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La pauvreté des jeunes : état des lieux, enjeu de politique publique et comparaison internationale
XVIIème rencontre du réseau Mission Locale Orléanais
Orléans, 31 mai 2011
Florence Lefresne
Institut de Recherches Economiques et Sociales
Histoire du traitement social de la pauvreté
On passe au tournant du XVIIIème siècle, d’une vision positive compassionnelle, issue de la tradition chrétienne, à une vision doublement négative : pauvres = « oisifs » (paresse, alcoolisme, imprévoyance…) et « perturbateurs de l’ordre social »
Réponse des Etats à la pauvreté : l’enfermement : « hôpital général », concerne au tournant du 18ème : 1% de la pop.; « workhouses », 1834 (Cf. Foucault, 1961, « L’histoire de la folie à l’âge classique ») ; Objectif économique : exclure les marchés parallèles (revente, recel, le petit artisanat de fortune, ravaudage, glanage) + distinguer le pauvre susceptible de travailler du pauvre inapte au travail.
2
La protection sociale contre la pauvreté ?
La croissance ne suffit pas à résoudre la pauvreté ; responsabilité collective (Etat ; collectivités territoriales). Adam Smith (1776) lui-même préconise un « salaire de subsistance ».
Vaincre la pauvreté : au cœur de la construction du Welfare State (1er des maux à vaincre énoncés par le rapport Beveridge de 1942)
Années 1980 : apparition d’un « deuxième monde de protection sociale » (Bruno Palier, 2008) : politiques d’insertion fondées sur des prestations minimales sous conditions de ressources et de plus en plus tournées vers l’activation
3
4
Plan de la présentationPlan de la présentation
1. La pauvreté : une diversité d’indicateurs, pièges de la mesure de la pauvreté des jeunes, état des lieux
2. Regards comparatifs européens
3. Retour sur le diagnostic : la place des jeunes sur le marché du travail
4. Quels enjeux pour les politiques
publiques ?
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1. La pauvreté : une diversité 1. La pauvreté : une diversité d’approches et d’indicateursd’approches et d’indicateurs La définition de la pauvreté est conventionnelle : repose sur la
définition de seuils et des indicateurs décidés aux niveaux national et international.
La pauvreté est un phénomène relatif : définie par rapport à des «modes de vie acceptables», eux-mêmes variables dans l’espace et dans le temps (parfois difficile d’obtenir un consensus sur les instruments de mesure : ex du Canada).
C’est un phénomène multidimensionnel qui ne saurait se réduire à l’absence ou à la privation de ressources monétaires.
C’est un phénomène dynamique à appréhender du point de vue des trajectoires individuelles, à court terme (entrée, sortie, retour, maintien) ou à plus long terme (transmission).
Premières approches de la mesure de la pauvreté
Rowntree (1901) : enquête, à New York, sur 11 000 familles vivant en 1899. Idée de panier minimal (28 % au-dessous du seuil)
Refait son étude en 1936, intègre journaux, tabac, vacances, radio, cadeaux…principaux concernés : les chômeurs
Principe toujours en vigueur aux E-U (Bureau du Census) : paniers-types variant avec l’âge et la structure de la famille, actualisés par l’indice des prix
Principale critique : « minimisation » de la pauvreté (avec une croissance des revenus sup aux prix)
6
Union Européenne : le choix d’une mesure relative
Conseil Européen : « Les personnes dont le revenu et les ressources matérielles, culturelles et sociales sont à ce point insuffisantes qu’elles les empêchent d’avoir des conditions de vie considérées comme acceptables dans le pays membre où elles vivent ».
Le « acceptable » est en fait ce qui est jugé « normal » par la moyenne de la population.
7
Principal indicateur européen : « le taux de risque de pauvreté »
Eurostat (Laeken 2001) « Toute personne vivant dans un ménage dont les ressources
ne dépassent 60 % du niveau de vie médian ». L’INSEE retient plutôt le seuil des 50 %.
Niveau de vie : revenu disponible du ménage divisé par le nb d’unités de consommation pondérées du ménage
(1 adulte = 1 ; 2ème adulte +14 ans = 0,5 ; enfant = 0,3). En France 1580 euros en 2008 (seuil de pauvreté : 949 euros). Revenu disponible : revenus directs + transferts - impôts
8
Les pièges arithmétiques d’une mesure relative
Doubler le revenu de tous ne change rien aux nombre de pauvres ;
Plus une mesure des inégalités : à la limite si personne n’a rien (une forme d’« égalité »), il n’y a pas de pauvres…!
Si le revenu médian baisse, la pauvreté diminue ! (ce qui pourrait se passer avec la crise)…Cf. objectif du Pdt de la République en 2007 : réduire la pauvreté d’un tiers avant 2012
Pour neutraliser l’effet « évolution des revenus », on utilise un indicateur de « taux de pauvreté ancrée dans le temps »
9
Limites liées à la construction de l’indicateur
Appartenir à un ménage…difficulté à prendre en compte les SDF (150 000 en France sur 8 millions de pauvres en 2007) ;
Hypothèse forte du partage au sein du ménage Paradoxe du genre : fortement représentées dans les
bas salaires, les femmes le sont moins dans la pauvreté (sauf famille monoparentale).
Comment mesurer la pauvreté des jeunes ? (pb d’autonomie)
10
INSEE, septembre 2010
13 % de pauvres en 2008, contre 13,4% en 2007, soit 7,8 millions de personnes ayant un niveau de vie de
moins de 949 euros par mois La moitié d’entre eux ayant moins de 773 euros par
mois 1,6 million de pauvres dans des familles
monoparentales. 30 % des familles monoparentales sont pauvres
1 million de 18-24 ans, soit 20,1 %
11
Mesurer la pauvreté des jeunes ? Conséquences de l’indicateur choisi
Le jeune (18-24 ; 18-29 ans) est appréhendé dans un ménage : celui des ses parents (cohabitants) : hypothèse du partage, risque de sous-
estimation de la pauvreté juvénile ; reflet de la situation des parents ; cohabitation choisie ou subie ? (retard d’autonomisation dû au revenu ; 50% sont étudiants ;
celui des ménages jeunes : 50 % sont des jeunes vivant seuls ; 20 % sont étudiants. Attention ! On exclut du champ; les ménages dont la personne référent est étudiante
- 12
Ménages : les échelles d’équivalence Seuil de pauvreté = 948 euros 1ère configuration : 4 jeunes vivant seuls
Revenus respectifs = 700, 800, 900, 2300 Nombre de pauvres : 3
2ème configuration : 4 personnes vivant en deux couples Couple A: lui =2300 ; elle = 700; eux = 3000
Revenu par tête = 1500 Revenu équivalent = 3000/1.5 = 2000
Couple B: lui = 800 ; elle = 900 ; eux = 1700 Revenu par tête = 850 Revenu équivalent = 1700/1.5 = 1133
Nombre de pauvres : 013
Les jeunes et les femmes : premiers concernés en France
14
Une limite sérieuse : la minoration des revenus du patrimoine dans le cas français
Depuis 30 ans, les revenus de la propriété ont augmenté plus vite que les autres catégories de revenus (diapo suivante),
Or les données fiscales minorent ces revenus (moins du quart des revenus)
Interpellation du CNIS en 2007 par le RAI (réseau d’alerte sur les inégalités). L’INSEE réévalue le niveau de vie moyen mais insuffisamment
2008 : niveau de vie moyen INSEE = 1580 euros; Avec chiffres compta nat = 2400 euros…Ce qui rehausse d’un tiers le seuil d’entrée en pauvreté
15
Ratios revenus nets de la propriété sur les salaires nets
16
Légende : les revenus de la propriété représentent aujourd’hui l’équivalent d’un peu moins de 50 % de la masse des salaires nets perçus par les ménages contre environ 25 % en 1978 et 20 % en 1949.Sources : INSEE, comptes nationaux, calculs IRES.
La France du travail, Ires, 2009
Salaires et loyers : le grand écart
17
0
5
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15
20
25
1961 1963 1967 1970 1973 1978 1984 1988 1992 1996 2002 2006
Taux d'effort brut
Taux d'effort net
Source: INSEE, Enquêtes LogementNote: Le taux d'effort est le rapport entre les loyers et les revenus des ménages locataires. I l est dit brut avant prise en compte des aides au logement et net après déduction de ces aides
D’autres indicateurs non monétaires…
Cf. travaux du sociologue anglais Townsend (1954) : idée de privation dans le domaine alimentaire, l’habillement, l’habitat, la culture…Reprise par Amartya Sen dans sa définition du bien être : espérance de vie, mortalité infantile ou illettrisme + accès « effectif » à des biens et des services (capabilités)
L’ONPES retient un indicateur en conditions de vie à partir de 28 item (logt, santé, loisirs…)
Créé par le RAI, le BIP40 (Baromètre des inégalités et de la pauvreté) est un indicateur multidimensionnel qui synthétise plus de 60 indicateurs
18
Créé par le RAI, le BIP40 est un indicateur multidimensionnel qui synthétise plus de 60 indicateurs,
couvre 6 domaines des inégalités : chômage-emploi-travail, revenus et pauvreté, santé, logement, éducation, justice
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BIP 40 - Evolution des inégalités depuis 1980
3,50
4,00
4,50
5,00
5,50
6,00
BIP 40
Sources : www.bip40.org
Evolution du BIP 40
La pauvreté en région Proportion d’allocataires de minima sociaux fin 2008 parmi la population âgée de 20 ans ou plus, selon le département
Taux de pauvreté par région
20
Nouveau dispositif de veille socialeEnquête auprès des acteurs de terrain (emploi, insertion, lutte contre les
exclusions)● Pas d'extension de la pauvreté à de nouveaux publics● Phénomènes émergents / phénomènes nouveaux● Désespérance et inquiétudes accrues ● Agressivité et exigences accrues ● Moins un effet direct de la crise que l'expression d'un processus
long de fragmentation de la société ● Augmentation du non-recours et perte de confiance dans les
institutions Cinq types de publics identifiés par les acteurs sociaux : les sans
ressources chroniques (un quart du public), les actifs pauvres (un cinquième), les jeunes en rupture familiale et sociale (près de 20%), les migrants en difficulté (plus de un sur dix) et les personnes en souffrance psychique (15%).
Asssocier les personnes concernées par la pauvreté 21ONPES
Une mesure subjective : la peur de la pauvreté
22
Principales caractéristiques de l’évolution de la pauvreté entre 1996 et 2007
● Stabilité de la pauvreté monétaire (13, 5 % en 1996 à 13,4% en 2007, soit 8 millions de personnes pour le seuil à 60 %)
● Augmentation de la pauvreté des jeunes● Augmentation de l'intensité en pauvreté● Augmentation de la pauvreté en emploi (entre 2003 et 2006)● Ralentissement de la baisse de la pauvreté en conditions de vie (à
partir de 27 indicateurs)● Persistance dans le RMI (sup. 3ans) 46,7 %● Taux de renoncement aux soins 14 % ● Amélioration de l'accès à la formation (non-diplômés /18-24 ans)● Taux de demandeurs d'emploi indemnisés, plutôt en baisse ● Part importante des demandes de logement insatisfaites
ONPES23
Indicateurs de pauvreté monétaire
24ONPES
Effets de la crise sur la pauvreté
● La plus forte dégradation du marché du travail depuis 1970
● Les principaux canaux de diffusion de la crise :● le marché du travail : - 480 000 emplois supprimés en 1 an● 1 million de “fin de droits” fin prévu en 2010 ● la baisse des revenus d'activité (chômage ou réduction primes, horaire,
salaire d’entrée des jeunes● le surendettement : 15 % de hausse du nb de dossiers en 2009
● Les stabilisateurs économiques ont joué leur rôle et ont compensé, au moins en partie, les effets de la crise. ● Si les statistiques ne peuvent rendre compte de l'impact de la
crise, les associations se font l'écho d'une augmentation des demandes d'aide.
ONPES 25
La reprise est fragile et pauvre en emplois
● Faible dynamisme de la demande intérieure et des exportations
● Les entreprises privilégient la restauration de la productivité
● Emplois précaires● Légère décrue du chômage, insuffisante pour agir sur la
pauvreté
Effets aggravants des ajustements budgétaires
26
27
Principaux publics touchés par le risque de pauvreté Les salariés peu qualifiés Les jeunes Les femmes chefs de famille un risque de paupérisation à terme pour les plus âgés
Trois types d'effets importants: Extension de la pauvreté aux salariés des secteurs industriels et
aux salariés en CDD et en intérim Intensification de la pauvreté pour des publics déjà exclus Irréversibilité pour certains (jeunes non-qualifiés en
particulier) et inégalités accrues
Les catégories particulièrement touchées
Une mesure subjective : la peur de la pauvreté
28
2. Regards comparatifs européens
29
Où se situe la France/UE ?
30Eurostat
Avant transferts…
31Eurostat
32
Taux de pauvreté dans l’Union européenne, après transferts sociaux
33
Taux de pauvreté à 60 % du revenu médian, source : Eurostat
La pauvreté des jeunes en Europe –Un paradoxe lié à l’indicateur
34
Eurostat, année 2009
Intensité et persistance
En effet, l’intensité de la pauvreté, qui mesure l’écart entre le seuil de pauvreté et le revenu médian des personnes situées sous ce seuil, est de 18,2 % en France, contre 22 % pour l’Union européenne à 25.
La proportion de personnes qui se situent sous le seuil de pauvreté à un moment donné et qui sont restées pauvres pendant 2 années au moins sur les 3 qui ont précédé l’enquête, est également plus faible en France que dans la moyenne de l’Union
35
Les formes de la pauvreté en Europe : l’intensité de pauvreté
36
Pauvreté : 60 % revenu médian ; transitoire : une fois en 5 ans ; récurrente : plus d’une fois en 5 ans Paugam, 2008
Trois facteurs socio-économiques, une typologie des formes de pauvreté
Développement économique et taux d’emploi ; Type d’Etat-providence (cf typologie d’Esping-Andersen) ; Liens sociaux, solidarités locales et familiales.
Trois formes de pauvreté (Paugam, 2008) :
- « pauvreté intégrée » (étendue, sociétés traditionnelles)
- « pauvreté marginale » (moins étendue mais plus stigmatisante des sociétés les plus développées)
- « pauvreté disqualifiante » (nelle pauvreté, précarité, chômage)-
37
Pauvreté et exclusion en Europe
● En dépit des engagements : stagnation de la pauvreté en Europe; La France en position moyenne
● Fort impact du système français de protection sociale (baisse de 30 % de la pauvreté monétaire) : importance de maintenir un haut niveau de financement de la protection sociale
● Pauvreté des chômeurs : 5 fois plus importante que la pauvreté en emploi (43 % contre 8 %)
● Interrogation sur l'efficacité, dans le contexte actuel, des incitations financières au retour à l'emploi et sur la validité des exigences accrues en matière de retour à l'emploi
● Vers un objectif européen de lutte contre la pauvreté
ONPES38
3. Retour sur le diagnostic : quelle place occupe les jeunes sur le marché du travail ?
39
40
0,0
1,0
2,0
3,0
4,0
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1975
1976
1977
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1980
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2003
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2005
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2008
2009
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25-49 ans (éch. gauche) 50 ans ou plus (éch. gauche) 15-24 ans (éch. droite)
Chômage des classes d’âge – source : INSEE
Florence Lefresne
Emplois précaires : flux et stock
75 % des emplois créés sont des CDD (Dares, 2010)
61% des DUE (déclarations uniques d’embauches à l’ACOSS) sont des contrats de moins d’un mois
En stock, les CDD ne représentent que 14,5% de la population salariée
Le flux finit par mordre sur le stock
41
42
Part des emplois atypiques dans l’emploi total,Données INSEE
Statuts d’emploi des jeunes
43Enquête Emploi 2009, INSEEFlorence Lefresne
40
50
60
70
80
90
100
SOURCE : Enquêtes Emploi INSEEIRES – Les mutations de l’emploi en France, Repères, La Découverte, 2005
Part de l’emploi stable (en %) par cohorte de jeunes entrant sur le marché du travail
44
Jeunes : vecteurs des nouvelles normes d’emploi
La sur-représentation des jeunes dans les flux d’entrée sur le marché du travail les place non seulement en première ligne face aux tensions conjoncturelles (sur-réaction au cycle), mais également au cœur des transformations structurelles de l’emploi.
45Florence Lefresne
Statut d’emploi par diplôme
46Insee
Taux de chômageSalaire médian pour un équivalent temps plein
(1)
Temps partiel contraint (2)
Homme Femme Écart Homme FemmeÉcart
(en %)Homme Femme Écart Effectifs de
sortantsEnsemble 14 15 -1 1 400 1 340 -4 4 14 -9 737 000Non diplômé 29 38 -10 1 200 1 140 -5 8 25 -18 123 000CAP - BEP - MC 14 23 -9 1 270 1 200 -6 4 24 -20 127 000Bac généraux 15 14 2 1 350 1 210 -10 7 17 -10 42 000Bac Pro et Techno 10 17 -7 1 300 1 200 -8 3 18 -14 135 000Bac+2 7 7 1 1 500 1 410 -6 3 8 -5 137 000Licence 8 7 1 1 500 1 470 -2 8 10 -2 51 000Maîtrise, MST, Master 1, … 11 9 2 1 660 1 500 -10 6 8 -2 38 000DESS, DEA, Master 2 5 7 -2 2 000 1 700 -15 3 6 -3 39 000Ecoles de commerce et d'ingénieurs 2 7 -5 2 250 2 110 -6 0 2 -2 31 000Doctorat 8 7 1 2 170 2 200 1 5 6 -1 14 000
(1) : hors emplois de moins de 14 heures par semaine.
(2) : proportion de jeunes qui occupent un emploi à temps partiel alors qu’ils souhaitent travailler à temps plein.
Champ : France métropolitaine.
Source : Céreq, enquête Génération 2004. 47
Inégalités d'insertion professionnelle trois ans après la fin des études selon le diplôme et le sexe
Insertion des jeunes diplômés, selon l’âge, en 2006
48Florence Lefresne
Scolarité à temps plein
CDI
CDD
Chô
Source : Estimations du Secrétariat de l’OCDE à partir de l’enquête Emploi de l’INSEE pour la Franceet de l’enquête communautaire sur les forces de travail pour les autres pays.
Insertion des jeunes sans diplômes
49
18 % de jeunes (soit 130 000) sortent chaque année sans bac ni BEP-CAP.Dont 6 % (soit 45 000) n’ont pas atteint la classe de seconde ou l’année terminale de CAP-BEP
Florence Lefresne
Le diagnostic est au moins double
Pour les 18 % de « sans diplôme » + 13% de sortants sans diplôme du 1er cycle universitaire…Le problème est clairement un déficit de « capital humain » + effet de ghetto social et spatial
Pour les autres, dont les niveaux de formation s’élèvent, le diagnostic est différent :
- Turn-over sur la marché du travail, lié à la précarité – 1 jeune sur 5 a comme 1er emploi l’intérim – 1 sur 3 en CDD
- Chômage d’insertion ou de rotation- Situations de précarité durable
50Florence Lefresne
4. Quels enjeux pour la politique publique
Politiques de l’emploi Politiques sociales
51
Une mise en perspective
Une innovation fondatrice : rapport Schwartz et mise en place du « réseau » (ML et PAIO) + DIIJ supprimée en 2002
Plus de 80 dispositifs en 30 ans…1975 : Stages Granet Des permanences : les registres d’action demeurent
(exonérations de cotisations employeurs, gisements d’emploi dans le secteur non-marchand, alternance…)…en dépit des alternances politiques
Des changements : élimination des statuts non contractuels (TUC, SIVP) et prolifération de contrats dérogatoires à la
norme ; décentralisation. 52Florence Lefresne
Une pluralité d’acteurs à coordonner
Plus un dispositif nécessitent la coordination d’un grand nombre d’acteurs publics ou d’intérêt public (ex : comité de pilotage de CIVIS) : DR-DDTEFP, ANPE-Pôle-Emploi, DRASS, Conseil Régional, Protection Judiciaire de la jeunesse, Services des Droits des Femmes, Missions locales, PLIE, Fonds d’Action Sociale, Délégation Académique à la Formation Continue, AFPA…
Réseaux d’employeurs locaux Réseaux associatifs socialisant les jeunes
53Florence Lefresne
Une tendance repérable dans la politique de l’emploi …
54
La dépense ciblée cède le pas sur les allègements généraux
55Dares
56Dares
Part des emplois aidés parmi les emplois occupés par des jeunes de moins de 26 ans
Florence Lefresne
Les moins de 26 ans en mesures (en milliers)
57Dares Florence Lefresne
Les tendances récentes
Depuis 2002 : politique tendancielle de réduction du volume des emplois aidés…en particulier emplois aidés non marchands (loi des finances 2008 : 130 000)
La crise contraint à une inflexion (+ 100 000 en 2009 et
+ 30 000 en 2010) Nouvelles aides à l’embauche (« zéro charge » dans les TPE ;
primes à l’embauche pour les contrat d’alternance) 1er janvier 2010 : Contrat unique d’insertion (2 volets : CUI-CAE et
CUI-CIE). Suppression des contrats réservés aux minima sociaux (CAV, CI-RMA).
Expérimentation du contrat d’autonomie
58Florence Lefresne
Les deux plans « Jeunes » liés à la crise
Le plan d’urgence en faveur de l’emploi des jeunes (avril 2009 : 1,3 Mds) : renforcement de l’alternance, contrats aidés supplémentaires, prime d’embauche d’anciens stagiaires en CDI (3000 euros) ; « CAE passerelles »
Le plan « Agir pour la jeunesse » (sept 2009) inspiré par le Livre vert : RSA, service public de l’orientation, le suivi des « décrocheurs », pré-recrutement par les entreprises finançant de la formation (disposition restée sans suite)
59Florence Lefresne
60
Les principaux résultats de l’évaluation
Effets d’aubaine, effets de substitution, beaucoup plus forts dans le secteur marchand
Différence de qualité d’insertion entre secteur marchand et secteur non marchand qui recouvre une segmentation des publics
Effets nets du passage par les dispositifs du secteur non marchand : sortie de pauvreté plus qu’accès à l’emploi stable ; rôle clé de l’accompagnement
Effet du passage par l’alternance : toutes choses égales par ailleurs, effet d’autant plus bénéfique que le niveau de formation est faible. Un résultat qui fait peu retour sur la politique publique
Florence Lefresne
Un bilan en demi-teinte
Impact limité sur le chômage des jeunes ; une faible contra-cyclicité
Faible contra-sélectivité des mesures : 71 % des titulaires d’un contrat de professionnalisation ont au moins le bac (Dares, 2011).
Ciblage ou non sur les publics les plus fragiles : un dilemme récurrent
La politique d’insertion est surtout une prérogative de l’Etat; exigences faibles en contreparties des exonérations de charges sociales
Faible enjeu de négociation des partenaires sociaux. Florence Lefresne
61
62
en % du total des prestations en % du PIB
Vieillesse-Survie 44,9 13,1
Vieillesse 38,3 11,1
Survie 6,6 1,9
Santé 35,8 10,4
Maladie 28,8 8,4
Invalidité 5,4 1,5
Accidents du travail 1,6 0,5
Famille-maternité 9,1 2,7
Famille 7,9 2,3
Maternité 1,2 0,4
Emploi 6,3 1,8
Chômage 5,9 1,7
Insertion professionnelle 0,4 0,1
Logement 2,6 0,8
Pauvreté-exclusion 1,5 0,4
Total 100 29
Répartition des prestations de protection sociale (2007)
DREESComptes de la protection sociale
Dégradation du niveau relatif des minima sociaux
Pour retrouver aujourd’hui une situation analogue à celle de 1984, il faudrait rehausser le niveau moyen des minima sociaux de plus de 40 %.
63La France du travail, IRES, 2009
15
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23
25
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29
31
33
1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005
Niveau relatif des minima sociaux(*)
(*) Revenu minimum moyen garanti en % du niveau de vie moyen (revenu disponible par unité de consommation)
La fonction « Pauvreté exclusion »Montants de minima sociaux, en % du revenu médian
64
API(personne seule / femme
enceinte)Minimum vieillesse
(personne seule)RMI
(personne seule)
Seuil de pauvreté(60 % du revenu
médian)
1984 49,2 50,7 60
1989 45,5 47,5 33,9 60
2000 42,6 47,0 33,5 60
2002 40,6 45,0 32,1 60
2003 40,4 44,7 31,9 60
2004 40,4 44,7 31,8 60
2005 39,8 43,9 31,2 60
2005* 38,2 42,2 30,0 60
2006 37,6 41,6 29,5 60
2007 36,8 40,7 28,9 60
2008 36,3 40,2 28,6 60
* rupture de série en 2005 (meilleure estimation par l’INSEE du revenu médian)Source : INSEE, CNAF, calculs Antoine Math
Le principe de fonctionnement du RSA
Comme pour le RMI et l’API, le RSA est une allocation différentielle qui complète les revenus du ménage pour qu’ils atteignent un revenu garanti. Ce dernier est égal à la somme :
• d’un montant forfaitaire, dont le montant varie en fonction de la composition du foyer, fixé par décret à un montant équivalent à celui du RMI ou de l’API selon la situation familiale (460 euros par mois, hors forfait logement, pour une personne vivant seule, 690 euros pour une personne élevant seule un enfant de plus de 3 ans…) ;
• d’une fraction des revenus professionnels des membres du foyer, fixée par décret à 62 %.
Revenu garanti = Montant forfaitaire + 62 % des revenus d’activité
65
Expérimentation du RSA : le dispositif
Méthode peu utilisée en France (contrairement aux pays anglo-saxons, introduite par la loi des finances 2007 et par la loi TEPA)
33 départements volontaires entre juin 2007 et mars 2008 4 outils : enquête monographique auprès des principaux acteurs chargés
de la mise en œuvre ; enquête qualitative auprès de bénéficiaires du RMI, de l’API ou du RSA ; une enquête quantitative réalisée sur un échantillon de 3 500 bénéficiaires RMI, API ou RSA ; un tableau de bord sur le contexte socio-économique, les moyens engagés et les résultats obtenus.
Conseils généraux, préfectures, CAF, référents chargés du suivi des bénéficiaires, représentants de services ou de structures d’insertion professionnelle, etc.
Cf Rapport final du RSA Comité d’évaluation (2009).
66
Résultats des expérimentations Globalement peu d’impact sur le retour à l’emploi ou sur le maintien de l’emploi
(+ 9 % mais non significatif) Impact plus fort pour les qualifiés Durée du travail plus courte pour les titulaires du RSA 11 % des personnes
travaillent au plus 9 heures par semaine dans les zones tests contre 6 % dans les zones témoins.
Les emplois sont moins rémunérateurs : dans les zones tests, 31 % des personnes perçoivent 1 000 euros ou plus par mois (soit l’équivalent d’un SMIC à temps plein) contre 40 % en zones témoins.
Impact sur la gouvernance, meilleur partenariat, forte mobilisation des départements
Absence de données précises sur le coût du dispositif et de son impact sur la pauvreté
67
Effets du RSA sur la pauvreté ?
Pour une personne seule sans enfant, revenu avec RSA : SMIC à quart temps : 600 euros SMIC à mi-temps : 750 euros Seuil de pauvreté 948 euros
Pour une mère isolée (le quart des RMIstes) avec 1 enfant, revenu avec RSA :
SMIC à mi-temps : 1000 euros seuil de pauvreté à 1200 euros
Incitation très faible à la reprise du temps plein68
Jeunes et RSA
Exclusion des jeunes du RMI en 1988 Faible part des jeunes indemnisés par l’assurance chômage
(réévaluée par la loi de modernisation du MT – 4 mois) Augmentation sensible de la pauvreté des jeunes depuis 10 ans Critères très restrictifs d’accès au RSA (3600 heures de travail
dans les trois dernières années)…8000 bénéficiaires en janvier 2011 contre 160 000 attendus
Risque d’émiettement de l’emploi pour les ayant-droit ; exclusion pour les autres.
Part des jeunes dans les fins de droits de l’Unedic 15 % du million de fins de droits attendus fin 2010
69Florence Lefresne
CONCLUSIONS
Le débat social a besoin d’une diversité d’indicateurs de pauvreté, notamment pour mesurer celle des jeunes ;
Quels sont les leviers essentiels à actionner ?
70
Les leviers d’action à privilégier
Introduire des critères plus souples d’accès au RSA pour les jeunes
Le RSA peut être conçu comme transitoire Placer « sous conditions » les allègements de charge
pour limiter la précarisation de l’emploi Développement l’accès au logement social Enjeu d’un service public garantissant l’accès aux biens
et services fondamentaux : santé, éducation, transports.
71
Vers une sécurisation des parcours professionnels ?
Eviter l’enfermement des jeunes dans des normes d’emploi spécifiques (participe du fractionnement et de la fragilisation des statuts et de la protection sociale (âge d’entrée en CDI, discontinuité de carrière…)
Enjeu général de redéfinition du statut professionnel : droits à la formation tout au long de la vie, à la mobilité professionnelle choisie, à la protection sociale, etc. non plus attachés au contrat de travail mais à la personne.
72Florence Lefresne
Taux de chômage des jeunes (15-24 ans) en Europe
Sources : Eurostat, données 200873
Florence Lefresne
Méfions nous de l’indicateur « taux de chômage »….
Taux de chômage = Nb de chômeurs
Pop. active
Taux d’activité = Pop. active
Pop. Part de jeunes au chômage =
Taux de chô des jeunes X taux d’act.des jeunes
74Florence Lefresne
Taux d’activité des jeunes (15-24 ans)En % de la classe d’âge
75Sources : Eurostat, données 2008
Florence Lefresne
Diversité des institutions de formation initiale
Les pays où la formation professionnelle initiale est dispensée dans l’appareil productif (apprentissage)
Allg, Autriche, Suisse, Danemark, Pays-Bas
Les pays où la formation professionnelle initiale est massivement dispensée sous statut scolaire
France, Espagne, Italie, Suède, Portugal, Grèce République tchèque…
76Florence Lefresne
Taux de chômage et part de jeunes au chômage
77Sources : Eurostat, données 2008
Florence Lefresne
Des performances d’emploi quasi-stagnantes dans l’Union européenne
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79
Effets de la récession
Ocde
Insertion des jeunes en France, selon l’âge, en 2006
80Florence Lefresne
Source : Estimations du Secrétariat de l’OCDE à partir de l’enquête Emploi de l’INSEE pour la Franceet de l’enquête communautaire sur les forces de travail pour les autres pays.
Insertion des jeunes au Danemark, selon l’âge en 2006
81Florence Lefresne
Source : Estimations du Secrétariat de l’OCDE à partir de l’enquête Emploi de l’INSEE pour la Franceet de l’enquête communautaire sur les forces de travail pour les autres pays.
Différentes logiques d’action en Europe
Place centrale de la formation et de la négociation dans les pays du Nord de l’Europe
Rôle confirmé de l’apprentissage en Allemagne mais relativement moins protecteur depuis la réunification
New deal au Royaume-Uni : activation contrainte, effets d’aubaine massifs, faiblesse de la formation, forte rotation dans l’emploi
Recherche de flexibilité du marché du travail dans les pays latins, en France, Belgique…effets de dualisation accrue du marché du travail
Florence Lefresne82
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Quelques références bibliographiquesOCDE, Des emplois pour les jeunes, France, 2009
Lefresne F., « Trente ans de politique de l’emploi des jeunes : une tentative d’évaluation » in Papinot C. et Vultur M. (dir.) Les jeunesses au travail : regards croisés France-Québec, INRS, UBO, Presses de l’Université de Laval, 4ème trimestre 2010, pp. 185-207. Lefresne F., Effets générationnels et transformations structurelles de l'emploi, Regards croisés sur l’économie, « Le choc des générations », La Découverte, n° 7, mai 2010, pp. 92-100.
Site de la Dares : http://www.travail-emploi-sante.gouv.fr/etudes-recherche-statistiques-de,76/statistiques,78/politique-de-l-emploi-et-formation,84/donnees-transversales,252/jeunes-et-politiques-de-l-emploi,2262.html
Site du Céreq : cerq.fr ; résultats de Génération 2007 dans la crise
Site du Fonds d’expérimentation pour la jeunesse : http://www.experimentationsociale.fr/
Minni C. (avec la collaboration de Omalek L. et Pommier P.) « Emploi et chômage des 15-29 ans », Dares Analyses, Octobre 2010, n°072.
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