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GILDOR , « ROY » DE LA SCèNE Amoureux et grand connaisseur de l’histoire des Caraïbes, acteur, animateur, chanteur country, Gildor junior ou Gildor II, tel un roi, n’a pas fini d’impressionner «ses sujets». Lors du tournage de la capsule Le Québec, une histoire de famille, nous avons eu la chance d’avoir un entretien avec lui au cours duquel il nous a raconté avec ferveur ses premiers spectacles dans la grange familiale, l’histoire de ses ancêtres et certains souvenirs d’enfance. PAR Marie-Anne Alepin Honoré plusieurs fois, Gildor a participé à une vingtaine de films, à près d’une quarantaine d’émissions de télé en tant que comédien ou animateur et à autant de productions théâtrales. PHOTO: MONIQUE RICHARD

Gildor roy de la scènelequebecunehistoiredefamille.com/sites/default/files/7...Montréal, vit à Baton Rouge, en Louisiane. Elle a fait une maîtrise en composition d’opé-ras

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Gildor, «roy» de la scène

Amoureux et grand connaisseur de l’histoire des Caraïbes, acteur,

animateur, chanteur country, Gildor junior ou Gildor II, tel un roi, n’a pas fini

d’impressionner «ses sujets». Lors du tournage de la capsule Le Québec, une

histoire de famille, nous avons eu la chance d’avoir un entretien avec lui au

cours duquel il nous a raconté avec ferveur ses premiers spectacles dans la

grange familiale, l’histoire de ses ancêtres et certains souvenirs d’enfance.

Par Marie-anne alepin

Honoré plusieurs fois, Gildor a participé à une vingtaine de films, à près d’une quarantaine d’émissions de télé en tant que comédien ou animateur et à autant de productions théâtrales.

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donné le goût d’en apprendre davantage sur vos ancêtres? Oui. À un moment donné, on est obligé d’ad-mettre qu’on fait partie de quelque chose de plus grand que seulement la famille immé-diate. Honnêtement, c’est un honneur et une fierté d’avoir été choisi pour participer à la capsule. Vous avez poursuivi votre propre lignée…Oui, j’ai deux garçons et une fille. Moi, je suis Gildor junior et j’avais un rêve secret de nommer mon fils aîné Gildor III, en chiffres romains. Je me disais qu’on ne pouvait pas être quelqu’un d’ordinaire avec un nom pareil et que ça devait être tripant d’avoir un fils qui porte ton nom. Comme la technicienne nous

a annoncé une fille lors de l’échographie, et que finalement à la naissance, c’était un gar-çon, on n’avait pas de nom. Je me suis dit: «Voilà ma chance! Je vais l’appeler Gildor III Roy…» Ma femme n’a pas voulu. (rires) Il s’appelle Luis-David Roy De Rodrigues. Il y a aussi William et Mahalia. Tous portent les noms des deux parents.avez-vous une histoire de famille à nous raconter?J’habite à Rigaud, et mon fils aîné a été baptisé à l’église de Sainte-Marthe, un petit village agricole en montagne. On a réalisé que mon arrière-grand-père, Ernest Roy, venait de là, et qu’il s’est ensuite installé dans le nord de l’On-tario. Mon père vient donc du nord de l’Onta-rio, mais c’était un Roy d’ici. Ce qui est bizarre, c’est qu’on est donc revenus au point de départ. Vous qui êtes acteur, chanteur, animateur, pensez-vous qu’il y a un trait particulier aux roy? Le frère de mon père a travaillé longtemps à la radio en Ontario, et ma tante, avec qui j’ai fait de la musique un bout de temps à Montréal, vit à Baton Rouge, en Louisiane. Elle a fait une maîtrise en composition d’opé-ras. Une autre tante a été longtemps direc-trice de divers centres culturels franco- ontariens. J’ai aussi un cousin qui a fait une école de théâtre professionnel. Quand j’étais jeune, on faisait des fêtes à la ferme. Puisque notre parenté venait de l’Abitibi- Témiscamingue et du nord de l’Ontario, on ne la voyait pas souvent. Quand on se réunissait pour ces fêtes, on était de 300 à 400 per-sonnes… On faisait de gros partys. Juste avec la famille, on composait des bands

de 10 ou 12 musiciens… Il y avait beaucoup de guitaristes, de pianistes, de batteurs, de chan-teurs et de violonistes dans la famille. Votre côté country vient donc de vos fêtes à la ferme?Oui, c’était peut-être propice, mais en réalité, mon côté country vient plutôt de mon père qui écoutait beaucoup ce genre de musique. Aussi, il chantait très bien. Mes premiers souvenirs musicaux, c’est mon père qui chante du Perry Como et du Hank Williams et toutes sortes de vieilles chansons — sur-tout en auto quand on allait voir mes grands-parents en Abitibi et au Témiscamingue et que la route était longue. Il a décidé d’appren-dre seul à jouer de la guitare à l’âge de 45 ans. Il était capable de chanter et de s’accompa-gner, il avait un vrai talent musical. Il m’a accompagné dans plusieurs de mes specta-cles où je le faisais monter sur scène. À quel moment avez-vous su que vous alliez faire du théâtre?Quand j’étais adolescent, j’étais maladivement gêné. J’allais dans un collège privé et j’étais le plus grand de la classe. Notre famille n’était pas très riche comparativement à d’autres. Tu sais, quand tu es ado, c’est bien important ces affaires-là. En secondaire 3, on a fait une pièce de théâtre dans le cours de français et, à ma première réplique sur la scène, j’ai su que c’était ça que je devais faire dans la vie. Pour la première fois, j’étais convaincu que les gens ne riaient pas de moi, et que c’était moi, qui les faisais rire. Ç’a été une révélation. Ce soir-là, je suis rentré à la maison, heureux, et j’ai dit à mes parents que je savais ce que je voulais faire dans la vie. Ils ont pris ça en riant, évi-demment, j’avais 13 ans! Mais j’étais sûr que ce serait mon métier, et ça ne s’est jamais démenti. comment a débuté votre carrière musicale?J’ai commencé à chanter dans la grange, puis j’ai joué dans des clubs et dans des bars. Au cégep, on s’était monté un band. Durant mes études en théâtre, on avait des cours d’opé-rette. Une fois diplômé, j’ai joué dans des opérettes et ensuite j’ai fait mon premier spectacle country à Montréal, à La Licorne. J’y jouais tous les dimanches et lundis soir, car la salle était libre, et on me l’avait offerte. Tout ça parce que les gens de La Licorne étaient mes amis et surtout parce qu’ils m’avaient vu à Star d’un soir alors que je chantais du country. Ma carrière country a commencé comme ça. J’ai fait des disques et des spectacles par la suite. avant de commencer l’entrevue, vous me disiez que sans le théâtre ou la musique, vous seriez peut-être devenu historien?Oui, oui! Paléontologue probablement. J’avais des 99 % au cours de civilisation, et la Rome antique et l’Égypte ancienne me

passionnaient. Plus jeune, j’ai beaucoup voyagé dans les Caraïbes, surtout en République dominicaine car, mes parents avaient une maison là-bas. J’ai commencé à lire et à m’intéresser à l’histoire du pays, donc aux indiens Taïnos, qui ont été exterminés après l’arrivée des Espagnols. J’étais fasciné par cette histoire bouleversante, et c’est devenu une passion au point où je pense être «pas pire connaissant» dans ce domaine. y allez-vous souvent? Ma femme vient de là, alors, quand on va souper chez la belle-mère, c’est là qu’on va! (rires) Ce n’est pas à Saint-Hyacinthe, c’est en République dominicaine. C’est juste un peu plus loin. Vous êtes né en abitibi-Témiscamingue, y retournez-vous de temps en temps?Pas assez souvent à mon goût! J’ai encore une

grande partie de ma parenté là-bas, tant du côté maternel que du côté paternel. Je trouve que c’est une région d’une grande beauté qui est encore mal connue. C’est correct comme ça, puisque ça préserve l’écosystème. (rires) Une petite question que j’aime poser: aviez-vous un surnom à l’école en lien avec votre patronyme?(rires) Oui, j’avais un surnom, mais pas à cause du nom Roy. Je suis né avec un léger handicap à une main qui est plus grosse que l’autre ( je suis le contraire de Peter MacLeod, qui a une main plus petite que l’autre). Un de mes bons amis à l’époque, qui est resté mon grand chum, m’appelait «Roy gros doigts». C’était juste niaiseux…Vous n’avez donc pas subi d’intimidation à l’école à cause de votre nom? J’ai quelque chose d’incendiaire à dire sur l’intimidation. J’ai 51 ans, donc il faut com-prendre le contexte. Dans le temps, à la récréation, on jouait au ballon- chasseur, on courait et, jusqu’à un certain point, on avait le droit de se tirailler. Une partie de l’intimida-tion se réglait à la récréation. Depuis qu’ils ont enlevé toutes les activités à risque de conflits dans les cours d’écoles, c’est étrange, mais la violence a augmenté dans les écoles. C’est vérifiable, tous les spécialistes le disent.

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Gildor au Centre Bell, près de la plaque honorifique de l’illustre gardien de but des Canadiens, Patrick Roy, durant du tournage de la capsule Le Québec, une histoire de famille.

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De Roy à VoisineDe son vrai nom Joseph Armand Roch, Roch Voisine est bel et bien un Roy puisqu’il est le descendant d’Antoine Roy dit Desjardins et de Marie Major. Le nom de Voisine est apparu il y a plusieurs généra-tions. Marie-Geneviève Côté, veuve de Jean-Baptiste Roy dit Desjardins, se remarie avec Philippe Voisine. Un enfant du premier mariage, Joseph-Marie Roy, élevé par Philippe Voisine, ajoute Voisine à son nom. Joseph-Marie Roy dit Voisine, commen-cera une autre branche de Voisine avec Marie-Anne Michaud avec qui il s’était marié à Kamouraska en 1776. L’arrière-arrière-grand-père de Roch, Elzéar Roy dit Voisine, portait encore le nom Roy.

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connaissiez-vous l’histoire de votre famille avant de participer au tournage de la capsule Le Québec, une histoire de famille?J’en avais une petite idée, car mes parents ont fait faire notre arbre généalogique dans les années 70. Je savais donc que le premier Roy de ma lignée vient du quartier Saint-Jean, de la ville de Caen, en Normandie. Ma famille du côté de ma mère, les Girard, vient d’un petit village tout près de là aussi; on est tous de la même «gang». (rires) En faisant notre arbre généalogique, on s’est rendu compte qu’on était des Roy dit Portelance, mais depuis quatre générations, on ne porte plus ce nom. Ce qui est drôle, c’est qu’à l’époque mon frère sortait avec une petite cousine sans le savoir, Brigitte Portelance.on finit par être tous parents au Québec…C’est vrai, et on a tous un grand-père ou une grand-mère qui a des traits étrangement amérindiens. Quand on regarde la photo de mon grand-père maternel, on dirait le sosie de Sitting Bull tellement ils se ressemblent. Il a dû y avoir des pow-wow dans certains tipis. (rires)incarnez-vous votre nom de famille? Au Moyen-Âge, Roy était un surnom qu’on donnait aux gagnants de concours… J’ai gagné des Félix et des MetroStar… (rires) Je ne sais pas si ça compte! (rires) Je trouve que c’est un nom porteur, et quand on est jeune, c’est assez facile de se mettre à rêver au monde de la chevalerie et au Moyen-Âge, surtout avec le nom Roy. Mais jamais je me suis dit: «Oh, je dois honorer mon nom de famille!»l’enregistrement de la capsule vous a-t-il

« Moi, je suis Gildor junior et j’avais un rêve secret de nom-mer mon fils aîné, Gildor III, en chiffres romains.»

Gildor a joué, durant huit ans, le garagiste Germain Langlois dans la série-culte Km/h.

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Gildor, le jour de sa première communion. il a six ans.

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les roy en bref• Ils sont 60 000 à porter

ce nom de famille au Québec et sont en 3e  position dans le pal marès des noms recensés dans la province.

• Plus de 100 immigrants Roy sont venus s’établir en Nouvelle-France et 29 d’entre eux auraient eu une descendance.

• Remontant aux XIIe et XIIIe siècles, le nom Roy a d’abord été un surnom avec plusieurs significa-tions: celui qui était le meilleur dans un domaine donné, celui qui avait gagné à des jeux disputés entre villages, celui qui exploitait des biens appartenant au roi ou encore, en Bretagne, celui qui était allé le premier à Saint-Jacques-de- Compostelle ou avait grimpé le premier le Mont-Saint-Michel. Il pouvait qualifier aussi un tempérament fier et distant. http://www.famillesroy.org http://lequebecunehis-toiredefamille.com/communaute/roy

élections américaines à l’automne prochain, c’est ça, le vrai choix que les gens auront à faire: la finance contre la possibilité pour tous d’aller à l’hôpital sans se ruiner. C’est tout le monde qui doit faire ce choix. Quels sont vos projets pour la prochaine année?Il y a plusieurs projets d’émissions qui se dessinent, mais rien de précis encore. Il y a aussi des projets de musique et de films. Je vais être encore fatigué l’an prochain… et je ne sais pas encore à cause de quoi. (rires)

Avec son album Une autre chambre d’hôtel sorti en 1994, Gildor a littéralement dépoussiéré le country québécois.

Gildor est le porte-parole de la Fondation de l’hôpital de suroît à salaberry-de-Valleyfield pour la campagne de financement je carbure avec mon hôpital.

À un moment donné, le méchant doit sortir avant que ça s’accumule et que ça devienne une intimidation organisée. C’est certain qu’internet n’aide pas non plus. J’ai com-mencé à porter des lunettes vers l’âge de huit ans. Elles n’étaient pas belles, mais en 1968, il n’y avait que trois modèles: le modèle «tes parents sont riches», le modèle «tes parents sont pas riches» et le dernier modèle «on va te les donner celles-là!» J’avais le dernier modèle! (rires) Un gars m’agaçait à cause de mes lunettes, et c’est la seule fois où je me suis battu à l’école. Il m’a intimidé une seule journée.Qu’est-ce qui vous préoccupe en ce moment dans le monde?Je viens de terminer le tournage du film Ésimésac, dans lequel je joue le rôle du forge-ron Riopel. On parle beaucoup de 2012, de la fin du monde avec l’histoire du calendrier maya. Mais je pense que la société est ren-due à un point où il va falloir choisir entre la vie communautaire au sens large — la vraie qualité de vie — ou la finance. Il va falloir choisir si c’est l’argent qui va mener le monde ou bien la qualité de vie. Durant les

« Il y avait beaucoup de guitaristes, de pianistes, de batteurs, de chanteurs et de violonistes dans la famille.»

C’est en chantant du country à l’émission Star d’un soir que la carrière de Gildor Roy a pris son envol et qu’il est devenu une figure de proue de la colonie artistique québécoise.

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