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1 B. Grandes manœu vres st ratégiq ues et dyna mique du sy stème pro ductif La plupart des entreprises commencent leur existence en se concentrant sur une seule activité. Par la suite certaines d’entre elles restent spécialisées sur cette activité (c’est la concentration) alors que d’autres diversifient largement leurs activités (on parle alors de diversification). Nous allons examiner ces différentes alternatives. 1. La concentration Définitions Le terme concentration économique a deux sens différents, et exprime : une situation, la répartition du pouvoir économique entre les mains d’un petit nombre d’agents et un processus d’évolution, le passage d’une économie de petites entreprises et de concurrence à une économie de grandes entreprises et de monopole. Dans le premier sens, les mesures de l a concentration prennent en considération le nombre et la dimension des unités de décision économique qui concourent à la production ou à la distribution des biens et des services. Dans le second sens, la concentration est souvent considérée comme un processus inéluctable d’évolution des sociétés industrielles. Le mouvement de concentration économique est une des caractéristiques majeures des sociétés ind ust rielles contempor aines. Dans les formes qu’i l revêt actuellement, ce mouvement est apparu dans l’histoire des sociétés occidentales à la faveur d’évolutions telles que l’industrialisation et l’urbanisation. La concentration consiste, pour une entreprise, à s’en tenir à une seule activité et à y renforcer son avantage concurrentiel. La concentration ne signifie pas l’immobilisme. L’entreprise qui se cantonne à une seule activité le fait parce qu’elle considère qu’elle doit mobiliser toutes ses ressources pour y réussir. L’exemple du grand groupe Michelin a bâti son succès sur la concentration. Michelin réalise 99% de son chiffre d’affaires dans les pneumatiques et 1% seulement dans les activités des cartes routières de guide de voyage. On peut définir, de manière très générale, le processus de concentration comme une réduction du nombre d’entreprises sur un secteur ou un marché ou une branche d’activité.  Il s’agit donc d’un processus d’augmentation de la taille des entreprises, mais pas seulement. NB : Il ne faut pas réduire la concentration à une augmentation de la taille des établissements, car il faut distinguer : La concentration technique (c’est-à-dire le fait pour une usine de s’agrandir). Aujourd’hui, le temps n’est plus aux grandes concentrations ouvrières sur un même site de production, sauf exception de la construction automobile. Dans l’industrie manufacturière française en 1999, 28,5 % des effectifs salariés seulement travaillent dans des établissements de 500 salariés au plus. Avec l’impo rtance que prennent les invest issements immatériels et le fonctionnement en réseau pour l’efficacité productive, la concentration technique est de moins en moins significative des économies échelles réalisées par l’industrie. La concentration économique (la taille des établissements peut augmenter, mais aussi le nombre des établissements au sein d’une même entreprise). Elle se mesure en part de marché des grandes entreprises La concentration financière (seule la propriété se concentre : différentes entreprises se trouvent dans les mains d’un même propriétaire par le jeu de l’achat des actions, mais dans les faits activités et établissements demeures distincts). La concentration financière a trait aux moyens dépendants d’un même centre de décision. Elle se mesure sur les groupes ou les entreprises. Une tendance à long terme à la concentration de l’industrie a été observée jusqu’au milieu des années 1970 en terme d’entreprise et le mouvement semble maintenant s’inverser. Mais la concentration se poursuit entre termes de groupe. Ainsi, à l’échelle mondiale, les groupes de plus de 2000 salariés concentrent 43 % de l’emploi, 50 % de la valeur ajoutée, 65 % des exportations, ainsi que 84 % des dépenses de recherche. Facteurs On peut distinguer les gains tec hniques qui révèlent des économies d’échelle, et les gains de pouvoir de

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1B. Grandes manœuvres stratégiques et dynamique du système productif 

La plupart des entreprises commencent leur existence en se concentrant sur une seule activité.Par la suite certaines d’entre elles restent spécialisées sur cette activité (c’est la concentration)alors que d’autres diversifient largement leurs activités (on parle alors de diversification). Nousallons examiner ces différentes alternatives.

1. La concentration• Définitions

Le terme concentration économique a deux sens différents, et exprime :– une situation, la répartition du pouvoir économique entre les mains d’un petit nombre

d’agents– et un processus d’évolution, le passage d’une économie de petites entreprises et de

concurrence à une économie de grandes entreprises et de monopole.Dans le premier sens, les mesures de la concentration prennent en considération le nombre et ladimension des unités de décision économique qui concourent à la production ou à la distributiondes biens et des services. Dans le second sens, la concentration est souvent considérée commeun processus inéluctable d’évolution des sociétés industrielles.

Le mouvement de concentration économique est une des caractéristiques majeures des sociétésindustrielles contemporaines. Dans les formes qu’il revêt actuellement, ce mouvement estapparu dans l’histoire des sociétés occidentales à la faveur d’évolutions telles quel’industrialisation et l’urbanisation.

La concentration consiste, pour une entreprise, à s’en tenir à une seule activité et à y renforcerson avantage concurrentiel. La concentration ne signifie pas l’immobilisme. L’entreprise qui secantonne à une seule activité le fait parce qu’elle considère qu’elle doit mobiliser toutes sesressources pour y réussir. L’exemple du grand groupe Michelin a bâti son succès sur laconcentration. Michelin réalise 99% de son chiffre d’affaires dans les pneumatiques et 1%seulement dans les activités des cartes routières de guide de voyage.

On peut définir, de manière très générale, le processus de concentration comme une réductiondu nombre d’entreprises sur un secteur ou un marché ou une branche d’activité. Il s’agit doncd’un processus d’augmentation de la taille des entreprises, mais pas seulement. NB : Il ne fautpas réduire la concentration à une augmentation de la taille des établissements, car il fautdistinguer :

– La concentration technique (c’est-à-dire le fait pour une usine de s’agrandir). Aujourd’hui,le temps n’est plus aux grandes concentrations ouvrières sur un même site de production,sauf exception de la construction automobile. Dans l’industrie manufacturière françaiseen 1999, 28,5 % des effectifs salariés seulement travaillent dans des établissements de500 salariés au plus. Avec l’importance que prennent les investissements immatériels etle fonctionnement en réseau pour l’efficacité productive, la concentration technique estde moins en moins significative des économies échelles réalisées par l’industrie.

– La concentration économique (la taille des établissements peut augmenter, mais aussi lenombre des établissements au sein d’une même entreprise). Elle se mesure en part demarché des grandes entreprises

– La concentration financière (seule la propriété se concentre : différentes entreprises setrouvent dans les mains d’un même propriétaire par le jeu de l’achat des actions, maisdans les faits activités et établissements demeures distincts). La concentration financièrea trait aux moyens dépendants d’un même centre de décision. Elle se mesure sur lesgroupes ou les entreprises. Une tendance à long terme à la concentration de l’industrie aété observée jusqu’au milieu des années 1970 en terme d’entreprise et le mouvementsemble maintenant s’inverser. Mais la concentration se poursuit entre termes de groupe.Ainsi, à l’échelle mondiale, les groupes de plus de 2000 salariés concentrent 43 % de

l’emploi, 50 % de la valeur ajoutée, 65 % des exportations, ainsi que 84 % des dépensesde recherche.

• FacteursOn peut distinguer les gains techniques qui révèlent des économies d’échelle, et les gains depouvoir de

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2négociations liées à des phénomènes de domination.

– Les économies d’échelle.Définition : Il y a économie d’échelle lorsque l’augmentation des quantités produites se traduitpar une réduction du coût unitaire.Le processus fonctionne selon un schéma circulaire : les économies d’échelle entraînent ladiminution du prix de revient unitaire, qui entraîne la diminution du prix de vente, qui entraîne

un accroissement de la demande, qui entraîne un accroissement de la production, qui entraînentdes économies d'échelle, qui entraîne une diminution du tarif de revient unitaire.

Rappel : Bénéficier de ces économies d’échelle a été un des objectifs de la forte concentrationqui a marqué le secteur automobile dans tous les pays industrialisés depuis le début du siècle.La concentration pendant de longues périodes en France a d’abord été influencée parl’accroissement des dimensions du marché.

– L’analyse du pouvoir de négociations.Si la concentration est sans limites, c’est qu’elle accroît le pouvoir de négociation la firme etqu’elle crée des effets de domination. Ses effets se manifestent dans de nombreux domaines.En matière de négociation avec les acteurs, la concentration impose ou facilite ledéveloppement des études de marché, la mise en place de politiques de marque et de publicité,qui réduisent les erreurs commerciales. Elle permet également d’augmenter le pouvoir denégociations vis-à-vis des institutions de crédit. De plus, ce pouvoir de marché peut permettrel’augmentation du pouvoir de négociations vis-à-vis des fournisseurs, de l’État, de latechnologie, mais aussi de la gestion du personnel.

• FonctionnementLa concentration s’explique principalement pour 2 raisons :

– Soit l’entreprise qui est affectée par ce mouvement investit pour créer de nouvellescapacités de production (on parle alors de concentration interne)

– Soit l’entreprise achète ou prend le contrôle d’unités de production concurrentes déjàexistantes (on parle de concentration externe). Dans ce cas elle peut soit payer lesactions en monnaie courante (c’est une OPA, Offre Publique d’Achat et on parle de« fusion-acquisition ») ou par échange d’actions de la société acheteuse contre desactions de la société achetée (c’est une OPE, Offre Publique d’Échange). C’est deuxopérations (OPA ou OPE) peuvent être amicales (quand elles interviennent d’un communaccord entre les sociétés en question) ou hostile

La concentration peut s’effectuer selon différentes modalités :

– La concentration horizontale consiste en un regroupement d’entreprises réalisant lemême stade de productionEx. fusion Mittal + Arcelor, groupe sidérurgique mondial fondé en 2006 lors de la fusiond’Arcelor (groupe sidérurgique européen, résultant lui-même de la fusion de 3 autresgroupes – l’espagnol Aceralia, le luxembourgeois Arbed et le français Usinor – et de Mittal

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3Steel (groupe de droit néerlandais), à la suite d’une d’une OPA hostile de Mittal surArcelor. Aujoud’hui, ce groupe compte quelques 310 000 employés dans plus de 60 pays.

– la concentration verticale, c’est le regroupement d’entreprises réalisant des activitéscomplémentaires (en amont et en aval). Se constitue alors ce qu’on appelle des « filièresde production » qui s’étendent d’amont (vers le fournisseur) en aval (vers le distributeur)Ex. Decathlon s’est ainsi développé en amont en créant sa propre marque, Quechua)

– la concentration par diversification ou concentration conglomérale (parce qu’elle aboutit à

la création de conglomérats) consister à regrouper des activités diversifiées sans rapportentre elles (= hétérogènes) afin de limiter les crises dans chaque secteurEx. Vivendi, groupe français leader dans le domaine de la communication est, si l’on encroit son site internet, le n°1 mondial des jeux vidéo, de la musique, des télécoms, maisaussi le n°1 brésilien des opérateurs alternatifs, et le n°1 français de la télévisionpayante…

Ex. Bouygues, un groupe industriel diversifié, organisé autour de deux pôles : laConstruction avec Bouygues Construction (BTP et Electricité), Bouygues Immobilier etColas (Routes), et les Télécoms-Médias avec TF1 et Bouygues Telecom.

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4 La concurrence est un facteur explicatif de ces concentrations. La compétition nécessite desinvestissements de + en + importants, ce qui induit un accroissement de la taille desentreprises. La concentration économique est un moteur de la croissance en ce sens qu’ellepermet un accroissement de la production et une diminution du coût.Mais la concentration présente également un risque, celui du monopole est un risque de laconcentration.

• PerceptionLa concentration est perçue différemment par les divers agents économiques.

→ Pour l’entrepreneur, il s’agit d’abord de se situer sur le marché qui le concerne, parrapport à ses concurrents, et notamment aux « leaders» du marché, avec l’objectif de maintenirou d’accroître sa propre part. À cet effet, il cherche à réorganiser sa production, à utiliser aumieux de ses intérêts les structures juridiques existantes.

→ Pour le travailleur d’une entreprise, la concentration économique est vécue à travers lesrestructurations ou lesfermetures d’établissements, liées ou non au déplacement d’activités vers d’autres lieux. Ellepeut aussi être vécue à travers le passage de relations sociales caractéristiques d’une petite oumoyenne entreprise à des relations caractérisées par un éloignement des centres de décision : il

se trouvera rarement face au réel interlocuteur. Pour les pouvoirs publics, la concentration économique est liée à des préoccupations de

politique économique et notamment de planification, de politique de développement sectoriel,de politique des prix, etc.

Les divers agents économiques (principalement les pouvoirs publics mais aussi le secteur privé,notamment des groupements professionnels) établissent et publient les statistiques quirépondent à leurs préoccupations. À partir de ces statistiques, souvent parcellaires et rarementcohérentes entre elles, il est possible de mesurer différents aspects de la concentrationéconomique, à un moment donné ou dans son évolution.

• InconvénientsLe principal inconvénient de la concentration réside dans la vulnérabilité d’une entreprise qui setrouve ainsi à la merci des fluctuations du secteur d’activité.Les mauvais résultats de Michelin en 2009 (baisse de presque – 11 % de son chiffre d’affaire audernier trimestre de l’année) sont la conséquence de la crise automobile et de la chute dumarché des pneumatiques. C’est sans aucun doute une illustration de cette faiblesse. Dès lorsun certain nombre d’entreprises choisissent de s’ouvrir à de nouvelles activités permettant larépartition du risque de l’entreprise pensée et la diversification.

Cf. l’excellente mise au point historique sur la question de la concentration au XXe siècle dans lemanuel de Philippe Deubel, Éditions Pearson, orange, p.104-sq).

1. La diversification

• DéfinitionLa diversification consiste pour une entreprise à entrer dans de nouvelles activités, liées ou nonà son activité d’origine.On parlera de diversification liée parce qu’il existe des synergies entre les activités existantes etla nouvelle activité. Les synergies sont les possibilités de partage de ressources et decompétences entre deux activités. Elles peuvent être technologiques, de production, dedistribution.

Exemple : le fabricant français de jouet Smoby exploite les mêmes technologies plastiquesdans son activité jouet et dans son activité d’emballage plastique. La société Bic vendauprès du même réseau de distribution stylo bille et rasoir.Exemple : iPod et iPhone pour Apple qui est, initialement, spécialisée dans les ordinateurs.

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5En l’absence de synergie entre les activités, on parlera de diversification de conglomérale. Dansles années 1960 cette pratique a été très utilisée par les grands groupes. Dans les années 1980elle est en net recul, notamment sur la pression d’actionnaires préférant privilégier une plusgrande visibilité de chacune des activités des filières de leur entreprise. Il subsistait néanmoinsun certain nombre de groupes impliqués dans de nombreuses activités n’ayant pasnécessairement de lien entre elles.

Exemple : Transport aérien et téléphonie pour Virgin.

Exemple : Le groupe au ONA au Maroc a initialement des activités dans les mines, letransport, le tourisme. Il y ajoute l’agro-alimentaire, la banque, l’assurance dans les années1980, puis la communication la grande distribution et l’immobilier dans les années 19990.

• Les différents types de diversificationLa diversification de confortement vise à l’entrée dans une nouvelle activité permettantd’améliorer sa position concurrentielle dans l’activité de base.Dans le cadre de la diversification de placement, on place les revenus de l’activité de base dansd’autres secteurs. C’est l’exemple d’ELF qui s’est lancé dans la pharmacie puis les cosmétiques.La diversification de redéploiement, enfin, est celle de la firme qui est arrivée à maturité dansson activité d’origine et qui cherche un nouveau souffle pour dynamiser sa croissance. Lefabricant de cigarette Philippe Morris s’est ainsi engagé dans l’agroalimentaire dans les années

1970.

• Les inconvénients de la diversificationEn dehors du choix entre la concentration et la diversification, les entreprises doivent réfléchir àune autre dimension de leur champ d’activité. Celle de son étendue verticale. Elles doivent ainsieffectuer des choix concernant les différentes étapes de la filière qu’elle souhaite prendre encharge ou au contraire déléguer.

1. L’intégration et l’externalisation

• L’intégrationDéfinition : L’intégration verticale est une forme particulière de diversification qui consiste àentrer dans une nouvelle activité située en amont ou en aval de l’activité de l’entreprise. End’autres termes, l’entreprise qui intègre choisi d’exercer les activités de son fournisseur ou deson client. Souvent, l’intégration verticale vient renforcer un choix de concentration. Elle permetde développer un avantage concurrentiel pour l’activité d’origine en agissant en amont ou enaval de celle-ci.

Exemple : Le rachat de la chaîne Séphora de distribution de cosmétiques et dudistributeur américain de produits de luxe TSF par le français LVMH qui peut ainsicontrôler la distribution de ses marques Dior, Louis Vuitton, Guerlain…

On distingue l’intégration amont (= l’entreprise devient son propre fournisseur) et l’intégrationaval (= elle devient son propre distributeur, son client).Les inconvénients de l’intégration verticale sont avant tous ceux de la diversification. Il fautmaîtriser de nombreuses compétences et connaître des environnements différents. Un autrerisque de l’intégration verticale est que la taille requise pour les activités amont et aval soitdifférente. Dès lors il peut se produire des surcapacités ou des goulots d’étranglements.

Exemple : Le quotidien français Le Monde a mis en place sa propre imprimerie, ce quiétait trop important pour à ce seul titre. Dès lors le journal a cherché des partenaires pourpartager les coûts de cette intégration trop importante.

• L’externalisationLes problèmes de l’intégration verticale ont conduit à certain nombre de firmes à se désintégrer,

à confier un certain nombre de leurs activités à des fournisseurs extérieurs, plus à même deréaliser l’activité à un moindre coût. Ce mouvement baptisé externalisation a accompagné celuidu recentrage d’un certain nombre de firmes, l’objectif du désengagement étant de concentrerses efforts et ses ressources sur les activités et compétences jugées stratégiques pourl’entreprise.

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6Les motifs d’externalisation dans une entreprise sont multiples :

– Assurer une plus grande disponibilité pour se concentrer sur le cœur de métier  (sur lesactivités à valeur ajoutée)

– Bénéficier de compétences étendues : par rapport à la structure interne, le prestataire deservices peut mettre les meilleurs spécialistes en face de problèmes parfois complexes

– Disposer pour sa structure économique d’une meilleure flexibilité en cas d’augmentationou de diminution du nombre de collaborateurs/d’activité de l’entreprise car le prestataire

peut s’adapter plus facilement à toute modification de la marche de l’entreprise. De plus,l’entreprise qui externalise n’a pas les soucis d’absence du personnel interne pourvacances, maladie ou autre.

– Enfin et surtout avec la montée en puissance d’une compétitivité globalisée, favoriser unmeilleur contrôle des coûts liés à la fonction, à l’infrastructure, au processus externalisé.Etant contractuels, donc connus d’avance et fixes (engagements très souventforfaitaires), ils peuvent être à terme moins élevés que des coûts internes grâce à leurmutualisation.

Selon Pierre Veltz : « On ne comprend donc pas la puissance de la vague d’externalisation si onne réalise pas que, dans la plupart des cas, elle renvoie à trois constats simples : a) on maîtrise souvent mieux un fournisseur externe qu’un atelier ou une unité interne, parcequ’on dispose de moyens de pression beaucoup plus efficace, sur les délais, les prix, la qualitéb) en cas de baisse d’activité, il est tellement plus facile de se séparer d’un fournisseur que de

licencier des salariésc) il est souvent beaucoup plus simple – réducteur de complexité – d’exiger une prestation

externe que d’organiser soi-même un processus de production, quitte à payer un surcoût. Contrôle, diffusion du risque, simplification sont donc les trois en jeux de l’externalisation ».

(cf. Le nouveau monde industriel, Gallimard 2008, p.181).

L’externalisation consiste en fait à sous-traiter, à sortir du périmètre de la firme les activitésd’appui du processus de production ou des partie de ce processus. Cette démarched’externalisation, partagée par de nombreuses entreprises dans les années 1980, a d’abordconcerné des activités périphériques avant de toucher des activités plus au cœur de l’entreprise.

L’externalisation a donc changé de nature : elle devient une démarche de gestion déléguéepouvant aller jusqu’au transfert de personnel.Exemple : En 2003, le constructeur d’avions Boeing a ainsi cédé à IBM la gestion de sonparc informatique pour 5 ans.

– AvantagesL’externalisation permet de réduire les coûts de façon significative. Une enquête effectuée en1997 par le cabinet Coopers & Lybrand, montre qu’en moyenne l’externalisation permet desréductions de coûts de l’ordre de 15 à 35 % pour les activités concernées (informatique pour lePrintemps confié à GSI = – 35 % sur les coûts).L’externalisation permet également de concentrer l’investissement sur les activités stratégiques,tout en profitant du savoir-faire d’un spécialiste pour les autres activités.

– Risques et inconvénientsUn des inconvénients de l’externalisation réside d’abord dans la dépendance qu’elle crée àl’égard d’un fournisseur et dans la nécessaire surveillance de celui-ci. Ceci suppose en effet descomités de pilotage, le maintien des équipes en relation avec fournisseur.L’externalisation représente également un risque de perte de savoir-faire qui pourrait s’avérerstratégique pour l’entreprise.

Exemple : La chaîne hôtelière Novotel a réintégré l’activité du nettoyage qu’elle soustraitait depuis de nombreuses années, considérant que l’état des chambres était unélément crucial dans la perception du service par ses clients.

Résumons les risques en matière d’externalisation :- Perte de substance au sein de l’entreprise par la perte du contrôle des opérations ou laperte de connaissances fondamentales dans l’entreprise, de son capital immatériel (=élément sans substance physique et ayant une valeur positive pour l’organisation, soittout ce qui permet à l’entreprise de créer de la valeur et que l’on ne peut déceler à lalecture de son bilan, soit 4 composantes essentielles : capital humain, capital clients,capital produits et capital organisation).

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7– Diminution de la maîtrise des informations par la perte de la confidentialité d’informations

sensibles– Fiabilité et pérennité du partenaire externe choisi– Mauvaise réversibilité de l’opération en cas de « réinternalisation » (ou backsourcing).

Il faut examiner ces risques de près ultérieurement avec son fournisseur avant de signer toutcontrat. Il importe également de diagnostiquer le rythme habituel d’évolution du périmètre àexternaliser : plus ce changement est fréquent, mieux les modalités d’étude et de réalisation de

ces changements devront être définis contractuellement avec le prestataire de services.Il existe des stratégies de limitation des risques dans le contrat d’externalisation. Par exemple, ilest possible de régler le problème du manque de confidentialité en donnant seulement accès àl’information pertinente au processus externalisé.L’effet de mode ou d’imitation de la concurrence est en tous les cas à proscrire comme cela a puêtre le cas en matière d’infogérance informatique avec « l’effet Kodak » entre Kodak et IBM.Dans le secteur de la construction d’avions, les limites de l’externalisation semblent atteintesdès lors que les compétences internes ne sont plus suffisantes pour maîtriser les délais delancement annoncés (retards de livraison de l’A380 comme du dernier né de Boeing).

Notons que l’externalisation est fréquemment associée d’une manière erronée au phénomènede la délocalisation.

Les deux modes de gestion des organisations ne doivent pas être confondus pour autant :– toute externalisation n’entraîne pas de délocalisation, puisqu’elle ne fait souvent appel

qu’à de la sous-traitance locale– toute délocalisation n’est pas forcément de l’externalisation, par exemple dans le cas où

c’est l’entreprise elle-même qui déplace l’un de ses propres sites de production.Exemple : selon des travaux récents (2006-2008) basés sur les interviews de 400responsables d’organisations privées et publiques basées en France, une entreprise sur deuxexternalise ou externalisera d’ici 2008 ses applications ou processus RH.

Avantages d’une externalisation a priori sans délocalisation : les expertises locales, le respectdes réglementations nationales et la maîtrise des coûts sans effet de change sont au hit paradedes motifs des dirigeants qui exigent un service irréprochable pour une prestation de plus en

plus complexe avec la stratification des règlementations.Bien sûr, il arrive toutefois qu’externalisation rime avec délocalisation. Dans le domaine de laproduction, le secteur textile et de la confection est sans doute le premier secteur industriel àavoir connu ce phénomène dès les années 1970. D’autres secteurs ont suivi (maroquinerie,chaussure par exemple) pour gagner des secteurs plus sophistiqués (comme aujourd’hui celuide l’automobile où les délocalisations vers l’Est européen sont des réalités : Renault produit sesmodèles bas de gamme en Slovénie).Dans le domaine des services, c’est surtout dans le secteur informatique que le mouvement apris une ampleur très forte notamment vers l’Inde et les pays de l’Est (Russie) compte tenu de lacapacité à réaliser des prestations intellectuelles à distance. On parle alors d’externalisation« offshore » ou délocalisée.

Mais des mouvements de réinternalisation ou backsourcing sont déjà avérés y compris enFrance en particulier dans le domaine informatique, celui des centres d’appel comme celui descompagnies d’assurance. Simon Scarott de Compass MC indique pour ce secteur :

– « Les augmentations des coûts de personnel peuvent atteindre désormais jusqu’à 15% par an dans des pays comme l’Inde, réduisant ainsi l’intérêt économique de l’offshore »

– « Comme pour toute prestation d’outsourcing, il est insuffisant de simplement sedécharger des opérations problématiques et des processus inefficaces vers d’autres pays,dans l’espoir de les voir s’améliorer. Trop d’exemples montrent que ces pratiques

 peuvent mettre en péril la qualité du service et n’aboutissent pas aux économiesattendues. En fait, il s’agit de savoir dans quelle mesure les économies sont réelles et durables et continueront à satisfaire le consommateur ».

Outre la réinternalisation pure et simple, l’externalisation avec relocalisation ne sont plus rares.Ces mouvements illustrent un retour de balancier naturel dès lors que les avantages initiaux del’externalisation ont disparu. L’optimum initial à l’origine de la première décision se trouve ainsichangé pour le décideur économique.

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8Exemple : En France, Atol (Lunetiers) et Samas (Fabrication de caissons à roulettes)illustrent ces choix du « come back » « made in France » (cf. La Tribune, 25/09/2008,« Les pionniers de la relocalisation » p. 34).Dans le premier cas, à technicité égale entre le pays local et le pays de délocalisation, larelocalisation peut être un avantage commercial au vu de la demande client d’un produitlocal plus cher, mais il permet aussi des circuits de production plus courts, moins chers enlogistique, plus réactifs et innovants du fait de la proximité du marché.

Dans le second cas, les avantages apparents (salaires, prix et qualité) se sont estompés.Problèmes de qualité, coûts salariaux en rattrapage dans le pays de délocalisation, coûtde logistique ont eu raison de la décision initiale.

Comme toute modification d’un procès, ces mouvements ont à chaque fois un coût économiqueet social qu’il faut réintégrer dans le calcul économique des acteurs comme des autoritéschargées d’établir la règlementation applicable.

B. Croissances et alliances

Quel que soit la voie choisie par l’entreprise, elle doit mettre à son service un mode dedéveloppement. Ces modes de développement sont au nombre de trois. Il s’agit de la croissanceinterne, de la croissance externe, ou encore d’une alliance.

1. La croissance interneLa croissance interne peut se définir comme le choix de se développer à partir de ses propresressources et non sur la base d’acquisition. Elle consiste dans la création par l’entreprise decapacités nouvelles. Elle résulte de l’adjonction de moyens de production, de recherche, dedistribution, créés grâce aux ressources humaines, financières et techniques de l’entreprise. Uneforte demande des produits de l’entreprise l’amène à multiplier ses unités de production. Cetype de croissance manifeste une nette volonté de protéger l’identité de l’entreprise en évitantle rachat d’autres entreprises (avec de nouvelles personnes, de nouveaux sites...). De plus, ledirigeant de l’entreprise ne prend pas le risqué de devoir éventuellement partager son pouvoiret, si elle dégage des marges suffisantes, l’entreprise peut procéder au réinvestissement dansses propres activités. La R&D s’en trouve souvent valorisée par le dépôt de brevets et le choixd’une croissance interne est une garantie de confidentialité. Enfin, ce type de croissance créedes opportunités de carrière pour personnel et génère de la motivation.

Exemple : Le français Zodiac, d’abord fabriquant de bateaux pneumatiques s’est ainsidiversifié dans l’équipement aéronautique en développant les activités de toboggand’évacuation gonflables à partir de technologie issue de son activité d’origine.

Avantages et inconvénients :- La croissance interne permet de contrôler le coût du développement. Contrairement à la

croissance externe pour laquelle il faut négocier avec les actionnaires ou encore émettre uneoffre publique d’achat en bourse, la croissance interne se fait à la valeur des actifs. Par ailleurs,la croissance interne peut se faire progressivement, à un rythme maîtrisé par l’entreprise. Demême que son financement peut-être progressif ce qui permet de l’autofinancer. L’ntrepreneur

garde la maîtrise. Ce type de croissance génère des emplois, et renforce le secteur. Enfin, ilentretient un climat social favorable avec espoirs promotion et sécurité emploi.- Le principal inconvénient de la croissance interne réside dans la lenteur de la mise en

œuvre d’une telle option. Par ailleurs, la croissance interne est peu adaptée à la diversificationqui nécessiterait l’acquisition de nouvelles compétences. Le développement de nouveauxéquipements peut également prendre beaucoup de temps et nécessiter un endettementimportant susceptible d’induire une diminution de la rentabilité).

2. La croissance externe

La croissance externe est définie comme le développement par le biais d’acquisition ou defusion (= acquisition de tout ou partie d’entreprises concurrentes ou complémentaires). Lacroissance externe se fait, pour certaines firmes, par la saisie d’opportunité : une entreprisefamiliale dont les héritiers souhaitent se défaire, la baisse du cours d’une devise rendant plusaisée les acquisitions dans un pays donné … font envisager cette manière d’accélérer ledéveloppement de l’entreprise.Pour les grands groupes la croissance externe est le mode de développement privilégié.

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Avantages et inconvénients : Les avantages des alliances et partenariats apparaissent si on lacompare ces modes de développement à la croissance externe.

- Les alliances et partenariats sont une formule souple et réversible. Les alliances offrentdes possibilités de rupture de non renouvellement et permettre d’arrêter ou de prolongerprudemment les fiançailles. Les alliances présentent l’intérêt de la progressivité par rapport à lacroissance externe, et permettent d’apprendre progressivement une diversification, une

intégration verticale ou de préparer le retrait d’une activité. Enfin les alliances et partenariatsévitent les problèmes d’intégration que soulèvent les fusions et acquisitions, dès lors quechaque entreprise conserve sa propre identité et son autonomie. Dans certains secteurs commel’aéronautique ou l’armement, dans lesquels les États sont soucieux de protéger des entreprisesnationales, les alliances permettent ainsi d’atteindre une grande taille tout en conservantl’autonomie des firmes.

- Les difficultés apparaissent surtout car il n’est pas aisé pour deux entreprises de coopérersurtout si elles se sont livrées jusqu’ici à une concurrence féroce.

Les trois types d’alliance :– Les alliances additives où les partenaires apportent à l’alliance des activités de même

nature et s’associent pour commercialiser un produit commun. C’est le cas d’Airbus.

– Les alliances d’intégration conjointe, quand les partenaires apportent également desactivités même nature, mais elles commercialisent chacune leurs propres produits. Denombreuses alliances dans l’automobile sont des alliances de ce type où les partenairesmettent en commun leurs compétences afin de profiter d’économies d’échelle enpartageant les coûts de production. Peugeot et Fiat se sont ainsi alliés afin de concevoir etde construire ensemble des véhicules monospaces.

– Les alliances complémentaires, où les partenaires participent sur la base d’apport denature différente. Souvent l’un des partenaires apporte des compétences en matière deproduction, l’autre partenaire prenant en charge la commercialisation. Ainsi en FranceRenault distribue dans son réseau et sous sa marque l’Espace, voiture conçue etfabriquée par Matra Automobile. Le même Renault collabore avec les filiales européennes

de l’américain General Motors pour la conception et la fabrication de certains de sesutilitaires sous des marques différentes.