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1 septembre 2015 www.help.lu n°6 PERIODIQUE PS/610 Dossier Dites non aux chutes ! Saviez-vous que les chutes sont la première cause de mortalité chez les personnes de plus de 65 ans ? Passé cet âge, une personne sur trois est victime d’une chute au cours de l’année. Si la plupart d’entre elles sont bénignes, certaines peuvent aussi entraîner de graves consé- quences, dont il faut pouvoir parler. « Plus de 60 % des chutes se pro- duisent au domicile et, dans 40 % des cas, la personne ne peut pas se relever seule », souligne d’emblée Maud Dumay, ergothérapeute au sein de la Croix-Rouge, membre de HELP. « Plus grave, 40 % des person- nes âgées restées plus de trois heures au sol sans pouvoir se relever décè- dent dans les six mois qui suivent la chute… » Des chiffres alarmants. Ce phénomène n’épargne personne. La plupart des glissades n’entraînent pas de véritable blessure. Seulement 5 à 10 % des chutes nécessitent une intervention médicale ou chirurgi- cale. « On constate toutefois une perte d’autonomie chez 20 à 30 % des victimes », reprend Maud Dumay. Dans de nombreux cas, on hésite à en parler. On se dit que ce n’est pas grave. On se relève et on reprend ses activités. Mais, souvent, la peur de retomber s’installe. On finit par éviter certaines activités, on s’isole. De ce fait, on perd en mobilité. Un cercle vicieux se dessine alors et con- duit irrémédiablement à une nouvelle chute… Des causes multiples à prendre en considération La chute peut être causée par de nom- breux facteurs. « Certains sont direc- tement liés à la personne. On peut évoquer les troubles de l’équilibre et de la marche, l’âge ou une pathologie aigüe ou chronique », explique Maud Dumay. « D’autres facteurs sont dits socio-comportementaux. Ils ont trait à la prise de médicaments, à la peur de chuter, à la sédentarité, à la dénu- trition chronique ou encore à la con- sommation d’alcool. Enfin, l’environ- nement immédiat du patient joue un rôle non-négligeable. » Il faut égale- ment parler, ici, de l’aménagement du domicile ou des dangers extéri- eurs. La présence d’un tapis de sol, un passage étroit entre des meubles, des escaliers trop raides, un câble apparent ou le manque de lumino- sité sont autant d’éléments qui aug- mentent inévitablement les risques d’accident. Si l’on associe souvent chute et frac- ture du col du fémur, celle-ci reste peu fréquente. Ses conséquences, par contre, sont très graves. 25% des patients victimes d’une telle fracture décèdent dans les six mois, tandis que 50% en gardent de sérieuses séquel- les. Par ailleurs, une maladie comme l’ostéoporose, si elle n’est pas une cause directe de chute, provoque une diminution de la densité osseuse et augmente le risque de fracture. Seulement 5 à 10% des chutes nécessitent une intervention médicale ou chirurgicale.

HELP vous dit bonjour ! Dossier en Français - septembre 2015

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bonjour est la newsletter trimestrielle du réseau d'aides et de soins à domicile HELP.

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1septembre 2015 www.help.lu

n°6

PERIODIQUE

PS/610

Dossier

Dites non aux chutes !Saviez-vous que les chutes sont la première cause de mortalité chez les personnes de plus de 65 ans ? Passé cet âge, une personne sur trois est victime d’une chute au cours de l’année. Si la plupart d’entre elles sont bénignes, certaines peuvent aussi entraîner de graves consé-quences, dont il faut pouvoir parler. « Plus de 60 % des chutes se pro-duisent au domicile et, dans 40 % des cas, la personne ne peut pas se relever seule », souligne d’emblée Maud Dumay, ergothérapeute au sein de la Croix-Rouge, membre de HELP. « Plus grave, 40 % des person-nes âgées restées plus de trois heures au sol sans pouvoir se relever décè-dent dans les six mois qui suivent la chute… » Des chiffres alarmants.

Ce phénomène n’épargne personne. La plupart des glissades n’entraînent pas de véritable blessure. Seulement

5 à 10 % des chutes nécessitent une intervention médicale ou chirurgi-cale. « On constate toutefois une perte d’autonomie chez 20 à 30 % des victimes », reprend Maud Dumay. Dans de nombreux cas, on hésite à en parler. On se dit que ce n’est pas grave. On se relève et on reprend ses activités. Mais, souvent, la peur de retomber s’installe. On finit par éviter certaines activités, on s’isole. De ce fait, on perd en mobilité. Un cercle vicieux se dessine alors et con-duit irrémédiablement à une nouvelle chute…

Des causes multiples à prendre en considération

La chute peut être causée par de nom-breux facteurs. « Certains sont direc-tement liés à la personne. On peut évoquer les troubles de l’équilibre et

de la marche, l’âge ou une pathologie aigüe ou chronique », explique Maud Dumay. « D’autres facteurs sont dits socio-comportementaux. Ils ont trait à la prise de médicaments, à la peur de chuter, à la sédentarité, à la dénu-trition chronique ou encore à la con-sommation d’alcool. Enfin, l’environ-nement immédiat du patient joue un rôle non-négligeable. » Il faut égale-ment parler, ici, de l’aménagement du domicile ou des dangers extéri-eurs. La présence d’un tapis de sol, un passage étroit entre des meubles, des escaliers trop raides, un câble apparent ou le manque de lumino-sité sont autant d’éléments qui aug-mentent inévitablement les risques d’accident.

Si l’on associe souvent chute et frac-ture du col du fémur, celle-ci reste peu fréquente. Ses conséquences, par contre, sont très graves. 25% des

patients victimes d’une telle fracture décèdent dans les six mois, tandis que 50% en gardent de sérieuses séquel-les. Par ailleurs, une maladie comme l’ostéoporose, si elle n’est pas une cause directe de chute, provoque une diminution de la densité osseuse et augmente le risque de fracture.

Seulement 5 à 10% des chutes nécessitent une intervention médicale ou chirurgicale.

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bonjour n°6 septembre 2015

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Dossier

Un sujet tabou difficile à aborder

Phénomène fréquent, la chute reste un sujet tabou pour bon nombre de personnes. Les jeunes pensionnés ne se sentent pas concernés, tandis que les personnes plus âgées préfèrent occulter tout danger. « Effectivement, la chute est un sujet tabou. Une chute met en évidence une diminu-tion des compétences. Elle peut être perçue comme une dégradation. Elle est liée à une crainte de l’instituti-onnalisation, à une peur d’intrusion dans la vie quotidienne. Dès lors, le « chuteur » a tendance à cacher, à ne pas dire, à minimiser… Il est sou-vent nécessaire d’ouvrir le dialogue suite à l’observation d’une anoma-lie au niveau de la démarche ou d’un autre détail éveillant la suspicion. Il faut permettre au client de se con-fier sans crainte, sans aucun juge-ment, par une écoute active et bien-veillante de tous les intervenants, qu’ils soient kinésithérapeutes, ergo-thérapeutes, psychologues, infirmiers ou aides-soignants ou autres. Pour ma part, le dialogue est et reste un moyen pédagogique très important pour la suite. »

Pouvoir prendre conscience de ses faiblesses est la première étape d’un processus d’accompagnement plus large. Cela permet au patient d’ac-cepter son état de relative fragilité et d’envisager la chute, non pas comme une fatalité, mais comme un risque à apprivoiser, voire une peur à dompter.

De la prévention à l’accompagnement ciblé

Dans un but préventif, un pro-gramme de dépistage des chutes a été validé dans plusieurs pays comme le Québec, la France ou la Belgique. Aujourd’hui, le réseau HELP s’inspire de ses initiatives. Un dépistage prend en compte la peur de chuter, le nom-bre de chutes dans l’année et un test rapide et simple comme le « Timed up and go » est effectué. A travers cet exercice, le sujet doit se lever d’un fauteuil avec accoudoirs, marcher sur une distance de 3 mètres, faire demi-tour, revenir vers le fauteuil, en faire le tour et s’asseoir. « Si le dépistage est positif, il devient nécessaire de disposer d’une vue globale du pati-ent, de renseigner tous les facteurs de risques et d’agir de façon ciblée et efficace », constate Maud Dumay. La faisabilité du « Timed up and go »

Au-delà de la prévention, la technologie peut aussi venir en aide aux clients qui sont sujets aux chutes.

au domicile n’est pas toujours pos-sible. C’est pourquoi le recensement des facteurs de risque est tout aussi important.

Au niveau du réseau HELP, une for-mation spécifique se met en place pour tous les collaborateurs afin de les sensibiliser aux facteurs de ris-ques, de leur permettre de mieux les

déceler dans le but de pouvoir initier le dialogue avec les patients. « Un groupe de travail institutionnel a vu le jour avec le centre de convale-scence de Colpach, le CIPA de Jun-glinster et le service d’aides et de soins à domicile de la Croix-Rouge. Son objectif est de responsabili-ser les clients et de mettre en place des actions concrètes pour répondre aux besoins spécifiques de chacun

d’entre eux. » Dans le futur, le pro-gramme PIED (Programme intégré d’équilibre dynamique), né au Qué-bec, va être mis en œuvre au niveau de la Croix-Rouge. Son objectif est d’améliorer l’équilibre et la force de participants, d’apprendre à se rele-ver du sol, de donner des conseils sur l’aménagement du domicile et à adopter des comportements, d’améli-orer le sentiment d’efficacité person-nelle (confiance) à l’égard des chutes et de maintenir une pratique régu-lière d’activités physiques.

Au-delà de la prévention, la techno-logie peut aussi venir en aide aux clients qui sont sujets aux chutes. Le système d’appel et d’aide à distance HELP24 permet à la personne âgée de continuer à vivre en toute autono-mie à son domicile, en se sentant en sécurité et en rassurant ses proches. « Ce système peut être couplé à un bra-celet antichute », explique Josy Hol-cher, chargé de direction de Help24. « Lorsque la personne tombe, ce bra-celet le détecte. Si, 10 à 15 secon-des après la chute, la personne ne fait pas de mouvement, le système déclenche une alarme chez un opéra-teur et un contact vocal est automa-tiquement établi avec la personne.

Sprechen Sie offen mit Ihren Angehörigen von der Sturzgefahr, es soll kein Tabuthema bleiben.

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Dites non aux chutes !

Par contre, si la personne peut bou-ger, il lui faudra actionner elle-même le bouton d’appel du bracelet anti-chute, ce fameux bouton rouge dont les bracelets Help24 sont dotés. Sur environ 700 clients équipés dispo-sant de l’aide à distance HELP24, 80 disposent d’un bracelet antichute. » Il s’agit d’une aide purement technique et le but de ce dispositif est de pou-voir apporter une assistance rapide, et d’éviter ainsi que la personne ne reste étendue de nombreuses heu-res. Au-delà de 65 ans, personne n’est à l’abri d’une mauvaise chute. Autant le savoir, l’accepter et se faire accompagner.

Quelques conseils pour éviter les chutes

Puisque les chutes surviennent majoritairement au domicile, il est indispensable de réaménager son intérieur :

» Enlevez les meubles et les objets encombrants.

» Dégagez les couloirs et les endroits de passages obligés.

» Remplacez les tapis glissants par des tapis antidérapants.

» Faites poser des barres d’appui dans les toilettes et dans la salle de bains.

» Multipliez les sources d’éclairage pour limiter au maximum les zones d’ombre.

» Installez une veilleuse entre la chambre et les toilettes.

» Rangez les fils électriques afin de ne pas risquer de vous prendre les pieds dedans.

» Rangez les objets dont vous avez régulièrement besoin à portée de main afin de ne pas avoir à faire de mouvements risqués pour les attraper.

Il est également conseillé :

» D’éviter l’alcool qui favorise la perte d’équilibre.

» De boire au minimum 1,5 litre par jour (sauf en cas de restriction hydrique).

» De faire de l’exercice physique régulier.

» D’éviter les réactions impulsives, comme par exemple se précipiter pour ouvrir la porte.

» De ne pas hésiter à demander de l’aide pour accomplir certaines activités.

Un programme spécifique à l’Hôpital Intercommunal de SteinfortL’Hôpital Intercommunal de Steinfort dispose d’un Service de Rééducation Fon-ctionnelle gériatrique. Celui-ci dispense des soins et services de rééducation à des personnes atteintes d’une ou de plusieurs déficiences physiques à la suite d’une maladie ou d’un traumatisme, en vue d’un retour à domicile. Dans ce cadre, chaque samedi matin, un atelier est consacré à la chute. « Depuis plus de dix ans, par petits groupes de huit personnes, nous sensibilisons les person-nes âgées au risque de chute », explique Jean-Paul Chennaux, chef du plateau technique de l’hôpital. « Nous leur proposons un panel d’exercices d’équilibre ou encore de relevé de chute. Nous leur expliquons une technique pour leur

permettre de se relever seul. On parle des petites expériences de chacun. Le thérapeute présent partage son vécu et de petites anecdotes. L’important est de susciter le dialogue. On présente également le système HELP24 de détec-tion de chute. On le constate chaque semaine, les clients ont réellement peur de se retrouver au sol. Notre but est de leur donner la confiance et le courage nécessaires pour réagir au mieux. » Par cette action de sensibilisation, l’Hôpi-tal Intercommunal de Steinfort contribue à démystifier ce phénomène fréquent mais trop souvent occulté.