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Douleurs Évaluation - Diagnostic - Traitement (2014) 15, 258—259 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com ACTUALITÉS Fumer des « joints » pour soulager les douleurs rhumatismales : regards croisés entre l’opinion publique et la communauté scientifique Smoke marijuana to relieve rheumatic pains: A difference between public opinion and scientific community De nombreux patients douloureux chroniques utilisent le cannabis à des fins médicales, notamment pour des douleurs neuropathiques chroniques ou celles liées au cancer. Il n’en fallait pas plus au patient souffrant de douleurs articulaires, le plus souvent déc ¸u par les thérapeutiques disponibles, pour tenter l’expérience. Or, comme le démontrent les auteurs de l’article [1], le grand public omet qu’on ne peut faire de « copier-coller » entre deux situations pathologiques et par voie de conséquence avec l’efficacité des thérapeu- tiques. Ainsi, jusqu’à présent, aucune étude bien conduite n’a prouvé l’efficacité de la marijuana dans les douleurs articulaires. La littérature se résume à quelques cas rap- portés, deux études épidémiologiques de petite taille, une étude sur l’usage du spray de nabiximol (association de THC et de cannabidiol) chez des patients atteints d’une polyar- thrite rhumatoïde et deux études portant sur le nabilone (un analogue synthétique du THC) chez des patientes fibromyal- giques. Ces études portent toutes sur de petits effectifs de patients et ont une méthodologie discutable (résultats basés sur un auto-questionnaire, auto-médication, traitements associés non renseignés, consommation de cannabis à des fins non médicales autorisée) rendant ainsi leurs conclusions ininterprétables. Les auteurs rappellent aussi, qu’aux bien- faits reconnus de la plante, s’opposent les méfaits connus du cannabis sur la santé. Le premier mot du titre de l’article est on ne peut mieux choisi : « le dilemme ». Dilemme pour le patient, douloureux et démuni, devant choisir entre ce qu’il croit être efficace et les effets secondaires. Dilemme pour le médecin, entre la demande du patient et les données scientifiques. À la lumière des travaux actuels, l’usage médi- cal du cannabis en rhumatologie ne peut être recommandé. Mais l’expérience des patients semble vouloir nuancer ces résultats. « L’opinion publique et la science : à chacun son ignorance » (Bernadette Bensaude-Vincent). Déclaration d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela- tion avec cet article. Référence [1] Fitzcharles MA, Clauw DJ, Ste-Marie PA, Shir Y. The dilemma of medical marijuana use by rheumatology patients. Arthritis Care Res 2014;66:797—801. Étienne Dahan Centre hospitalier, 23, avenue Louis-Pasteur, 67600 Sélestat, France Adresse e-mail : [email protected] Rec ¸u le 1 er aoˆ ut 2014 ; accepté le 1 er aoˆ ut 2014 Disponible sur Internet le 3 octobre 2014 http://dx.doi.org/10.1016/j.douler.2014.08.002 Méditation versus relaxation : départagées par le catastro- phisme ? Mindfulness versus relaxation: Separated by catastrophism? La modification volontaire de l’état de conscience est une des stratégies d’adaptation psychologiques (copings) pouvant être apprises aux patients douloureux. Parmi ces stratégies psychocorporelles, nous retrouvons principale- ment la relaxation (R), l’hypnose (H) ou la méditation de pleine conscience (M, Mindfulness). Si R et H sont inté- grées depuis de nombreuses années aux soins il n’en est pas de même pour la M, qui se développe depuis peu dans le monde occidental. La pratique méditative vise à construire des compétences en termes d’attention portée, moment après moment (encrage dans le moment présent) aux événements externes ou internes (perceptions sen- sorielles, cognitions, émotions et sensations corporelles) ; d’acceptation sans jugement (défusion cognitive) ; de non- évitement expérientiel (en gardant notamment le contact avec la douleur) ; de conscience élargie et unifiée du soi 1624-5687/© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Fumer des « joints » pour soulager les douleurs rhumatismales : regards croisés entre l’opinion publique et la communauté scientifique

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ninterprétables. Les auteurs rappellent aussi, qu’aux bien-aits reconnus de la plante, s’opposent les méfaits connusu cannabis sur la santé. Le premier mot du titre de l’articlest on ne peut mieux choisi : « le dilemme ». Dilemme poure patient, douloureux et démuni, devant choisir entre ceu’il croit être efficace et les effets secondaires. Dilemmeour le médecin, entre la demande du patient et les donnéescientifiques. À la lumière des travaux actuels, l’usage médi-al du cannabis en rhumatologie ne peut être recommandé.

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éclaration d’intérêts

’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en rela-ion avec cet article.

éférence

1] Fitzcharles MA, Clauw DJ, Ste-Marie PA, Shir Y. The dilemma ofmedical marijuana use by rheumatology patients. Arthritis CareRes 2014;66:797—801.

Étienne DahanCentre hospitalier, 23, avenue Louis-Pasteur,

67600 Sélestat, France

Adresse e-mail : [email protected]

Recu le 1er aout 2014 ; accepté le 1er aout 2014

Disponible sur Internet le 3 octobre 2014

ttp://dx.doi.org/10.1016/j.douler.2014.08.002

éditation versus relaxation :épartagées par le catastro-hisme ?

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a modification volontaire de l’état de conscience estne des stratégies d’adaptation psychologiques (copings)ouvant être apprises aux patients douloureux. Parmi cestratégies psychocorporelles, nous retrouvons principale-ent la relaxation (R), l’hypnose (H) ou la méditation deleine conscience (M, Mindfulness). Si R et H sont inté-rées depuis de nombreuses années aux soins il n’en estas de même pour la M, qui se développe depuis peuans le monde occidental. La pratique méditative vise àonstruire des compétences en termes d’attention portée,oment après moment (encrage dans le moment présent)

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