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À LIRE, VOIR, ÉCOUTER Med Pal 2004; 3: 157-160 © Masson, Paris, 2004, Tous droits réservés 159 www.e2med.com/mp Une superbe écriture qui nous rend audi- ble ce cri qui pourrait très bien raisonner à nos oreilles pour de toutes autres rai- sons mais avec les mêmes mécanismes. Eux les vaches, nous les porcs Carmen Boullosa Éditions du serpent à plumes, 2003. ISBN 2-84261-364-3. (17 ) Le titre est ambigu, il interroge. Il pourrait laisser croire que ce livre se veut un pa- rallèle entre féminin (les vaches) et mas- culin (les porcs). Il n’en est rien. Il s’agit, en fait, d’une histoire effroyable de la flibuste aux Caraïbes au temps des marchands d’esclaves et des voleurs de la mer. Un tableau cruel et sans détour des exactions des flibustiers : assassinats, viols, vols, destructions. Imbibés d’alcool, certains transcendent leurs attaques et considèrent que tout est à eux. L’arrivée d’esclaves blanches, implantées là par le gouverneur qui cherchait à les sédentariser, va mettre fin à cette aven- ture et faire changer la cruauté de main. Un roman troublant fort bien écrit qui peut nous faire déceler jusqu’où l’homme peut aller dans l’horreur sous des prétex- tes parfois « bienséants ». Femmes extrêmes Françoise Bott Éditions Le Cherche Midi, 2003. ISBN 2-74910-110-7. (15 ) Des histoires courtes, faciles et agréables à lire. La vie de femmes connues et de femmes moins connues, sans cliché, sans a priori, sans rajout. On pourra s’assurer que Louise Michel doit évoquer en nous bien plus qu’une simple station de métro de la capitale française. Les matins bleus Dominique Dussidour Éditions La Table ronde., 2003. ISBN 2-7103-2511-X. (13,60 ) Il s’agit de l’histoire d’un amour unique. Pas d’un amour à l’eau de rose, un amour décrit comme une association aseptisée. Au travers des mots et des expressions, cet amour nous apparaît comme un amour profond, comme un drame de la mort et de la séparation père, mère, en- fant. L’amour exprimé par ces mots de- vient, au fil de la lecture, une page d’amour intégral. Une écriture superbe, rare et si agréable à lire. Histoire Histoire du métissage Nelly Schmidt Éditions de la Martinière, 2003. ISBN 2-7324-3047-1. (35 ) Ce superbe ouvrage retrace l’histoire de l’aventure humaine du métissage. On y retrouve les influences de périodes aussi diverses et traumatisantes que les conquê- tes, les colonisations et l’esclavage mar- quées par la violence, le refus de la diffé- rence, le racisme, la haine mais aussi l’amour et la reconnaissance de l’autre tel qu’il est pour lui-même. Le métis a longtemps été le fruit d’un amour réprouvé par la masse des bien pensants, des pensants justes. Aujourd’hui, le métissage est symbole de l’interculturalité, de l’universalité de l’hu- manité. Nul homme n’est inférieur à un autre. Ce livre contenant un texte fort érudit et une riche iconographie mérite d’être lu, d’être diffusé tant pour son contenu que pour l’espoir qu’il véhicule d’un monde ou chaque être humain signifiera, au-delà de lui-même, que son humanité ne lui vient pas que de son clan, de sa race mais bien de sa seule présence en tant qu’être. Le phénomène Cathare René Nelli Éditions Privat, 2003. ISBN 2-7089-5363-X. (15 ) L’auteur essaie de reconstituer l’essentiel de la philosophie hétérodoxe. Il essaie de le faire en profondeur sans se limiter à l’interprétation au « pied de la lettre ». Il s’agit d’un précis sur le catharisme pour qui veut l’étudier et l’approfondir et non un ouvrage d’initiation pour le néophyte qui devra aller chercher ailleurs les bases historiques et culturelles ailleurs pour bé- néficier de toute l’érudition qui nous est ici offerte. Divers Le passager. Tome I : La traversée des nuages Vink Éditions Dargaud, 2003. ISBN 2-205-05362-0. (9,45 ) Un graphisme particulier que l’on pourrait qualifier de néoréaliste, un scénario peu ordinaire font l’originalité de cet album dont l’auteur, vietnamien, a su conserver ses racines culturelles tout en témoignant de sa parfaite intégration au sein de notre mentalité. On y trouve le rêve et la poésie de l’Asie. L’idée de « race » dans les sciences humaines et la littérature (XVIII e et XIX e siècles) Sous la direction de Sarga Moussa Éditions de L’Harmattan, Collection Histoire des Sciences Humaines, 2003. ISBN 2-7475-4350-1. (38 ) Ce volume rassemble les actes du colloque international de Lyon qui s’est tenu en novembre 2000 sur la construction de la notion de race. On peut y découvrir la fa- çon dont le discours sur le sujet de la race (et ses conséquences historiques) s’est dé- veloppé pendant ces deux siècles. Le ra- cisme, en tant qu’idéologie, est un fruit de ce XIX e siècle où bien des excès fondés sur un savoir, une pseudo science univer- sels et définitifs ont amené des esprits bien faibles (mais se pensant si puissants) à la dérive du non sens, voire de l’imbé- cillité en terme de raison et d’intelligence ne serait-ce que du sens des mots. À lire impérativement, et certains y ga- gneraient à en prendre de la graine pour pouvoir comprendre que leur savoir, leur science n’est que détail dans une foulti- tude de penser, de dire et de croire et que seule la tolérance et l’ouverture au non soi peuvent permettre un véritable dialo- gue et donc nous ouvrir la porte d’un réel progrès. Celui qui nous a dit qu’il n’était pas de science sans conscience voit à tra-

Histoire

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À L I R E , V O I R , É C O U T E R

Med Pal 2004; 3: 157-160

© Masson, Paris, 2004, Tous droits réservés

159

www.e2med.com/mp

Une superbe écriture qui nous rend audi-ble ce cri qui pourrait très bien raisonner à nos oreilles pour de toutes autres rai-sons mais avec les mêmes mécanismes.

E

ux les vaches, nous les porcs

Carmen Boullosa

Éditions du serpent à plumes, 2003.

ISBN 2-84261-364-3. (17

)

Le titre est ambigu, il interroge. Il pourrait laisser croire que ce livre se veut un pa-rallèle entre féminin (les vaches) et mas-culin (les porcs). Il n’en est rien.Il s’agit, en fait, d’une histoire effroyable de la flibuste aux Caraïbes au temps des marchands d’esclaves et des voleurs de la mer. Un tableau cruel et sans détour des exactions des flibustiers : assassinats, viols, vols, destructions.Imbibés d’alcool, certains transcendent leurs attaques et considèrent que tout est à eux.L’arrivée d’esclaves blanches, implantées là par le gouverneur qui cherchait à les sédentariser, va mettre fin à cette aven-ture et faire changer la cruauté de main.Un roman troublant fort bien écrit qui peut nous faire déceler jusqu’où l’homme peut aller dans l’horreur sous des prétex-tes parfois « bienséants ».

F

emmes extrêmes

Françoise Bott

Éditions Le Cherche Midi, 2003.

ISBN 2-74910-110-7. (15

)

Des histoires courtes, faciles et agréables à lire. La vie de femmes connues et de femmes moins connues, sans cliché, sans

a priori

, sans rajout. On pourra s’assurer que Louise Michel doit évoquer en nous bien plus qu’une simple station de métro de la capitale française.

L

es matins bleus

Dominique Dussidour

Éditions La Table ronde., 2003.

ISBN 2-7103-2511-X. (13,60

)

Il s’agit de l’histoire d’un amour unique. Pas d’un amour à l’eau de rose, un amour décrit comme une association aseptisée. Au travers des mots et des expressions, cet amour nous apparaît comme un amour profond, comme un drame de la

mort et de la séparation père, mère, en-fant. L’amour exprimé par ces mots de-vient, au fil de la lecture, une page d’amour intégral.

Une écriture superbe, rare et si agréable à lire.

Histoire

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istoire du métissage

Nelly Schmidt

Éditions de la Martinière, 2003.

ISBN 2-7324-3047-1. (35

)

Ce superbe ouvrage retrace l’histoire de l’aventure humaine du métissage. On y retrouve les influences de périodes aussi diverses et traumatisantes que les conquê-tes, les colonisations et l’esclavage mar-quées par la violence, le refus de la diffé-rence, le racisme, la haine mais aussi l’amour et la reconnaissance de l’autre tel qu’il est pour lui-même.

Le métis a longtemps été le fruit d’un amour réprouvé par la masse des bien pensants, des pensants justes. Aujourd’hui, le métissage est symbole de l’interculturalité, de l’universalité de l’hu-manité. Nul homme n’est inférieur à un autre.

Ce livre contenant un texte fort érudit et une riche iconographie mérite d’être lu, d’être diffusé tant pour son contenu que pour l’espoir qu’il véhicule d’un monde ou chaque être humain signifiera, au-delà de lui-même, que son humanité ne lui vient pas que de son clan, de sa race mais bien de sa seule présence en tant qu’être.

L

e phénomène Cathare

René Nelli

Éditions Privat, 2003. ISBN 2-7089-5363-X.

(15

)

L’auteur essaie de reconstituer l’essentiel de la philosophie hétérodoxe. Il essaie de le faire en profondeur sans se limiter à l’interprétation au « pied de la lettre ». Il s’agit d’un précis sur le catharisme pour qui veut l’étudier et l’approfondir et non un ouvrage d’initiation pour le néophyte qui devra aller chercher ailleurs les bases historiques et culturelles ailleurs pour bé-

néficier de toute l’érudition qui nous est ici offerte.

Divers

L

e passager. Tome I : La traversée des nuages

Vink

Éditions Dargaud, 2003. ISBN 2-205-05362-0.

(9,45

)

Un graphisme particulier que l’on pourrait qualifier de néoréaliste, un scénario peu ordinaire font l’originalité de cet album dont l’auteur, vietnamien, a su conserver ses racines culturelles tout en témoignant de sa parfaite intégration au sein de notre mentalité.

On y trouve le rêve et la poésie de l’Asie.

L’

idée de « race » dans les sciences humaines et la littérature (

XVIII

e

et

XIX

e

siècles)

Sous la direction de Sarga Moussa

Éditions de L’Harmattan, Collection Histoire

des Sciences Humaines, 2003.

ISBN 2-7475-4350-1. (38

)

Ce volume rassemble les actes du colloque international de Lyon qui s’est tenu en novembre 2000 sur la construction de la notion de race. On peut y découvrir la fa-çon dont le discours sur le sujet de la race (et ses conséquences historiques) s’est dé-veloppé pendant ces deux siècles. Le ra-cisme, en tant qu’idéologie, est un fruit de ce XIX

e

siècle où bien des excès fondés sur un savoir, une pseudo science univer-sels et définitifs ont amené des esprits bien faibles (mais se pensant si puissants) à la dérive du non sens, voire de l’imbé-cillité en terme de raison et d’intelligence ne serait-ce que du sens des mots.

À lire impérativement, et certains y ga-gneraient à en prendre de la graine pour pouvoir comprendre que leur savoir, leur science n’est que détail dans une foulti-tude de penser, de dire et de croire et que seule la tolérance et l’ouverture au non soi peuvent permettre un véritable dialo-gue et donc nous ouvrir la porte d’un réel progrès. Celui qui nous a dit qu’il n’était pas de science sans conscience voit à tra-