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ÉDITORIAL Médecine palliative 228 N° 5 – Octobre 2005 Med Pal 2005; 4: 228 © Masson, Paris, 2005, Tous droits réservés Hommage à François Boureau Marcel-Louis Viallard, Évaluation Traitement de la douleur, Centre Hospitalier Bretagne Atlantique, Vannes. La nouvelle du décès brutal de notre ami et collègue François Boureau fait partie de ces nouvelles que jamais nous n’aurions voulu apprendre ni même imaginer. La disparition d’un esprit aussi généreux et brillant ne peut que nous atterrer. Que dire pour tenter d’exprimer l’in- dicible ? Comment parler de notre douleur, de notre peine alors qu’elle ne peut, ni ne doit, se faire plus ex- pressive et moins digne de celles de ses enfants, de sa compagne, de ses proches, de ses amis intimes ? Notre pensée va en priorité à ceux qu’il aimait et qui l’aiment aujourd’hui comme hier. Quel apaisement pouvons-nous prétendre apporter pour une telle blessure si ce n’est l’ex- pression d’une solidarité totale, d’une communion de peine, dans le silence d’une simple présence aux côtés de ceux qui étaient pour lui l’essentiel à n’en point dou- ter. Un homme rare, précieux tel un trésor par sa gen- tillesse, son ouverture d’esprit, son souci de l’autre, son intelligence, son humanité. François fait partie de ses hommes que l’on rencontre et auquel on reste attaché. Simplement car, pour nombre d’entre nous, il est, au delà de l’homme apprécié, un maître qui a su nous transmettre un savoir qu’il prétendait modeste mais dont l’étendue est impressionnante. Pionnier dans le développement de l’évaluation et le traitement de la douleur, dans l’ensei- gnement et la recherche dans ce domaine, il s’est égale- ment investi dans la prise en charge des soins palliatifs. Pour lui, il n’y avait pas de frontière puisqu’il s’agissait de répondre aux besoins des personnes qu’il soignait, en les considérant non pas comme des malades ni des por- teurs de symptômes mais bien comme des personnes souf- frantes. Son humanisme n’avait d’égal que la rigueur de son savoir, en permanence alimenté d’un travail de re- cherche dont la qualité est reconnue de tous les profes- sionnels impliqués dans ces champs de la médecine. François était aussi un homme plaisant, l’humour n’était jamais absent lors des échanges. Il fait partie de ces êtres qui nous démontrent, au quotidien, que science et conscience sont les deux bras de la pratique médicale. Il fut pour beaucoup d’entre nous l’initiateur dans la pratique médicale mais aussi un modèle dans la relation entre collègues. Son attachement à transmettre le souci du bien soi- gner, à considérer la personne malade dans sa globalité a fait de lui un des artisans du Diplôme d’Études Spéciali- sées Complémentaires (DESC) douleur et soins palliatifs. Récemment, il avait dirigé la rédaction d’un ouvrage de référence pour les étudiants (mais aussi pour les profes- sionnels en exercice). Nous n’en dirons pas plus sur l’en- semble de ses travaux scientifiques, cela est fait dans d’autres revues. Nous voulons nous attacher à saluer un homme bien, un homme de bien. Nous voulons également dire à son entourage proche qu’en nos cœurs et nos es- prits, il est une place particulière pour François, que rien ne pourra entamer, pas même le temps. Retirons nous pour laisser la place à ses proches. Ils savent que les amis de François sont à leurs côtés et pleu- rent, avec eux, un homme aimé, admiré et respecté. Suivons le chemin de nos temps séparés unis dans une douleur partagée. Le silence comme les mots ou les signes seront, pour longtemps, marqués de l’empreinte de cet homme qui nous a tant donné, tant appris et à qui peut- être n’avons-nous jamais pu dire combien il était impor- tant pour nous et combien ses messages humains, ses enseignements scientifiques perdureront, au delà de lui, à travers ce que nous allons tenter, tous ensemble, à notre place, de porter dans nos pratiques comme dans nos pen- sées. Cela se fera avec l’humilité et la discrétion des élèves qui veulent privilégier la fidélité à l’esprit du maître. Nous sommes en deuil. Puisse notre peine trouver apaisement dans cette fidélité à transmettre et développer encore l’œuvre de François. Puissions nous être pour ses enfants, son épouse et ses proches, de simples témoins du rayonnement de François mais aussi sources de réconfort. Viallard ML. Hommage à François Boureau. Med Pal 2005; 4: 228. Adresse pour la correspondance : Marcel-Louis Viallard, Unité Mobile de Soins Palliatifs, Consultation d’évaluation traitement de la douleur, Centre Hospitalier Bretagne Atlantique, 20, boulevard du Général Maurice Guillaudot, BP 70755, 56017 Vannes Cedex. e-mail : [email protected]

Hommage à François Boureau

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Page 1: Hommage à François Boureau

É D I T O R I A L

Médecine palliative

228

N° 5 – Octobre 2005

Med Pal 2005; 4: 228

© Masson, Paris, 2005, Tous droits réservés

Hommage à François Boureau

Marcel-Louis Viallard, Évaluation Traitement de la douleur, Centre Hospitalier Bretagne Atlantique, Vannes.

L

a nouvelle du décès brutal de notre ami et collègueFrançois Boureau fait partie de ces nouvelles que jamaisnous n’aurions voulu apprendre ni même imaginer. Ladisparition d’un esprit aussi généreux et brillant ne peutque nous atterrer. Que dire pour tenter d’exprimer l’in-dicible ? Comment parler de notre douleur, de notrepeine alors qu’elle ne peut, ni ne doit, se faire plus ex-pressive et moins digne de celles de ses enfants, de sacompagne, de ses proches, de ses amis intimes ? Notrepensée va en priorité à ceux qu’il aimait et qui l’aimentaujourd’hui comme hier. Quel apaisement pouvons-nousprétendre apporter pour une telle blessure si ce n’est l’ex-pression d’une solidarité totale, d’une communion depeine, dans le silence d’une simple présence aux côtésde ceux qui étaient pour lui l’essentiel à n’en point dou-ter.

Un homme rare, précieux tel un trésor par sa gen-tillesse, son ouverture d’esprit, son souci de l’autre, sonintelligence, son humanité. François fait partie de seshommes que l’on rencontre et auquel on reste attaché.Simplement car, pour nombre d’entre nous, il est, au delàde l’homme apprécié, un maître qui a su nous transmettreun savoir qu’il prétendait modeste mais dont l’étendue estimpressionnante. Pionnier dans le développement del’évaluation et le traitement de la douleur, dans l’ensei-gnement et la recherche dans ce domaine, il s’est égale-ment investi dans la prise en charge des soins palliatifs.Pour lui, il n’y avait pas de frontière puisqu’il s’agissaitde répondre aux besoins des personnes qu’il soignait, enles considérant non pas comme des malades ni des por-teurs de symptômes mais bien comme des personnes souf-frantes. Son humanisme n’avait d’égal que la rigueur deson savoir, en permanence alimenté d’un travail de re-cherche dont la qualité est reconnue de tous les profes-sionnels impliqués dans ces champs de la médecine.

François était aussi un homme plaisant, l’humourn’était jamais absent lors des échanges. Il fait partie de

ces êtres qui nous démontrent, au quotidien, que scienceet conscience sont les deux bras de la pratique médicale.

Il fut pour beaucoup d’entre nous l’initiateur dans lapratique médicale mais aussi un modèle dans la relationentre collègues.

Son attachement à transmettre le souci du bien soi-gner, à considérer la personne malade dans sa globalité afait de lui un des artisans du Diplôme d’Études Spéciali-sées Complémentaires (DESC) douleur et soins palliatifs.Récemment, il avait dirigé la rédaction d’un ouvrage deréférence pour les étudiants (mais aussi pour les profes-sionnels en exercice). Nous n’en dirons pas plus sur l’en-semble de ses travaux scientifiques, cela est fait dansd’autres revues. Nous voulons nous attacher à saluer unhomme bien, un homme de bien. Nous voulons égalementdire à son entourage proche qu’en nos cœurs et nos es-prits, il est une place particulière pour François, que rienne pourra entamer, pas même le temps.

Retirons nous pour laisser la place à ses proches. Ilssavent que les amis de François sont à leurs côtés et pleu-rent, avec eux, un homme aimé, admiré et respecté.

Suivons le chemin de nos temps séparés unis dans unedouleur partagée. Le silence comme les mots ou les signesseront, pour longtemps, marqués de l’empreinte de cethomme qui nous a tant donné, tant appris et à qui peut-être n’avons-nous jamais pu dire combien il était impor-tant pour nous et combien ses messages humains, sesenseignements scientifiques perdureront, au delà de lui, àtravers ce que nous allons tenter, tous ensemble, à notreplace, de porter dans nos pratiques comme dans nos pen-sées. Cela se fera avec l’humilité et la discrétion des élèvesqui veulent privilégier la fidélité à l’esprit du maître.

Nous sommes en deuil. Puisse notre peine trouverapaisement dans cette fidélité à transmettre et développerencore l’œuvre de François. Puissions nous être pour sesenfants, son épouse et ses proches, de simples témoins durayonnement de François mais aussi sources de réconfort.

Viallard ML. Hommage à François Boureau. Med Pal 2005; 4: 228.

Adresse pour la correspondance :

Marcel-Louis Viallard, Unité Mobile de Soins Palliatifs, Consultation d’évaluation

traitement de la douleur, Centre Hospitalier Bretagne Atlantique, 20, boulevard du

Général Maurice Guillaudot, BP 70755, 56017 Vannes Cedex.

e-mail : [email protected]