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24 heures | Lundi 30 juin 2014 30 Contrôle qualité VC1 24 heures | Lundi 30 juin 2014 31 Contrôle qualité VC1 tous les combattants et rappela surtout que le journaliste reste un homme, qu’«il ne peut se réfugier derrière son étiquette», évoquant des situations où la menace d’une photo sauvait un condamné… Peu funèbre, le gros des trou- pes privilégiait une ambiance fes- tive, à l’image de la promenade conçue par l’ECAL, Night Less, qui, après Augustin Rebetez l’an dernier, investissait les bosquets avec un parcours incitant à la danse. Ailleurs, bars et écrans ser- vaient de repères aux flâneurs, es- timés à près de 6000 par l’Elysée. Dans la foulée du concert rock de Duck Duck Grey Duck, la soirée finissait par prendre l’eau aux alentours de minuit. Boris Senff de Michael Jackson. Une introduc- tion sympathique, avec des mets orientaux pris d’assaut, mais avec une ambiance de concert un peu statique… Le lendemain, l’Elysée invitait dans ses jardins et la donne se compliquait avec le premier quart de finale de la Coupe du monde, occasionnant quelques arrivées tardives, et une météo mena- çante. Le cœur de la fête fut toute- fois sauvé et la présentation sur le photojournalisme de Matthias Bruggman (trop souvent inaudi- ble, hélas) et de Patrick Chauvel se déroula dans les meilleures condi- tions. Le second, légende de la photo de guerre, évoqua la peur, scrutée dans les yeux de (presque) Photographie La 4 e édition a slalomé entre le foot et la pluie, mais a attiré 6000 visiteurs Le quinquagénaire bâtiment de Max Bill s’est pris pour une scène de rock, vendredi, lors du préam- bule d’une Nuit des images qui avait lieu au Théâtre de Vidy. Sur l’avant-toit de l’édifice, le Cous- cous Clan du chanteur Rachid Taha et du guitariste-chanteur Ro- dolphe Burger servait leur se- moule rock épicée raï sur divers classiques: Walk on the wild side de Lou Reed, Rock the Casbah de The Clash, Ya Rayah de Dahmane El Harrachi et même le Billy Jean «J’ai de la chance de l’avoir, glisse la so- prano alémanique. Nous formons un beau couple ensemble.» Gravité vocale La Zurichoise à la carrière impression- nante se délecte de pouvoir enfin aborder Carmen: «Avec mon physique, on m’a très souvent demandé de le faire mais trop de sopranos se sont cassé la voix sur ce rôle qui descend très bas. Petit à petit, la mienne s’oriente vers un soprano plus dramatique. J’ai maintenant les graves pour être à l’aise dans le mezzo lyrique de Carmen, sans forcer.» Et sans crainte surtout. Après La Tra- viata et Donna Anna du Don Giovanni, Noëmi Nadelmann a apprivoisé l’espace d’Avenches et s’y replonge avec délecta- tion. classe!» Avoir endossé le rôle 350 fois ne semble pas l’avoir blasée. Noëmi Nadelmann, l’autre Carmen de la distribution (à l’affiche les 5 et 12 juillet), a une autre raison de ne pas être blasée: elle fait à Avenches sa prise de rôle. Ce soir, elle vient écouter sa consœur qui chante sur scène avec «son» Don José, le Chilien Giancarlo Monsalve. Disque Isabelle Boulay s’offre une respiration sur les terres de Reggiani, qu’elle a découvert adolescente et rencontré adulte. Entretien La poignée de main d’Isabelle Boulay met tout de suite les choses au clair. La déli- cate interprète de Parle-moi, et plus ré- cemment d’un album hommage à Serge Reggiani, n’est pas diva pour un sou. Fille de restaurateur dans les rudes terres du nord du Québec, la rousse a grandi dans un milieu de mecs et en a gardé un franc- parler réjouissant. «Tous ces gars qui ve- naient raconter leurs déboires amoureux! Ils s’exilaient pour de longues périodes de travail, revenaient et leurs femmes n’étaient plus là. Les écouter se plaindre, ça forge le caractère. Si j’avais été un homme, je pense que j’aurais beaucoup ressemblé à Serge. Le tempérament, la lucidité…» Sa relation avec Reggiani a débuté tôt, lorsque l’adolescente fana de variété et de chanson réaliste a découvert un artiste capable de rivaliser avec Piaf dans son Panthéon personnel. Devenue elle-même chanteuse à succès, elle par- tage le micro avec le vieux monsieur en 2003, quelques mois avant qu’il ne s’éteigne, à l’âge de 82 ans. «Il avait la jeunesse éternelle. Il a toujours été là sans jamais se mettre en avant, ce n’était pas dans sa nature. Le public s’est rendu compte de son importance dès lors qu’il a senti qu’il allait s’en aller, c’est pour- quoi l’affection envers lui a toujours été croissante.» Isabelle Boulay a «bifurqué» en admi- ratrice autant qu’en consœur vers ce dis- que hommage, qui reprend 14 titres de l’interprète de L’Italien. «J’étais en train de travailler sur un nouvel album origi- nal, mais j’avais continuellement en moi ses chansons. Je me souviens être allé chercher mon fils à la crèche avec Le vieux couple qui tournait en boucle dans ma tête. De plus, plusieurs personnes m’ont demandé en quelques jours si j’allais re- prendre Reggiani! Ça m’a troublé. Du jour au lendemain, j’ai mis mon disque de côté.» L’aventure Reggiani pouvait com- mencer. «J’avais moins la trouille du ré- pertoire que de la réaction des proches de Serge. Je ne me serais pas lancée si je n’avais pas eu l’assentiment de sa femme, «Si j’avais été un homme, je pense que j’aurais beaucoup ressemblé à Serge» Noëlle, et de son parolier Jean-Loup Da- badie.» Le résultat, emballé dans un livret blanc orné d’une rose griffonnée, s’inti- tule assez logiquement Merci Serge Reg- giani. A l’image de la pochette, Isabelle Boulay a choisi la sobriété pour adapter à son timbre la mâle voix. Ukulélé sur Ma solitude, tapis de cordes sur Ma fille, piano et trombone pour Si tu me payes un verre«Jouer une chanson déjà existante n’est pas forcément une aide, car on doit juste- ment se distancer d’elle, ne pas singer. On a traité cet album avec la même rigueur qu’un disque original, la même recherche de cohérence. Il fallait faire un disque élé- gant, classique, mais contemporain. Les musiciens ont beaucoup contribué à ça.» La voix, elle, honore le chanteur en refusant l’ostentatoire et privilégiant un affect subtil. «On m’a souvent considérée comme une chanteuse à voix. Ça me flatte, mais je sais au fond de moi que c’est faux. Je me sens plus proche d’une chanteuse réaliste.» Et de citer le modèle d’une «variété grand luxe», comme le nomme la rousse. Soit une chanson popu- laire de qualité, «Gainsbourg, Renaud, même Claude François – Alexandrie Alexandra, c’est une chanson hyper bien conçue, des paroles à la musique.» Le prochain hommage sera-t-il adressé à la vedette à talonnettes? «Non, je me verrais plutôt chanter en anglais du Winnie Nel- son (ndlr: chanteur country américain). Et du Stephan Eicher!» L’invitation est lan- cée. François Barras «On m’a souvent considérée comme une chanteuse à voix. Ça me flatte, mais je sais au fond de moi que c’est faux» Isabelle Boulay, chanteuse réaliste Isabelle Boulay est fan de Serge Reggiani depuis son adolescence. MAXPPP 1972 Naissance à Sainte-Félicité, en Gaspésie, au Québec, Canada. 1980 Chante dans le restaurant de ses parents. 1993 Trophée de la chanson franco- phone à Périgueux. 1996 Rôle de Marie-Jeanne dans la reprise de Starmania. Trois cent cinquante représentations. 2000 Succès de son 3e album, Mieux qu’ici-bas, porté par le tube Parle-moi. 2003 Chante sur scène en duo avec Serge Reggiani. 2008 Naissance de Marcus. 2011 Les grands espaces, produit par Benjamin Biolay. En dates Festival Avenches regarde vers Séville Dès le 4 juillet, Carmen, l’opéra mythique de Bizet, revient aux arènes après 10 ans d’absence. Reportage en répétition pendant la générale piano Matthieu Chenal C ette année, dans les arènes d’Avenches, le décor est une arène miniature. Et l’il- lusion en est si bien ren- due, avec cette forme qui épouse l’ovale de l’amphi- théâtre romain et ce gazon négligé qui pousse sur les bords, que l’on pourrait croire qu’il fait partie du lieu. Tout a été pensé pour qu’au quatrième acte de Car- men, au moment du triomphe du toréa- dor Escamillo et de la mort de la célèbre Gitane, on se sente plus à Séville qu’à Avenches. Béton, lampadaires et barbelés: l’Es- pagne de cette nouvelle Carmen, signée Eric Vigié pour la mise en scène et Jean- Marie Abplanalp pour les décors, tranche radicalement avec les deux autres pro- ductions présentées sur ce même site en 1996 et 2004. «J’ai placé cette Carmen au début des années 1960, explique Eric Vi- gié. Le défaut de l’Espagne, c’est qu’on tombe vite dans le folklore. Cette époque, en pleine décadence du franquisme, per- met d’apporter une certaine neutralité, d’éviter les castagnettes et les fleurs dans les cheveux. Je souhaite simplement échapper au cliché et mettre en avant la qualité vocale et instrumentale.» Le directeur artistique d’Avenches Opéra, qui signe ici sa deuxième mise en scène, après La bohème, en 2012, ne cher- che pas à bannir toute tentation spectacu- laire. Il y en aura de toute façon: «La mise en scène offre quatre ambiances très con- trastées, précise-t-il, avec un final cinéma- tographique un peu surréaliste, à la Buñuel. On raconte simplement, et sans exagérer, la tranche de vie dramatique d’une femme normale.» Jeudi soir, les arènes étaient presque vides, mais la scène grouillait de monde pour la répétition générale piano, la der- nière avant l’arrivée de l’orchestre, sa- medi. Les hommes du chœur de l’Opéra de Lausanne sont habillés en vert-de-gris, les filles en tenues d’ouvrières bleu usé – sauf Carmen, dont la robe rouge dé- passe sous la tunique. A peine provo- cante, juste différente. Courtiser la Gitane Dans les travées, on croise Pascal Mayer, qui prépare les chœurs du festival depuis dix-huit ans: «Il y a un côté artisanal qui me plaît infiniment. Même si ce n’est pas vraiment mon univers, j’y ai pris goût. Dans Carmen, le chœur est très présent et ce n’est pas évident en plein air: on doit chanter assez fort, mais si c’est trop fort, on ne comprend plus les paroles.» Le chef fribourgeois a bien écouté ses hommes courtiser la Gitane: «Carmen! sois gen- tille, au moins réponds-nous, et dis-nous quel jour tu nous aimeras!» Avant de retourner en coulisses pour leur faire ses commentaires, il laisse la belle Béatrice Uria Monzon entonner sa Havanaise. «Ecoutez cette Carmen, quelle Ambiance La Carmen mise en scène par Eric Vigié se déroule dans une Espagne des années 60 en pleine décadence du franquisme. U Eclairage Lancée en 1995 par une Aïda jouée six soirs de suite à guichets fermés, l’expérience de l’opéra aux arènes romaines d’Avenches est une aventure insolite, fragile et courageuse. Car, malgré le succès initial (les 52 000 spectateurs du Nabucco de 1999 n’ont jamais été dépassés), la manifestation a connu des éditions difficiles, soit en raison de la météo capricieuse, soit en raison de choix artistiques qui n’ont pas séduit le public. On a beau s’y référer sans cesse, Avenches n’est pas Vérone et il reste difficile d’élargir un public forcément régional au-delà du cercle des fidèles. Le comité d’organisation a subi aussi quelques soubresauts périlleux, avec heureusement une grande fidélité de la part du fondateur, Sergio Fontana, directeur artistique de 1995 à 2010, de Leo Obertüfer, arrivé en 1996 et actuel président du Conseil de fondation, du chef de chœur Pascal Mayer depuis 1997, et de certains sponsors depuis le début. Bon an, mal an, Avenches Opéra a tenu le coup, et c’est finalement une sorte de miracle: on ne pourrait plus programmer aujourd’hui deux productions la même année, comme La Bohème et La Traviata en 1997 ou Turandot et Le barbier de Séville en 1998. La concurrence des autres festivals est rude, même côté lyrique, avec des manifestations similaires en Suisse allemande alors que le public alémanique est crucial à Avenches. Mais l’indéniable saut qualitatif insufflé par Eric Vigié depuis 2011 a sauvé la manifestation d’une forme d’amateurisme qui ne passerait plus aujourd’hui. La folie lyrique fête ses 20 ans d’opéra Hommage Sa tournée d’été devait passer par l’Europe, Paris et l’Olympia, mais Bobby Womack s’en est allé avant de traverser l’Atlantique Son It’s all over now avait été repris par les Stones et son Across 110 th Street figurait sur la B.O. de Jackie Brown de Quentin Tarantino: du rock au cinéma, d’Aretha Franklin, pour qui il avait écrit, à Lana del Rey, invitée pour un duo sur son dernier album, Bobby Womack a marqué cinq décennies de musi- que. Il est décédé vendredi, à l’âge de 70 ans, alors que l’Europe l’at- tendait pour une série de concerts. L’année de sortie de son der- nier album, The bravest Man in the Universe, considéré comme l’un des meilleurs de 2012 par les pro- fessionnels, le chanteur soul avait également annoncé qu’il souffrait de la maladie d’Alzheimer. Pris dans l’enfer de la drogue, miné par une cascade de soucis de santé, Bobby Womack marquait pourtant avec cet album son re- tour après de longues années d’absence. Fils de métallurgiste, né à Cle- veland, le musicien avait fait ses débuts en famille avec les Wo- mack Brothers. Orienté gospel, la fratrie managée par le père en- flammait les églises jusqu’à ce que le succès vienne avec Looking for La soul américaine perd l’une de ses légendes La Nuit des images de l’Elysée se prend la tête dans les nuages love, enregistré en 1962 sous le nouveau nom de The Valentinos. L’aventure solo de Bobby Wo- mack débute deux ans plus tard, alors que le groupe familial est sur le déclin. Le chanteur s’offre le succès en écrivant pour d’autres interprètes dont Joe Tex and Dusty Springfield, puis, dans les années 1970, il enregistre quel- ques tubes comme That’s The Way I Feel About Cha et Woman’s Gotta Have It, avant de sortir du circuit dans les années 80. La légende soul américaine avait également écrit plusieurs chansons et joué de la guitare pour des artistes aussi célèbres qu’Aretha Franklin ou Wilson Pic- kett. F.M.H./ATS Couscous Clan a signé vendredi le préambule de cette 4e édition depuis le toit du Théâtre de Vidy. ALAIN ROUÈCHE Repéré pour vous La série qui rappelle Columbo Arsenic et vieilles ficelles. Comme l’illustre inspec- teur Columbo, de Los Angeles, Angela Flynn, une mère de famille céli- bataire (Kristin Lehman, vue dans The Killing), et son partenaire Oscar Vega (Louis Ferreira, vu dans Breaking Bad) tra- quent les assassins pour la crim’ de Vancouver. Pas de surprise: chaque épisode désigne d’entrée de jeu la victime et son tueur. Comment les deux héros vont-ils le confondre, «that is the question». Lancée en prime time aux Etats-Unis lors de son lan- cement en 2013, la série canadienne Motive («Le mobile du crime», par le producteur de Dexter et de The Mentalist) a car- tonné à l’audimat. Non que Motive réinvente la poudre, mais le couple fonctionne à merveille. Au rayon de l’analyse scientifique et de la mé- decine légale, on a vu plus percutant. Mais ce n’est pas le sujet. Jean Ellgass Motive (saison 1) Daniel Cerone Universal Bobby Womack avait fêté ses 70 ans en mars. AP Culture&Société Culture Société Gastro Ciné Conso Sortir Les gens Dates Ve 4, sa 5, di 6, ma 8, ve 11, sa 12 juillet. Début avancé à 21 h, ce qui permet de prolonger la soirée au nouvel Espace Lounge. Billets La nouvelle billetterie permet d’imprimer les billets chez soi. 026 676 06 00 ou ticketcorner.ch Restauration Pinte vaudoise, à la place du Casino, dès 18 h; possibilité de réserver des paniers garnis pour pique-niquer dans les arènes (38 fr. pour 2 personnes). Transports Bus au départ de Genève, de Lausanne et d’Yverdon, parkings gratuits. www.avenchesopera.ch. Pratique «J’ai maintenant les graves pour être à l’aise dans le mezzo lyrique de Carmen, sans forcer» Noëmi Nadelmann, l’une des Carmen de la distribution à Avenches Merci Serge Reggiani Isabelle Boulay Universal Music Distinction Doté de 80 000 fr. pour le vainqueur, le jury du Prix de l’Elysée, lancé par le musée avec la complicité de Parmigiani, a révélé samedi soir le nom des huit premiers prétendants. Professeur à l’ECAL et troisième du concours Taylor Weeing, Anoush Abrar figure parmi les nominés avec Mari Bashtashevki (Danemark), Philippe Chancel (France), Annabel Elgar (Angleterre), Agnès Geoffray (France), Martin Kollar (Slovaquie), Marco Poloni (Italie-Suisse) et Kourtney Roy (Canada). L’heureux élu sera connu en juin 2015. Huit nominés MARC-ANDRÉ GUEX

GastroCinéConso Culture& Société · Eric Vigié pour la mise en scène et Jean-MarieAbplanalppourlesdécors,tranche radicalement avec les deux autres pro-ductions présentées

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24heures | Lundi 30 juin 201430

Contrôle qualitéVC1

24heures | Lundi 30 juin 2014 31

Contrôle qualitéVC1

tous les combattants et rappelasurtout que le journaliste reste unhomme, qu’«il ne peut se réfugierderrière son étiquette», évoquantdes situations où la menace d’unephoto sauvait un condamné…

Peu funèbre, le gros des trou-pes privilégiait une ambiance fes-tive, à l’image de la promenadeconçue par l’ECAL, Night Less,qui, après Augustin Rebetez l’andernier, investissait les bosquetsavec un parcours incitant à ladanse. Ailleurs, bars et écrans ser-vaient de repères aux flâneurs, es-timés à près de 6000 par l’Elysée.Dans la foulée du concert rock deDuck Duck Grey Duck, la soiréefinissait par prendre l’eau auxalentours de minuit. Boris Senff

de Michael Jackson. Une introduc-tion sympathique, avec des metsorientaux pris d’assaut, mais avecune ambiance de concert un peustatique…

Le lendemain, l’Elysée invitaitdans ses jardins et la donne secompliquait avec le premier quartde finale de la Coupe du monde,occasionnant quelques arrivéestardives, et une météo mena-çante. Le cœur de la fête fut toute-fois sauvé et la présentation sur lephotojournalisme de MatthiasBruggman (trop souvent inaudi-ble, hélas) et de Patrick Chauvel sedéroula dans les meilleures condi-tions. Le second, légende de laphoto de guerre, évoqua la peur,scrutée dans les yeux de (presque)

PhotographieLa 4e édition a slaloméentre le foot et la pluie,mais a attiré 6000 visiteurs

Le quinquagénaire bâtiment deMax Bill s’est pris pour une scènede rock, vendredi, lors du préam-bule d’une Nuit des images quiavait lieu au Théâtre de Vidy. Surl’avant-toit de l’édifice, le Cous-cous Clan du chanteur RachidTaha et du guitariste-chanteur Ro-dolphe Burger servait leur se-moule rock épicée raï sur diversclassiques: Walk on the wild sidede Lou Reed, Rock the Casbah deThe Clash, Ya Rayah de DahmaneEl Harrachi et même le Billy Jean

«J’ai de la chance de l’avoir, glisse la so-prano alémanique. Nous formons unbeau couple ensemble.»

Gravité vocaleLa Zurichoise à la carrière impression-nante se délecte de pouvoir enfin aborderCarmen: «Avec mon physique, on m’atrès souvent demandé de le faire maistrop de sopranos se sont cassé la voix surce rôle qui descend très bas. Petit à petit,la mienne s’oriente vers un soprano plusdramatique. J’ai maintenant les gravespour être à l’aise dans le mezzo lyrique deCarmen, sans forcer.»

Et sans crainte surtout. Après La Tra-viata et Donna Anna du Don Giovanni,Noëmi Nadelmann a apprivoisé l’espaced’Avenches et s’y replonge avec délecta-tion.

classe!» Avoir endossé le rôle 350 fois nesemble pas l’avoir blasée.

Noëmi Nadelmann, l’autre Carmen dela distribution (à l’affiche les 5 et

12 juillet), a une autre raison de ne pasêtre blasée: elle fait à Avenches sa prise derôle. Ce soir, elle vient écouter saconsœur qui chante sur scène avec «son»Don José, le Chilien Giancarlo Monsalve.

DisqueIsabelle Boulay s’offreune respiration sur les terresde Reggiani, qu’elle a découvertadolescente et rencontré adulte.Entretien

La poignée de main d’Isabelle Boulay mettout de suite les choses au clair. La déli-cate interprète de Parle-moi, et plus ré-cemment d’un album hommage à SergeReggiani, n’est pas diva pour un sou. Fillede restaurateur dans les rudes terres dunord du Québec, la rousse a grandi dansun milieu de mecs et en a gardé un franc-parler réjouissant. «Tous ces gars qui ve-naient raconter leurs déboires amoureux!Ils s’exilaient pour de longues périodesde travail, revenaient et leurs femmesn’étaient plus là. Les écouter se plaindre,ça forge le caractère. Si j’avais été unhomme, je pense que j’aurais beaucoupressemblé à Serge. Le tempérament, lalucidité…»

Sa relation avec Reggiani a débutétôt, lorsque l’adolescente fana de variétéet de chanson réaliste a découvert unartiste capable de rivaliser avec Piafdans son Panthéon personnel. Devenueelle-même chanteuse à succès, elle par-tage le micro avec le vieux monsieur en2003, quelques mois avant qu’il ne

s’éteigne, à l’âge de 82 ans. «Il avait lajeunesse éternelle. Il a toujours été làsans jamais se mettre en avant, ce n’étaitpas dans sa nature. Le public s’est renducompte de son importance dès lors qu’ila senti qu’il allait s’en aller, c’est pour-quoi l’affection envers lui a toujours étécroissante.»

Isabelle Boulay a «bifurqué» en admi-ratrice autant qu’en consœur vers ce dis-que hommage, qui reprend 14 titres del’interprète de L’Italien. «J’étais en trainde travailler sur un nouvel album origi-nal, mais j’avais continuellement en moises chansons. Je me souviens être alléchercher mon fils à la crèche avec Le vieuxcouple qui tournait en boucle dans matête. De plus, plusieurs personnes m’ontdemandé en quelques jours si j’allais re-prendre Reggiani! Ça m’a troublé. Du jourau lendemain, j’ai mis mon disque decôté.» L’aventure Reggiani pouvait com-mencer. «J’avais moins la trouille du ré-pertoire que de la réaction des proches deSerge. Je ne me serais pas lancée si jen’avais pas eu l’assentiment de sa femme,

«Si j’avais étéunhomme, jepensequej’auraisbeaucoupressembléàSerge»

Noëlle, et de son parolier Jean-Loup Da-badie.»

Le résultat, emballé dans un livretblanc orné d’une rose griffonnée, s’inti-tule assez logiquement Merci Serge Reg-giani. A l’image de la pochette, IsabelleBoulay a choisi la sobriété pour adapter àson timbre la mâle voix. Ukulélé sur Masolitude, tapis de cordes sur Ma fille, pianoet trombone pour Si tu me payes un verre…«Jouer une chanson déjà existante n’est

pas forcément une aide, car on doit juste-ment se distancer d’elle, ne pas singer. Ona traité cet album avec la même rigueurqu’un disque original, la même recherchede cohérence. Il fallait faire un disque élé-gant, classique, mais contemporain. Lesmusiciens ont beaucoup contribué à ça.»

La voix, elle, honore le chanteur enrefusant l’ostentatoire et privilégiant unaffect subtil. «On m’a souvent considéréecomme une chanteuse à voix. Ça meflatte, mais je sais au fond de moi quec’est faux. Je me sens plus proche d’unechanteuse réaliste.» Et de citer le modèled’une «variété grand luxe», comme lenomme la rousse. Soit une chanson popu-laire de qualité, «Gainsbourg, Renaud,même Claude François – AlexandrieAlexandra, c’est une chanson hyper bienconçue, des paroles à la musique.» Leprochain hommage sera-t-il adressé à lavedette à talonnettes? «Non, je me verraisplutôt chanter en anglais du Winnie Nel-son (ndlr: chanteur country américain). Etdu Stephan Eicher!» L’invitation est lan-cée. François Barras

«Onm’asouventconsidéréecommeunechanteuseàvoix.Çameflatte,mais jesaisaufonddemoiquec’est faux»Isabelle Boulay, chanteuse réaliste

Isabelle Boulay est fan de Serge Reggiani depuis son adolescence. MAXPPP

1972 Naissance à Sainte-Félicité,en Gaspésie, au Québec, Canada.1980 Chante dans le restaurant de sesparents.1993 Trophée de la chanson franco-phone à Périgueux.1996 Rôle de Marie-Jeanne dans lareprise de Starmania. Trois cent cinquantereprésentations.2000 Succès de son 3e album, Mieuxqu’ici-bas, porté par le tube Parle-moi.2003 Chante sur scène en duo avecSerge Reggiani.2008 Naissance de Marcus.2011 Les grands espaces, produit parBenjamin Biolay.

En dates

Festival

AvenchesregardeversSévilleDès le 4 juillet, Carmen, l’opéramythique de Bizet, revient aux arènesaprès 10 ans d’absence. Reportage enrépétition pendant la générale pianoMatthieu Chenal

Cette année, dans les arènesd’Avenches, le décor estune arène miniature. Et l’il-lusion en est si bien ren-due, avec cette forme quiépouse l’ovale de l’amphi-

théâtre romain et ce gazon négligé quipousse sur les bords, que l’on pourraitcroire qu’il fait partie du lieu. Tout a étépensé pour qu’au quatrième acte de Car-men, au moment du triomphe du toréa-dor Escamillo et de la mort de la célèbreGitane, on se sente plus à Séville qu’àAvenches.

Béton, lampadaires et barbelés: l’Es-pagne de cette nouvelle Carmen, signéeEric Vigié pour la mise en scène et Jean-Marie Abplanalp pour les décors, trancheradicalement avec les deux autres pro-ductions présentées sur ce même site en1996 et 2004. «J’ai placé cette Carmen audébut des années 1960, explique Eric Vi-gié. Le défaut de l’Espagne, c’est qu’ontombe vite dans le folklore. Cette époque,en pleine décadence du franquisme, per-met d’apporter une certaine neutralité,d’éviter les castagnettes et les fleurs dansles cheveux. Je souhaite simplementéchapper au cliché et mettre en avant laqualité vocale et instrumentale.»

Le directeur artistique d’AvenchesOpéra, qui signe ici sa deuxième mise enscène, après La bohème, en 2012, ne cher-che pas à bannir toute tentation spectacu-laire. Il y en aura de toute façon: «La miseen scène offre quatre ambiances très con-trastées, précise-t-il, avec un final cinéma-tographique un peu surréaliste, à laBuñuel. On raconte simplement, et sansexagérer, la tranche de vie dramatiqued’une femme normale.»

Jeudi soir, les arènes étaient presquevides, mais la scène grouillait de mondepour la répétition générale piano, la der-

nière avant l’arrivée de l’orchestre, sa-medi. Les hommes du chœur de l’Opérade Lausanne sont habillés en vert-de-gris,les filles en tenues d’ouvrières bleu usé– sauf Carmen, dont la robe rouge dé-passe sous la tunique. A peine provo-cante, juste différente.

Courtiser la GitaneDans les travées, on croise Pascal Mayer,qui prépare les chœurs du festival depuisdix-huit ans: «Il y a un côté artisanal quime plaît infiniment. Même si ce n’est pasvraiment mon univers, j’y ai pris goût.Dans Carmen, le chœur est très présent etce n’est pas évident en plein air: on doitchanter assez fort, mais si c’est trop fort,on ne comprend plus les paroles.» Le cheffribourgeois a bien écouté ses hommescourtiser la Gitane: «Carmen! sois gen-tille, au moins réponds-nous, et dis-nousquel jour tu nous aimeras!»

Avant de retourner en coulisses pourleur faire ses commentaires, il laisse labelle Béatrice Uria Monzon entonner saHavanaise. «Ecoutez cette Carmen, quelle

AmbianceLa Carmen mise en scène parEric Vigié se déroule dans uneEspagne des années 60 en pleinedécadence du franquisme.

UEclairage Lancée en 1995 par uneAïda jouée six soirs de suite à guichetsfermés, l’expérience de l’opéra auxarènes romaines d’Avenches est uneaventure insolite, fragile et courageuse.Car, malgré le succès initial (les52 000 spectateurs du Nabuccode 1999 n’ont jamais été dépassés),la manifestation a connu des éditionsdifficiles, soit en raison de la météocapricieuse, soit en raison de choixartistiques qui n’ont pas séduit lepublic. On a beau s’y référer sans cesse,Avenches n’est pas Vérone et il reste

difficile d’élargir un public forcémentrégional au-delà du cercle des fidèles.

Le comité d’organisation a subi aussiquelques soubresauts périlleux, avecheureusement une grande fidélité de lapart du fondateur, Sergio Fontana,directeur artistique de 1995 à 2010, deLeo Obertüfer, arrivé en 1996 et actuelprésident du Conseil de fondation, duchef de chœur Pascal Mayer depuis1997, et de certains sponsors depuis ledébut. Bon an, mal an, Avenches Opéraa tenu le coup, et c’est finalement unesorte de miracle: on ne pourrait plus

programmer aujourd’hui deuxproductions la même année, comme LaBohème et La Traviata en 1997 ouTurandot et Le barbier de Séville en1998. La concurrence des autresfestivals est rude, même côté lyrique,avec des manifestations similaires enSuisse allemande alors que le publicalémanique est crucial à Avenches.

Mais l’indéniable saut qualitatifinsufflé par Eric Vigié depuis 2011 asauvé la manifestation d’une formed’amateurisme qui ne passerait plusaujourd’hui.

La folie lyrique fêteses20 ansd’opéra

HommageSa tournée d’été devaitpasser par l’Europe, Pariset l’Olympia, mais BobbyWomack s’en est allé avantde traverser l’Atlantique

Son It’s all over now avait été reprispar les Stones et son Across 110 thStreet figurait sur la B.O. de JackieBrown de Quentin Tarantino: durock au cinéma, d’Aretha Franklin,pour qui il avait écrit, à Lana delRey, invitée pour un duo sur sondernier album, Bobby Womack amarqué cinq décennies de musi-que. Il est décédé vendredi, à l’âgede 70 ans, alors que l’Europe l’at-tendait pour une série de concerts.

L’année de sortie de son der-nier album, The bravest Man in theUniverse, considéré comme l’undes meilleurs de 2012 par les pro-fessionnels, le chanteur soul avaitégalement annoncé qu’il souffraitde la maladie d’Alzheimer. Prisdans l’enfer de la drogue, minépar une cascade de soucis desanté, Bobby Womack marquaitpourtant avec cet album son re-tour après de longues annéesd’absence.

Fils de métallurgiste, né à Cle-veland, le musicien avait fait sesdébuts en famille avec les Wo-mack Brothers. Orienté gospel, lafratrie managée par le père en-flammait les églises jusqu’à ce quele succès vienne avec Looking for

Lasoulaméricaine perd l’unede ses légendes LaNuitdes imagesde l’Elyséeseprend la tête dans lesnuageslove, enregistré en 1962 sous lenouveau nom de The Valentinos.

L’aventure solo de Bobby Wo-mack débute deux ans plus tard,alors que le groupe familial est surle déclin. Le chanteur s’offre lesuccès en écrivant pour d’autresinterprètes dont Joe Tex andDusty Springfield, puis, dans lesannées 1970, il enregistre quel-ques tubes comme That’s The WayI Feel About Cha et Woman’s GottaHave It, avant de sortir du circuitdans les années 80.

La légende soul américaineavait également écrit plusieurschansons et joué de la guitarepour des artistes aussi célèbresqu’Aretha Franklin ou Wilson Pic-kett. F.M.H./ATS

Couscous Clan a signé vendredi le préambule de cette4e édition depuis le toit du Théâtre de Vidy. ALAIN ROUÈCHE

Repéré pour vous

Lasériequi rappelleColumboArsenic et vieilles ficelles.Comme l’illustre inspec-teur Columbo, de LosAngeles, Angela Flynn,une mère de famille céli-bataire (Kristin Lehman,vue dans The Killing), etson partenaire OscarVega (Louis Ferreira, vudans Breaking Bad) tra-quent les assassins pourla crim’ de Vancouver.Pas de surprise: chaque épisodedésigne d’entrée de jeu la victimeet son tueur. Comment les deuxhéros vont-ils le confondre, «that isthe question». Lancée en primetime aux Etats-Unis lors de son lan-

cement en 2013, la sériecanadienne Motive («Lemobile du crime», par leproducteur de Dexter etde The Mentalist) a car-tonné à l’audimat. Nonque Motive réinvente lapoudre, mais le couplefonctionne à merveille.Au rayon de l’analysescientifique et de la mé-decine légale, on a vu

plus percutant. Mais ce n’est pas lesujet. Jean Ellgass

Motive (saison 1)Daniel CeroneUniversal

Bobby Womack avait fêté ses70 ans en mars. AP

Culture&Société Culture SociétéGastro Ciné Conso

Sortir Les gens

Dates Ve 4, sa 5, di 6, ma 8, ve 11,sa 12 juillet. Début avancé à 21 h, ce quipermet de prolonger la soirée au nouvelEspace Lounge.Billets La nouvelle billetterie permetd’imprimer les billets chez soi.026 676 06 00 ou ticketcorner.chRestauration Pinte vaudoise, à la placedu Casino, dès 18 h; possibilité de réserverdes paniers garnis pour pique-niquerdans les arènes (38 fr. pour 2 personnes).Transports Bus au départ de Genève,de Lausanne et d’Yverdon, parkingsgratuits. www.avenchesopera.ch.

Pratique

«J’aimaintenant lesgravespourêtreà l’aisedans lemezzolyriquedeCarmen,sansforcer»Noëmi Nadelmann, l’une des Carmende la distribution à Avenches

Merci Serge ReggianiIsabelle BoulayUniversal Music

Distinction Doté de 80 000 fr.pour le vainqueur, le jury du Prix del’Elysée, lancé par le musée avec lacomplicité de Parmigiani, a révélésamedi soir le nom des huitpremiers prétendants. Professeur àl’ECAL et troisième du concoursTaylor Weeing, Anoush Abrar figureparmi les nominés avec MariBashtashevki (Danemark), PhilippeChancel (France), Annabel Elgar(Angleterre), Agnès Geoffray(France), Martin Kollar (Slovaquie),Marco Poloni (Italie-Suisse) etKourtney Roy (Canada). L’heureuxélu sera connu en juin 2015.

Huit nominés

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RC

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