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UNE ARCHITECTURE FUNÉRAIRE REMARQUABLE
FOCUSOCTOGONE
À MONTMORILLON• • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • ♦
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En 1991, à la suite d’un éboulement important qui détruisit quelques maisons, rue Fontaine de l’école, des travaux de consolidation du rocher ont été effectués. À cette occasion, des archéologues, travaillant encordés à flanc de falaise, ont mis au jour deux assises superposées de pierres taillées, bases d’une tour ronde ayant appartenu à l’enceinte fortifiée du château.
LE VIEUX-PONT
Un premier pont est mentionné au XIIe siècle et se situait probablement au même emplacement que le Vieux-Pont actuel. Ce dernier, daté pour ses parties les plus anciennes du XVe siècle, n'a conservé qu'une seule arche. Comme l’indiquent d’anciens plans du XVIIIe siècle, ce pont portait également une porte de ville fortifiée et un oratoire. Il a subi plusieurs crues dévastatrices qui ont emporté les arches latérales et les restaurations du XIXe siècle lui ont donné son aspect actuel.
LES FORTIFICATIONS
Connues dans les textes dès le XVe siècle, elles n’ont laissé que peu de traces : une tour le long de la rive gauche de la Gartempe et une partie du tracé encore visible sur le cadastre de 1840. En 1523, une lettre de François 1er précise « l’état ruiné des murailles, des portes et des fossés de Montmorillon » et de ce fait, il octroie aux habitants « la permission de clore leur ville de murailles à leur frais afin de demeurer en sécurité ».
Existaient-elles depuis le XIIe siècle, comme c’est le cas dans de nombreuses villes de même importance ? En tous cas, ces murailles sont reprises et peut-être augmentées au XVIe siècle, à la suite de la permission de François 1er : « fossés, portes et barrières, tours et murailles » disparus aujourd’hui protègent alors une partie de la ville, rive gauche et rive droite.
L’ÉGLISE NOTRE-DAME
Au nord de l’espace castral, l’église Notre-Dame a été édifiée à la fin du XIe siècle, utilisant le relief naturel du rocher. Cette église reprise plusieurs fois a conservé son chevet roman. Les lignes courbes des arcades en plein cintre ornent très harmonieusement les murs extérieurs du sanctuaire.
LA CRYPTE SAINTE-CATHERINELa crypte Sainte-Catherine, construite à flanc de rocher, est ornée de peintures murales de la fin du XIIe siècle évoquant la légende de sainte Catherine d’Alexandrie. Une Vierge de tendresse trône dans une immense mandorle tandis que l’Enfant Jésus couronne la jeune Catherine. Ces peintures murales, classées Monuments Historiques, sont reproduites à la Cité de l’architecture et du patrimoine à Paris.
LA CHAPELLE SAINT-NICOLAS
Située à l’écart du bourg, la chapelle Saint-Nicolas était autrefois au milieu des vignes, sur le point culminant à l’ouest de Montmorillon. C’est le dernier vestige d’un prieuré dépendant de l’abbaye de Charroux. Elle a été l’objet d’un pèlerinage important jusqu’à la Seconde Guerre mondiale : les jeunes filles en quête de mari invoquaient saint Nicolas en ces termes « Bon saint Nicolas, vous qui mariez les filles avec les gars, ne m’oubliez pas ! ». On y venait également pour guérir des rhumatismes.
L’ÉGLISE SAINT-MARTIAL
Aujourd’hui, la haute silhouette de l’église Saint-Martial domine la rive droite. Depuis le XIXe siècle, cet édifice néo-gothique remplace l’église précédente, dédiée au premier évêque connu du Limousin, saint Martial. La tour carrée romane située sur le côté sud de l’édifice, est le dernier témoin du XIIe siècle. Financés par les souscriptions des habitants, la construction et les mobiliers du XIXe siècle sont d’une belle homogénéité.
1. L’église Notre-Dame, le Vieux-Pont et la motte castrale.
2. Cadastre de 1840 avec le tracé des fortifications en rive droite.
3. La chapelle Saint-Nicolas.
4. La crypte Sainte-Catherine, église Notre-Dame.
5. L’église Saint-Martial.
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LA FONDATION
Au cours du XIe siècle, trois hommes de Montmorillon, dont un prête, Robert, Acfred et Umbert, souhaitent établir une église en l’honneur de sainte Marie-Madeleine. Rencontrant l’opposition des prêtres du château, ils fondent un premier établissement hospitalier pour les pauvres. Autrefois située entre le chauffoir et l’église Saint-Laurent-et-Saint-Vincent, la salle Marie-Madeleine, disparue depuis le début du XIXe siècle, est le lieu d’accueil des malades sous la garde de religieux.
Vers 1102, cette première fondation trouve un second souffle lorsque « Robert du Puy », longtemps désigné par différents auteurs comme Seigneur de Vacheresse (Persac), revenant de pèlerinage à Jérusalem, consacre sa fortune pour faire relever de ses ruines cette fondation. Soutenue par les seigneurs locaux et les grands de l’époque, la Maison-Dieu devient prospère. Pierre II, évêque de Poitiers, fonde à cette intention une confrérie de clercs en 1107. Guillaume le Troubadour, comte du Poitou et 9e duc d’Aquitaine la prend sous sa protection. À une date inconnue, l’établissement adopte la règle de saint Augustin et, peut-être vers 1300, passe entre les mains des ermites de Saint-Augustin.
L’HÔPITAL-MONASTÈRE
Bâtiments monastiques et hospitaliers voisinent pour la vie en communauté de moines augustins et des malades. Les guerres de Cent Ans et de Religion, entre le XIVe et le XVIe siècle sont la cause de nouveaux aménagements architecturaux : fortifications, constructions classiques… Les moines y accueillent et soignent les malades du XIIe au XVIIIe siècle, jusqu’à la Révolution.
DU PETIT SÉMINAIRE À LA MAISON DE RETRAITE
Quelques vingt ans après la Révolution française, l’évêché de Poitiers achète l’ancienne Maison-Dieu pour y installer un Petit Séminaire dont le souvenir est toujours très vivant dans la mémoire locale. En 1968, à la fermeture de cette école de prêtes, l’hôpital acquiert à son tour les bâtiments pour abriter la maison de retraite. En 2009, la maison de retraite est transférée dans de nouveaux bâtiments près de l’hôpital. Le site est, depuis cette date, l’objet de réflexions pour écrire une nouvelle page.
LAMAISON-DIEU
1. Vue aérienne de la Maison-Dieu.
2. Plan de la Maison-Dieu réalisé par Pascal Hérault, La Maison-Dieu de Montmorillon, histoire de sa reconstruction
au XVIIe siècle, Écomusée du Montmorillonnais, 1993.
3. La façade XVIIe siècle donnant sur les jardins.
4. Colonne, seul vestige de la salle d’hôpital.
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L’ÉGLISE SAINT-LAURENT-ET-SAINT-VINCENT
Dite « Chapelle Saint-Laurent » depuis l’époque du Petit Séminaire, c’était à l’origine l’église du monastère, lieu de prières des moines augustins de la Maison-Dieu. Ceux-ci partageaient leur temps entre prières et soins aux malades. Cet édifice a conservé sa façade et son clocher du XIIe siècle, tandis que l’intérieur a été considérablement modifié pour le Petit Séminaire dans la seconde moitié du XIXe siècle.
La frise sculptée de l’Enfance du Christ était à l’origine située au-dessus du portail. Depuis le XVIIe siècle, elle orne le sommet de la façade à la suite du percement de la grande baie. Elle a été endommagée au XVIe siècle, lors des guerres de Religion et tous les personnages ont perdu leur visage. La qualité des drapés, sculptés dans un calcaire très fin, l’apparente déjà au style gothique.
Agrandi d’un transept et d’un chœur en hémicycle pour les besoins du Séminaire, l’intérieur de la chapelle a reçu un mobilier et un décor de peintures murales réalisé par la Société d’Art Chrétien de Tours, d’un style académique et d’inspiration éclectique, représentatif du goût néo-médiéval du XIXe siècle. Ces peintures avaient un véritable rôle pédagogique pour les petits séminaristes.
LES FORTIFICATIONS
À la fin du Moyen Âge, la prospérité de la Maison-Dieu attire la convoitise des mercenaires et des pillards, dans le climat difficile de la guerre de Cent Ans. Pillages, famines, épidémies sévissent en Montmorillonnais comme dans la France entière aux XIVe et XVe siècles. Dans ce contexte d’insécurité, la Maison-Dieu est fortifiée pour protéger moines, malades, réserves alimentaires et autres richesses matérielles.
Seul vestige de cet ensemble dont on ne connaît pas le développement, la tour quadrangulaire est accolée d’un escalier en vis desservant les niveaux. Au-dessus des deux portes, les bretèches, éléments d’architecture militaire, défendaient l’entrée de l’établissement en permettant le jet de projectiles. Plus tard, la tour a servi de logis avant la reconstruction du XVIIe siècle, puis de prison.
LE RENOUVEAU CLASSIQUE
Malgré la protection des « murailles, fossés et pont-levis », la Maison-Dieu est ruinée pendant les guerres de Religion. Au début du XVIIe siècle, les moines Augustins vont devoir en reconstruire les bâtiments monastiques. Grâce à son rattachement à la Maison-Mère des Augustins Réformés de Bourges, l’établissement de Montmorillon récupère son patrimoine foncier dilapidé lors des tourmentes du XVIe siècle.
La salle d’hôpital est réaménagée au nord de l’église, l’immense monastère est reconstruit au sud, espace privilégié pour accueillir la communauté monastique : cellules et chambres, parloir et réfectoire, apothicairerie et salle du chapitre, desservis par un escalier en pierre monumental à rampes droites et balustrades.
Architecture classique caractérisée par la géométrie, la longue façade orientale et les fuyes dominent avec noblesse le paysage urbain de Montmorillon. À la même époque, on construit le chauffoir pour accueillir les pauvres et chauffer les malades de l’hôpital, entre 1630 et 1634, et la grange en 1668.
1. La chapelle Saint-Laurent et la tour de fortification.
2. Peintures de la chapelle Saint-Laurent.
3. Gravure de la Maison-Dieu après les extensions du XIXe siècle, carte postale ancienne.
4. Le chauffoir.
5. Saint-Laurent et la maison de l’hospitalier avant sa destruction en 1912.
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LE CIMETIÈRE DE LA MAISON-DIEU
La « Cour de l’Octogone » est aujourd’hui fermée par la rue des Augustins à l’ouest, par la rue Fontaine des Miracles au sud, par les bâtiments des XVIIe - XIXe siècles et la grange, au nord et à l'est. Il est difficile de déterminer précisément la superficie du cimetière de la Maison-Dieu au Moyen Âge.
La chapelle cimétériale dite aujourd’hui « l’Octogone » était-elle située au milieu, ou décentrée par rapport à la nécropole ? Seule l’archéologie pourrait répondre à cette question. Les derniers sondages archéologiques menés en 2016 ont montré que la zone de sépultures était importante.
Élevé au XIIe siècle dans le cimetière de la récente Maison-Dieu, cet édifice est construit en pierre calcaire selon un plan octogonal.Aujourd’hui perçue comme une architecture très originale, la chapelle de Montmorillon s'inscrit au Moyen Âge dans un mouvement architectural qui, sans les destructions irrémédiables, aurait livré de nombreux spécimens : Peyrat-de-Bellac, Vertillac, Limoges en Haute-Vienne, Ferrière-en-Gâtinais en Haute-Loire, par exemple, possédaient également des architectures octogonales.
SYMBOLE DE LA RÉSURRECTION
La forme octogonale est un rappel symbolique de la résurrection. Le chiffre 8, très utilisé dans les constructions liées au culte des défunts, est également associé aux édifices baptismaux, comme le présente la piscine octogonale du Baptistère Saint-Jean à Poitiers par exemple.Au Moyen Âge, période éminemment chrétienne, la mort n'est pas perçue comme la fin de tout mais comme un « passage » vers une autre vie. Tous les chrétiens enterrés au fil des siècles dans cet ancien cimetière sont morts dans l’espoir de cette résurrection.
L’ARCHITECTURE
Cet édifice chrétien possède deux niveaux : la chapelle supérieure couvre un espace à demi-enterré à vocation d’ossuaire. Hormis à l’est où se développe le chevet de plan rectangulaire, les sept autres côtés sont ornés de hautes arcades légèrement brisées encadrant les ouvertures des deux niveaux et formant une banquette à la base des murs.
L’OCTOGONE DANS LECIMETIÈRE
UNE TOITURE SOUVENT MODIFIÉE
Depuis le XIXe siècle, des dalles de pierres couvrent la chapelle orientale et, jusqu’aux restaurations de 1997-1998, une toiture de tuiles plates reliait l’ancien clocher-mur à la toiture pyramidale de l’Octogone.La toiture à trois niveaux de la partie octogonale est celle que l’Octogone porte depuis deux siècles : des pierres soigneusement taillées et disposées en pyramide constituent le premier niveau très homogène avec l’élévation. Les niveaux supérieurs, couverts de tuiles plates et d’ardoises, datent sans doute des restaurations de 1793, revues par l’entreprise Simillon en 1881-1886. L’histoire de cette toiture est très mouvementée.
Depuis 1594, date de la première citation connue du « charnier » de la Maison-Dieu, on signale l’état de délabrement inquiétant des voûtes et du toit. En 1611, les auteurs du procès-verbal de visite s’inquiètent du manque d’entretien et de l’abandon de la « Chapelle Saint-Jean » ou « charnier » : « la charpente et ouverture est complètement ruinée et tombée sur la voulte » (sic).Entre 1611 et 1639, des travaux ont lieu dans le contexte du renouveau de la Maison-Dieu et de la construction des grands bâtiments monastiques.
PROCÈS-VERBAL DE 1639Le 21 octobre 1639, le Sénéchal du Roi, guidé par le Père Prieur Guérin, arrive dans le cimetière de l’hôpital et constate que « il a été fait une charpente neuve en forme de pyramide où il y a un clocher fait en dôme couvert d’ardoises et de plomb avec une lanterne, pour y mettre une cloche et le reste couvert à tuile et à ardoises ».Qu’est devenu ce lanternon du XVIIe siècle ? Certains auteurs affirment, sans citer leurs sources, qu’il est tombé en 1745.
1. L’Octogone, côté sud, après les restaurations de 1997-1998.
2. L’Octogone avant les restaurations de 1997-1998, carte postale ancienne.
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SUBVENTION RÉVOLUTIONNAIREEn 1793, le gouvernement révolutionnaire finance les travaux de restauration de la toiture, sur la croyance qu’il s’agit d’un temple païen ! Est-ce dès cette date que la toiture montre les trois niveaux, pierres, tuiles et ardoises, connus jusqu’en 1997 ? Les dessins de Millin et Siauve en 1805 semblent l’affirmer.
Les interventions de l’entreprise de travaux publics Simillon commandées en 1881-1886 par l’architecte Formigé n’auraient pas modifié la silhouette.
Depuis les travaux du XIXe siècle, la charpente a gauchi et les arêtiers de la toiture ont amorcé une « vrille » qui la mettait en péril. Ce gauchissement général des pyramides de tuiles et d’ardoises a motivé la restauration de 1997-1998.
La forme initiale de la toiture a toujours interrogé les auteurs. Y avait-il une flèche de pierre comme celle du clocher Saint-Laurent ? Jules Gailhabaud (1857), Jules Jean Formigé (1877) et Pierre Bonnard (1988) en esquissent la proposition : ce qui modifie considérablement la silhouette générale de l’Octogone.
LE DÉCOR SCULPTÉ
Le décor extérieur de la chapelle octogonale est assez réduit : seuls les modillons ornent la corniche. Ces éléments combinent plusieurs fonctions : technique, décorative et symbolique. Les têtes affligées, les monstres grimaçants font peut-être référence au monde des peines infernales, tant craint par les chrétiens du Moyen Âge.
Les statues-colonnes, installées au-dessus de l’entrée, étaient conçues pour être visibles sur chaque face et ne sont probablement pas à leur place d’origine. Rien ne permet de dire à quel endroit elles étaient initialement.
LES GRADINS ET LA PLATEFORME, UN RAPPEL DU SAINT-SÉPULCRE ?
La salle supérieure conserve le plan octogonal observé à l’extérieur. Cinq degrés en gradins, disposés sur la voûte de la partie inférieure, créent une plateforme surélevée, autour d’un oculus à six lobes ouvert sur l’ancien ossuaire.
Cet aménagement a intrigué quelques auteurs. S’appuyant sur la fondation de la Maison-Dieu par un seigneur pèlerin revenant de Terre Sainte, l’Abbé Reix, sans jamais avoir vu ces degrés, pense qu’il s’agit d’une reproduction du Saint-Sépulcre de Jérusalem.
Portées par des pilastres, de hautes arcades encadrent les baies en plein cintre. La salle est couverte d’une voûte gothique Plantagenêt, en forme de dôme, relevant probablement du début du XIIIe siècle. Les ogives finement nervurées retombent sur de simples culots à colonnettes.
LE DÉCOR MÉDIÉVAL
Le décor peint médiéval a disparu sous les peintures en faux joints roses et jaunes réalisés en 1854. À cette date, Monseigneur Pie, évêque de Poitiers et bienfaiteur du Petit Séminaire, souhaite aménager cette salle en petite chapelle.
En 1840, le grand érudit poitevin Alphonse Le Touzé de Longuemar a observé très précisément ces peintures médiévales qu’il date alors du XIIIe siècle. Il les décrit dans son album archéologique de la Vienne en 1882. Ce décor était concentré sur les murs de la chapelle orientale.« Dans des compartiments étroits encadrés de colonnettes, était assis sur un trône, un personnage couronné. Vêtu d’une robe jaune et d’un manteau ocre rouge, chaque personnage tenait un vase à long col et un instrument de musique : rebec ou violon du Moyen Âge ». Il est probable que ces figures représentaient les Vieillards de l’Apocalypse. L’auteur évoque aussi la présence d’un Agneau divin encensé par les anges.
Le vestige des peintures médiévales est formé par un enduit ocre jaune à motif de faux joints rouges, peints à la base du mur sud-est. Ce dernier témoin du décor ancien a été découvert de 1981 à 1986, lors du dégagement des gradins de ce sol très original.
UN INTÉRIEUR À DOUBLE NIVEAU
1 et 2 . Modillons de la corniche de l’Octogone.
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Coupe de l’Octogone, d'après François Jeanneau.
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L’OCULUS
La forme polylobée de cette ouverture montre qu’elle devait rester visible. L’oculus apparaît comme un élément important de cet espace et l’aménagement semble conçu pour le mettre en valeur. Sa fonction primordiale, sans doute liturgique, au sein de l’édifice est évidente.
Il matérialisait peut-être la communication symbolique entre la chapelle, dédiée aux prières dites à l’attention des défunts, et l’espace réservé aux ossements des chrétiens.
L’OSSUAIRE
De plan circulaire, il est désigné aux XVIe et XVIIe siècles comme « charnier », terme usuel pour les ossuaires. Son organisation n’est malheureusement pas connue. En 1805, Siauve écrit très clairement que l’ossuaire est plein d’ossements qui dégagent une odeur insupportable.
Lors de l’installation du Petit Séminaire, on a voulu utiliser cette salle basse, comme laiterie ; les ossements ont alors été déménagés. Nous ignorons tout de leur destination.
En juin 1994, lors des fouilles archéologiques réalisées en prévision du chantier de restauration, des ossements humains erratiques ont été découvert à 50 cm de profondeur dans le sol de terre battue.
SA FONCTIONSituée au sein du cimetière, cette chapelle à double niveau a été utilisée pour recevoir les restes des chrétiens qui, dans l’attente de la résurrection, ne pouvaient, par manque de place, rester dans leur tombe. Au fil des générations, le cimetière trop plein devait être régulièrement vidé.
Loin d’être exhaustive, la présentation des différentes hypothèses et interprétations des auteurs à propos de l’Octogone, témoigne combien cet édifice original a intrigué les curieux, suscité la verve des écrivains férus d’histoire et d’architecture depuis deux siècles.
DOM DE MONTFAUCON
Le premier auteur connu qui s’intéresse à la chapelle octogonale de la Maison-Dieu est le moine bénédictin Bernard de Montfaucon, doyen de l’archéologie française. En 1724, il rédige un article et propose des dessins sur cet édifice dans son ouvrage intitulé : « Le culte des Grecs, des Romains, des Égyptiens et des Gaulois ».
Influencé par la forme octogonale, il voit dans la chapelle cimétériale « le temple gaulois le plus remarquable » parmi les édifices qu’il a répertoriés.
Ses dessins d’architecture, aussi fantaisistes que ses croquis des statues de l’entrée, sont cependant des documents intéressants. L’auteur dit lui-même qu’il reçut « les dessins envoyés par mes confrères de ce pays-là que j’ai depuis rectifiés sur des mémoires plus sûrs ». Est-ce dire que Montfaucon n’est jamais venu à Montmorillon ? Il est vrai que les conditions de voyage étaient difficiles au XVIIIe siècle !
Le moine bénédictin imaginait que la porte bouchée dans l’ossuaire, au sud-ouest, ouvrait
sur un souterrain. « Là commence un chemin large de plus d’une toise (…) qui conduit à la rivière, où peut-être les prêtes allaient se laver avant que d’exercer leurs fonctions, et par où ils pouvaient aussi mener leur victime ».
Malgré l’imagination de cet auteur, l’élévation et la coupe du monument qu’il nous propose, à considérer avec réserve, sont instructives : le clocher oriental était un mur-peigne indépendant de la toiture de la chapelle ; à l’ouest, seules quelques marches menaient à l’intérieur.
TEMPLE DRUIDIQUE ?
Convaincu qu’il s’agit d’un temple druidique, Montfaucon le qualifie « d’Octogone » et l’édifice perd alors son vocable chrétien dans le cercle des « savants antiquaires ». Cette croyance à l’antiquité de l’édifice provoque une conséquence inattendue à la fin du XVIIIe siècle : lors de la tourmente révolutionnaire, la Maison-Dieu subit le sort de tous les établissements religieux de France. Les moines Augustins sont dispersés, sauf un, le moine-chirurgien Aubry qui accueille les malades jusqu’en 1833. Les bâtiments sont alors laissés à l’abandon… sauf un. En 1793, le gouvernement révolutionnaire accorde des subsides pour la réparation de la toiture de l’Octogone. L’attribution d’une origine païenne au « temple gaulois » en est peut-être la raison.L’erreur de datation de Montfaucon a contribué à la célébrité de la chapelle octogonale.
CE QU’EN PENSENT LES AUTEURS
1. Vue intérieure avec les gradins.
2. L’escalier descendant à l’ossuaire.
3. L’ossuaire.
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Élévation et coupe de Bernard de Montfaucon.
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MILLIN ET SIAUVE
Quelques années après la Révolution française, deux nouveaux érudits s’intéressent à Montmorillon et à son Octogone. Le premier, Aubin-Louis Millin, professeur d’archéologie, suivi par Étienne-Marie Siauve, commissaire des guerres et membre de l’Académie Celtique, éliminent la proposition du bénédictin Montfaucon et restituent l’origine médiévale (1805).
GRAVURES DU XIXe SIÈCLEMalgré de nombreuses imprécisions, les gravures de Millin et Siauve montrent les trois marches devant la porte occidentale et prouvent la présence de cet accès axial avant la construction de l’escalier-perron de 1854.
Sur ces dessins, la toiture a les trois niveaux de pierres, tuiles et ardoises connus jusqu’en 1997, tandis que le clocher-mur oriental est déjà relié à la toiture pyramidale…
CLASSEMENT MONUMENT HISTORIQUE
Si celui-ci figure sur la première liste des monuments historiques classés en 1840, il est probable que le souvenir de sa possible ancienneté ait pesé dans le choix des inspecteurs malgré le démenti de Millin et Siauve en 1805.
CHAPELLE DES TEMPLIERS ?
Au cours du XIXe siècle, de nombreux auteurs se penchent sur le phénomène « Octogone ». Albert Lenoir, fils du créateur du Musée des Monuments Français y voit, de par sa forme octogonale, une construction due aux chevaliers du Saint-Sépulcre, comme la chapelle des Templiers de Laon, bâtie intentionnellement sur le plan de l’église de Jérusalem. Elie Lambert combat cette proposition, en 1954 seulement.
1. Portail et perspective vue du sud, selon Millin.
2. Coupe de l'Octogone par Étienne-Marie Siauve. 3. Entrée occidentale de l'Octogone.
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HYPOTHÈSE
D’où viennent ces mystérieuses statues ? Depuis quand sont-elles dans cette grande ouverture rectangulaire ? Aujourd’hui, il paraît évident que, sculptées sur deux ou quatre faces d’un pilier, ces quatre groupes de figures étaient destinés à être vus sans encombre à leur origine. Voici l’hypothèse la plus plausible : ne serait-ce pas des statues appartenant à la Maison-Dieu médiévale détruite pendant les guerres de Religion au XVIe siècle ? Ces statues-colonnes, la tête sous une arcade, auraient-elles porté la galerie d’un cloître disparu avant d’être mises en place au-dessus de la porte de l’Octogone lors des travaux du XVIIe siècle ? À ce jour, rien ne permet de confirmer cette hypothèse.
Au début du XVIIIe siècle, un mur intérieur masquait le revers. Montfaucon en 1724 n’a donc pas pu voir les figures à l’arrière, tandis qu’en 1805, Millin et Siauve, les ont dessinées.
DES DIVINITÉS GAULOISES ?
Pensant que l’Octogone était un temple druidique, le moine bénédictin Montfaucon y voyait des divinités gauloises ou des druides et druidesses.Malgré l’interprétation fantaisiste de ces trois érudits « archéologues » des siècles précédents, leurs dessins constituent des documents intéressants à comparer avec la réalité actuelle. Ils témoignent qu’en 1724, la femme de droite avait encore ses bras tandis que ceux-ci étaient déjà cassés en 1805. À cette date, l’inscription ROALI (incompréhensible déjà !) était encore visible sur le buste de l’évangéliste barbu, à droite de la femme aux serpents.
LA LUXURE
Siauve nous dit, en 1805, dans son « Précis d’un mémoire sur l’Octogone de Montmorillon et connu sous le nom du temple des druides » : « j’ai voulu mettre sous les yeux des savants et antiquaires de l’Europe, les dessins exacts de ces groupes (…) » teintés sans aucun doute de l’interprétation qu’il en faisait. Cet auteur voyait dans la femme aux serpents la représentation du jour, tandis que la femme aux crapauds était le symbole de la nuit. En effet, le « reptile ne sort du sein de la terre que lorsqu’elle est échauffée par les rayons du soleil, alors que le crapaud loge dans les caves humides et ne sort que la nuit (…) ».
Aujourd’hui, après analyse comparée de ces figures, elles n’offrent plus le même mystère. Ces deux femmes sont des représentations symboliques de la punition de la luxure en enfer.Ce thème iconographique, est très fréquent dans l’art roman.
La luxure apparaît dans l’art occidental (enluminures, peintures murales, sculptures…) au début du XIIe siècle. Mais c’est dès le IVe siècle que les textes l’évoquent. La « vision de Saint-Paul » montrait « les luxurieuses et les mères infanticides en proie aux serpents et aux crapauds de l’enfer ». Les reptiles ont souvent été l’image du mal et du vice et un corps nu représentait l’âme humaine.
LESSTATUESDEL’ENTRÉE
1. Dessins de Millin au XIXe siècle. L'évangéliste saint Jean et la sainte anonyme.
2. Dessins de Siauve au XIXe siècle. La femme aux serpents et l’évangéliste barbu.
3. Position des statues sur les quatre piliers.
4. Les groupes de statues au-dessus de la porte occidentale.
5. La punition de la luxure en enfer, ici avec les serpents.
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Femme aux crapauds
PILIER 1 PILIER 2 PILIER 3 PILIER 4
Femme aux serpents
Évangélistebarbu
ÉvangélisteÉvangélisteNord Sud
Évangélistesaint Jean
Ange VisitationEst : Revers
Ouest : Devant
Vierge
Sainteanonyme
Sainteanonyme
Sainteanonyme
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8 CJ
080 CJ
ogo CJ g
Détail de la sépulture 1 : rotation du crâne.
Fouilles de 1994.
LES ÉVANGÉLISTES
Les personnages masculins sont sans doute les quatre évangélistes. Saint Jean est reconnaissable car il est imberbe, le plus jeune ami du Christ, et il tient une coupe qui évoque le miracle de la coupe de poison donnée par Aristodème dans la légende dorée : « … Alors, l’apôtre prit la coupe et se fortifiant du signe de la croix, il avala tout le poison sans éprouver aucun mal, ce qui porta tous les assistants à louer Dieu ».
L’ANNONCIATION
Le thème de l’Annonciation, souvent illustré dans la sculpture romane, est présent à Montmorillon. Aujourd’hui, l’ange est visible au revers, la Vierge se situe sur une face interne (pilier 3).
LA VISITATION
Les deux figures s’enlaçant au revers du pilier 3 ne font aucun doute : il s’agit de la Visitation, les deux cousines, Marie et Elisabeth, enceintes l’une du Messie, l’autre de Jean-Baptiste s’étreignent avec tendresse « … le fruit de vos entrailles est béni ». Ces deux personnages sont essentiels dans l’art religieux car à l’origine de la vie humaine du Christ et donc, le début de la Rédemption. Scène secondaire de l’Incarnation, elle accompagne très souvent l’Annonciation, c’est la première reconnaissance de la vie du Christ par un être humain.
LES COSTUMES
Les détails vestimentaires sont d’un grand intérêt : outre leur beauté évoquant quelquefois le luxe, ils nous permettent de dater ces hauts reliefs. Les femmes portent le « bliaud » au long corsage étroitement lacé, avec une longue jupe ajustée aux hanches. La « chainse », chemise du dessous, apparaît à l’encolure de quatre femmes. Quelques-unes ont ces manches si démesurément longues qu’il fallait les nouer pour les empêcher de traîner sur le sol. Ces robes étaient portées par les aristocrates dans la seconde moitié du XIIe siècle. Les peintures de la crypte Saint-Catherine dans l’église Notre-Dame de Montmorillon, évoquent aussi cette mode vestimentaire.
Fermail, galons, ceinture… expriment le goût de luxe et de la coquetterie féminine dont le sculpteur s’est fait le témoin, comme sur tant d’autres décors romans visibles à Notre-Dame la Grande à Poitiers, Notre-Dame de la Couldre à Parthenay, par exemple.
Plusieurs campagnes de fouilles archéologiques ont été menées dans les années 1980-1990 et plus récemment en 2016.
DE 1981 À 1986
Philippe Durand, universitaire, natif de Montmorillon, obtient l’autorisation de la DRAC de dégager le système de gradins de la chapelle haute.Depuis bientôt deux siècles, ces gradins étaient cachés par un remblai apporté au début du XIXe siècle pour constituer un sol uniforme.Sondages et dégagements ont révélé que ce remblai s’est effectué en deux temps : les premières marches ont été recouvertes lors des travaux du XVIIe siècle. Effectivement, un document de 1639 nous dit bien que « la salle vient d’être carrelée ». Puis, au XIXe siècle, un second remblai a complètement recouvert la plateforme centrale et fait perdre à l’Octogone une partie de son originalité et de son intérêt architectural.Depuis 1986, cet emmarchement couvrant l’extrados de la coupole inférieure forme à nouveau le sol de la chapelle haute.
EN 1994
La deuxième campagne archéologique a eu lieu en 1994 (février et juin) par deux archéologues mandatés par le Service Régional d’Archéologie (DRAC) et François Jeanneau, architecte en chef des monuments historiques. Il s’agissait de
rechercher les niveaux des sols initiaux tant à l’intérieur dans l’ossuaire qu’à l’extérieur dans le cimetière.
Au sud-ouest, la porte, visible dans la crypte et décrite par Montfaucon comme le départ d’un souterrain, a été ouverte. Deux murs disposés en angle obstruent le passage et annulent toute proposition de sortie de ce type. Seule, une trace d’arrachement dans le mur au sous-sol laisse supposer l’ancienne présence d’un escalier latéral permettant la descente dans l’ossuaire par l’extérieur.
SÉPULTURES MÉDIÉVALESDes travaux ont été effectués au nord près de la chapelle orientale et au pied de l’escalier occidental. Dans cet espace réduit, huit sépultures ont été découvertes. Deux sont des inhumations en pleine terre, tandis que les autres sont des coffres funéraires. Les cuves des sarcophages, faites de pierres sèches posées de chant, sont couvertes de plusieurs dalles plus ou moins bien taillées liées entre elles par du mortier. Toutes les sépultures sont orientées ouest-est, la tête regardant vers l’est, obéissant à des rites funéraires précis. Le défunt est dirigé vers la lumière du soleil levant, symbole divin du renouveau.
Les enluminures médiévales témoignent de ces pratiques d’inhumations directement en pleine terre. Les défunts de Montmorillon avaient-ils été
ARCHÉOLOGIEET RITESFUNÉRAIRES
1. Marie et saint Jean.
2. Une sainte, non identifiée avec les détails de costumes.
3. Peintures murales de la crypte Sainte-Catherine, église Notre-Dame à Montmorillon, aux environs des années 1200.
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enterrés avec un linceul ? Dans des cercueils de bois ?Un seul mobilier a été découvert accompagnant un squelette. Celui-ci a pu être daté du XIIIe siècle grâce à une petite fiole de couleur orangé, contenant sans doute à l’origine de l’eau bénite.
2016
Dans le cadre du projet « Robuchon », un diagnostic archéologique a été mené dans l’enceinte de la Maison-Dieu. Plusieurs tranchées ont permis de repérer des sépultures tout autour de l’Octogone sur une superficie importante, dans la cour au nord de l’Octogone, à l’ouest et également au sud de la grange du XVIIe siècle. Des sépultures en coffrages, probablement médiévales, et des inhumations en pleine terre, datant sans doute de l’époque moderne, ont été mises au jour.
Des fouilles plus poussées permettraient notamment de déterminer plus précisément l’étendue de la zone funéraire, de définir les zones occupées à l’époque médiévale, à l’époque moderne et de mieux distinguer les individus.
UNE ZONE FUNÉRAIRE PRIVILÉGIÉE
La zone funéraire proche de l’Octogone, lieu de prière, était particulièrement recherchée pour les inhumations. Au Moyen Âge, les nécropoles ne sont plus, comme dans l’Antiquité, en dehors
des murs de la ville. Au contraire, les cimetières s’organisent peu à peu autour des églises, lieux de culte. Les familles des défunts recherchent les places les plus proches des lieux de prières. Dans l’espoir d’un au-delà heureux, la motivation essentielle est de bénéficier de la vertu des prières… Être enterré en terre chrétienne est un souci majeur dans le contexte médiéval où la religion a une si grande importance.
LA LITURGIE
Dans la chapelle octogonale, se pratiquait la liturgie des défunts. L’église Saint-Laurent servait aux offices monastiques quotidiens et autres cérémonies religieuses. Les vêpres des défunts se célébraient la veille de l’enterrement. Les funérailles proprement dites sont constituées de la levée du corps, des laudes, de la messe, de l’absoute (bénédiction du corps) et de la sépulture avec bénédiction de la tombe. Après la levée du corps dans la demeure du disparu, toutes ces cérémonies sont susceptibles d’être assurées dans une chapelle cimétériale, hormis la bénédiction de la tombe qui s’effectue au cimetière.Un chapelain, ou un prête de la paroisse, était spécialement nommé pour cet office. Ses revenus étaient assurés par les fondations des messes.Depuis le XIe siècle, la messe en mémoire de tous les défunts est célébrée le 2 novembre.
OSSUAIRES CHAPELLE FUNÉRAIRE CHAPELLE MORTUAIRE
Nous savons qu’il existe encore de très nombreuses chapelles de cimetières en Europe.La pratique de déplacer les ossements des défunts de leur tombe à un ossuaire, appelé aussi charnier, est attestée au cours du Moyen Âge. Les ossuaires, associés aux chapelles mortuaires, étaient donc très fréquents. Il y en avait une deuxième à Montmorillon, située dans le cimetière Saint-Martial, la chapelle Saint-Léger, détruite au XVIIIe siècle.
Chapelle funéraire pour inhumer un personnage important ou les membres d’une même famille, comme à Jouhet, chapelle mortuaire aménagée pour le culte des défunts, chapelle cimétériale située au sein d’un cimetière comme à Civaux... Toutes ces constructions architecturales prouvent l’attention que l’homme du Moyen Âge apportait à la mort et à la liturgie funéraire.
La mort perçue non comme une fin mais comme « passage » faisait l’objet de rites et de dévotions témoignant de la foi et de l’importance de la religion à cette époque.
D’AUTRESCHAPELLESCIMÉTÉRIALESDE FRANCEET DE NAVARRE
1. Sépulture 1, vue de l'Est. Fouilles de 1994.
2. Zone de fouilles en 2016. Des sépultures ont été découvertes au sud de la grange.
1. Chapelle Sainte-Catherine à Jouhet.
2. Chapelle Sainte-Catherine à Civaux.
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Quelques exemples d’autres chapelles de cimetière illustrent cette tradition médiévale.
La chapelle Sainte-Catherine de l’ancien cimetière, du XIIIe siècle, à Fontevraud (Maine-et-Loire), est un édifice à double élévation, la chapelle carrée surmontant un ossuaire circulaire.
La crypte ossuaire de Saint-Pierre de Royan (Charente-Maritime), de plan rectangulaire, se situe sous le transept de l’église.
La chapelle du cimetière des Templiers de Laon (Aisne) possède un seul étage. C’est également un octogone.
La petite chapelle rectangulaire de la Madeleine de Saint-Emilion (Gironde) est située dans un cimetière aujourd’hui au milieu des vignes ; datée du XIIIe siècle, le sol conserve de nombreuses sépultures.
La chapelle Saint-Clair de l’Aiguilhe du Puy-en-Velay (Haute-Loire) appartenait au cimetière des pauvres de l’hôpital Saint-Nicolas : octogonale, elle n’a qu’un seul niveau dont le décor se rapproche de celui de Montmorillon.
Les chapelles Sainte-Marie d’Eunate et du Saint-Sépulcre de Torres del Rio sont toutes les deux situées sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle (en Navarre). Appartenant
également à un cimetière depuis le XIIe siècle, elles sont octogonales. Les grandes arcades rythmant les murs rappellent celles de l’Octogone.
Tous ces édifices nous rappellent la fréquente destination funéraire ou commémorative de ces édifices octogonaux.
Ces quelques exemples montrent que la chapelle cimétériale de Montmorillon n’est pas la seule dans le contexte médiéval européen. Cependant, l’Octogone de Montmorillon reste un exemple exceptionnel de cette architecture funéraire. Toutefois, l’étude des chapelles à plan centré et de cimetière est loin d’être terminée.
ENTRE 1611 ET 1639Réfection de la toiture. Réconciliation de la chapelle par l’évêque de Poitiers le 17 juin 1638.
1724Un mur intérieur obstrue l’arrière de l’ouverture abritant les statues.
VERS 1745Construction des murs latéraux et de la toiture reliant le clocher-peigne oriental à la toiture de l’Octogone.
1793Réparation de la toiture.
DÉBUT DU XIXe SIÈCLEDéménagement des ossements accumulés pendant plusieurs siècles dans l’ossuaire.
1809Siauve fait détruire le mur à l’arrière des statues.
1805 OU 1809Après l’achat de la Maison-Dieu par l’Évêché, le Petit Séminaire installe dans la chapelle haute une salle d’étude pour les élèves : remblaiement des gradins au sol.
1838- 1840Inscription à l’inventaire des monuments historiques puis classement.
1843La clef de voûte de l’oculus menace : premier étaiement de bois.
1854Transformation de l’Octogone en chapelle à l’époque du Petit Séminaire. L’accès occidental est modifié : les marches axiales sont remplacées par un escalier latéral et un perron.Construction du mur de séparation avec la cour sud.Réouverture de la porte souterraine au sud-est pour descendre dans l’ancien ossuaire devenu « laiterie ».
LESTRANSFORMATIONSET RESTAURATIONSSUCCESSIVESDE L’OCTOGONE
1. Chapelle Saint-Clair de l'Aiguilhe au Puy-en-Velay.
2. Crypte ossuaire de Saint-Pierre de Royan. © Ville de Royan – A. Valli.
Vue intérieure de l'entrée avant les restaurations de 1997-1998.
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1858Installation des vitraux.
1877Le rapport de l’architecte Ruprich-Robert témoigne de la mauvaise couverture.
1881 À 1886Travaux de l’entreprise Simillon de Montmorillon : réparation sommaire de la charpente.
1904 ET 1912Intervention de l’architecte Déverin pour l’escalier intérieur menant à l’ancien ossuaire, rejointoiement de la toiture sud-ouest.
1982-1986Dégagement des remblais autour des gradins dans la salle haute par Philippe Durand.
1986-1987Première étude préalable par l’architecte en chef des monuments historiques, Pierre Bonnard, pour la restauration.
1991Un étaiement de bois posé par les services techniques municipaux soutient le claveau de l’oculus hexagonal (sol de la chapelle haute).
1994Février et juin : fouilles archéologiques menées par Marjorie Berbuto (DRAC) pour rechercher les niveaux de sols anciens.
1994-1995Étude préalable par l’architecte en chef des monuments historiques, François Jeanneau, responsable des travaux de restauration.
1997-1998Restaurations de François Jeanneau.
2016Fouilles archéologiques dans l'enceinte de la Maison-Dieu dans le cadre du projet « Robuchon ».
Responsable des travaux de restauration de l’Octogone entrepris en 1997, François Jeanneau, Architecte en Chef des Monuments Historiques de la Vienne, réfute la proposition séduisante mais hypothétique de ses prédécesseurs. Ceux-ci préconisaient de construire une flèche de pierre semblable à celle du clocher de l’église Saint-Laurent, située à quelques pas.Certes, les dispositions structurelles d’un arrachement sont très visibles dans le comble, au niveau de l’arase supérieure de la pyramide en pierre. Il faut donc admettre qu’une toiture de pierre prolongeait autrefois la pyramide tronquée actuelle. Toutefois, trop d’incertitudes subsistent : quelle en était la forme au sommet ? Comment se faisait la liaison avec la chapelle orientale et le clocher-mur ? A-t-elle été réalisée ?
21 OCTOBRE 1639
Par ailleurs, le procès-verbal de la visite du sénéchal royal à la Maison-Dieu le 21 octobre 1639, décrit assez précisément la toiture de cette époque : « … il a été fait une charpente neuve en forme de pyramide où il y a un clocher fait en dôme couvert d’ardoises et de plomb avec une lanterne pour y mettre une cloche et le reste couvert à tuiles et ardoises ».
ÉTAT DU XVIIe SIÈCLE
Cette information historique, conjuguée à l’analyse des éléments subsistants de la charpente, ont convaincu François Jeanneau que la restitution de l’état connu au XVIIe siècle était la meilleure solution.De plus, étant donnée la présence de l’immense bâtiment monastique classique, l’extérieur de la chapelle octogonale est en harmonie avec son environnement architectural.
LA RESTAURATION DE 1997-1998
1. Vue extérieure avant les restaurations.
2. Après les restaurations. 23
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1. Pietà, vitrail du XIXe siècle dans le chœur de l'Octogone.
2. Nervures de la voûte de la chapelle haute après restaurations de 1997-1998.
3. Proposition d'une flèche de pierre, dessin de Formigé, 1877.
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EXTÉRIEUR
La restauration de l'extérieur s'est ainsi déclinée : • Dépose des deux niveaux supérieurs de la toiture
pyramidale.• Restitution du dôme et du lanternon, selon le
modèle décrit dans le procès-verbal de 1639.• Suppression de la toiture du clocher oriental
pour lui redonner l’élégance d’un clocher-mur, séparé de la pyramide.
• Un escalier axial devant l’entrée remplace le perron latéral de 1854.
• Les pierres sont nettoyées, les joints de ciment éliminés.
• Un drainage périphérique recueille les eaux de ruissellement.
• Suppression des murs de clôture au sud pour permettre de faire le tour complet du monument.
INTÉRIEUR
La restauration de l’intérieur a été également importante.• À l’intérieur de la salle haute, les peintures
murales médiévales observées par Le Touzé de Longuemar en 1840 sont très fragmentaires sous les décors de faux-joints roses et jaunes de 1854. Les enduits dégradés ont été piochés, les fissures rejointoyées, les lacunes comblées avant le passage d’un épais badigeon de chaux grasse pour harmoniser les surfaces murales et les voûtes.
• Les dégagements archéologiques (1981-1986) ont mis au jour le système de gradins sur extrados de la coupole de l’ossuaire ; ces derniers ont été restitués face à l’entrée, en remplacement de l’escalier du XIXe siècle.
• Un carrelage de terre cuite couvre le sol, plateforme et pourtour des marches.
• L’oculus polylobé a été consolidé et le claveau, dangereusement affaissé, a été remonté.
• L’ancien ossuaire est visible à travers la grille de ferronnerie posée sous l’oculus, à l’intrados, pour garder l’effet de « trou » dans le sol.
• L’oculus de la voûte Plantagenêt est ouvert pour laisser apercevoir la charpente.
1594Charnier.
1611Chapelle Saint-Jean et charnier.
1638-1656Citation de Notre-Dame de Lorette.
1724Montfaucon y voit un temple gaulois (de l’époque celtique).
1766Chapelle Saint-Sépulcre.
1793« Temple », restauration par le gouvernement révolutionnaire.XVIIIe siècle : Dom Fonteneau cite le vocable de Notre-Dame de Lorette.La déploration du Christ, statue en terre cuite du XVIIe siècle conservée aujourd’hui à l’église Notre-Dame de Montmorillon, était alors située dans le chœur de l’Octogone. Elle a été restaurée en 1996.
1805Siauve signale que l’ossuaire est plein d’ossements qui exhalent une odeur insupportable.
1805 OU 1809L’emmarchement du 1er étage est remblayé pour installer une salle d’étude destinée aux séminaristes dans la chapelle haute.À cette même époque, sans doute, l’ossuaire est vidé de ses nombreux ossements car le Petit Séminaire utilise la salle basse comme « laiterie » (chambre froide).
1809Albert Lenoir décrit l’Octogone comme une « chapelle des templiers ».
1837Dans le dossier de subvention attribuée par le Préfet de la Vienne, on trouve l’appellation « temple » sans doute toujours sous l’influence de Montfaucon.
1838-1939Notre-Dame de Pitié.
1840Classement au titre des Monuments Historiques de la « Chapelle Octogonale ».
1898Chapelle du Saint-Sépulcre transformée en chapelle pour le Séminaire.
XXe – XXIe SIÈCLESDepuis la fermeture du Petit Séminaire, la maison de retraite a utilisé les bâtiments monastiques du XVIIe et les constructions du XIXe jusqu’en 2009. La chapelle octogonale a perdu à nouveau sa fonction religieuse. Désormais affectée au tourisme culturel, elle est nommée l’Octogone de Montmorillon.
MYTHES ET FONCTIONS DE L’OCTOGONE À TRAVERS LES SIÈCLESCette chapelle à double élévation a changé d’usages et de vocables au fil des siècles. À travers les documents d’archives et les analyses des différents auteurs, nous pouvons connaître les dédicaces et usages successifs affectés à cet édifice.
1. L'ancien escalier occidental construit au XIXe siècle.
2. La toiture en cours de restauration.
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Déploration du Christ du XVIIe siècle, aujourd’hui conservée dans l'église Notre-Dame.
Crédit photo Gilles Beauvarlet - Inventaire général du patrimoine culturel de Nouvelle-Aquitaine. 2928
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BIBLIOGRAPHIE
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- DURAND Philippe, Octogone, sauvetage urgent, Bulletin de liaison et d’information de l’association des archéologues du Poitou-Charentes, Direction des Antiquités, n°15, 1986.
- DURAND Philippe, Octogone, sauvetage urgent, Bulletin de liaison et d’information de l’association des archéologues du Poitou-Charentes, Direction des Antiquités, n°16, 1987.
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- MONFAUCON Bernard de, Le culte des Grecs, des Romains, des Egyptiens et des Gaulois. Supplément expliqué et représenté en figures, tome II, Paris, 1724.
- PLAULT Michel, Les lanternes des morts, Edition Brissaud, 1989.
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- TREFFORT Cécile, À réveiller les morts : la mort au quotidien dans l’Occident médiéval, Presses Universitaires de Lyon, 1993.
Auteurs : Marie-Gabrielle Giroire à partir du mémoire de maîtrise de Corinne Magré, adapté par Béatrice Guyonnet pour cette réédition.
Crédits photographiques : Marjorie Berbuto, Gilles Beauvarlet - Inventaire général du patrimoine culturel de Nouvelle-Aquitaine, Alain Buchet, Club photo vidéo de Saulgé, Béatrice Guyonnet, Jacky Mercier, Momentum Prod, Jean-Louis Rommevaux.
Cartes postales anciennes : Collections Gaston Touraine.
Réalisation graphique : Priscilla Saule.
Vue sud-est de l'Octogone et du clocher-mur.
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La Communauté de communes Vienne & Gartempe appartient au réseau national des Villes et Pays d’art et d’histoireLe Ministère de la Culture attribue le label Ville ou Pays d’art et d’histoire aux collectivités locales qui mettent en œuvre des actions d’animation et de valorisation de leur architecture et de leur patrimoine. De la préhistoire à l’architecture du XXIe siècle, les villes et pays mettent en scène le patrimoine dans sa diversité. Aujourd’hui un ré-seau de 196 villes et pays vous offre son savoir-faire dans toute la France.
Laissez-vous conter le Pays d’art et d’histoire Vienne & Gartempe...…en compagnie de l’animatrice de l’architecture et du patrimoine ou bien d’un guide conférencier agréé par le Ministère de la Culture. Le guide vous accueille. Il connaît toutes les facettes de Vienne & Gartempe et vous donne des clefs de lecture pour comprendre l’histoire et le patrimoine du Pays. La Communauté de communes Vienne & Gartempe, Pays d’art et d’histoire, conçoit un programme de visites et d’animations du patrimoine valorisant l’ensemble du Pays.
Si vous êtes en groupeVienne & Gartempe vous propose des visites toute l’année sur réservation. Renseignements auprès de la Communauté de communes Vienne & Gartempe.
À proximitéN’hésitez pas à découvrir Poitiers, Cognac, Thouars, Parthenay, Rochefort, Saintes, Royan, Limoges, l’Île de Ré, le Pays Confolentais, le Pays Mellois, Angoulême et l’Angoumois, le Pays Châtelleraudais, le Pays des Monts et Barrages, qui bénéficient également de ce label.
RenseignementsCommunauté de communes Vienne & Gartempe Maison des ServicesBéatrice GUYONNET, animatrice de l’architecture et du patrimoine6, rue Daniel Cormier - BP 2001786 502 MONTMORILLON CedexTél. 05 49 91 07 53Fax 05 49 91 30 [email protected]
@PAHVienneGartempe
Document réalisé par la Communauté de communes Vienne & Gartempe avec le soutien financier de la DRAC Nouvelle-Aquitaine, du Conseil Régional Nouvelle-Aquitaine et du Conseil Départemental de la Vienne.
« IL A ÉTÉ FAIT UNE CHARPENTE NEUVE EN FORME DE PYRAMIDE OÙ IL Y A UN CLOCHER FAIT EN DÔME COUVERT D’ARDOISES ET DE PLOMB AVEC UNE LANTERNE, POUR Y METTRE UNE CLOCHE ET LE RESTE COUVERT À TUILE ET À ARDOISES ».Procès verbal de 1639.
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