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Fabrice Zawa, 22 ans, apprend à lire, écrire et compter dans un centre éducatif de Hombo Sud mis en place grâce à l’UNICEF. Crédit : Benoit Almeras-Martino / UNICEF, 2014. PARTICIPER POUR S’AUTONOMISER Améliorer la résilience des communautés de Bunyakiri par l’Approche Communautaire Participative

Guide des bonnes pratiques n°18: Participer pour s’autonomiser

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Guide des bonnes pratiques

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  • Fabrice Zawa, 22 ans, apprend lire, crire et compter dans un centre ducatif de Hombo Sud mis en place grce lUNICEF. Crdit : Benoit Almeras-Martino / UNICEF, 2014.

    PARTICIPER POUR SAUTONOMISER

    Amliorer la rsilience des communauts de Bunyakiri par lApproche Communautaire Participative

  • Dans le territoire de Kalehe (Sud Kivu), des familles auparavant dplaces du fait de linscurit latente de la zone se sont rinstalles au cours des deux dernires annes.

    Dsireuses de reconstruire leurs vies, ces familles retournes arrivent dans

    un tat de vulnrabilit aigu : elles nont pas les moyens financiers de satisfaire leurs besoins essentiels,particulirement la scolarisation de leurs enfants, laccs aux soinsde sant, laccs leau potable. Les incertitudes lies leur avenirne les incitent pas non plus sinvestir durablement dans leurscommunauts.

    Dans le cadre de son Programme Elargi dAssistance auxRetourns lUNICEF entreprend de renforcer la cohsionsociale dans les villages de

    Bunyakiri, grce la mise en place de services sociaux de base. LApproche Communautaire Participative est une stratgie mise en place pour renforcer le dialogue et la rsilience des communauts.

    En veillant la participation de lensemble de la population, particulirement celle des enfants et des femmes, cette approche vise trouver des rponses locales et durables aux problmes daccs aux services sociaux par les familles.

    Son ambition est damliorer lorganisation des communauts face aux chocs futurs, de rduire la dpendance des bnficiaires laide extrieure et dencourager une appropriation de leur propre dveloppement.

    LE CONTEXTE

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    La participation des femmes et des enfants est lun des lments clefs de la russite de lApproche Communautaire Participative. Ici, une femme sexprime pendant la runion de planification des activits dEau, dHygine et dAssainissement dans la localit de Mayibano. Crdit : Benoit Almeras-Martino / UNICEF, 2014.

  • UNE STRUCTURE REPRESENTATIVEChaque Chikembe est issu de la communaut, qui dtermine el le-mme les modal its de son fonctionnement et ses membres, en vei l lant toutefois une reprsentation effective des femmes et des enfants. Dans les faits, chaque membre du Chikembe est lu par les habitants du vi l lage au cours dune assemble part icipative.

    UNE STRUCTURE DE COORDINATIONLes membres lus du Chikembe, souvent membres inf luents de la communaut1 ou dj reprsentants de structures communautaires spcial ises existantes2, effectuent le suivi des activits menes dans le vi l lage, part icul irement dans les secteurs pr ior itaires de l ducation, de la sant, de l eau, hygine, assainissement et de la protection de l enfance.

    UNE STRUCTURE DINFORMATIONChaque Chikembe organise des runions d information des habitants du vi l lage sur les activits menes par les structures communautaires, les services de l Etat et les organisations actives

    1 Infirmiers Titulaires, Directeurs dcoles, Chefs de village, etc.2 COPA pour les coles, RECOPE pour la protection de lenfance, CODEVI pour leau, lhygine et las-sainissement, CODESA pour les structures de sant.

    dans le vi l lage.

    UNE STRUCTURE DE PLANIFICATIONLe Chikembe effectue des analyses de r isques des structures existantes dans le vi l lage3 et dveloppe des plans daction simples pour y rpondre : l enfant doit tre au cur de leurs projets.

    UNE STRUCTURE DE MOBILISATION COMMUNAUTAIRELe Chikembe mobi l ise la communaut pour la ral isat ion des plans daction ainsi labors (voir plus haut). En vue de rduire les cas de maladies etde dcs, le Chikembe sest galement vu confier un rle de sensibi l isateur des habitants du vi l lages. Cette sensibi l isat ion est axe autour du respect des droits des enfants et de la promotion des prat iques essentiel les.

    UNE STRUCTURE DE PLAIDOYER Si l in it iat ive communautaire est insuff isante pour rpondre aux problmes identif is, le Chikembe peut sadresser aux structures gouvernementales ou aux partenaires (agences des Nations Unies, ONG) et leur demander appui.

    3 cole, structures de sant, sources deau, etc.

    LUNICEF a appuy les communauts dans l organisation de Chikembe : ce sont des structures communautaires charges de planif ier les activits pr ior itaires dans chaque vi l lage cibl, d informer la communaut des activits menes, et de contacter les partenaires susceptibles dappuyer les vi l lages dans la ral isat ion de leurs plans.

    COMMENT A MARCHE ?

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  • Le Centre de formation Y.E.P.1 mis en place Hombo par lUNICEF en partenariat avec le Norwegian Refugee Council sadresse des jeunes de 14 25 ans en situation de vulnrabilit2. Ces jeunes nont pas eu la chance de pouvoir suivre une scolarit normale cause des conflits qui ont affect le Sud- Kivu.

    Comme tu as lair de ne pas savoir comment a scrit, je peux directement tcrire mon nom!

    Assise derrire un pupitre de la salle de classe, Annie-Marcelline se saisit dun calepin, et commence crire son nom - elle hsite, le stylo tremble un peu dans sa main... mais elle finit par y arriver et montre firement le rsultat.

    Annie a 18 ans. Avant-dernire enfant dune famille qui en compte neuf, elle na jamais eu

    1 Youth Education Pack2 Filles-mres, handicaps, enfants anciennement impliqus dans les groupes arms, etc.

    loccasion daller lcole. Mes parents ont prfr scolariser nos deux frres ans - moi je suis reste pour aider aux champs, parce quils navaient pas de moyen.

    Jai eu Kineti, mon premier enfant, quand javais 17 ans, mais le pre est parti et moi je suis reste dans la maison de mes parents.Quand jai entendu quon inscrivait les jeunes au Centre, je me suis prcipite parce que je voulais que ma vie samliore.

    Pendant les cours, Kineti et les enfants des autres apprenants sont surveills dans une garderie amnage dans le centre. Un ct pratique pour Annie qui est plus tranquille pour apprendre.

    Je dcouvre beaucoup de choses ici, jaime apprendre de nouvelles choses. Plus tard, jai envie de gagner ma vie en faisant de la couture, pour que Kineti puisse aussi tudier quand il sera plus grand!Pendant dix mois, Annie et les autres jeunes suivront des cours dalphabtisation, de calcul

    et apprendront des comptences essentielles, ainsi quun mtier3.

    Ouvert depuis septembre 2014, le Centre est temporairement install dans les locaux dune cole primaire de Hombo Sud. Pour le moment, il accueille 240 lves, dont 193 filles, qui ont t encourager sinscrire par les membres des communauts de trois localits4.

    Ces mmes communauts se sont mobilises pour amnager le terrain o seront construits les locaux propres du Centre Y.E.P.

    Parmi les constructeurs du Centre, Furaha Mutula le voit comme une chance, parce que a va rduire les problmes dici, comme la prostitution des mineures ou la dlinquance des jeunes garons. Toute la communaut sest mobilise pour a, parce quon veut que ces jeunes soient utiles la socit!

    3 Dans des filires telles que la coupe-couture, la mcanique ou la coiffure.4 Le quartier Hombo Centre, le quartier Hombo Libration, le village dIrangi.

    LE CENTRE Y.E.P., UNE DEUXIME CHANCE POUR ANNIE

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  • 20 Chikembe ont t mis en place dans les 20 vi l lages cibls par la deuxime phase du Programme Elargi dAssistance aux Retourns (PEAR+ 2). Leurs membres (une quinzaine par Chikembe en moyenne) ont t lus grce la part icipation des communauts qui ls sont chargs daider.

    Avec la part icipation communautaire et sous la coordination des Chikembe, ces 20 vi l lages ont ral is des analyses de r isque pour 20 coles pr imaires et 8 structures de sant. En matire dEau, dHygine et dAssainissement, 13 vi l lages cibls se sont engags dans le processus Vi l lage Assaini; les 7 autres se sont engags consol ider leurs instal lat ions existantes.

    Grce l UNICEF et son partenaire AVSI, plusieurs dizaines denfants de famil les retournes ont t prscolar ises, recevant des cours de rattrapage ainsi que des kits scolaires.

    240 jeunes vulnrables1 de 14 24 ans suivent actuel lement des cours dalphabtisat ion, de calcul, de comptences gnrales pour favoriser leur rintgration et leur part icipation au sein des communauts. I ls se sont inscrits grce aux sensibi l isat ions menes par les communauts de vingt vi l lages et les membres des Chikembe. Les communauts ont galement t mobi l ises pour amnager les terrains destins accuei l l i r les futurs locaux du centre de formation Hombo Sud.

    CE QUI A T ACCOMPLI

    Dans la localit de Bututa, lanalyse des risques mene lcole primaire et dans la structure de sant a pouss les membres des Chikembe mobiliser la communaut pour amliorer les infrastructures existantes. Lon Balangane, prsident du Chikembe de Bututa, dcrit le travail ralis grce la mobilisation des habitants:

    Derrire lcole, il y avait un terrain avec des trous, les enfants risquait de se blesser en y jouant; on a mobilis les parents pour comblerles trous et maintenant il y a moins de risques pour eux. On a aussi dcid de construire une clture pour ne pas quils jouent sur la route.

    Quand la situation sest calme et que les familles sont revenues, on a cherch les enfants qui nont pas pu tre inscrits lanne dernire.

    On a trouv 66 enfants. Ils ont suivi des cours de rattrapage pendant lt et on a pu les inscrire normalement la rentre.

    Notre Centre de Sant est dans une maison loue. Pour baisser les cots des soins, on a dcid de construire un nouveau btiment qui pourrait laccueillir. On a demand un terrain au chef du village et les responsables de la Zone de Sant nous ont conseill pour la construction.

    Chaque famille de la communaut pouvait cotiser : donner mille francs, cinq kilos de manioc ou bien aider faire les travaux. On na pas encore fini, mais le positif cest quon a travaill ensemble avec les autorits et la communaut.

    B U T U TA , T R AVA I L L E R E N S E M B L E P O U R L AV E N I R

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  • LINCLUSION DE LENSEMBLE DE LA COMMUNAUTSi les nouvelles structures communautaires mises en place Bunyakiri ont apport quelque chose cest la participation des femmes et des enfants. La prise en compte de leurs proccupations a men un meilleur respect des droits des enfants, notamment en matire de protection. De plus, lensemble de la communaut peut tre consult pour des questions auparavant cloisonnes, telles que lducation (qui ntaient abordes quentre parents dlves et ducateurs).

    PLUS DE TRANSPARENCE ET DE REDEVABILITLes runions dinformation publique ont abouti la cration dun cadre de concertation de fait entre les communauts et les acteurs communautaires Les diffrents reprsentants peuvent y tre facilement interpels par les communauts pour rgler les problmes qui mergent dans le village. Enfin, les Chikembe sont considrs comme un pont entre les autorits et les communauts.

    LA PLANIFICATION DES ACTIVITSAu travers de lanalyse de situation des structures scolaires et de sant, les communauts identifient elles-mmes les problmes et les solutions ; il sagit dun premier pas dans la prparation de possibles crises et au retrait progressif des organisations partenaires du gouvernement.

    LA MOBILISATION COMMUNAUTAIRE Le travail des Chikembe a conduit une mobilisation des habitants des villages dans la ralisation de travaux dintrt communautaires (construction du centre de formation de Hombo Sud, construction de centres de sant, travaux de scurisation des abords des coles).

    LA DCOUVERTE : CE QUI MARCHE

    L A PA RT I C I PAT I O N D E S F E M M E S , P R E M I E R S PA S V E R S L G A L I T ?La scne se passe pendant la runion de planification des activits dassainissement du village de Mayibano. Les femmes prennent la parole. Agrablement surpris par ce fait inhabituel, nous voulons connatre les raisons de ce changement.

    Avant les femmes ne savaient rien, elles ne voulaient donc pas participer aux runions de la barza1!

    Cette rponse suscite videmment de1 Lieu symbolique o les autorits du village se concertent au sujet des activits de la communaut.

    vives ractions de la part des femmes prsentes - jusqu ce quun autre homme rsume le nouvel tat desprit que veulent apporter les Chikembe Mayibano:

    Les coutumes encourageaient les hommes refuser lintervention des femmes dans les dcisions de la communaut. Aujourdhui, si tu ne partages pas avecles femmes, tu vis dans le pass. Toutes les dcisions devraient se prendre avec les femmes, parce que leur avis est important!

    A woman speaks during a public meeting in Mayibano village.

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  • Pour les membres des Chikembe rencontrs, la vision de court terme est de sappuyer sur les partenaires extrieurs pour raliser les projets que la communaut aura labors. LUNICEF souhaite impliquer les Chikembe dans ses interventions futures dans la zone.

    VERS UN EFFET BOULE DE NEIGELes Chikembe nont t crs que dans les vingt villages cibls par le Programme Elargi dAssistance aux Retourns. Or, linitiative a rencontr un cho certain dans les villages environnants, qui souhaitent galement mettre en place ces structures.

    VERS DES MCANISMES DE SOLIDARIT POUR LES PLUS VULNRABLESLa frquence des mouvements de population Bunyakiri a fragilis la situation de nombreux mnages parmi les solutions envisages par la population, des mcanismes de solidarit communautaire pourraient tre mis en place, notamment grce au dveloppement du microcrdit. Sa gestion pourrait tre confie aux Chikembe. Ces mcanismes pourraient contribuer la scolarisation des enfants retourns, la ralisation de travaux (construction de postes de sant) ou la mutualisation des frais de sant.

    LA PLANIFICATION DU DVELOPPEMENTLes membres des Chikembe souhaitent dpasser le cadre strict de la protection des droits de lenfant et veulent mettre profit leurs outils de planification dans dautres secteurs, tels que lagriculture.

    VERS UNE AUTONOMISATION DES COMMUNAUTSLes Chikembe veulent mieux prendre en charge le dveloppement des communauts, en trouvant des solutions locales aux problmes rencontrs et en se mobilisant pour financer ou effectuer les travaux communautaires. plus long-terme, tous ont conscience dun possible dsengagement des partenaires mettant leurs capacits lpreuve.

    LE RVE : LA VISION DU FUTUR

    Destin Kitchengele, 10 ansConseiller du Chikembe de Mashere

    Dans mon cole, les enseignants frappaient les lves qui ne donnaient pas de bonnes rponses. Mais avec le Chikembe, je connais mieux les droits de lenfant et jutilise mes connaissancespour sensibiliser la communaut contre a.

    Maintenant cest trs rare quun enseignant fasse du mal un lve.

    Neema Lubombo, 13 ansConseillre du Chikembe de Hombo Libration

    Avec le Chikembe, on fait un plaidoyer pour que les enfants qui nont pas de moyens ne soient pas chasss de lcole; on essaie de

    trouver des solutions avec eux.Mon pre est trs heureux que je travaille pour la

    communaut, il mencourage vraiment pour a!

    Nabintu Mitingi, 16 ansConseillre du Chikembe de Mayibano

    Je suis fire dtre dans le Chikembe, parce que les enfants peuvent sexprimer et sont couts - les parents respectent mieux lavis des enfants.

    Plus tard, je voudrais devenir parlementaire pour plaider la cause des habitants de mon village.

    La participation des enfants - et la prise en compte de leur point de vue sur lavenir de leurs villages - est lun des principaux changements dans la mise en place des Chikembe. Tmoignages de ces lus pas comme les autres.

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  • Les membres des Chikembe mobiliss pour construire le centre Y.E.P. de Hombo Sud (Sud Kivu), en octobre 2014. Crdit : Benoit Almeras-Martino / UNICEF, 2014.