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  • 7/25/2019 filiation_mandet_cedh_2016

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    du Greffier de la Cour

    CEDH 018 (2016)14.01.2016

    Lannulation dune reconnaissance de paternit la demande du pre

    biologique de lenfant na pas emport violation de la Convention

    Dans son arrt de chambre1, rendu ce jour dans laffaire Mandet c. France(requte no30955/12), laCour europenne des droits de lhomme dit, la majorit,quil y a eu :

    Non-violation de larticle 8 (droit au respect de la vie prive et familiale de la Conventioneuropenne des droits de lhomme

    Laffaire concerne lannulation dune reconnaissance de paternit accomplie par lpoux de la mre, la demande du pre biologique de lenfant.

    La Cour relve quil ressort des motifs des dcisions des juridictions internes quelles ont dmentplac lintrt suprieur de lenfant au cur de leurs considrations. Ce faisant, elles ont retenu quemme si lenfant estimait que Jacques Mandet tait son pre, lintrt de lenfant tait avant tout deconnatre la vrit sur ses origines. Ces dcisions ne reviennent pas faire indment prvaloirlintrt du pre biologique sur celui de lenfant mais considrer que lintrt de lenfant et dupre biologique se rejoignent en partie.

    Il convient aussi de noter quayant confi lexercice de lautorit parentale la mre, les dcisionsdes juridictions internes nont pas fait obstacle ce que lenfant continue vivre au sein de la familleMandet, comme il le souhaitait.

    Principaux faits

    Les requrants, Florence Mandet ne Guillerm, Jacques Mandet et Alos Mandet sont desressortissants franais, ns respectivement en 1955, 1945 et 1996, rsidant Duba (Emirat deDuba).

    Florence et Jacques Mandet se marirent une premire fois en 1986. Trois enfants naquirent de leurunion. En juin 1996, leur divorce fut prononc. Florence Mandet accoucha dAlos Mandet en aot1996 et lenfant fut dclar sous le nom de sa mre. En septembre 1997, Jacques Mandet reconnutlenfant. Florence et Jacques Mandet se remarirent en octobre 2003, ce qui eut pour effet delgitimer lenfant.

    Le 22 fvrier 2005, M. Glouzmann saisit le tribunal de grande instance de Nanterre pour contester lareconnaissance de paternit par M. Mandet et afin de se voir reconnatre la paternit naturelle. Par

    un jugement du 10 fvrier 2006, le tribunal retint que lenfant tant n plus de trois cents joursaprs la sparation de Florence et Jacques Mandet, la prsomption lgale de paternit de JacquesMandet devait tre carte. Le tribunal releva quil ntait pas contest qu lpoque de laconception de lenfant, M. Glouzmann entretenait des relations intimes avec Mme Mandet et quede nombreux tmoignages tablissaient quils avaient vcus maritalement et que lenfant taitconnu comme tant leur enfant commun. Le tribunal en dduisit que lenfant Alos Mandet navaitpas eu de possession dtat continue denfant lgitime de Florence et Jacques Mandet et que

    1 Conformment aux dispositions des articles 43 et 44 de la Convention, cet arrt de chambre nest pas dfinitif. Dans un dlai de troismois compter de la date de son prononc, toute partie peut demander le renvoi de laffaire devant la Grande Chambre de la Cour. Enpareil cas, un collge de cinq juges dtermine si laffaire mrite plus ample examen. Si tel est le cas, la Grande Chambre se saisira delaffaire et rendra un arrt dfinitif. Si la demande de renvoi est rejete, larrt de chambre deviendra dfinitif la date de ce rejet.

    Ds quun arrt devient dfinitif, il est transmis au Comit des Ministres du Conseil de lEurope qui en surveille lexcution. Desrenseignements supplmentaires sur le processus dexcution sont consultables ladresse suivante :http://www.coe.int/t/dghl/monitoring/execution.

    http://www.coe.int/t/dghl/monitoring/execution/default_FR.asp?http://www.coe.int/t/dghl/monitoring/execution/default_FR.asp?http://www.coe.int/t/dghl/monitoring/execution/default_FR.asp?http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-159795http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-159795http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-159795http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-159795http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-159795
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    nom de la mre, dclar que M. Glouzmann tait son pre et lui ont organis un droit de visite etdhbergement. Elle observe quen annulant ainsi le lien de filiation que lenfant avait avec JacquesMandet, les juridictions internes ont modifi sur le plan juridique un lment important de lastructure familiale dans lequel lenfant voluait depuis plusieurs annes pour le remplacer par unautre lien de filiation paternelle. Elle en dduit que la mesure dnonce par les requrants sanalyse

    comme une ingrence dans le droit au respect de la vie familiale et prive de lenfant.Vu larticle 339 du code civil, la Cour observe que cette ingrence tait prvue par la loi et jugequelle avait pour but la protection des droits et liberts dautrui, savoir ceux de M. Glouzmann.

    Se rfrant sa jurisprudence, la Cour souligne que la France disposait dune marge dapprciationpour juger si lingrence tait ncessaire dans une socit dmocratique au sens de larticle 8 de laConvention. Cependant, chaque fois que la situation dun enfant est en cause, la Cour doit avoirgard au principe essentiel selon lequel lintrt suprieur de lenfant doit primer.

    La Cour note quil nest pas exact que les juridictions internes aient fait du refus de lenfant de sesoumettre lexpertise un lment corroborant leurs conclusions quant au caractre mensonger dela reconnaissance de paternit dont il avait t lobjet. Il ressort en effet de larrt de la cour dappel

    de Versailles que ce quelles ont pris en compte cet gard, est le refus des poux Mandet de seplier cette expertise ainsi que leur refus de conduire lenfant g de moins de dix ans lorsquellea t ordonne auprs de lexpert. Le constat relatif au lien de filiation entre lenfant et M.Glouzmann ne repose pas sur ce refus mais sur la dtermination de la priode lgale de conceptionet sur lapprciation des lments produits contradictoirement par les parties. ce titre, la courdappel a retenu que les poux Mandet ne prouvaient pas quune cohabitation ou des relationsintimes avaient t maintenues entre eux durant la priode de conception et, linverse, quil taittabli que M. Glouzmann entretenait des relations intimes avec Florence Mandet et vivait avec elle,non seulement au moment de la conception mais aussi aprs la naissance et que lenfant tait connucomme tant le leur.

    La Cour relve ensuite que les juridictions internes ont fait ce que lon pouvait attendre delles pourimpliquer lenfant dans le processus dcisionnel. Elle constate que le tribunal de grande instance deNanterre a dsign une administratrice ad hoc pour reprsenter les intrts de lenfant dans laprocdure mais quelle na pu le rencontrer parce que les poux Mandet et lenfant avaient quitt laFrance. Par ailleurs, la Cour de cassation a examin la question du droit de lenfant dtre entendudans la procdure et a jug que ce droit avait t respect. Elle a relev que lenfant avait tinform de la procdure et savait que sa filiation tait conteste et quil avait envoy des lettres aux

    juges dans lesquelles il exprimait son dsir de ne pas changer de nom et de conserver sa filiationpaternelle lgard de Jacques Mandet sans solliciter toutefois son audition.

    La Cour relve de plus quil ressort des motifs des dcisions des juridictions internes quelles ontdment plac lintrt suprieur de lenfant au cur de leurs considrations. Ce faisant, elles ont

    retenu que mme si lenfant estimait que Jacques Mandet tait son pre, son intrt tait avant toutde connatre la vrit sur ses origines.

    Il apparat la Cour que les juridictions nont pas omis daccorder un poids dcisif lintrtsuprieur de lenfant mais ont jug que cet intrt ne se trouvait pas tant l o lenfant le voyait - lemaintien de la filiation alors tablie et la prservation de la stabilit affective - que dansltablissement de sa filiation relle. Les dcisions des juridictions ne reviennent pas faireindment prvaloir lintrt de M. Glouzmann sur celui de lenfant, mais retenir que lintrt delun et de lautre se rejoignent en partie. Ce faisant, les juridictions internes nont pas excd lamarge dapprciation dont elles disposaient.

    Enfin, il convient de noter quayant confi lexercice de lautorit parentale la mre, les dcisions

    des juridictions internes nont pas fait obstacle ce que lenfant continue vivre au sein de la familleMandet, comme il le souhaitait.

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    La Cour considre par consquent quil ny a pas eu violation de larticle 8.

    Article 6 1

    Relevant que les requrants ont bnfici dune procdure contradictoire, quils ont pu prsenter lesarguments et lments de preuves quils jugeaient pertinents pour la dfense de leur cause et que

    les dcisions rendues par les juridictions internes taient dment motives, la Cour ne voit aucunlment susceptible de caractriser un manquement leur droit un procs quitable. Cette partiede la requte est manifestement mal fonde et doit tre rejete.

    Opinion spare

    La juge Nuberger a exprim une opinion dissidente dont le texte se trouve joint larrt.

    Larrt nexiste quen franais.

    Rdig par le greffe, le prsent communiqu ne lie pas la Cour. Les dcisions et arrts rendus par la

    Cour, ainsi que des informations complmentaires au sujet de celle-ci, peuvent tre obtenus surwww.echr.coe.int. Pour sabonner aux communiqus de presse de la Cour, merci de sinscrire ici :www.echr.coe.int/RSS/frou de nous suivre sur Twitter @ECHRpress.

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    La Cour europenne des droits de lhomme a t cre Strasbourg par les tats membres duConseil de lEurope en 1959 pour connatre des allgations de violation de la Conventioneuropenne des droits de lhomme de 1950.

    mailto:[email protected]://twitter.com/ECHR_Presshttp://www.echr.coe.int/RSS/frhttp://www.echr.coe.int/