Gide - Retour de l'URSS

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A LA MMOIRE DE

EUGNE

DABIT

JE DDIE CES PAGES, REFLETS DE CE QUE J'AI VCU

ET pens prs DE LUI,AVEC LUI.

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RETOUR DE L'U. R. S. S.

(novembre 1936)

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L'hymne homrique Dmter raconte que la grande desse, dans sa course errante larecherche de sa fille, vint la Cour de Klos.L, nul ne reconnaissait, sous les traits em-

prunts d'une niania, la desse la garde d'un en fant dernier-n lui f ut confie par la reine Mtaneire, du petit Dmophon qui devint plus tard Triptolme, l'initiateur des travaux des champs. Toutes portes closes, le soir et tandis que la maison dormait, Dmter prenait Dmophon,l'enlevait de son berceau douillet et, avec une

apparente cruaut, mais en ralit guide parun immense amour et dsireuse d'amener jus-

qu' la divinit l'enfant, l'tendait nu sur un ardent lit de braises. J'imagine la grande Dmter penche, comme sur l'humanit future, sur ce nourrisson radieux. Il supporte l'ardeur des charbons, et cette preuve le fortifie. En lui, je ne sais quoi de surhumain se prpare, de robuste et d'inesprment glorieux. Ah que ne put Dmter poursuivre jusqu'au bout sa

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RETOUR DE LU. R. S. S.

tentative hardie et mener bien son dfi1 Mais

Mteneire inquite, raconte la lgende, fit irruption dans la chambre de l'exprience, faussement guide par une maternelle crainte, repoussa la desse et tout le surhumain qui se forgeait, carta les braises et, pour sauver l'enfant, perdit le dieu.

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AVANT-PROPOS

J'ai dclar, il y a trois ans, mon admiration pour l'U. R. S. S., et mon amour. L-bas une exprience sans prcdents tait tente qui nous gonflait le cur d'esprance et d'o nous attendions un immense progrs, un lan capabled'entraner l'humanit tout entire. Pour assis-

ter ce renouveau, certes il vaut la peine de vivre, pensais-je, et de donner sa vie pour y aider. Dans nos curs et dans nos esprits nous attachions rsolument au glorieux destin del'U. R. S. S. l'avenir mme de la culture nous

l'avons maintes fois rpt. Nous voudrions pouvoir le dire encore. Dj, avant d'y aller voir, de rcentes dcisions qui semblaient dnoter un changement

d'orientation ne laissaient pas de nous inquiter.

J'crivais alors (Octobre 1935)

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RETOUR DE L'U. R. S. S.

C'est aussi, c'est beaucoup la btise et la malhonntet des attaques contre l'U. R. S. S.

qui f ont qu'aujourd'hui nous mettons quelque obstination la dfendre. Eux, les aboyeurs, vont commencer l'approuver lorsque prcisment nous cesserons de le faire car ce qu'ilsapprouveront ce seront ses compromissions, ses

transigeances et qui feront dire aux autres Vous voyez bien mais par o elle s'cartera du but que d'abord elle poursuivait. Puissenotre regard, en restant fix sur ce but, ne

point tre amen, par l mme, se dtournerde l'U. R. S. S..

(N. R. F. Mars 1936.)

Pourtant, jusqu' plus ample inform m'enttant dans la confiance et prfrant douter de mon propre jugement, quatre jours aprs mon arrive Moscou je dclarais encore dans mon discours sur la Place Rouge, l'occasion desfunrailles de Gorki Le sort de la culture

est li dans nos esprits au destin mme del'U. R. S. S.. Nous la dfendrons.

J'ai toujours profess que le dsir de demeurer constant avec soi-mme comportait trop

souvent un risque d'insincrit

et j'estime que

s'il importe d'tre sincre c'est bien lorsque la foi d'un grand nombre, avec la ntre propre, est engage.

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AVANT-PROPOS

Si je me suis tromp d'abord, le mieux est de reconnatre au plus tt mon erreur car je suis responsable, ici, de ceux que cette erreur entrane. Il n'y a pas, en ce cas, amour-propre qui tienne et du reste j'en ai fort peu. Il y a des choses plus importantes mes yeux que moi-mme plus importantes que l'U. R. S. S.c'est l'humanit, c'est son destin, c'est sa culture.

Mais m'tais-je tromp tout d'abord ? Ceux qui ont suivi l'volution de l'U. R. S. S. depuis peine un peu plus d'un an, diront si c'est moi qui ai chang ou si ce n'est pas l'U. R. S. S.. Et par l'U. R. S. S. j'entends celui qui la dirige. D'autres, plus comptents que moi, diront si ce changement d'orientation n'est peut-tre qu'apparent et si ce qui nous apparat comme une drogation n'est pas une consquence fatale de certaines dispositions antrieures.L'U. R. S. S. est en construction , il

importe de se le redire sans cesse. Et de l l'exceptionnel intrt d'un sjour sur cette immense terre en gsine il semble qu'on y assiste la parturition du futur. Il y a l-bas du bon et du mauvais je devrais dire de l'excellent et du pire. L'excellent fut

obtenu, au prix, souvent, d'un immense effort.L'effort n'a pas toujours et partout obtenu ce

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RETOUR DE L'u. R. S. S.

qu'il prtendait obtenir. Parfois l'on peut penser pas encore. Parfois le pire accompagne et double le meilleur on dirait presque qu'il en est la consquence. Et l'on passe du plus lumineux au plus sombre avec une brusqueriedconcertante. Il arrive souvent que le voyageur, selon des convictions prtablies, ne soit

sensible qu' l'un ou qu' l'autre. Il arrive trop souvent que les amis de l'U. R. S. S. se refusent voir le mauvais, ou du moins le reconnatre

de sorte que, trop souvent, la vrit sur l'U. R. S. S. est dite avec haine, et le mensonge avecamour.

Or, mon esprit est ainsi fait que son plus de svrit s'adresse ceux que je voudrais pouvoir approuver toujours. C'est tmoigner mal son amour que le borner la louange et je pense rendre plus grand service l'U. R. S. S. mme et la cause que pour nous elle reprsente, en parlant sans feinte et sans mnagement. C'est en raison mme de mon admira-

tion pour l'U. R. S. S. et pour les prodiges accomplis par elle dj, que vont s'lever mes critiques en raison aussi de ce que nous attendons encore d'elle en raison surtout de ce

qu'elle nous permettrait d'esprer. Qui dira ce que l'U. R. S. S. a t pour nous ? Plus qu'une patrie d'lection un exemple, un guide. Ce que nous rvions, que nous

AVANT-PROPOS

osions peine esprer mais quoi tendaientnos volonts, nos forces, avait eu lieu l-bas.

Il tait donc une terre o l'utopie tait en passede devenir ralit. D'immenses accomplissements dj nous emplissaient le cur d'exigence. Le plus difficile tait fait dj, semblaitil, et nous nous aventurions joyeusement dans cette sorte d'engagement pris avec elle au nom de tous les peuples souffrants. Jusqu' quel point, dans une faillite, nous sentirions-nous de mme engags ? Mais laseule ide d'une faillite est inadmissible.

Si certaines promesses tacites n'taient pas tenues, que fallait-il incriminer ? En fallait-il tenir pour responsables les premires directives, ou plutt les carts mmes, les infractions, les accommodements si motivs qu'ils fussent ?.

Je livre ici mes rflexions personnelles sur ce que l'U. R. S. S. prend plaisir et lgitime orgueil montrer et sur ce que, ct de cela, j'ai pu voir. Les ralisations de l'U. R. S. S. sont, le plus souvent, admirables. Dans des contres entires elle prsente l'aspect dj riant du bonheur. Ceux qui m'approuvaient de chercher, au Congo, quittant l'auto des gouverneurs, entrer avec tous et n'importe qui en contact direct pour m'instruire, me reprocheront-ils d'avoir apport en U. R. S. S. un sem2

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blable souci et de ne me laisser point blouir ? Je ne me dissimule pas l'apparent avantage que les partis ennemis ceux pour qui l'amour de l'ordre se confond avec le got des tyrans1 vont prtendre tirer de mon livre. Et voici qui m'et retenu de le publier,de l'crire mme, si ma conviction ne restait

intacte, inbranle, que d'une part l'U. R. S. S. finira bien par triompher des graves erreurs que je signale d'autre part, et ceci est plusimportant, que les erreurs particulires d'un pays ne peuvent suffire compromettre la vritd'une cause internationale, universelle. Le men-

songe, ft-ce celui du silence, peut paratreopportun, et opportune la persvrance dans le mensonge, mais il fait l'ennemi trop beau jeu, et la vrit, ft-elle douloureuse, ne peut blesser que pour gurir.i. Tocqueville, De la Dmocratie en Amrique.(Introduction.)

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I

En contact direct avec un peuple de travailleurs, sur les chantiers, dans les usines ou dans

les maisons de repos, dans les jardins, les parcs de culture , j'ai pu goter des instants de joie profonde. J'ai senti parmi ces camaradesnouveaux une fraternit subite s'tablir, mon

cur se dilater, s'panouir. C'est aussi pourquoi les photographies de moi que l'on a prises l-bas me montrent plus souriant, plus riant mme, que je ne puis l'tre souvent en France. Et que de fois, l-bas, les larmes me sont venues aux yeux, par excs de joie, larmes de tendresse et d'amour par exemple, cette maison de repos des ouvriers mineurs de Dombas auxenvirons immdiats de Sotchi. Non, non il

n'y avait l rien de convenu, d'apprt j'tais arriv brusquement, un soir, sans tre annonc mais aussitt j'avais senti prs d'eux la confiance.

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Et cette visite inopine dans ce campement d'enfants, prs de Borjom, tout modeste, humble presque, mais o les enfants, rayonnants de bonheur, de sant, semblaient vouloir m'offrir leur joie. Que raconter ? Les mots sont impuissants se saisir d'une motion si profonde et si simple. Mais pourquoi parler de

ceux-ci plutt que de tant d'autres ? Potes de Gorgie, intellectuels, tudiants, ouvriers surtout, je me suis pris pour nombre d'entre eux d'une affection vive, et sans cesse je dplorais de ne connatre point leur langue. Mais dj se lisait tant d'loquence affectueuse dans les sourires, dans les regards, que je doutais alors si des paroles y eussent pu beaucoup ajouter.Il faut dire que j'tais prsent partout l-bas comme un ami ce qu'exprimaient encore les regards de tous, c'est une sorte de reconnaissance. Je voudrais la mriter plus encore et cela aussi me pousse parler.

Ce que l'on vous montre le plus volontiers, ce sont les plus belles russites il va sans direet cela est tout naturel mais il nous est arriv

maintes fois, d'entrer l'improviste dans des coles de village, des jardins d'enfants, des clubs, que l'on ne songeait point nous montrer et qui sans doute ne se distinguaient en rien de beaucoup d'autres. Et ce sont ceux que

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j'ai le plus admirs, prcisment parce que rien n'y tait prpar pour la montre.Les enfants, dans tous les campements de pionniers quej'ai vus, sont beaux, bien nourris (cinq repas par jour), bien soigns, choys mme, joyeux. Leur regard est clair, confiant leurs rires sont sans malignit, sans malice

on pourrait, en tant qu'tranger, leur paratre un peu ridicule pas un instant je n'ai surpris,chez aucun d'eux, la moindre trace de mo-

querie.

Cette mme expression de bonheur panoui,nous la retrouverons souvent chez les ans,

galement beaux, vigoureux. Les parcs de culture o ils s'assemblent au soir, la journede travail acheve, sont d'incontestables russites entre tous, celui de Moscou.

J'y suis retourn souvent. C'est un endroit o l'on s'amuse comparable un Luna-Park qui serait immense. Aussitt la porte franchie on se sent tout dpays. Dans cette foule de jeunes gens, hommes et femmes, partout le

srieux, la dcence pas le moindre soupon de rigolade bte ou vulgaire, de gaudriole, de grivoiserie, ni mme de flirt. On respire partout une sorte de ferveur joyeuse. Ici, des jeux sont organiss l, des danses d'ordinaire un animateur ou une animatrice y prside et les rgle,

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et tout se passe avec un ordre parfait. D'immenses rondes se forment o chacun pourrait prendre part mais les spectateurs sont toujours beaucoup plus nombreux que les danseurs. Puis ce sont des danses et des chants populaires, soutenus et accompagns le plus souvent par un simple accordon. Ici, dans cet espace encloset pourtant d'accs libre, des amateurs s'exercent diverses acrobaties un entraneur sur-

veille les sauts prilleux conseille et guide plus loin, des appareils de gymnastique, des agrs l'on attend patiemment son tour l'on s'entrane. Un grand espace est rserv aux terrains de volley ball et je ne me lasse pas de contempler la robustesse, la grce et la beautdes joueurs. Plus loin ce sont les jeux tranquilles checs, dames et quantit de menus jeux d'adresse ou de patience, dont certains que je ne connaissais pas, extrmement ingnieux comme aussi quantit de jeux exerant

la force, la souplesse ou l'agilit, que je n'avais vus nulle part et que je ne puis chercher dcrire, mais dont quelques-uns auraient certainement grand succs chez nous. De quoi vous occuper pendant des heures. Il y en a pour les adultes, d'autres pour les enfants. Lestout petits ont leur domaine part, o ils trouvent de petites maisons, de petits trains, de petits bateaux, de petites automobiles et quan-

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