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GRAND ORIENT DE FRANCE

Rapport de synthèsesur les Questions à l’Étude des Loges

du Grand Orient de France

Année 2011

G.O.D.F. - Rapport de synthèse sur les Questions à l’Étude des Loges - Année 2011 1

� QUESTION D’INTÉRÊT GÉNÉRAL

La mondialisation et la solidarité sont-elles compatiblesou antinomiques ?

� Mondialisation et solidarité

La mondialisation est le plus souvent définie comme une internationalisation des échanges économiques, en accord avecla doctrine économique néolibérale pour laquelle l’individualismeet le profit seraient centraux. Sous sa forme actuelle, la mondialisation résulte de l’écroulement dans les années 1990du bloc communiste, et de la fin de l’opposition des deux blocsdécoulant de l’après-guerre. Cet écroulement a laissé librechamp au système néolibéral dont l’esprit domine actuellementl’économie mondiale.

La solidarité a été définie dans l’un des travaux comme « un liend'engagement et de dépendance réciproques entre des personnes ainsi tenues à l'endroit des autres, généralement desmembres d’un même groupe liés par une communauté de destin(famille, village, profession, entreprise, nation, etc.) ». Cette définition est largement partagée dans tous les travaux propo-sés. A l’inverse de la compassion et de la charité, qui peuventse ressentir ou se faire à sens unique, la solidarité nécessite unéchange entre personnes ayant conscience l’une de l’autre, uneréciprocité.

� Aspect économique de la mondialisation

Le premier aspect présenté de la mondialisation est la doctrinenéolibérale appliquée à l’échelle mondiale. Cet aspect de lamondialisation, le plus souvent décrit comme négatif, est res-ponsable d’une compétition acharnée entre les différents acteurs

économiques mondiaux. Cette compétition, qui pose la questionde la répartition des richesses produites par la mondialisationéconomique, se déroule aussi bien entre les pays qu’entre lesouvriers, notamment entre ouvriers des pays en voie de développement et ouvriers des pays développés. Selon les théories économiques libérales, l’internationalisation deséchanges permettrait d’accroître la richesse produite et la libéralisation de l’économie une juste répartition de celles-ci.Ceci semble en partie confirmé par les mutations actuelles de certains pays dits émergents tels que l’Inde ou laChine dont l’essor économique est remarquable. Mais aucontraire, la mondialisation conduirait à l’accumulation des richesses au sein de petits groupes de personnes privilégiées,y compris dans les pays émergents. Il s’en suit un chômage demasse dans les pays développés, par la disparition des entre-prises industrielles, mais aussi à une exploitation des ouvriersdes pays émergents associée à des conditions de travail, dessalaires et des prestations sociales bien plus faibles que dansles pays développés. Quant aux pays dits en développement,leur essor est pour beaucoup grevé par le manque de fonction-nement démocratique dont ils sont les victimes. L’aspect économique de la mondialisation tel qu’actuellement pratiquéest basé sur la seule compétition et s’en trouve donc antinomique avec le mot solidarité.

� Aspect géopolitique de la mondialisation

Le deuxième aspect de la mondialisation abordé est celui del’évolution du monde vers la forme d’un « village planétaire »dans lequel les distances ont très largement diminué entre lespays et les Hommes. Ceci aussi bien au niveau des temps deparcours d’un pays à l’autre que des distances culturelles.L’amélioration des moyens de déplacement a permis la globali-sation des échanges économiques. Les outils actuels de communication réduisent progressivement la distance culturelle

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et l’incompréhension entre les Hommes mais conduisent aussià une uniformisation des cultures, des modes de vie et des comportements. La création de ce village planétaire et la mondialisation de l’information permettent ainsi de connaîtrepresque en temps réel la situation dans les autres pays dumonde et facilite donc la conscience et la compréhension del’autre. Elle pourrait donc servir de terrain à la solidarité interna-tionale. Les nouvelles technologies de l’information conduisentcependant à de nouveaux genres de liens sociaux qui pourraientmodifier les valeurs actuelles. Et puisqu’elle se base sur lesconcepts néolibéraux, individualistes, la mondialisation actuellene semble pas pouvoir permettre l’émergence d’une solidaritéinternationale qui serait pourtant nécessaire. Les deux aspectsde la mondialisation, économique et culturelle, conduisent d’ailleurs de nombreuses personnes à se replier sur elles-mêmes au détriment de la solidarité et à s’orienter vers des sen-timents allant parfois à l’encontre des principes démocratiques.

� Aspect environnement de la mondialisation

Enfin, le troisième aspect qui ressort de la mondialisation estcelui d’une prise de conscience écologique et la compréhensionque les ressources sont limitées et que certains modes de vieactuels doivent changer. Il existe une interdépendance forteentre les Hommes qui doivent agir solidairement afin de protégerleur environnement. La résolution des problèmes environne-mentaux passe, de fait, par une conciliation entre mondialisationet solidarité.

� Antinomie ou complémentarité ?

L’antinomie entre mondialisation et solidarité réside première-ment dans la différence d’échelle entre ces deux notions. Alorsque la solidarité exprime un sentiment de destin commun entre

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deux individus, et nécessite cette perception pour pouvoir s’exprimer, la mondialisation économique actuelle est basée surdes valeurs individualistes de compétition. Cependant, le plusgrand nombre des travaux indique que mondialisation et solidarité ne sont pas substantiellement antinomiques mais plutôt complémentaires. Sans la solidarité, la mondialisation nepeut conduire qu’aux dérives individualistes actuelles et donc àla création de tensions toujours croissantes et au repli sur soi.

� Perspective d'avenir

En réaction, des solutions sont d’ores et déjà proposées qui résident dans l’économie sociale et solidaire, dont fait partie lecommerce équitable, et qui sont notamment portées par lesmouvements altermondialistes. En parallèle, l’éducation du plusgrand nombre semble aussi importante pour permettre unemondialisation qui se fasse en conscience, et qui ne soit pasruine de l’humanité. Le concept de mondialité proposé par lephilosophe Edouard GLISSANT semble répondre à ce besoinde concilier mondialisation et solidarité. La solution passe enfinpar l’émergence de systèmes supranationaux, seuls à même de répondre aux défis posés par la mondialisation : par une coopération entre pays, plutôt que par une compétition toujoursplus grande entre ceux-ci.

La solidarité est au cœur de la Franc-Maçonnerie qui pourraitjouer un rôle à l’échelle planétaire, en faisant entendre son message afin de faciliter l’émergence d’une solidarité pouvantcontrebalancer certains excès de la mondialisation. Son devoirest d’y travailler sans relâche et de replacer l’Homme au premierplan de la mondialisation.


� QUESTION SUR LA LAÏCITÉ

L'intégrisme ne commence pas quand la bombe explose, mais plutôt quand la pensée se fige.Qu'en pensez-vous ?

� Analyse

L'intégrisme est le refus de toute évolution d'une doctrine aunom du respect de la tradition. Il est systématiquement le fruitd'une attitude dogmatique correspondant à une pratique restric-tive de la doctrine : ce qui conduit toujours celles et ceux qui se laissent abuser à la certitude de détenir la vérité. En effet, l'intégrisme est un concept de certitudes inébranlables, de véritéabsolue n'acceptant ni contestation, ni déviance.Il n'y a pas de recherche, de dévoilement mais l'accomplisse-ment rigoureux des règles de pensée et de vivre prédétermi-nées. L'absolu de cette pensée ne peut engendrer questagnation, dogmatisme, étroitesse pouvant aller jusqu'à la passion exacerbée et à la folie humaine dévastatrice.

� Problématique

Aucun être humain ne naît intégriste, il le devient. L'intégrismepasse par des voies d'éducation qui s'apparentent à de l'endoc-trinement par des techniques de lavage de cerveau, à des créations de réflexes conditionnés ou dans la création d'uneconscience collective au détriment de la conscience individuelle.La pensée est figée dès que la dictature est établie, dèsqu’aucune liberté ne parcourt les consciences. Ainsi, tout est réduit à la soumission.

La pression exercée sur les hommes et plus particulièrementsur les femmes, le refus du droit à l'éducation, l'asservissement


aux pseudo-traditions qui ne sont là que pour accréditer cettedictature qui utilise Dieu comme prétexte d'une religion avilissante, tout ceci représente la pensée figée. Les femmesreprésentent un vecteur essentiel au développement social descommunautés auxquelles elles appartiennent. Là ou leshommes font la guerre, la paix sociale est rétablie par lesfemmes.

� Solutions

C'est en appuyant, en encourageant les initiatives locales d'éducation culturelle et sociale et plus particulièrement l'accèsà l'enseignement des femmes que l'intégrisme et la penséeunique pourront être battus en brèche. Il faut faire évoluer lapensée pour ébranler les certitudes et provoquer l'effondrementde ses fondements. A ce sujet, Georges CHARPAK et HenriBROCH (dans leur livre " Devenez sorciers, devenez savants ")disaient : "L'éducation, seul antidote à la prise en main par lesintégristes religieux ou politiques transmettant leurs transes àdes foules assommées par la misère et abruties par l'ignorance".

La société humaine doit être en construction permanente dansla recherche incessante de la libération des esprits dans unecommunauté ouverte à la pensée qui se devrait nomade et fructueuse. Voilà pourquoi il est important que la laïcité soit demise dans toute les démocraties là ou la règle sociale doit prendre le pas sur les croyances de toute origine.

Le combat contre l'intégrisme passe aussi par l'apprentissagedu doute, où douter n'est pas renoncer à la vérité, au contraire,la vérité est toujours complexe, la pensée doit être vivante etanimée par le doute, car c'est un travail permanent de laconscience. En effet, la pensée, élément sensible et vivant dela conscience, est en permanence stimulée par des sensationsinternes et externes lui permettant d'imaginer, de concevoir par


la médiation et la réflexion, des opinions, interprétations et jugements, tant sur les philosophies que les sciences ou le psy-chisme, qui motivent les pulsions et les passions créatrices. Par comparaison, analyses et critiques positivistes des idées re-çues, des dogmes et des systèmes de pensées du passé et du présent, elle permet de déterminer avec les lumières de laconscience, les résolutions nécessaires au partage des ressources et des connaissances dans la globalité des sciences,des arts et des cultures.

Son évolution permanente et constante, son adaptation auxséismes métaphysiques et théologiques doivent permettre à l'humain d'ouvrir ses qualités morales, aux sensibilités universelles, à la sagesse, à la beauté et à la modération ; maisattention à ne pas laisser au bord du chemin ceux dont la pen-sée est aujourd'hui figée, qui pourraient se replier définitivementsur eux-mêmes et sur les certitudes martelées par l'intégrisme.

� Conclusion

La meilleure thérapeutique face à l'intégrisme réside dans la réhabilitation des valeurs républicaines à travers l'éducation citoyenne, l'apprentissage du doute et la laïcité. En somme, l'intégrisme ne commence pas seulement lorsque la bombe explose, mais "la pensée figée" sera le passage obligé, y menant. Construire un espace public laïque, sublimant toutesles appartenances, en est, semble-t-il, le meilleur remède. Maisil convient d'être attentif à ce que l'idée Républicaine et laïquen'entraîne pas la volonté de fondre toutes les appartenances enune seule, de manière figée, il faut construire des liens sociauxqui libèrent.



� QUESTION SUR LA PAIX

Comment et sur quels critères traiter les étrangers ensituation irrégulière en France ?

� Définition de la situation irrégulière

La première idée généralement développée est de bien définirle statut de « situation irrégulière ».Un étranger en situation irrégulière (parfois surnommé « sans-papiers » ou « clandestin ») est un statut juridique, qualifiant la situation d'un étranger présent sur le territoire national d'un État, tout en étant dépourvu de titre de séjour enrègle.

� Les différents types

En France, cette situation peut intervenir de différentes façons :

- Irrégularité tenant à l'entrée en France de façon clandestine,c’est-à-dire être entré sans les documents nécessaires ou malgré le refus des autorités françaises ou malgré une interdic-tion du territoire ou une expulsion,

- Irrégularité tenant au séjour en France, c’est-à-dire rester sanstitre de séjour en cours de validité au bout des trois mois aprèsson entrée,

- Irrégularité tenant à l'exercice en France d'un travail, c’est-à-dire travailler sans autorisation préalable de travail alors qu'elleest exigée pour la profession exercée,

- Et enfin, irrégularité d'une personne née de parents immigréssur le territoire national, parce que la demande de naturalisationn'a pas été effectuée à l'acquisition de la majorité légale.


Ces différents cas représentent :- Pour les clandestins, sans titre de séjour, une petite minorité,- Pour ceux entrés légalement, ayant travaillé, et se voyant refuser le renouvellement du titre de séjour suite à une perted’emploi, environ 90% des cas,- Et enfin, nés de parents immigrés et dont la naturalisation n’apas été effectuée, une infime minorité.

Dans tous les cas, il s’agit d’un délit. Cependant, il est globale-ment reconnu qu’il existe un juste milieu entre expulsion systématique et libre circulation des personnes.

� Rappel des lois

Le législateur a mis en place des outils que l’on peut qualifierd’aides pour ces étrangers, régissant l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers pénétrant en France.

Cette réglementation est composée :

- du Droit des étrangers qui organise non seulement l’entrée desressortissants étrangers sur le territoire français, mais aussi leurséjour et leur sortie. Il a été codifié dans le Code de l’entrée etdu séjour des étrangers et du Droit d’asile,

- du Droit d’asile considéré comme droit fondamental garantipar la Constitution et par la Convention de Genève de juillet1951. Il est séparé du droit des étrangers et dépend en particu-lier de la Cour nationale du droit d’asile, tandis que le droit desétrangers dépend de la juridiction administrative ordinaire. LeDroit d’asile est une valeur éthique, voire politique. Il a été institué afin d’accorder aux personnes injustement menacées le bénéfice d’un refuge pour se protéger temporairement voire(re)faire leur vie en exil,


- de l’Aide Médicale d’Etat est un dispositif de prise en chargedes soins pour les étrangers en situation irrégulière résidant enFrance de manière ininterrompue depuis plus de 3 mois et disposant de ressources inférieures à un plafond identique àcelui exigé pour bénéficier de la C.M.U.C. (Couverture MaladieUniverselle Complémentaire).

Au niveau européen, il faut noter que l’accord Schengen de1985 et la Convention de 1990 ont été établis en faveur de la liberté de circulation des biens et des personnes appartenant àl’espace Schengen.

� Raisons de l’immigration

La France représente toujours une terre d’accueil traditionnelle,berceau des droits de l’homme.

L’étranger qui prend le risque, souvent énorme, parfois vital, dequitter sa patrie pour fuir une dictature ou une vie inhumaine,celui qui a travaillé légalement plusieurs années et payé légale-ment des impôts en France, aspire à vivre dans notre pays, oùla vie lui apparaît meilleure que dans son pays d’origine.

L’étranger arrive systématiquement avec sa langue, sa propreculture, sa famille parfois, et sa religion presque toujours. S’il esten effet une particularité de l’immigration à la française, c’estbien celle qui garantit à l’immigrant de pouvoir pratiquer son culte à sa guise tant la tradition de notre laïcité est connueet reconnue chez les candidats à l’immigration en quête d’hospitalité.

Les étrangers en situation irrégulière, même si cela est illégal,n’en sont pas pour autant des délinquants. La plupart du tempsce ne sont que des exploités. Exploités par les trafiquants defaux papiers, par les trafiquants qui profitent de leur misère pour


s’enrichir, par certains employeurs qui trouvent une main d’œuvre bon marché, corvéable à merci et n’osant pas se rebel-ler.

� Comment y remédier ?

Trois niveaux d’actions sont proposés.

- La prévention

Apporter des solutions aux problèmes mondiaux poussant àl’exil (économique et politique). Veiller à ce que les aides auxpays en développement arrivent à leur véritable destination ensubordonnant celles-ci à l’installation d’une véritable démocratie.Cesser les échanges commerciaux qui enrichissent les dictateurs et qui spolient les populations. Equilibrer les rapportsentre pays riches et pauvres.

Créer à l'image des ambassades, un lieu d'information et deprise en charge des étrangers avant que ceux-ci ne décident departir de chez eux, en leur proposant un projet, sur place àl'exemple des micros crédits (Inde et Bengladesh) et favoriserle commerce équitable. Utiliser les médias pour relayer cette information.

- La répression

Lutter contre les profiteurs de la misère des étrangers en situa-tion irrégulière (Employeurs, logeurs, passeurs, mafias�) quiles exploitent, dévalorisent leur travail, favorisent la délinquance,empêchent leur intégration, pénalisent toute la population, etfaussent une partie de l’économie.

Faire en sorte que les textes en vigueur, tant le Droit des étrangers que le Droit d’asile soient appliqués avec, en dernierrecours, les expulsions.


Cependant, les valeurs humanistes induisent une réflexion plusnuancée sur ce dernier point. Le traitement d’une situation irrégulière doit se faire individuellement dans la dignité.Une des solutions proposées consisterait à mettre en place un« sursis à l’expulsion » sous la forme d’un contrat d’intégrationpersonnalisé (apprentissage de la langue, de la culture, projetprofessionnel, accompagnement d’un référent républicain�). Sila personne ne peut faire la preuve de sa volonté d’intégration,elle redeviendrait expulsable.

- La régularisation

Il ressort des différents rapports des Loges, que les situationsnécessitent d'être traitées au cas par cas dans le respect et ladignité. Il est souvent rappelé que les étrangers en situation irrégulière sont d’abord des hommes, des femmes et des enfants. L’homme est un nomade. L’immigration zéro ne peutpas exister.

Le discours stigmatisant l’étranger comme principal responsabledu malaise social, du chômage et de l’insécurité est tronqué.Notre pays a besoin de l’immigration pour maintenir sa démographie et son potentiel de croissance, sa diversité.

La régularisation par un protocole d’intégration est le moyen proposé par nos Loges pour construire une volonté, un avenirpartagé dans un respect mutuel. Pour développer cette idée decontrat, le pays d'accueil proposerait au demandeur d'une situation régulière de respecter un cadre formel d'intégration. Cecontrat offrirait une information civique et républicaine, un accompagnement pour ne pas verser par isolement dans lecommunautarisme, un apprentissage linguistique et profession-nel si nécessaire. Ce contrat serait suivi et validé par des entretiens ou des examens. Il validerait la motivation et la démarche d’intégration du candidat. Le respect de son contratconduirait à une régularisation pleine et entière, sans contrepar-


tie de la part du pays. La démarche serait commune et favoriserait l’échange et notre perception de la question. Ellepermettrait d'éviter les tensions aujourd’hui tangibles qui sapentnos valeurs de Liberté, d'Egalité et de Fraternité.


� QUESTION DITE DES LOGES HORS MÉTROPOLES

La décroissance : régression ou prise de conscience ?

S’il est un sujet qui mérite clarification, c’est celui de la décrois-sance. Pour le traiter efficacement, il est important de se mettred’accord sur ce qu’est la décroissance.La décroissance n’est pas l’inverse de la croissance. Elle est cependant née en réaction au modèle de développementcontemporain.

La décroissance n’est pas une idéologie, elle ne fait pas système. Le débat public, les soubresauts du débat dans lemonde profane brouillent les cartes. La variété des personnalitésparlant de la décroissance est très vaste : du penseur au tropisme républicain Paul Ariès à Alain de Benoist, le maître àpenser de la Nouvelle Droite, de Serge Latouche à Pierre Rabhi,on ne compte plus les interprétations aussi diverses qu’intégrales du terme de décroissance. Il existe donc unegrande variété de « décroissants » : certains rejettent la science, d’autres l’utilisent dans le cadre d’une critique du modèle de production actuel. Certains sont à l’extrême gauche, d’autres àl’extrême droite, certains sont chrétiens, d’autres païens� Il n’ya pas d’unité chez les « décroissants » et c’est la raison pour laquelle il est difficile de traiter d’un sujet appelé génériquement« la décroissance ».

Afin de bien comprendre ce que recouvre la question, il est impératif de bien saisir deux notions centrales dans l’économie :celle de croissance et celle de valeur.

La croissance se définit comme l’augmentation en valeur (paropposition à volume) de la production de biens et de servicesmarchands.


La valeur, en économie, a le même sens que dans le langagecourant : le sens de l’attrait représenté pour les humains. Il fauty intégrer également la notion de disponibilité. Pour un mêmeattrait, la rareté donne une valeur économique plus importanteà ce qui est rare. La valeur, en économie, est relative, elle dépend du lieu, du moment, de l’existence de points de comparaison, etc� La valeur est un attrait pour l’humain et, estdonc, essentiellement une question de choix et de psychologie.

Un bien ou un service n’a de valeur que si quelqu’un le désireet peut l’acheter.

La décroissance ne peut être définie comme l’inverse de lacroissance, on peut la considérer comme un opposé de celle-ci, mais un opposé qui se veut maîtrisé de telle manière qu’iln’ait pas les effets négatifs des contraires actuels de la crois-sance que sont « récession », « crise » voire « dépression ».

La notion de décroissance s’oppose ainsi à la notion de développement durable qui, elle, ne remet pas en cause l’idéede croissance.

La décroissance est, objectivement, une critique radicale du productivisme et du consumérisme mais si elle n’est pas uneidéologie, elle nous invite à nous poser la question de la pérennité du modèle de production capitaliste. Il y a deux idéauxtypes dans cette « galaxie » de la décroissance : l’une est hostileaux Lumières, aux sciences, au savoir, conteste par exemple,dans le domaine de l’élevage l’usage de traitement antibiotique ;l’autre est favorable aux Lumières, ne conteste pas la sciencemais la met sous le contrôle des citoyens, est républicano-compatible et conteste seulement, dans le domaine de l’élevage,l’usage de méthodes intensives (usages de farines animales,par exemple).


Selon les mouvements expliquant la décroissance, la baisse dela production permettrait une baisse du temps de travail, libérantainsi du temps libre pour des activités en commun et un développement des liens sociaux ainsi qu’une baisse de la pollution et de la consommation de matières premières non renouvelables. La baisse des transports et une consommationlocale permettent également une baisse de la pollution.

La croissance n’est pas une augmentation de la production envolume, mais bien en valeur. La surproduction n’a aucune valeur car ne se vend pas et donc n’engendre pas la croissance.

De plus, la croissance n’est pas seulement générée par laconsommation de ressources non renouvelables. L’innovation « verte » apporte de la croissance sans pour autant puiser dansles ressources non renouvelables.

L’industrialisation, fruit de la croissance, a certes des défauts,mais elle a amené aussi des progrès, comme la coopérationentre les hommes au niveau planétaire, le développement desconnaissances, des techniques, de la circulation des idées, unepossibilité d’accès à un nombre de plus en plus grand d’humainsà la santé, à la nourriture, à l’éducation, au savoir. Tout cela estbasé sur une valeur qui participe à la croissance.

Sur ces aspects, la décroissance serait une vraie régression,qui, si elle permettait une préservation de notre planète, ne résoudrait pas pour autant le problème de la pauvreté, qui résulte d’une mauvaise redistribution des richesses. Pire, les richesses produites étant réduites, la décroissance risque d’accroître encore la pauvreté.

L’impératif est donc de ne pas faire litière de la nécessité de produire pour nourrir une population en continuelle augmentation.Cela rejoint, sur ce point, la nécessité de placer l’homme au


cœur du système économique comme de son environnementécologique : il s’agit de ne pas tomber dans un quelconque culteanimiste !

La décroissance est survenue avec la crise et s’il faut la considérer comme un élément de réponse, il faut également sedéfier d’une tentative malthusienne, tout en reconnaissant quel’on doit méditer les affres d’un modèle consumériste lié à l’hyper-individualisme.

La croissance est rattachée au courant économique producti-viste basé essentiellement sur le pétrole.Les premiers chocs pétroliers des années 70 ont amené uneréelle prise de conscience. Pour la première fois, la diminution,voire la disparition à terme des ressources naturelles en général,du pétrole en particulier, est évoquée. Ces ressources ne sontpas durables à l’infini. La décroissance est en route.

Apparaît aussi la notion d’écologie, dont la décroissance d’aujourd’hui est un thème central. La problématique posée partdu même constat, du même dilemme : une croissance écono-mique exponentielle basée sur un monde fini est-elle viable ?Jusqu’où peut-on aller avec nos ressources ?

La nécessité d’un changement dans nos comportements se faitjour. La « croissance » du Produit Intérieur Brut (PIB) en tantque seul instrument de mesure économique commence à êtrecontestée.

La croissance sur laquelle reposent nos sociétés est-elle soutenable, sachant que rien n’est infini, que les hommes, dansleur pensée, leur manière de vivre et dans leur rapport à la terrenourricière sont encore et heureusement profondément différents ?


Le monde actuel, dans sa pensée occidentale et moderne, atendance à transformer cette pierre brute trop rapidement et entrop grande quantité. Elle manque de manière évidente de mesure et de niveau, quant à l’approche d’une humanité meilleure et respectueuse.

Les savoirs très développés, très spécialisés restent insuffisam-ment partagés. Pour bien observer, comprendre et agir, en globalité, il est nécessaire que ces savoirs soient accessibles,non seulement aux pouvoirs qui les utilisent, mais égalementaux forces qui s’y opposent – la génération internet permet déjàde nouvelles prises de conscience.

Une prise de conscience de la finitude de nos richesses naturelles nous oblige à réviser en profondeur nos modes deconsommation tant en quantité qu’en qualité.

La Franc-Maçonnerie se veut adogmatique, ce qui va à l’encon-tre de tous les obscurantismes idéologiques. En effet, l’harmoniese trouve en chacun de ceux qui recherchent encore et toujoursla vérité.Ainsi en est-il de l’éveil de notre propre prise de conscience qui croît par le travail que nous réalisons chaque jour sur nous-mêmes en construisant le temple.Notre devoir n’est-il pas de devenir des passeurs de lumière ?

Ainsi, l’application des théories de la décroissance généreraittrès probablement une régression mais ces théories nous pous-sent à une prise de conscience salutaire qui nous fait penserque la croissance n’est un bien que si nous donnons de la valeurà ce qui est renouvelable, précepte auquel nous sommes attachés en tant que Francs-Maçons.Elle nous pousse à ne pas oublier que nous avons besoin decette croissance pour le bien de l’humanité et que celui-ci doitêtre partagé.


Ce sont là des valeurs qui sont portées par les théories du développement durable.

Les théories de la décroissance nous poussent à nous reposerla question de ce pourquoi l’homme travaille : veut-il se libérerdu travail pénible ou s’abîmer dans le travail pour des valeursfutiles ? Vers quoi veut-il aller, vers quoi veut-il croître, quel estle but du développement de l’humanité ?

En conclusion, la décroissance appelle donc une réponse dialectique. En tant que critique radicale du processus de production et de consommation contemporain, elle doit êtreprise en compte mais le fait qu’elle soit disparate et ne forme pas une idéologie cohérente appelle de la part de la Franc-Maçonnerie à un travail d’éveil de la conscience républicaine.Cette question doit être abordée avec hauteur et prise sous tousses aspects (sociologiques, environnementaux, économiques,énergétiques, santé�)Alors régression , si elle n’est pas conjuguée avec les Lumières,la décroissance apparaîtra comme l’élément d’une prise deconscience.


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