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Bertrand GUYARD – Habitat individuel et développement durable Page 1 sur 1 Bertrand GUYARD Septembre 2006 Habitat individuel et développement durable Expériences européennes dans le domaine de l’habitat durable et mise en place d’une démarche HQE pour les écuries du Parc de la Deûle "Une chose est certaine. Le destin des villes déterminera de plus en plus non seulement le destin des nations mais aussi celui de notre planète. Nous ne pouvons ignorer la question de la gestion durable de nos villes qu'à nos risques et périls." Elisabeth Dowdeswell alors Directrice Executive du Programme des Nations Unies pour l'Environnement Directeur : M. Youssef Diab Master II Génie Urbain Spécialité Développement Urbain Durable Cité Descartes – 5, bd Descartes Champs-sur-Marne 77 454 Marne-la-Vallée cedex 2

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Bertrand GUYARD Septembre 2006

Habitat individuel et développement durable

Expériences européennes dans le domaine de l’habitat durable et mise en place d’une démarche HQE pour les écuries du Parc de la Deûle

"Une chose est certaine. Le destin des villes déterminera de plus en plus non seulement le

destin des nations mais aussi celui de notre planète. Nous ne pouvons ignorer la question de la gestion durable de nos villes qu'à nos risques et périls." Elisabeth Dowdeswell alors

Directrice Executive du Programme des Nations Unies pour l'Environnement

Directeur : M. Youssef Diab Master II Génie Urbain

Spécialité Développement Urbain Durable Cité Descartes – 5, bd Descartes Champs-sur-Marne 77 454 Marne-la-Vallée cedex 2

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REMERCIEMENTS

Je tiens tout particulièrement à remercier M. Richard MALBRAND et Mme Isabelle TRIDER pour leur accueil chaleureux au sein du bureau d’études INGESPACES et leurs précieux conseils

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SOMMAIRE AVANT-PROPOS / INTRODUCTION

I- Vers un développement durable des villes

A. Le développement durable dans le droit français

1. Schématisation du principe de « développement durable » 2. Emergence et définition d’un concept 3. Le développement durable dans le droit français

B. La « soutenabilité urbaine », un enjeu essentiel du développement durable

1. L’impact environnemental des activités urbaines 2. Le concept de ville durable 3. Les principaux outils de mise en œuvre d’un développement durable des villes

a) Protection de l’environnement et amélioration du cadre de vie b) Equité et cohésion sociale

II- Habitat et développement durable

A. L’habitat individuel en France

1. Caractéristiques de l’habitat individuel et profil des occupants

a) Enquête « logements » INSEE 2002 b) De fortes disparités sur le territoire français c) Une surface habitable plus importante d) Profil des occupants et acquéreurs de maisons individuelles

2. Des composantes symboliques fortes

a) Les représentations traditionnelles liées à la maison individuelle b) Evolutions des aspirations en matière d’habitat

3. Habitat individuel, étalement urbain et nuisances écologiques

a) Habitat individuel et consommation d’énergie b) Le processus de péri-urbanisation et ses conséquences

B. De nouvelles formes d’habitat et d’aménagement au service du développement durable

1. La construction de Haute Qualité environnementale (HQE)

a) Présentation de la démarche HQE b) Difficultés de mise en œuvre de la démarche HQE

2. L’éco-aménagement

a) Végétation b) Circulation

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c) Mobilier urbain et revêtements de sols d) Techniques alternatives d’assainissement pluvial e) Un meilleur choix d’énergie dans les opérations d’aménagement

III- Expériences européennnes : de l’éco-quartier à la démarche HQE

A. Le quartier durable de Vesterbro à Copenhague

1. Contexte

2. La politique de la ville et la planification

3. Acteurs et gouvernance

4. Une organisation de quartier favorable au développement durable

a) Les carburants écologiques b) La maîtrise des énergies c) Préserver l’eau potable d) Réduire la production de déchets

5. Evaluation globale du projet

B. Le quartier durable Vauban à Fribourg

1. Contexte

2. Montage de l’opération

3. Contenu de l’opération

4. Une organisation de quartier favorable au développement durable

a) Limitation de l’automobile b) Un quartier vert c) Production d’énergie d) Récupération et évacuation des eaux

5. Evaluation globale du projet

a) Une prise en compte globale du développement durable b) Effets indésirables et éléments pouvant être améliorés

c) Eléments pouvant être améliorés

C. Mise en place d’une démarche HQE pour les écuries du Parc de la Deûle

1. Eco-construction

2. Eco-gestion

3. Confort

4. Santé

CONCLUSION

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AVANT-PROPOS J’ai souhaité avec ce mémoire confronter différentes échelles afin de mieux cerner les enjeux de l’habitat et du développement durable. Ainsi, le raisonnement se façonne tout au fil du corpus par un jeu d’emboîtement d’échelles aléatoires. Petite échelle (échelle globale) Grande échelle (échelle fine) ���� villes durables ���� l’éco-quartier ���� politique de l’habitat en France ���� la reconversion HQE (monde) (Europe) (France) (local)

INTRODUCTION Le monde ne cesse de s’urbaniser. Les pays développés sont très largement urbains et les trois quarts de leurs habitants vivent dans des villes. Croissance urbaine et développement économique sont longtemps allés de pair mais aujourd’hui, les interactions ne sont plus toujours positives. Un développement durable de la planète suppose certes de meilleures conditions de vie en milieu urbain mais aussi d’autres modes de vie, plus respectueux de l’environnement tant local que global. C’est une des conditions d’existence des « villes durables ». La ville doit donc s’inventer un modèle de développement qui concilie les temporalités respectives, et les exigences environnementales, économiques et politiques. Dans cette perspective, la définition de la durabilité appliquée à la ville part de la définition communément admise du développement durable figurant dans le rapport Bruntland pour la repositionner dans un environnement naturel dont elle ne peut être isolée. Bien que le développement durable dépasse le seul territoire de l’urbain, il s’applique directement à la ville pour ce qui est de la consommation ou de la destruction de biens non renouvelables tels que l’air et l’eau ou les espaces naturels qui les entourent mais également, les problèmes d’approvisionnement, de sécurité, de prévention des risques, de santé publique, de protection de l’environnement, d’aménagement équilibré du territoire, de solidarité et d’équité. La politique de l’habitat recouvre toutes ses dimensions et celle de la protection de l’environnement est particulièrement prégnante. L’acte de construire constitue une empreinte forte sur le territoire. Il marque surtout une action difficilement réversible dont les effets sur l’environnement sont sensibles : consommations d’énergies fossiles non renouvelables, pollutions atmosphériques, effet de serre, gestion des déchets de chantiers, risques sanitaires, … Ainsi, l’enjeu énergétique et les changements climatiques, bien que planétaires, interpellent fortement les collectivités territoriales et illustrent parfaitement le principe de subsidiarité territoriale auquel doit répondre les villes pour une politique durable de l’habitat. L’éco-quartier semble être devenu la pierre angulaire du programme d’actions environnementales de certaines villes comme Fribourg ou Copenhague mais contribuent-ils concrètement à transformer les habitudes et à favoriser le développement durable ? Cette démarche associe le confort des êtres humains au développement durable. Pour un bâtiment, elle consiste à maîtriser ses impacts sur l'environnement extérieur (respect du site, maîtrise des nuisances et des déchets de chantier), à mieux gérer la consommation de l'énergie et de l'eau et à créer un environnement intérieur satisfaisant (recherche du confort thermique et acoustique, emploi de matériaux sains).Si en Allemagne, en Suisse ou en Autriche, cette démarche est acquise depuis longtemps, les premières opérations HQE ont vu le jour en France il y a peu, et de nombreux chantiers ou projets sont à venir comme la reconversion des écuries du Parc de la Deûle près de Lille. A partir de ces différentes réflexions nous tenterons de mieux comprendre les interactions qu’ils existent entre habitat et développement durable.

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I- Vers un développement durable des villes A) Le développement durable dans le droit français

1- Schématisation du principe de « développement durable » Le concept de développement durable se fonde sur trois dimensions : la protection de l’environnement, l’efficacité économique et l’équité sociale. Il se fonde sur plusieurs principes : l’homme au coeur du développement, la solidarité dans le temps et l’espace, la responsabilité, la prévention, la précaution, la gouvernance,… Il vise ainsi à répondre à trois objectifs indissociables et d’égale valeur : la croissance : permettre une efficacité accrue des processus de production pour satisfaire nos besoins fondamentaux et combler nos besoins immatériels, le partage : des fruits de la croissance afin de maintenir la cohésion sociale et préserver les liens sociaux, la protection : léguer aux générations futures une terre vivable. Le développement durable constitue un principe « guide » pour l’action publique. Celle-ci doit rechercher la synergie entre ces trois objectifs et s’appliquer à la gestion des territoires urbains. Assurer la diversité de l’occupation des territoires, faciliter l’intégration urbaine des populations, veiller à une utilisation économe et valorisante des ressources, assurer la santé publique, tels sont les objectifs majeurs auxquels la politique de l’habitat doit répondre. Le schéma ci-dessous montre comment l’interaction des politiques portant sur l’environnement, l’économie et la société peut concourir au développement durable. L’objectif est de tendre vers un monde équitable (lien entre économie et société), viable (lien entre économie et environnement) et vivable (lien entre société et environnement).

Source : ensc-lille.fr

Liens entre économie et société Grâce à une économie bien gérée et durable, les membres d'une société peuvent avoir des revenus qui sont équitables entre tous, des emplois à long terme et des biens et services de qualité.

Liens entre environnement et société Un environnement sain procure de la nourriture, de l'eau potable, de l'air de qualité, des abris et des emplois à une société. C'est l'ensemble des décisions d'une société qui détermine l'avenir de l'environnement.

Liens entre économie et environnement L'environnement procure des ressources naturelles qui sont exploitables et essentielles à la survie de l'économie.

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Pour avoir une économie durable, les ressources naturelles doivent être exploitées et gérées convenablement. L'économie peut contribuer à protéger l'environnement tout comme elle peut le détruire.

2- Emergence et définition d’un concept

���� La Conférence Mondiale des Nations Unies sur l'Environnement (Stockholm, 1972) réagit au constat présenté par le Club de Rome dans son rapport "halte à la croissance", publié en 1970, qui prône la "croissance zéro" de la démographie humaine afin d'épargner les matières premières non renouvelables. L'objectif de cette rencontre est de réfléchir sur les tendances d'évolution du développement économique et les menaces pesant sur la planète et les espèces qui l'habitent. A cette occasion est créée la Commission mondiale sur l'environnement et le développement, présidée par le Premier ministre norvégien Madame Brundtland. ���� Le rapport Brundtland (1987), sous le titre "Notre avenir à tous", s'intéresse principalement à la protection de l'écosystème de la planète terre. Un des plus importants principes exprimés dans ce rapport est qu'il faut "penser globalement et agir localement". Entre des positions extrêmes soit de sanctuarisation des espaces vierges, soit de priorité absolue aux activités humaines, il s'agit de trouver un compromis, garanti par l'acceptation de limites à ne pas dépasser pour ne pas franchir l'irréversible, de seuils au-delà desquels les pollutions induites par la civilisation industrielle doivent être contrôlées, voire interdites. Ce document insiste sur la nécessité de mettre en place un type de croissance qui ne pénalise pas les générations futures, notamment en matière de disponibilité de ressources naturelles. Le développement doit désormais se faire dans le respect des équilibres écologiques de la planète. On parle à partir de là de développement durable. ���� La Conférence sur l'environnement et le développement (Sommet de la Terre, Rio de Janeiro, 1992) introduit des liens entre environnement et développement économique, permettant ainsi d'approcher dans son ensemble la problématique du développement mondial : démographie, pauvreté, urbanisation, dégradation de l'environnement, etc. A l'occasion de cette rencontre, qui fait figure de compromis historique entre pays du nord et pays du sud, plus de 100 chefs d'Etat et de gouvernements adoptent plusieurs documents de référence :

• la déclaration de Rio ;

• le programme Action 21 ou Agenda 21 ;

• le texte de création de la Commission mondiale pour le développement durable ;

• deux conventions, l'une sur les climats et l'autre sur la biodiversité ;

• deux textes sur les forêts et la désertification.

La Déclaration de Rio énonce 27 principes de développement durable qui sont adoptés à l'unanimité. L'Agenda 21 est un programme de mise en œuvre du concept de développement durable pour le XXIème siècle. Ce document contient un grand nombre d'objectifs, souvent très généraux, énonçant des actions à entreprendre mais sans apporter des directives permettant de structurer et de hiérarchiser ces actions vers une politique d'ensemble. Il est conçu pour être décliné du niveau national au niveau local, en passant par le niveau régional.

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Dans une dynamique d'élaboration concertée, il propose un cadre d'action et de recommandations, en particulier dans le domaine de l'urbanisme, à l'ensemble des partenaires : gouvernements, collectivités locales, industriels, société civile qui, chacun à leur niveau, ont un rôle à jouer. Il ne revêt aucun caractère réglementaire. 3- Le développement durable dans le droit français

En 2003, la France se dote de textes fondamentaux de portée nationale, la stratégie nationale du développement durable et la charte de l’environnement adossée à la constitution. La stratégie de développement durable comprend un programme d'actions " territoires " qui se décline en cinq volets :

1. la dimension urbaine et bâtie des territoires,

2. la dimension rurale et naturelle des territoires,

3. la préservation des milieux,

4. les inégalités sociales et environnementales des territoires

5. mieux associer les collectivités locales à la gestion des territoires.

" L'homme est comptable et responsable de ces territoires qui lui ont été confiés par les générations précédentes et qu'il confiera à ses successeurs. " La charte de l'environnement est un texte parallèle à la déclaration des droits de l'homme qui décrit les droits et devoirs de chaque citoyen en matière d'environnement. Le cadre législatif actuel de l'intégration des finalités du développement durable dans les projets et programmes de développement local, chacun à son échelle, est constitué par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire (LOADDT) du 25 juin 1999, la loi relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale du 12 juillet 1999, la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) du 13 décembre 2000 et la loi relative à la démocratie de proximité du 27 février 2002. Selon la LOADDT, les Chartes de Pays et les Projets d'agglomération doivent être l'expression d'un développement durable des territoires concernés suivant les recommandations inscrites dans l'Agenda 21 de Rio 1992. L'évaluation environnementale doit être prise en compte dans la révision des contrats de plan Etat-Région, des DOCUP et des schémas de services collectifs. La loi SRU rappelle l'importance de se servir des documents d'urbanisme pour " respecter les objectifs de développement durable " (titre I) et soutient la mise en œuvre " d'une politique de déplacement au service du développement durable " (titre III). Le rapport de présentation des documents d'urbanisme doit comporter un état initial de l'environnement ainsi qu'une évaluation de l'impact du projet sur l'environnement. Les documents d'urbanisme et de planification (SDRIF, SRADT, PADD, SCOT, PLU, etc.) doivent désormais prendre en compte la conception et la gestion durable des urbanisations, et du développement économique et social en général, pour une nouvelle organisation du territoire.

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B) La « soutenabilité urbaine », un enjeu essentiel du développement durable Le thème du développement urbain durable s’inscrit dans le cadre plus large du développement durable et en constitue l’un des enjeux essentiels au sens où les villes sont, dans les pays développés, les plus grandes concentrations d’activités économiques et résidentielles. Elles sont la source la plus importante de déchets et de pollution et utilisent la plus grande quantité d’énergie.

1- L’impact environnemental des activités urbaines Les grandes agglomérations sont confrontées à diverses problématiques qui ont un impact environnemental fort :

un étalement urbain non maîtrisé qui dégrade la qualité des sites et espaces naturels périphériques, qui spécialise les territoires, éloigne les groupes sociaux les uns des autres, crée des besoins nouveaux de déplacements motorisés, et peut mettre en péril les budgets des collectivités locales ; Dans son rapport sur les Villes Européennes durables, la Commission européenne souligne d’ailleurs ce problème en précisant qu’une des préoccupations majeures en matière de planification urbaine est « la vitesse à

laquelle l’urbanisation consomme la ressource limitée qu’est la sol dans les pays de l’Union européenne. » (photo ci-dessus : exemple d’étalement pavillonaire dans la banlieue parisienne). une fracture physique et sociale qui s’accentue au sein des villes et agglomérations, entre les quartiers dégradés et d’autres devenus financièrement inaccessibles ; certains territoires sont pris dans une spirale de dégradation, d’autres vivent en « îlots protégés » ; le modèle de la ville à deux vitesses, renforçant les inégalités sociales se répand de plus en plus. (ci-dessous : exemple de la fracture sociale au Brésil à Rio de Janeiro).

une surconsommation des espaces naturels et ruraux, une dégradation des paysages, un renforcement des conflits d’usages, un gaspillage des ressources naturelles (eaux, forêts, etc.).

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Pour parvenir à un développement durable des villes, l’objectif général est de réduire l’impact environnemental (« empreinte écologique ») des activités urbaines. Il s’agit également de protéger et d’améliorer l’environnement urbain et par là d’élever la qualité de vie, de sauvegarder la santé humaine et de protéger les écosystèmes locaux et planétaire.

2- Le concept de ville durable

Roberto CAMAGNI, dans son ouvrage le développement urbain soutenable, une définition et une approche viable (2001), donne cette définition de la ville durable :

« Le modèle de référence pour la soutenabilité urbaine n’est pas un paradis terrestre d’équilibre éco-biologique, ni une ville idéale, mais un archétype pluridimensionnel, une vision simplifiée du système urbain où les différentes fonctions de la ville sont représentées : garantir le bon fonctionnement économique, favoriser l’accessibilité et l’interaction sociale, permettre une intégration en réseau avec le monde extérieur ; et où le maximum de bien être collectif est issu de l’intégration entre l’environnement naturel, le built and cultural heritage, l’économie et la société. » Dans le même ordre d’idées, la commission française du développement durable, chargée de promouvoir en France les orientations correspondant aux objectifs pris dans les conférences internationales, définit la ville durable comme une ville :

- « dont les habitants disposent des moyens d’agir pour qu’elle soit organisée et fonctionne dans des conditions politiques, institutionnelles, sociales et culturelles satisfaisantes pour eux et équitables pour tous ;

- dont le fonctionnement et la dynamique satisfont à des objectifs de sécurité des conditions biologiques de vie, de qualité des milieux et de limitation des consommations et des ressources ;

- qui ne compromet ni le renouvellement des ressources naturelles alentour, ni le fonctionnement, les relations et la dynamique des écosystèmes microrégionaux englobant, ni enfin les grands équilibres régionaux et planétaires indispensables au développement durable des autres communautés ;

- et qui s’attache à préserver les capacités de vie et les potentialités de choix des générations futures. »

La problématique de la ville durable s’est en effet construite à l’origine autour de l’axe majeur du développement urbain à long terme et des préoccupations d’environnement. Mais le concept de « ville durable » est plus large et correspond à une nouvelle tentative pour aborder les problèmes urbains de manière globale, dans toutes leurs dimensions : économiques, sociales, écologiques, institutionnelles,… C’est pourquoi les réflexions sur ce thème portent aussi bien sur la protection de l’environnement que sur les formes urbaines, les liens sociaux, l’emploi, la mobilité…

3- Les principaux outils de mise en œuvre d’un développement durable des villes Comme nous l’avons montré, le concept de ville durable fait appel à l’interaction de politiques économiques, sociales et environnementales.

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Pour autant, les outils de mise en œuvre du développement urbain durable sont difficiles à déterminer avec exactitude. Les chercheurs sont d’ailleurs partagés sur la question de savoir ce que recouvre cette notion. Certains pensent qu’il s’agit simplement d’intégrer la prise en compte de l’environnement dans les politiques de la ville, d’autres qu’il faut construire une nouvelle vision de la ville, tant au niveau de son fonctionnement interne que dans ses relations avec l’extérieur. Pour parvenir à une meilleure « durabilité urbaine », plusieurs outils sont proposés. Il s’agit notamment de rendre les villes plus accessibles, d’en améliorer l’image et l’attractivité, de donner aux citadins un meilleur cadre de vie… a) Protection de l’environnement et amélioration du cadre de vie Réintroduire la nature en ville L’une des principales raisons évoquées par les citadins qui s’enfuient périodiquement, voire définitivement vers la campagne est le manque de « nature ». Les espaces verts en milieu urbain sont souvent trop rares et trop peu étendus, de sorte qu’on ne les remarque parfois même pas. Introduire davantage de nature en ville peut en ce cas être une condition de son maintien et la clef d’une meilleure qualité de vie en ville. Cette proposition, qui semble relever du bon sens, pose cependant la question de l’espace qui peut être accordé à la nature en ville, au regard de la disponibilité du foncier et de son prix. Les Municipalités préfèrent souvent affecter des terrains libres en zone urbaine à la construction de logements ou d’immeubles de bureau, pour des raisons économiques et pour répondre à la pénurie de logements, en particulier de logements sociaux. Par ailleurs, cet objectif entre en contradiction avec celui d’une densité urbaine importante, qui présente de nombreux avantages pour la lutte contre l’étalement urbain. Une double réponse peut être fournie. La présence dans de nombreuses villes de friches industrielles autorise la libération de foncier en centre-ville, qui peut à la fois être affecté à la construction de logements d’une certaine densité et à l’aménagement d’espaces verts de respiration. D’autre part, la limitation de l’automobile permet une libération d’espace : on estime que la surface consacrée aux infrastructures routières occupe jusqu’à 30 % du sol urbain, voire davantage dans les villes très étalées. Les villes possèdent donc des réserves d’espace non négligeables, sitôt que l’emprise de l’automobile se trouve réduite. Il existe d’autres solutions pour combler le manque de réserves foncières, ainsi la ville d’Orléans a aménager un jardin sur le toit d’un multiplexe de cinéma (photos ci-dessous).

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Recycler les friches urbaines Comme nous l’avons évoqué, il existe dans de nombreuses villes des friches industrielles en milieu urbain, qui représentent une réserve foncière abondante, et qui possèdent des localisations intéressantes pour un développement de l’habitat individuel en ville. La transformation des friches industrielles participe d’un recyclage de l’espace qui est le propre de la construction de la ville durable. Elle permet de préserver la densité urbaine et de proposer une offre d’habitat différente au sein des villes. Il existe cependant des obstacles à la reconquête de ces terrains. Il s’agit d’une part de la nécessité d’une dépollution qui s’impose souvent sur d’anciens terrains à vocation industrielle, et qui représente un coût non négligeable. D’autre part, il est assez fréquent que ces zones voisinent des établissements encore en activité, et non compatibles avec la proximité de logements. Par ailleurs, la localisation de ces terrains induit souvent une forte spéculation foncière qui peut rendre difficile la

valorisation des friches par des aménagements non traditionnels, à savoir par exemple un lotissement dense privilégiant la mixité (logement social, équipements publics…) et respectant l’environnement (bâtiments HQE, éco-aménagement…) Pour lever ou contourner ces obstacles, il faut sans nul doute que les élus mènent une politique volontariste notamment par l’acquisition du foncier s’il ne leur appartient pas et par la mise en œuvre de projets innovants (photo ci-dessus : friche urbaine rue d’Iéna – Lille Wazemmes).

Privilégier la densité La densité démographique élevée de la ville permet des économies d’échelle et un meilleur respect de l’environnement. En matière de transports, la réduction des distances à parcourir permet une moindre consommation d’énergies non renouvelables (essence des voitures) et surtout l’emploi plus aisé de modes alternatifs (marche, vélo, autobus…) favorisé par la possibilité d’une meilleure desserte de transports en commun. De même, la densité autorise des économies dans le domaines des infrastructures routières, des réseaux, de l’éclairage public, … Par ailleurs, la ville dense permet de maximiser l’accès au marché du travail et aux équipements publics. La notion de densité apparaît comme une réponse à l’étalement urbain, responsable de nombreuses nuisances pour l’environnement. Elle n’est pas forcément synonyme d’habitat collectif et peut passer par la réduction de la taille des parcelles, la mitoyenneté… Cependant, il faut envisager la notion de densité avec mesure : une densité élevée d’utilisation du sol induit pollution de l’air et de l’eau, problèmes sociaux, de cohabitation… Mieux gérer le parc de logements Une meilleure gestion du parc de logements (en particulier la réduction de la vacance) induit la réduction des besoins de construction de nouveaux immeubles, et par là même une économie d’espace, de matériaux et d’infrastructures, et le respect des paysages urbains. L’entretien du parc de logements et la réhabilitation du parc ancien sont susceptibles d’apporter une nouvelle offre et ainsi de freiner l’étalement de la ville, tout en améliorant la qualité des tissus urbains anciens.

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De même, lorsqu’une démolition-reconstruction est envisagée, l’insertion du nouveau bâtiment dans l’espace environnant, la rue ou le quartier, le site ou le paysage, permet la sauvegarde de la qualité urbaine. Prendre à cœur cette exigence peut permettre de lutter contre la banalisation des villes et améliorer leur image. Coordonner urbanisme et politique de transports publics L’un des principaux dysfonctionnements liés à la ville en matière de développement durable est l’omniprésence de l’automobile, responsable de pollutions, d’engorgements et de consommation importante d’espace. Aujourd’hui, quatre ménages sur cinq possèdent une voiture, soit quatre fois plus que dans les années cinquante. En outre, 30% des ménages ont deux voitures ou plus. Ce taux a augmenté de manière très importante puisqu’il n’était que de 16,7 % en 1982.

En France, l’urbanisation s’est développée autour de l’usage de l’automobile. La conséquence est l’éloignement toujours plus grand de la ville-centre entraînant étalement urbain et périurbanisation. Ce phénomène a annulé les efforts entrepris dans de nombreuses agglomérations pour favoriser l’utilisation d’autres moyens de transport. Les politiques de limitation de la voiture en ville (zones piétonnes et zones 30, interdiction de

stationner ou stationnement payant…) ainsi que les politiques incitatives (amélioration des réseaux et des services liés aux transports en commun, développement des liaisons douces…) n’entament que très faiblement l’utilisation de l’automobile. Ceci s’explique par une certaine frilosité des Municipalités à prendre des décisions très engagées mais également très impopulaires. La planification croisée des transports et de l’habitat apparaît comme une solution pouvant remédier à cette situation, comme cela a été entrepris à Berne ou à Bâle1. La densification du bâti le long des axes de transport en commun paraît en effet être une stratégie judicieuse, qui a fait ses preuves dans ces villes suisses. Il s’agit par ailleurs d’articuler zone d’habitat et bassin d’emplois, en mettant en place de nouvelles instances de planification des transports à l’échelle du bassin d’emploi (photo ci-dessus : zone piétonne à Avignon). . b) Equité et la cohésion sociale Pour parvenir à un développement durable des villes, il faut introduire davantage de démocratie et d’égalité entre ses habitants. Mettre en place une mixité fonctionnelle et sociale La loi Solidarité et Renouvellement urbains (SRU) du 13 décembre 2000, a renforcé l’obligation pour les communes de disposer d’un nombre de logements sociaux représentant au moins 20 % des résidences principales (article 55). Cette obligation concerne les communes de plus de 3500 habitants (1500 habitants en Ile-de-France) ou les communautés urbaines et d’agglomération compétentes dans le domaine de l’habitat.

1 KAUFMANN V., SAGER F., FERRARI Y., JOYE D., Coordonner transports et urbanisme. Lausanne : Presses polytechniques et universitaires romandes, 2003. 220 p.

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La planification est un outil privilégié pour accroître la mixité, en distribuant par exemple l’habitat social dans le centre historique et les différents secteurs de l’agglomération. Les Schémas de Cohérence Territoriale, au niveau de l’agglomération et les Plans Locaux d’Urbanisme sont élaborés en cohérence avec les Plans Locaux de l’Habitat, qui constituent un instrument privilégié de mise en œuvre des objectifs de mixité urbaine et sociale, de diversification de l’offre de logement et de résorption des phénomènes de ségrégation. La mixité fonctionnelle consiste à implanter sur une zone donnée habitat, activités, équipements, commerces, espaces verts… ce qui favorise une réduction des besoins de déplacement. Dans ce domaine, la planification joue un rôle central. Il faut abandonner la spécialisation fonctionnelle des différentes zones de la ville, liée à la pratique historique du zonage, et remettre en cause les politiques de cloisonnement urbains qui prévalent dans les villes. Cependant, cette question est complexe : les bassins d’emploi et les bassins de vie, incluant les lieux liés au travail, mais aussi liés aux loisirs et à la culture vont en s’élargissant. Seuls quelques emplois peu qualifiés permettent de penser à des « bassins d’emploi de quartier » ou dans le cas de filières d’activités localisées (par exemple, un pôle technologique où se trouvent les entreprises et instituts de recherche ainsi que les résidences des salariés et chercheurs). La mixité des fonctions est une notion difficilement applicable au marché de l’emploi.

Résorption des problèmes liés aux quartiers d’habitat social L’un des principaux enjeux urbains à l’heure actuelle réside dans la résorption des problèmes liés aux quartiers d’habitat social. Ces quartiers, composés de grands ensembles construits massivement après la guerre en périphérie des villes, cumulent différents handicaps : concentration de populations à faible revenu, de jeunes non diplômés, de familles monoparentales… Ces quartiers sont également le lieu de l’exclusion,

favorisée par leur isolement du reste de la ville et par l’image négative qui y est attachée. Ils concentrent des problèmes multidimensionnels : économiques, sociaux, identitaires, de sécurité… auxquels la « politique de la ville », initiée dans les années 1970, a tenté d’apporter des solutions, sans connaître toutefois de résultats flagrants. En matière d’urbanisme, il existe certains outils qui pourraient permettre de réparer les erreurs du passé. Les politiques de renouvellement urbain, passant notamment par des opérations de démolition-reconstruction ont pour ambition de refaire la ville sur elle-même. Il paraît en effet souhaitable de remettre en cause l’urbanisme « de tours et de barres » et de lui préférer des formes d’habitat plus « vivables » : moins de densité, plus de mixité sociale et fonctionnelle, meilleur cadre de vie… Pour autant, il est certain que cela prendra du temps. En attendant, il faut prendre conscience que l’amélioration de l’habitat social ne se joue pas qu’au niveau des façades mais aussi dans l’espace environnant (photo ci-dessus : Cité avanchets Vernier-Genève). Gouvernance urbaine L’implication des habitants dans une politique, un projet est beaucoup plus efficace qu’une simple politique d’information, de communication sur l’écologie par exemple.

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La législation va dans le sens d’une plus grande participation des citoyens à la vie publique, en particulier dans le domaine de l’urbanisme, puisque l’élaboration des plans locaux inclut la consultation des habitants. On peut cependant regretter le fréquent manque d’intérêt porté à ces questions, symbolisé par exemple par la faible participation aux réunions publiques. De nouveaux modes de consultation restent sans doute à développer, par le biais des nouvelles technologies ou simplement en contactant directement les citoyens, comme la Mairie de Paris a tenté de le faire en envoyant à chaque habitant un questionnaire relatif à l’élaboration du PLU. II- Habitat et développement durable A) L’habitat individuel en France

Définition L’Encyclopaedia Universalis donne cette définition de l’habitat : « L’habitat n’est pas qu’un toit-abri, foyer ou logis, mais un ensemble socialement organisé. Il permet à l’homme de satisfaire ses besoins physiologiques, spirituels et affectifs ; il le protège des éléments hostiles et étrangers. Il lui assure son épanouissement vital. L’habitat intègre la vie individuelle et familiale dans les manifestations de la vie sociale et collective. » (Encyclopædia Universalis 1995.)

Habitat individuel et habitat collectif Les deux adjectifs accolés au terme habitat, individuel ou collectif, opposent deux grands groupes de formes architecturales, et deux types de paysages urbains. Ils renvoient immédiatement à deux modèles de références : du côté du collectif, l’immeuble empilant ou juxtaposant plusieurs logements sur une même parcelle ; du côté de l’individuel, la maison ou le pavillon de banlieue, faisant correspondre à chaque parcelle un logement unique.

1- Caractéristiques de l’habitat individuel et profil des occupants a) Enquête « logements » INSSE 2002 Au total, l’habitat individuel représente 56,6 % des 24,5 millions de résidences principales existant en France. L’enquête a par ailleurs révélé qu’un ménage sur quatre résidant en collectif souhaite changer de logement pour, à 42 %, vivre en maison individuelle. La construction de maisons individuelles a connu une forte augmentation par rapport à la période précédente de référence : sa part, qui représentait 57,6 % des maisons construites de 1993 à 1996, est passée à 62,2 % de 1997 à 2001. En 2003, les mises en chantier de maisons individuelles stagnent (+ 0,3 %), alors que celles d'appartements sont en hausse de 10,5 %. Après des années de croissance continue, la maison individuelle marque ainsi légèrement le pas tout en restant largement dominante. b) De fortes disparités sur le territoire français L’habitat individuel est davantage représenté dans une grande moitié ouest de la France : le record est détenu par le département de la Vendée, avec 86,5 % de maisons, suivi par les Deux-Sèvres, le Gers et la Dordogne. A l'opposé, dans les Alpes-Maritimes et le Rhône, cette part tombe à 30 %, et même à 27,4 % en moyenne en Ile-de-France. Ces disparités s’expliquent par le caractère plus ou moins rural des différents départements ainsi que par leur attractivité économique, qui influe sur la densité démographique.

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c) Une surface habitable plus importante En 2002, la taille moyenne d'une maison dépasse les 108 m², soit 3 m² de plus qu'en 1996. La tendance est en effet à la construction de logements individuels de surfaces toujours plus importantes : l'INSEE, selon les témoignages des professionnels, estime à 114,4 m² la surface moyenne des maisons construites entre 1997 et 2001. Or les logements collectifs connaissent le mouvement inverse : alors que la surface des appartements a culminé à 68,3 m² entre 1949 et 1981, elle est retombée à 60,5 % dans les nouvelles constructions (1997/2001). De plus, 44 % des appartements construits depuis 1997 sont des studios et des deux pièces alors qu'ils ne représentent que 37 % du parc, ce qui laisse présager une évolution décroissante de la surface moyenne des logements collectifs dans l’avenir. Le logement moyen (individuel et collectif confondus) est composé de quatre pièces : 4,8 pièces dans l'individuel et 3 dans le collectif. La taille des ménages se rétrécissant (2,4 personnes en moyenne), chaque membre dispose en moyenne de 1,8 pièce et 41 m² en individuel contre 1,4 pièce et 31 m² en appartement. En moins de vingt ans, la surface moyenne par personne s'est accrue de 20 %. d) Profil des occupants et acquéreurs de maisons individuelles La grande majorité des maisons individuelles est occupée par un couple avec enfants âgés de 0 à 20 ans. Les deux tiers des moins de 20 ans résident en maison individuelle, mais ils ne sont plus que 40 % entre 24 et 27 ans. A partir de 30-40 ans, l’accession à la propriété s’accompagne d’un transfert vers l’habitat individuel qui culmine à de 70 % entre 55 et 70 ans. Après 70 ans, ce taux diminue progressivement mais reste élevé : 62 % des personnes âgées d’au moins 85 ans, qui ne sont ni en maison de retraite ni dans un établissement spécialisé, vivent en maison individuelle. L’accession à la propriété d’une maison individuelle se fait moins tôt qu’au début des années quatre-vingt-dix. Entre 28 et 31 ans, alors qu’une grande majorité des individus a quitté le domicile parental, 50 % vivaient dans une maison en 1988 ; ils sont 46 % en 1996. Entre 30 et 60 ans, pour chaque génération, la proportion de personnes habitant dans une maison augmente avec l’âge : ainsi en 1984, c’était le cas de 62 % des personnes de 40 à 43 ans (génération 1941-1944) ; et 12 ans plus tard de 68 % des individus de cette génération. Par ailleurs, chacune des générations nées entre 1925 et 1956 vit plus souvent en maison individuelle que la précédente : par exemple, 66 % des personnes âgées de 40 à 43 ans en 1996 habitent une maison contre 62 % des personnes du même âge en 1984.

2- Des composantes symboliques fortes a) Les représentations traditionnelles liées à la maison individuelle L’habitat collectif, associé à la ville et sa banlieue, est devenu synonyme de nuisances, d’insécurité, d’exiguïté, de promiscuité. A l’inverse, l’habitat individuel, traditionnellement associé à l’espace rural ou péri-urbain (maisons individuelles composant les villages ou programmes d’aménagement d’ensemble de type lotissement…) véhicule des valeurs positives : la liberté, l’indépendance, l’espace, la qualité de vie… elle apparaît comme un refuge et répond à une volonté de repli sur soi, de « cocooning ».

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La maison symbolise accession à la propriété et ascension sociale. Elle correspond à une aspiration de vie meilleure, et marque souvent le passage du couple à la famille.

Enfin, la fuite de la ville (associée à une symbolique de violence et d’insécurité) figure parmi les motivations majeures des futurs acquéreurs de maisons individuelles. On observe d’ailleurs un essor de la demande de sécurisation des maisons, comme l’illustre l’apparition sur le marché de volets

et portes blindés, ou de systèmes de télésurveillance, à des prix de plus en plus attractifs ou encore le développement de « gated communities », lotissements sécurisés nés aux Etats-Unis (photo ci-dessus : exemple d’une gated communities aux portes de Pékin). b) Evolutions des aspirations en matière d’habitat Différentes enquêtes effectuées auprès des français démontrent une certaine évolution des aspirations en matière d’habitat. Le parcours résidentiel des ménages s’est complexifié, en raison d’une mobilité accrue et l’investissement dans une maison est aujourd’hui mis en concurrence avec d’autres priorités. Le bien-être et l’accès à la culture prennent de plus en plus d’importance. L’habitat périurbain, par son éloignement des établissements scolaires et des lieux culturels (cinémas, théâtre mais aussi patrimoine des centre-ville historiques, …) est donc dans ce contexte porteur de certains inconvénients.

En somme, les français souhaitent majoritairement profiter des avantages de l’habitat individuel (indépendance, espace vert privatif, qualité de vie…) tout en bénéficiant de ceux de la vie en ville (proximité des services publics, des transports en commun, du lieu de travail…). L’enjeu semble donc résider dans l’introduction (ou la réintroduction) de la maison individuelle en ville, sous forme par exemple de lotissement dense.

3. Habitat individuel, étalement urbain et nuisances écologiques

L’habitat individuel dans son modèle majoritaire est aujourd’hui sur le banc des accusés, au motif des nuisances qu’il produit sur l’environnement. Tout d’abord, la maison isolée au centre de sa parcelle génère de grandes consommations d’énergie. Par ailleurs, depuis une trentaine d’années, ce type d’habitat se développe majoritairement au sein de lotissements en périphérie des villes, ce qui entraîne un étalement urbain responsable de nombreux méfaits : consommation d’espace, déplacements polluants, destruction d’écosystèmes… a) Habitat individuel et consommation d’énergie La consommation d'énergie est partagée en quatre grands secteurs : le secteur « résidentiel et tertiaire » qui représente 46,7 % de l'énergie consommée en France, les transports (24,9 %), l'industrie (28,8 %) et l'agriculture (1,6 %). Le secteur « résidentiel et tertiaire » est composé des logements (deux tiers de la consommation d'énergie de ce secteur), des bureaux, des commerces, des équipements collectifs, etc.

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L'électricité est principalement utilisée par le secteur « résidentiel et tertiaire » (62 % de la consommation électrique totale) et l'industrie (35 %), loin devant les transports (3 %) et l'agriculture (1 %). L'énergie consommée dans les logements est utilisée à 75 % pour le chauffage, à 15 % pour la cuisson et l'eau chaude sanitaire (douches et bains, petits lavages, etc.) et à 10 % pour l'électroménager, l'éclairage, la télévision, etc. En moyenne dans un ménage, la production de froid (réfrigérateur-congélateur, etc.) consomme environ 1100 kWh par an, l'audiovisuel (téléviseur, magnétoscope, antenne parabolique, etc.) 600 kWh/an, l'éclairage 500 kWh/an et le sèche-linge 400 kWh/an. Le lave-vaisselle et le lave-linge consomment chacun environ 300 kWh/an (pour fixer les idées, 500 kWh est l'énergie contenue dans 40 litres d'essence). En France en 1998, 97 % des ménages possédaient un réfrigérateur ou un réfrigérateur-congélateur, un équipement audiovisuel et un lave-linge, 37 % un lave-vaisselle et 24 % un sèche-linge. L'augmentation du nombre et de la surface des logements devrait entraîner d'ici 2020 une augmentation globale de la consommation. L'augmentation de la consommation d'énergie touchera principalement les usages spécifiques de l'électricité (en augmentation de 86 %), l'eau chaude sanitaire et la cuisson (+ 43 %) et le chauffage (+ 8 %).

Selon une enquête Ipsos du mois de juin 20022, 66 % des Français se sentent personnellement responsables d'une partie de la pollution de la planète et 87 % iraient se renseigner sur les aménagements économes en énergie pour le logement si l'Etat accordait des aides. Une alternative semble donc possible…

2 Les français se sentent-ils responsables de leur environnement ? Le Moniteur N° 5158 du 04/10/2002. P. 12.

Evolution des parts de chaque usage dans la consommation totale du secteur résidentiel (1973-1998)

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La typologie de l’habitat influe fortement sur la consommation d’énergie nécessaire en matière de chauffage. La densité induit des consommations moindres : On estime qu’une maison individuelle consomme en moyenne près de deux fois plus d’énergie de chauffage qu’un appartement, mais pour une surface supérieure de 55 % environ, soit une surconsommation, à surface égale de 30 % environ. Celle-ci s’explique par l’absence ou la réduction des échanges avec les logements voisins. Les écarts sont d’ailleurs importants entre les maisons en bandes, les maisons jumelées (+25 %) et les pavillons isolés (+50 %), comme entre les appartements selon l’étage (la surconsommation d’un appartement en rez-de-chaussée, et surtout au dernier étage d’un immeuble, peut dépasser 50 % par rapport aux niveau intermédiaires). Une étude réalisée par Jean-Pierre Traisnel3 vise à comparer l’énergie consommée dans un immeuble en centre ancien dense (Paris), dans un grand ensemble en première couronne de la banlieue parisienne et dans un lotissement pavillonnaire de la banlieue périphérique. Les trois ensembles urbains retenus pour l’étude présentent des caractéristiques contrastées et permettent ainsi de comparer l’efficacité énergétique de logements : - de trois périodes de construction : immeuble haussmannien d’avant 1949, immeuble

collectif des années 1960 et maison individuelle en lotissement de construction récente ; - de conditions d’occupation variées : surface habitable de 33 m² en moyenne à Paris, 28 m²

pour les logements collectifs de banlieue et 39 m² pour le pavillonnaire ; - d’environnements urbains différents : quartier Haussmannien de Paris au bâti compact et

bien desservi par les transports en commun, grand ensemble de banlieue de forte densité, lotissement pavillonnaire de faible densité et où la dépendance à l’automobile est forte.

Le choix des postes de dépense énergétique à comparer permet une analyse globale de la consommation dans chaque cas. Il s’agit : - des dépenses énergétiques liées à la construction et à la réhabilitation, - des dépenses de chauffage, - des dépenses annexes (eau chaude, électricité spécifique…) - des déplacements quotidiens et des dépenses énergétiques liées à la voirie (construction,

éclairage public…) Le résultat de cette étude montre que la structure urbaine de la ville-centre (et cela est encore plus marqué lorsqu’il s’agit de Paris) est globalement la moins consommatrice d’énergie. Viennent ensuite le grand ensemble puis le lotissement pavillonnaire périurbain. On observe également une forte disparité entre les logements neufs et réhabilités, du fait de meilleures performances des logements neufs en matière de chauffage. Les consommations de chauffage sont moindres dans le logement collectif (Paris et grand ensemble), grâce à une plus forte compacité. Les « autres consommations » (eau, chaude, électricité spécifique…) sont à niveau identique pour les trois types d’habitat. En revanche, on observe une différence de consommation en ce qui concerne la rénovation du bâtiment et surtout la voirie. Ceci s’explique par le fait que la voirie pavillonnaire occupe par habitant huit fois plus de surface au sol que celle associée à l’ensemble parisien.

3 Analyse comparative de morphologies urbaines, in « Habitat et développement durable », Les cahiers du Club d’ingénierie prospective énergie et environnement n°13, avril 2001. p.5-72.

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Energie (MJ/m².an)

Paris

Grand

ensemble

Pavillonnaire

Chauffage (neuf/réhabilité) 315/556 277/490 373/839

Autres consommations 268,2 268,2 268,2

Rénovation bâtiment + voirie 18,8 43,5 54,2

Déplacements 206 561 601

Total (neuf/réhabilité) 808/1049 1150/1362 1296/1762

Enfin, les dépenses d’énergie pour les déplacements sont celles qui influent le plus sur la différence de consommation totale. Ces dépenses sont en effet trois fois plus importantes pour le pavillonnaire et le grand ensemble que pour l’immeuble parisien.

Les émissions de CO2 induites par chaque morphologie suivent globalement la même répartition que la consommation d’énergie. Cette étude permet de connaître le « coût global » pour l’environnement de chaque morphologie. Cela confirme l’importance de la densité de construction pour limiter les consommations d’énergie et les émissions de CO2 liées au chauffage, à l’entretien de la voirie et surtout aux déplacements. b) Le processus de péri-urbanisation et ses conséquences Les facteurs de l’étalement La période des « trente glorieuses » (1945-1975) est caractérisée par une croissance rapide de la population (augmentation de 1% par an) et de l’économie (croissance du PNB de 4,5 % par an en moyenne).

Consommations d'énergie - cas du logement réhabilit é

0

500

1000

1500

2000

Paris Grand ensemble Pavillonnaire

MJ/

m²/a

n

Déplacements

Rénovation bâtiment + voirie

Autres consommations

Chauffage

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Cette période est ainsi marquée par un essor de la construction : au début des années 1970, on construisait encore 500 000 logements par an. On observe également une amélioration du niveau de vie et le développement de l’équipement des ménages, avec pour corollaire une augmentation de la consommation d’énergie par habitant de 91 %. Parallèlement, on assiste à la diffusion de l’automobile : on en compte 1,35 millions en 1950, 5 en 1960, 12 en 1970, 15,5 en 1975 et 24 millions d’automobiles particulières en 1996 (soit plus de 400 pour 1000 habitants), ce qui accroît la mobilité et favorise la production de modes d’habitat plus consommateurs d’espace, en particulier de maisons individuelles. L’accroissement du niveau de vie est également responsable de cet état de fait. Les citadins ont souhaité disposer de logements non seulement plus confortables, mais plus vastes et ont désiré – d’autant qu’une publicité souvent non dénuée d’aspects idéologiques y poussait – résider dans des maisons individuelles, ont eu besoin d’équipements publics (écoles, terrains de jeux et de sports, hôpitaux, etc…) plus nombreux et plus vastes, ont disposé de plus de temps libre et consacré une plus grande part de ceux-ci à des loisirs de plein-air nécessitant jardins publics, parcs urbains, forêts aménagées, etc… La banalisation de l’automobile a permis de fréquenter plus assidûment les équipements péri-urbains et surtout a facilité le développement de l’habitat individuel en ouvrant à l’urbanisation de vastes espaces, souvent éloignés des transports en commun. La mesure de l’étalement urbain Depuis 1997, l'Insee prend ce phénomène en compte de manière statistique, en mesurant des « aires urbaines », unités qui englobent une agglomération centrale et les communes qui l'entourent, si plus de 40 % de la population active y travaille.

Aujourd’hui, l'étalement urbain n’affecte plus seulement les grandes métropoles, mais également les villes moyennes ou petites, de sorte qu’en 1999 en France, on dénombrait 354 aires urbaines, qui regroupaient 77 % de la population du pays. Les couronnes périphériques aux agglomérations, qui correspondent à la notion d'étalement urbain, accueillent aujourd'hui plus de 9 millions de personnes. On observe par ailleurs une consommation accélérée du sol : entre 1990 et 1999, la superficie totale des aires urbaines est passée de 132 000 à 176 000 km². L’habitat représente 54 % des espaces urbains nouveaux, consacrés en majorité à la maison individuelle (50%). Les conséquences de l’étalement urbain La naissance et le développement de ces zones urbanisées en deuxième ou troisième couronne des villes traditionnelles posent de nombreux problèmes, au premier rang desquels l’augmentation des déplacements motorisés et l’impact sur les milieux naturels. L’accroissement du trafic urbain génère un grand nombre de nuisances : consommation importante d’espace, congestion, accidents, bruit, pollution atmosphérique ayant des incidents sur la santé et l’érosion du patrimoine, pollution des eaux pluviales, dégradation des paysages, sectionnement du tissu urbain (pour des quartiers enserrés dans des bretelles ou des rocades). A un niveau plus global et de manière plus indirecte, le développement des déplacements automobiles est également responsable de l’épuisement des ressources fossiles, des pollutions pétrolières maritimes, de l’émission de gaz à effets de serre… L’étalement conduit également à une détérioration de la qualité de vie, au sens où l’accroissement des distances réduit le temps passé en famille, pour des loisirs ou pour un engagement politique, associatif… Il a par ailleurs des conséquences néfastes sur la santé parce qu’il réduit le nombre des déplacements non motorisés (marche à pied, vélo…).

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Enfin, le moteur principal de l'étalement urbain réside dans la possibilité d'échapper aux prix fonciers élevés en s'éloignant de la ville, tout en conservant une bonne accessibilité aux activités et services urbains. On observe ainsi un report des dépenses pour les équipements et les services sur les villes-centre, sans que celles-ci bénéficient en retour des impôts locaux versés par les usagers habitant dans des communes limitrophes. D’un point de vue sociologique, le phénomène de périurbanisation et l’urbanisme qui lui est associé, présente le risque de la perte de toute vie sociale et communautaire. Le terme de « cité-dortoir » appliqué à ces nouvelles zones d’habitat est emblématique de l’individualisme qui y prévaut. De plus, l’extension des villes a un impact important sur les sites et paysages. La consommation d’espace qui en résulte est notamment responsable de défrichements massifs dans les bois et forêts, de l’empiétement sur des zones naturelles remarquables, de la réduction du nombre de terres agricoles… Par ailleurs, on observe souvent un manque d’intégration au site des constructions nouvelles en périphérie. Il en résulte un appauvrissement des spécificités architecturales propres à chaque région et une standardisation des villages de France. D’un point de vue paysager, la systématisation des hautes haies taillées (de type thuya…) et la rare plantation d’arbres de haute tige, ou d’arbres fruitiers conduisent à l’appauvrissement de la diversité biologique et à l’uniformisation des paysages. Hormis ces critères visuels et esthétiques, on note des problèmes liés à l’aspect fonctionnel de ces nouveaux quartiers d’habitat construits en périphérie des villes. Implantés sur d’anciennes parcelles agricoles, sur les abords d’axes routiers, ils s’inscrivent dans une logique propre. Le parcellaire et le tracé des voies ne répondent qu’à des exigences fonctionnelles et économiques, sans aucune prise en compte des spécificités du site sur lequel ils s’implantent, de sorte qu’ils ne s’insèrent pas dans la structure de leur commune. Il en résulte également une absence de réflexion sur l’espace public, ainsi réduit à sa plus simple expression (voie de desserte permettant l’aspect direct à toutes les parcelles). La construction de maisons individuelles peu groupées et en périphérie lointaine qui demeure aujourd’hui le modèle majoritaire est en totale contradiction avec les objectifs du développement durable. Il existe donc un réel enjeu en matière de construction de haute qualité environnementale et d’aménagements de zones d’habitat plus écologiques. B) De nouvelles formes d’habitat et d’aménagement au service du développement durable.

1- La construction de Haute Qualité environnementale (HQE)

a) Présentation de la démarche HQE Au niveau national, les origines de la démarche HQE remontent à l’appel à projets initié en 1994 par le plan « Construction et architecture » auprès des bailleurs sociaux pour des réalisations expérimentales.

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Chaque opération a expérimenté une à deux cibles environnementales, parmi les suivantes : gestion des déchets sur le chantier, confort acoustique, recyclage des matériaux de construction et réutilisation des eaux de pluie. La HQE (telle que le présente l’association HQE qui est à l’origine du concept), se définit avant tout comme une démarche de conduite de projet visant l’intégration de l’environnement à tous les moments de la vie des bâtiments.

« Un bâtiment de Haute Qualité Environnementale est une construction qui, tout au long de son cycle de vie, satisfait à la préservation des ressources naturelles et aux exigences de qualité de vie, de confort et de santé de ses occupants ». La qualité environnementale concerne donc les différentes phases du cycle de vie d’un bâtiment :

- construction (y compris fabrication des matériaux de construction) - utilisation et exploitation - adaptation (rénovation / réhabilitation) - démolition / déconstruction

Le référentiel HQE (dont la première version remonte à Novembre 1997), donne une définition assez concrète de la qualité environnementale des bâtiments : « La qualité environnementale correspond aux caractéristiques du bâtiment, de ses équipements (en produits et services) et du reste de la parcelle de l’opération de construction ou d’adaptation du bâtiment qui lui confère l’aptitude à satisfaire les besoins de maîtrise des impacts sur l’environnement extérieur et de création d’un environnement intérieur confortable et sain ».

La démarche HQE affiche ainsi trois objectifs majeurs :

- Se soucier du confort, de la santé et du budget des occupants - Mieux intégrer le bâtiment dans son milieu urbain tout en tirant profit des ressources

locales et renouvelables - Développer une nouvelle filière économique en faveur de l’environnement et de la

qualité du bâtiment

L’exigence de qualité environnementale d’un bâtiment se décompose en 14 cibles regroupées sous deux domaines, la maîtrise des impacts sur l’environnement extérieur et la création d’un environnement intérieur satisfaisant. Ces cibles concernent la construction et la gestion du bâtiment, mais aussi le confort du logement et les conditions d’une bonne santé de ses occupants (ci-dessous : exemple d’un bâtiment aux normes HQE).

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b) Difficultés de mise en œuvre de la démarche HQE La démarche HQE est une démarche volontaire proposée à la filière construction. Son application reste encore limitée, notamment du fait de certaines difficultés de mise en œuvre. Il existe différents obstacles exprimés par les professionnels, liés à la faisabilité technique, au montage financier des projets, à la législation en vigueur ou encore aux habitudes de travail sur les chantiers.

Faisabilité technique - le savoir-faire actuel n’est pas toujours en phase avec la démarche HQE - conflits de cibles, par exemple, le carrelage est un éco-matériau qui répond mal aux

exigences de confort acoustique et thermique - complexité de l’approche (analyse des cycles de vie des produits, écobilans,…)

Montage financier - surcoûts - aides jugées insuffisantes - choix financiers primant sur les choix qualitatifs

Normes juridiques - certaines exigences normatives rendent impossible la mise en place de procédés tels

que la récupération des eaux de pluie, qui provoque systématiquement les réserves de la DDASS

Culture de travail - certains procédés innovants ont du mal à s’imposer du fait de « routines » ancrées dans

la pratique du bâtiment (bétonnage systématique, ventilation mécanique…) - travail d’équipe source de conflit : objectifs non partagés,… - opposition de certaines personnes au motif de perte de temps, de difficultés

d’information, de connaissances qui n’existent pas avec des procédés classique Leviers Afin de limiter ces éléments freinant la généralisation d’une conception environnementale de la construction, plusieurs moyens peuvent être évoqués. Il semble tout d’abord qu’il faille augmenter le montant des aides financières ou d’en mettre en place de nouvelles pour permettre un effet de levier significatif. Cela a été le cas dans le Nord-Pas-de-Calais, où le soutien financier de l’ADEME et de la Région a permis la réalisation de nombreux programmes HQE. Il faut également poursuivre l’expérimentation, au niveau national, et favoriser évaluation et retours d’expérience afin de démontrer la faisabilité de tels projets.

Par ailleurs, des programmes de recherche sur les techniques et produits innovants, en association avec les producteurs (éco-matériaux, systèmes de récupération des eaux de pluie…), permettraient de généraliser des processus et matériaux plus écologiques et d’en réduire les coûts. De même, l’intégration de paramètres environnementaux dans le système propre de qualité, calqué sur ISO 9001 assurerait l’amélioration des processus de construction d’un point de vue environnemental. Enfin, il convient de renforcer la formation des acteurs de la construction (architectes, entreprises) et de favoriser une synergie entre les différents corps de métiers du bâtiment (la démarche HQE implique de s’attacher simultanément à des problèmes thermiques, de façade, d’électricité, d’acoustique…).

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A cet égard, il est nécessaire de généraliser la mise en place d’une direction de projet, qui assure le pilotage et la coordination des différents spécialistes, et qui est garante de la démarche environnementale.

2- L’éco-aménagement La démarche HQE permet d’intégrer les constructions dans une optique de développement durable. A une échelle supérieure, l’aménagement de zones à vocation mixte (habitat, activités…) peut également suivre des règles permettant un moindre impact sur l’environnement.

Les objectifs poursuivis sont multiples. Il s’agit de limiter la circulation automobile, d’intégrer un maximum d’espaces verts, et de manière plus générale de créer un paysage urbain de qualité. Il est également important de privilégier la multifonctionnalité, et de rendre ces lieux attractifs et vivants. Pour ce faire, plusieurs actions peuvent être entreprises, sur la végétation, la circulation, le mobilier urbain, le revêtement des sols… a) Végétation

Il est tout d’abord essentiel de tenir compte de la présence des arbres dans les projets d’aménagement et de conserver ceux qui peuvent l’être. Afin d’augmenter l’offre de surfaces vertes sans pour autant utiliser une superficie importante, il est possible de garnir les pignons, façades et murs avec des plantes grimpantes, de végétaliser les toits, de privilégier les clôtures végétales…

b) Circulation En vue d’une réduction du trafic automobile, à l’intérieur des zones d’habitat et en direction des grands pôles, plusieurs actions peuvent être entreprises : - Réaliser des aménagements en faveur des deux-roues, travailler sur un réseau cyclable sécurisé et multiplier les garages à vélo devant les équipements publics (grands magasins, gares…) - Réaliser des aménagements en faveur des piétons (rues piétonnes, liaisons douces…) - Développer les transports en commun (couloirs réservés, amélioration de la qualité du service, aménagement de parkings à proximité des stations de transport collectif…) - Développer les zones 30 - Limiter le stationnement en centre-ville et créer des parkings de dissuasion à l’entrée des agglomérations

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c) Mobilier urbain et revêtements de sols Il convient d’effectuer une sélection du mobilier urbain afin qu’il s’intègre au mieux au site et qu’il assure la qualité visuelle des espaces. Le choix peut se porter sur des matériaux naturels et durables tels que le bois par exemple. Concernant l’éclairage public, il s’agit de privilégier la qualité esthétique mais aussi les économies d’énergie (ampoules basse consommation, réverbères à réfracteurs…).

Plan lumière de la ville d’Orléans

Les revêtements de sol doivent permettre l’infiltration des eaux de pluie. Pour ce faire, il faut privilégier les sols poreux pour les trottoirs, les parkings… Si possible, il est également souhaitable de prévoir des bassins de rétention paysagers. Afin d’augmenter l’offre de surfaces vertes, les aires de stationnement peuvent être engazonnées et plantées, ce qui permet par ailleurs de les ombrager et d’accroître les possibilités d’infiltration. d) Techniques alternatives d’assainissement pluvial Les techniques alternatives d’assainissement pluvial sont toutes celles qui complètent ou plus souvent se substituent à la technique d’assainissement classique par collecteur. Elles permettent une gestion plus efficace des eaux pluviales, en s’adaptant au site où le projet d’aménagement ou d’assainissement s’intègre.

Ces techniques ont par ailleurs d’autres avantages : elles assurent une meilleure protection face au risque d’inondation et remplissent des fonctions complémentaires :

- de circulation (chaussées-réservoirs, trottoirs sur tranchées), - de traitement paysager (noue aménagée en espace vert, toitures-terrasses…), - d’aire de loisirs (bassins de retenue en eau,…),

e) Un meilleur choix d’énergie dans les opérations d’aménagement Des incertitudes pèsent quant à l’évolution du contexte énergétique et, de plus, l’usage de certaines énergies sont néfastes pour la planète. C’est pourquoi il faut penser à adapter les modes énergétiques au contexte actuel en comparant les impacts économiques, qualitatifs, sociaux à court et à long terme et les conséquence environnementales.

La mise en œuvre d’une planification énergétique locale (notamment à l’occasion de l’extension de l’urbanisation) permet l’exploitation des opportunités énergétiques locales (réseaux de chaleur, rejets thermiques d’un établissement industriel…) et la possibilité de créations d’emplois pour la mise en valeur d’énergies renouvelables (bois..).

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L’aménageur a la possibilité d’agir sur les facteurs structurants de la consommation d’énergie : la localisation de l’habitat et des activités (la complémentarité des besoins du résidentiel et des activités est à prendre en compte), l’implantation et la typologie des bâtiments… Les avantages, outre l’amélioration de la qualité de l’environnement à l’échelle planétaire, sont multiples : on observe l’allègement de la facture énergétique à long terme, en ne prenant pas seulement en compte l’investissement de départ mais aussi les consommations d’énergie des futurs habitants. D’autre part, les solutions collectives de chauffage engendrent une pollution plus diluée donc moins d’effets nocifs pour la ville. III- Expériences européennes : de l’éco-quartier à la démarche HQE A) Le quartier Vesterbro à Copenhague 1- Contexte Copenhague, ville capitale de 500 000 habitants, forme le coeur d'une région urbaine abritant 1,7 million d'individus, soit près du tiers de la population danoise. Terre d'accueil des industries de haute technologie, la cité s'énorgueillit également des nombreux parcs et espaces verts aménagés en bord de mer comme en centre ville. Copenhague appartient à la vaste région Öresund qui englobe les régions de Scanie (Suède) et du Zealand (Danemark). Depuis l'an 2000, le pont Öresund -qui assure la liaison directe entre Copenhague et Malmö- enjambe le détroit pour mieux les relier. La région Öresund couvre un territoire où vivent 3,2 millions de personnes et génère 1/5 du PNB cumulé de la Suède et du Danemark. L'une de ses forces est sans conteste la concentration de cerveaux au mètre carré : quelque 120 000 étudiants sont inscrits dans pas moins de 11 universités et le secteur de la recherche y fait un boom remarquable grâce notamment au développement des biotechnologies au sein d'une Medicon Valley. L’ancien Vesterbro…

Construit entre 1850 et 1920, ce quartier autrefois appelé “Inner Vesterbro” aligne des immeubles de 5 ou 6 étages maximum datant, pour 90% d'entre eux, d'avant 1900. Proche de la gare centrale, au sud-ouest de la ville, il s'étend sur 35 hectares où l'habitat -majoritaire- côtoie des immeubles de bureaux et des hôtels. Au total, 23 blocs d'immeubles abritent 4 000 logements, essentiellement des T1 et des T2 de taille assez réduite par rapport à la moyenne de Copenhague. L'insalubrité se répand : 64% des appartements ne possédent pas de chauffage central ni d'alimentation en eau chaude sanitaire, 71% ne sont pas équipés de salles de bain et 11% n'ont pas de WC. Environ 6 100 habitants vivent alors dans ce quartier très dense : étudiants principalement, mais aussi immigrés, retraités, chômeurs… souvent en grande précarité. Propriété de particuliers ou de la ville, la plupart des appartements étaient en location.

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Inéluctablement, le quartier commence à se transformer en ghetto où règnent le trafic de drogue et la criminalité et où le taux de chômage (20%) est deux fois supérieur à la moyenne nationale. …Et le nouveau

En 1990, une enquête nationale est engagée sur les besoins de modernisation de l'habitat existant : ses conclusions sont accablantes. Sur les quelque 270 000 logements -10% du parc danois- ne bénéficiant d'aucune installation moderne (salle de bains, toilettes…), 41% sont localisés dans la capitale. À l'issue de cette enquête, le Gouvernement décrète un “Acte de renouvellement urbain et d'amélioration des logements” qui fixe les grandes lignes des actions à mener, charge aux municipalités

d'assurer les projets de rénovation. La ville de Copenhague démarre son programme dans la foulée, sur le quartier de Vesterbro. La réhabilitation du parc de logements entraîne insensiblement un changement de la composition de la population -qui atteint 34 000 individus-, en attirant des personnes à niveau social plus élevé et favorise ainsi une mixité dans le quartier. Autrefois propriété de la ville, la moitié des appartements est aujourd'hui détenue par des particuliers qui ont pu se rendre acquéreurs de leur habitation grâce à une association coopérative de logements (Andelsbolig). Les propriétaires possèdent une part de la copropriété, constituée généralement de 12 à 20 appartements. Chaque co-propriétaire est co-responsable de la gestion de son immeuble.

2- La politique de la ville et la planification En 1990, la ville de Copenhague crée un groupe de travail, au sein du département de l'Énergie, de l'Eau et de l'Environnement, chargé de réfléchir à la mise en oeuvre d'un plan de rénovation urbaine écologique sur le quartier ancien de Vesterbro, dont la majorité des immeubles tombe en ruine. Progressivement, un maillage d'initiatives, tant locales que nationales, va créer des outils affinés et cohérents pour le quartier. Les outils de la rénovation urbaine En 1991, le Plan d'actions de rénovation urbaine, décliné en dix grands principes (cf. ci-dessous), est adopté par la ville. 1. Les immeubles doivent être intégrés en préservant la continuité urbaine des immeubles adjacents existants, sans empiéter dans les espaces des cours intérieures. 2. L'espace de construction doit être alloué rationnellement aux appartements, en incluant des espaces communs suffisants et des espaces de rangement facilement accessibles. 3. Les structures des bâtiments doivent être diagnostiquées. 4. Les toitures, fenêtres, portes et autres éléments de façades doivent être imperméables.

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5. Les canalisations doivent être intégrées aux bâtiments. 6. Les immeubles doivent être équipés d'un chauffage central et raisonnablement isolés contre l'humidité, le froid et le bruit de la circulation. 7. Chaque appartement doit comporter au moins 2 pièces d'une taille raisonnable. Il est possible de ne pas répondre aux normes danoises de surfaces habitables dans les immeubles, soit entre 7 et 18 m2 par pièce. 8. Chaque appartement doit être équipé d'une cuisine séparée, toilettes et salle de bain conforme au standard moyen. 9. Les sols, plafonds et murs des appartements, les cages d'escalier et les communs doivent être soignés et de bonne qualité. 10. Les extérieurs du bâtiment doivent être conformes à toute la co-propriété et dans un état acceptable de rénovation. En 1999, le département Construction de la ville, en liaison avec le bureau de Contrôle de l'environnement, définit les lignes directrices nécessaires à la mise en pratique de mesures écologiques pour le plan de rénovation urbaine : “Guidelines for Sustainable Urban Renewal and Public Supported Development for Housing” (“Lignes directrices pour un renouvellement urbain et une politique de logements subventionnés durables”). Publiées sous forme de guide, elles s'appliquent à tous les projets de construction ou de rénovation urbaine et portent, par exemple, sur l'isolation des bâtiments, l'utilisation de matériaux écologiques… En 2001, les lignes directrices “Guidelines for Sustainable Urban Renewal and Public Supported Development for Housing” sont réactualisées. De nouvelles exigences en matière de construction ou de rénovation écologique sont fixées. Elles comprenent trois niveaux pour chacun des dix thèmes abordés :

• standard minimum (obligatoire), • standard de haute exigence (plus cher mais réalisable avec les techniques disponibles), • standard de l'innovation (optionnel et novateur). Les dix thèmes sont : 1. Système de chauffage urbain 2. Énergie solaire passive 3. Économies d'eau 4. Économies d'électricité 5. Murs végétalisés et plantes grimpantes (amélioration de l'isolation, de la qualité de l'air et de la récupération des eaux pluviales) 6. Gestion des déchets (tri sélectif) 7. Pollution des sols 8. Centre d'information écologique 9. Mobilité 10. Zones vertes.

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L’agenda 21 de Copenhague En 2004, la ville met en place des agences locales de l'Agenda 21 dans chacun des grands quartiers. L'Agenda 21 comprend les thèmes suivants : • La ville durable : le bien-être des citoyens (développement durable urbain et construction). • La réduction de la consommation de ressources naturelles et de la production de déchets. • Les aspects fondamentaux touchant à la vie urbaine : l'eau potable et l'eau de mer, la pollution des sols et de l'air. • L'énergie dans la ville : installations de chauffage urbain, réduction de la demande de consommation énergétique… • L'environnement et la santé : air et bruit, aires de loisirs (espaces verts et aquatiques), qualité écologique de la construction et de l'ameublement et matériaux écologiques. • La nature dans la ville : biodiversité. • Les acteurs et leurs rôles : dialogue citoyen (démocratie participative, dialogue sur la rénovation des quartiers, le développement et la transformation urbaine soutenable), durabilité environnementale de la gestion municipale. La dimension participative En 1990, débute le projet de rénovation écologique qui doit s'étaler sur 6 à 10 ans. Les zones de rénovation sont déterminées par îlots de 10 à 20 immeubles, représentant 100 à 300 logements. Pour chaque îlot, la ville établit un plan de rénovation, évalue les améliorations à apporter et les dépenses correspondantes. La gestion des opérations est confiée par la ville à une équipe de consultants de type coopératif, SBS Byfornyelse, agréée au niveau national et forte d'une expérience identique à Aalborg. Ce cabinet de consultants d'une soixantaine de personnes regroupe des architectes, des sociologues, des animateurs de quartier, des assistants sociaux…

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L'une des originalités du projet de rénovation de Vesterbro est sans conteste la participation active des habitants à chaque étape du programme. L'équipe de consultants a pu dialoguer avec les résidents pour finaliser les choix de rénovation. Pendant près d'un an avant le démarrage des travaux, un processus de concertation s'est déroulé selon plusieurs étapes, allant de la planification des axes et des objectifs généraux à une liste de priorités par blocs d'immeubles. Un délai de 8 semaines leur a été laissé pour faire connaître leurs objections au projet et leurs suggestions. Une fois les différentes remarques compilées et étudiées, les plans d'actions par îlots ont pu être définis. Pendant la rénovation, certains résidents sont relogés temporairement par la société de rénovation urbaine, en fonction de l'importance des travaux à réaliser dans les appartements. Quelques uns sont complètement refaits à neuf et voient leur surface habitable modifiée : combinaison de deux appartements pour n'en faire qu'un, division d'un grand appartement ou destruction et disparition de certains autres avec une expropriation à la clé… En 1992, les travaux de rénovation démarrent dans 4 blocs d'immeubles, avec l'approbation des habitants consultés et informés. L’îlot de Hedebygade

Débutés en 1998, les travaux de rénovation écologique du bloc d'immeubles de Hedebygade se sont achevés en 2002. Ce projet exemplaire comporte douze actions, toutes développées dans le cadre du programme global de rénovation écologique. Cet îlot est composé de 19 immeubles construits entre 1880 et 1886 sous diverses formes de propriété : privée, sociétés de gestion immobilière… Les objectifs écologiques poursuivis pour le bloc de Hedebygade tiennent en trois points :

• démontrer la faisabilité technique et promouvoir un savoir-faire spécifique danois ;

• contribuer à la mise en oeuvre de solutions écologiques innovantes de rénovation des vieux bâtiments : intégration des technologies de chauffage solaire et de ventilation, cellules photovoltaïques sur les façades exposées au sud, éclairage naturel, mesures des consommations énergétiques, par le biais de compteurs, tri des déchets, purification de l'air à l'aide de plantes vertes, création d'une maison communautaire... ;

• favoriser le développement de solutions écologiques de rénovation urbaine viables commercialement.

Un financement partagé Ce projet a bénéficié de subventions très intéressantes. Le ministère de l'Urbanisme et du Logement, la ville de Copenhague, les propriétaires et SBS Byfornyelse ont pris en charge tous les coûts du renouvellement urbain : relogement des personnes, prestations des architectes et ingénieurs, coût de construction… L'État a intégralement financé les projets écologiques : installation de panneaux solaires, tri des déchets… Quant aux nombreuses expérimentations concernant l'optimisation énergétique, elles ont été soutenues financièrement par le programme européen Thermie. À elle seule, la ville de Copenhague disposait en 2000 de 40% du budget national de rénovation urbaine (environ 72 millions d'€). Elle a dû intégrer au montant du projet les travaux de rénovation des squares et la construction d'un centre culturel et sportif, de sa compétence.

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Au final, le coût de la rénovation par blocs d'immeubles est assez élevé : 17 000 DKK/m2, soit environ 2 280 euros/m2 (montant maximum, hors coût éventuel de dépollution). Mais la nouvelle loi danoise de rénovation urbaine a changé la donne puisqu'elle revoit à la baisse (-30 millions de DKK, soit 4 030 000 €) les subventions : 1 343 000 € pour l'État, 2 687 000 € pour la ville. Cet aspect devrait limiter les possibilités de reproduire une telle opération de rénovation.

3- Acteurs et gouvernance Parmi la multitude d'acteurs impliqués dans la rénovation du quartier Vesterbro, trois ont plus particulièrement donné une impulsion et une approche originales au projet :

• la ville de Copenhague et sa communauté urbaine (14 villes périphériques) ; • le bureau coopératif de consultants pour la rénovation urbaine, SBS Byfornyelse, de statut privé, dont la moitié des contrats sont passés avec la ville de Copenhague ; • le “Centre pour la rénovation de Vesterbro” (ou Vesterbro byfornyelscenter), unique en son genre au Danemark, est un organisme semi-public financé par la ville mais indépendant, où travaillent architectes et conseillers sociaux chargés d'aider les habitants à s'organiser en groupes et réseaux d'échanges d'expériences. Les autres partenaires du projet sont notamment :

• l'État • l'agence de protection de l'environnement de la ville de Copenhague • les associations de quartier • les résidents • les conseils des îlots d'immeubles • les propriétaires • les consultants spécialisés.

Le centre pour la rénovation de Vesterbro La loi danoise pour les rénovations, adoptée en 1986, impose aux habitants de participer aux projets de rénovation. Ainsi, le Centre a permis l'implication très forte des citoyens du quartier. Lieu d'information créé en 1990 à l'initiative de la ville de Copenhague, il a pour mission de sensibiliser les habitants sur des thèmes écologiques liés à la construction comme, par exemple, les lampes à basse consommation, le double vitrage, le chauffage central couplé au réseau urbain,

les chasses d'eau à double flux… Il organise également des réunions de concertation avec les résidents des différents blocs qu'il invite à s'organiser en “conseils d'îlots” dès le démarrage du projet de rénovation. Composé des représentants de chaque immeuble et consulté pour toutes les questions d'aménagement, il peut intervenir pour discuter avec l'architecte du projet et émettre des objections à certains choix. Il agit également en réseau avec les autres “conseils d'îlots” sur le principe d'un forum d'échanges d'expériences et d'informations. Le Centre est alors utilisé comme structure d'appui et d'expertise par ces “conseils d'îlots”.

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La revue « Quartier Vesterbro » Le Centre Vesterbro publie une revue qui fait office à la fois de relais d'informations généralistes sur la rénovation urbaine et de support pour les débats entre résidents. Cette publication trimestrielle, de bonne qualité, est distribuée à tous les résidents et aux entreprises du quartier. 4- Une organisation de quartier favorable au développement durable a) Les carburants écologiques Planifier les transports Durant ces dix dernières années, le trafic a augmenté de 15% à Copenhague. Les services municipaux ont donc décidé d'élaborer un nouveau plan de déplacements urbains respectueux de l'environnement. Ce document détaille la stratégie pour une mobilité durable dans la ville et la manière dont les impacts sur l'environnement peuvent être réduits.

Réduire les décibels Quelque 45 000 appartements dans Copenhague sont exposés au bruit du trafic routier, avec un niveau supérieur à 65 dB. À Vesterbro, l'isolation renforcée des immeubles a été choisie à la fois pour ses performances thermique et phonique.

Limiter la circulation Conséquence inattendue de la rénovation du quartier, la hausse du nombre de voitures particulières - pour se rendre sur les lieux de travail, situés dans les banlieues, mais également pour partir en week-end à la campagne- due à la croissance des revenus des habitants. Cette augmentation des véhicules génère des problèmes de stationnement et de maîtrise des espaces publics. En conséquence, des places de parking ont dû être aménagées en périphérie du quartier.

Des déplacement doux La ville de Copenhague soutient fortement l’utilisation de la bicyclette en zone urbaine. Elle entretient un réseau de pistes et de routes cyclables qui est un modèle en Europe, et poursuit ses efforts par des mesures pratiques : développement de location gratuite de vélos dans plusieurs endroits de la ville (système de consigne), construction d'abris… Démarche couronnée de succès puisque l'usage du vélo a augmenté de 40% depuis 1995. Il représente 32% des choix de déplacement pour se rendre au travail, en centre ville, alors que, dans le même temps, l'usage de la voiture ne progressait que de 16%. En 2003, les citadins de Copenhague ont ainsi parcouru quotidiennement à vélo plus d'un million de kilomètres !

À Vesterbro, grâce aux cheminements piétonniers, les habitants profitent des efforts engagés en matière de verdissement du quartier. La mixité fonctionnelle de ce dernier leur permet, la plupart du temps, de se rendre à pied au supermarché, chez le médecin, à l'école et au travail.

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b) La maîtrise des énergies L'objectif général est l'intégration de techniques de réduction de consommation d'énergie dans la rénovation des immeubles du quartier. Cette démarche doit rechercher en priorité une bonne qualité de l'air intérieur, un confort thermique pour les occupants et des économies, grâce à l'utilisation d'énergies renouvelables. Les solutions techniques retenues ne s'appliquent pas à tous les immeubles rénovés de Vesterbro. Chaque îlot a ses solutions techniques spécifiques, utilisées seules ou de façon intégrée. Citons, à titre d'exemple, celles retenues dans le bloc d'immeubles de Hedebygade. Le recours aux énergies renouvelables Des cellules photovoltaïques sont intégrées dans la plupart des façades en verre, exposées plein sud. L'énergie électrique générée sert à éclairer les arrières-cours ou les rues (Ehringade)

pendant la nuit. L'un des bâtiments a bénéficié d'une solution innovante : une “paroi solaire”, composée d'une paroi vitrée, d'une lame d'air et de capteurs. Le système de ventilation a été couplé au système d'énergie solaire avec un pré-chauffage de l'air circulant juste derrière les cellules photovoltaïques. D'une épaisseur de 25 cm, ces façades en vitrages à haute performance thermique améliorent l'isolation des immeubles. Afin d'y intégrer les panneaux photovoltaïques, des verrières ou des balcons ont été aménagés, sous forme de bow windows agrémentés d'allèges en panneaux photovoltaïques, par exemple.

Un système de récupération d'énergie solaire, composé d'un récupérateur d'air dans lequel l'air chaud est transféré à un échangeur air/eau chaude, a été mis en oeuvre sous le toit de certains immeubles. Une canalisation véhicule l'eau dans un réservoir tampon situé dans la chaufferie, en sous-sol des immeubles. Ce système permet d'éviter les problèmes de gel ou de surchauffe de l'eau. Il produit de l'eau chaude sanitaire et du chauffage pour les espaces communs des immeubles. Dans certains cas, ce système est également combiné avec le photovoltaïque.

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L'eau chaude sanitaire est fournie par des serpentins situés sur le côté sud des toits et chauffés par les rayons du soleil. 86 m2 de capteurs reliés à un réservoir de 3 200 litres fournissent l'eau chaude sanitaire pour 30 appartements à Dannebrogsgade. Un immeuble de l'îlot Hedebygade est équipé d'un système innovant d'optimisation de la lumière naturelle, guidé par ordinateur. Il capture dans un puits de lumière les rayons du soleil (heliostat) projetés sur des miroirs (prisme) et les redistribue dans les appartements. Ce système contribue au confort visuel et thermique des appartements.

Les atouts du réseau urbain Le réseau de distribution d'eau est à basse température, ce qui signifie que la température de l'eau dans les canalisations et dans les radiateurs est plus basse (environ 60°C) que celle d'un système traditionnel. Pour compenser cette baisse, le système de distribution et les radiateurs ont une surface plus importante (comparé à un système traditionnel). Le système de ventilation intégré et l'échangeur air/eau réchauffe l'eau distribuée dans les appartements pour l'eau chaude sanitaire et les radiateurs. Afin de réduire les coûts d'installation, ces derniers sont pilotés par des vannes thermostatiques et placés au centre des appartements. Une panoplie d’équipements performants Un compteur central individuel de consommation d'électricité, d'eau chaude et de chauffage est placé dans les entrées des appartements. Il affiche les consommations journalière, mensuelle et annuelle. Les données proviennent des compteurs intégrés aux radiateurs, à l'alimentation électrique et aux canalisations. Des récepteurs radios captent ces informations, transmises ensuite à un ordinateur central et redistribuées sur le compteur central des appartements. L'isolation des constructions comporte plusieurs aspects : les façades sont isolées par l'extérieur, protégées par des plantes grimpantes, les toitures sont végétalisées et les fenêtres sont en double vitrage, essentiellement en bois et en aluminium. Le PVC est interdit. Enfin, des lampes à basse consommation sont utilisées pour l'éclairage public ainsi qu'à l'intérieur des immeubles. c) Préserver l’eau potable Les solutions techniques retenues ne s'appliquent pas à tous les immeubles rénovés de Vesterbro. L'objectif global est la réduction de la consommation d'eau potable et le recours à des eaux de récupération (eaux pluviales). En 2002, la consommation d'eau par personne était de 125 litres par jour, l'objectif pour 2010 est de la réduire à 110 litres.

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Les appartements ont été équipés d'économiseurs d'eau, sur les douches et les robinets, et les chasses d'eau limitées à 3,5 l. Chaque appartement dispose d'un compteur de consommation d'eau.

Une grande quantité d'eaux de pluie provenant des toits est recyclée. Ainsi, la récupération de 12 m3 pour 170 m2 de surface de toit permet d'alimenter les chasses d'eau. À Hestestald-carré, 8 cuves de récupération des eaux pluviales de 1 000 litres chacune ont été enterrées dans le jardin. Elles alimentent les chasses d'eau et les

machines à laver situées dans la laverie commune de l'immeuble, dont l'accès est réservé aux résidents. Une unité de traitement des eaux usées a été créée dans un immeuble dit “Green House” de 3 étages, représentant 130 m2 de surface. Dans les sous-sols se trouve le bassin de réserve des eaux pluviales (îlot de Lille Colbjornsensgade). d) Réduire la production de déchets Les communes danoises gèrent l'ensemble des déchets (ordures ménagères, déchets industriels…) : 50% vont à l'incinération, 3% sont mis en décharge et 47% dont destinés au recyclage. Sachant qu'à Copenhague un habitant génère 8,5 kg de déchets par semaine –en incluant les fractions destinées au recyclage- l'objectif était de réduire de 60% la production actuelle. Première réponse, dans la perspective d'une collecte sélective, des containers sont mis à disposition dans les cours intérieures des immeubles pour effectuer le tri d'une douzaine de types de déchets : verre, plastique, fraction biodégradable, métal, journaux, emballage cartons, vêtements, médicaments, peintures, acides, outils de nettoyage, compost…

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5- Evaluation globale Chaque année le gouvernement danois détermine les opérations prioritaires en matière de rénovation urbaine, en particulier sur des critères économiques. Au-delà d'un seuil limite : nombre d'appartements sans toilettes, absence de chauffage central…, les autorités locales démarrent alors des projets de rénovation ; certaines dépenses peuvent être financées par l'État. D'autres indicateurs, tels les indicateurs environnementaux des plus grandes villes nordiques (“the Nordic Larger Cities Environmental Indicators”), ont été mis en place pour créer une plate-forme d'échanges de données et d'expériences entre les sept grandes villes du nord de l'Europe : Stockholm, Malmö, Helsinki, Copenhague, Göteborg, Reykjavik, Oslo. Le détail de ces indicateurs est donné dans l'évaluation globale des projets. À titre d'exemple, Copenhague a réduit ses émissions de CO2 de 23%, entre 1990 et 2000, et s'est fixé, dans le cadre de son Agenda 21, 12% supplémentaires d'ici 2010. Regard quantitatif sur Vesterbro Les projets de rénovation sont évalués, d'une façon générale, selon le concept de “comptabilité verte”. Développé et appliqué par le Bureau danois de la construction et de la recherche urbaine et par le Centre danois pour l'Écologie urbaine, il a pour objectif principal de quantifier les consommations liées à l'environnement de chaque citoyen et de les estimer budgétairement. L'évaluation est fondée sur 5 indicateurs d'écologie urbaine : 1. consommation de chauffage 2. consommation électrique 3. consommation d'eau 4. production de déchets 5. émissions de CO2 Ces critères d'évaluation, longs à construire, ont pour certains été établis après la réalisation des travaux de rénovation. Les projets de rénovation alimentent également une banque de données nationales sur l'écologie urbaine. Chaque indicateur est mesuré annuellement et rapporté au nombre de résidents. Un indicateur supplémentaire mesure la consommation de chauffage par rapport à la surface chauffée.

On constate que les consommations d'énergie et d'eau ainsi que les émissions de CO2, dans l'îlot de Hegebygade, sont inférieures à la moyenne nationale. À noter également que l'amélioration du confort intérieur (baignoires à la place de douches…) a pu engendrer, à la marge, une hausse des consommations d'eau.

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Regard qualitatif sur Vesterbro L'un des mérites de l'opération aura été l'organisation, en 2002, d'une enquête de satisfaction auprès des habitants du quartier, par le biais d'un questionnaire distribué aux résidents du bloc de Hedebygade afin de mesurer leur intérêt pour l'écologie urbaine. Comme toujours dans ce genre d'exercice, opinions enthousiastes et mitigées se sont mêlées pour donner, au final, un résultat plutôt encourageant si l'on tient compte du contexte de départ et des avancées majeures constatées. Si l'intérêt est croissant, certains habitants ont été, dans le même temps, déçus par le

processus de rénovation. Les informations qu'ils ont reçues les laissent insatisfaits et le sentiment d'avoir été écartés du projet est prégnant. Estimant la durée de la rénovation trop longue, quelques uns ont perdu patience et quitté le quartier. Tirant une leçon de cet enseignement, les porteurs du projet ont jugé que des travaux de ce type ne devraient pas excéder trois ans. En revanche, les résidents sont fiers de l'architecture des bâtiments, des nouvelles façades et de l'aménagement des cours intérieures. La rénovation urbaine de Vesterbro a produit deux phénomènes contradictoires : une augmentation des loyers qui a fait fuir les ménages les plus modestes -obligeant le gouvernement local à leur trouver un nouveau logement- et le succès auprès d'une couche sociale plus aisée. Or, initialement, l'un des objectifs du projet de rénovation était de limiter les conflits sociaux et de maintenir en l'état la démographie du quartier. B) Le quartier Vauban à Fribourg

1- Contexte

Suite au départ des Forces Armées Françaises, la ville de Fribourg a racheté les terrains de la caserne Vauban et a décidé d’y faire un quartier « vert » avec des logements, des activités économiques, des infrastructures d’accueil et de loisirs. Les constructeurs et les futurs habitants doivent respecter un grand nombre de règles écologiques impliquant un nouveau mode de vie : parkings partagés en périphérie, faible circulation automobile, exigences en matière d’économies d’énergie, utilisation de matériaux spécifiques, partage d’automobiles. L’aménagement de ce quartier a été conçu en impliquant la population via la création d’une association de citoyens (« le Forum Vauban ») qui a par ailleurs recruté des professionnels chargés de conseiller et d’organiser la vie dans le quartier. Le quartier Vauban se situe dans la ville de Fribourg en Brisgau, dans la Région du Baden-Württemberg, en Allemagne. Cette ville universitaire de 210 240 habitants se localise au sud-ouest de l’Allemagne, à 40 km de la frontière française.

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Cette commune connaît un développement fort du fait de son attractivité auprès des populations allemandes à la recherche du soleil. La croissance démographique significative qui en a résulté a nécessité un développement de l’offre de logements. La ville de Fribourg s'est fait une spécialité des problématiques liées au développement durable. Elle abrite l'une des principales usines européennes de production de panneaux photovoltaïques et l'une des tours du centre ville en est intégralement recouverte sur une façade. La ville a également réalisé des opérations incitatives favorisant l'emploi de modes de transports alternatifs et un « pôle des déplacements » a été construit. A proximité de la gare et d'une station de tramway, il combine un parking pour véhicules particuliers, un parking et un atelier d'entretien pour vélos, un point de location de vélos et un café en

terrasse. Enfin, la ville a abrité une caserne française (Forces Françaises en Allemagne) pendant de nombreuses années. Au départ définitif des troupes françaises, en 1992, les anciennes casernes appartenant à l’Etat allemand ont été rachetées par la ville. Ce site a alors été reconverti et accueille aujourd’hui le quartier Vauban, considéré comme l'un des premiers écoquartiers réalisés. Vauban est situé à la périphérie sud de la ville de Fribourg (à 2,5 km du centre-ville) ; il est limitrophe de la commune voisine « Merzhausen ». Au total, il couvre sur une superficie de 41 hectares environ.

2- Montage de l'opération Déroulement de l’opération Après avoir acheté, en 1992, la totalité du terrain de l’ancienne caserne Vauban à la République Fédérale d’Allemagne, la ville de Fribourg a décidé de profiter de ce terrain pour initier un programme urbanistique innovant. Elle a donc lancé un concours d’idées (dont le premier prix a été décerné au cabinet d’architecture Kohlhoff & Kohlhoff) ayant pour objectif de développer un concept de construction adapté au quartier. En acquérant le terrain, la ville a effectué elle-même une parcellisation et dirigé les ventes en collaboration avec son administrateur financier, une société de développement communal « Kommunalentwicklung LEG Baden Württenberg GmbH ». Les constructions ont commencé en 1997 (habitat et premiers équipements : commerces, écoles, jardins d'enfants). Les premiers acquéreurs, principalement des familles, se sont installés à Vauban dès l’année scolaire 1998. La fin des travaux est prévue pour 2006. L’objectif initial étant d’accueillir à terme 5.000 habitants.

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Montage financier du programme Le projet est porté par les services techniques de la Mairie. La commune finance les aménagements du quartier (87 millions d’euros) et a par ailleurs acquis les terrains, mais elle les vend ensuite, à un prix compris entre 400 et 450 euros /m². Son budget est donc équilibré. Le montant total des investissements pour la réalisation du quartier Vauban s’élève à 87.000.000 €, dont 51.000.000 ont été apportés à part égale par le land du Baden-Würtemberg (20.500.000 €) et par la ville de Fribourg (20.500.000 € ). Pour les 36.000.000 € restants, les autres financeurs sont la fondation Deutsche Bundesstiftung Umwelt et le Programme européen LIFE. Une démarche participative Dès le lancement du projet, la Ville de Fribourg a souhaité que la population participe à la démarche. Le « Forum Vauban », association de citoyens, a vu le jour et les membres se sont réunis en groupes de travail. Cette association est chargée d’organiser la vie dans le quartier. Elle participe financièrement aux soirées organisées par les habitants et prépare elle-même différentes animations. De plus, elle est à l’origine de la publication d’un journal sur la vie du quartier et anime des réunions sur le thème de problèmes soulevés par les habitants. Son rôle est également de fournir des informations au sujet de l’aménagement du quartier Vauban. Avec l’important soutien d’une fondation, la "Deutsche Bundesstiftung Umwelt", le Forum Vauban a recruté plusieurs spécialistes : un juriste, un biologiste, un urbaniste, un technicien de l’environnement, un physicien, un géographe, un économiste et un expert-bancaire. Cette équipe pluridisciplinaire a pour rôle d’accompagner et de conseiller les habitants pour leur projet de construction et pour leur installation au sein du quartier (conseils techniques aux futurs habitants, propriétaires et locataires). Elle accompagne également la ville dans ses actions de communication et dans la diffusion d’informations. Par ailleurs, des "groupes de construction" regroupant des "propriétaires-promoteurs" se sont constitués autour de projets collectifs permettant de réduire les coûts de construction (un seul architecte, buanderie commune, etc…). Le fait de partager un projet commun - l’achat du terrain et la construction d’un immeuble qui est ensuite habité et/ou loué par les propriétaires - permet de fait de favoriser les contacts entre voisins. Enfin, il faut signaler qu’une communauté « Hippie » occupait le site avant sa reconversion. L’aménagement du quartier s’est fait en concertation avec ce groupe de personnes, dont la situation a été régularisée : initialement « squatters » d’une caserne désaffectée, la ville leur a permis d’acquérir ce bâtiment à un prix raisonnable.

3- Contenu de l'opération

Un programme favorisant la mixité

L’impression générale qui se dégage du quartier Vauban est celle d’une grande densité et d’une grande diversité au niveau architectural. En effet, la structure est essentiellement composée de petites parcelles sur lesquelles sont implantées des constructions en bandes, maisons individuelles et immeubles collectifs.

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Les parcelles sont vendues de façon préférentielle à des particuliers ou à des collectifs de construction. Ces collectifs sont composés de personnes s’associant pour acquérir un terrain et y construire un immeuble. Par la suite, nombre d’entre eux occupent eux-mêmes les logements et mettent les autres en location, afin d’amortir leurs investissements.

Densité et caractéristiques des maisons Le terrain est découpé en petites parcelles ce qui implique une densité urbanistique élevée. Afin d’utiliser l’espace de manière optimale, les rues sont étroites, ce qui est favorisé par l’absence de places de stationnements dans les zones résidentielles. Les parcelles des maisons couvrent 160 m², pour 6 mètres de largeur. Le coefficient d’occupation des sols atteignant 1,4, les maisons peuvent atteindre jusqu’à 13 mètres (R+2 ; R+3).

Il est souvent fait appel à un architecte pour la construction des maisons individuelles, qui revêtent ainsi de grandes disparités architecturales. Il existe très peu de règles en matière d’aspect extérieur des constructions : la pente des toits peut par exemple varier librement entre 0 et 45°. Par ailleurs, les maisons sont parfois mitoyennes avec des immeubles collectifs, ce qui favorise la diversité, mais aussi la cohésion entre différentes couches sociales.

Les maisons, de deux ou trois étages, comportent un pas de porte à l’avant, qui donne sur la rue (les parcelles ne sont pas clôturées) et un jardin à l’arrière desservi par une liaison douce.

Une offre de logements diversifiée favorisant la mixité des populations La volonté est de favoriser la mixité des populations à l’intérieur du quartier. Ainsi, il existe des logements sociaux dans le quartier, qui ne sont pas différenciables des autres logements, tant par l’aspect extérieur des immeubles que par leur localisation. Par ailleurs, une résidence universitaire accueillant près de 500 étudiants est implantée au sein du quartier.

Arrière des constructions et jardin

Voisinage collectif (à gauche) et individuel

Avant des constructions

Habitat individuel aux caractéristiques architecturales disparates

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Véranda favorisant l’utilisation optimale des apports solaires

Panneaux solaires en toiture

Enfin, l’offre de logement est diversifiée : sur l’ensemble des logements, 30% sont loués et 70% sont réservés à l'accession à la propriété. De plus, près de 180 parcelles sont réservées à l’habitat individuel, 40 environ à l’implantation d’immeubles collectifs. On peut en revanche regretter l’absence de structures d’accueil des personnes âgées. La grande majorité des habitants de Vauban est en fait composée de familles avec des enfants en bas âge. Qualité environnementale des constructions Les bâtiments d’habitation doivent être construits sur le modèle de maisons à « faible consommation d’énergie » (consommation limitée à 65 kWh/m²/an). Il s’agit d’une obligation contractuelle précisée dans les contrats de vente. Par exemple, les contraintes d’isolation, qui utilisent le mode de calcul le plus strict de la ville de Fribourg, sont plus exigeantes que la législation nationale en la matière. Cette exigence s’applique également à la commune pour la construction d’établissements publics (écoles, jardins d’enfants). Par ailleurs, certains constructeurs, souhaitant appliquer une véritable démarche qualité (prestation volontaire), ont construit des bâtiments dits « passifs » (consommation de 15kWh/m²/an).

Ces immeubles construits selon la « conception solaire passive » utilisent le mouvement naturel de chaleur et l'air pour maintenir des températures confortables, avec peu ou pas d'aide mécanique. Il s’agit de maximiser les apports solaires (stockage de l’énergie et de la chaleur solaire, vérandas et baies vitrées réduisant les besoins de chauffage, orientation au sud, …), tout en s’en protégeant, en particulier l’été (arbres procurant de l'ombre, stores…).

On trouve également des constructions dites « à énergie positive » (consommation de 15kWh/m²/an également), c'est-à-dire des constructions produisant, sur une année, plus d’énergie qu’elles n’en consomment (construction avec panneaux solaires pour la production d’énergie complémentaire). Dans ce cas, l’électricité produite est entièrement vendue au distributeur, puis rachetée selon la quantité nécessaire. Une occupation des sols révélant une mixité fonctionnelle La plus grande partie de la surface du quartier (35 ha environ) est réservée à l’habitat, collectif et individuel. Néanmoins, 4 hectares sont réservés aux activités industrielles et 2 hectares sont prévus pour les PME et les artisans (menuisier, assembleur informatique, …).

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Par ailleurs, différents équipements publics sont implantés dans le quartier :

- une école élémentaire - trois crèches - un supermarché, à côté de l’école, au rez-de-chaussée d’un parking. - Un centre socio-culturel, implanté dans un bâtiment de l’ancienne caserne, la Haus 37 - différents commerces en rez-de-Chaussée des immeubles implantés le long de la

« Vauban allee », artère principale du quartier - un restaurant - plusieurs espaces verts publics - 2 parkings collectifs en hauteur, dont le « solargarage », surmonté de 750 m² de

panneaux solaires (avec places en location ou à acheter)

L’implantation de commerces en rez-de-chaussée des immeubles est favorisé par l’obligation faite aux groupes de propriétaires d’un immeuble de réserver une surface sous arcades pour un local à usage commercial. On trouve ainsi un magasin de jouets en bois, un fleuriste, un café,… Cependant, les surfaces accordées sont souvent réduites, par peur de la non rentabilité de l’activité. D’autre part, une réflexion a été menée en terme de localisation des équipements, afin de réduire le nombre de déplacements. L’école est située à côté du supermarché, lui-même implanté au rez-de-chaussée du principal parking couvert, à l’entrée Est du quartier. Les autres équipements et espaces publics se répartissent à l’intérieur de la zone d’habitat (crèches, espaces verts et aires de jeux…)

4- Une organisation du quartier favorable au développement durable

a) Limitation de l’automobile Limitation de la vitesse et de la circulation

Terrain de jeux

Ecole élémentaire

Supermarché et parking en hauteur

Immeuble occupé par des PME

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L’aménagement du quartier favorise une limitation de la vitesse et de la circulation. Par ailleurs, la vitesse de circulation sur l’ensemble des rues est limitée à 30 km/heure. La « Vauban allee », axe central du quartier est une zone où la vitesse est limitée à 30 km/h. Elle constitue par ailleurs le seul raccordement du quartier au reste de la ville, aucune liaison avec les quartiers voisins n’ayant été prévue. Les rues des zones résidentielles adjacentes à la « Vauban allee » étant en forme de " U" (impasses), il n’y a pas de trafic de passage dans le quartier, ce qui réduit grandement la circulation. Politique de stationnement Le plan d’aménagement urbain n’a pas prévu de places de parkings dans les zones d’habitation le long de l’axe principal. De plus, les habitants ne peuvent avoir un garage privé accolé à leur maison. Aucun emplacement de parking public n’est prévu dans les zones d’habitation en forme de « U ». Les propriétaires d’automobiles doivent donc acheter leur place de parkings située à la limite du quartier. Ces places de parking sont situées dans des garages collectifs, ce qui permet de limiter la consommation d’espace pour les stationnements des véhicules. Les places sont utilisées à la fois par les habitants et par les personnes venant travailler dans le quartier Vauban. Cette option réduit jusqu’à 20% l’espace nécessaire au stationnement en comparaison avec des parkings privés.

Garage collectif Moyens de transports alternatifs Un service du bus dessert le quartier, pour rejoindre notamment le centre-ville et la gare de Fribourg. Par ailleurs, l’extension d’une ligne de tramway jusqu’à Vauban est en cours. Sa mise en service est prévue pour 2006. Le projet prévoit également une correspondance directe avec le réseau express régional (Regio-S-Bahn) passant à l’Ouest du quartier.

D’autre part, un système de « Car Sharing » (partage de voiture) a été mis en place : une association possède plusieurs voitures qu’elle loue aux habitants. Ces derniers vont chercher les clefs, prennent la voiture qu’ils ont réservée et la ramène après usage. Leur participation financière dépend du nombre de kilomètres.

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Enfin, Vauban est un quartier aux distances courtes où les habitants peuvent facilement rejoindre les commerces, l’école, les jardins d’enfants ou les arrêts des lignes de bus à pied. Le quartier possède un réseau de liaisons douces très vaste, de nombreuses voies étant réservées aux vélos et piétons. On y trouve également de nombreux garages à vélos à proximité des habitations et des principaux pôles. Par ailleurs, le réseau communal de pistes cyclables (d’ailleurs très important) a été étendu pour relier le quartier Vauban aux principaux pôles de la ville. b) Un quartier vert En amont de l’opération d’aménagement, certaines zones polluées (eau, sol) ont été décontaminées.

Lors de l’aménagement du quartier Vauban, l’ancien peuplement d’arbres (vieux d’une soixantaine d’années) a été conservé. De même, les rives et les abords du ruisseau « St. Georgener Dorfbach » qui longe le quartier est protégé en tant que « biotope » par l’article 24 de la loi de protection de la nature.

Par ailleurs, le programme comprend la constitution d’une structure verte composée d’arbres et de diverses plantations, le long des voies de circulation et dans de nombreux espaces verts. Ils permettent de séparer les zones d’habitation (« bandes vertes ») et d’aérer le quartier, d’une densité de construction élevée.

Des plantations sont également été réalisées sur les toits plats. Il s’agit d’une obligation faite aux bâtiments dont la pente de toit est inférieure à 10 %. Cette règle est inscrite dans le cahier des charges des constructions.

c) Production d’énergie Le chauffage des habitations est produit par une centrale de chauffage fonctionnant aux copeaux de bois et par une centrale thermique avec chauffage à distance. Il était initialement prévu que la matière première provienne uniquement de résidus de l’industrie (fabrication de planches…). En réalité, une partie du bois brûlé provient d’arbres abattus dans la forêt noire, élément critiqué par les écologistes.

Vieux arbres et plantations récentes sur un espace vert de respiration.

Toiture végétalisée

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d) Récupération et évacuation des eaux Des exigences environnementales existent également en matière d’eau. Les canalisations

d’eaux pluviales traditionnelles ont été remplacées par des caniveaux pavés qui reçoivent à la fois les eaux de ruissellement des rues et des toits, si ces dernières ne sont pas recueillies dans des citernes. En effet, plusieurs citernes de récupération de l’eau de pluie sont implantées dans le quartier et à plus faible échelle, des systèmes de récupération existent dans certaines habitations, notamment utilisés pour l’arrosage des plantes. Un système de cuvettes et de tranchées-réservoir permet l’infiltration des eaux dans la nappe phréatique. Enfin, l’eau de pluie récupérée est utilisée pour les chasses d’eau des toilettes de l’école élémentaire.

5- Evaluation globale du projet L’objectif initial était de créer une nouvelle zone d’habitation innovante et exemplaire dans le domaine du développement durable et d’offrir l’opportunité à de larges couches sociales de la population d’y acquérir un terrain et de pratiquer un style de vie plus écologique. Au terme des travaux d’aménagement du quartier (en 2006), 5.000 personnes devraient habiter à Vauban. Les objectifs en matière de développement durable peuvent être globalement considérés comme atteints. Cette expérience est d’ailleurs connue et estimée exemplaire dans de nombreux pays européens : les responsables du projet sont très souvent sollicités par des communes ou bureaux d’études. Par ailleurs, le quartier jouit d’une forte attractivité : les terrains sont achetés même avant que les aménagements ne soient achevés, ce qui démontre la réussite du projet. Enfin, les règles écologiques semblent totalement inscrites dans le quotidien des habitants, qui se sont appropriés le quartier. Cependant, toute opération est toujours perfectible et le projet Vauban n’échappe pas à la règle : certains effets indésirables, notamment dus à la forte densité de la zone sont à déplorer. De plus, le projet aurait pu aller plus loin, en particulier en matière de mixité. a) Une prise en compte globale du développement durable (+) Le parti d’aménagement retenu pour le quartier Vauban et le cahier des charges des constructions favorisent une prise en compte globale des éléments constitutifs d’un développement durable des villes. Pour résumer, ces éléments sont les suivants :

De fortes exigences environnementales à l'intérieur du quartier

- Reconversion d’une friche militaire et décontamination des sols pollués - Conservation des éléments naturels existants (arbres, ruisseau) - Mise en place d’une trame verte (plantations, espaces verts, aires de jeux…) - Production d’énergie in situ (ce qui évite un transport coûteux sur le plan

environnemental), et qui favorise le recyclage de matériaux (centrale de chauffage aux copeaux de bois)

- Récupération des eaux de pluie - Limitation de l’automobile, promotion des moyens de transport alternatifs (bus, tram, train)

et mise en place de nombreuses liaisons douces

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- Densité de construction impliquant une consommation raisonnée de l’espace - Mixité fonctionnelle (commerces, écoles, espaces verts...) en vue d’une réduction des

déplacements - Qualité environnementale des constructions (faible consommation d’énergie, végétalisation

des toits, choix des matériaux de construction, sur démarche volontaire des constructeurs...),

Un projet favorisant l’équité et la cohésion sociale

- Mise en place d'une association de citoyens, aidée par des spécialistes et chargée de l'organisation de la vie locale et de l'information sur l'aménagement du quartier,

- Prise en compte des occupants initiaux du site (squatters) - Incitation à la création d’associations de propriétaires, qui deviennent ainsi prioritaires

pour l’achat de parcelles - Mixité sociale (individuel/collectif, locatif/accession, social/privé) - Création d’emplois, indirectement (BTP, services…) et sur la zone (locaux pour PME,

commerces…) et articulation entre besoins des résidents et des non résidents qui travaillent dans le quartier (parkings…).

Une démarche-projet innovante et privilégiant le partenariat

- Partenariat financier de la ville, du land, d’une fondation privée et de l’Europe (programme européen LIFE environnement)

- Projet porté par la ville (achat des terrains, parcellisation et réalisation des équipements et espaces publics)

- Analyse des besoins des habitants et démarche de réflexion participative - Opération insérée dans une stratégie territoriale globale :

- développement de l’offre de logements et d’infrastructures dans un contexte de croissance urbaine

- mise en place d’un quartier « vert » innovant, dans une ville réputée pour son engagement dans le domaine de l’environnement

- opération liée à une autre réalisation locale, le quartier de Reiselfeld, engagé dans une démarche similaire.

b) Effets indésirables et éléments pouvant être améliorés (-) Une densité trop importante La densification qui permet une consommation optimisée de l’espace ainsi que de proposer des terrains à des prix raisonnables fait l'objet de critiques de certains habitants qui jugent la densité des bâtiments trop importante. Une limitation trop stricte de l’usage de l’automobile Le stationnement est une autre cause principale de conflits, beaucoup de personnes stationnent leur véhicule à des endroits illicites, ce qui provoque la colère des riverains. Pour autant, la limitation de l’automobile semble être globalement bien acceptée par les habitants qui utilisent dans une large mesure les transports en commun, le car sharing (même si celui-ci est qualifié de contraignant du fait de l’obligation de déterminer une heure précise de retour), et surtout le vélo, comme beaucoup de fribourgeois. Un quartier enclavé La « Vauban allee » est le seul axe qui raccorde le quartier à la ville.

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Les rues des zones résidentielles adjacentes à cet axe sont en forme de " U" (donc en impasse), de sorte qu’il n’y a pas de trafic de passage dans le quartier. L’objectif est de limiter le trafic automobile, et de conférer à Vauban un cadre de vie de qualité et davantage de sécurité pour les enfants. Cependant, il en résulte une absence de liaison directe vers les quartiers alentours et un sentiment d’isolement du quartier par rapport à l’ensemble de la ville. c) Eléments pouvant être améliorés Mixité de population En matière de mixité de population, les résultats sont un peu décevants : les familles avec enfants en bas âge et les étudiants (résidence universitaire) sont les principaux résidents. Ainsi, les équipements sont principalement tournés vers la petite enfance (jardins d’enfants, école primaire, aires de jeux), au détriment des jeunes pour qui rien n’est prévu. Par ailleurs, il y a très peu de personnes âgées dans le quartier. Il faut dire que la hauteur des constructions, induisant la présence de plusieurs étages n’est pas adaptée pour des personnes âgées, cantonnées aux appartements en rez-de-chaussée. Il semble qu’aucun ascenseur ne soit prévu (les couloirs et escaliers d’accès sont le plus souvent extérieurs). Plusieurs habitants déplorent cette absence de mixité générationnelle. De plus, certains habitants ressentent une certaine ségrégation des populations, il existe une sorte de ligne entre les riches, les propriétaires de maisons, et les locataires. Il n’y a pas de contact entre ces deux types de population. Il est vrai que même si l’habitat individuel est assez dispersé dans le quartier (il est même souvent mitoyen avec des immeubles collectifs), on observe une plus forte concentration de ce type d’habitat au Sud-Est du quartier. Cette localisation est d’ailleurs particulièrement favorable : proximité de la rivière, de l’école, du supermarché et du parking ainsi que de l’entrée Est du quartier par la Vauban allee. Mixité fonctionnelle Outre le fait que les équipements soient principalement tournés vers la petite enfance, on peut regretter leur insuffisance (absence de bureau de poste, de services administratifs, de salle polyvalente, de structure pour les personnes âgées…). En matière de commerce, le seul supermarché du quartier est assez réduit et les habitants ne le fréquentent pas régulièrement. Ils se tournent davantage vers les autres grandes surfaces de Fribourg, en particulier celle situé près de la gare, à 1 km du quartier. L’effort fait pour favoriser l’implantation de commerces de proximité le long de la Vauban allee (obligation pour les propriétaires de réserver une partie du rez-de-chaussée à un local commercial) est plutôt payant, même si les surfaces accordées sont souvent réduites, par peur de la non rentabilité de l’activité.

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C) Mise en place d’une démarche HQE pour les écuries du Parc de la Deûle Lille Métropole Communauté urbaine s’est chargée avec le Syndicat mixte du Parc de la Deûle, devenu depuis octobre 2002 le Syndicat mixte "Espace naturel Lille Métropole", du développement et de la gestion des 350 hectares d’espaces de nature et de loisirs que constituent, au sud-est de la métropole lilloise la première étape du parc de la Deûle, vaste projet de corridor écologique qui reliera, à terme, l’agglomération lilloise aux communes de l’ancien bassin minier, sur 25 kilomètres le long du canal de la Deûle. Il s’agit d’un projet ambitieux qui vise notamment à restaurer des espaces plus ou moins dégradés, et à préserver des milieux naturels. Au total, les travaux d’aménagement vont concerner près de 600 hectares situés au coeur des champs captants, territoire qui abrite la principale ressource en eau de Lille Métropole. Pour entretenir cet espace et assurer le développement de sa biodiversité, une équipe de 19 agents d’entretien du patrimoine naturel a été constituée en janvier 2000. Pour accueillir cette équipe il était nécessaire de mettre à sa disposition des ateliers et des bureaux au coeur même du parc. Le Syndicat mixte lança dès lors une procédure d’appel d’offres en affichant sa volonté de voir le futur bâtiment s’inscrire dans une démarche HQE. A l’issue de la consultation, l’Atelier d’Architecture Ecologique représenté par l’architecte Jérôme HOUYEZ, fut retenu comme maître d’œuvre pour concevoir et réaliser les futures Écuries du parc de la Deûle, aujourd’hui centre technique et administratif de Mosaïc, jardin des cultures. Rapidement maître d’ouvrage, maître d’oeuvre, partenaires se mirent autour de la table pour se fixer des objectifs de "performance environnementale". Ensemble, ils décidèrent de se référer à la démarche HQE et à ses 14 cibles pour réhabiliter cet ancien bâtiment agricole.

1- Eco-construction a) Cible 1 : relation harmonieuse du bâtiment avec son environnement immédiat Préserver la qualité architecturale du bâti existant Il était nécessaire de conserver l’esprit architectural originel du bâtiment, caractérisé par ses onze arcades et son aspect "monumental". Les priorités retenues ont donc été : - La mise en valeur des arcades et du pignon est ; - Le recours à des matériaux locaux, en particulier la terre cuite et le bois ; - L’adoption d’un nouveau "couronnement" en structure bois ; - Le maintien des volumes intérieurs.

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S’inscrire dans une architecture bioclimatique Les caractéristiques climatiques du site, (précipitations, vents dominants, ensoleillement) ont été analysées et prises en compte dans la recomposition du bâtiment pour en réduire les besoins énergétiques. La présence de la Deûle est un élément fort dans le paysage local. Pourtant le choix a été fait de lui "tourner le dos", au moins provisoirement, pour privilégier des vues plus "jardinées" vers le futur jardin Mosaïc et exploiter ainsi les façades les plus favorables sur le plan énergétique. Ensoleillement - La façade principale nord-ouest longue de 45m a été repensée pour mettre en valeur ses arcades et favoriser l’éclairage naturel. - Le pignon sud-est offrait une orientation favorable pour exploiter au mieux les apports solaires gratuits ; cela s’est concrétisé par l’aménagement d’une large verrière. - La toiture fut entièrement repensée, un nouveau couronnement en structure bois, conçu comme une "cinquième" façade offre désormais grâce à de larges vitrages un éclairage naturel optimisé. Précipitations La hauteur des précipitations locales (730 mm/an) représentait un gisement d’eau claire, conséquent, que le maître d’ouvrage tenait à récupérer et valoriser. Vent On notera que le bâtiment est protégé des vents dominants de sud-ouest par la présence de la ferme "Gruyelle". Le degré de pente de la toiture sert de tremplin et offre une inclinaison optimale pour l’exploitation des panneaux solaires thermiques.

La cinquième façade bioclimatique La verrière du pignon Sud-Est 7PPPP Participer au développement de la flore et de la faune locale Le bâtiment existant est situé au coeur d’un milieu boisé, ponctué de zones humides. Sa réhabilitation n’a pas été consommatrice de nouveaux espaces, l’équilibre naturel du site ne s’en est pas trouvé perturbé.

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La gestion écologique du milieu a permis de participer localement au développement de la biodiversité notamment par : l’ouverture de clairières, la plantation d’arbres et arbustes d’essences régionales, le nettoyage des étangs, la pose de nichoirs etc… De 1998 à fin 2003, le parc de la Deûle s’est enrichi de plus de 75 000 végétaux spécialement plantés : 5 000 arbres, 41 000 arbustes, 3 500 plantes aquatiques. Composer avec les éléments du voisinage Les Écuries sont accolées à l’aile sud-ouest d’une imposante ferme "flamande" toujours en activité. Le réaménagement des Écuries et leurs fonctions futures, devaient tenir compte de cette mitoyenneté. Aujourd’hui, les deux bâtiments se côtoient en parfaite intelligence. La présence des "champs captants", principale ressource en eau potable de la métropole lilloise qui nécessite une protection sans faille, rendait obligatoire le raccordement au réseau d’assainissement de la Communauté urbaine. La rénovation des Écuries aura permis de mettre aux normes le système d’assainissement de la ferme en le couplant à celui des Écuries. Les réseaux d’adduction d’eau potable et d’alimentation électrique, ne desservaient pas le bâtiment mais uniquement la ferme. La réhabilitation des Écuries fut l’occasion de renforcer la ligne électrique et de rénover le réseau d’adduction d’eau potable sur plus de 500 mètres. La voie d’accès à la villa des Nénuphars existait, elle fut simplement réaménagée pour répondre aux besoins du bâtiment.

b) Cible 2 : choix des matériaux et procédés constructifs

Les principes

Sélectionner des matériaux peu transformés, plutôt d’origine locale, afin de limiter leurs impacts sur l’environnement durant leur cycle de vie : de l’extraction de la matière première à l’élimination du produit. Adopter des systèmes constructifs aisés dans leur mise en oeuvre, leur transformation et le cas échéant leur démantèlement. Valoriser le savoir-faire des artisans régionaux.

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Les choix

La brique de terre cuite traditionnelle de 11/22 constitue la structure du bâtiment originel. Les briques utilisées dans les aménagements intérieurs et les tuiles de la nouvelle toiture, sont aussi en terre cuite, elles proviennent de producteurs régionaux et de la briqueterie belge toute proche de Ploogsteert. Le bois, matériau renouvelable par excellence, présente plusieurs avantages dont celui d’être léger. Il a donc permis la construction du nouveau couronnement en évitant le renforcement des fondations du bâtiment. Cette structure entièrement démontable, a été rapide à mettre en oeuvre et a généré très peu de déchets.

Les bois ont été choisis en fonction de leurs caractéristiques techniques (résistance), de leurs usages et de leur provenance.

Pour des raisons de traçabilité, de manque d’informations sur leurs modes de gestion, les bois exotiques n’ont pas été utilisés dans ce projet. Seuls des bois issus de forêts gérées (françaises ou européennes) ont été retenus.

• Le mélèze, naturellement résistant aux intempéries, aux insectes, aux champignons ne nécessitait pas de traitement. Il compose l’ossature de la verrière. Avec le temps, les UV et la pluie modifieront la teinte du bois qui deviendra grisée.

• Le pin non raboté utilisé en bardage extérieur est protégé des intempéries par le débordement de toitures : à ce titre il ne nécessite pas de traitement.

• Le sapin a été utilisé pour l’ensemble de la charpente en lamellé collé. Le recours aux fermes en lamellé collé s’explique pour deux raisons principales :

- elles libèrent un plus grand volume à l’étage que les fermes traditionnelles, - leur réalisation en série a permis de réduire leur coût de fabrication.

• Le hêtre compose l’escalier et la mezzanine. Pour leur protection, un simple traitement à l’huile de lin, appliqué régulièrement, est nécessaire.

• Le bois dit "rétifié" , ici du sapin, a été testé pour des éléments spécifiques.

Pour le revêtement de sol, deux matériaux ont été privilégiés :

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- Le linoléum à base de lin et de bois, a été préféré aux matériaux en PVC pour les bureaux de l’étage. Le PVC contient du chlore, il est susceptible de poser des problèmes environnementaux au stade de sa production et de son élimination.

- Le carrelage en grès cérame a été privilégié pour sa résistance et sa facilité d’entretien au rez-de-chaussée où les passages sont très fréquents. Pour l’isolation , trois types de matériaux ont été installés :

- La laine de lin (fibre végétale) en rouleau a été choisie pour isoler les murs de l’étage. Elle a été préférée aux isolants classiques (laines minérales). Le lin est une plante "régionale" longtemps utilisée dans l’industrie textile, elle trouve de nouveaux débouchés grâce aux matériaux d’isolation.

- Le liège en plaques a été mis en oeuvre pour isoler les murs du rez-de-chaussée. Souvent en provenance du Portugal, le liège présente entre autre l’avantage de ne pas contenir de fibres.

- La laine de verre conditionnée dans un film papier (kraft) a été installée pour l’isolation de la sous-toiture. Cette protection permet d’éviter une éventuelle contamination de l’air ambiant par les fibres minérales contenues dans ce type d’isolant. Les peintures utilisées pour les murs et les plafonds sont de teinte claire pour permettre une meilleure diffusion de la lumière. Des enduits à la chaux teintée, des peintures à base d’eau disposant du label NF Environnement ont été privilégiés pour les murs et les sous faces des plafonds. Pour les équipements, comme pour les matériaux, une réflexion particulière a été menée : - Le mobilier en bois a été privilégié, une recherche sur la provenance et le traitement des essences utilisées a été réalisée.

- Les ordinateurs ont été choisis pour leur faible consommation d’énergie. c) Cible 3 : chantier à faible nuisance

Les principes

Réduire au maximum les impacts négatifs du chantier sur le site. La tranquillité des riverains, le tri des déchets, l’élimination des produits et matériaux dangereux furent les principales préoccupations.

Les choix

La déconstruction Elle pourrait constituer une cible à elle seule, sa prise en compte se fait en amont de la phase de construction. Dans le cas des Écuries, les briques, récupérées après la déconstruction des murs obturants les arcades, ont été utilisées pour le rehaussement des deux murs pignons. La gestion des déchets de chantier La majorité des entreprises retenues étaient des entreprises artisanales, dont certaines étaient déjà sensibles à la démarche HQE : la production de déchets est donc restée limitée. De plus, l’architecte a assuré un rôle de "coordinateur propreté" tout au long du chantier. L’assemblage en usine des différents matériaux a limité considérablement la production de déchets et la mise en contact avec des substances nocives. Au final, les conditions de travail des artisans en ont été améliorées.

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Compte tenu des choix constructifs, les déchets de bois furent inévitables, mais l’utilisation de bois non traité a facilité leur élimination. Conformément à la réglementation, l’ancienne toiture, en amiante-ciment, a été démontée et acheminée vers un centre d’enfouissement technique de classe 1 pour déchets toxiques. La circulation des véhicules Les nuisances susceptibles d’être occasionnées par la circulation des véhicules de chantier (bruit, poussières, salissures) n’ont pas engendré de problèmes avec les riverains, relativement éloignés du site.

2- Eco-gestion a) Cible 4 : gestion de l’énergie

Les principes

Réduire les besoins énergétiques du bâtiment pour la production d’eau chaude, le chauffage, la climatisation, l’éclairage, tout en garantissant le confort et la santé des utilisateurs. Cet objectif devait être atteint en minimisant les rejets atmosphériques contribuant à l’effet de serre, et en ayant recours aux énergies renouvelables.

Les choix

Recours à l’énergie solaire La conception bioclimatique d’un bâtiment permet d’exploiter gratuitement les apports solaires en prévoyant des surfaces vitrées bien réparties et bien dimensionnées. Aux Écuries, elle s’est traduite par la réalisation de la verrière sur le pignon sud-est qui apporte lumière et chaleur dans le bâtiment. Des capteurs solaires thermiques (4 m2) ont été installés sur le pan de toiture arrière, inclinés à 35° et orientés au sud-ouest. Ils assurent 50% de la production d’eau chaude sur l’année et 100% en été. Le bois comme combustible renouvelable Après une étude comparative prenant en considération les caractéristiques du site et sa localisation, le choix a été fait d’installer une chaudière à bois. D’une puissance de 55 kiloWatts, cette chaudière assure la totalité des besoins en chauffage des locaux et 50% de la production d’eau chaude. Elle présente un système entièrement automatisé d’approvisionnement du foyer par une vis sans fin. Son rendement provisoire de 76% permet de réduire au maximum toutes formes de rejets atmosphériques et limite considérablement la production de cendres. L’exploitation de l’ensemble des locaux à l’étage permettra d’améliorer le rendement de cette chaudière. Dimensionnée dans la perspective de cet agrandissement, elle est pour l’instant sous utilisée. Le combustible utilisé provient de la plate-forme de recyclage de déchets de bois de Seclin située à 5km. Issu principalement de palettes et de cagettes, ce bois non traité, est séché, broyé avant d’être acheminé par petit porteur dans la fosse de 16m3 installée dans le bâtiment. La valorisation de la production locale de bois est envisagée par les techniciens du parc. Ils étudient très sérieusement la manière de valoriser les bois de coupe et d’élagage qu’ils ont à gérer. Pour ce faire, ils devront s’équiper d’un broyeur et s’affranchir des contraintes de conditionnement, de stockage, de transport des déchets…. Cette démarche mérite d’être suivie.

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b) Cible 5 : gestion de l’eau

Des principes

• Encourager l’économie d’eau potable. • Mettre en place des dispositions assurant la récupération des eaux pluviales. • Assurer un traitement performant des eaux usées.

Des choix

La valorisation des eaux pluviales L’eau de pluie collectée sur la toiture est en partie récupérée et stockée dans 3 cuves de 1 000 litres chacune. Elle est directement utilisée pour l’arrosage, le nettoyage des locaux et l’alimentation des toilettes, le trop plein étant rejeté dans la Deûle via un bassin tampon. Le revêtement extérieur en pavés autobloquants participe par sa porosité à la gestion in-situ des eaux de pluies par simple infiltration. Les systèmes d’économie d’eau Des économiseurs d’eau ont été installés sur la robinetterie : mitigeurs, réducteurs de débit pour les douches, chasses d’eau à double débit (3/6 litres) pour les toilettes. Le respect des « champs captants » Le traitement des eaux usées du bâtiment est assuré par la station d’épuration d’Houplin-Ancoisne. Situées au coeur de la principale ressource en eau potable de la métropole lilloise, les Écuries auraient pu être équipées d’un système de traitement autonome. Pour des raisons réglementaires de protection des champs captants, elles ont été raccordées au réseau d’assainissement de LMCU. c) Cible 6 : gestion des déchets

Des principes

Dans le cadre de la politique de traitement des résidus urbains mise en place par la Communauté urbaine de Lille la gestion des déchets porte sur : la réduction à la source de la production des déchets, la mise en place du tri sélectif, la valorisation des produits recyclables.

Des choix

Trier et valoriser l’ensemble des déchets d’activité Les bacs de tri mis à disposition par la Communauté urbaine permettent aux agents du Parc de collecter séparément, le verre, les métaux, les plastiques et les papiers de bureaux. Ces matériaux sont ensuite collectés et dirigés vers leurs filières de valorisation respectives.

Des perspectives

A terme, les bois d’élagage issus des coupes pourraient être broyés, séchés et utilisés sur place comme combustibles pour alimenter la chaudière. Les autres déchets végétaux (feuilles, résidus de fauches…) issus essentiellement du Jardin Mosaïc, seront conditionnés pour être utilisés en compost et couvre-sol. Dans un avenir proche, les usagers du Parc seront eux aussi amenés à trier leurs déchets, comme c’est déjà le cas dans de nombreux parcs publics en Allemagne.

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d) Cible 7 : entretient et maintenance

Des objectifs

Recourir à des matériaux durables, adaptés aux usages des lieux, faciles d’entretien. Mettre en place des systèmes de gestion technique.

Des choix

Les revêtements de sol du rez-de-chaussée, en grès cérame, et celui de l’étage en linoléum, ont été choisis pour leur simplicité d’entretien. Ils ne demandent qu’un nettoyage à l’eau et ne nécessitent pas l’utilisation de détergent. La structure de la verrière en mélèze, les châssis de certaines portes et fenêtres en bois rétifié résistent naturellement aux intempéries et ne nécessitent pas d’entretien. Ces choix évitent de recourir à des travaux réguliers de décapage, de ponçage et de mise en peinture. Un thermostat couplé à une horloge programmable régule les niveaux de température dans les différents espaces, bureaux, ateliers, locaux de stockage en fonction de leur occupation. Le choix d’un matériel fiable et de qualité permet d’optimiser leur usage et est un gage de leur pérennité.

Des perspectives

Définition avec la société de nettoyage d’une liste de produits d’entretien respectueux de l’environnement.

3- Confort

a) Cible 8 : confort hygrothermique

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Des objectifs

Assurer un confort permanent et l’homogénéité des ambiances hygrothermiques en toute saison.

Des choix

Un système de ventilation naturelle La mise en oeuvre du système de puits canadien participe largement au confort thermique des locaux en toute saison et à la stabilité du taux d’humidité de l’air intérieur. Les stores des velux de la façade sud-ouest et l’utilisation de vitrages à faible émissivité participent aussi à la limitation des risques de surchauffe en période estivale. En cas de fortes chaleurs, l’air chaud accumulé dans la verrière peut être évacué par simple convection thermique grâce aux châssis ouvrants installés en partie haute du vitrage. Un rideau de houblon, plante grimpante régionale, vient compléter ce système. Conserver l’inertie thermique du bâtiment Le pignon sud-est, les dalles de l’étage et du rez-de-chaussée ont été conservés et rénovés et en parti isolés. Le mur du pignon sud-est reprend le principe du "mur Trombe" : il emmagasine la chaleur produite par la verrière au cours de la journée et la restitue dans la première partie de la nuit. Le matin, le mur est à nouveau froid, et participe au rafraîchissement des locaux. b) Cible 9 : confort acoustique

Des principes

Protéger les utilisateurs des bruits extérieurs et réduire les nuisances sonores à l’intérieur des locaux, en privilégiant certains matériaux.

Des choix

Relativement isolé au coeur du Parc de la Deûle, le site ne subit pas les contraintes des bruits extérieurs. L’épaisseur des murs, leur isolation et les fenêtres en double vitrage constituent de toute façon d’excellents moyens de protection. La réflexion de l’équipe de conception a donc porté sur la mise en œuvre de moyens techniques pour assurer le confort acoustique intérieur et permettre par exemple que les bruits ponctuels de l’atelier ne perturbent en rien le confort acoustique des bureaux. Les vestiaires, la chaufferie, l’espace de restauration constituent des espaces tampons entre les ateliers et les bureaux. A l’étage Les rampants de toiture sont des panneaux en bois aggloméré (classement E1 : faible taux de formole dans les colles), autoportants, perforés en surface qui réduisent considérablement le temps de réverbération du bruit. Les autres matériaux de finition, comme les panneaux de bois OSB sur les murs, le linoléum en revêtement de sol, les menuiseries en bois participent aussi à la qualité acoustique des lieux. Au rez de chaussée Le plafond en voûtains de terre cuite a été conservé. Recouvert d’un isolant (5 cm de laine de roche rigide) et d’une dalle flottante, il forme un ensemble performant pour amortir les bruits d’impacts.

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rampants de sous-toiture acoustique ouvrants en double vitrage panneau OSB c) Cible 10 : confort visuel • Optimiser l’éclairage naturel.

• Disposer d’un éclairage artificiel d’appoint performant en termes de qualité d’éclairage et d’économie d’énergie.

Des choix

Des procédés constructifs favorables La faible largeur du bâtiment, 6 mètres, est favorable à une bonne diffusion et une bonne répartition de l’éclairage naturel. A l’étage les bureaux bénéficient d’un éclairage naturel en double exposition : Les fenêtres de toit sur le versant sud de la toiture offre un éclairage zénithal ; Les châssis de toit au nord, disposés régulièrement entre chaque travée de la façade complètent l’apport de lumière naturelle. Le degré d’inclinaison des ouvertures, offre trois fois plus de lumière à surface égale qu’une ouverture verticale. Ces fenêtres offrent des perspectives sur la campagne environnante qui participent largement à la qualité d’ambiance ressentie par les utilisateurs du bâtiment. Au rez-de-chaussée, certaines arches ont été vitrées en partie haute et les faux plafonds rehaussés, pour laisser entrer la lumière naturelle jusqu’au fond des pièces. Des puits de lumière dans les vestiaires, des impostes vitrées au-dessus des portes des toilettes participent, aussi à cet éclairage naturel confortable et gratuit. Afin d’optimiser les apports de lumière naturelle dans les locaux, chaque pièce a fait l’objet d’un calcul de facteur de lumière du jour (FLJ). Pour des bureaux, on considère qu’un FLJ supérieur à 3% est satisfaisant.

Un éclairage artificiel performant Des coloris appropriés Les teintes claires ont été privilégiées pour le revêtement des murs et des sols, afin d’atténuer les effets de contraste et d’accentuer la réflexion de la lumière naturelle et des éclairages.

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Des éclairages artificiels performants Les performances des lampes sont adaptées aux besoins des différents locaux. Des ampoules fluocompact, basse consommation (220 Volts) ont été choisies pour les vestiaires et les sanitaires. Dans les espaces de bureau, des lampes basse tension (12 V) ont été privilégiées pour leur qualité d’éclairement. Fixées sur des câbles, elles offrent un éclairage uniforme et évolutif.

d) Cible 11 : Confort olfactif

Des principes

Limiter les odeurs indésirables et assurer un renouvellement d’air suffisant par le choix des matériaux et du système de ventilation.

Des choix

Le choix d’un matériau comme le bois procure à l’intérieur des locaux une ambiance olfactive de qualité. L’ensemble des utilisateurs et des visiteurs s’accorde sur cette "agréable odeur de bois". Elle est confortée par l’utilisation d’huile de lin pour protéger l’escalier et la mezzanine. Les odeurs de la ferme parfois très présentes, ne sont pas perçues comme des nuisances, car elles s’inscrivent parfaitement dans le contexte rural au cœur duquel sont implantées les Écuries.

4- Santé a) Cible 12 : conditions sanitaires

Des principes

Limiter l’usage de produits d’entretien dommageables pour l’environnement intérieur et extérieur.

Des choix

Les matériaux de finition, qui ont été retenus comme le carrelage et le linoléum ne nécessitent pas d’entretien lourd et fréquent avec des produits d’entretien toxiques (T) et nocifs (Xn). Le linoléum a par exemple la particularité de ne pas générer d’électricité statique, ce qui limite la fixation de poussières, il est aussi antiseptique et permet de réduire la présence d’acariens.

Des perspectives

Limiter les risques électromagnétiques en déplaçant ou en isolant le transformateur de la rampe de spot à l’étage dans une pièce peu fréquentée. b) Cible 13 : qualité de l’air

Des principes

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• Assurer une qualité de l’air irréprochable à l’intérieur des locaux. • Eviter tous rejets de polluants atmosphériques.

Des choix

Le haut rendement de la chaudière à bois et le recours à des panneaux solaires thermiques pour le chauffage et la production d’eau chaude limitent considérablement les rejets de gaz à effet de serre dans l’atmosphère et participent à la qualité de l’air extérieur. Les choix constructifs faits pour la réhabilitation des Écuries assurent à l’intérieur des locaux une qualité de l’air optimale : - Les lasures des chassis de fenêtre et les peintures murales ne contiennent pas de solvants pouvant générer des composés organiques volatiles (COV), au moment de la mise en oeuvre et dans la vie du bâtiment. - La laine de roche utilisée pour l’isolation de la dalle et de la toiture est "ensachée" dans un film de papier kraft étanche, monté en usine. Ces précautions évitent tout risque de propagation de micro-fibres à l’intérieur des locaux. - Les panneaux de bois ont été choisis avec un taux minimum d’urée formaldéhyde (classement E0 ou E1) pour préserver la santé des occupants. - Les menuiseries, escaliers, mezzanine, fenêtres, portes sont en bois non traité. Les bois extérieurs sont protégés par une lasure à base d’eau, et les bois intérieurs protégés par des huiles dures sans solvants. c) Cible 14 : qualité de l’eau

Des principes

Assurer en toute sécurité l’utilisation d’eau potable et non potable pour des usages biens définis.

Des choix

Le système de récupération des eaux de pluies comprend une réserve, une pompe, des filtres et un boîtier électronique de gestion. Le boîtier électronique permet, d’alimenter automatiquement par de l’eau du réseau collectif les cuves d’eau pluviale quand le niveau n’est plus suffisant. Ce système entièrement sécurisé évite par conséquent tout risque de mélange entre les deux circuits d’eau. Par précaution, une signalétique spécifique indique les robinets distribuant de l’eau "non potable".

Système de gestion des eaux pluviales

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En fonctionnement depuis février 2000, les "Écuries" du Parc de la Deûle ne comptent plus le nombre de personnes qui viennent les visiter, principalement des élus, des techniciens des collectivités, mais aussi des ingénieurs, des étudiants et le grand public. En quatre années, ce bâtiment est devenu une référence en matière de réhabilitation Haute Qualité Environnementale (HQE®) en région Nord - Pas de Calais. La simplicité, le bon sens, l’avant-gardisme ont présidé à sa conception mais le vrai succès de cette réalisation, aux dires de ses utilisateurs et des visiteurs, est le bien être qui s’en dégage. Ce bâtiment est devenu aujourd’hui le centre technique et administratif de Mosaïc, le jardin des cultures, expression de la "nature rêvée". Mais au-delà de la technique et de la démarche formelle, l’idée est de montrer que la haute qualité environnementale est avant tout un état d’esprit, une recherche vers une nature respectée, une vie améliorée.

Les écuries du Parc de la Deûle

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CONCLUSION La prospérité des pays développés étant à l’origine de problèmes majeurs (effet de serre, pollutions, destruction de nombreux écosystèmes), il est important d’engager pour l’avenir un développement durable afin de léguer aux générations futures un monde vivable, d’un point de vue écologique mais aussi économique et social. Cet objectif est inscrit dans la déclaration de Rio signée le 14 juin 1992 par 173 pays. Il est intégré au droit français de l’aménagement et de l’urbanisme, notamment par la Loi Solidarité et Renouvellement Urbains, qui vise à favoriser un développement plus équilibré et durable. Pour parvenir à une meilleure « durabilité urbaine », plusieurs outils concrets peuvent être proposés. Il s’agit notamment de recycler les friches urbaines, de privilégier la densité, de coordonner les politiques de transport public et d’urbanisme, de mettre en place une mixité fonctionnelle et sociale… En ce qui concerne la construction, la démarche HQE (Haute Qualité Environnementale) établit des cibles afin d’améliorer la qualité technique, architecturale et d’usage des bâtiments et de limiter les impacts sur l’environnement tout en apportant un maximum de confort aux occupants. Différents exemples d’aménagements en France et dans le monde montrent qu’il est possible pour les villes de se développer tout en respectant au mieux l’environnement et en conférant une bonne qualité de vie aux habitants. Les pays du Nord de l’Europe(Suède, Norvège, Danemark, Allemagne…) sont pionniers dans ce domaine. Nous avons en particulier étudié le cas des quartiers Vauban à Fribourg (Allemagne) et Vesterbro (Danemark) où une forte densité domine. Les quartiers sont remarquables par leurs qualités de constructions (utilisation de l’énergie solaire, bonne isolation…) et par la limitation de l’automobile.¨ Malheureusement, les éco-quartiers engendrent un surcoût initial de 15 à 20 %. Cependant ce surcoût est compensé par un moindre coût d’usage (les charges) et de maintenance ainsi que par des externalités comme la réduction des gaz à effet de serre. Le quartier représente une communauté importante pour le développement durable, en dépit de son poids politique très modeste. Dans l’optique du développement durable, le quartier a par conséquent besoin de structures spécifiques avec accès direct aux autorités politiques. Les équivalents français n’existent pas encore. A cela des raisons qui paraissent liées dans notre pays à l’abondance du foncier et à une culture de l’étalement urbain difficile à contrer. La prolifération des lotissements de maisons individuelles est persistante, sans conscience encore des coûts collectifs et individuels qu’ils induisent notamment en terme de transports. A une échelle plus fine, la réhabilitation des écuries du Parc de la Deûle est également remarquable pour sa qualité environnementale. L’aménagement paysager et l’intégration du bâtiment ainsi que la haute qualité environnementale de celui-ci font de ce site une opération exemplaire.

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Bibliographie Sur le thème du développement durable ���� ROUYER R. (dir), « Environnement, écologie, développement durable », Architecture intérieure CREE, n°298, 2001. p.28-131 ���� KAUFMANN V., SAGER F., FERRARI Y., JOYE D., Coordonner transports et urbanisme. Lausanne : Presses polytechniques et universitaires romandes, 2003. 220 p. ���� ROUXEL F., RIST D., Le développement durable, approche méthodologique dans les diagnostics territoriaux. Collections du CERTU, ministère de l’équipement, des transports et du logement. Septembre 2000, 147 p. ���� EMELIANOFF C., La ville durable. Etats des lieux en Europe et prospective. Saint-Cloud : école normale supérieure, 1998. 363 p. (rapport de recherche) ���� TRAISNEL J.P., « Habitat et développement durable », Les cahiers du Club d’ingénierie prospective énergie et environnement n°13, avril 2001. P.5-72 Sur le thème de l’étalement urbain ���� « Villes. Contenir l’étalement des territoires urbains paraît nécessaire mais exigera une forte volonté politique », le moniteur n° 9 spécial centenaire, 24 octobre 2003. P. 116 ���� INSTITUT ECONOMIQUE DE MONTREAL., « l’étalement ur bain est-il une catastrophe économique et écologique ? » (en ligne ; réf du 27 décembre 2003). Disponible sur internet Sur le thème de l’habitat, de la maison individuelle et du lotissement ���� VAYSSE F., « Logement : belle progression de la construction en 2003 » le moniteur n° 5227, 30 janvier 2004. p. 14 ���� RAYMOND H., HAUMONT N., l’habitat pavillonnaire. SI : Collections Habitat et Sociétés, l’Harmattan. 2001. 114 p. Sur les techniques alternatives relatives à l’habitat individuel : ���� CERTU Techniques alternatives aux réseaux d’assainissement pluvial ; S.I. : CERTU, Ministère de l’équipement, des transports et du logement, novembre 1998. 155 p. Sur la construction de Haute Qualité Environnementale (HQE) ���� ERRARD, D. « La construction se mobilise pour l’environnement », Le Moniteur, 21 novembre 2003, p.58-60. ���� GAUZIN-MULLER D., L’architecture écologique, 29 exemples européens. Paris : Editions du Moniteur, 2001. 287 p.

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Sur le quartier Vauban ���� PROJECKTGRUPPE VAUBAN. Quartier Vauban, le développement durable au quotidien. 7 p. Sites internet ���� http://www.iedm.org/etalementurbain.html ���� http://www.cg34.fr/environnement/developpement%20durable/hqe/poph.htm ���� http://www.lillemetropole.fr/gallery_files/site/68520/69095.pdf ���� http://www.assohqe.org/ ���� http://www.planetecologie.org/kitdevdur/Villedevdur.html ���� http://www.areneidf.org/ ���� http://www.ville-orleans.fr/ ����http://groups.google.ca/group/fr.soc.politique/browse_thread/thread/61fcc7a452c3397e/1d6 bdbd431902b45?hl=en