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Cas clinique Histiocytose X pulmonaire et hypothalamo-hypophysaire, diagnostiquée par biopsie cérébrale stéréotaxique C. Fournier 1 , A. Scherpereel 1 , I. Tillie-Leblond 1 , D. Dewailly 2 , S. Blond 3 , M.-M. Ruchoux 4 , J. Remy 5 , A.-B. Tonnel 1 1 Clinique des Maladies Respiratoires, CHRU de Lille, France. 2 Clinique d’Endocrinologie, CHRU de Lille, France. 3 Service de Neurochirurgie A, CHRU de Lille, France. 4 Service de Neuropathologie, CHRU de Lille, France. 5 Service de Radiologie, CHRU de Lille, France. Tirés à part : A.-B. Tonnel, Clinique des Maladies Respiratoires, Hôpital Calmette, 1, rue du Pr Leclerc, 59037 Lille Cedex, France. [email protected] Réception version princeps à la Revue : 20.12.2002. Retour aux auteurs pour révision : 20.03.2003. Réception 1 ère version révisée : 20.05.2003. Réception 2 e version révisée : 11.09.2003. Acceptation définitive : 08.10.2003. Résumé Introduction Malgré de nombreuses investigations approfon- dies, les localisations pulmonaires d’une histiocytose X peuvent parfois difficilement fournir le diagnostic de cette pathologie potentiellement multifocale. Cas clinique Nous rapportons le cas d’une patiente de 16 ans qui pose le problème d’une lésion hypothalamo-hypophysaire avec manifestations endocriniennes associée à une discrète dyspnée et à de modestes lésions micronodulaires excavées au scanner thoracique. Le diagnostic d’histiocytose X initialement évoqué est dans un premier temps écarté devant la négativité des examens complémentaires à visée pulmonaire et la régression spontanée des images tomodensitométriques thoraciques. Il est reposé devant l’aspect histologique des biopsies cérébrales sté- réotaxiques réalisées devant l’augmentation de taille de la lésion cérébrale. Conclusions Ce cas clinique souligne la possibilité d’une évolu- tion dissociée des lésions thoraciques et cérébrale d’histiocytose X, et confirme l’intérêt d’un examen anatomopathologique extra- thoracique dans certaines situations diagnostiques difficiles d’une histiocytose X d’expression multifocale. Mots-clés : Histiocytose X v Poumon v Hypophyse v Diabète insipide v Biopsie cérébrale. Rev Mal Respir 2004 ; 21 : 141-5 Rev Mal Respir 2004 ; 21 : 141-5 © 2004 SPLF, tous droits réservés 141

Histiocytose X pulmonaire et hypothalamo-hypophysaire, diagnostiquée par biopsie cérébrale stéréotaxique

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Page 1: Histiocytose X pulmonaire et hypothalamo-hypophysaire, diagnostiquée par biopsie cérébrale stéréotaxique

Cas clinique

Histiocytose X pulmonaire et hypothalamo-hypophysaire,diagnostiquée par biopsie cérébrale stéréotaxique

C. Fournier1, A. Scherpereel1, I. Tillie-Leblond1, D. Dewailly2,

S. Blond3, M.-M. Ruchoux4, J. Remy5, A.-B. Tonnel1

1 Clinique des Maladies Respiratoires, CHRU de Lille, France.2 Clinique d’Endocrinologie, CHRU de Lille, France.3 Service de Neurochirurgie A, CHRU de Lille, France.4 Service de Neuropathologie, CHRU de Lille, France.5 Service de Radiologie, CHRU de Lille, France.

Tirés à part : A.-B. Tonnel, Clinique des Maladies Respiratoires,Hôpital Calmette, 1, rue du Pr Leclerc, 59037 Lille Cedex, [email protected]

Réception version princeps à la Revue : 20.12.2002.Retour aux auteurs pour révision : 20.03.2003.Réception 1ère version révisée : 20.05.2003.Réception 2e version révisée : 11.09.2003.Acceptation définitive : 08.10.2003.

Résumé

Introduction Malgré de nombreuses investigations approfon-dies, les localisations pulmonaires d’une histiocytose X peuventparfois difficilement fournir le diagnostic de cette pathologiepotentiellement multifocale.

Cas clinique Nous rapportons le cas d’une patiente de 16 ansqui pose le problème d’une lésion hypothalamo-hypophysaireavec manifestations endocriniennes associée à une discrètedyspnée et à de modestes lésions micronodulaires excavées auscanner thoracique. Le diagnostic d’histiocytose X initialementévoqué est dans un premier temps écarté devant la négativité desexamens complémentaires à visée pulmonaire et la régressionspontanée des images tomodensitométriques thoraciques. Il estreposé devant l’aspect histologique des biopsies cérébrales sté-réotaxiques réalisées devant l’augmentation de taille de la lésioncérébrale.

Conclusions Ce cas clinique souligne la possibilité d’une évolu-tion dissociée des lésions thoraciques et cérébrale d’histiocytoseX, et confirme l’intérêt d’un examen anatomopathologique extra-thoracique dans certaines situations diagnostiques difficilesd’une histiocytose X d’expression multifocale.

Mots-clés : Histiocytose X v Poumon v Hypophyse v Diabèteinsipide v Biopsie cérébrale.

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Endocrine and pulmonary histiocytosis: a casediagnosed through stereotoxic biopsyC. Fournier, A. Scherpereel, I. Tillie-Leblond, D. Dewailly,S. Blond, M.-M. Ruchoux, J. Remy, A.-B. Tonnel

Summary

Introduction Despite intensive investigation, the pulmonarylesions of Langerhans cell histiocytosis can sometimes provedifficult to yield a diagnosis of this potentially multi-focal disease.

Case report We report the case of a sixteen year old woman,who presented with a hypothalamo-hypophyseal mass associ-ated with endocrine clinical signs, dyspnoea, and micro-nodularpulmonary lesions on computerised tomography. A Langerhanscell histiocytosis was initially suspected, but then thought unlikelyin the light of negative pulmonary investigations and spontaneousregression of the pulmonary lesions. However, an increase in thesize of the cerebral mass prompted a brain biopsy finally con-firming the diagnosis of Langerhans cell histiocytosis.

Conclusions This case report identifies a possible dissociationbetween the clinical courses of cerebral and pulmonary Langer-hans cell histiocytosis, and confirms the usefulness of extra-thoracic biopsies in making a diagnosis on the disseminated formof the disease.

Key-words: Langerhans Cell Histiocytosis v Lung v Hypophysis v

Diabetes Insipidus v Brain Biopsy.

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[email protected]

Introduction

Les rares manifestations extra-respiratoires de l’histiocy-tose X sont dominées par une symptomatologie endocri-nienne, dont la plus fréquente est le diabète insipide [1]. Nousrapportons l’observation d’une jeune patiente présentant unemasse hypothalamo-hypophysaire évolutive infiltrant la tigepituitaire associée à des opacités micronodulaires excavées dis-séminées régressant spontanément sur le scanner thoracique,chez laquelle le diagnostic d’histiocytose X a été porté grâce à laréalisation de biopsies cérébrales stéréotaxiques.

Observation

Mlle D.O. âgée de 16 ans est hospitalisée pour biland’une dyspnée associée à un syndrome polyuro-polydipsique.Ses antécédents sont marqués par une appendicectomie, il n’ya pas d’intoxication tabagique, il s’agit d’un sujet Caucasien.L’histoire de la maladie débute en février 1999 par une amé-norrhée et une galactorrhée brutales associées à un syndromepolyuro-polydipsique, des céphalées fronto-temporales etrétro-orbitaires, et une asthénie importante. Le dosage de pro-lactinémie est élevé à 89 ng/ml (normale ≤ 25ng/ml). Lapatiente est mise sous traitement hormonal par progestérone etles cycles menstruels réapparaissent. En septembre 1999, lorsd’une hospitalisation en endocrinologie, le diagnostic de dia-bète insipide d’origine centrale est posé sur des argumentsclinico-biologiques. Une IRM cérébrale retrouve une lésioninfiltrative du plancher du 3e ventricule et de la tige pituitaire.Les radiographies et la scintigraphie osseuses sont normales. Laradiographie thoracique est normale mais la survenue d’unediscrète dyspnée à l’effort de stade 1 (de la classificationNYHA) fait pratiquer des examens complémentaires. Lesexplorations fonctionnelles respiratoires retrouvent une dis-tension pulmonaire modérée avec élévation du volume rési-duel, de la capacité résiduelle fonctionnelle et de la capacitépulmonaire totale respectivement à 147 %, 121 % et 109 %des valeurs théoriques (Tables « CECA » [2]). Les autres para-mètres ventilatoires (Volume Expiré Maximal Seconde, Capa-cité vitale, débits des petites voies aériennes) sont normaux. Lagazométrie artérielle en air ambiant et le transfert dumonoxyde de carbone sont normaux. Le scanner thoraciqueen coupes fines montre une dissémination de faible profusiondans l’ensemble des 2 champs pulmonaires de micronodulesdont certains sont le siège d’une excavation centrale, et demicrokystes (fig. 1). Bien qu’en petit nombre (n = 6), cesnodules sont compatibles avec le diagnostic de granulomatoselangerhansienne ou histiocytose X. Il n’y a pas d’adénoméga-lies médiastino-hilaires. L’endoscopie bronchique est macros-copiquement normale. Le lavage broncho-alvéolaire (LBA)montre une cellularité normale à 80 000 éléments/ml avec 72% de macrophages alvéolaires, 27 % de lymphocytes (rapportCD4/CD8 = 3), 1 % de polynucléaires neutrophiles et

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l’absence de cellules de Langerhans (CD1a +). Sur le planbiologique, seule l’enzyme de conversion de l’angiotensine 2est élevée à 91UI/L (normale : 25 à 55UI/L), les autres dosagesétant normaux. Ces données quelque peu divergentes fonthésiter entre le diagnostic d’histiocytose X et une possiblesarcoïdose d’expression neurologique et pulmonaire. A noterque sur le plan clinique, aucune autre localisation classique deces deux maladies n’est retrouvée (notamment cutanée, oph-talmologique et, osseuse). Des biopsies pulmonaires trans-bronchiques retrouvent un tissu pulmonaire de morphologienormale. Le caractère limité des lésions pulmonaires ne fait pasopter pour une biopsie pulmonaire chirurgicale. La scintigra-phie au gallium ne retrouve aucune fixation anormale nimédiastinale, ni dans les régions salivaires ou lacrymales. Lediagnostic reste donc incertain et la patiente continue à êtresuivie.

Sur le plan endocrinologique, il persiste un diabète insi-pide bien équilibré par le traitement, la prolactine est revenueà la normale. Les céphalées persistent et nécessiteront unenouvelle hospitalisation six mois après le début des symptô-mes. L’IRM cérébrale montre alors une discrète augmentationde volume de la lésion infiltrative du 3e ventricule et de la tigepituitaire. Les dosages hormonaux soulignent une insuffisancehypophysaire avec insuffisance corticotrope nette et insuffi-sance thyréotrope débutante. A noter que le taux de l’enzymede conversion de l’angiotensine est cette fois normal. Le dia-gnostic de cette lésion hypophysaire avec lésions pulmonairesn’est toujours pas posé ; la patiente est mise sous hormonothé-rapies substitutives et surveillée tous les trois mois. Dans lecadre de cette surveillance, l’IRM cérébrale réalisée au dou-zième mois de l’évolution relève une augmentation de la lésion

du 3e ventricule infiltrant la tige pituitaire dont les contoursdeviennent plus flous et qui prend nettement le contraste aprèsinjection de gadolinium (fig. 2). L’évolution est marquée parl’apparition d’une fièvre prolongée dont l’origine centrale(atteinte hypothalamique) est évoquée. L’indication d’unebiopsie cérébrale stéréotaxique est retenue sur l’évolution de lalésion (suspicion de tumeur germinale ectopique). L’étude duliquide céphalo-rachidien est normale. L’étude anatomo-pathologique des biopsies cérébrales retrouve « un tissu céré-bral totalement remanié et constitué par de nombreuses struc-tures vasculaires à paroi remaniée et infiltrée par des élémentsinflammatoires polymorphes dont des éléments histiocytairesCD1a positif correspondant à des cellules de Langerhans ».

Le diagnostic est donc celui d’une histiocytose X localiséeau plancher du 3e ventricule compliquée d’insuffisance corti-cotrope, thyréotrope, gonadotrope, d’un diabète insipide, etde signes hypothalamiques, nécessitant une opothérapie subs-titutive, associée à des lésions pulmonaires discrètes et peusymptomatiques, qui avaient initialement attiré vers le dia-gnostic d’histiocytose X mais n’avaient pu être confirmées.Après avis multidisciplinaires, une chimiothérapie est réaliséeet permet une diminution de la lésion cérébrale. Actuellementla patiente présente une évolution favorable.

Discussion

Le diagnostic final retenu dans cette observation est l’his-tiocytose X. Ce diagnostic avait été évoqué dès le début de la

Fig. 1.Scanner thoracique – coupes parenchymateuses avec injection deproduit de contraste. Présence de 2 micronodules lobaire inférieurgauche le long de la scissure dont un est excavé.

Fig. 2.Imagerie cérébrale par résonance magnétique – séquence T1 avecinjection de gadolinium. Lésion infiltrative de la tige pituitaire dontles contours sont flous et qui prend nettement le contraste aprèsinjection de gadolinium.

Histiocytose X pulmonaire et endocrinienne

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maladie sur des anomalies tomodensitométriques pulmonairesmais ni le lavage broncho-alvéolaire, ni des biopsies transbron-chiques de qualité n’avaient permis de le confirmer, ce quiconfirme la faible sensibilité de ces examens dans cette indica-tion. La biopsie pulmonaire chirurgicale ne sera pas retenuecompte tenu de la régression spontanée des images radiologi-ques thoraciques. Il est surprenant de noter l’existence d’unedistension thoracique sur les épreuves fonctionnelles respira-toires sans trouble ventilatoire obstructif associé ; les lésionsscannographiques étant de plus très discrètes.

Ce sont les manifestations endocrinologiques, avec ini-tialement le diabète insipide et l’hyperprolactinémie puis lasurvenue un an plus tard de l’insuffisance anté-hypophysaire etde l’atteinte hypothalamique, qui vont dominer le tableauclinique, permettant d’aboutir au diagnostic d’histiocytose X.En effet, c’est devant l’augmentation de taille de la lésioncérébrale que des biopsies sous contrôle stéréotaxique sonteffectuées apportant la preuve anatomopathologique d’un gra-nulome à cellules de Langerhans. On note que, parallèlement àcette aggravation cérébrale, est observé une régression sponta-née des lésions pulmonaires. L’amélioration pulmonaire spon-tanée avec diminution des symptômes, régression des opacitésradiologiques micronodulaires, et correction de la fonctionrespiratoire est relativement fréquente dans les histiocytoses Xconfinées au parenchyme pulmonaire (30 à 50 % des cas).Mais cette évolution spontanée favorable reste exceptionnelleen cas d’histiocytose X disséminée, et rarissime en casd’atteinte endocrinienne hypothalamo-hypophysaire [3]. Deplus, à notre connaissance, une évolution dissociée thoracique/cérébrale n’est pas décrite à ce jour.

La granulomatose à cellules de Langerhans ou histiocy-tose X regroupe diverses granulomatoses d’étiologie impréciseréunies sur la base d’une lésion anatomopathologique origi-nale : le granulome à cellules de Langerhans [4]. Les organesatteints sont le poumon, les os, et la peau. Le tabagisme est unfacteur de risque reconnu [5]. L’histiocytose X pulmonairetouche plutôt l’homme jeune avec un tableau clinique le plussouvent pauvre avec peu de symptômes mais pouvant associerune toux, une dyspnée, un pneumothorax inaugural (qui n’esten pratique retrouvé que dans 10 à 20 % des cas) ; et unsyndrome radiologique associant des micronodules et desmicrokystes bilatéraux (lié à des lésions bronchiolaires avecfragilisation des parois et cavitation). Le granulome éosinophi-lique osseux atteint l’adolescent et l’adulte jeune et entraînel’apparition de lacunes des os plats et des vertèbres. La maladiede Letterer-Siwe est une forme disséminée aiguë qui touche lesenfants de moins de deux ans et se manifeste par un syndromegénéral fébrile et anémique avec hépato-splénomégalie, et desatteintes cutanées, osseuses et pulmonaires diffuses. Enfin, lamaladie de Hand-Schuller-Christian se voit classiquementdans la seconde enfance et associe la triade diabète insipide,exophtalmie, et lacunes osseuses crâniennes. Parallèlement à

ces tableaux « classiques », d’autres atteintes sont possibles etnotamment des atteintes endocriniennes [4, 6].

Dans l’observation présentée, on ne retrouve pas la triadede Hand-Schuller-Christian, mais le tableau clinique d’unehistiocytose X localisée au plancher du 3e ventricule et surtoutà la tige pituitaire se révélant par un diabète insipide est connudes endocrinologues, en particulier chez les enfants mais éga-lement de façon plus exceptionnelle chez l’adulte [6]. Elle peutêtre évoquée uniquement sur les données de l’IRM cérébralequi prend alors une grande valeur et permet d’envisager lediagnostic sans preuve anatomo-pathologique devant un dia-bète insipide d’étiologie inconnue [7, 8]. Dans le cas présent,l’évolutivité de la lésion cérébrale rendait nécessaire la biopsiestéréotaxique afin d’éliminer une pathologie tumorale tellequ’un germinome ectopique ou un astrocytome de bas grade.Ceci d’autant plus que les anomalies pulmonaires étaient ennette régression dans le même intervalle.

Dans les localisations hypothalamo-hypophysaires del’histiocytose X, le diabète insipide est la manifestation endo-crinienne la plus fréquemment retrouvée (40 % des cas) [1].L’apparition dans le cours évolutif de la maladie d’autres ano-malies hormonales est moins fréquente, mais possible et clas-sique. On peut observer une hyperprolactinémie, une insuffi-sance en hormone de croissance, une insuffisancethyroïdienne, un hypogonadisme avec déficit en LH-FSH,une insuffisance corticotrope, voire un panhypopituitarisme.Des signes d’atteinte hypothalamique sont également fré-quents [2, 9]. Notre patiente présentait une atteinte panhypo-pituitaire associée à une atteinte hypothalamique.

Devant un diabète insipide central associé à des lésionspulmonaires, d’autres étiologies peuvent en théorie être discu-tées : des causes infectieuses (tuberculose, pneumocoque, bru-cellose, yersiniose...), tumorales (métastases de cancerbroncho-pulmonaire, cancer à petites cellules, lymphome) etgranulomateuses avec en premier lieu la sarcoïdose. Le dia-gnostic de sarcoïdose a ainsi été envisagé dans notre observa-tion. Le lavage broncho-alvéolaire présentait une formulecellulaire compatible avec ce diagnostic (discrète hyperlym-phocytose avec prédominance de lymphocytes CD4+),l’enzyme de conversion de l’angiotensine (ECA) était augmen-tée à plusieurs reprises et il existe des formes pseudo-tumoralesde neurosarcoïdose donnant un tableau similaire avec peu designes extra-cérébraux et notamment peu de signes pulmonai-res [10]. Mais l’ECA est un dosage peu spécifique, parfoisaugmenté au cours de l’histiocytose X. De plus, bien que lelavage broncho-alvéolaire dans l’histiocytose X pulmonairemontre classiquement une hypercellularité à prédominancemacrophagique avec mise en évidence d’un taux de cellulesCD1a positives (cellules de Langerhans) supérieur à 5 %,l’augmentation des lymphocytes n’est pas rare, même si l’onobserve alors plutôt une diminution du rapport CD4/CD8.Ces anomalies du LBA sont plus fréquentes chez les sujetsfumeurs, mais on les retrouve également chez les non fumeurs

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et notamment chez des enfants avec des granulomatoses lan-gerhansiennes multifocales où elles peuvent même précéder lessymptômes pulmonaires [11]. Enfin, les lésions pulmonairesvisualisées au scanner thoracique étaient plus évocatrices d’unehistiocytose X que d’une sarcoïdose, notamment le caractèreexcavé de certains des nodules qui est très rare dans la sarcoï-dose. Les anomalies radiologiques décrites au cours de l’histio-cytose X pulmonaire montrent classiquement un syndromemicronodulaire et/ou microkystique d’expression variable. Latomodensitométrie, plus performante, peut montrer des kys-tes de taille variable mais volontiers petits, ronds et isolés, àparoi fine ou épaisse, qui peuvent confluer et réaliser un aspecten rayon de miel évocateur, des nodules pleins ou excavés(micronodules, nodules, ou macronodules) centrolobulaires ;des opacités linéaires, réticulaires ou en verre dépoli (plus rare),prédominant dans les zones moyennes et inférieures des pou-mons, volontiers bilatérales. L’ancienneté de la pathologiedétermine des aspects très différents selon les patients avecpossibilités de formes pseudo-tumorales liées à la confluencedes lésions kystiques. Cette sémiologie scannographique n’estcependant pas spécifique de l’histiocytose X, mais devant uncontexte clinique évocateur, elle peut apporter des argumentsforts en faveur du diagnostic.

Conclusion

Cette observation rapporte le cas d’une atteinte pulmo-naire et cérébrale de nature granulomateuse langerhansienne.Elle illustre la possible dissociation entre l’évolution cérébraleet thoracique de cette maladie. La régression des micronodulespulmonaires associée en parallèle à une majoration de la lésioncérébrale a rendu nécessaire la confirmation diagnostique parbiopsie cérébrale stéréotaxique. La négativité du LBA et desbiopsies pulmonaires transbronchiques ne doit donc pas fairerécuser définitivement le diagnostic d’histiocytose X.

Références

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