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1 CRIDON Nord-Est FORMATION Printemps 2010

FORMATION Printemps 2010 - CRIDON NORD-EST : … ·  · 2010-03-166 Art. 775 al. 2 C. civ « Les héritiers de celui qui décède sans avoir opté exercent l'option séparément,

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CRIDON Nord-Est

FORMATION Printemps 2010

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1ÈRE PARTIE : Questions de successions

Par Claire PEUBLE,Consultante au CRIDON Nord-Est,

Chargée d’enseignement à la Faculté de droit de DOUAI

&Frédéric VAUVILLE,

Professeur agrégé des universités, Conseiller scientifique du CRIDON Nord-Est

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Cas n°1 :

Par Claire PEUBLE

Conjoint survivant décédé sans avoir accepté le bénéfice d’une donation entre époux

Vous êtes chargé de procéder au règlement de la succession d’une dame, décédée en 2009, veuve depuis quelques mois, qui laisse pour lui succéder trois enfants issus d’une première union.

Vous vous apercevez que Madame avait vocation à bénéficier, au décès de son mari, d’une donation entre époux « trois branches »

Cependant, aucun acte d’option n’a été réalisé lors du règlement de la succession de Monsieur. Quel sort réserver à cette donation ?

1ER RÉFLEXE :

. Acceptation tacite ?

SI PAS D’ACCEPTATION TACITE :

2ÈME RÉFLEXE :

. Se référer à l’acte de donation : prévoit-il que l’option entre l’une des trois branches sera réservée exclusivement au donataire ?

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Art. 775 al. 2 C. civ

« Les héritiers de celui qui décède sans avoir opté exercent l'option séparément, chacun pour sa part. »

Cette solution est confirmée par un arrêt du 1er juillet 2009 qui réaffirme une transmissibilité passive de l’option sauf clause contraire

La donation est caduque

L’option est transmise aux ayants droit. (art. 775 al. 2 Civ. ancien art. 781 du même C.)

DÉCÈS

DU CONJOINT SURVIVANT SANS AVOIR OPTÉ

L’acte de donation réserve l’option entre l’une des 3 quotités permises par l’article 1094-1 du Code civil exclusivement au donataire

L’acte de donation ne prévoit rien

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COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du 1 juillet 2009N° de pourvoi: 08-16851 Publié au bulletin

RejetM. Bargue, président M. Rivière, conseiller apporteur M. Legoux, avocat général SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu que Marcel X... est décédé le 7 février 2000, en laissant pour lui succéder Erge Y..., sa seconde épouse, et Mmes Sylvie D... et Françoise Z..., ses filles issues de son premier mariage ; que, par acte notarié du 10 juillet 1989, il avait fait donation à son épouse de “ la plus forte quotité disponible entre époux en vigueur au jour du décès, soit en pleine propriété seulement, soit en pleine propriété et usufruit, soit en usufruit seulement au choix de l’épouse survivante “ avec stipulation que “ le choix entre l’une ou l’autre de ces donations appartiendra au survivant seulement “ ; que Erge Y... est décédée le 29 juin 2002, en laissant pour lui succéder M. A..., son fils né d’une première union, sans avoir exercé l’option prévue à l’acte du 10 juillet 1989 ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. A...fait grief à l’arrêt confirmatif attaqué (Besançon, 19 mars 2008) d’avoir dit qu’il ne pouvait revendiquer aucun droit dans la succession de Marcel X... en exécution de l’acte de donation du 10 juillet 1989, alors, selon le moyen :

1° / que, si le conjoint gratifié n’a pas opté de son vivant pour l’une des quotités disponibles entre époux, son héritier, qui dispose de tous ses droits, peut le faire dans les conditions où lui-même en avait la faculté ; qu’en jugeant que, par exception, la clause de l’acte de donation stipulant que l’exercice de ce droit d’option à l’épouse survivante “ seulement “ excluait qu’elle soit transmissible à son héritier, M. A..., quand l’héritier de l’épouse

gratifiée était fondé à exercer l’option de caractère patrimonial dont disposait son auteur, la cour d’appel a violé les articles 724, 781 et 1094-1 du code civil ;

2° / qu’en toute hypothèse, le droit d’option prévu à l’article 1094-1 du code civil au bénéfice du conjoint survivant constitue un droit patrimonial qui est transmissible à ses héritiers après son décès, en cas de non-exercice ; qu’en jugeant que, par exception, la clause de l’acte de donation stipulant que l’exercice de ce droit d’option à l’épouse survivante “ seulement “ excluait qu’elle soit transmissible à son héritier, M. A..., quand une telle clause a manifestement pour objet d’éviter qu’un autre que la donataire ou son héritier, qui est le continuateur de sa personne, n’exerce ce droit d’option en méconnaissance de ses intérêts, ce qui pourrait être le cas des créanciers de la donataire, de sorte que M. A...pouvait opter pour une part en pleine propriété des biens dépendant de la succession de Marcel X... et qu’il avait donc la qualité d’héritier et d’indivisaire, la cour d’appel a dénaturé l’acte du 10 juillet 1989 et a ainsi violé l’article 1134 du code civil ;

3°/ qu’en toute hypothèse, les parties ne peuvent déroger au principe d’irrecevabilité des donations, ni stipuler une clause de retour en dehors des hypothèses prévues à l’article 951 du code civil ; qu’en affirmant que les parties avaient entendu réserver à la donataire l’exercice du droit d’option, de sorte qu’à défaut d’un tel exercice avant le décès de la donataire, la donation ne pouvait développer un quelconque effet, la cour d’appel a conféré à cet acte un caractère révocable et a attaché à cette stipulation des conséquences identiques à celles produites par une clause de retour, en dehors des hypothèses où celle-ci est admise, en violation des articles 894 et 951 du code civil ;

Mais attendu que, si le droit d’option prévu à l’article 1094-1 du code civil revêt un caractère patrimonial et est transmissible aux héritiers du conjoint gratifié, décédé sans avoir effectué un choix, il en est autrement lorsque l’acte de donation stipule que l’exercice de ce droit appartiendra au survivant seulement, une telle clause excluant la transmissibilité du droit ; qu’ayant relevé que le droit d’option appartenait au survivant seulement et que Erge Y... était décédée sans l’avoir exercé, la

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cour d’appel en a exactement déduit que la donation était caduque ; que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le second moyen, pris en ses trois branches, ci-après annexé :

Attendu que M. A...fait encore grief à l’arrêt d’avoir dit qu’occupant sans droit ni titre de l’immeuble successoral il était redevable d’une indemnité d’occupation qui sera évaluée par le notaire chargé de la succession ;

Attendu, d’abord, qu’ayant relevé, hors toute dénaturation, qu’il résultait des écritures de M. A...que celui-ci avait occupé l’immeuble successoral depuis la date du décès de sa mère jusqu’à celle où il avait remis les clés au notaire liquidateur, la cour d’appel en a justement déduit qu’il était redevable d’une indemnité d’occupation, laquelle réparait le préjudice résultant de la privation de jouissance du bien ;

Attendu, ensuite, qu’ayant, dans ses conclusions d’appel, sollicité que le montant de l’indemnité d’occupation soit évoqué devant le notaire liquidateur, M. A...n’est pas recevable à présenter devant la Cour de cassation un moyen incompatible avec ces écritures ;

D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. A...aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. A...

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR dit que Monsieur Alexandre A...ne peut revendiquer aucun droit dans la succession de Marcel X... en exécution de l’acte de donation du 10 juillet 1989 ;

AUX MOTIFS PROPRES QU’il n’est pas possible d’envisager, en fait comme en droit, une solution différente de celle du tribunal, qui en l’état des pièces qui lui ont été communiquées, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et une juste application de la loi, en ce qui concerne l’absence de qualité d’héritier et d’indivisaire ; qu’il sera seulement ajouté que Alexandre A...est mal fondé à soutenir sa qualité à procéder à l’option de l’époux survivant (en pleine propriété, en pleine propriété et usufruit, en usufruit seulement) qui, aux termes mêmes de l’acte de donation établi par Marcel X..., appartient au survivant seulement ; qu’il est constant que l’épouse de Marcel X..., Ergé B...Y... , n’a pas opté de son vivant, et que ce droit n’était pas transmissible ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Marcel X... avait consenti à son épouse, par acte authentique du 10 juillet 1989, une donation en cas de survie ; qu’en cas d’existence d’enfant au décès du donateur, ce qui fut le cas, la donation a été stipulée porter « sur la plus forte quotité disponible entre époux en vigueur au jour du décès, soit en pleine propriété seulement, soit en pleine propriété et usufruit, soit en usufruit seulement au choix de l’épouse survivante » ; que l’acte de donation ajoute aussitôt après ce qui précède « Le choix entre l’une ou l’autre de ces donations appartiendra au survivant seulement » ; que la donataire est décédée en 2002 sans avoir exprimé formellement son choix ; que son fils, en sa qualité d’héritier prétend pouvoir le faire à sa place, l’option étant selon lui transmissible, et sa mère n’ayant nullement opté, il souhaite quant à lui une part en pleine propriété ; que pour les demanderesses, Monsieur A...ne saurait exercer l’option dans la mesure où sa mère l’aurait déjà exercée tacitement en restant occupante de l’immeuble d’habitation dépendant de la succession de son mari, immeuble propre au défunt, ce qui traduirait une volonté certaine de bénéficier de la donation sous forme d’usufruit ; que si le droit d’option ouvert au donataire est en principe transmissible aux héritiers du gratifié, il est loisible aux parties à l’acte de donation d’exclure cette faculté ; qu’en mentionnant dans l’acte de donation que la gratifiée aurait le choix d’opter pour la quotité disponible sous la forme qu’elle préférerait, mais que ce choix n’appartiendrait qu’à elle seule, les donateur et

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donataire acceptant, ont voulu de façon non équivoque réserver à la seule donataire, à l’exclusion de tous autres, la faculté d’opter pour telle ou telle forme de donation ; qu’il s’ensuit que Monsieur A..., tout héritier de sa mère qu’il est, ne saurait exercer ce choix ; qu’en conséquence, Monsieur A...ne saurait avoir de droits sur les biens composant la succession de Marcel X... qu’autant que sa mère aurait opté pour une part en pleine propriété, ce qui n’est soutenu par aucune des parties ; que la conséquence de l’absence d’option exercée par la gratifiée ou exerçable par son héritier est que l’objet de la libéralité est indéterminable et donc que la donation est caduque ;

1) ALORS QUE si le conjoint gratifié n’a pas opté de son vivant pour l’une des quotités disponibles entre époux, son héritier, qui dispose de tous ses droits, peut le faire dans les conditions où lui-même en avait la faculté ; qu’en jugeant que, par exception, la clause de l’acte de donation stipulant que l’exercice de ce droit d’option à l’épouse survivante « seulement» excluait qu’elle soit transmissible à son héritier, Monsieur A..., quand l’héritier de l’épouse gratifiée était fondé à exercer l’option de caractère patrimonial dont disposait son auteur, la Cour d’appel a violé les articles 724, 781 et 1094-1 du Code civil ;

2) ALORS QUE, en toute hypothèse, le droit d’option prévu à l’article 1094-1 du Code civil au bénéfice du conjoint survivant constitue un droit patrimonial qui est transmissible à ses héritiers après son décès, en cas de non-exercice ; qu’en jugeant que, par exception, la clause de l’acte de donation stipulant que l’exercice de ce droit d’option à l’épouse survivante « seulement » excluait qu’elle soit transmissible à son héritier, Monsieur A..., quand une telle clause a manifestement pour objet d’éviter qu’un autre que la donataire ou son héritier, qui est le continuateur de sa personne, n’exerce ce droit d’option en méconnaissance de ses intérêts, ce qui pourrait être le cas des créanciers de la donataire, de sorte que Monsieur A...pouvait opter pour une part en pleine propriété des biens dépendant de la succession de Monsieur C...et qu’il avait donc la qualité d’héritier et d’indivisaire, la Cour d’appel a dénaturé l’acte du 10 juillet 1989 et a ainsi violé l’article 1134 du Code civil ;

3) ALORS QU’en toute hypothèse, les parties ne peuvent déroger au principe d’irrecevabilité des donations, ni stipuler une clause de retour en dehors des hypothèses prévues à l’article 951 du Code civil ; qu’en affirmant que les parties avaient entendu réserver à la donataire l’exercice du droit d’option, de sorte qu’à défaut d’un tel exercice avant le décès de la donataire, la donation ne pouvait développer un quelconque effet, la Cour d’appel a conféré à cet acte un caractère révocable et a attaché à cette stipulation des conséquences identiques à celles produites par une clause de retour, en dehors des hypothèses où celle-ci est admise, en violation des articles 894 et 951 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire)

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif d’AVOIR dit que Monsieur Alexandre A..., occupant sans droit ni titre de l’immeuble successoral, est redevable d’une indemnité d’occupation qui sera évaluée par le notaire chargé de la succession ;

AUX MOTIFS QU’il résulte des écritures de Alexandre A...que ce dernier a occupé l’immeuble successoral du décès de sa mère jusqu’au 10 mars 2003, date à laquelle il a rendu les clefs au notaire ; qu’en l’absence de toute qualité d’héritier et indivisaire, Alexandre A...a occupé l’immeuble sans droit ni titre et est redevable à cet effet d’une indemnité d’occupation, qu’il appartiendra au notaire d’évaluer ;

1) ALORS QU’en affirmant qu’il résultait des écritures de Monsieur A...qu’il avait occupé l’immeuble successoral du décès de sa mère jusqu’au 10 mars 2003, quand celui-ci contestait avoir occupé l’immeuble litigieux et soutenait n’avoir eu les clés en sa possession que dans l’objectif d’assurer l’entretien des lieux, la Cour d’appel a dénaturé ses écritures, déposées le 22 février 2007, et a ainsi violé l’article 1134 du Code civil ;

2) ALORS QU’en toute hypothèse le versement d’une indemnité d’occupation par l’occupant sans droit ni titre suppose non seulement qu’il se soit fautivement maintenu dans les lieux, mais aussi que son attitude ait été à l’origine d’un préjudice ; qu’en condamnant Monsieur A...au payement d’une indemnité d’occupation sans rechercher, ainsi

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qu’elle y était invitée (conclusions d’appel de Monsieur A..., spéc. p. 27, pénultième § et s.), si la prétendue occupation des lieux avait été à l’origine d’un quelconque préjudice, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1382 du Code civil ;

3) ALORS QU’en toute hypothèse il appartient au juge de trancher la contestation dont il est saisi ; qu’en condamnant Monsieur A...à payer une indemnité d’occupation, « qu’il appartiendra au notaire d’évaluer » (arrêt p. 3, pénultième §), quand cet officier public ne pouvait donner qu’un avis de pur fait sur les

éléments d’évaluation de cette indemnité et ne pouvait trancher la contestation s’étant élevée entre les parties, la Cour d’appel a méconnu son office et a ainsi violé les articles 4 et 1382 du Code civil, ensemble l’article 481 du Code de procédure civile.

Publication :

Décision attaquée : Cour d’appel de Besançon du 19 mars 2008

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Cas n°2 :

Par Frédéric VAUVILLÉ

Le défunt débiteur

Vous êtes chargé du règlement de la succession de deux époux communs en biens. Il s’avère qu’en 1986, une procédure judiciaire a été initiée à leur encontre et qu’un arrêt de Cour d’appel du 5 novembre 1990 a condamné solidairement les époux à payer une certaine somme d’argent. Cet arrêt leur a été signifié et un commandement de payer leur a été délivré en 1992 au vu de cet arrêt. Une hypothèque a été prise sur un bien de la communauté, mais l’inscription qui avait effet jusqu’en 2000 n’a pas été renouvelée et s’est donc trouvée périmée.

Les époux ont réglé régulièrement une somme de 1 000 F par mois pendant plusieurs années et ont stoppé les règlements sans qu’il ne leur soit ensuite plus rien réclamé.

Les héritiers vous demandent conseil quant à l’acceptation de la succession et s’interrogent en particulier sur la prescription extinctive de la dette.

Art. 2224 C. civ

« Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. »

Art. 2241 C. civ

« La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure. »

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Art. 2244 C. civ

« Le délai de prescription ou le délai de forclusion est également interrompu par un acte d'exécution forcée. »

Art. 26 Loi du 17 juin 2006

- Les dispositions de la présente loi qui allongent la durée d'une prescription s'appliquent lorsque le délai de prescription n'était pas expiré à la date de son entrée en vigueur. Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé.

- Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.

- Lorsqu'une instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation.

La présente loi sera exécutée comme loi de l'Etat.

Art. 792 C. civ.

Les créanciers de la succession déclarent leurs créances en notifiant leur titre au domicile élu de la succession. Ils sont payés dans les conditions prévues à l'article 796. Les créances dont le montant n'est pas encore définitivement fixé sont déclarées à titre provisionnel sur la base d'une évaluation.

Faute de déclaration dans un délai de quinze mois à compter de la publicité prévue à l'article 788, les créances non assorties de sûretés sur les biens de la succession sont éteintes à l'égard de celle-ci. Cette disposition bénéficie également aux cautions et coobligés, ainsi qu'aux personnes ayant consenti une garantie autonome portant sur la créance ainsi éteinte.

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ARRETE

Arrêté du 9 novembre 2009 relatif aux modalités de diffusion par voie électronique de la déclaration d’acceptation d’une succession à concurrence de l’actif net et des actes subséquents à celle-ci, et des décisions de désignation des mandataires successoraux par voie de justice La ministre d’Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, Vu le code civil, notamment ses articles 788, 790, 794 et 813-3 ; Vu le code de procédure civile, notamment ses articles 1335, 1337 et 1355 ; Vu le décret n° 2005-1073 du 31 août 2005 relatif à la rémunération des services rendus par la Direction des Journaux officiels,

ARRÊTÉ :

Article 1

La publicité par voie électronique au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC) de la déclaration d’acceptation d’une succession à concurrence de l’actif net et des actes subséquents à celle-ci ainsi que de la décision de nomination par voie de justice d’un mandataire successoral, prévues par les articles 788, 790, 794 et 813-3 du code civil et 1335, 1337 et 1355 du code de procédure civile, est effectuée sur le site www. bodacc. fr.

Article 2

Modifié par Décret n°2010-31 du 11 janvier 2010 - art. 3 (V)

Les informations nécessaires à la publication sont directement saisies en ligne par le greffe de la juridiction territorialement compétente ou par le mandataire successoral désigné par voie de justice, sur le site dédié de la direction de l’information légale et administrative, au moyen d’un formulaire électronique.

Article 3

Le présent arrêté est applicable dans les îles Wallis et Futuna.

Article 4

Cette prestation donne lieu à rémunération pour service rendu dans les conditions prévues par le décret susvisé du 31 août 2005.

Article 5

Le présent arrêté entre en vigueur à la même date que l’article 2 du décret n° 2009-1366 du 9 novembre 2009 relatif à la déclaration de renonciation à une succession et à la désignation en justice d’un mandataire successoral.

Article 6

Le présent arrêté sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 9 novembre 2009.

Michèle ALLIOT-MARIE

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Cas n°3 :

Par Claire PEUBLE

Assurance-vie

Vous devez régler une succession dans laquelle le défunt a souscrit un contrat d’assurance-vie en désignant comme bénéficiaires « ses héritiers ».

Voyons les solutions rendues en la matière selon les successibles laissés par le souscripteur :

Clause bénéficiaire : « Mes héritiers »

Existence d’un héritier réservataire et d’un légataire universel

Existence d’héritiers non réservataires et d’un légataire universel

CAPITAUX-DECES

½ Légataire universel

½ Enfant réservataire

CAPITAUX-DECES

Intégralement au légataire universel

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Existence d’héritiers légaux (2 frères et la mère)

art. L. 132-8 C. ass. :

« Les héritiers, ainsi désignés, ont droit au bénéfice de l’assurance en proportion de leurs parts héréditaires (…) »

Même solution si l’un d’eux renonce à la succession puisque l’article L. 132-8 du Code des assurances prévoit que : « Ils conservent ce droit en cas de renonciation à la succession ».

La clause bénéficiaire désigne : « Mes héritiers légaux »

Existence de 3 petits neveux et d’un légataire universel.

CAPITAUX-DECES

¾ aux 2 frères

¼ pour la mère

CAPITAUX-DECES

TROIS petits neveux

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COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du 4 avril 1978 N° de pourvoi: 76-12085 Publié au bulletin

RejetPDT M. Charliac, président RPR M. Guimbellot, conseiller apporteur AV.GEN. M. Gulphe, avocat général Demandeur AV. M. Lemanissier, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches : attendu qu’il résulte de l’arrêt attaque que dame d... était affiliée a la caisse autonome d’assurance-décès de la mutuelle générale des PTT dont le règlement prévoyait en son article 52 que les capitaux garantis seraient attribues soit au membre participant soit au bénéficiaire nommément désigné soit aux héritiers du participant ;

Que dame d... est décédée laissant quatre soeurs : dame z..., dame a..., dame c... et dame b... en l’état d’un testament dans lequel elle instituait cette dernière légataire universelle ;

Que la mutuelle, estimant que les quatre soeurs avaient droit chacune au quart du capital garanti, a verse a dame y..., dame a... et dame jardin la part qui, d’après elle, leur revenait, que dame b... a assigne la mutuelle en paiement de la totalité du capital décès dont elle se prétendait bénéficiaire en tant que légataire universelle ;

Attendu qu’il est reproché à la cour d’appel, qui a fait droit à cette demande, d’avoir dénaturé le testament de la défunte, lequel ne faisait aucune allusion au capital décès, et d’avoir méconnu les règles de la stipulation pour autrui qui imposaient aux juges d’appel, en l’absence de désignation par la défunte du bénéficiaire de l’assurance, de déclarer comme telles les héritières de la dame d... ;

Qu’il lui est également fait grief d’avoir méconnu la notion de legs universel, la désignation d’une personne comme légataire universelle n’excluant pas que certains biens soient attribues à d’autres personnes et de s’être référé sans utilité à l’article 1006 du code civil pour déclarer dame goudot e... x... du capital ;

Mais attendu que la cour d’appel a retenu a juste titre pour déclarer fondée la demande de dame b... que le terme “héritier” englobait tous les successeurs et qu’ayant par là-même admis que la légataire universelle devait être, en tant que seule héritière, considérée comme x... du capital garanti, elle a légalement justifie sa décision, abstraction faite de tous autres motifs critiques par le moyen qui sont surabondants ;

Et sur la troisième branche du moyen : attendu qu’il est encore reproché à l’arrêt d’avoir condamné la mutuelle au paiement de dommages-intérêts envers dame b... sans caractériser la faute qui aurait fait dégénérer en abus son droit d’ester en justice ;

Mais attendu que la cour d’appel relève que la mutuelle a spontanément réglé aux dames z..., a... et jardin des parts qu’elles ne réclamaient pas et que la résistance prolongée et dilatoire qu’elle a opposée aux demandes justifiées de la dame b... a cause un préjudice à cette dernière ;

Qu’en l’état de ces constatations elle a pu décider que la mutuelle avait commis une faute ouvrant droit a réparation ;

Que la troisième branche n’est pas mieux fondée que les précédentes ;

Par ces motifs : rejette le pourvoi forme contre l’arrêt rendu le 19 novembre 1975 par la cour d’appel de paris.

Publication : bulletin des arrêts cour de cassation chambre civile 1 n. 138 p. 110 Décision attaquée : cour d’appel paris (chambre 7 a ) du 19 novembre 1975

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Art. L 132-8 C. ass.

« Le capital ou la rente garantis peuvent être payables lors du décès de l'assuré à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés. Est considérée comme faite au profit de bénéficiaires déterminés la stipulation par laquelle le bénéfice de l'assurance est attribué à une ou plusieurs personnes qui, sans être nommément désignées, sont suffisamment définies dans cette stipulation pour pouvoir être identifiées au moment de l'exigibilité du capital ou de la rente garantis. Est notamment considérée comme remplissant cette condition la désignation comme bénéficiaires des personnes suivantes :

-les enfants nés ou à naître du contractant, de l'assuré ou de toute autre personne désignée ; -les héritiers ou ayants droit de l'assuré ou d'un bénéficiaire prédécédé.

L'assurance faite au profit du conjoint profite à la personne qui a cette qualité au moment de l'exigibilité. Les héritiers, ainsi désignés, ont droit au bénéfice de l'assurance en proportion de leurs parts héréditaires. Ils conservent ce droit en cas de renonciation à la succession. En l'absence de désignation d'un bénéficiaire dans la police ou à défaut d'acceptation par le bénéficiaire, le contractant a le droit de désigner un bénéficiaire ou de substituer un bénéficiaire à un autre. Cette désignation ou cette substitution ne peut être opérée, à peine de nullité, qu'avec l'accord de l'assuré, lorsque celui-ci n'est pas le contractant. Cette désignation ou cette substitution peut être réalisée soit par voie d'avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l'article 1690 du code civil, soit par voie testamentaire. Lorsque l'assureur est informé du décès de l'assuré, l'assureur est tenu de rechercher le bénéficiaire, et, si cette recherche aboutit, de l'aviser de la stipulation effectuée à son profit. »

RM (AN) n°44814 de M. Marc Laffineur, (Union pour un Mouvement Populaire - Maine-et-Loire) publiée au JO le : 28/07/2009 page : 7515

Ministère interrogé > Justice Ministère attributaire > Justice et libertés (garde des sceaux) Rubrique > donations et successions Tête d'analyse > héritiers Analyse > définition

Question publiée au JO le : 24/03/2009 p. 2725 Réponse publiée au JO le : 28/07/2009 p. 7515 Date de changement d'attribution : 23/06/2009

TEXTE DE LA QUESTION

M. Marc Laffineur appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la définition de la notion d'« héritier » dans le code civil. Le code civil désigne par le terme « héritier » uniquement les héritiers légitimes ou naturels au sens de la filiation et du sang, les légataires étant considérés comme des « ayants droit ». Cependant l'interprétation donnée par

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les assureurs est souvent différente en matière de clause bénéficiaire des contrats d'assurance vie, certains se retranchant derrière l'article L 132-8 du code des assurances. Ainsi, dans un contrat d'assurance vie où les « bénéficiaires » désignent les « héritiers » et où la succession comprend à la fois des héritiers légitimes (enfants nés du mariage) et des légataires, selon la compagnie d'assurance, le bénéfice du contrat sera réparti soit entre les « héritiers », soit entre les héritiers et le ou les légataires. Il existerait donc une différence de traitement en matière de succession entre le code civil et le code des assurances. Aussi, il lui demande ce qu'elle entend prendre comme mesure à cet égard.

TEXTE DE LA RÉPONSE

Il n'y a pas lieu d'interpréter la notion d'héritier de manière différente selon qu'elle s'applique en droit des successions ou en droit des assurances, notamment pour l'application de l'article L. 132-8 du code des assurances relatif au contrat d'assurance vie. Cet article permet en effet à un héritier de bénéficier du capital décès soit lorsqu'il est nommément désigné comme bénéficiaire, soit lorsque le contrat comporte une clause mentionnant comme bénéficiaires les « héritiers ou ayants droit de l'assuré ou d'un bénéficiaire prédécédé ». Dans cette dernière hypothèse, l'adjonction du terme « ayant droit » permet d'englober non seulement les héritiers légaux mais aussi tous les successibles dont le légataire universel. En présence d'une telle clause, ces derniers ont donc vocation à bénéficier du capital décès sans que l'on puisse y voir une contradiction avec la notion d'héritier au sens du code civil. Lorsque les clauses bénéficiaires font uniquement référence aux « héritiers », les tribunaux privilégient une approche concrète afin de dégager l'intention du souscripteur. Ainsi, la Cour de cassation a pu estimer, dans un arrêt du 4 avril 1978, qu'en cas d'absence d'héritiers réservataires l'intégralité du montant du contrat d'assurance vie revient au légataire universel en tant que seul héritier (Cass. 1re civ., 4 avril 1978). Il n'est pas souhaitable de remettre en cause cette approche, qui seule permet de mieux prendre en compte la diversité des situations. En

revanche, il convient de rappeler que l'article L. 132-9-1 du code des assurances prévoit que le contrat comporte une information sur les conséquences de la désignation du ou des bénéficiaires et sur les modalités de cette désignation. Il appartient en conséquence à l'assureur de veiller à la parfaite adéquation entre les mentions figurant dans la clause bénéficiaire et les objectifs poursuivis par le souscripteur lors de la conclusion du contrat afin d'éviter toutes difficultés ultérieures d'interprétation.

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Cas n°4 :

Par Frédéric VAUVILLÉ

Le co-indivisaire taisant

Vous êtes chargé du règlement d’une succession comprenant notamment un immeuble d’habitation, une résidence secondaire, des terres agricoles et des valeurs mobilières. Le défunt laisse son conjoint survivant et quatre enfants. Alors que la vente de la résidence secondaire est souhaitée par trois des enfants et le conjoint, le dernier héritier « fait le mort »…

Quelle (s) solution (s) peut-on proposer pour parvenir à la vente ?

Art. 815-3 C. civ.

Le ou les indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis peuvent, à cette majorité :

1° Effectuer les actes d'administration relatifs aux biens indivis ;

2° Donner à l'un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers un mandat général d'administration ;

3° Vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l'indivision ;

4° Conclure et renouveler les baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal.

Ils sont tenus d'en informer les autres indivisaires. A défaut, les décisions prises sont inopposables à ces derniers.

Toutefois, le consentement de tous les indivisaires est requis pour effectuer tout acte qui ne ressortit pas à l'exploitation normale des biens indivis et pour effectuer tout acte de disposition autre que ceux visés au 3°.

Si un indivisaire prend en main la gestion des biens indivis, au su des autres et néanmoins sans opposition de leur part, il est censé avoir reçu un mandat tacite, couvrant les actes d'administration mais non les actes de disposition ni la conclusion ou le renouvellement des baux.

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Art. 815-4 C. civ.

Si l'un des indivisaires se trouve hors d'état de manifester sa volonté, un autre peut se faire habiliter par justice à le représenter, d'une manière générale ou pour certains actes particuliers, les conditions et l'étendue de cette représentation étant fixées par le juge.

A défaut de pouvoir légal, de mandat ou d'habilitation par justice, les actes faits par un indivisaire en représentation d'un autre ont effet à l'égard de celui-ci, suivant les règles de la gestion d'affaires.

Art. 815-5-1 C. civ.

Sauf en cas de démembrement de la propriété du bien ou si l'un des indivisaires se trouve dans l'un des cas prévus à l'article 836, l'aliénation d'un bien indivis peut être autorisée par le tribunal de grande instance, à la demande de l'un ou des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis, suivant les conditions et modalités définies aux alinéas suivants.

Le ou les indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis expriment devant un notaire, à cette majorité, leur intention de procéder à l'aliénation du bien indivis.

Dans le délai d'un mois suivant son recueil, le notaire fait signifier cette intention aux autres indivisaires.

Si l'un ou plusieurs des indivisaires s'opposent à l'aliénation du bien indivis ou ne se manifestent pas dans un délai de trois mois à compter de la signification, le notaire le constate par procès-verbal.

Dans ce cas, le tribunal de grande instance peut autoriser l'aliénation du bien indivis si celle-ci ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires.

Cette aliénation s'effectue par licitation. Les sommes qui en sont retirées ne peuvent faire l'objet d'un remploi sauf pour payer les dettes et charges de l'indivision.

L'aliénation effectuée dans les conditions fixées par l'autorisation du tribunal de grande instance est opposable à l'indivisaire dont le consentement a fait défaut, sauf si l'intention d'aliéner le bien du ou des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis ne lui avait pas été signifiée selon les modalités prévues au troisième alinéa.

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2ÈME PARTIE : Questions de successions

internationales

Par David BOULANGER,Directeur du CRIDON Nord-Est & du CFPN,

Maître de conférences à la Faculté de droit de Douai

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Cas n°1 :

Quels sont les principes civils applicables en droit commun lors du règlement d’une succession internationale ?

En effet, le notaire est de plus en plus souvent confronté à la situation d’un défunt de nationalité française ou étrangère, décédé domicilié en France ou hors de France et laissant des éléments d’actif successoral en France et hors de France.

a) Le droit international privé commun scissionniste

La loi du dernier domicile du défunt régit la succession mobilière

COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du lundi 30 octobre 2006 N° de pourvoi: 05-17849 Non publié au bulletin

RejetPrésident : M. ANCEL, président

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en ses cinq branches ci-après annexé :

Attendu que Jacques X..., est décédé en France le 14 août 2000, laissant pour lui succéder son fils, M. Gilles X..., né d'un premier mariage et

sa seconde épouse Mme Eliane Y..., qu'il avait épousée en Suisse en 1988, bénéficiaire d'une donation notariée reçue en France en 1988 et d'un testament olographe rédigé en 1987 ;

Que Mme Y... a assigné M. Gilles X... aux fins de liquidation partage des biens successoraux ;

Attendu que M. Gilles X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 19 mai 2005) d'avoir déclaré la loi française applicable aux biens immobiliers et aux biens mobiliers dépendant de la succession de son père, Jacques X... ;

Attendu que la cour d'appel a, d'abord, relevé que les immeubles dépendant de la succession étaient situés en France, puis, par motifs propres et adoptés, a souverainement estimé qu'il résultait de l'ensemble des circonstances de fait que le dernier domicile du défunt était fixé en France où il vivait avec sa seconde épouse et où était situé le principal de ses intérêts, et non en Suisse, pays avec lequel les

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éléments de rattachement étaient de pure circonstance et uniquement destinés à satisfaire à une réglementation administrative, de sorte que la loi française était applicable à sa succession mobilière ; que le moyen qui ne tend qu'à remettre en cause cette appréciation souveraine, ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Gilles X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne M. Gilles X... à payer à Mme Y... la somme de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente octobre deux mille six.

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (2e chambre civile, section B) du 19 mai 2005

La lex rei sitae régit la succession immobilière

COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du mardi 20 juin 2006 N° de pourvoi: 05-14281 Publié au bulletin

Cassation partielleM. Ancel, président M. Gueudet, conseiller rapporteur M. Cavarroc, avocat général SCP Choucroy, Gadiou et Chevallier, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Daniel X..., de nationalité française, est décédé à Paris le 23 octobre 2001, en laissant pour lui succéder, ses deux fils Alec et Guy X..., et sa seconde épouse Sylvia Y..., de nationalité américaine, avec laquelle il s'était marié le 28 novembre 1978 à New-York (Etats Unis d'Amérique) ; que les époux X... faisant l'objet d'un important redressement fiscal, l'épouse a par acte du 22 novembre 2001 déclaré renoncer à la succession de son mari ; que

selon acte de consentement à exécution du legs verbal et délivrance de legs du 12 décembre 2001, MM. Alec et Guy X... se sont engagés à verser à Mme X... qui l'a accepté, une rente viagère d'un montant annuel de 381 122,54 euros nette de frais et d'impôts ; que prétendant que son consentement avait été vicié, Mme X... a sollicité l'annulation de cette renonciation, la reconnaissance de ce qu'elle était mariée sous le régime matrimonial de la communauté de biens réduite aux acquêts, l'ouverture des procédures de comptes, liquidation et partage de la succession et de la communauté, et l'allocation de provisions à valoir sur ses droits dans les partages à intervenir ;

Sur les premier, deuxième, troisième, cinquième, sixième et neuvième moyens pris en leurs diverses branches, ci-annexés :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le quatrième moyen pris en ses trois branches :

Attendu que MM. Alec et Guy X... font grief à l'arrêt attaqué de les avoir déclarés tenus in solidum de verser à Mme X... une somme de 15 000 000 d'euros à titre d'avance en capital, sur les droits dans le partage de l'indivision post-communautaire alors, selon le moyen :

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1 / qu'en condamnant personnellement MM. Alec et Guy X... à payer à Mme Sylvia Y... une avance en capital à valoir sur ses droits dans le partage post-communautaire, qui devait être mise à la charge de l'indivision, la cour d'appel a violé l'article 815-11, dernier alinéa, du code civil ;

2 / qu'en prononçant une telle condamnation sans constater ni que l'indivision comprenait des fonds disponibles au moins égaux à cette somme, ni que dans le partage à intervenir Mme Y... aurait droit à une somme d'argent au moins égale à ce montant, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à se décision au regard de l'article 815-11, alinéa 4, du code civil ;

3 / qu'en constatant que le montant des liquidités existant au décès de M. Daniel X... ne dépassait pas 1 300 000 euros tandis qu'une dette fiscale de 7 612 705 euros avait du être acquittée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard de l'article 815-11, alinéa 4 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant souverainement constaté que MM. Alec et Guy X... s'étaient appropriés la totalité des biens dépendant de l'indivision post-communautaire et que les fonds disponibles étaient constitués de liquidités et de nombreuses oeuvres d'art aisément mobilisables évaluées à 42 985 000 euros, c'est sans violer l'article 815-11 du code civil, que la cour d'appel a déclaré que ceux-ci étaient personnellement tenus de payer l'avance demandée, pour le montant qu'elle a souverainement estimé, qui est inférieur à la part à laquelle elle pouvait prétendre ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli dans aucune de ses branches ;

Mais sur le septième moyen pris en sa première branche :

Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que pour déclarer MM. Alec et Guy X... tenus in solidum de verser à Mme X... une somme de 500 000 euros à valoir sur la liquidation de ses droits au titre de l'usufruit légal, l'arrêt retient qu'ils ont seuls joui du patrimoine successoral depuis l'ouverture de la succession sans que le titulaire de cet usufruit ait pu en bénéficier ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans préciser le fondement légal de cette condamnation, alors que Mme X... avait sollicité une provision d'une part en réparation du préjudice moral et matériel subi du fait de la privation de ses droits successoraux et d'autre part à titre d'avance sur les dits droits, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

Et sur le huitième moyen pris dans ses deux branches :

Vu l'article 3 du code civil ;

Attendu qu'après avoir ordonné l'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage de la succession de Daniel X..., l'arrêt donne mission au notaire commis à cet effet, d'établir un projet de partage tenant compte des biens meubles et immeubles situés tant en France qu'à l'étranger ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans appliquer, au besoin d'office, la règle de conflit de lois donnant compétence en matière de succession immobilière à la loi étrangère du lieu de situation des immeubles et rechercher si cette loi ne renvoyait pas à la loi française du dernier domicile du défunt, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu d'examiner la seconde branche du septième moyen :

REJETTE le pourvoi contre l'arrêt rendu le 24 février 2005 par la cour d'appel de Paris ;

CASSE et ANNULE mais uniquement en ce qu'il a condamné MM. Alec et Guy X... à verser une avance de 500 000 euros à valoir sur des droits de Mme X... dans le partage successoral à intervenir, et en ce qu'il a ordonné le partage et la liquidation des immeubles dépendant de la succession situés à l'étranger, l'arrêt rendu le 14 avril 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

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Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille six.

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris du 14 avril 2005

b) La qualification de la nature des biens et du domicile du défunt

La qualification lege fori :

Qualification des biens successoraux :

(STROGANOFF-SCHERBATOFF, TGI Seine, 12 janvier 1966, RC DIP 1967.120, note Y. LOUSSOUARN)

« C’est à la loi française qu’il y a lieu de recourir pour déterminer si des objets sont des immeubles ou des meubles et en déduire la loi qui régit leur dévolution ; qu’il n’est pas possible de qualifier les biens successoraux selon la loi du lieu de leur situation sous peine de donner compétence à cette loi alors qu’il s’agit précisément de dire laquelle est compétente »

Qualification de domicile attributif de compétence législative :

Référence au lieu du principal établissement de l’article 102 du Code civil.

Art. 102 C. civ.

c) La qualification du rapport Le bénéfice du rapport est attribué à la masse - mobilière ou immobilière - à laquelle la libéralité fait subir une déperdition. Le mécanisme est donc régi par la loi applicable à cette masse.

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Cf. Civ. I, 11 février 2009, n° 06-12140, ci-dessous

d) La réserve calculée par masse de biens

COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du mercredi 17 juin 2009 N° de pourvoi: 07-21718 Publié au bulletin

RejetM. Bargue, président Mme Monéger, conseiller rapporteur M. Sarcelet, avocat général SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Margot X... et M. Karl Y..., de nationalité allemande et domiciliés en Allemagne, ont eu cinq enfants : quatre filles Elisabeth, Margot, Rosemarie, Johanna Michaela, et un fils, Hartmut ; qu'ils ont acquis le 7 janvier 1966 un immeuble à La Roque-sur-Pernes (Vaucluse) ; que par un codicille du 12 août 1967 joint à son testament rédigé le 6 avril 1963, Margot X..., décédée le 28 octobre 1969, attribuait à chacun de ses enfants l'ensemble des biens lui appartenant, sauf l'immeuble édifié en France, spécifiant que " La maison de Provence doit appartenir en propriété à Elisabeth et Hartmut, les autres frères et soeurs ont le droit d'habitation " ; que par acte notarié passé en Allemagne le 3 décembre 1987, Karl Y... faisait donation à M. Hartmut Y... de la moitié indivise de l'immeuble situé en France ; qu'avant son décès intervenu en 1998, il avait renoncé à tout droit dans la succession de son épouse ; que le 30 janvier 1996, M. Hartmut Y... et sa soeur, Mme Johanna Michaela A..., ont conclu une transaction devant le juge du tribunal de grande instance de Bonn, aux termes de laquelle le droit d'habitation conféré à Michaela s'exercerait suivant des modalités

prévues dans la transaction, et expirerait le 24 septembre 1999 ;

Attendu que le 3 avril 2001, Mmes Elisabeth Y..., Margot Y..., épouse Z..., Rosemarie Y..., épouse B..., et Johanna Michaela Y..., épouse A..., ont assigné leur frère, M. Hartmut Y... devant le tribunal de grande instance de Carpentras au visa des articles 815 et suivants, 815-9, 843, alinéa 1, 860, 931, 970, 1339, 1340 du code civil ;

Sur les premier et troisième moyens :

Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à justifier de l'admission d'un pourvoi ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que M. Hartmut Y... fait grief à l'arrêt attaqué (Nîmes, 24 février 2006) d'avoir donné mission à l'expert de dire si les libéralités consenties par Margot X... et Karl Y... ont dépassé la quotité dont chacun d'eux pouvait disposer sur sa moitié indivise de l'immeuble, alors, selon le moyen, qu'en vertu de l'article 3 du code civil, dans une succession internationale, on doit tenir compte pour apprécier si la réserve héréditaire est atteinte, des avantages obtenus par le réservataire à l'étranger ; qu'en décidant en l'espèce que M. Hartmut Y... ne peut alléguer que les droits réservataires de ses soeurs n'ont pas été affectés par lesdites libéralités, compte tenu des biens qu'elles ont reçus dans la succession ouverte en Allemagne, la cour d'appel a violé l'article 3 du code civil et 1 du protocole n° 1 annexé à la Convention européenne des droits de l'homme ;

Mais attendu que la cour d'appel ayant justement retenu que l'objet du litige était limité aux droits successoraux des parties sur l'immeuble situé en France et que la loi internationalement compétente était la loi française, c'est selon cette loi que devait être déterminé le montant de la réserve héréditaire pour l'immeuble situé en France ; que le moyen n'est pas fondé ;

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PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le

président en son audience publique du dix-sept juin deux mille neuf.

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes du 14 février 2006

e) Le renvoi fonctionnel en matière immobilière

COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du mercredi 11 février 2009 N° de pourvoi: 06-12140 Publié au bulletin

CassationM. Bargue, président Mme Pascal, conseiller rapporteur M. Domingo, avocat général SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Vu l'article 3 du code civil ;

Attendu qu'en matière de succession immobilière, le renvoi opéré par la loi de situation de l'immeuble ne peut être admis que s'il assure l'unité successorale et l'application d'une même loi aux meubles et aux immeubles ;

Attendu que les époux Horace X... et Marie-Thérèse H... de Y... sont décédés respectivement en 1991 et 1989, laissant pour leur succéder leurs trois fils, Charles, Horace et Richard ; que la succession de Marie-Thérèse X... a été ouverte à Salies de Béarn ; que M. Richard X... a fait assigner ses frères devant le tribunal de grande instance de Pau, soutenant que la vente, le 24 octobre 1985, de deux immeubles situés à Majorque (Baléares) à

ces derniers par leurs parents constituait une donation déguisée ;

Attendu que pour juger que la vente du 24 octobre 1985 constituait une donation déguisée, rapportable, en valeur, à la succession de chacun des donateurs et fixer le montant de ce rapport, l'arrêt retient d'abord, par motifs adoptés, que si la règle de conflit applicable en matière successorale immobilière donne compétence à la loi du pays où est situé l'immeuble, en l'espèce la loi espagnole, celle-ci adopte le principe de l'unité de la succession, même en matière immobilière, et donne compétence à la loi nationale du défunt de sorte que la loi française est applicable à l'action ; puis, par motifs propres et adoptés, que l'acte de vente a été passé clandestinement, que, compte tenu de la différence entre le prix de vente et la valeur des immeubles à la date de la vente, une donation déguisée a été consentie sous couvert d'une vente ; enfin que la donation n'est pas nulle mais soumise à rapport ; Qu'en statuant ainsi, sans avoir constaté que Marie-Thérèse X... était de nationalité française alors que la loi française n'était compétente, par renvoi de la loi espagnole du lieu de situation des immeubles, que si elle était la loi nationale de la défunte, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, les arrêts rendus les 5 décembre 1995, 27 mai 2002 et 12 décembre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;

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Condamne M. Richard X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette toutes les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille neuf.

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau du 12 décembre 2005

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Cas n°2 :

Une personne décède domiciliée en France, où elle laisse divers biens meubles et immeubles, mais de peu de valeur. Toutefois, peu de temps avant son décès, le défunt avait acquis une maison en Belgique, au moyen d’un emprunt contracté auprès d’une banque belge, non encore remboursé. Or, il s’avère que, même si la maison était vendue, le prix serait insuffisant pour désintéresser le créancier belge. Comment convient-il d’appréhender ce passif dans le règlement de la succession du défunt ?

OBLIGATION À LA DETTE : chaque succession supporte la totalité du passif.

CONTRIBUTION À LA DETTE : le recours se ferait selon une loi unique qui serait celle du domicile du défunt.

Tribunal civil de première instance de PAPEETE, 7 mars 1975, RC DIP 1976, p. 674, note ANCEL

(Cf. Tribunal civil de première instance de PAPEETE, 7 mars 1975, RC DIP 1976, p. 674, note ANCEL : pour la liquidation du passif, les dettes de la succession sont soumises à une loi unique qui, eu égard au domicile du défunt et au lieu des contrats correspondants, est la loi française ; en conséquence, elles doivent être prélevées sur l’ensemble de la succession, la masse successorale française n’ayant à supporter qu’une part du passif proportionnelle à la fraction qu’elle représente par rapport à la valeur totale des diverses masses)

RESPONSABILITÉ DU NOTAIRE :

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COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du mardi 9 décembre 1997 N° de pourvoi: 95-18192 Publié au bulletin

CassationPrésident : M. Lemontey, président Rapporteur : M. Aubert, conseiller rapporteur Avocat général : M. Roehrich, avocat général Avocats : la SCP Boré et Xavier, M. Boullez., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Attendu que Ion Radulescu, citoyen roumain résidant en Suisse, est décédé à Genève en 1987, laissant des biens incluant des immeubles situés en France ; que M. Giudici, désigné par décision de la justice de paix du canton de Genève pour administrer la succession, a, en septembre 1987, mandaté M. X..., notaire, pour dresser la liste des biens immobiliers situés en France et procéder à leur évaluation ; qu'en décembre 1987, l'héritière identifiée en la personne de Mlle Alexandru, fille du de cujus, a été envoyée en possession et les frais de M. Giudici ont été évalués par la juridiction genevoise à 50 000 francs suisses ; que les décisions suisses ont reçu l'exequatur par un jugement du 4 avril 1991, qui a validé une saisie-arrêt pratiquée entre les mains de M. X... à hauteur de 200 000 francs français et qui a condamné l'héritière à payer à M. Giudici l'équivalent en francs français de la somme de 50 000 francs suisses ; que M. X... ayant alors indiqué qu'il ne détenait plus de fonds pour le compte de Mlle Alexandru, s'en étant déssaisi le 27 juin 1989, M. Giudici lui a réclamé le paiement de la somme qui lui était due ; que l'arrêt attaqué a accueilli cette demande ; Sur le premier moyen, pris en ses trois branches : Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir ainsi condamné, alors que, d'une part, en considérant que le notaire avait commis une faute en se dessaisissant des fonds, produits de la liquidation, au profit de l'héritière, pourtant seule en droit de les recevoir, la cour d'appel aurait violé l'article 1382 du Code civil ; que, d'autre part, en considérant que le notaire avait pu recevoir de M. Giudici mandat de retenir les fonds revenant à l'héritière, la cour d'appel aurait

violé le même article ; qu'enfin, en considérant que le notaire avait commis une faute en s'abstenant de prendre les garanties pour préserver la créance de M. Giudici, la cour d'appel aurait encore violé le même texte ; Mais attendu qu'ayant constaté que M. X... avait reçu mandat de M. Guidici pour faire l'inventaire des biens de Ion Radulescu, qu'il résultait de correspondances nombreuses que ce notaire n'ignorait pas l'existence d'un passif important en Suisse et que, malgré un avertissement du 13 avril 1989 précisant que le montant du passif n'était pas complètement connu, il s'était déssaisi de la totalité des fonds le 27 juin suivant, la cour d'appel, qui a justement énoncé que l'obligation faite par la loi française de procéder à la dévolution successorale des immeubles sis en France selon la loi française ne s'opposait pas à ce que le notaire prît toutes précautions nécessaires pour assurer la garantie de ce passif qui avait ainsi été porté à sa connaissance, a pu retenir une faute à la charge de cet officier public ; que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches ; Mais, sur le troisième moyen : Vu l'article 1382 du Code civil ; Attendu que, pour condamner M. X..., l'arrêt énonce que le préjudice subi par M. Giudici était établi dès lors qu'il ne pouvait être contraint d'exercer un recours compliqué et aléatoire en Roumanie, alors que, sans la faute du notaire, il pouvait être normalement payé de ses diligences ; Attendu, cependant, que seul est sujet à réparation le préjudice direct, actuel et certain ; qu'en se déterminant comme elle a fait, sans caractériser la perte définitive de la créance de M. Giudici, et donc l'existence d'un dommage actuel et certain, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le deuxième moyen : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 mars 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée. Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, du 16 mars 1995

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Cas n°3 :

Un acte de partage dressé par un notaire étranger et portant sur des immeubles situés en France et hors de France est-il efficace à l’égard des immeubles situés en France ?

COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du mercredi 19 novembre 2008 N° de pourvoi: 05-16203 Publié au bulletin

RejetM. Bargue, président Mme Monéger, conseiller rapporteur M. Domingo, avocat général Me Blanc, SCP Didier et Pinet, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que Yahia X... est décédé le 28 octobre 1974 à Tunis, en laissant des immeubles en Tunisie, en Algérie et en France ; qu'aux termes d'un acte dressé le 25 juin 1994 en Tunisie, par deux notaires, acte enregistré et produit aux débats dans sa traduction par un interprète assermenté près la cour d'appel de Tunis, les cinq héritiers X..., fils et filles du défunt, sont convenus de procéder au partage des biens de la succession ; qu'il a été attribué à M. Slimane X..., un appartement à Paris ; qu'en 2002, celui-ci a assigné son frère M. Mamhoud X... en expulsion de cet appartement et en paiement d'une indemnité d'occupation ;

Attendu que M. Mamhoud X... fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 23 mars 2005) d'ordonner son expulsion de l'appartement qu'il occupait à Paris et de le condamner au paiement d'une indemnité d'occupation, alors, selon le moyen, qu'un acte de partage amiable établi à l'étranger est dépourvu d'efficacité relativement à un immeuble situé en France et qu'il y a violation de l'article 3 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant fait application, du fait de la situation de l'immeuble en France, de l'article 819 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 23 mars 2006 autorisant un partage amiable lorsque tous les héritiers sont présents et capables, la cour d'appel a considéré à bon droit que l'acte de partage établi à l'étranger liait les parties ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ; Condamne M. Mamhoud X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille huit.

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris du 23 mars 2005

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Cas n°4 :

Les situations de couples dans l’ordre international font apparaître des hypothèses originales que le notaire Français doit savoir appréhender lors des règlements successoraux

a) Le « classique » bigame

Effet atténué de l’ordre public international

COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du jeudi 3 janvier 1980 N° de pourvoi: 78-13762 Publié au bulletin

RejetPdt M. Charliac, président Rpr M. Ponsard, conseiller rapporteur Av.Gén. M. Baudoin, avocat général Av. Demandeur : SCP Lyon-Caen Fabiani Liard, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt confirmatif attaque, que Larbi y... s'est marie en Algérie, en 1936, avec Zohra x..., et en a eu sept enfants ; qu'après s'être installe en France avec sa famille et y avoir acquis des immeubles, il est retourne en Algérie et y a épouse, en 1969, conformément a son statut personnel, Fatima z... dont il a eu deux enfants ; que, Larbi y... étant décédé en 1974, la cour d'appel a décidé que dame z... et ses deux enfants, de nationalité algérienne comme le défunt lui-même, étaient en droit de venir a

la succession des immeubles situes en France, en qualité d'épouse et d'enfants légitimes du défunt, au même titre que dame x... et ses sept enfants, également de nationalité algérienne, et en concours avec eux ;

attendu qu'il est fait grief a la cour d'appel d'avoir ainsi statue, alors que, d'une part, la loi française, applicable a la dévolution successorale des immeubles situes en France, ne reconnaît qu'une épouse légitime et n'admet parmi les ayants droit du défunt que cette épouse, de sorte que, selon le moyen, la deuxième épouse ne pouvait prétendre a aucune vocation successorale, quels que fussent son statut personnel et la régularité de son statut matrimonial, et alors que, d'autre part, lorsque, comme en l'espèce, la règle de conflit du for désigne, pour résoudre la question d'état des personnes, préalable a celle de dévolution successorale, une loi étrangère, en l'occurrence la loi algérienne, cette loi devrait être écartée, au nom de la conception française de l'ordre public international, en tant qu'elle valide un mariage polygamique et reconnaît au second conjoint et à ses enfants les qualités d'époux et d'enfants légitimes ;

Mais attendu que, d'une part, si la loi française régit la dévolution successorale des immeubles sis en France, la qualité de conjoint et l'établissement de la parente nécessaire pour le

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jeu de la dévolution successorale relèvent de la loi personnelle, ainsi que l'a énoncé à bon droit la cour d'appel ;

Et attendu que, d'autre part, la réaction a l'encontre d'une disposition de loi étrangère contraire a la conception française de l'ordre public n'est pas la même suivant qu'elle met obstacle a la création en France d'une situation juridique prévue par cette loi ou qu'il s'agit seulement de laisser acquérir des droits en France, sur le fondement d'une situation créée sans fraude à l'étranger en conformité avec la loi ayant compétence en vertu du droit international prive français, et qu'en particulier, en cas DE mariage polygamique régulièrement contracte à l'étranger conformément à la loi personnelle des parties, le second conjoint et ses enfants légitimes peuvent prétendre, en ces

qualités, concurremment avec le premier conjoint et ses propres enfants, exercer les droits reconnus par la loi successorale française, soit au conjoint survivant, soit aux enfants légitimes ; qu'il s'ensuit que l'arrêt attaqué est légalement justifié et que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi forme contre l'arrêt rendu le 22 février 1978 par la cour d'appel de PARIS.

Décision attaquée : Cour d'appel Paris (Chambre 2 B) du 22 février 1978.

b) Les couples homosexuels

• RM (S) n°20257 de M. Jean Louis Masson, (Moselle - NI) publiée dans le JO Sénat du 09/03/2006 - page 722

1°) DONATION ET RÉGIME MATRIMONIAL AUX PAYS-BAS ET EN FRANCE

Question écrite n° 20257 de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI) publiée dans le JO Sénat du 03/11/2005 - page 2829 Rappelle la question 16294

M. Jean Louis Masson attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le fait que sa question écrite n° 16294 du 3 mars 2005 concernant la donation et le régime matrimonial aux Pays-Bas et en France n'a toujours pas obtenu de réponse, c'est-à-dire plus de sept mois après qu'elle a été posée. Il s'étonne tout particulièrement de ce retard très important et il souhaiterait qu'il lui en indique les raisons.

Réponse du Ministère de la justice publiée dans le JO Sénat du 09/03/2006 - page 722

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que, pour être reconnu en France, le mariage conclu à l'étranger doit être valable tant au regard de la loi du lieu de célébration que de la loi personnelle de chacun des futurs époux qui en régit les conditions de fond. Le mariage suppose que la loi personnelle de chacun des futurs époux l'autorise. Ainsi, au regard de la loi française, deux Français de même sexe ne pourront valablement se marier à l'étranger, même si la loi du lieu de célébration reconnaît ce mariage, dans la mesure où leur loi personnelle, la loi française, le prohibe. Il en va de même du mariage d'un Français à l'étranger avec une personne étrangère de même sexe. Dans les autres cas, la jurisprudence admet de tirer certaines

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conséquences d'unions contractées régulièrement à l'étranger alors même qu'elles seraient déclarées nulles si elles l'avaient été en France. Dès lors, sous réserve de l'appréciation souveraine des juges et des règles de conflits de loi, un mariage homosexuel valablement célébré à l'étranger entre deux personnes de nationalité étrangère pourra produire des effets en France, notamment sur le plan patrimonial et successoral. Ainsi, à titre d'exemple, les époux pourront valablement changer de régime

matrimonial, selon les règles prévues par la convention de La Haye du 14 mars 1978. Le changement de régime matrimonial n'aura une pleine efficacité que dans la mesure où la loi applicable au régime matrimonial accepte la possibilité d'un tel changement. De même, les époux pourront se consentir une donation entre époux dont les effets s'exerceront sous réserve de la reconnaissance d'une telle libéralité par la loi successorale applicable.

• RM (S) n°00886 de M. Jean Louis Masson, (Moselle - NI) publiée dans le JO Sénat du 24/01/2008 - page 161

2°) LÉGISLATION DES DIFFÉRENTS PAYS EUROPÉENS ET DROITS SUCCESSORAUX

Question écrite n° 00886 de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI) publiée dans le JO Sénat du 19/07/2007 - page 1287

M. Jean Louis Masson attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur le fait qu'à la suite des élections législatives, toutes les questions écrites qui avaient été posées sous la précédente législature et qui n'avaient pas encore obtenu de réponse ont été déclarées caduques. Il lui pose donc à nouveau la question qui avait été adressée à son prédécesseur le 3 mars 2005 et à laquelle celui-ci n'avait pas répondu. Plus précisément, il attire son attention sur la complexité qui résulte de l'imbrication des législations des différents pays européens compte tenu des déplacements de leurs ressortissants. Ainsi, dans le cas d'un couple d'homosexuels légalement mariés aux Pays-Bas, dont l'un des deux conjoints est de nationalité française, il souhaiterait savoir de quelle manière s'appliquent les droits successoraux en cas de décès de l'un pour ce qui est des biens immobiliers possédés en France. Réponse du Ministère de la Justice

publiée dans le JO Sénat du 24/01/2008 - page 161

La garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que pour

pouvoir produire des droits successoraux au profit du conjoint survivant, le mariage conclu à l'étranger doit être valable en France. En application des principes de droit international privé et des articles 171-1 et suivants du code civil dans leur rédaction issue de la loi n° 2006-1376 du 14 novembre 2006, la validité du mariage s'apprécie, d'une part, au regard de la loi du lieu de célébration et, d'autre part, de la loi personnelle de chacun des futurs époux, laquelle en régit les conditions de fond. Le mariage suppose que la loi personnelle de chacun des futurs époux l'autorise. Ainsi, au regard de la loi française, deux Français de même sexe ne pourront valablement se marier à l'étranger, même si la loi du lieu de célébration reconnaît ce mariage, dans la mesure où leur loi personnelle, la loi française, le prohibe. Il en va de même du mariage d'un Français à l'étranger avec une personne de même sexe. Ainsi, dans le cas d'un mariage célébré aux Pays-Bas, dont l'un des conjoints est de nationalité française, cette union ne pourra pas être reconnue en France. En outre, en application de l'article 171-5 du code civil dans sa rédaction issue de la loi n° 2006-1376 précitée, l'acte de mariage, qui ne pourra pas être transcrit sur les registres de l'état civil français, ne sera pas opposable aux tiers en France. Par conséquent, la loi successorale française applicable à la dévolution de l'immeuble situé en France s'appliquera sans prendre en compte l'existence du mariage.

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c) Les partenaires enregistrés

Art. 515-7-1 C. civ.

« Les conditions de formation et les effets d'un partenariat enregistré ainsi que les causes et les effets de sa dissolution sont soumis aux dispositions matérielles de l'État de l'autorité qui a procédé à son enregistrement. »

BOI 7 G-2-10 DU 13 JANVIER 2010

BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS N° 6 DU 13 JANVIER 2010

DIRECTION GÉNÉRALE DES FINANCES PUBLIQUES

7 G-2-10

INSTRUCTION DU 30 DECEMBRE 2009 MUTATIONS A TITRE GRATUIT. TARIFS ET LIQUIDATION DES DROITS.

SITUATION DES PERSONNES AYANT CONCLU UN PARTENARIAT CIVIL A L’ETRANGER. (LOI N° 2009-526 DU 12 MAI 2009 DE SIMPLIFICATION ET DE CLARIFICATION DU DROIT

ET D’ALLEGEMENT DES PROCEDURES, ART. 1ER)

(C.G.I., art. 777, 790 F et 796-0 bis) NOR : ECE L 09 20726J

Bureau C 2 PRESENTATION

L’article 1er de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures a introduit dans le code civil une règle de droit international privé permettant aux partenariats civils conclus à l’étranger de produire leurs effets en France, sous réserve que ceux-ci ne soient pas contraires à l’ordre public.

En matière de droits de mutation à titre gratuit, et sous cette réserve, il convient désormais d’appliquer aux personnes ayant conclu un partenariat civil à l’étranger le régime prévu en faveur des personnes ayant conclu un pacte civil de solidarité (PACS).

La présente instruction administrative commente ces dispositions.

Cette reconnaissance produit les mêmes effets en matière d’impôt sur le revenu, qui sont commentés dans l’instruction administrative du 29 décembre 2009, publiée au bulletin officiel des impôts sous la référence 5 B-4-10, à laquelle il convient sur ce point de se reporter.

Les articles cités dans la présente instruction sont, sauf indication contraire, ceux du code général des impôts (CGI).

Chapitre 1 : Dispositions de droit civil

1. L’article 515-7-1 du code civil, issu de l’article 1er de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures (Journal officiel du 13 mai 2009), dispose que les conditions de formation et les effets d'un partenariat enregistré ainsi que les causes et les

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effets de sa dissolution sont soumis aux dispositions matérielles de l'État de l'autorité qui a procédé à son enregistrement.

Dès lors, les partenariats civils conclus à l’étranger peuvent désormais produire leurs effets juridiques en France, sous réserve que ceux-ci ne soient pas contraires à l’ordre public.

A titre d’exemple, le contrat de cohabitation belge ne produira pas d’effets en France lorsqu’il sera conclu entre un frère et une soeur car il est alors contraire à l’ordre public. En effet, l’article 515-2 du code civil prohibe la conclusion d’un pacte civil de solidarité (PACS) entre collatéraux jusqu’au troisième degré inclus.

Chapitre 2 : Conséquences en matière de droits de succession

2. Les personnes liées par un partenariat civil conclu régulièrement à l’étranger bénéficient désormais en matière de droits de succession du régime applicable aux personnes liées par un PACS. Elles sont donc exonérées de ces droits en application de l’article 796-0 bis.

Ainsi, deux ressortissants britanniques domiciliés en France et unis par un « civil partnership », enregistré au Royaume-Uni, bénéficient, en cas de décès de l’un d’eux, de l’exonération de droits de mutation par décès prévue à l’article 796-0 bis précité 1.

Chapitre 3 : Conséquences en matière de droits de donation

3. Les partenariats civils conclus régulièrement à l’étranger bénéficient également, en matière de droits de donation, du régime applicable aux PACS.

Ainsi, pour la perception des droits de mutation à titre gratuit entre vifs, les partenaires ayant conclu un partenariat civil à l’étranger peuvent bénéficier de l’abattement de 79 533 € (montant actualisé au 1er janvier 2010) prévu à l’article 790 F.

A cet égard, il convient de préciser que, comme pour les partenaires liés par un PACS, le bénéfice de cet abattement est remis en cause lorsque le partenariat prend fin au cours de l'année civile de sa conclusion ou de l'année suivante pour un motif autre que le mariage entre les partenaires ou le décès de l'un d'entre d'eux.

4. S'agissant du tarif, il convient de se référer au barème applicable aux transmissions à titre gratuit entre époux ou entre partenaires liés par un PACS prévu à l'article 777.

Chapitre 4 : Justifications à fournir

5. Les partenaires ayant conclu un partenariat civil à l’étranger doivent prouver que celui-ci est juridiquement assimilable à un PACS en établissant qu'ils ont conclu entre eux un contrat visant à organiser leur communauté de vie (article 515-1 du code civil) et que celui-ci a fait l'objet d'un enregistrement devant une autorité compétente.

Ils pourront en ce sens se prévaloir des prises de position formelles de l’administration.

6. Afin d’éviter aux contribuables d’avoir à déterminer, au cas par cas, le régime juridique du partenariat étranger et son assimilation, ou non, au PACS, les décisions rendues par l’administration centrale des finances publiques feront l’objet d’une publication, laquelle constitue une prise de position formelle de l’administration.

(1 Cf. n° 8 ci-après.)

7. Ainsi, toute décision d’assimilation d’un régime juridique étranger sera publiée sur le site internet « impots.gouv.fr » dans la rubrique « la documentation fiscale » sous la rubrique « les rescrits » dans la partie relative à l’impôt sur le revenu, rubrique 5 B 32, calcul de l’impôt.

8. A cet égard, sont notamment assimilés au PACS les partenariats suivants, sous réserve de la condition d’ordre public rappelée ci-dessus :

- le « civil partnership » britannique ; - le contrat de « cohabitation légale » ou « wettelijke samenwoning » belge ; - le « registreret partnerskab » danois ; - le « rekisteröidystä parisuhteesta / registrerat partnershap » finlandais ; - le « geregistreerd partnerschap » néerlandais ; - le « partenariat légal » luxembourgeois ;

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- l’« eingetragene Lebenspartnerschaft » allemand ; - le « registrovane partnerstir » tchèque ; - le « registrirana istospolna partnerska skupnost » slovène ; - l’« unio estable de parella » espagnol ; - le « staofesta samvist » islandais ; - le « registrat partnerskap » norvégien ; - l’« uniao de facto » portugais ; - le « registrerat partnerskap » suédois.

9. L'existence et la date d'enregistrement du partenariat civil conclu à l’étranger doivent être justifiées auprès du service des impôts compétent, lors du dépôt de la déclaration de succession, de l'acte de donation ou à l'occasion d'une déclaration de don manuel, par tout moyen de preuve compatible avec la procédure écrite.

A cet égard, il est précisé que ces partenaires étrangers pourront s’adresser au greffe de la juridiction de leur domicile afin que celui-ci atteste des effets de leur partenariat civil.

La preuve peut être également apportée par un certificat de coutume2.

(2 Le certificat de coutume est une attestation, délivrée par un jurisconsulte étranger (avocat, notaire, consul), affirmant l’existence d’une règle de droit ou en exposant le contenu.)

Chapitre 5 : Entrée en vigueur

10. L’article 1er de la loi de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures, publiée au Journal officiel du 13 mai 2009, est entré en vigueur le 14 mai 2009.

Dès lors, le dispositif décrit ci-dessus ne devrait s’appliquer qu’aux successions ouvertes et aux donations consenties à compter de cette même date.

Toutefois, il est admis que le partenariat civil conclu à l’étranger soit assimilé au PACS à compter du 22 août 2007, date d’entrée en vigueur de l’article 8 (paragraphes I à XV) de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat.

En conséquence, le dispositif décrit ci-dessus s’applique aux successions ouvertes et aux donations consenties à compter du 22 août 20073.

DB liée : 7 G 242, 243, 244 et 314. BOI lié : 7 G-7-07

La Directrice de la législation fiscale Marie-Christine LEPETIT

(3 Cf. en annexe 2 réponse ministérielle à la question écrite n° 53004 de M. François de Rugy, député de la Loire-Atlantique, publiée au Journal officiel Assemblée nationale du 1er décembre 2009, page 11428.)

ANNEXE 1

Article 515-7-1 du code civil

(issu de l'article 1er de la loi n°2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures)

Art. 515-7-1. - Les conditions de formation et les effets d'un partenariat enregistré ainsi que les causes et les effets de sa dissolution sont soumis aux dispositions matérielles de l'État de l'autorité qui a procédé à son enregistrement.

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ANNEXE 2

Réponse ministérielle à la question écrite n° 53004 de M. François de Rugy, député de la Loire-Atlantique (Journal officiel Assemblée nationale du 1er décembre 2009, page 11428)

QUESTION :

M. François de Rugy attire l'attention de M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique sur l'application de l'article 1er de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures. Cet article introduit dans le code civil la disposition suivante :

« Les conditions de formation et les effets d'un partenariat enregistré ainsi que les causes et les effets de sa dissolution sont soumis aux dispositions matérielles de l'État de l'autorité qui a procédé à son enregistrement » (article 515-7-1 du code civil). Dans l'attente d'une instruction fiscale, il souhaite savoir si les personnes ayant contracté un partenariat à l'étranger disposeront des mêmes droits que les pacsés français en matière fiscale : exonération des droits de succession en vertu de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 ; abattement de 76 000 € sur les droits de mutation à titre gratuit entre vifs ; imposition commune. Par ailleurs il souhaite savoir quelle sera la date à prendre compte pour l'imposition commune, la date de publication de la loi au Journal officiel ou une date ultérieure.

RÉPONSE :

L'article 515-7-1 du code civil, issu de l'article 1er de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allégement des procédures, dispose que les conditions de formation et les effets d'un partenariat enregistré, ainsi que les causes et les effets de sa dissolution, sont soumis aux dispositions matérielles de l'État de l'autorité qui a procédé à son enregistrement. Dès lors, les partenariats civils conclus à l'étranger peuvent désormais produire leurs effets juridiques en France, sous réserve, et conformément aux règles de droit international privé, que ceux-ci ne soient pas contraires à ordre public. Sur le plan fiscal, et sous cette réserve, cette modification législative emporte les conséquences suivantes. S'agissant des droits de mutation à titre gratuit les personnes liées par un partenariat conclu régulièrement à l'étranger bénéficient désormais du régime applicable aux personnes liées par un PACS. Il en résulte qu'elles bénéficient de l'exonération de droits de mutation par décès, prévues à l'article 796-0 bis du code général des impôts (CGI) et, en matière de droits de mutation à titre gratuit entre vifs, de rabattement de 79 222 (montant actualisé au 1er janvier 2009), prévu à l'article 790 F du code précité. Il est admis que ces dispositions s'appliquent, comme pour les partenaires liées par un PACS, aux successions ouvertes ou aux donations consenties depuis le 22 août 2007. S'agissant de l'impôt sur le revenu, les partenariats civils conclus à l'étranger produisent également les mêmes effets que celui d'un PACS dès lors qu'ils répondent aux mêmes conditions que celui-ci.

Tel est le cas du régime de l'imposition commune prévu pour les personnes ayant contracté un PACS, toutes conditions pour bénéficier de ce mode d'imposition étant remplies. Par ailleurs, le dispositif de reconnaissance de ces unions civiles contractées à l'étranger, décrit ci-dessus, ne devrait s'appliquer qu'à compter du 14 mai 2009. Il sera toutefois admis que ces dispositions s'appliquent à compter de l'imposition des revenus de 2009 à déclarer en 2010. Les contribuables unis à l'étranger antérieurement à l'entrée en vigueur du dispositif de reconnaissance ne pourront pas bénéficier des dispositions pour l'imposition de leurs revenus antérieurs à 2009. Des instructions précisant les modalités d'application de cette reconnaissance des unions civiles étrangères tant au regard des droits de mutation à titre gratuit que de l'impôt sur le revenu, seront prochainement publiées.

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Cas n°5 :

Comment exécuter un legs consenti à un établissement étranger, par exemple une association belge ?

Art. 910 C. civ.

« Les dispositions entre vifs ou par testament au profit des établissements de santé, des établissements sociaux et médico-sociaux ou d'établissements d'utilité publique n'ont leur effet qu'autant qu'elles sont autorisées par arrêté du représentant de l'Etat dans le département.

Toutefois, les dispositions entre vifs ou par testament au profit des fondations, des congrégations et des associations ayant la capacité à recevoir des libéralités, à l'exception des associations ou fondations dont les activités ou celles de leurs dirigeants sont visées à l'article 1er de la loi n° 2001-504 du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales, sont acceptées librement par celles-ci.

Si le représentant de l'Etat dans le département constate que l'organisme légataire ou donataire ne satisfait pas aux conditions légales exigées pour avoir la capacité juridique à recevoir des libéralités ou qu'il n'est pas apte à utiliser la libéralité conformément à son objet statutaire, il peut former opposition à la libéralité, dans des conditions précisées par décret, la privant ainsi d'effet. »

Art. 3, D. 66-388 du 13 juin 1966

«Sous réserve des dispositions des articles 7 et 8 de la loi du 4 février 1901, l’acceptation des dons et legs faits à des Etats ou des établissements étrangers est autorisée par arrêté du ministre de l’intérieur après avis du ministre des affaires étrangères. »

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Proposition de loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit ARTICLE 11(EXTRAITS) :

« I. – L’article 910 du code civil est ainsi modifié : 1° Au deuxième alinéa, après le mot : « libéralités », sont insérés les mots : « et, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, des établissements publics du culte et des associations inscrites de droit local, » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les libéralités consenties à des États étrangers ou à des établissements étrangers habilités par leur droit national à recevoir des libéralités sont acceptées librement par ces États ou par ces établissements, sauf opposition formée par l’autorité compétente, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. »

Cas n°6 :

Le cohéritier français lésé dans un partage effectué à l’étranger peut-il obtenir une compensation sur les biens situés en France ?

Art. 2, loi du 14 juillet 1819 relative à l'abolition du droit d'aubaine et de détraction :

« Dans le cas de partage d’une même succession entre des cohéritiers étrangers et français, ceux-ci prélèveront sur les biens situés en France une portion égale à la valeur des biens situés en pays étranger dont ils seraient exclus, à quelque titre que ce soit, en vertu des lois et coutumes locales. »

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Cas n°7 :

Est-il possible de désigner la loi applicable à une future succession ou d’établir un pacte successoral ?

COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du mercredi 3 février 2010 N° de pourvoi: 08-20141 Non publié au bulletin

RejetM. Pluyette (conseiller doyen faisant fonction de président), président SCP Gaschignard, SCP Piwnica et Molinié, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que Georg X... de nationalité allemande, marié à Mme Ute Y..., a eu trois enfants, Alexander, Nina et Tanja (les consorts X...) ; que, domicilié en Allemagne, il est décédé le 30 juillet 1994, en cours de procédure de divorce ; que selon un acte du 1er juin 1991, rédigé par un notaire allemand, Georg X... et Mme Carmen Z... ont conclu un pacte successoral par lequel ils s'instituaient mutuellement héritiers à titre exclusif et illimité ; que Mme Z... a assigné en 1999 les consorts X... devant le tribunal de grande instance de Grasse pour obtenir sa mise en possession des actifs de la succession en France comportant un immeuble et des meubles ; que par arrêt du 16 octobre 2003, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a reconnu que Mme Z... avait vocation successorale sur les biens meubles de Georg X... situés en France ;

que cette décision a été cassée, dans son intégralité, pour des motifs de procédure liés à la pluralité des défendeurs qui n'avaient pas été régulièrement assignés (Civ 1re 25 avril 2006, n° 0412720) ;

Sur le premier moyen en cinq branches ci-après annexé :

Attendu que les consorts X... reprochent à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 mai 2008) d'avoir dit les juridictions françaises incompétentes au profit des juridictions allemandes pour statuer sur la succession de Georg X... quant aux meubles et immeubles situés en Allemagne, et de les avoir déboutés de leur demande tendant à se voir attribuer des biens issus de la succession de Hannelore A..., et enfin dit que Mme Z... avait vocation successorale sur l'ensemble des biens meubles de Georg X... situés en France ;

Attendu que la cour d'appel a justement relevé d'une part, que Georg X... étant domicilié en Allemagne, les juridictions allemandes étaient seules compétentes pour connaître de la liquidation de la succession mobilière et immobilière des biens situés en Allemagne, d'autre part, que les parties s'étaient accordées sur la vocation successorale de Mme Z... quant aux biens meubles situés en France, en application du pacte successoral de 1991 ; que le moyen, qui porte sur des motifs surabondants dans ses trois dernières branches, est inopérant dans ses deux premières ;

Sur le second moyen, pris en ses quatre branches ci-après annexé :

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Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'avoir dit que Carmen Z... avait vocation successorale sur l'ensemble des biens meubles de Georg X... situés en France et d'avoir condamné, en conséquence, les consorts X... à payer à Carmen Z... la somme de 145 244, 90 euros ;

Attendu que par une appréciation souveraine des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a estimé, d'une part, que les véhicules litigieux appartenaient à Georg X..., d'autre part, que Mme X... avait encaissé le prix du bateau acheté par M. B... ; ensuite, qu‘ayant seulement pris en considération l'estimation du mobilier homologuée par un jugement du 26 juin 1989, et constaté que la liquidation du surplus de la succession était de la compétence des tribunaux allemands, elle n'avait pas à faire les recherches prétendument omises ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les consorts X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts X... et les condamne à payer à Mme Z... la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille dix.

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 20 mai 2008

2°) Proposition de

RÈGLEMENT DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL

relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions et des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen

Article 17 Liberté de choix

1. Une personne peut choisir comme loi régissant l’ensemble de sa succession la loi de l'État dont elle possède la nationalité.

2. La désignation de la loi applicable à la succession doit être expresse et contenue dans une déclaration revêtant la forme d’une disposition à cause de mort.

3. L'existence et la validité au fond du consentement quant à cette désignation sont régies par la loi désignée.

4. La modification ou la révocation par son auteur d’une telle désignation de la loi applicable doit remplir en la forme les conditions de la modification ou de la révocation d’une disposition à cause de mort.

Article 18 Pactes successoraux

1. Un pacte qui concerne la succession d'une personne est régi par la loi qui, en vertu du présent règlement, aurait été applicable à la succession de cette personne en cas de décès au jour où l'accord a été conclu. Si, selon cette loi, le pacte n’est pas valide, sa validité sera néanmoins admise si elle l’est par la loi qui, au moment du décès, est applicable à la succession en vertu du présent règlement. Le pacte est alors régi par cette loi.

2. Un pacte qui concerne la succession de plusieurs personnes n'est valide au fond que si cette validité est admise par la loi qui, en application de l’article 16, aurait été applicable à la succession de l'une des personnes dont la succession est concernée en cas de décès au jour où l'accord a été conclu. Lorsque le contrat est valide en application de la loi applicable à la succession d'une seule de ces personnes, cette loi s'applique. Lorsque le contrat est valide en application de la loi applicable à la succession de plusieurs de ces personnes, le pacte est régi par la loi avec lequel il présente les liens les plus étroits.

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3. Les parties peuvent désigner comme loi régissant leur accord la loi que la personne ou l'une des personnes dont la succession est concernée aurait pu choisir en vertu de l'article 17.

4. L'application de la loi prévue au présent article ne porte pas atteinte aux droits de toute personne non partie au pacte et qui, en vertu de la loi désignée aux articles 16 ou 17 a un droit à réserve ou un autre droit dont elle ne peut être privée par la personne dont la succession est concernée.

Article 50 Dispositions transitoires

1. Une personne peut choisir comme loi régissant l’ensemble de sa succession la loi de l'État dont elle possède la nationalité.

2. Le présent règlement s'applique aux successions des personnes décédées après sa date d'application.

3. Lorsque le défunt avait, avant la date d'application du présent règlement, désigné la loi applicable à sa succession, cette désignation est considérée comme valide pour autant qu'elle remplisse les conditions énoncées à l'article 17.

4. Lorsque les parties à un pacte successoral avaient, avant la date d'application du présent règlement, désigné la loi applicable à ce pacte, cette désignation est considérée comme valide pour autant qu'elle remplisse les conditions énoncées à l'article 18.

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3ÈME PARTIE : Questions de libéralités

Par Claire PEUBLE,Consultante au CRIDON Nord-Est,

Chargée d’enseignement à la Faculté de droit de DOUAI

&Frédéric VAUVILLE,

Professeur agrégé des universités, Conseiller scientifique du CRIDON Nord-Est

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Cas n°1 :

par Claire PEUBLE

Action en retranchement de l’adopté simple

Vous êtes chargé de procéder au règlement de la succession d’un homme, âgé de 68 ans, qui laisse pour lui succéder son épouse survivante (avec laquelle il était marié sous le régime de la communauté universelle avec clause d’attribution intégrale au survivant), âgée de 42 ans, ainsi que trois enfants issus d’un premier mariage, adoptés simplement par le conjoint survivant.

Le climat familial étant distendu et l’âge de l’épouse survivante étant proche du leur, les enfants issus d’un précédent lit envisagent d’agir en réduction contre cette dernière afin d’invoquer l’atteinte à leurs droits réservataires. Les conseillez-vous dans ce sens ?

MADAME MONSIEUR

Adoption simple par Madame

Enfants de Monsieur issus d’une 1ere union

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Art. 1527 C. civ.

Les avantages que l'un ou l'autre des époux peut retirer des clauses d'une communauté conventionnelle, ainsi que ceux qui peuvent résulter de la confusion du mobilier ou des dettes, ne sont point regardés comme des donations.

Néanmoins, au cas où il y aurait des enfants qui ne seraient pas issus des deux époux, toute convention qui aurait pour conséquence de donner à l'un des époux au-delà de la portion réglée par l'article 1094-1, au titre " Des donations entre vifs et des testaments ", sera sans effet pour tout l'excédent ; mais les simples bénéfices résultant des travaux communs et des économies faites sur les revenus respectifs quoique inégaux, des deux époux, ne sont pas considérés comme un avantage fait au préjudice des enfants d'un autre lit.

Toutefois, ces derniers peuvent, dans les formes prévues aux articles 929 à 930-1, renoncer à demander la réduction de l'avantage matrimonial excessif avant le décès de l'époux survivant. Dans ce cas, ils bénéficient de plein droit du privilège sur les meubles prévu au 3° de l'article 2374 et peuvent demander, nonobstant toute stipulation contraire, qu'il soit dressé inventaire des meubles ainsi qu'état des immeubles.

Conjoint Survivant

MADAME MONSIEUR

Irrecevabilité de l’action en retranchement

Enfants de Monsieur adoptés simplement par Madame

Attribution de l’intégralité de

la communauté

LUI SUCCEDERONT

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* * *

COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du mercredi 11 février 2009 N° de pourvoi: 07-21421 Publié au bulletin

RejetM. Bargue, président Mme Gorce, conseiller rapporteur M. Domingo, avocat général SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu que René X...- Z..., marié en secondes noces avec Mme Y... sous le régime de la communauté universelle avec attribution intégrale au survivant d'entre eux, est décédé, laissant pour lui succéder, outre son épouse, ses deux enfants nés de son union avec elle,

Pierre et Christine X...- Z..., et deux enfants nés d'un premier lit, Marc et Emmanuel X...- Z...- Y..., adoptés simplement par Mme Y... ; que dans le cadre des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de son père, M. Marc X...- Z...- Y... a fait assigner Mme Y... ainsi que ses frères et soeur en retranchement des avantages matrimoniaux excédant la quotité disponible ;

Attendu que M. Marc X...- Z...-- Y... fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 avril 2007) d'avoir rejeté ses demandes tendant au retranchement de l'avantage matrimonial résultant de l'adoption du régime de la communauté universelle par les époux René X...- Z... et à l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de feu René X...- Z..., alors selon le moyen, que :

1° / l'enfant d'un précédent lit, adopté par le nouveau conjoint (ou compagnon), n'a pas les mêmes droits que l'enfant légitime né de la nouvelle union, puisqu'il n'a aucune vocation successorale à l'égard des ascendants de l'adoptant et qu'il est en outre exposé à la révocabilité de son adoption, le privant pour l'avenir des effets de celle-ci ; qu'il est en

VOCATION SUCCESSORALE

DES ENFANTS AU DÉCÈS DE MONSIEUR

Biens propres par nature

Biens exclus de la communauté par convention de mariage ou reçus par legs ou donation avec clause d’exclusion de la communauté

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conséquence nécessairement exposé à des risques différents ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a violé les dispositions combinées des articles 368, 370-2 et 1527 alinéa 2 du code civil, ensemble l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2° / le juge doit examiner concrètement, dans chaque espèce, les circonstances révélant les risques de spoliation ou de discrimination entre les enfants au préjudice de l'enfant adopté ; qu'en l'espèce, il invitait la cour d'appel a examiner la discrimination négative dont il avait fait l'objet, à l'occasion des donations faites par les époux X...- Z... aux enfants concernés au cours de leur union (conclusions d'appel de M. Marc X...- Z...- Y... p. 3 alinéa 3 et p. 8) : que la cour d'appel qui ne s'est nullement expliquée sur ce point a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1527 alinéa 2 du code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que M. Marc X...- Z...- Y... avait été l'objet d'une adoption simple de la part de Mme Y..., c'est par une exacte application des articles 1527, alinéa 2 et 368 du code civil, et sans violer l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de se livrer à un examen qui ne lui était pas demandé, a décidé qu'il ne pouvait exercer l'action en retranchement ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Marc X...- Z...- Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Marc X...- Z...- Y... à payer aux défendeurs la somme totale de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze février deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour M. Marc X...- Z...- Y....

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR rejeté les demandes de Monsieur Marc X...- Z...- Y... tendant au retranchement de l'avantage

matrimonial résultant de l'adoption du régime de la communauté universelle par les époux René X...- Z... et à l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de feu Monsieur René X...- Z... ;

AUX MOTIFS QUE Monsieur Marc X...- Z...- Y... ne saurait exercer l'action en retranchement instituée par l'alinéa 2 de l'article 1527 du Code civil, puisque le fait qu'il ait à l'égard de Madeleine Y... les mêmes droits successoraux qu'un enfant légitime, ne lui permet pas de soutenir qu'il aurait été privé de ses droits dans la succession de son père ou qu'il serait victime d'une discrimination au profit d'enfants n'ayant pas été adoptés, lesquels ne disposent pas des droits conférés par l'article 368 du Code civil ; qu'il ne peut non plus prétendre qu'il serait privé ipso facto de la possibilité de succéder à son père en raison de la différence d'âge existant entre lui et ses deux frères et soeurs les plus jeunes, alors que cette différence n'est que de cinq ans pour l'un et de huit ans pour l'autre ;

Et AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Monsieur Marc X...- Z...- Y... ne supporte aucun péril autre que celui auquel sont exposés les enfants légitimes du second mariage ; en sa qualité d'adopté, il a en effet vocation à hériter du conjoint survivant, savoir Madame Madeleine Y... ; que le retard apporté à sa vocation successorale ou le risque de dilapidation du patrimoine par le conjoint survivant sont des risques supportés par les enfants légitimes, de sorte qu'au regard du principe de nondiscrimination selon la naissance, Monsieur Marc X...- Z... Y... ne peut se prévaloir d'un droit de protection dont sont privés les enfants légitimes, Pierre et Christine X...- Z... ;

ALORS, D'UNE PART, QUE l'enfant d'un précédent lit, adopté par le nouveau conjoint (ou compagnon), n'a pas les mêmes droits que l'enfant légitime né de la nouvelle union, puisqu'il n'a aucune vocation successorale à l'égard des ascendants de l'adoptant et qu'il est en outre exposé à la révocabilité de son adoption, le privant pour l'avenir des effets de celle-ci ; qu'il est en conséquence nécessairement exposé à des risques différents ; qu'en affirmant le contraire, la Cour d'appel a violé les dispositions combinées des articles 368, 370-2 et 1527 alinéa 2 du Code civil, ensemble l'article 14 de la Convention

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européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE le juge doit examiner concrètement, dans chaque espèce, les circonstances révélant les risques de spoliation ou de discrimination entre les enfants au préjudice de l'enfant adopté ; qu'en l'espèce, Monsieur Marc X...- Z...- Y... invitait la Cour d'appel à examiner la discrimination négative dont il avait fait l'objet, à l'occasion des donations faites par les époux X...- Z... aux

enfants concernés au cours de leur union (conclusions d'appel de Monsieur Marc X...- Z...- Y..., p. 3 alinéa 3 et p. 8) ; que la Cour d'appel qui ne s'est nullement expliquée sur ce point, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1527 alinéa 2 du Code civil.

Publication : Bulletin 2009, I, n° 30 Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 3 avril 2007

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Cas n°2 :

Par Claire PEUBLE

Légataire des meubles et indemnité d’occupation

Vous réglez une succession dans laquelle le défunt était locataire d’un immeuble à titre de résidence principale.

Les meubles de ce logement ont été légués par le défunt à l’un de ses amis qui tarde à en prendre possession.

Le bailleur s’impatiente et fait état d’une créance à l’encontre du légataire correspondant à une indemnité née de l’occupation du logement par ce dernier depuis le décès.

Comment conciliez-vous les parties ? Le bailleur peut-il prétendre de plein droit être créancier d’une indemnité d’occupation ?

Le versement d’une indemnité peut être fondé sur 2 choses :

L’existence d’un contrat de bail entre le bailleur et l’occupant : il s’agit alors d’un loyer (I)

Le versement peut également constituer la contrepartie d’une occupation sans titre et prendre la forme d’une indemnité d’occupation (II)

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LE LÉGATAIRE NE DEVIENT PAS PARTIE AU CONTRAT : PAS DE LOYER

Art. 14 al. 5 - Loi du 6 juillet 1989

« En cas d'abandon du domicile par le locataire, le contrat de location continue :

- au profit du conjoint sans préjudice de l'article 1751 du code civil ; - au profit des descendants qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date de l'abandon du domicile ; - au profit du partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité ; - au profit des ascendants, du concubin notoire ou des personnes à charge, qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date de l'abandon du domicile.

Lors du décès du locataire, le contrat de location est transféré :

- au conjoint survivant qui ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 1751 du code civil ; - aux descendants qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date du décès ; - au partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité ; - aux ascendants, au concubin notoire ou aux personnes à charge, qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date du décès.

En cas de demandes multiples, le juge se prononce en fonction des intérêts en présence.

A défaut de personnes remplissant les conditions prévues au présent article, le contrat de location est résilié de plein droit par le décès du locataire ou par l'abandon du domicile par ce dernier. »

LE SEUL MAINTIEN DES MEUBLES DANS LE LOGEMENT NE CONSTITUE PAS UNE OCCUPATION JUSTIFIANT UNE INDEMNITÉ

CONCLUSION : Le bailleur doit mettre en demeure le légataire.

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COUR DE CASSATION Chambre civile 3 Audience publique du 10 décembre 2008 N° de pourvoi: 07-19320 Publié au bulletin

Cassation partielleM. Peyrat (conseiller doyen faisant fonction de président), président Mme Monge, conseiller apporteur M. Gariazzo (premier avocat général), avocat général Me Balat, SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 juin 2007), que Mme X..., locataire d’un appartement, propriété de l’Office public de l’habitat de Nice et des Alpes maritimes (l’OPAM) devenu l’office Côte d’Azur habitat (l’office), est décédée, instituant l’Association nationale pour l’intégration des handicapés moteurs (l’association) en qualité de légataire universelle ; que l’association a assigné l’OPAM aux fins d’obtenir restitution de sommes par lui perçues postérieurement au décès ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l’office fait grief à l’arrêt de dire que le bail liant l’OPAM à la locataire avait été résilié de plein droit lors du décès de celle-ci de sorte qu’aucune somme n’était due à titre de loyers ou d’indemnités d’occupation par le légataire universel du preneur pour la période postérieure à la date du décès alors, selon le moyen :

1°/ que l’occupant sans droit ni titre d’un logement est redevable d’une indemnité d’occupation envers son propriétaire ; qu’en décidant qu’aucune somme n’était due par la légataire universelle de la locataire, pour la période postérieure au décès, dès lors que le bail était résilié, sans préciser le droit ou le titre qui autorisait les ayants droit de la locataire à se maintenir gratuitement dans les lieux jusqu’à la libération des lieux, la cour d’appel

a privé sa décision de base légale au regard des articles 1376 et 1382 du code civil ;

2°/ qu’il appartient au locataire ou à ses ayants droit de restituer le bien loué au terme du bail ; qu’en décidant qu’il appartenait au bailleur de prendre les mesures nécessaires pour faire libérer les lieux, la cour d’appel a violé les articles 1709, 1730 et 1731 du code civil, ainsi que l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 ;

3°/ que lors du décès du locataire, le contrat de location est transféré aux conjoints, ascendants et descendants dans les conditions fixées par l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989 ; qu’en se bornant à retenir qu’il appartenait au bailleur de prendre les mesures nécessaires pour faire libérer les lieux, sans rechercher si l’OPAM était effectivement en mesure de récupérer les locaux dès le décès de la locataire, compte tenu de l’incertitude existant quant à un éventuel transfert du bail, du fait de l’indétermination des héritiers ou légataires de la locataire, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 14 de la loi du 6 juillet 1989, ainsi que les articles 1376 et 1382 du code civil ;

Mais attendu qu’ayant énoncé, à bon droit, que le contrat de location était résilié de plein droit au décès du locataire s’il ne pouvait être transféré aux personnes limitativement énumérées à l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989, constaté que l’association, instituée légataire universelle de la locataire, ne remplissait pas les conditions posées par cet article et qu’aucune personne n’était susceptible de bénéficier du transfert du bail litigieux, la cour d’appel, qui en a exactement déduit que le bail avait été résilié de plein droit au décès de Mme X..., n’a pas relevé que l’association s’était, postérieurement, maintenue dans les lieux et a pu, sans être tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, retenir qu’il appartenait au bailleur de prendre les mesures nécessaires pour faire libérer les lieux, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Mais sur le second moyen :

Vu l’article 5 du code de procédure civile, ensemble l’article 4 du code civil ;

Attendu que le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé ;

Attendu que pour dire que la restitution s’effectuerait en exécution de la décision,

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l’arrêt retient que la demande en restitution des sommes perçues est sans objet, le présent arrêt constituant un titre suffisant ;

Qu’en statuant ainsi, alors que les parties étaient en désaccord sur le montant des sommes versées et, partant, sur l’étendue de l’obligation à restitution de l’OPAM, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE et ANNULE mais seulement en ce qu’il a dit que la demande en restitution des sommes versées était sans objet et que ladite restitution s’effectuerait en fonction de l’arrêt, l’arrêt rendu le 5 juin 2007, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence autrement composée ;

Condamne l’office Côte d’Azur habitat aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne l’office Côte d’Azur habitat à payer à l’association Nationale pour l’intégration des handicapés moteurs la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de l’office Côte d’Azur habitat ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé à l’audience publique du dix décembre deux mille huit par M. Peyrat, conseiller doyen faisant fonction de président, conformément à l’article 452 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Nicolay-de Lanouvelle, avocat aux Conseils pour l’office Côte d’Azur habitat.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir dit que le bail liant un bailleur (l’OPAM) et un preneur (Madame veuve X...) avait été résilié de plein droit lors du décès de la locataire (29 avril 1999), de sorte qu’aucune somme n’était due à titre de loyers ou indemnité d’occupation par le légataire

universel du preneur (l’ANPIHM) pour la période postérieure à la date du décès ;

AUX MOTIFS PROPRES QU’aux termes de l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989 auquel le bail passé entre l’OPAM et Mme X... était soumis, le contrat de location était résilié de plein droit par le décès du locataire, s’il ne pouvait être transféré aux personnes limitativement énumérées par ledit article soit : le conjoint survivant, le partenaire lié au locataire par un pacte civil de solidarité ou les ascendants, descendants et personnes à charge vivant avec le locataire depuis au moins un an à la date du décès ; qu’il était constant que l’ANPIHM, instituée légataire universelle de la locataire, décédée le 29 avril 1999, ne remplissait pas les conditions posées par l’article 14 de la loi et qu’aucune personne n’était susceptible de bénéficier du transfert du bail litigieux ; qu’il avait donc été résilié de plein droit au décès de Mme veuve X... et qu’il appartenait au bailleur de prendre les mesures nécessaires, notamment du fait de la présence de meubles ayant appartenu à la locataire, pour faire libérer les lieux ;

1°) ALORS QUE l’occupant sans droit ni titre d’un logement est redevable d’une indemnité d’occupation envers son propriétaire ; qu’en décidant qu’aucune somme n’était due par la légataire universelle de la locataire, pour la période postérieure au décès, dès lors que le bail était résilié, sans préciser le droit ou le titre qui autorisait les ayants droits de la locataire à se maintenir gratuitement dans les lieux jusqu’à la libération des lieux, la Cour d’Appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1376 et 1382 du Code civil.

2°) ALORS QU’il appartient au locataire ou à ses ayants droits de restituer le bien loué au terme du bail ; qu’en décidant qu’il appartenait au bailleur de prendre les mesures nécessaires pour faire libérer les lieux, la Cour d’Appel a violé les articles 1709, 1730 et 1731 du Code civil, ainsi que l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989.

3°) ALORS QUE subsidiairement, lors du décès du locataire, le contrat de location est transféré aux conjoints, ascendants et descendants dans les conditions fixées par l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989 ; qu’en se bornant à retenir qu’il appartenait au bailleur de prendre les mesures nécessaires pour faire libérer les lieux, sans rechercher si l’OPAM

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était effectivement en mesure de récupérer les locaux dès le décès de la locataire, compte tenu de l’incertitude existant quant à un éventuel transfert du bail, du fait de l’indétermination des héritiers ou légataires de la locataire, la Cour d’Appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 14 de la loi du 6 juillet 1989, ainsi que les articles 1376 et 1382 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir dit que la demande en restitution des sommes versées était sans objet et que ladite restitution s’effectuerait en exécution de l’arrêt ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE la demande en restitution des sommes perçues était sans objet, le présent arrêt constituant un titre suffisant ;

ALORS QUE le juge doit trancher le litige qui lui est soumis ; que les parties étaient en désaccord quant au montant des sommes perçues par l’OPAM et, par suite, quant à l’étendue de l’obligation de restitution ; que l’ANPIHM réclamait la restitution des sommes perçues s’élevant, selon à elle, à 20.317,19 ; tandis que l’OPAM soutenait n’avoir perçu que la somme de 9.226,37 ; qu’en refusant de trancher cette contestation, la Cour d’Appel a méconnu l’étendue de ses pouvoirs, en violation des articles 5 du nouveau Code de procédure civile et 4 du Code civil.

Publication : Bulletin 2008, III, n° 203 Décision attaquée : Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 5 juin 2007

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Cas n°3 :

Par Claire PEUBLE

Imputation des libéralités consenties au conjoint survivant sur ses droits légaux

Vous êtes chargé de procéder au règlement de la succession d’une personne qui laisse pour lui succéder son épouse survivante, donataire de l’usufruit universel, ainsi que trois enfants, issus des deux époux.

Madame souhaite recueillir le plus de droits possibles et envisage à ce titre d’opter pour le quart en pleine propriété au titre de ses droits légaux, et accepter la donation entre époux en usufruit.

Est-ce réalisable ?

Art. 769 al. 2 C. civ.

« (…) celui qui cumule plus d’une vocation successorale à la même succession a, pour chacune d’elle, un droit d’option distinct »

MADAME opte pour ¼ au titre de ses droits légaux.

Elle accepte la donation en usufruit.

Art. 758-6 C. civ.

« Les libéralités reçues du défunt par le conjoint survivant s’imputent sur les droits de celui-ci dans la succession. Lorsque les libéralités ainsi reçues sont inférieures aux droits définis aux articles 757 et 757-1, le conjoint survivant peut en réclamer le complément, sans jamais recevoir une portion des biens supérieure à la quotité définie à l’article 1094-1 ».

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PREMIER EXEMPLE : IMPUTATION

LÉGENDE :

Actif = 100

Droits légaux du conjoint survivant = 25

Usufruit converti = 20

Complément = 5

SECOND EXEMPLE :

LÉGENDE :

Droits légaux du conjoint survivant = 25

Usufruit converti = 30

USUFRUIT Valorisation en pleine propriété

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COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du 6 février 2001 N° de pourvoi: 99-10845 Publié au bulletin

CassationPrésident : M. Lemontey, président Rapporteur : Mme Cassuto-Teytaud., conseiller apporteur Avocat général : Mme Petit., avocat général Avocats : M. Foussard, la SCP Waquet, Farge et Hazan., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Sur le moyen unique du pourvoi :

Vu l’article 767, alinéas 4 et 6, du Code civil ;

Attendu qu’il résulte de ce texte que les libéralités consenties au conjoint survivant s’imputent sur l’usufruit légal et non sur la valeur de biens en pleine propriété, fussent-ils l’assiette de l’usufruit ;

Attendu que pour ordonner l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Jacques X..., l’arrêt attaqué a dit que la libéralité consentie en toute propriété à Mme veuve Anne-Marie X... s’imputera sur la valeur du capital sur lequel porte l’usufruit légal du conjoint survivant, dans la limite du double maximum de la masse d’exercice et de la masse de calcul ;

Attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 24 novembre 1998, entre les parties, par la cour d’appel de Caen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Rouen.

Publication : Bulletin 2001 I N° 28 p. 18

Décision attaquée : Cour d’appel de Caen, du 24 novembre 1998

COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du 25 septembre 2006 N° de pourvoi: 0060009 Publié au bulletin

RejetGIRAUD - COUSSIE Contentieux Judiciaire Numéro JURISDATA: 2006-035114

Abstract

Successions, vocation successorale du conjoint survivant, successions ouvertes depuis le 1er juillet 2002, loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001, abrogation de la règle d'imputation prescrite par l'article 767 alinéa 6 ancien du Code civil, portée, droits ab intestat, article 757 du Code civil, article 757-1 du Code civil, article 757-2 du Code civil, cumul avec une ou des libéralités consenties entre époux, article 1094 du Code civil, article 1094-1 du Code civil, possibilité (oui), condition, défaut d'atteinte à la nue-propriété de la réserve

héréditaire, défaut de dépassement de l'une des quotités disponibles spéciales entre époux, avis

Successions, vocation successorale du conjoint survivant, successions ouvertes à compter du 1er janvier 2007, loi n° 2006-728 du 23 juin 2006, article 758-6 du Code civil, réintroduction de la règle de l'imputation, portée, cumul des droits ab intestat avec une ou des libéralités consenties entre époux, possibilité (non), avis.

Résumé

Si la règle de l'imputation prescrite par l'article 767, alinéa 6, ancien du Code civil, a été abrogée par la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001, pour les successions ouvertes depuis le 1er juillet 2002, le conjoint survivant peut cumuler les droits successoraux prévus aux articles 757, 757-1 et 757-2 du Code civil avec une ou des libéralités consenties en application de l'article 1094 ou de l'article 1094-1 du même code, sans atteindre toutefois à la nue-propriété de la réserve héréditaire ni dépasser l'une des quotités disponibles spéciales permises entre époux.

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La loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 ayant réintroduit la règle de l'imputation par l'insertion de l'article 758-6 dans le Code civil, pour les successions ouvertes à compter du 1er janvier 2007, le conjoint survivant ne peut plus bénéficier du cumul des droits successoraux ab intestat avec une ou des libéralités consenties en application de l'article 1094 ou de l'article 1094-1 du même code.

COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du jeudi 4 juin 2009 N° de pourvoi: 08-15799 Publié au bulletin

RejetM. Bargue, président M. Chauvin, conseiller rapporteur M. Mellottée (premier avocat général), avocat général SCP Monod et Colin, SCP Peignot et Garreau, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches, ci-après annexé, qui, en sa troisième branche, est nouveau, mais de pur droit :

Attendu que Patrice X... est décédé le 22 janvier 2003, en laissant pour lui succéder ses deux enfants issus de son premier mariage, Frédérique et Sébastien, et sa seconde épouse, Mme Y... ; que, par testament olographe du 30 septembre 1997, il avait légué à Mme Y... l'usufruit des 15 % de parts qu'il détenait en pleine propriété dans la SCI 40 pence ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Grenoble, 25 septembre 2007) d'avoir interprété le testament en ce que l'intention du testateur n'était pas de donner à Mme Y... le seul usufruit de ses parts dans la SCI 40 pence et d'avoir constaté que Mme Y... pouvait, outre le legs, réclamer les droits conférés par l'article 757 du code civil ; Attendu qu'ayant retenu, par motifs adoptés et non contredits par son arrêt, que les termes du testament démontraient que Patrice X... avait

souhaité assurer après son décès un revenu régulier et substantiel à son épouse, qu'en l'état de la législation et des droits du conjoint survivant au jour de la rédaction de l'acte, l'attribution d'un usufruit apparaissait comme la mesure la plus adaptée pour atteindre ce but, que, si le choix d'un legs en usufruit permettait la perception de revenus, il ne pouvait en être déduit que le testateur eût voulu écarter toute dévolution en pleine propriété au bénéfice de son conjoint, que les attestations versées aux débats démontraient la préoccupation de Patrice X... de préserver au mieux les intérêts de son épouse et ceux de ses enfants, que plus d'une année s'était écoulée entre la publication de la loi du 3 décembre 2001 et le décès de Patrice X... et que, ce dernier, bien conseillé, avait donc la possibilité, si tel avait été son souhait, de modifier, avant ou après l'entrée en vigueur des dispositions légales nouvelles, les dispositions testamentaires qu'il avait eu la précaution de prendre, la cour d'appel, ayant ainsi répondu aux conclusions invoquées et procédé à l'analyse de la volonté de Patrice X..., a estimé souverainement que, nonobstant l'intervention de la loi du 3 décembre 2001 dont elle a fait une exacte application, le maintien de la libéralité traduisait la volonté implicite de Patrice X... de permettre le cumul des droits légaux et de la libéralité ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme X... aux dépens ; Vu l'article 37 de la loi du 19 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Peignot et Garreau ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juin deux mille neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour Mme X.... Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir, par confirmation du jugement entrepris, interprété le testament du 30 septembre 1997 de Monsieur Patrice X... en ce que son intention n'était pas de donner à son épouse le seul usufruit de ses parts de la SCI 40 PENCE et d'avoir constaté que Claudine Y... pouvait, outre les legs effectués à son profit, réclamer les droits que lui conféraient l'article 757 du Code civil,

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AUX MOTIFS QU'aux termes du testament en date du 30 septembre 1997, Monsieur Patrice X... a légué à son épouse née Claudine Y... : « L'usufruit des parts que je possède en pleine propriété, soit 15 % dans la SCI "40 Pence ... » ; que le testament précise : « Au cas de vente des parts, de dissolution de la société ou de disparition de l'immeuble social par vente ou autrement, mes héritiers seront tenus de remployer, en accord avec ma légataire le prix de cession ou produit de remplacement de façon à ce qu'elle continue de recevoir jusqu'à son décès un revenu équivalent à celui perçu au moment de cette mutation par ces 15 % de parts » ; que ce testament parfaitement clair, sans aucun terme ou disposition ambigu n'a pas à être interprété ; que d'après l'article 757 du Code civil, en présence d'enfants appelés à la succession, qui ne sont pas issus des deux époux, le conjoint survivant ne bénéficie d'aucune option successorale ; qu'il hérite de la propriété du quart de la succession de l'époux prédécédé ; que les appelants semblent contester le fait que les libéralités consenties au conjoint survivant ne s'imputent pas sur ses droits successoraux aux termes de la réforme du 3 décembre 2001 mais en réalité ils ne contestent que le bénéfice par Madame Y... de droits légaux en pleine propriété, sans cependant oser soutenir que les dispositions de l'article 757 du Code civil ne s'appliqueraient pas ; que si Monsieur X... avait annulé son testament, Madame Y... bénéficierait quand même d'un quart en pleine propriété sur les biens du défunt, de sorte que tous les développements sur la volonté du défunt sont sans intérêt, étant rappelé que ce que les appelants contestent sont les droits accordés par la loi et non l'usufruit résultant du testament ; que les appelants n'ayant pu contester utilement les droits d'héritière de Madame Y... seront déboutés de leur appel, ALORS, D'UNE PART, QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; si bien qu'en laissant sans réponse les conclusions d'appel des consorts X... dans lesquelles ils invoquaient de manière précise l'intention du testateur, Monsieur Patrice X...,

confirmée par de nombreuses attestations, de léguer à Madame Y..., son épouse, le seul usufruit des parts qu'ils détenaient en pleine propriété dans la SCI 40 PENCE et, par conséquent de ne pas instituer le cumul des droits légaux du conjoint survivant avec le bénéfice de la libéralité du 30 septembre 1997 qu'il lui avait consenti, la Cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du Code de procédure civile, ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en refusant de rechercher l'intention véritable du testateur, au motif inopérant du caractère clair et non équivoque du testament, la Cour d'appel a confondu interprétation d'un testament et analyse de la volonté du testateur et, ce faisant, violé les articles 1002 et 1134 du Code civil, ALORS, ENFIN, QUE la relation entre les libéralités dont la rédaction est antérieure au 1er juillet 2002, et les droits successoraux en faveur du conjoint survivant nés de l'entrée en vigueur de la loi du 3 décembre 2001, laisse applicable aux successions la solution supplétive de volonté résultant de l'article 767, alinéa 4, ancien du Code civil en vigueur au moment de la libéralité, suivant lequel le conjoint survivant doit cesser d'exercer son droit d'usufruit dans le cas où il aurait reçu du défunt des libéralité, même faits par préciput et hors part, dont le montant atteindrait celui des droits que l'article 767, alinéa 1, ancien du Code civil lui attribue ; si bien qu'en faisant application au cas d'espèce de l'article 757 du Code civil, dans sa rédaction issue de la loi du 3 décembre 2001 et en faisant bénéficier Madame Y... du cumul de ses droits légaux issus de la loi du 3 décembre 2001 avec le bénéfice des libéralités consenties par le défunt avant l'entrée en vigueur de cette loi, la Cour d'appel a violé l'article 2 du Code civil, ensemble l'article 767 du même Code, dans sa rédaction antérieure à la loi du 3 décembre 2001. Publication : Bulletin 2009, I, n° 122 Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble du 25 septembre 2007

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Cas n°4 :

Par Frédéric VAUVILLÉ

Le donateur endetté

Un époux vous consulte en vue de la donation de sa maison avec réserve d’usufruit au profit de ses enfants. Il vous dit avoir des « soucis judiciaires » et souhaite ainsi se protéger en cas de condamnation.

Peut-on passer l’acte ? Si oui quelles précautions prendre ? Le fait qu’il soit chef d’entreprise change-t-il la donne ? Peut-on plutôt conseiller l’apport à une SCI ?

Art. 1167 C. civ.

Ils (les créanciers) peuvent aussi, en leur nom personnel, attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits.

Ils doivent néanmoins, quant à leurs droits énoncés au titre « Des successions » et au titre « Du contrat de mariage et des régimes matrimoniaux », se conformer aux règles qui y sont prescrites.

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COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du 13 janvier 1993 N° de pourvoi: 91-11871 Publié au bulletin

CassationPrésident : M. Massip, conseiller doyen faisant fonction, président Rapporteur : Mme Gié., conseiller apporteur Avocat général : Mme Le Foyer de Costil., avocat général Avocat : M. Choucroy., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Attendu que M. X..., assigné le 4 novembre 1983 par la Société française de factoring international factors France (SFF) en paiement d’une somme d’argent en exécution d’un engagement de caution, a été condamné au paiement de la somme réclamée par un jugement du 30 octobre 1984 ; que, le 22 septembre précédent, il avait vendu à sa concubine, Mme Y..., l’appartement qui, acquis en 1981 à l’aide d’un prêt consenti par l’UBC, constituait leur résidence ; que la SFF a assigné Mme Y... pour faire juger que la vente, consentie en fraude de ses droits, lui était inopposable ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l’article 1167 du Code civil ;

Attendu que pour rejeter cette demande, l’arrêt retient que la SFF ne disposait pas, à la date de la vente, d’un principe certain de créance puisque M. X... n’a été condamné que postérieurement à celle-ci ;

Qu’en statuant ainsi, alors que l’obligation de M. X... étant née dès le jour de son engagement de caution, la SFF possédait un principe certain de créance antérieurement à la vente, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Vu l’article 1167 du Code civil ;

Attendu que pour débouter la SFF, l’arrêt retient encore, par motifs adoptés, que le préjudice de celle-ci n’est pas établi ;

Qu’en se déterminant ainsi, alors qu’elle relevait, par ailleurs, que M. X..., dont l’insolvabilité n’était pas contestée, avait consenti la vente de son appartement à un prix inférieur à sa valeur vénale, ce dont résultait son appauvrissement, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ;

Et sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Vu l’article 1167 du Code civil ;

Attendu que pour statuer comme il a fait, l’arrêt retient, enfin, par motifs adoptés, que la vente était destinée à apurer dans les meilleures conditions pour lui la dette de M. X... à l’égard de l’UCB et que les conditions favorables auxquelles elle a été conclue ne suffisent pas à démontrer la fraude au préjudice de la SFF dont la créance était peu importante ;

Qu’en se déterminant ainsi, alors que la fraude au sens de l’article susvisé, résulte de la seule connaissance qu’a le débiteur du préjudice qu’il cause au créancier en se rendant insolvable ou en augmentant son insolvabilité, la cour d’appel a violé ce texte ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 22 novembre 1990, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Grenoble.

Publication : Bulletin 1993 I N° 5 p. 4

Décision attaquée : Cour d’appel de Lyon, du 22 novembre 1990

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COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du 20 décembre 2000 N° de pourvoi: 98-19343 99-10338 Publié au bulletin

CassationPrésident : M. Beauvois, président Rapporteur : Mme Masson-Daum., conseiller apporteur Avocat général : M. Weber., avocat général Avocat : la SCP Ancel et Couturier-Heller, la SCP Guiguet, Bachellier et de la Varde., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Joints les pourvois n°s 99-10.338 et 98-19.343 ;

Donne acte au Trésor public (trésorier de Créon) du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre la Banque Worms et M. Y... ;

Sur le moyen unique de chacun des pourvois, réunis :

Vu l’article 1167 du Code civil, ensemble l’article 1832 du même Code ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Bordeaux, 16 juin 1998), que les époux X... ayant fait apport de la nue-propriété de deux immeubles à deux sociétés civiles immobilières dont ils sont les seuls associés, la société anonyme Banque Worms et le Trésor public (trésorier de Créon), créanciers des premiers, les ont assignés en inopposabilité des apports sur le fondement de l’article 1167 du Code civil ;

Attendu que, pour débouter la société Banque Worms et le Trésor public de leur demande, l’arrêt relève que les époux X... ne s’opposent pas au nantissement des parts sociales dont ils sont détenteurs et retient qu’il suffit que le créancier nanti procède à la publicité du nantissement consenti à son profit, que la saisie et la réalisation forcée des parts sociales correspondant aux apports de biens dont la valeur a été transférée aux sociétés devront permettre au poursuivant de se trouver rempli de ses droits et que le privilège réservé au créancier gagiste fait obstacle à toute aliénation de nature à priver celui-ci des garanties constituées par un patrimoine qui, même administré sous la forme sociale, demeure dès

lors qu’il détient la totalité des parts, la propriété du débiteur ;

Qu’en statuant ainsi, alors que les apports aux sociétés n’étaient plus la propriété des époux X... et sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la difficulté de négocier les parts sociales et le risque d’inscription d’hypothèques sur les immeubles du chef des sociétés ne constituaient pas des facteurs de diminution de la valeur du gage du créancier et d’appauvrissement des débiteurs, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 16 juin 1998, entre les parties, par la cour d’appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Agen.

Publication : Bulletin 2000 III N° 200 p. 139

Décision attaquée : Cour d’appel de Bordeaux, du 16 juin 1998

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COUR DE CASSATION Chambre civile 3 Audience publique du 9 février 2010 N° de pourvoi: 09-10639 Non publié au bulletin

RejetM. Lacabarats (président), président Me Blanc, SCP Boulloche, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique, ci-après annexé :

Attendu, d’une part, qu’ayant constaté que l’actif de la SCI Le Voilier, qui avait acquis le 23 mars 2006 au prix de 3 000 000 euros le bien constituant le patrimoine immobilier des époux X..., avait diminué en raison du montant et du coût du crédit contracté pour cette acquisition et du paiement de la somme de 1 500 000 euros par la SCI sur ses deniers personnels, relevé qu’il en était allé de même pour le patrimoine des époux X..., qui soutenaient eux-mêmes avoir utilisé le prix de vente pour le remboursement d’autres dettes, et retenu que la liquidation judiciaire de la société L’embarcadère laissait présumer l’absence de revenus des époux X... du chef de son exploitation, la cour d’appel, qui en a déduit qu’en cédant leur immeuble à une SCI dont ils étaient les seuls associés alors qu’ils avaient connaissance du principe certain de créance dont disposait M. Y... à leur encontre, les époux X... avaient permis de faire échapper ce bien aux poursuites de leur créancier en le remplaçant par des fonds plus difficiles à appréhender que représentaient les parts sociales de la SCI, dont la valeur nominale n’était que de 30 euros, a caractérisé l’existence d’un appauvrissement des débiteurs et la conscience qu’ils avaient de causer un préjudice à leur créancier ;

Attendu, d’autre part, que si c’est au créancier exerçant l’action paulienne d’établir l’insolvabilité, au moins apparente, du débiteur à la date de l’acte critiqué, c’est à ce dernier qu’il appartient de prouver qu’il dispose de biens de valeur suffisante pour répondre de

l’engagement ; que la cour d’appel n’a pas inversé la charge de la preuve en retenant que ni au jour où la procédure avait été engagée ni à celui où elle statuait, les époux X..., qui avaient été condamnés par jugement du 18 décembre 2006, confirmé par un arrêt du 4 décembre 2007, à payer à M. Y... la somme de 450 000 euros, ne démontraient qu’ils disposaient de biens de valeur suffisante pour répondre de leur engagement ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les époux X... aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf février deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par Me Blanc, avocat aux Conseils pour les époux X... et la SCI Le Voilier

Il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir déclaré inopposable à Monsieur Y... la vente par Monsieur et Madame X... à la SCI Le Voilier de leur bien immobilier situé à Villefranche-sur-Mer,

Aux motifs qu’au jour où Monsieur et Madame X... avaient cédé leur bien constituant leur patrimoine immobilier, Monsieur Y... disposait d’un principe certain de créance dont ils avaient connaissance ; que par jugement du 18 décembre 2006 confirmé par un arrêt du 4 décembre 2007, ils avaient été condamnés à lui payer 450.000 euros au titre de travaux de remise en état et de dommages et intérêts ; que la vente litigieuse avait été consentie à la SCI Le Voilier, dont ils étaient les seuls actionnaires, pour un montant de 3.000.000 euros, étant relevé qu’ils avaient eux-mêmes acquis ce bien le 10 juillet 2000 pour un prix de 3.300.000 euros payé comptant à l’aide d’un prêt hypothécaire ; que le prix de vente avait été stipulé payable par la SCI Le Voilier au moyen d’un prêt hypothécaire à hauteur de 1.500.000 euros et le solde du

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même montant au moyen de deniers personnels, étant précisé que le prêt contracté était remboursable en 180 mensualités, à concurrence de 179 mensualités de 4750 euros et d’une dernière de 1.504.750 euros représentant le capital à terme échu ; que le coût du crédit s’élevait à 907.732,20 euros ; que si la SCI Le Voilier n’avait pas été constituée à l’occasion de cette acquisition et si cette dernière n’était pas contraire à ses statuts, il n’en demeurait pas moins que l’actif social s’était trouvé diminué en raison du montant et du coût du crédit contracté par la SCI Le Voilier pour cet achat, comme du fait du paiement de la somme de 1.500.000 euros de ses deniers, tout comme le patrimoine de Monsieur et Madame X... du fait de cette cession ; qu’ils soutenaient avoir utilisé le prix de vente pour le remboursement de dettes contractées par ailleurs ; que la Société L’Embarcadère avait été mise en liquidation judiciaire le 9 février 2007, ce qui laissait présumer l’absence de revenus des époux X... du chef de son exploitation ; qu’en ayant cédé leur bien immobilier, Monsieur et Madame X... avaient permis de le faire échapper aux poursuites de leur créancier en le remplaçant par des fonds plus difficiles à appréhender ; que la saisie des parts sociales diligentée par Monsieur Y... le 18 mai 2007 révélait que la valeur de la part nominale de la société n’était que de trente euros ; que les saisies des comptes bancaires de Monsieur et Madame X... s’étaient révélées infructueuses en raison de saisies opérées par d’autres créanciers ; que Monsieur et Madame X... ne démontraient pas qu’ils disposaient de biens de valeur suffisante pour répondre de leur engagement ;

Alors que 1°) l’acte argué de fraude doit avoir eu pour objectif d’appauvrir le patrimoine du débiteur; qu’en énonçant que le remplacement d’un bien immobilier par des parts de société constituait en lui-même une fraude paulienne, la cour d’appel a violé l’article 1167 du code civil ;

Alors que 2°) la fraude paulienne nécessite que soit rapportée la preuve de la connaissance par le débiteur du préjudice causé au créancier par l’acte litigieux ; qu’à défaut d’avoir caractérisé la conscience par le débiteur d’avoir causé un préjudice à son créancier, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1167 du code civil ;

Alors que 3°) le créancier doit démontrer l’insolvabilité de son débiteur à la date d’introduction de la demande ; qu’en ayant énoncé qu’il incombait à Monsieur et Madame X... de démontrer qu’ils disposaient de biens de valeur suffisante pour répondre de leur engagement envers Monsieur Y..., la cour d’appel a inversé la charge de la preuve et violé les articles 1315 et 1167 du code civil ;

Décision attaquée : Cour d’appel d’Aix-en-Provence du 20 novembre 2008

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COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du 30 mai 2006 N° de pourvoi: 02-13495 Publié au bulletin

Cassation partielle sans renvoi

M. Ancel., président M. Gridel., conseiller apporteur M. Sarcelet., avocat général Me Foussard, SCP Laugier et Caston., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu que, par arrêt irrévocable du 17 février 1994, M. Philippe X..., expert-comptable auprès de la société Interlude du 1er juillet 1983 au 30 juin 1987, a été condamné à lui restituer un trop perçu et à lui verser 1 419 480,66 francs de dommages-intérêts, son assureur n’étant tenu in solidum qu’à hauteur de 500 000 francs ;

qu’après des tentatives d’exécution demeurées vaines, la société Interlude, soutenant que M. Philippe X..., conscient du principe certain de ses dettes, avait mis à disposition les fonds par lesquels son fils M. Robert X... avait, le 27 février 1987, acquis un appartement situé à Saint-Mandé, ainsi que ceux par lesquels Mme Marie-José Y..., épouse Philippe X..., avait effectué un apport de numéraire dans une société immatriculée en 1992, a demandé la réintégration dans le patrimoine de son débiteur de l’immeuble et de l’apport; que l’arrêt attaqué, après avoir constaté d’une part l’impossibilité de M. Robert X... à justifier le financement de l’achat du bien au-delà de 24,75 % de son prix et, d’autre part, la limite de la demande de la société Interlude envers Mme Y..., a accueilli l’action, pour 41 000 francs à l’égard de celle-ci, et pour 75,25 % de l’immeuble en ce qui concerne le fils ;

Sur les deux premières branches du premier moyen et la première du second :

Attendu que les griefs manquent en fait, la cour d’appel ayant souverainement établi que la fraude de M. Philippe X... avait consisté, pour les soustraire à sa créancière, à donner les sommes litigieuses à sa femme et à son fils, puis constaté, en des motifs non critiqués, que l’immeuble acquis par celui-ci avait été subrogé au capital reçu ;

Mais sur les deux moyens, respectivement pris en leur troisième et seconde branches :

Vu l’article 1167 du Code civil ;

Attendu que l’inopposabilité paulienne autorise le créancier poursuivant, par décision de justice et dans la limite de sa créance, à échapper aux effets d’une aliénation opérée en fraude de ses droits, afin d’en faire éventuellement saisir l’objet entre les mains du tiers ; d’où il suit qu’en ordonnant le retour des sommes données dans le patrimoine de M. Philippe X..., la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu’en application de l’article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour de Cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a ordonné le retour, dans le patrimoine de M. Philippe X..., de l’immeuble et de la somme recherchée, les constatations des créances de la société Interlude envers M. Robert X... et envers Mme Marie-José Y..., épouse Philippe X..., étant expressément maintenues, l’arrêt rendu le 24 janvier 2002, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

DIT n’y avoir lieu à renvoi ;

Dit la société Interlude fondée à poursuivre le recouvrement de ses créances constatées par l’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 17 février 1994, d’une part, entre les mains de M. Robert X..., 75,25 % du lot n° 18 de l’état descriptif de division-règlement de copropriété de l’immeuble sis ... à Saint-Mandé (Val-de-Marne) cadastré section E n° 47 “place Charles Digeon n° 4” pour 19 ares 59 centiares, soit : au troisième étage à gauche sur cour, escalier de droite, un appartement comprenant entrée, dégagement, trois pièces, salle d’eau, water-closet, chauffage central individuel, cave n° 1,

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et les 25/1 000e des parties communes générales, qui avait été vendu, selon acte reçu le 27 février 1987 par M. Z..., notaire associé à Saint-Mandé, par M. Denis A... à M. Philippe X..., moyennant le prix de 350 000 francs, ou la valeur de l’immeuble dont s’agit, et, d’autre part, auprès de Mme Marie-José X..., la somme de 6 250,41 euros, à laquelle elle a été condamnée, in solidum avec M. Philippe X... ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de MM. Philippe et Robert X... et de Mme Marie-José Y... ; condamne, in solidum, MM. Philippe et Robert X... et Mme Marie-José Y... à payer à M. B..., ès qualités de

mandataire ad hoc de la société Interlude, la somme de 2 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille six.

Publication : Bulletin 2006 I N° 268 p. 234

Décision attaquée : Cour d’appel de Paris, du 24 janvier 2002

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Cas n°5 :

Par Virginie GODRON

Refus d’un cohéritier de concourir à la vente d’un bien donné

Vous êtes chargé de régulariser la vente d’un immeuble que le vendeur avait reçu par donation. Mais l’un des frères du vendeur refuse de consentir à la vente, afin de garantir le tiers acquéreur.

Est-il possible de régulariser la vente ? Comment garantir le tiers acquéreur ?

Art. 924-4 C. civ.

« Après discussion préalable des biens du débiteur de l'indemnité en réduction et en cas d'insolvabilité de ce dernier, les héritiers réservataires peuvent exercer l'action en réduction ou revendication contre les tiers détenteurs des immeubles faisant partie des libéralités et aliénés par le gratifié. L'action est exercée de la même manière que contre les gratifiés eux-mêmes et suivant l'ordre des dates des aliénations, en commençant par la plus récente. Elle peut être exercée contre les tiers détenteurs de meubles lorsque l'article 2276 ne peut être invoqué.

Lorsque, au jour de la donation ou postérieurement, le donateur et tous les héritiers réservataires présomptifs ont consenti à l'aliénation du bien donné, aucun héritier réservataire, même né après que le consentement de tous les héritiers intéressés a été recueilli, ne peut exercer l'action contre les tiers détenteurs. S'agissant des biens légués, cette action ne peut plus être exercée lorsque les héritiers réservataires ont consenti à l'aliénation. »

Les conditions de mise en œuvre de l’action en revendication contre le tiers acquéreur :

•. La réductibilité de la donation dont est issu le bien vendu

•. L’insolvabilité du vendeur, débiteur de l’indemnité de réduction

•. L’absence de consentement unanime à l’aliénation du donateur et de tous ses héritiers réservataires

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CONSEILS

. Lorsque l’acquéreur accepte de prendre le risque de l’action en revendication à son encontre :

. Lorsque l’acquéreur n’accepte pas de subir un tel risque :

. L’anticipation de ces difficultés à l’occasion de la donation

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Cas n°6 :

Par Virginie GODRON

Droit au logement de la seconde épouse

L’un de vos clients, veuf en premières noces, s’est récemment remarié. Le couple habite dans un immeuble sur lequel votre client dispose de droits en usufruit, ses enfants d’un premier lit disposant sur ce bien de droits en nue-propriété. Il désire qu’après son décès, son épouse puisse demeurer gratuitement dans cet immeuble sa vie durant.

Quelles solutions peut-on lui proposer pour permettre à sa seconde épouse d’occuper gratuitement ce logement sa vie durant ?

PREMIÈRE HYPOTHÈSE : MONSIEUR EST USUFRUITIER DU TOUT

•. L’inefficacité des instruments classiques de protection du conjoint survivant :

•. Les nus-propriétaires, seules personnes pouvant constituer un usufruit successif :

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SECONDE HYPOTHÈSE : MONSIEUR EST POUR PARTIE PLEIN

PROPRIÉTAIRE ET POUR PARTIE USUFRUITIER

•. L’inefficacité des instruments classiques de protection du conjoint survivant :

•. La possibilité pour Monsieur de léguer à sa seconde épouse l’usufruit du tout (Cass. 1re civ., 28 mars 2006) :

COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du 28 mars 2006N° de pourvoi: 04-10596 Publié au bulletin

Cassation partielle

M. Ancel., président M. Rivière., conseiller apporteur Me Foussard, SCP Piwnica et Molinié., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu que M. Gavino X... et son frère, Paolino X..., ont acquis, en indivision, en 1951 et 1957, deux parcelles de terrain à bâtir sises à Champ près Froges et Froges sur lesquelles ils ont, chacun, fait édifier une maison

d’habitation ; qu’après avoir épousé Mme Y... en 1978, Paolino X... est décédé en 1995 en laissant un testament olographe par lequel il léguait à son frère, Gavino, la nue-propriété des immeubles qu’il possédait dans ces deux communes et à son épouse “l’usufruit de ces mêmes biens” ; que M. Gavino X... a demandé le partage de l’indivision en usufruit existant entre lui et Mme Y... ;

Sur le second moyen, pris en ses trois branches, tel qu’exposé au mémoire en demande et annexé au présent arrêt :

Attendu que Mme Y... fait grief à l’arrêt d’avoir rejeté sa demande visant à l’octroi d’une indemnité au titre des impenses qu’elle a réalisées postérieurement au décès de son mari ;

Attendu qu’abstraction faite du grief des deux premières branches qui s’attaque à un motif surabondant, fût-il erroné, c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation que la cour d’appel, par motifs adoptés, a jugé que les

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travaux réalisés par Mme Y... postérieurement au décès de son mari n’étaient que des travaux d’entretien ce dont il s’induisait qu’ils ne constituaient pas des dépenses d’amélioration ni de conservation ouvrant droit à indemnité au titre de l’article 815-13 du Code civil ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Mais sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Vu les articles 900, 967 et 1021 du Code civil ;

Attendu que le dernier de ces textes n’étant pas d’ordre public, il est loisible au testateur d’imposer à ses héritiers ou légataires la charge de procurer à un autre légataire la propriété entière du bien légué lorsque le testateur n’a, sur celui-ci, qu’un droit de propriété indivis et que cette volonté peut être déduite par les juges du fond de l’ensemble des dispositions testamentaires sans qu’elle eût à être expressément formulée par le disposant ;

Attendu que pour ordonner le partage de l’usufruit des biens indivis entre M. Gavino X... et Mme Y... l’arrêt attaqué retient qu’en application du testament de son mari, cette dernière bénéfice d’un usufruit de moitié sur tous les biens immobiliers situés à Champ près Froges et pas seulement sur les maisons, M. Gavino X... ayant la pleine propriété de la moitié de ces biens et la nue-propriété sur l’autre moitié ; que les parties sont en conséquence en indivision sur l’usufruit de ces biens, à hauteur de moitié pour chacune d’elles ; que le testament de Paul X... n’a pas à être interprété dès lors que l’intéressé ne pouvait disposer que des droits qu’il détenait, soit la moitié en ce qui concerne l’usufruit ;

Qu’en statuant ainsi, sans rechercher, par une interprétation du testament, quelle avait pu être

la volonté du testateur, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’elle a ordonné le partage de l’usufruit des biens indivis entre M. Gavino X... et Mme Y..., ordonné la conversion de l’usufruit accordé à Mme Y... en une rente viagère et décidé que cette conversion pourrait être faite en capital si Mme Y... l’acceptait, l’arrêt rendu le 21 octobre 2003, entre les parties, par la cour d’appel de Grenoble ;

remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Grenoble, autrement composée ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille six.

Publication : Bulletin 2006 I N° 186 p. 161

Décision attaquée : Cour d’appel de Grenoble, du 21 octobre 2003

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Cas n°7 :

Par Virginie GODRON

Durée de l’usufruit donné

Un père de famille souhaite consentir à l’un de ses enfants une donation de l’usufruit viager d’un immeuble, afin d’assurer au donataire un complément de revenus.

Quand s’éteindra l’usufruit donné : au décès du donateur ou au décès du donataire ?

Droits du donateur sur le bien avant la donation

Plein propriétaire

Plein propriétaire

Plein propriétaire Usufruitier

Objet de la libéralité

Donation de la nue-propriété avec réserve d’usufruit sur la tête du donateur

Donation de la nue-propriété avec réserve d’usufruit sur la tête du donateur et réversion d’usufruit au profit d’un tiers

Donation de l’usufruit

Donation de l’usufruit

Durée de l’usufruit

L’usufruit est fonction de la durée de vie du donateur. Il s’éteint au décès du donateur (sauf cause d’extinction anticipée)

L’usufruit est fonction de la durée de vie du donateur et du bénéficiaire de la réversion d’usufruit. Il s’éteint au décès du survivant d’entre eux (sauf cause d’extinction anticipée)

L’usufruit est fonction de la durée de vie du donataire. Il s’éteint au décès du donataire (sauf cause d’extinction anticipée)

L’usufruit reste fonction de la durée de vie du donateur. Il s’éteint au décès du donateur (sauf cause d’extinction anticipée)

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CONSEILS

. En cas de donation, par le plein propriétaire, de l’usufruit d’un même bien à plusieurs personnes :

. Pour toutes les donations d’usufruit, si le donataire est marié et entend occuper cet immeuble avec son conjoint :

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Cas n°8 :

Par Virginie GODRON

Occupation à titre gratuit, par le nu-propriétaire, d’un bien démembré

Il y a plusieurs années, un père a consenti à son fils une donation de la nue-propriété d’un immeuble, le donateur se réservant un usufruit viager. Suite à cette libéralité, c’est en réalité le fils donataire qui a occupé gratuitement le bien donné.

Au décès du père, ses autres enfants peuvent-ils demander à leur frère le rapport de l’avantage indirect retiré de cette occupation gratuite ?

COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du 14 octobre 2009 N° de pourvoi: 08-19887 Non publié au bulletin

Rejet

M. Bargue (président), président SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, SCP Defrenois et Levis, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses six branches, ci-après annexé :

Attendu que les époux Emile et Marie X... sont respectivement décédés les 15 mars et 13 novembre 1997, en laissant pour leur succéder leurs quatre enfants, Jean-Claude, Marcel, Christiane et Antoine, auxquels ils

avaient consenti des donations portant sur des biens immobiliers ; qu’ils avaient ainsi fait donation à leur fils Marcel de la nue-propriété d’une maison d’habitation dont ils s’étaient réservé l’usufruit ; que Mme Christiane X... et M. Antoine X... (les consorts Saint Jean) ont fait assigner MM. Jean-Claude et Marcel X... aux fins de voir ordonner le partage des successions et le rapport, par leur frère Marcel, de la prétendue libéralité résultant de l’occupation à titre gratuit de la maison d’habitation ;

Attendu que les consorts X... font grief à l’arrêt attaqué (Lyon, 24 juin 2008), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 14 novembre 2007, pourvoi n° 06-19. 966), de les avoir déboutés de leur demande de rapport de la somme de 131 715, 95 euros ;

Attendu qu’ayant relevé que tant l’évaluation que le rapport des donations consenties à tous les enfants avaient porté sur la pleine propriété des biens, y compris sur celle de la maison d’habitation litigieuse, ce dont il résultait que M. Marcel X... ne devait pas rapporter en plus la valeur de l’avantage ayant résulté de son occupation à titre gratuit du bien donné, la cour

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d’appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;

Condamne Mme Christiane de Saint-Jean et M. Antoine de Saint-Jean aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille neuf.

Décision attaquée : Cour d’appel de Lyon du 24 juin 2008

CONSEILS

. A l’occasion de la donation de la nue-propriété :

. Suite à la donation de la nue-propriété, si vous avez connaissance de l’occupation à titre gratuit de l’immeuble par le nu-propriétaire :

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Cas n°9 :

Par Virginie GODRON

Gel des valeurs et donation-partage

Une mère a consenti à ses trois enfants une donation-partage. Chacun d’entre eux a reçu un tiers indivis d’un immeuble, et une somme d’argent (50 000 €). Par ailleurs, craignant la prodigalité de son seul fils, la donatrice a stipulé une réserve d’usufruit sur la somme qu’elle lui donnait. Peu de temps après la donation, la donatrice a ouvert un compte-titre démembrés avec son fils.

Au décès de sa mère, le fils considère que le gel des valeurs de l’article 1078 du Code civil ne peut s’appliquer, et que les biens donnés doivent être réévalués conformément à l’article 922 du Code civil. Faut-il accéder à sa demande ?

Art. 1078 C. civ.

« Nonobstant les règles applicables aux donations entre vifs, les biens donnés seront, sauf convention contraire, évalués au jour de la donation-partage pour l'imputation et le calcul de la réserve, à condition que tous les héritiers réservataires vivants ou représentés au décès de l'ascendant aient reçu un lot dans le partage anticipé et l'aient expressément accepté, et qu'il n'ait pas été prévu de réserve d'usufruit portant sur une somme d'argent. »

Les conditions d’application de l’article 1078 du Code civil :

•. La libéralité est une donation-partage (cf CA Limoges, 20 mars 2008) ;

•. Tous les héritiers réservataires vivants ou représentés au décès de l’ascendant ont reçu un lot et l’ont accepté ;

•. Il n’existe pas de réserve d’usufruit sur une somme d’argent (cf Cass. 1re civ., 14 octobre 2009) ;

•. Il n’existe pas de clause contraire dans la donation-partage.

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CONSEILS

. Pour que l’acte conserve la qualification de donation-partage :

. Pour que les conditions posées par l’article 1078 du Code civil soient remplies :

COUR DE D’APPEL Limoges 20 mars 2008 no du rôle général : 07/00015 Inédit

(…) Attendu toutefois que constitue une donation-partage celle qui révèle la volonté de l'ascendant donateur de répartir ses biens entre ses enfants selon le mode qu'il détermine, peu important à cet égard que les attributions en résultant soient, pour une grande partie des biens concernés, faites en indivision (...).

Cet acte s'analyse bien en une donation-partage pour l'ensemble des dispositions qui y sont contenues sans qu'il puisse être considéré, au mépris de la volonté manifestée par les donateurs et acceptée comme telle par les donataires, qu'il convient d'en dissocier les termes. (…)

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COUR DE CASSATION Chambre civile 1 Audience publique du 14 octobre 2009 N° de pourvoi: 08-17994 Non publié au bulletin

Cassation partielle

M. Bargue (président), président SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boullez, SCP Peignot et Garreau, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Attendu que, par acte notarié du 30 avril 1981, Joseph X... et Brigida Y..., son épouse, ont fait donation entre vifs à titre de partage anticipé, avec réserve d’usufruit, de la nue propriété, d’une part, d’un chalet sis à Combloux à leur fils, Gérard, et, d’autre part, d’une somme en numéraire de 800 000 francs à leur autre fils, Michel ; que, le 4 mai 1981, M. Michel X... et ses parents ont acquis en leurs qualités respectives de nu-propriétaire et d’usufruitier diverses Sicav pour la somme de 800 000 francs ; que, postérieurement au décès des donateurs en 2004, M. Michel X... a fait assigner son frère, Gérard, afin de dire que l’évaluation de l’immeuble de Combloux devait être faite pour sa valeur au jour de l’ouverture de la succession de leurs parents et que la donation partage devait être réduite comme portant atteinte à ses droits d’héritier réservataire ;

Sur le premier moyen, qui est recevable :

Attendu que M. Gérard X...- Z... fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir dit que l’évaluation de la valeur du bien immobilier sis..., devait être faite au jour de l’ouverture de la succession, et que la donation effectuée à son profit par acte en date du 30 avril 1991, et portant sur le chalet de Combloux devait être réduite comme empiétant sur la réserve héréditaire de M. Michel X..., et d’avoir désigné le président de la chambre des notaires de la Haute-Savoie ou son délégataire pour procéder aux opérations de compte, liquidation, partage avec notamment pour mission de reconstituer l’actif

de la succession de Joseph X... et son épouse, d’évaluer le bien immobilier de Combloux, de déterminer l’indemnité de réduction due par M. Gérard X...- Z... à M. Michel X..., alors, selon le moyen, que l’ancien article 1078 du code civil prévoit l’évaluation des biens au jour de la donation-partage à la condition qu’il n’ait pas été prévu de réserve d’usufruit portant sur une somme d’argent ; qu’il s’ensuit qu’en cas de remploi de la somme dont l’ascendant s’est réservé l’usufruit par acquisition de parts sociales, d’un commun accord avec le gratifié, il est procédé à l’évaluation des biens donnés au jour de l’acte dans les termes de l’ancien article 1078 du code civil, peu important que le gratifié n’ait pas acquis la pleine maîtrise du bien acquis par remploi, du vivant de son ascendant ; qu’il résulte des constatations auxquelles la juridiction du second degré a procédé que les parents de M. Michel X... ont, d’un commun accord avec lui, acquis des valeurs mobilières au moyen des deniers qu’il avait reçus avec réserve d’usufruit, tout en continuant à percevoir les fruits de ces valeurs mobilières d’un montant égal à 2 % de la valeur du portefeuille ; qu’en énonçant, pour écarter l’application de l’article 1078 du code civil au profit de l’évaluation des biens au jour du décès des donateurs, que M. Michel X... n’avait pas acquis la pleine maîtrise des valeurs mobilières acquises par remploi des deniers dont il avait été alloti sous réserve d’usufruit, dès lors que ses ascendants avaient conservé le contrôle de ce placement par le prélèvement trimestriel de 2 % de la valeur du portefeuille, la cour d’appel a déduit un motif inopérant ; qu’ainsi, elle a violé l’article 1078 du code civil ;

Mais attendu qu’ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que les donateurs avaient toujours gardé le contrôle du placement et, corrélativement, que le donataire n’avait pas la libre disposition de la somme donnée, c’est à bon droit que la cour d’appel a jugé que l’immeuble donné devait être évalué au jour de l’ouverture de la succession ; que le moyen n’est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, qui est recevable :

Vu l’article 1382 du code civil ;

Attendu que le notaire, officier public, est tenu d’informer et d’éclairer les parties sur les

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incidences juridiques et fiscales des actes qu’il établit ;

Attendu que pour débouter M. Gérard X...- Z... de sa demande formée à l’encontre de la SCP de notaires E..., B..., C... et D..., l’arrêt retient que, bien que n’étant pas établi que le notaire rédacteur de l’acte de donation-partage du 30 avril 1981 ait rempli, à cette occasion, son obligation d’information et de conseil à l’égard des parties à cet acte, il n’apparaît pas que les donateurs auraient pu prendre des dispositions autres que celles résultant des clauses de cet acte s’ils avaient été complètement et exactement informés des conséquences de la réserve d’usufruit sur la somme d’argent donnée à l’un de leurs fils ;

Qu’en statuant ainsi, alors que le notaire ne justifiait pas avoir attiré l’attention des parties sur les conséquences de l’acte et avoir ainsi satisfait à son obligation d’information et de conseil, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a débouté M. Gérard X...- Z... de son action en responsabilité formée contre la SCP

E..., B..., C... et D..., l’arrêt rendu le 3 juin 2008, entre les parties, par la cour d’appel de Chambéry ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Grenoble ;

Condamne la SCP E..., B..., C... et D... aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la SCP E..., B..., C... et D... à payer à M. Gérard X... Z... la somme de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre deux mille neuf.

Décision attaquée : Cour d’appel de Chambéry du 3 juin 2008

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Cas n° 10 :

Par Virginie GODRON

Le formalisme de la RAAR

Un couple souhaite avantager l’un de ses enfants en lui consentant une donation ayant pour objet un immeuble commun. Les frères et sœurs du donataire sont d’accord pour que celui-ci soit avantagé, et désirent renoncer par anticipation à demander la réduction de cette donation.

Quelles sont les précautions rédactionnelles devant être prises pour satisfaire les attentes des parties ?

Art. 929 C. civ.

« Tout héritier réservataire présomptif peut renoncer à exercer une action en réduction dans une succession non ouverte. Cette renonciation doit être faite au profit d'une ou de plusieurs personnes déterminées. La renonciation n'engage le renonçant que du jour où elle a été acceptée par celui dont il a vocation à hériter.

La renonciation peut viser une atteinte portant sur la totalité de la réserve ou sur une fraction seulement. Elle peut également ne viser que la réduction d'une libéralité portant sur un bien déterminé.

L'acte de renonciation ne peut créer d'obligations à la charge de celui dont on a vocation à hériter ou être conditionné à un acte émanant de ce dernier. »

Textes applicables

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Art. 930 C. civ.

« La renonciation est établie par acte authentique spécifique reçu par deux notaires. Elle est signée séparément par chaque renonçant en présence des seuls notaires. Elle mentionne précisément ses conséquences juridiques futures pour chaque renonçant.

La renonciation est nulle lorsqu'elle n'a pas été établie dans les conditions fixées au précédent alinéa, ou lorsque le consentement du renonçant a été vicié par l'erreur, le dol ou la violence.

La renonciation peut être faite dans le même acte par plusieurs héritiers réservataires. »

CONSEILS

. Les précautions tenant à la donation :

. Les précautions tenant au formalisme de la RAAR :

. Les précautions destinées à assurer la connaissance de la RAAR par le notaire chargé de régler la succession du donateur :

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