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Chapter 1 Généralités sur l’optique physique : Nature physique et outils mathématiques de représentation de la lumière 1.1 "Optique" et "Photonique" La "Photonique" est le nom donné aux sciences et technologies traitant de la production, la détection, la manipulation et l’utilisation du rayonnement lumineux. Les applications sont innombrables: Tant dans les objets qui nous en- tourent, dont bon nombre utilisent la lumière (lecteur DVD, écran LCD, ap- pareil photo, microscopes, imprimante laser, internet, hologrammes, éclairage...), ont été fabriqués avec (microprocesseurs, DVD...) ou grâce à la lumière (cf BTP et les télémètres laser). Sans compter la compréhension des mécan- ismes de la vision chez les êtres vivants et les effets biologiques de la lumière (dont les applications médicales). Enfin la lumière est une sonde très puis- sante pour explorer la matière: ainsi la spectrophotomètrie est utilisée dans les laboratoires d’analyse, mais aussi en astrophysique (détermination de la température et de la composition des étoiles, leur mouvement, la présence de planètes extrasolaires...); l’analyse de la lumière diffusée par la matière ren- seigne sur la taille, la disposition et et la forme des particules qui la compose. J’oublie exprès les applications militaires, qui ne sont pas en reste... L’"optique" est la partie de la "photonique" qui concerne plus partic- ulièrement l’étude de la propagation de la lumière. C’est ce dont ce cours va traiter. Il fait suite aux cours des années antérieures : 1

Généralités sur l’optique physique : Nature physique … · NB Ce type d’équation n’est pas propre à l’optique et l’électromagnétisme (cf acoustique et ondes en mécanique:

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Page 1: Généralités sur l’optique physique : Nature physique … · NB Ce type d’équation n’est pas propre à l’optique et l’électromagnétisme (cf acoustique et ondes en mécanique:

Chapter 1

Généralités sur l’optiquephysique : Nature physique etoutils mathématiques dereprésentation de la lumière

1.1 "Optique" et "Photonique"

La "Photonique" est le nom donné aux sciences et technologies traitant dela production, la détection, la manipulation et l’utilisation du rayonnementlumineux.

Les applications sont innombrables: Tant dans les objets qui nous en-tourent, dont bon nombre utilisent la lumière (lecteur DVD, écran LCD, ap-pareil photo, microscopes, imprimante laser, internet, hologrammes, éclairage...),ont été fabriqués avec (microprocesseurs, DVD...) ou grâce à la lumière (cfBTP et les télémètres laser). Sans compter la compréhension des mécan-ismes de la vision chez les êtres vivants et les effets biologiques de la lumière(dont les applications médicales). Enfin la lumière est une sonde très puis-sante pour explorer la matière: ainsi la spectrophotomètrie est utilisée dansles laboratoires d’analyse, mais aussi en astrophysique (détermination de latempérature et de la composition des étoiles, leur mouvement, la présence deplanètes extrasolaires...); l’analyse de la lumière diffusée par la matière ren-seigne sur la taille, la disposition et et la forme des particules qui la compose.J’oublie exprès les applications militaires, qui ne sont pas en reste...

L’"optique" est la partie de la "photonique" qui concerne plus partic-ulièrement l’étude de la propagation de la lumière. C’est ce dont ce cours vatraiter. Il fait suite aux cours des années antérieures :

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L1 : propagation de la lumière dans systèmes optiques en vue de laformation des images : "rayons lumineux" et optique géométrique

L2 : optique "physique" : nature ondulatoire et électromagnétique de lalumière, interférences, polarisation

L3 : optique encore plus "physique" : conséquences de la nature ondu-latoire de la lumière sur sa propagation, et applications. Interaction avec lamatière et propagation dans des milieux matériels anisotropes.

Au delà de ses applications en "photonique", ce cours empruntera, in-troduira et illustrera des concepts utilisés dans de nombreux domaines dela Physique (électromagnétisme, acoustique, mécanique quantique...). Enparticulier le concept de "transformation de Fourier", qui fait l’objet d’unebonne partie du cours de maths de L3, apparaîtra très fréquemment dans cecours d’optique.

Livres généraux de références :

• E. Hecht "Optique" (Traduction française de la 4ème édition) PearsonEducation, 2005

• J.P. Perez "Optique, fondements et applications", 6ème édition, Dunod,2000

• G. Chartier "Manuel d’Optique", Hermes, 1977

• NB vision optique très originale R.P. Feynman "Lumière et matière",InterEditions, 1987, réédité collection "Points" (ed. Seuil)

1.2 La lumière: une onde électromagnétique solu-tion des équations de Maxwell

L’électromagnétisme est basé sur le concept de "champs" électrique et mag-nétique, vecteurs fonctions de l’espace et du temps au moyen desquels s’exprimentles actions sur la matière. Les lois de l’électromagnétisme s’expriment math-ématiquement sous la forme des équations de Maxwell, dont les champs sontsolutions.

1.2.1 Dans le vide: ondes se propageant à la vitesse c

Dans le vide, les équations de Maxwell peuvent être combinées pour donnernaissance à l’" équation de propagation " :

∆E − µ0ϵ0∂2E

∂t2= 0 (1.1)

idem pour B plus

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Figure 1.1: Propagation suivant le sens des z croissant.

rotE = −∂B∂t

(1.2)

et µ0ϵ0 = 1/c2 où c= vitesse de la lumièreNoter que l’Eq. 1.1 comprend en fait 3 équations, une pour chaque

composante de ELes solutions à ces équations de propagation incluent des "ondes électro-

magnétiques", dont la lumière fait partie.Un cas particulier simple est celui d’une onde ne dépendant que de z et

où une seule composante, mettons Ex est non nulle. Alors Eq. 1.1 se réduità:

∂2Ex∂z2

− 1

c2∂2Ex∂t2

= 0 (1.3)

qu’on peut réécrire sous la forme

(∂Ex∂z

− 1

c

∂Ex∂t

).(∂Ex∂z

+1

c

∂Ex∂t

) = 0 (1.4)

dont on peut facilement vérifier que Ex = f(z− ct) ou Ex = g(z+ ct), ou lasomme Ex = f(z − ct) + g(z + ct) sont solutions (f et g étant des fonctionsquelconques)

On voit que f(z − ct) correspond à une fonction de z ayant une certaineforme à t = 0, et qui à instant t > 0 à la même forme déplacée de δz = ct(cf Fig.1.1)

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NB Ce type d’équation n’est pas propre à l’optique et l’électromagnétisme(cf acoustique et ondes en mécanique: Helmoltz, a eu une contribution im-portante dans ce domaine, avant Maxwell)

1.2.2 Dans un milieu "diélectrique": la vitesse de propaga-tion des ondes dépend de la "constante diélectrique"du matériau

Le problème n’est a priori pas évident car la matière condensée est constituéed’une multitude de "particules élémentaires" chargées. En fait on simplifie leproblème en considérant (cf cours d’électromagnétisme) un "champ moyen"(moyenne sur un volume grand devant la taille des molécules constituantle matériau), qui obéit alors aux mêmes équations que E dans le vide àcondition de remplacer ϵ0 par ϵ0.ϵr où ϵr est la "permittivité", ou "constantediélectrique" du matériau.

Il en résulte des ondes se propageant à la vitesse c′ = 1/√ϵ0ϵrµ0 = c/n

où n =√ϵr, est donc l’"indice de réfraction" du milieu.

Exemples

• Verre: ϵr ∼ 7,√ϵr ∼ 2, 6 mais n ∼ 1, 5...

• Eau ϵr ∼ 80,√ϵr ∼ 9 mais n ∼ 1, 3...

Ceci illustre la variation de ϵr, et donc de n, avec la fréquence (la couleurdans la gamme visible) du rayonnement, car la permittivité "électrostatique"à ν = 0 peut être très différente de la permittivité aux fréquences optiques.Ce phénomène de "dispersion" (dont le nom provient du phénomène bienconnu de la dispersion de la lumière blanche par un prisme) est lié à la"réponse de la matière à l’application d’un champ électrique et comprendplusieurs contributions, liées à l’existence de plusieurs types de particules(électrons, ions...) qui ont chacun des comportements différents; A bassefréquence toutes les particules sont mobilisés par le champ. Dans la gammedes rayonnements visibles, il n’ y a guère que les électrons qui sont mis enmouvement (les ions plus lourds sont "gelés") et ordinairement l’indice croîtavec la fréquence (décroît avec la longueur d’onde), comportement qualifiéde "dispersion "normale". (cf Hecht, §3.5.1, ou Chartier, chapitre 8).

La notion de permittivité suppose le milieu "isotrope" et "linéaire". Ceciest valable pour la plupart des milieux amorphes (verres, liquides, gaz...)dans les conditions habituelles où l’intensité du rayonnement n’est pas trèsforte. Il y a des situations où ce n’est pas le cas: milieux cristallins (milieux"biréfringents", cf TP et suite de ce cours), rayonnements lasers intenses (cfcours "optique et laser" de M1).

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1.2.3 Propagation de la lumière dans le cas général

Une situation physique comprend

• des sources (émetteurs de rayonnement)

• de la matière :-particules diffusantes-"obstacles" absorbants ou réfléchissants-milieux matériels diélectriques (On se désintéressera dans ce cours duchamp dans les milieux absorbants ou réfléchissants, qu’on supposeranul)

L’obtention des solutions correspondantes de l’équation de propagationest un problème mathématiquement difficile: en général il n’ y a pas desolution "analytique" (exprimable en termes de fonctions mathématiquessimples comme cos, log etc...) Mais cela ne veut pas dire que la solutionn’existe pas (sinon c’est que la Nature n’existerait pas!).

Ni même qu’on ne peut pas la calculer:-il existe des méthodes numériques (" codes de calculs ", logiciels com-

merciaux)-on peut utiliser des représentations simplifiées et incomplètes de la réalité

physique, qui conduisent à des équations dont les solutions sont une bonneapproximation de ce qu’on à calculer.

En pratique on ne cherche pas la solution générale et complète d’uneéquation, on cherche la solution à un problème!

L’une des approximations les plus importantes que nous considéreronsdans ce cours pour décrire la propagation de la lumière est le "principed’Huyghens-Fresnel". Elle sera étudiée en détail dans le chapitre suivant.L’application de ce principe en optique repose généralement sur une représen-tation simplifiée du champ lumineux connue sous le nom d’approximationscalaire, que nous allons maintenant présenter.

1.3 Le champ lumineux peut être le plus souventreprésenté par une seule quantité ψ(t, r) ("ap-proximation scalaire")

Le champ électrique est un vecteur avec 3 composantes, idem pour B. L’équationde propagation étant la même pour toutes les composantes, on à envie dedire que la forme mathématique de la solution de l’équation de propagationest à un facteur près la même pour toutes les composantes, qu’on symbolisepar la quantité ψ. Cela est effectivement proche de la réalité dans un très

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grand nombre de situations. Cette représentation du champ électromagné-tique par une seule fonction ψ(r, t) est connue sous le nom d’ "approximationscalaire". On l’utilisera presque toujours.

Ceci n’est pas valable si la vitesse de propagation dépend de la directiondu champ (c’est le des des milieux anisotropes tels que les cristaux, cf plustard).

Cette approximation revient à dire aussi que les "conditions aux lim-ites" imposées lors de l’interaction de la lumière avec la matière sont lesmêmes pour toutes les composantes à la fois des champs magnétique et élec-trique. Ce qui n’est pas exact (cf par exemple en électrostatique au voisinaged’un conducteur la composante tangentielle du champ est nulle, mais pas lacomposante normale). D’une façon générale cette description n’est pas val-able très près des surfaces matérielles, avec des conséquences visibles sur lesphénomènes de réflexion de la lumière sur les surfaces réfléchissantes (cf TPet cours électromagnétisme). Elle n’est pas valable non plus lorsque le champélectromagnétique varie beaucoup sur des distances de l’ordre de la longueurd’onde, par exemple au voisinage du point focal d’un objectif de microscope:Cf J.D. Jackson, "Electrodynamique classique", (3ème ed. Dunod, 2001),ch. 10. 1

Dans toute la suite, sauf lorsqu’on s’intéressera explicitement à l’état depolarisation du champ et à sa propagation dans les milieux anisotropes, ondécrira donc le champ électromagnétique par cette seule vibration scalaire ψobéissant à l’équation

∆ψ − n2

c2∂2ψ

∂t2= 0 (1.5)

1.4 Toute onde peut être considérée comme la su-perposition d’ondes monochromatiques planes

La propriété fondamentale des équations de Maxwell et des équations depropagation cf Eq.1.1 qui en dérivent pour les champs E et B (et aussi biensûr pour l’Eq.1.5 pour le champ scalaire ψ) sont d’être "linéaires", et d’avoirdes solutions du type onde propagative monochromatique plane:

1.4.1 Linéarité

Si le champ ψ1(r, t) et le champ ψ2(r, t) sont solutions, alors ψ1+ψ2 "superpo-sition cohérente des champs 1 et 2" est également solution (Rigoureusement

1A noter que l’on parle beaucoup de "nanophotonique", relative à l’étude del’interaction de la lumière avec des structures "nanométriques", donc plus petites ou del’ordre de la longueur d’onde (qui est typiquement de quelques centaines de nm). Ladescription de ces effets relève réellement de l’électromagnétisme dans sa formulation, laplupart des représentations classiques utilisées en optique physique se révélant le plussouvent inapplicables dans ce cas.

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Figure 1.2: Exemple de décomposition d’une fonction quelconque (ici unefonction créneau) en somme d’oscillations monochromatiques de fréquencesdifférentes

valable aussi, ainsi que la suite de cette section, pour les solutions des équa-tions de Maxwell).

1.4.2 Solutions "monochromatiques" (ou "harmoniques")

L’Eq. 1.5 admet des solutions "monochromatiques":

ψ(t; r) = ψ0(r) cos(ϕ(r)− ωt) (1.6)

avec le cas particulier important des ondes planes monochromatiques sepropageant suivant Oz:

ψ(t;x, y, z) = ψ0 cos(ω

c(z − ct)) (1.7)

ou plus généralement suivant la direction définie par le vecteur d’onde k denorme2 |k| = ω/c:

ψ(t; r) = ψ0 cos(k.r − ωt) (1.8)

1.4.3 Décomposition en ondes planes monochromatiques

Inversement, la linéarité implique que toute onde ayant une dépendance tem-porelle quelconque peut être considérée comme superposition (en général

2dans un milieu diélectrique d’indice n remplacer c par c/n

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compliquée) d’ondes monochromatiques (cf cours de Maths, série de Fourieret transformation de Fourier et Fig.1.2):

ψ(t; r) =∑ωi

ψ0(ωi; r) cos(ϕ(ωi; r)− ωit) (1.9)

ou plus généralement

ψ(t; r) =

∫ψ0(ω, r) cos(ϕ(ω, r)− ωt)dω (1.10)

Cette propriété s’étend à la dépendence spatiale: toute onde monochroma-tique de fréquence ω ayant une dépendence spatiale quelconque peut aussiêtre représentée comme superposition d’ondes planes monochromatiques:

ψ(t; r) =

∫ψ0(k) cos(k.r − ωt)dkxdkydkz (1.11)

où on notera que les variables kx, ky, kz ne sont pas indépendantes, puisque|k| = ω/c.

Ce type de décompositions est l’outil mathématique numéro un pourdécrire les phénomènes de diffraction des ondes. La relation entre ψ(t)et ψ0(ω), et entre ψ(r) et ψ0(k) traduit le concept de "transformation deFourier".

1.5 Energie et éclairement asssociés à l’onde lu-mineuse sont proportionnels à l’amplitude aucarré |ψ0|2 de la vibration

Ce qu’on détecte en optique ce n’est en général pas directement les champsE ou B, ce sont le plus souvent des photons, énergie prélevée sur le champlumineux.

Deux types de situations (cf Fig.1.5):

• cf caméra CCD : la lumière collectée par l’objectif est focalisée surles différents pixels où sont générés des électrons proportionnellementaux nombre de photons incidents. On est alors sensible au flux de lalumière incidente, c’est le cas le plus fréquent.

• cf cas de molécules fluorescentes en suspension, ou des grains d’argentdans une émulsion photographique l’effet (nombre de photons émis ounombre de grains impressionnés par unité de temps) est sensible à ladensité locale de photons (indépendant de leur direction de propaga-tion).

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Figure 1.3: Deux types de schémas de détecteurs lumineux. a.: Une sur-face photosensible intercepte le flux lumineux incident qu’elle convertit enun signal électrique. b.: Des molécules absorbent le rayonnement indépen-damment de sa direction incidente, qu’elle convertissent en rayonnementde fluorescence qui peut être détecté. Une émulsion photographique fonc-tionne de manière un peu similaire en ce sens que des microcristaux d’iodured’argent absorbent le rayonnement indépendemment de sa direction et sontconvertis en argent métallique, idem pour les résines photosensibles utiliséesdans la fabrication de masques pour la gravure de microstructures.

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Pour un champ électromagnétique E(r, t), B(r, t) dans le vide (ou dansl’air, peu différent du vide), les lois de l’électromagnétisme montrent l’existenced’une densité d’énergie électromagnétique

U =ϵ0E

2

2+B2

2µ0= UE + UB (1.12)

Pour une onde assimilable localement à une onde plane propagative (casle plus courant), on montre que B = E/c = E.

√(µ0ϵ0) d’où UE = UB

et U = 2UE (J/m3) On a alors un "flux d’énergie" I (éclairement W/m2)suivant la direction de propagation correspondant à la longueur du vecteurde Poynting S = E ∧ B/µ0 qui vaut I = Uc (cf (J/m3).m/s=(J/s)/m2)également proportionnel à la densité d’énergie locale d’énergie U .

En fait en optique le détecteur ne suit pas les oscillations rapides de Eet B, il est sensible à l’énergie reçue pendant un intervalle de temps ∆t enpratique très long devant la période caractéristique d’oscillation du champ.Cette énergie est donc proportionnelle à la quantité:∫ T+∆t

TU(t)dt

qui lorsqu’on divise par ∆t donne la "valeur moyenne" de U autour del’instant T :

< U >(T )=1

∆t

∫ T+∆t

TU(t)dt (1.13)

Pour un champ monochromatique E = E0(r) cos(ωt− ϕ(r)), on a alors

< U >=< 2UE >=< ϵ0E2 >= ϵ0E

20(r)/2

Noter que si la phase fluctue avec le temps -ce qui est le cas- en principe çacomplique: En effet cette phase est le plus souvent la somme d’une quantitéstationnaire et d’une quantité fluctuante (ϕ(r) + θ(t)). Mais comme ∆t >>2π/ω), en fait ça ne change rien.

D’une façon générale on admettra alors que détecteur est sensible soitau flux d’énergie (éclairement I) soit dans certains cas à la densité localed’énergie électromagnétique, les deux étant proportionnels à < E2 >= E2

0/2,donc en fait à l’amplitude module carré |ψ0|2 de la vibration scalaire représen-tant le champ.

1.6 Outils mathématiques de représentation des on-des monochromatiques

Les ondes monochromatiques sont un élément de base particulièrement im-portant dans la description des ondes physiques, et on est souvent amené à

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considérer la somme de telles ondes. Pour cela il est commode de raison-ner sur la représentation complexe algébrique ou géométrique de ces ondesmonochromatiques 1.6:

1.6.1 Représentation complexe

On peut en effet réécrire l’expression 1.6 sous la forme3

ψ(t, r) = ℜe[ψ0 exp(−i(ωt− ϕ(r))] (1.14)

Dans la suite on écrira souvent simplement ψ = ψ0 exp(−i(ωt − ϕ(r))sous entendant le fait qu’en réalité la quantité physique mesurée est la partieréelle de cette expression.

Application à la représentation de la somme de 2 ondes de mêmefréquence

Ceci permet de représenter la somme de 2 ondes ψ′ et ψ′′ sous la forme

ψ′(t, r)+ψ′′(r, t) = ℜe[ψ′0 exp(−i(ωt−ϕ′(r))+ψ′′

0 exp(−i(ωt−ϕ′′(r))] (1.15)

soit plus simplement

ψ′(t, r) + ψ′′(r, t) = ℜe[exp(−iωt)(ψ′0 exp iϕ

′(r) + ψ′′0 exp iϕ

′′(r))] (1.16)

Expression de la valeur moyenne du produit de 2 ondes de mêmefréquence

On est souvent intéressé à calculer la valeur moyenne dans le temps duproduit de deux vibrations (un cas particulier important est le calcul del’intensité associée à une onde somme de plusieurs composantes).

Soit ψ′(t) = ℜeZ ′(t) et ψ′′(t) = ℜeZ ′′(t) où Z ′(t) = Z ′0 exp(−iωt) et

Z ′′(t) = Z ′′0 exp(−iωt) avec Z ′

0 = ψ′0 exp iϕ

′ et Z ′′0 = ψ′′

0 exp iϕ′′.

Alors il est facile de montrer que la valeur moyenne dans le temps duproduit de ψ′ et ψ′′:

< ψ′.ψ′′ >= lim∆t→∞

1

∆t

∫ T+∆t

Tψ′(t).ψ′′(t)dt

s’exprime simplement sous la forme:

< ψ′.ψ′′ >=1

2ℜe(Z ′.Z ′′∗) =

1

2ℜe(Z ′∗.Z ′′) (1.17)

où ∗ désigne le complexe conjugué.3On peut tout aussi bien prendre une représentation du type ℜe[ψ0 exp(i(ωt− ϕ(r))],

voire ℜe[ψ0 exp(i(ωt+ϕ(r))] c’est une affaire de convention, qu’il faut toutefois garder demanière cohérente

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Figure 1.4: Représentation de grandeurs oscillantes monochromatiques et deleur somme par des "phaseurs" dans le plan complexe

1.6.2 Représentation géométrique par " phaseur "

Une autre représentation commode d’une vibration monochromatique dutype Eq. 1.14 est celle du vecteur du plan complexe associé à z = ψ0 exp iϕ,représentation connue sous le nom de "vecteur de Fresnel" ou "phaseur".Dans ce cas la somme des deux vibrations ψ′ et ψ′′ est représentée par lasomme géométrique des vecteurs de Fresnel associés à z′ = ψ′

0 exp iϕ′ et

z′′ = ψ′′0 exp iϕ

′′ (cf Fig.1.4).

1.7 Superposition de sources lumineuses: additiondes champs ou addition des éclairements?

1.7.1 Superposition de deux champs?

Supposons qu’une source 1 donne champ ψ1, et une source 2 donne champψ2. Alors si les source 1 et source 2 allumées en même temps est-ce que lechamp résultant vaut ψ1 + ψ2 ?

Exemples d’une telle situation:

• plusieurs images d’une même source

• plusieurs lampes

• plusieurs lasers

• plusieurs atomes dans une même lampe

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• champs émis par un même atome à 2 instants successifs

Pas si simple ! Tient au fait que même lorsque sources émettent unrayonnement réputé monochromatique ψ(r, t) = ψ0(r) cos(ωt − ϕ(r)), c’esten fait ψ(r, t) = ψ0(r) cos(ωt−ϕ(r)−θ(t)) où θ(t) est une fonction fluctuanteavec un temps caractéristique grand devant la période 2π/ω, variant entre0 et 2π d’une manière différente suivant les sources, qui sont dites alors"incohérentes". Alors la somme ψ1 + ψ2 a une valeur qui fluctue, la phaseassociée à z = z1 + z2 fluctue entre 0 et 2π, et le module de z1 + z2 fluctueentre |ψ10−ψ20| et ψ10+ψ20 (immédiat à voir en raisonnant sur les phaseursFig.1.4).

Ceci renvoie d’ailleurs au problème assez subtil et délicat de la descrip-tion d’un " champ lumineux ": L’état le plus général d’un champ lumineuxn’est pas descriptible en terme du seul concept de champ électromagnétiqueclassique, c’est une superposition statistique "incohérente" de champs élec-tromagnétiques.

1.7.2 Energie et éclairement en présence du champ générépar deux sources

Si on a deux sources émettant les ondes ψ1 = ℜez1 et ψ2 = ℜez2 donnant cha-cune les éclairements I1 ∝< ψ2

1 >= (1/2)|z1|2 et I2 ∝< ψ22 >= (1/2)|z2|2,où

z1 = ψ01 exp(iϕ1 + iθ1(t)− iωt)

etz2 = ψ02 exp(iϕ2 + iθ2(t)− iωt)

l’éclairement résultant I est donné par la moyenne dans le temps 4

I ∝ 1

2ℜe[(z1 + z2).(z

∗1 + z∗2)] (1.18)

soit, en insérant les expressions de z1 et z2:

I ∝ 1

2(ψ2

01 + ψ202) + ψ10ψ20 cos[(ϕ1 + θ1(t))− (ϕ2 + θ2(t))] (1.19)

ouI = I1 + I2 + 2

√I1I2 cos[(ϕ1 + θ1(t))− (ϕ2 + θ2(t))] (1.20)

Noter le 3ème terme qui décrit "l’interférence" des ondes, sensible à ladifférence de phase entre les ondes.

4Suppose que θ1(t) et θ2(t) varient peu sur l’échelle de temps ∆t suivant lequel oncalcule l’éclairement (cf Eq.1.13)

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Sources cohérentes

Ce cas correspond au cas où θ1 − θ2 ne varie pas dans le temps, et estobtenu le plus souvent lorsque les 2 sources sont issues d’une seule dont lerayonnement a été dédoublé (cf trous d’Young, miroirs de Fresnel, couchesminces...). Donc les fluctuations de θ1 sont recopiées dans θ2. Alors le termed’interférence n’est pas nul, de telle sorte que l’éclairement résultant des 2ondes est différent en général de la somme des éclairements produits parchacune des ondes.

Sources incohérentes

C’est le cas le plus fréquent où les sources sont indépendantes. Dans ce casle terme d’interférence est tantôt positif, tantôt négatif suivant les valeursfluctuantes de θ1 et θ2, et en moyenne fait zéro. Cela revient à dire quele module au carré moyen du phaseur z1 + z2 est alors |z1|2 + |z2| , et quel’éclairement résultant est la somme des éclairements I = I1 + I2.

Nous discuterons un peu plus en détail ces points de cohérence du ray-onnement dans le chapitre 2.

1.8 Les rayons lumineux matérialisant le transportde l’énergie sont les lignes de champ du vecteurde Poynting, et sont perpendiculaires aux sur-faces d’onde

Depuis le début de ce chapitre on parle d’onde de lumière. Quel rapport ya-t-il avec le concept plus intuitif et déjà connu de "rayon lumineux"? On vavoir ici que les deux concepts peuvent être regroupés dans le cas très fréquentoù l’amplitude de l’onde varie lentement avec la position.

Physiquement, le rayon lumineux matérialise le trajet suivant lequel sepropage de l’énergie lumineuse émise depuis un point dans une directiondonnée. En électromagnétisme le flux d’énergie est donné en grandeur et endirection par le vecteur de Poynting (cf §1.5) S = E ∧ B/µ0. Cela suggèreque les rayons lumineux sont les lignes de champ du vecteur de Poynting. Cevecteur s’exprime en fonction des champs électrique et magnétique. Dans lecadre de l’approximation scalaire on a vu que l’onde résultant de l’émissiond’une source monochromatique peut être décrite par un champ de vibrationdu type: (cf Eq.1.14)

ψ(t, r) = ψ0(r) exp[i(ϕ(r)− ωt)]

où l’amplitude ψ0 est une quantité réelle. Cette approximation ne donnepas l’expression des champs magnétique et électrique, donc pas le vecteur

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de Poynting. Comment alors déduire du champ scalaire la trajectoire desrayons lumineux?

Dans le cas où on a affaire à une onde plane associée à un vecteur d’ondek l’électromagnétisme nous dit que le vecteur de Poynting est parallèle à k.Par ailleurs il est facile de montrer que dans ce cas k = gradϕ. Cela suggèred’examiner dans le cas général la relation entre le vecteur de Poynting etle gradient de la phase du champ. Dans ce cas général on considère que lapropagation s’effectue dans un milieu non homogène où l’indice varie suivantla position n(r).

Considérons alors les surfaces ϕ(r) = cte qu’on appelle surfaces équiphases,ou surfaces d’onde. Pour une onde "plane" (cf Eq.1.8) elles se réduisent àdes plans parallèles perpendiculaires à la direction de propagation définiepar le vecteur d’onde k. Dans le cas général elles sont courbes, mais on peuttoujours définir le vecteur gradϕ, qui par définition est orthogonal à la sur-face d’onde en chaque point. On peut alors montrer à partir des équationsde Maxwell (cf M. Born et E. Wolf, "Principles of Optics") que le vecteurde Poynting S est parallèle à gradϕ. Ceci confirme que les rayons lumineuxsont des lignes orthogonales aux surfaces d’onde. 5

Par ailleurs si l’amplitude ψ0(r) varie peu sur une distance de l’ordrede la longueur d’onde, (ce n’est en général pas le cas de la phase ϕ(r)) onmontre alors ("approximation iconale" ou "eikonale" , cf Perez ch17, ch 20-II,Chartier Annexe 3C) que :

| gradϕ| = ω

c.n (1.21)

où n est la valeur de l’indice de réfraction au point r.

Ainsi (Fig.1.5) les rayons lumineux sont des lignes orthogonales aux sur-faces équiphase de l’onde, phase dont la variation est donnée en chaque pointpar un vecteur d’onde local

gradϕ(r) = k = n(r)ω

cu

associé à l’onde plane tangente en r à la surface équiphase.5Dans notre exposé la "phase du champ" est définie comme celle du champ scalaire

Eq.1.14. En fait on peut aussi définir une phase pour chacune des composantes du champélectromagnétique, les surfaces équiphase du champ électromagnétique s’identifiant auxsurfaces équiphase du champ scalaire pour autant que la description en terme de champscalaire soit valable. C’est le cas si, comme on l’a dit, l’amplitude du champ varie peu surune distance de l’ordre de la longueur d’onde

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Figure 1.5: Les rayons lumineux sont parallèles au vecteur d’onde local per-pendiculaire à la surface d’onde.

Pour finir notons que le long d’un rayon repéré par l’abscisse curvilignes, la variation de la phase de l’onde est donnée par l’intégrale du gradientde ϕ:

∆ϕ =

∫dϕ

ds.ds

soit∆ϕ =

∫ω(n/c).ds =

ω

cL =

λL = ω∆t

où on fait apparaître la quantité L =∫n.ds qui n’est autre que le "chemin

optique" L, le long du rayon, ou L/c =∫n.ds/c = ∆t qui est le temps de

parcours de la lumière.

1.9 Un cas particulier important d’ondes: les ondessphériques

On considère le cas d’ondes ne dépendant que de la coordonnée radiale r.Ceci correspond au cas de l’émission à partir d’une source ponctuelle placéeen O. (En fait en éléctromagnétisme, l’émission par un dipôle oscillant placéen O ressemble à cette situation, mais le flux émis dépend de la direction).

En coordonnées sphériques (r, θ, ϕ) pour une fonction ψ ne dépendantque de r on a ∂ψ

∂θ = 0, ∂ψ∂ϕ = 0 et le laplacien ∆ψ se réduit à:

∆ψ =∂2ψ

∂r2+

2

r

∂ψ

∂r

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Figure 1.6: Onde sphérique divergent à partir du point O pris comme originedes coordonnées. Les surfaces équiphase (surface d’onde) en bleu sont descercles de centre O. En chaque point on peut définir un vecteur d’onde localqui est ici de norme constante, de direction radiale.

soit

∆ψ =1

r

∂2rψ

∂r2

et l’équation de propagation Eq.1.5 se réduit alors à (en prenant n = 1 poursimplifier l’écriture):

∂2rψ

∂r2− 1

c2∂2rψ

∂t2= 0

dont les solutions, sontrψ+ = f(r−ct): propagation suivant r croissant, onde divergente à partir

de r = 0ou rψ− = g(r+ ct): propagation suivant r décroissant, onde convergente

vers r = 0Noter la décroissance de ψ en 1/r qui assure que le flux de l’énergie

intégré sur sphère rayon r est indépendant de r, et donc que l’énergie seconserve lors de la propagation. Pour des ondes monochromatiques

ψ+ =1

rψ0 cos[

ω

c(r − ct) + ϕ0] = ψ0

cos(kr − ωt+ ϕ0)

r

ψ− = ψ0cos(−kr − ωt+ ϕ0)

r

avec k = ω/c

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On peut regrouper les deux cas sous la forme

ψ = ψ0cos(ϕ− ωt)

r

avecgradϕ = ±kur

ce qui indique que les surfaces d’onde sont des sphères de centre 0 (cfFig.1.6).Les rayons lumineux suivant lesquels se propage l’énergie leur sontperpendiculaires, ce sont comme on s’y attendait des droites issues de O.Pour une onde divergente, cela correspondant à l’onde issues d’une sourceponctuelle placée en O. L’onde convergente correspond au cas d’une ondequ’on focalise en O, situation pouvant être réalisée au moyen d’un systèmeoptique (lentille ou miroir).

Représentation complexe

ψ = ℜe[ψ0exp(i(±kr − ωt+ ϕ0))

r] (1.22)

Expression paraxiale

Au voisinage de l’axe Oz on remarque que r =√z2 + x2 + y2 vaut approxi-

mativement

r ∼ z +(x2 + y2)

2z

et donc

ψ ∼ ψ0 exp(−iωt)exp(±ikz)[exp(±ik(x2 + y2)/2R)]

R(1.23)

où l’on a fait apparaître le rayon de courbure R = z de la surface d’onde auvoisinage de r = z, expression qui contient l’onde plane comme cas limiteR = ∞ (cf Fig.1.6. Remarquer que R est une quantité qui peut être positiveou négative.

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