cecas - ont été négociées.La détermination des salariées,non résolues à subir, a permis detransformer ce plan de licencie-ment en plan de départs volontai-

res et d'obtenir différentsdispositifs dont certainssont inédits (voir enca-dré). La négociation,appuyée par la mobilisa-tion d'autres salariés etdélégués d'autres entitésdu groupe, a permis d'a-méliorer les droitssociaux des salariés quiserviront de repères pourles futures négociationsdans le groupe. Uneavancée quand on saitque les salariés desrégies publicitaires jouis-sent de droits conven-tionnels bien moinsimportants que d'autrescollègues.

PUBLICAT : DES DROITS RENFORCÉS POUR

LES SALARIÉS DE LA PUBLICITÉ

A l'issue d'une procédured'information consultationdu comité d'entreprise etgrâce à la détermination del'intersyndicale Cfdt,Info'Com-Cgt de Publicat,aidée et soutenue par l'inter-syndicale du pôle Magazine(Snj, Cfdt, Info'Com-Cgt, Snj-Cgt) et des déléguésInfo'Com-Cgt du Monde,voici les principales caracté-ristiques de l'accord :1 - Inapplication de l'articleL122-12 transférant _demanière obligatoire_ les sala-riés vers la régie publicitairequi récupérera les deux titresperdus.2 - Transformation du plan delicenciement en un plan dedéparts volontaires (PDV).3 - Les indemnités conven-tionnelles (1/3 mois parannée de présence dans lapublicité) avec :! une indemnité supplémen-taire de six mois. Le tout (IC +IS) avec un plancher de20 000 euros ;! ou un congé de reclasse-ment (cabinet BPI) de six mois(65 % du salaire) et un suivipar le cabinet de reclasse-ment de neuf mois à douzemois selon des critères d'an-cienneté.4 - À la fin du suivi par le cabi-net de reclassement, si le sala-rié ne retrouve pas un emploi,trois mois de salaires supplé-mentaire seront versés.5 - Maintien du salaire pen-dant dix-huit mois (extensiblejusqu'à vingt-quatre mois) encas de reclassement internedans le groupe.6 - Reclassement interneouvert sur tous les postes etCDD de plus de six mois (jour-nalistes, cadres, ouvriers etemployés).7 - Une enveloppe formationcomprenant les dispositifssuivants :! 2500 euros pour les forma-tions d'adaptation en reclas-sement externe ;! 2000 euros mutualisablepour une formation d'adapta-tion en reclassement interne ;! 15000 euros pour les for-mations de reconversion.8 - La Mutuelle payée pen-dant neuf mois (pour lesmoins de 50 ans) et douzemois (pour les plus de 50 ans),en cas de départ volontairede l'entreprise ou de reclasse-ment externe.9 - Une commission paritairesur la mise en œuvre et lesuivi de cet accord.

Dans le but de décliner la coordination régionale des trois syndicats de filières de métier(nouveau comité inter) et face aux incertitudes pesant sur l'avenir des activités du grou-pe, les délégués SIP-CGT et Info'Com-CGT du Monde imprimerie et de la Société éditricedu Monde (SEM), du pôle Magazine du groupe, viennent de mettre en place un collectif.Celui-ci se réunira tous les mois, dans chacune des entités du " pôle nord ", afin de faireun point régulier sur :

MISE EN PLACE DE L'INTER CGT GROUPE LE MONDE

1 - l'actualité sociale et économique dans chaque entité,2 - des axes communs de travail,3 - les solidarités mais aussi des convergences à faire vivre d'un site à l'autre.Coordonner nos activités syndicales, être solidaires et faire converger nos revendicationsnous permettra d'agir ensemble pour l'emploi, pour le maintien et le développement desactivités éditoriales, industrielles, administratives et commerciales du groupe.

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7 - JUIN 2007

Dossier réalisé parAntoine Peillon

La vile entreprise de destructionsociale !

Fillon-Sarkozy

La vile entreprise de destructionsociale !

Dossier réalisé parAntoine Peillon

AA ppeeiinnee uunnee ppââllee mmaajjoorriittéé eennvvooyyééee ddaannss ll’’hhéémmiiccyyccllee dduu ppaallaaiiss BBoouurrbboonn ((331144 ddééppuuttééss UUMMPP ccoonnttrree 335555

ddaannss ll’’AAsssseemmbbllééee nnaattiioonnaallee ssoorrttaannttee)),, llee ggoouuvveerrnneemmeenntt FFiilllloonn-SSaarrkkoozzyy ssee llaannccee àà ttoommbbeeaauu oouuvveerrtt ddaannss «« ssaa »» rreennttrrééee

ppaarrlleemmeennttaaiirree eett pprroommeett ddee ccoommmmeenncceerr,, ddèèss llee 2200 jjuuiinn,, eenn CCoonnsseeiill ddeess mmiinniissttrreess,,

ssoonn eennttrreepprriissee ddee ddeessttrruuccttiioonn ssoocciiaallee.. AAuu pprrooggrraammmmee :: llee «« ppaaqquueett ffiissccaall »»,, aauu ccœœuurr dduuqquueell ffiigguurreenntt

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8 - JUIN 2007

C’EST BIEN TOUT le respect que lesnouveaux maîtres de la

République ont pour la liberté du dia-logue social : les partenaires sociauxont en effet jusqu’à la fin de l’année« pour avancer » sur le dossier ducontrat de travail unique. Après, legouvernement décidera de légiférer« s’il n’y avait pas de progrès », aprévenu François Fillon, dans unentretien paru dans le Parisien /Aujourd’hui en France du vendredi 8juin. Il faut dire que le contrat de tra-vail unique est une sorte d’obsessionde Nicolas Sarkozy. Adoptée parl’UMP (et par l’UDF de Bayrou, sousune forme légèrement différente),cette promesse électorale remonte enfait à l’époque où Sarkozy était minis-tre des Finances.Fin 2004, le seigneur de Bercy rece-vait, sous sa commande, le rapportCahuc-Kramarz (Pierre Cahuc etFrancis Kramarz, «De la précarité à lamobilité : vers une sécurité socialeprofessionnelle», rapport pour leministre des Finances et de l’Industrie,et le ministre du Travail et de laCohésion sociale, la Documentationfrançaise, juin 2005). Le titre du docu-ment n’était évidemment pas choisiau hasard : il reprenait une termino-logie apparue dans les congrès duPCF, au début des années 90, reprisensuite par la Cgt et introduite dansles programmes du PS.

Liberté totalede licencier

Or, la ligne directrice du rapportCahuc-Kramatz consiste à amalga-mer CDI et CDD en un « contratunique », dérogeant aux conventionscollectives, attachant individuelle-ment les droits d’un salarié à sa seulepersonne. Elle est reprise en 2004 parMichel Camdessus, ancien directeurdu FMI, ancien gouverneur de laBanque de France, qui proposait luiaussi « la création d’un contratunique» qui permettrait « à l’entre-prise de gérer son personnel en fonc-

tion de ses besoins réels »… Apropos de ces travaux soi-disantd’expertise, l’économiste huma-niste Denis Clerc écrivait, en jan-vier 2005 (Alternatives écono-miques n° 232, page 67) :«Toutes ces propositions annon-cent-elles une sécurité socialeprofessionnelle ? Autant direalors que le divorce payant etautomatique conduit à l’amourassuré.»

En cohérence avec l’esprit ultrali-béral du rapport Cahuc-Kramarz, le «contrat unique»que l’UMP entend nous imposerest, en réalité, plus flexible que leCDD, puisqu’il peut être rompu àtout moment sans préavis et,surtout, sans obligation de moti-ver la rupture. De plus, contrairement à ce der-nier, il n’offre aucune prime deprécarité en cas de rupture. Enfin, les entreprises se voient,dans ce projet, exonérées deleurs obligations de reclasse-ment, lesquelles sont transféréesà l’ANPE, moyennant une contri-

Imposerle «contrat unique» sous la menace

MARYSE DUMAS, SECRÉTAIRE CONFÉDÉRALE DE LA CGT :

«Le contrat unique, c’est introduire laprécarité du CDD dans le CDI»«C’est l’exemple type de la faussebonne idée. A priori, le principe d’uncontrat de travail unique pour tous lessalariés nous paraît très séduisant. LaCgt s’était d’ailleurs opposée à la créa-tion du CDD. Mais, tel qu’il est présenté,le nouveau contrat de travail introduitla précarité du CDD dans le CDI, alorsque c’est exactement l’inverse qu’il fautfaire : donner à tous les garanties d’unCDI et une vraie «sécurité sociale pro-fessionnelle». Or ce nouveau contrat detravail unique rend caduque toute lalégislation sur les licenciements : pas decontestation possible du motif du licen-ciement, pas de consultation des repré-sentants du personnel, pas de plansocial ni d’obligation de reclassementpour les employeurs. Les licenciements seraient facilités et lesentreprises dédouanées de leursresponsabilités vis-à-vis des salariés etdes bassins d’emploi. Par ailleurs, le rap-port entre le salarié et l’employeurdevient strictement individuel. Toutesles études le prouvent : la flexibilitégénère d’énormes problèmes de souf-france au travail.»

Premières manifestations de la Commune de Paris (1871)

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9 - JUIN 2007

bution patronale auxAssedic d’un montant de1,6% des salaires versésà un employé licenciédepuis son embauche. Cela ouvre une libertétotale de licencier, en l’a-chetant, sans aucunrecours possible des sala-riés auprès de la justice.Les obligations et respon-sabilités sociales actuellesdes employeurs serontdès lors monnayables, surle modèle américain del’achat-vente de droits àpolluer (Clean Air Act)…Seule protection du salarié,les droits à indemnités, encas de licenciement, aug-menteraient en fonctionde la durée du contrat,selon des modalités quirestent évidemment à fixerconcrètement. Ces droits à indemnitéspourraient même, éven-tuellement, subsister enpassant d’un contrat à un

autre. Cette augmentationdu coût de la rupture du«contrat unique» en fonc-tion de l’ancienneté, associéeà la libéralité totale de licen-cier, ne peut qu’inciter lespatrons au renouvellementpermanent des effectifs,jetant les salariés dans l’incer-titude systématique du lende-main, ou plutôt dans la certi-tude de la précarité inévitablede leur emploi.

Une véritablesécurité socialeprofessionnelle

À cette vision purement mar-chande du travail, la Cgt oppo-se, aujourd’hui plus quejamais, sa conception de lasécurité sociale professionnelle,qui entend garantir à chacu-ne et chacun des droits pro-gressifs, cumulables et trans-férables au fur et à mesuredes mobilités et des évolu-tions de carrière, tout au longde la vie professionnelle. Cesnouveaux droits devront cer-tes être attachés à la person-ne du salarié, mais ils serontgarantis collectivement, à l’é-

chelle des branches d’activi-tés ou des bassins d’emploi,cumulables et transférablesd’une entreprise à une autre.

Plus précisément, quels sont ces droits ?

Le droit à l’emploi. Le contrat à temps plein et àdurée indéterminée où l’em-ploi statutaire doit être larègle d’embauche. Il est pro-longé, même en cas de fer-meture d’entreprise ou desuppression d’emploi, jusqu’àl’obtention d’un nouvelemploi dans une autre entre-prise de la branche ou dubassin d’emploi.

Le droit à une carrière.Tout salarié devra avoir aumoins doublé, à l’âge de laretraite, son salaire d’entréedans la vie professionnelle. Ildevra être aussi assuré de laprogression d’au moins unniveau de qualification en fai-sant jouer la formation conti-nue ou la validation desacquis de l’expérience (VAE).

Le droit à la formation continue. Au moins 10 % du temps detravail : soit 160 heures paran, ou 4 ans sur une carrière,pour une formation, au choixdu salarié, rémunérée etconsidérée comme du tempsde travail. Elle sera d’autantplus efficace qu’elle sera miseen œuvre tout au long de lavie et pas seulement aumoment de la perte d’unemploi, laquelle provoqueune fragilisation du salarié.

L’anti-licenciement

La sécurité sociale profession-nelle prônée par la Cgt suppo-se une responsabilité socialemutualisée des entreprisesd’une branche ou d’un bassind’emploi pour former en per-manence et reclasser effective-ment les salariés en cas d’acci-dent économique dans l’uned’entre elles. Elle ne vise pas une meilleure«employabilité» du salarié,mais une plus grande libertéde celui-ci, puisqu’il pourras’appuyer sur la sécurité et lavisibilité de sa carrière profes-

sionnelle. Contrairement au«contrat unique» qui le libéra-lise totalement, la sécuritésociale professionnelle estnotre réponse pour combattrela notion même de licencie-ment. Elle dépasse la visionexclusivement réparatrice del’indemnisation du chômage.En effet, elle garantit aux sala-riés dont l’emploi est, pourdiverses raisons, supprimé,l’intégralité de leurs droits et,premièrement, la poursuite deleur contrat de travail.Notre démarche rejette ainsi letransfert sur les salariés desrisques inhérents aux straté-gies financières des entrepriseset aux aléas du marché. Elle exige des politiquespubliques, en matière d’em-ploi et de droits sociaux, gui-dées par l’intérêt général audétriment des seuls intérêtsdes actionnaires, c’est-à-direl’exact contraire de la destruc-tion sociale entamée, en cedébut d’été 2007, par le gou-vernement Fillon-Sarkozy. Ellesuppose, de notre part, « lecourage» de lutter pied àpied contre l’acceptation desleurres lancés par les affidésdu Medef, «de ne pas subir laloi du mensonge triomphantqui passe et de ne pas faireécho, de notre âme, de notrebouche et de nos mains auxapplaudissements imbéciles»(Jean Jaurès).

Jean-Jaurès en 1913, un an avant son assassinat

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AINSI en a décidé lePrince, sans aucune

consultation réelle des par-tenaires sociaux : lesentreprises bénéficierontd’une réduction de cotisa-tions de 0,5 à 2euros parheure travaillée, variableselon leurs effectifs. Lessalaires versés au titre desheures supplémentairesseront donc intégralementdéduits du revenu imposa-ble du salarié, mais il n’yaura pas de crédit d’impôtpour ceux qui ont des reve-nus trop faibles pour êtreimposables.Sous réserve de validationpar le Conseil d’Etat, leprojet prévoit une exonéra-tion totale des chargessociales et de CSG (soit21,5 points au total) pourles salariés, et ce quel quesoit le niveau de salaire.

Cette mesure s’applique-rait, selon François Fillon, àl’ensemble des salariés,dont ceux travaillant àtemps partiel ou bénéfi-ciant d’une convention deforfait (les cadres notam-ment).Cependant, les heures com-plémentaires effectuées parles salariés à temps partielne seront exonérées quedans la limite de 10 % de ladurée de travail fixée dansle contrat de travail. Quantaux cadres au forfait, dontle nombre de jours de tra-vail dans l’année dépasserale plafond légal de218 jours (la moyenne desforfaits est actuellement de211 jours), seuls ceux quin’ont pas choisi leurs joursde repos compensateursseront concernés par cettemesure.

La réforme des heures supplémentairessera applicable dès le 1er octobre 2007. A lami-juin, sans même attendre l’électiond’une nouvelle Assemblée nationale, leprojet de loi sur l’exonération et la défisca-lisation des heures supplémentaires étaitbouclé par l’équipe Fillon. Il prévoit la suppression totale des chargessalariales sur les heures supplémentaires.Ce projet entraînera, à coup sûr, une nou-velle explosion du chômage, l’aggravationdes inégalités entre les salariés et la ruinedes protections sociales collectives, jusqu’àl’insupportable !

Maryse Dumas, le 7 juin :

«Les conditions de travail et l'emploi seront les perdants de l'augmentation des heures supplémentaires !»

La Cgt encourage les salariés à se mobiliser dans les entreprises,les localités, les branches et au plan national pour obtenir l'aug-mentation des salaires, de l'emploi et l'abandon de ce projet. Leprojet de loi que le gouvernement vient de faire connaîtreconcernant les heures supplémentaires s'annonce comme unvéritable marché de dupes.Il est annoncé comme devant permettre à ceux qui « veulentgagner plus de travailler plus ». En fait : aucun volontariat n'estprévu. Au contraire, les employeurs sont encouragés à imposerun allongement obligatoire du temps de travail aux salariés.Les salariés ne gagneront pas vraiment plus : l'apparence de gainimmédiat de pouvoir d'achat (exonérations de cotisations socia-les et fiscales) sera compensée par de nouvelles dépenses impo-sées aux salariés : déremboursements des frais de santé, franchi-ses, augmentation de la TVA, etc. La contrepartie en sera sou-vent le blocage du salaire de base, masqué par des déclarationsd'heures supplémentaires réelles ou fictives. Il faudra travaillerplus pour gagner pareil.La mesure est injuste, elle va creuser les inégalités au détrimentdes plus bas salaires, des temps partiels (parmi lesquels un grandnombre de femmes et de salariés pauvres), des salariés en pré-carité, des salariés les plus vulnérables vis-à-vis de leuremployeur.Elle sera désastreuse pour l'emploi. Elle vise à faire travailler plusceux qui ont un emploi au détriment des conditions de travail etde l'embauche de ceux qui en cherchent un.Elle sera chère pour le contribuable : 5 à 6 milliards d'euros lapremière année, c'est ce que le gouvernement est prêt à impo-ser aux contribuables pour allonger le temps de travail et proté-ger les employeurs des exigences d'augmentation de salaires quimontent dans les entreprises. Ils se rajoutent aux 25 milliardsannuels d'exonérations de cotisations patronales qui sont unevéritable trappe à bas salaires.La Cgt encourage les salariés à se mobiliser dans les entreprises,les localités, les branches et au plan national pour obtenir l'aug-mentation des salaires, de l'emploi et l'abandon de ce projet.

Travailler plus,

pour gagner plus?Un très dangereux marché de dupes!

Travailler plus,

pour gagner plus?Un très danger euxmarché de dupes!

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Un coût de 5 à 6 milliards d’euros pour la collectivitéLe gouvernement a par ailleurs annon-cé que le taux de majoration des heu-res supplémentaires dans les entrepri-ses de moins de 20 salariés, qui étaitfixé à 10% jusqu’au 31 décembre2008, serait porté à 25% au 1er octo-bre prochain. Le Premier ministre acependant précisé que « lesemployeurs bénéficieraient égalementd’un allégement de cotisations socia-les visant à compenser le surcoût desheures supplémentaires et à inciterl’entreprise à accroître son offre detravail ». Les entreprises bénéficierontainsi d’une exonération de chargessociales modulée selon leurs effectifs.Pour les entreprises de plus de 20 sala-riés, la réduction de cotisations s’élè-vera de 0,5 à 1 euro par heure supplé-mentaire effectuée par leurs salariés,quels que soient les salaires. Les entre-prises de moins de 20 salariés bénéfi-cieront d’une réduction de cotisationsproche de 2 euros par heure supplé-mentaire. Pour Fillon, « ce forfaitannule complètement le surcoût del’heure supplémentaire ». Le coût totaldu dispositif serait de 5 à 6milliardsd’euros par an, dont 2,5 à 3 milliardspour les seuls allégements de cotisa-tions sociales.

Premier coup de semonce à ObernaiBien entendu, le Medef a aussitôtdéclaré que le texte «apparaît stimu-lant pour chacun : le salarié, l’investis-seur, l’entrepreneur ». Cependant,l’organisation patronale a soulignél’incertitude sur « les effets espéréspour les très petites entreprises (TPE)et PME de moins de 20 salariés ». Leprojet gouvernemental ne lui paraîtpas encore assez «généreux»… pourle patronat. Du côté des syndicats desalariés, les confédérations syndicalesCgt, Cfdt et Cfe-Cgc se sont pronon-cées, dans une déclaration commune,«contre le projet de loi prévoyant ladéfiscalisation des heures supplémen-taires et des allégements de cotisa-tions sociales», estimant que lesdispositions du texte «vont accroîtreles inégalités et ne garantissent pas deretombées positives pour l’emploi».Le premier coup de semonce syndicalcontre les heures supplémentaires àgogo a été tiré en Alsace, à Obernai,dès la première semaine de juin. Lessalariés de l'usine Kronenbourg sesont mis en grève contre les heuressupplémentaires de la nuit du samedi,devenues obligatoires depuis le prin-

temps dernier. Ces heures se rajou-taient à celles déjà effectuées pendantla journée, dans le cadre d'un accordde modulation du temps de travail.Après une semaine de grève, l'accordnégocié le vendredi 8 juin remettait encause les heures supplémentairesimposées au profit de nouvellesembauches…

Une mesure profondément inégalitairePour la Cgt, l’analyse de la mesuresociale phare de Sarkozy est faite :c’est une arnaque pure et simple dessalariés. En effet, l’employeur décideseul de qui fait ou ne fait pas des heu-res supplémentaires, car les salariés nepeuvent ni les exiger ni les refuser. Lesoi-disant gain de pouvoir d’achatgénéré est illusoire et de courte durée,car il sera rapidement compensé par leblocage des salaires, par les augmen-tations de dépenses de santé (dérem-boursements, franchises) et d’impôts(Tva dite « sociale », par exemple)qui devront compenser l’affaiblisse-ment des ressources de la protectionsociale et de l’Etat qui découle du pro-jet d’exonération et de défiscalisation.Par ailleurs, comme prévisible, cettemesure sera profondément inégalitai-re, les allègements de cotisations et decontributions fiscales étant d’autantplus faibles que les salaires sont plusbas. Les temps partiels ne pourronttoujours pas accéder au temps plein,(seulement 10 % du temps prévu aucontrat de travail pourra faire l’objetd’heures supplémentaires). Or, ceux-ci

“LA COUR

DES COMPTES CONTRE

LES EXONÉRATIONS

DANS UN RAPPORT

DE 2006, LA COUR DES COMPTES

A SÉVÈREMENT CRITIQUÉ

LE DISPOSITIF D'EXONÉRATION

DE COTISATIONS SOCIALES

PATRONALES

MIS EN PLACE

DEPUIS 1993. LA COUR AVAIT JUGÉ

CE DISPOSITIF

«COÛTEUX, INCONTRÔLÉ

ET MANQUANT

D'ÉVALUATION

QUANT À SES EFFETS

SUR L'EMPLOI». ELLE AVAIT DEMANDÉ

À CE QUE L'ON S'INTERROGE

SUR SA PÉRENNITÉ.

Le cri du peuple (manchette Tardi)

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12 - JUIN 2007

sont aujourd’hui légion. Unrécent rapport du Conseil del’emploi, des revenus et de lacohésion sociale (CERC), inti-tulé «La sécurité de l’emploiface aux défis des transfor-mations économiques»(décembre 2005), démontreque l’essentiel des emploiscréés ces dernières annéesoscille entre 15 et 18 heurespar semaine. Quant auxquelque 200000 « jobs»créés par Borloo dans les ser-vices à la personne, leurtemps de travail est de l’ord-

re de quinze heures hebdo-madaires en moyenne…Les salariés précaires et encontrats temporaires ne sontpas non plus concernés par leprojet. Et de nombreux sala-riés travaillant dans des bran-ches et entreprises où desaccords prévoient des majo-rations pour heures supplé-mentaires inférieures à 25 %,voire un déclenchement decelles-ci au-delà du tempslégal (hôtels-cafés-restau-rants, transports…), resterontà l’écart de l’essentiel de la

mesure. Or, ce sont très sou-vent les salariés qui ont lestemps de travail les plus longset les salaires les plus bas !

La ruine de l’emploiPlus gravement, peut-être, lalibéralisation des heures sup-plémentaires se fera automa-tiquement au détriment del’embauche. Pour une entre-prise de 50 salariés, parexemple, faire faire trois heu-res supplémentaires parsemaine à chaque salariérevient à supprimer au moinsquatre possibilités d’embau-che à temps plein. Lesdemandeurs d’emploi reste-ront plus que jamais au chô-mage, les employeurs préfé-rant la facilité des heures sup-plémentaires à l’embauche.Enfin, les conditions de tra-vail, déjà très dégradées dansde nombreux secteurs, se res-sentiront de nouvelles pres-sions contre l’équilibre entrevie au travail et vie hors dutravail.Nous l’avons déjà écrit, lesConfédérations Cgt, Cfdt etCfe-Cgc se sont immédiate-ment prononcées contre ceprojet. Elles ont aussi expriméleur position commune parun vote négatif, égalementexprimé par la ConfédérationFO, dans tous les organismesde protection sociale officiel-lement consultés sur ce sujet.Ainsi, les administrateurs Cgt,Fo, Cfdt et Cgc de l’Agencecentrale des organismes desécurité sociale (Acoss), la«banque» de la Sécuritésociale, ont émis un avis défa-vorable au projet de détaxa-tion des heures supplémen-

taires. Plus généralement,deux caisses de Sécuritésociale sur trois, la Caissenationale d'assurance vieilles-se (Cnav) et la Caisse nationa-le d'allocations familiales(Cnaf) ont émis un avis défa-vorable sur le projet de loi.

Fraude généralisée etprotection socialeen périlCar ce projet est un véritablemarché de dupes. Il ne peutqu’encourager un peu plus lafraude aux heures supplé-mentaires qui est déjà l’unedes premières causes derecours devant les prud’hom-mes. Ainsi, il existe un risquede dérive des dispositifs liés àla transformation d’élémentsde rémunération, telles lesprimes, en heures supplé-mentaires, risque face auquelles possibilités de contrôleseront très insuffisantes.Il sera enfin très coûteuxpour le contribuable. Selon lechiffrage de l’Acoss, cettemesure coûtera au minimum5 milliards d’euros pour lesseules exonérations de coti-sations sociales, estimationqui constitue un minimumpuisqu’elle est calculée sur labase du montant actueld’heures supplémentaires(900 millions d’heures paran). On imagine combiencette somme serait plus utilesi elle était investie dans ledéveloppement de l’emploistable, de la formation, de larecherche ou de la politiqueindustrielle, plutôt que dansde nouveaux cadeaux finan-ciers au patronat.“

NOS PROPOSITIONS

ET REVENDICATIONS

La meilleure manière de revaloriser la«valeur travail» est d’augmenter larémunération du travail ! Le salairedoit être la juste rémunération de laforce de travail, garantissant lesmoyens nécessaires à l’existence dechaque salarié, en dehors de tout autreélément de rémunération.Le salaire doit être égal entre hommeset femmes. Il doit être au minimum de1 500 euros brut par mois. Ce salaireest le point de départ pour toutes lesgrilles de salaires. Le principe de cesalaire minimum doit être étendu àtoute l’Union européenne.La qualification de la salariée ou dusalarié doit être reconnue et rémuné-rée comme telle. Cette qualification estacquise par le diplôme, la validationdes acquis de l’expérience et la forma-tion continue.Cela signifie que la Filpac Cgt se batpour organiser autour d’elle une opi-nion majoritaire, fondée sur la consoli-dation de la notion de salaire, sur leprincipe de solidarité opposé auxmanœuvres de division, sur l’idée fon-damentale que l’action collective estsupérieure aux aventures individuellesen matière de rémunération.

Les barricades de la place Blanche tenues par les femmes (1871)

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13 - JUIN 2007

Enfin, l’exonération des heu-res supplémentaires met enpéril le financement de laprotection sociale. Certes, l’exposé des motifsdu projet de loi précise queles exonérations sur les char-ges sociales seront compen-sées par l’Etat, mais il ne ditrien sur la manière dont cettecompensation sera réalisée. Il n’indique pas comment lesallègements de cotisationssalariales seront financés.Quant aux allégements decotisations employeurs, ilssont, de toute évidence,supérieurs au panier de recet-tes fiscales actuellementaffecté au financement desallégements généraux. Ilscreuseront donc encore ledéficit de la Sécurité sociale ! Enfin, le texte est muet sur lamanière dont la perte derecettes pour les régimes deretraites complémentaires etl’assurance chômage seracompensée, si tant est qu’ellesoit compensée…

TVA «sociale»,précipice du pouvoir d’achatCe péril considérable pourtout le système de solidariténationale serait contourné,selon le gouvernement Fillon,par le miracle de la TVA soi-disant « sociale ». Curieuseconviction, alors même que lenouveau président de laRépublique est informé,depuis 2004 au moins, quecette solution entraînera obli-gatoirement une forte infla-tion. A l’époque où Sarkozyétait ministre de l’Economie etdes Finances, n’avait-il pasreçu une expertise comman-dée par la commission desFinances du Sénat qui affir-mait qu’avec une hausse deTVA de quatre points, mêmeassociée à une diminutionéquivalente des charges, pro-voquerait une nette accéléra-tion des prix pendant aumoins deux ans ?

Selon les experts des Finances,le taux d’inflation pourrait alors« plus que doubler ». Ce qui«pèserait sur le pouvoir d’achatet freinerait la croissance éco-nomique». Cerise sur legâteau, le Chambre de com-merce de Paris a, elle aussi,fait connaître son avis encoreplus négatif que celui de laCommission des Finances duSénat, puisqu’elle prévoit, encas de hausse de la TVA, unebaisse de pouvoir d’achatdeux fois plus importante quecelle prévue par la premièreinstitution.Cette mesure annoncée entreles deux tours des électionslégislatives a déjà été jugée parles Français. Il s’agit trop mani-festement d’une nouvellearnaque consistant à baisserles cotisations patronales enfaisant payer cette baisse parl’augmentation massive de laTVA, laquelle est payée essen-tiellement par les salariés,retraités et demandeurs d’em-ploi qui représentent 91% dela population active de notre

pays. En effet, la TVA est l’im-pôt le plus injuste, puisqu’ilfrappe du même taux d’impo-sition le pauvre comme leriche. Pour le Conseil économique etsocial, le taux d’effort fiscaldes 10% des ménages lesplus pauvres est de 8,1%,tandis que celui des 10% desménages les plus aisés est de3,4%... Car, bien entendu,plus un ménage est riche, plusla part de son revenu destinéeà la consommation diminue etplus la part destinée à l’épar-gne augmente. Tout le monde sait ça !Si le gouvernement Fillon per-siste dans cette voie, malgrél’avertissement déjà lancédans les urnes, la «fracturesociale», chère à l’illusionnisteChirac, se transformeraimmanquablement en«explosion sociale» dont lapuissante mobilisation contrele Cpe (septembre 2006)n’aura été, dès lors, qu’unsigne avant-coureur.

UN COÛT EXORBITANT

POUR LES FINANCES PUBLIQUES

Le Conseil d’analyses économiques,attaché au Premier ministre, présente,à propos des heures supplémentairesprévues par le nouveau président(Les Echos, 29 mai 2007), les réservessuivantes :«Une fiscalité spécifique sur les heu-res supplémentaires, quelle que soitsa forme, aurait au mieux un effetincertain sur l’emploi et le revenuglobal, avec un risque de coût exor-bitant pour les finances publiquesqui se double d’une complexitéaccrue du système fiscal… Ce typede fiscalité doit être évité. Il ne cons-titue pas un moyen efficace de valo-riser le travail.»«Un allégement des prélèvementsobligatoires sur les heures supplé-mentaires accroît le pouvoir d’achat

de ceux qui travaillent au-delà de ladurée légale. Néanmoins, en contre-partie, le financement de l’allége-ment réduit les revenus des salariésqui ne font pas d’heures supplé-mentaires.»«Cette mesure a un effet négatif surl’emploi, puisqu’elle incite les entre-prises à substituer des heures de tra-vail aux hommes…»« Un employeur et son salarié peu-vent conjointement gagner à abais-ser (ou ne pas augmenter) le taux desalaire des heures normales et àdéclarer fictivement un grand nom-bre d’heures supplémentaires (cequi est très difficilement contrôla-ble), afin de bénéficier des avan-tages fiscaux.»

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15 - JUIN 2007

L A FRANCE est unemarque, qui se vend

mal… Jouyet-Lévy n’hési-tent pas, en tant que réser-voirs de pensée libérale(Think Tank), à considérerla productivité de tout unpays. Selon quelle métho-de ? Mystère.

La marque France et ses TICMais ils affirment, dans lechapitre « Saisir l’impor-tance de l’image de lamarque France pour notrecroissance économique »:«La France apparaît ainsiprisonnière de réflexesétatistes et d’un senti-ment permanent de parti-cularisme, qui conduisentà douter du climat socialet des affaires français età craindre la multiplica-tion de réglementationscontraignantes. »En lieu et place de cetétat… d’esprit, nos rap-

porteurs nous ramènentaux réalités du marché :«L’organisation du travailfait l’objet d’une nouvelledivision internationale : laproduction se déplacedans les pays à bas coût demain d’œuvre, et les paysdéveloppés se spécialisentdans les technologies depointe, la construction del’offre commerciale, lacréation du concept de lamaîtrise du design.» Leprincipe de base de cesmessieurs, c’est la mondia-lisation prise au sens dedélocalisations massives.Ils se proposent d’en tirerles conséquences et deprojeter de façon globalele pays dans cette mondia-lisation. Comment ?Ils considèrent qu’avant,pendant le boom d’après-guerre (les trente années, de1945 à 1975, surnommées« glorieuses »), l’économieétait tirée par les richesses

en matières premières,industries et volume deproduction des biensmatériels. Après ce boom,la richesse n’est plus maté-rielle, mais immatérielle.Ce seraient l’innovation,les brevets industriels, lesconnaissances et lessavoirs au service de lavente industrielle et finan-cière qui prendraient lerelais.Tout le raisonnement denos compères est fondésur cette supercherie : enfait, ce n’est pas la riches-se qui change de forme,c’est la mise en concurren-ce mondiale des salariésqui permet d’en produireavec plus de profits. Deplus, comme les marchésdes pays développés sontsaturés, les industriels etles financiers sontcontraints de développerdes trésors d’imaginationpour vendre : publicité,

marketing. D’où la placede la communication prisecomme puissant stimulantà l’achat.La vaste transhumancedes usines de fabricationet d’assemblage vers lespays au coût du travailinférieur est déterminéepar la soif de profiter deleur faible protectionsociale, des faibles salai-res, de la faiblesse des loissociales. Qu’importe ànotre duo, ils insistent :après le développementdu secteur tertiaire et desservices, il faut amplifier etsystématiser l’orientationsuivante : «Le développe-ment des technologies del’information et de la com-munication (TIC) ouvre auxentreprises des possibilitésconsidérables de réorgani-sation de leur productionet de recentrage sur lesactivités à plus forte valeurajoutée.»

Le nouvelévangile libéral

Le rapport Montaigne n’était qu’un brouillon. Voici la sainte œuvrelibérale, le rapport du patron de Publicis, Maurice Lévy, et de Jean-Pierre Jouyet, chef du service de l’inspection générale des Finances.Le titre ? « L’économie de l’immatériel, la croissance de demain. »Commandé par le gouvernement Villepin, il lui a été remis endécembre 2006. Fillon-Sarkozy en héritent.Le rapport avec les salariés de la Communication ? Pendant queHersant Média Groupe, Ouest-France et EBRA créent leurs basesuniques de gestion de l’informatique de production et de gestion,Jouyet-Lévy font des technologies de l’information et de la commu-nication (les TIC) le vecteur fondamental de la croissance écono-mique du pays à l’heure de la mondialisation. Manière de dire que larévolution technologique en cours doit être domestiquée au profitde la réorganisation de l’appareil industriel. Ça vaut le détour.

JeanGersin

Numérique immatérielNumérique immatériel

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L’aubaine pour la marque France,et ses marchés, ce sont ces TIC.L’utilisation des réseaux de com-munication ? Ces messieurs pro-posent de systématiser la conver-gence entre contenants (lesustensiles numériques connectésentre eux) et contenus, c’est-à-dire, pêle-mêle, l’information etles données propres à la transmis-sion nécessaire à l’industrie et à lafinance, aux savoirs qui y sontattachés, aux brevets, aux idéescommerciales, à la publicité. Lenumérique doit d’abord servir àsupporter et stimuler les ventes, àcréer des entreprises petites etmoyennes. L’information doit semettre au service de ce but.

L’Etat à marée basseManque de bol, pour nos amis,l’Etat est toujours là. Pour eux, ilencombre et encadre tout :" un parc numérique et informa-tique important et non productif," une recherche encadrée pardes règlements nationaux," un enseignement supérieurmarqué par l’Education nationale," une organisation du travailrelevant d’un Code archaïque," des revenus de la propriété intel-lectuelle relevant du XIXe siècle.Que faire ? Jouyet et Lévy avancent la perspec-tive de libéraliser ce qui freineencore la convergence numériquedes contenants et des contenus. Les fréquences hertziennes doi-vent tomber dans le domaine dumarché, le patrimoine immatérielde l’Etat (à l’instar de ce qui sepasse au Journal officiel) doit êtreutilisé pour intervenir sur le mar-

ché, la télévision est sommée des’ouvrir à l’initiative industrielleprivée. La contre-réforme s’étendaux grandes écoles, qui devrontformer des diplômés performantsen matière de création de brevets.Le Code de la propriété intellec-tuelle, sur lequel se fonde le droitd’auteur, sera revu à l’échelleeuropéenne, de façon à rendrelibres de tous droits moraux lesacheteurs des brevets et des inno-vations.On comprend mieux, en regar-dant dans le rétroviseur, le rapportMontaigne, qui n’était qu’unepointe avancée du raisonnement.Comme «Montaigne», le rapportJouyet-Lévy appelle de ses vœuxl’exclusion de l’information et deses professions du domaine destechnologies de l’information etde la communication. Cette infor-mation, prise au sens du devoir etdu droit d’informer librement lescitoyens, relève de l’histoire, cellede la déclaration des droits del’homme. Fini, tout cela. L’heureest la marchandise « information»sur des réseaux numérisés exclusi-vement dédiés à la circulation desdonnées des industriels.

L’information au péril de Jouyet-LévyVoilà qui éclaire le nouveau rap-port des industriels et des finan-ciers avec l’information. Cela faitdes dizaines d’années que desgrands patrons se paient des jour-naux, des radios, des télés. Mais ilne s’agit plus de simples rapportsde l’information à ses riches pro-priétaires. Si des Bolloré,Lagardère, Bouygues, Pinault,Arnault s’attelent à la tâche

Bernard Arnault craque pour les EchosBernard Arnault, à cette heure matinale, semblerait en passede se payer les Echos, du groupe Pearson, lequel préfèreacheter le groupe Dow Jones (Wall Street Journal…) etvendre le journal du libéralisme français à qui le veut.Arnault, c’est le luxe : Louis Vuitton (cherche pas, c’esttrop cher pour toi.), Moët Hennessy (LVMH), Dior (J’adoreaussi, mais pour en avoir, faut un trésor). Et plein de trucsdans les choses des chiffons pour dames très, très friquées(pardon, la haute couture). Et la Tribune. Arnault Bernard,c’est la première fortune de France. 17,2 milliards d’eurosau dernier classement. Alors, à ces hauteurs-là, la questiondu pluralisme de la presse, le problème de licenciements àprévoir, après tout, qu’est-ce ? La non-parution des Echosdatée du 20 juin indique que les salariés auraient le front des’émouvoir. Pourquoi, au fond, ils ne risquent que leuremploi…

Le personnel des Echos ne craque pas pour Bernard ArnaultRéunis en Assemblée générale ce matin (19 juin), les salariésde l’Unité économique et sociale des Echos (Les Echos SA,Echofi, Eurostaf, Les Echos Formation, Hera et PercierPublication) ont voté à l’unanimité (et trois abstentions)contre la vente des Echos à Bernard Arnault, PDG du groupeLVMH et propriétaire du journal la Tribune. Selon des informations précises et concordantes, BernardArnault est entré en négociation exclusive avec le groupePearson sur une offre dite «préemptive». L’opposition dessalariés est motivée par l’extrême inquiétude que suscitentle non-respect manifeste de l’indépendance éditoriale desjournalistes par l’acquéreur potentiel ainsi que les conflitsd’intérêts qui pourraient en résulter. L’assemblée généralea mandaté les élus et les représentants syndicaux pourdemander la tenue d’un comité d’entreprise extraordinairemardi 19 juin dans la matinée en présence de David Bell, leprésident des Echos et représentant de Pearson au conseild’administration. En attendant la tenue d’une nouvelleassemblée générale à l’issue de la réunion du comitéd’entreprise, l’Assemblée générale a décidé d’un avis degrève mardi qui empêcherait la parution du titre mercredi20juin. La direction de Pearson a fait savoir lundi enmilieu d’après-midi que David Bell sera présent pour laréunion du CE convoquée à 10 h 30 mardi au siège desEchos et qu’il rencontrera à 12 h 30 les représentants de lasociété des journalistes. L’assemblée générale est doncrepoussée après cette échéance.

Sécu : vaut mieux être riche,bien portant, et habiter Neuilly…19 juin : pendant la révélation au peuple angoissé du nou-veau casting du gouvernement, Friedrich van Roekeghem,directeur de l’Union nationale des caisses d’assurance mal-adie, s’occupait des assurés sociaux. Il ose appeler cela «unplan de redressement». Redresser la Sécu, ou mettre àgenoux les assurés sociaux ? Voilà ce qu’avance l’amiFriedrich :Le parcours de soins, qui commence au généraliste choisi,est désormais doté d’une punition : 50% remboursés si lepatient ne le respecte pas. A Neuilly, chez Sarko, ils s’en fou-tent. Mais à Saint-Denis ?Le forfait de 1 euro à la charge de l’assuré passerait à 4euros.Les médecins sont contraints à des… «gains de producti-vité» ! C’est ça, la pensée libérale : tout mesurer avec lamême règle.Le médicament générique devient presque obligatoire, pen-dant que d’autres actes médicaux seront moins remboursés.

Metropolis (film de Fritz Lang)

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17 - JUIN 2007

P OURTANT, des luttes de salariés ont eulieu avant et pendant les élections et

continuent après.Dans le labeur, secteur industriel en cons-tante restructuration, où les concentra-tions, les transferts, les suppressions d’ac-tivité et d’emplois sont incessants, où lesentreprises sont soumises à des critères derentabilité insoutenables, où se multiplientles constitutions de groupements écono-miques sans statuts juridiques précis, ren-dant difficile la référence au champconventionnel, il est nécessaire d’apporterdes réponses aux questions que se posentles salariés.Des travaux de cette assemblée il ressort :" Il est nécessaire et urgent d’engager unprocessus d’information et de débat sur lessalaires, les droits des salariés, leurs sta-tuts, les droits syndicaux, etc.

Le secteur fédéral du labeur propose auxdélégués présents de tenir des réunions

décentraliséesen organisantp l u s i e u r sassemblées demilitants et desalariés." Pour s’op-poser auxattaques, auxmauvais coupsqu’organise lepatronat sousla pression desactionnaires, ilfaut recons-

médiatique, c’est pour faire sur-gir au moins un groupe à taillemultinationale capable de gérerles réseaux numériques d’infor-mation et de communication auservice des objectifs définis parJouyet-Lévy.Lagardère entend d’abord êtremaître des réseaux numériques.Ceux de la distribution, de l’in-formation, des retransmissionstélévisées des événements spor-tifs. Ebra s’appuie de manièreavant-gardiste sur les réseauxnumériques de la banque pro-priétaire, le Crédit Mutuel CIC,pour réorganiser ses réseauxnumériques. Mais ces réseaux seront utiliséspar ceux qui en seront maîtres,les banquiers, pour opérer ceque préconise Jouyet-Lévy.Ouest-France est à cet égardtrès en avance. Dans les réseaux numériquesqu’il crée, il fera passer sessociétés de service, commeAdrexo. Cette société de distribution depublicité à domicile concurrenceLa Poste, mais elle concurrenceGaz de France dans le relevé descompteurs, et s’apprête à trou-ver de nouvelles utilisations ditesde service, autour de l’adresseindividuelle.Ces diversifications éloignent lesgroupes de presse de leur centrede gravité antérieur. Ce n’est déjà plus l’information,encore moins l’informationimprimée, qui devient prioritai-re, mais la course à la présencesur Internet pour s’y positionnercomme prestataires généralistesde services de communication.Considérer le numérique quilaboure les entreprises de com-munication et d’information,sans prendre en compte les rap-ports économiques qui le déter-minent, serait commettre uncontresens. Jouyet et Lévy nousle rappellent avec force. Il s’agit pour la Filpac de répondreen termes professionnels au définumérique, mais aussi de faireprogresser la question, désor-mais centrale, du pluralisme : ils’agit de sauver l’information deson naufrage dans son utilisa-tion domestiquée au service dumarché. Des tâches d’avenir,qu’elle traitera notamment lorsde son congrès.

ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DU LABEUR, LE 12 JUIN 2007

C’est possible !Il suffit de s’en mêler

LabeurLabeur

Le secteur labeur a tenu son assemblée générale entre lesdeux tours des élections législatives alors que les résultats dupremier tour laissaient augurer un pouvoir sans partage pourune droite recomposée sur son extrême. Rien, sinon les salariés, n’empêchera que se réalisent lessouhaits du candidat Sarkozy aujourd’hui Président.

Jean-PierreGhiotto

Lamartine sur le parvis de l’Hôtel-de-ville lors des journées de 1848

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truire une solidarité humaine etprofessionnelle.La filière graphique ne disparaîtpas mais se reconstitue pour ten-ter d’échapper à ses obligationsconventionnelles et, pour ne pasaborder ces sujets, lesemployeurs « revendiquent »plus que leurs employés, multi-plient les réunions et épuisent lesmilitants.Une société comme la Comareg(Annonces) possède 230 sites oùtravaillent entre 1 et 3 salariés,où les salaires sontdifférents d’uneimprimerie ou d’unsite à l’autre. Militerdans un tel contexterelève de l’exploit.L’utilisation par lesgrands groupes dulabeur de plans« sociaux» puis lerecours aux intérimai-res est souvent larègle. Par ailleurs, les direc-teurs de site n’ont aucun pouvoiralors que les négociations sala-riales se font par entreprise etnon pour le groupe. Il faut sebattre pour des propositions syn-dicales et non contre des exigen-ces patronales.

Des propositions crédibles et réalisablesCes propositions syndicales neseront fortes que si elles sont lefruit de la réflexion des salariés etqu’elles paraissent « crédibles etréalisables ». Dans ces condi-tions, tout est possible, mais celasuppose que les militantsconnaissent parfaitement lespropositions fédérales, les reven-dications du secteur des indus-tries graphiques mais aussi les

acquis pour les exposer, lesconfronter aux interrogations deleurs collègues.

Une charte des industries graphiquesL’élaboration d’un document,d’une « Charte des industriesgraphiques » devra servir d’outilpour les militants et alimenter lesdébats auprès des salariés. Cette charte devra être consti-tuée d’objectifs syndicaux com-

muns, commel’ouverture duchamp d’applica-tion de la conven-tion collective à denouvelles activitésgraphiques, l’aug-mentation dessalaires, la majora-tion des heuressupplémentaires à33-50 et 100 %dès la 36e heure, lerenouve l lementdes effectifs par le

départ anticipé des travailleursâgés avec remplacement, desmoyens nouveaux pour la défen-se de l’emploi, le renforcementdu rôle des institutions représen-tatives du personnel, la revalori-sation des indemnités de licencie-ment pour leur donner véritable-ment un caractère dissuasif etl’exigence d’un nouveau statutpour le travail salarié… etc. Cette charte sera ce que les tra-vailleurs en feront et elle devraêtre la base des revendicationscommunes à tout un secteurd’activité. Il est égalementurgent qu’une table ronde surl’avenir et le développement desindustries graphiques se tienneavec l’ensemble des acteurs dece secteur.

RÉUNIONS D’INFORMATIONElles auront lieu pendant la semaine d’action

et d’information du 17 au 23 septembre 2007

" 19 septembre pour la région Nord à Lille" 18 septembre pour la région Ile-de-France à Montreuil" 20 septembre pour les régions Centre et Ouest à Tours" 20 septembre pour la région Sud-Est à Valence" 21 septembre pour la région Est à Strasbourg

L’importantest de créer un objectif revendicatif qui doit être notre bien commun.

Pas de mobilisationsansreconquête de l’opinion des salariés

CEN DES 20 ET 21 JUIN 2007

Les élections ont eu lieu, Sarkozy estprésident et l’UMP détient légitime-ment la majorité des sièges àl’Assemblée nationale. Les citoyensse sont prononcés, certes à la suited’une campagne médiatique qui n’estpas sans reproches, mais qui n’écartepas le fait que les Français ont choisileur président en fonction de sesdéclarations et sur les mesures qu’ilcomptait mettre en œuvre. Lesouvriers français ont à près de 47%voté en connaissance de cause pourSarkozy et il y a lieu de s’interrogersur les raisons qui les ont conduits àfaire ce choix.

Jean-Pierre Ghiotto

Vie fédéraleVie fédérale

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19 - JUIN 2007

L A SÉCURITÉ a été l’élémentcentral de la campagne, pas

seulement la sécurité dans les«banlieues», mais la sécurité dela vie sociale (travail, emploi,santé, pouvoir d’achat…).Problème ressenti par la majori-té des travailleurs quellle quesoit leur catégorie sociale etprofessionnelle. Personne ne sesent plus à l’abri et l’annonced’une rupture avec cet état defait a fortement pesé dans lechoix des Français, d’autant quela gauche n’a pas disposé de lamême maîtrise sur des thèmesqui «parlaient» à une populationinquiète. L’absence d’un projetalternatif à la politique libérale afait défaut et deux ans après lerejet du traité constitutionneleuropéen, ceux-là mêmes qui l’a-vaient désapprouvé, qui étaientcontre, ont placé en tête desélections ceux qui l’avaientdéfendu et qui appelaient àvoter «oui».

L’épreuve des faitsReste aujourd’hui l’épreuve desfaits et l’illusion d’ouverture,l’affichage de la diversité donnépar la composition des mem-bres du gouvernement ne doitpas faire oublier qu’on n’avaitpas eu depuis Pétain un ministè-re « de la race » ou de l’immi-gration.Jamais le besoin de constructiond’un autre projet de sociétéentre et avec les partis poli-tiques ne s’est fait autant res-sentir et, dans ce domaine, lesyndicalisme ne peut êtreabsent.

L’été 2007 sera fécondCette période habituellementde trêve va voir beaucoup dechoses se mettre en chantier etles actions gouvernementalesimmédiates porteront sur lessalaires en lien avec la fiscalité,les retraites des régimes spé-

ciaux, le servi-ce minimumet le contrôledu droit degrève, lecontrat detravail, laréforme desuniversités, lajustice.

Ce gouvernement pourra agirpar la loi avec sa majorité parle-mentaire, par décret ou par loicadre (négociation entre diffé-rentes parties).La direction fédérale se devrad’être «sur le pont», y compriscet été.Dans le domaine des lois cadre,les choses sérieuses commen-cent.La Cgt doit-elle entrer en «résis-tance» ou se mettre en situa-tion d’être une force de propo-sition et de conquête ? Proposer plutôt que bloquer,écouter les salariés, faire un tra-vail d’information avec les syn-dicats pour éviter qu’un écartne se creuse entre les aspira-tions exprimées dans les entre-prises et le contenu des discus-sions aux plus hauts échelons.Il n’y aura pas de mobilisationsans une reconquête de l’opi-nion des salariés.Il faut remettre en selle lavaleur fondamentale qu’est lasolidarité, expliquer ce qu’estun salaire, une heure supplé-mentaire, redonner des repèresaux salariés.Sarkozy a transformé en slo-gans populaires le programmedu Medef et il nous faut avoirune propagande de base enreprenant tout de zéro.

Dans le débatPour certains, résister sera taxéd’immobilisme. Il faut explorerles besoins qui s’expriment etadapter notre propos pour lerendre «recevable».Utiliser des«flashs» plutôt que des longsdiscours.Mettre notre «outil» Cgt enconformité avec le monde d’au-jourd’hui.Pour d’autres, mieux vaut unebonne résistance qu’une mau-vaise offensive. Etre sur ladéfensive peut générer un ren-forcement. L’utilisation desmédias a été « choquante ».La campagne électorale présen-tée comme une vulgaire «staracademy ».Sarkozy tente de prendre uncontrôle total des moyens d’in-formation et si nous avons des

contre-proposi-tions, il faudrasavoir et sedonner lesmoyens de lescommuniquer.Attention à larépression syn-dicale qui s’ins-talle, notrec a m a r a d ePichot en étantl’illustration.

Mobilisations en cours" Sur les salaires qui étaient unthème de mobilisation central,avec une démarche fédéraledépassant les simples négocia-tions de branches." Sur les restructurationsindustrielles, avec la volonté depréserver l’emploi plutôt que denégocier des primes de départ." Sur les transformations del’industrie graphique, avec miseen place d’une charte commepour le secteur papetier et latenue d’une table ronde oud’assises." Sur les restructurations dessecteurs éditoriaux et le posi-tionnement des travailleurs duLivre dans ces secteurs.

Cela malgré l’attaque frontaledes syndicats de journalistes SnjCgt, F3C Cfdt et Snj autonomequi attaquent en justice la socié-té Ebra, au motif d’un vice deforme dans l’accord qu’elle asigné avec la Filpac Cgt. Ce prétexte sur la forme ne peutmasquer l’offensive de fondcontre la Filpac à laquelle se li-vrent ces syndicats qui verraientbien les ouvriers du Livre frappés«d’interdit professionnel» dansles secteurs éditoriaux. Le jugement de cette affaireaura lieu le 11 septembre 2007.

L’implication du Cen est impéra-tive car la mobilisation ne se ferapas seule et il faudra éviter ladivision des travailleurs que culti-ve le patronat par médias inter-posés en opposant les salariésdu public et ceux du privé.

Information : Stéphane Puifourcat,secrétaire général de l’Ud del’Essonne, Marc Peyrade vient com-pléter l’équipe fédérale

PRÉSENTATION DU PROJET

DE RAPPORT D’ACTIVITÉ QUI SERA

SOUMIS AU CONGRÈS DE LILLE

Rapidement quelques grandsthèmes :" Mondialisation et ses consé-quences dans notre secteur fédéral" La fédération a-t-elle rempli samission dans ce contexte ?" Traité constitutionnel européen" Précarité comme modèle derelations au travail. CPE." Secteurs touchés par la mondia-lisation : industrie graphique,presse mondialisée, industrie gra-phique, la publicité." La fédération dans le syndica-lisme mondial" Industries graphiques : répon-ses aux fermetures d’entreprises etautres restructurations." Production fédérale : docu-ments, réflexions, conférences,comités généraux … etc." Piliers revendicatifs :Les conventions collectives, la for-mation professionnelle, la protec-tion sociale, droits et liberté,démocratie sociale, égalité profes-sionnelle, syndicalisation." Travail de la direction fédérale.Joints au rapport fédéral les rapportsd’activité de l’Ufr et de l’Ufict Lc

Le Front populaire

Le Cen réaffirme qu’il ne peut y avoiraucun endroit où la Filpac ne puisse syndiquer à la Cgt, surtout quand il s’agit de déserts syndicaux.

CONSTRUIRE

UNE UNITÉ

SYNDICALE

APPARAÎT

IMPÉRATIF

IL FAUDRA S’APPUYER

DANS

LES NÉGOCIATIONS

SUR

LES MOBILISATIONS

EN COURS

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