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HUMANITAS (La Revue de référence du Groupe de Recherche en Sciences Humaines et Sociales, GRESHS) 11e Année – N°11 Décembre 2012 ¾ Fabrice NFOULE MBA, L’introduction des Secrétariats……………………………………………… ¾ Martial MATOUMBA, Chronique radiocarbone des âges de la pierre au Gabon ……………………………. ¾ Souleymane SANGARE, Affaiblissement et chute des institutions politiques en Afrique......................... ¾ Jean Rodrigue Elisée EYENE MBA, Valeurs morales et droit chez Kant et Hayek…………... …. ¾ Lazare N’DA BAZOUMANA, Le conflit identitaire, un facteur de désorganisation sociale………………………………………………. ¾ Noel VEI KPAN et Bernard DJE KOUAKOU, Impact de la variabilité pluviométrique sur la production cacaoyère en Côte d’Ivoire.................... 3-37 38-57 58--70 71-93 94-111 112-125 Les Editions du GRESHS ISSN 1726 – 6688 DLBN 1199/12/2012

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  • HUMANITAS (La Revue de référence du Groupe de Recherche en Sciences Humaines et Sociales, GRESHS) 11e Année – N°11 Décembre 2012

    Fabrice NFOULE MBA, L’introduction des Secrétariats………………………………………………

    Martial MATOUMBA, Chronique radiocarbone des âges de la pierre au Gabon …………………………….

    Souleymane SANGARE, Affaiblissement et chute des institutions politiques en Afrique.........................

    Jean Rodrigue Elisée EYENE MBA, Valeurs morales et droit chez Kant et Hayek…………... ….

    Lazare N’DA BAZOUMANA, Le conflit identitaire, un facteur de désorganisation sociale……………………………………………….

    Noel VEI KPAN et Bernard DJE KOUAKOU, Impact de la variabilité pluviométrique sur la production cacaoyère en Côte d’Ivoire....................

    3-37

    38-57 58--70

    71-93

    94-111

    112-125

    Les Editions du GRESHS ISSN 1726 – 6688 DLBN 1199/12/2012

  • HUMANITAS est la revue de référence du Groupe de Recherche en Sciences Humaines et Sociales (GRESHS) de l’Ecole Normale Supérieure B.P. 17009, Libreville (Gabon), Tél : (241) 73 31 59 Fax : (241) 73 31 61 E-mail : [email protected] DIRECTEUR DE LA PUBLICATION :

    MEYO-ME-NKOGHE Dieudonné, PROFESSEUR TITULAIRE COMITE SCIENTIFIQUE :

    RENE-JOLY ASSAKO ASSAKO (Professeur, ENS, Yaoundé), CHALINE Jean Pierre (Professeur Paris IV), DESAUSTELS Jacques (Professeur Laval, Québec), EMEJULU James (Professeur UOB, Libreville), GAY Jean-Christophe (Professeur, Université de Nice, France), LAROCHELLE Marie (Professeur Laval, Québec), MBOT Emile (Professeur UOB, Libreville), MERCIER Jean Luc (Professeur ULP, Strasbourg), METEGUE N’NAH Nicolas (Professeur UOB, Libreville), MOUKAGA Hugues (Professeur UOB, Libreville), NKIET Guy Martial (Professeur USTM, Franceville), NZINZI Pierre (Professeur UOB, Libreville), ONA ONDO Daniel (Professeur UOB, Libreville), ROPIVIA Marc-Louis (Professeur UOB, Libreville).

    COMITE DE LECTURE :

    BIGNOUMBA GUY-SERGE (Maître de Conférences, UOB), GAHUNGU Patrice (Maître de conférences ENS, Libreville), FOTSING MANGOUA, (Professeur, Université de Dschang), LEGROS Denis (Professeur, Université Paris VIII), NGUEMA ENDAMNE Gilbert (Maître de Conférences, ENS, Libreville), OWAYE JEAN FRANCOIS (Maître de Conférences, UOB, Libreville), MANIRAGABA BALIBUTSA (Professeur, ENS, Libreville). COMITE DE REDACTION :

    MBOUMBA MBINA Roger (ENS, Libreville), MBAZOO Magali (ENS, Libreville), MBA Pauline (ENS, Libreville), MBA ZUE Nicolas (UOB, Libreville), NGUEMA ENDAMNE Gilbert (ENS, Libreville), OWAYE Jean François (UOB, Libreville), Pour tout contact s’adresser à : NYANGUI Euloge Lydie Les Editions du GRESHS, ENS, B.P. 17009 Libreville (Gabon) Tél : 00 (241) 73 31 59/00 (241) 05 34 58 22/00 (241) 07 64 54 31

  • HUMANITAS

  • L’INTRODUCTION DES SECRETARIATS GENERAUX: UNE MUTATION

    STRUCTURELLE AUX INCIDENCES« RELATIVES » DANS L’APPAREIL

    POLITIQUE ET ADMINISTRATIF AU GABON (1964-1986)

    Fabrice Nfoule Mba

    Attaché de Recherche

    IRSH-CENAREST, Libreville/ Gabon

    Résumé : Responsables administratifs et techniques de premier plan, les Secrétaires Généraux

    des ministères, et d’autres institutions publiques, accaparent la coordination des

    services et de leurs actions. Cette ancienne prérogative politique glisse alors

    inexorablement de l’échelon politique au niveau technique. Il s’agit là d’une

    mutation structurelle de l’appareil politique et administratif gabonais de 1964 à

    1986. S’impose alors l’hypothèse que l’introduction des Secrétariats Généraux

    induit une double distinction technique, non seulement de l’édifice

    gouvernementale, mais aussi de l’appareil administratif. Cette évolution s’avère,

    néanmoins, partielle, voire incomplète.

    Mots-Clés : Secrétariat Général, introduction, mutation, politique, administration,

    Gabon

  • 4 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    INTRODUCTION

    Le cadre institutionnel au Gabon s’est structuré après la Seconde

    Guerre mondiale autour de deux organes politiques majeurs : le

    Conseil représentatif1 et le Conseil de gouvernement

    2. Or, si ces deux

    pôles embryonnaires des pouvoirs législatif, et exécutif, n’eurent de

    cesse de se raffermir, il n’en demeurait pas moins que l’organisation,

    et le fonctionnement, de l’appareil politique et administratif

    souffraient d’un manque d’harmonisation. Cette carence se faisait

    particulièrement sentir dans la coordination, et l’organisation, non

    seulement des activités interministérielles, mais aussi des initiatives

    administratives menées par les services techniques. Au plan politique,

    l’institution présidentielle « écrasait » et se confondait, à bien des

    égards, avec le gouvernement. La répartition des rôles et

    l’identification des prérogatives de chacune des instances du pouvoir

    exécutif manquaient alors de cohérence, voire de clarté. Au niveau des

    ministères, la prééminence des cabinets politiques entravaient

    l’éclosion d’une administration véritablement dépositaire de la

    dimension technique des politiques publiques. L’administration

    centrale y apparaissait, sinon, affaiblie, du moins, extrêmement

    « effacée ». Á contre-courant de cette situation, l’introduction des

    Secrétariats Généraux postulait une coordination, et une organisation,

    plus harmonieuses de l’architecture politique et administrative,

    notamment entre 1964 et 1986.

    En 1964, le Secrétariat Général du Gouvernement (SGG) fut créé,

    dans le dessein, entre autres, de synchroniser les activités

    1Instauré par la Constitution de 1946 et organisé par le décret n° 46-2-374 du 25 octobre de la

    même année, le Conseil représentatif se métamorphosa progressivement en Assemblée

    territoriale, en 1952, avant que de se muer en Assemblée législative, en 1959, puis en

    Assemblée nationale à la faveur de l’indépendance en 1960. 2Emanation du rapport des forces à l’Assemblée territoriale, le Conseil de gouvernement

    expérimenta, quant à lui, le pouvoir exécutif en 1956. Au début positionnée à la vice-

    présidence de cet organisme, la tête d’affiche du groupe politique majoritaire à l’Assemblée

    accéda, à partir de 1958, à la présidence de ce qui devint l’un des points focaux de l’exécutif

    gabonais. Voir Mabileau (J) et Meyriat (J), (1967), Décolonisation et régime politique en

    Afrique noire, Paris, A. Colin.

  • Fabrice NFOULE MBA 5

    Humanitas, 11, 2012

    gouvernementales. Malgré une connotation éminemment politique,

    cette nouvelle fonction disposa d’une compétence technique de grande

    importance : la coordination, et l’organisation, de l’action et des

    politiques publiques. Elargie à certains ministères techniques et

    régaliens, à la fin des années soixante et au milieu des années

    soixante-dix, puis à la Primature, en 1986, l’instauration des

    Secrétaires Généraux(SG) ne fut pas sans conséquence sur

    l’organisation, et le fonctionnement, des départements ministériels.

    Quelle fut alors la portée véritable des évolutions induites par

    l’avènement des « SG » dans l’attirail institutionnel gabonais ? Quels

    impacts cette fonction eut-elle réellement sur l’organisation, et le

    fonctionnement, des ministères ?

    C’est à l’intérieur du cadre chronologique délimité, entre 1964 et

    1986, que notre étude envisage d’interroger les incidences de

    l’insertion des « SG » dans l’attelage politique et administratif au

    Gabon3. Mais ne pouvant étudier l’ensemble des composantes de

    l’espace institutionnel gabonais, le propos discrimine huit institutions

    particulières ; à savoir la présidence de la République, la Primature et

    les ministères des Affaires économiques, de l’Éducation nationale, des

    Finances, du Travail, de l’Intérieur et des Affaires étrangères. Ce

    choix s’explique par le fait que l’organisation et la structure de ces

    institutions, parmi d’autres, déclinent une existence effective des

    Secrétariats Généraux durant la période qui intéresse notre analyse. En

    s’appuyant sur un certain nombre de travaux historiques, juridiques,

    politistes et théoriques ainsi que sur des textes constitutionnels, et

    réglementaires, portant sur le fonctionnement, et l’organisation, du

    dispositif politique et administratif en Afrique, en général, et au

    Gabon, spécifiquement, il s’agit de voir comment, et à partir, des

    3Il convient de signaler que l’introduction des Secrétaires Généraux, en tant que structure, et

    fonction, administratives au Gabon remonte à bien avant 1964. L’application de ce dispositif

    déborde même, et très largement, le cadre restreint des instances du pouvoir exécutif. Au

    long de l’histoire, on retrouve cette fonction dans les Préfectures et les collectivités locales,

    héritées de l’ancienne administration territoriale coloniale. Des institutions comme

    l’Assemblée Nationale, structurée depuis la décolonisation et consolidée après

    l’indépendance, mais aussi certaines institutions constitutionnelles telles quele Conseil

    Économique et Social, la Cour Suprême ainsi que les grands corps constitués, expérimentés

    durant le monopartisme, à l’instar de la Grande Chancellerie des Ordres Nationaux, le Collège

    des Hauts Conseillers de l’État, le Conseil National des Municipalités... ont effectivement

    disposé de Secrétariats Généraux.

  • 6 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    Secrétariats Généraux, l’armature organisationnelle et fonctionnelle

    des institutions, ainsi identifiées, s’est transformée. Notre approche

    soutient que l’avènement de cette fonction procède d’une réforme de

    structure qui a suscité une distinction technique à deux niveaux :

    d’abord à l’échelon politique, entre le Président de la République et le

    gouvernement, ensuite au sein des ministères, entre les cabinets et les

    services administratifs centraux. L’idée ici est que des pesanteurs

    politiques, adjointes à des faiblesses techniques, n’ont pas permis aux

    évolutions, suscitées par l’instauration des Secrétariats Généraux, de

    franchir certaines limites. Il en a résulté une mutation, certes

    structurelle, mais, au demeurant, « partielle », « incomplète », voire

    « partielle »de l’appareil politique et administratif. Dès lors, notre

    analyse s’articule en deux grands points : le mouvement de répartition

    des rôles qui spécifie techniquement les deux composantes du pouvoir

    exécutif et « dépolitise » la coordination, et l’organisation, de l’action

    publique, d’une part, et les conséquences techniques du déploiement

    des «SG» dans le fonctionnement des départements ministériels,

    d’autre part.

    1. La distinction« technique » au sein du pouvoir exécutif (1964-

    1978)

    Historiquement, c’est dans un contexte politique marqué par un

    présidentialisme, poussé à l’extrême4, que la fonction de Secrétaire

    Général fut introduite dans l’appareil gouvernemental gabonais. En

    effet, le jeu institutionnel imprimé par la Constitution du 21 février

    1961 dévoilait une concentration des pouvoirs autour de la

    magistrature suprême. Cette situation était si particulière qu’il

    4 Le présidentialisme désigne, ici, la prééminence institutionnelle, et politique, du Président de

    la République. Historiquement, cette institution n’apparaît au Gabon qu’en 1961 et devient la

    clé de voûte des institutions. Deux personnalités, Léon M’ba et Albert Bernard (puis Omar)

    Bongo, ont exercé cette magistrature dans la période qui intéresse notre étude. De 1964 à

    1986, l’emprise de cette institution dans le jeu institutionnel en fait, non seulement le Chef

    des armées, du gouvernement, mais également le détenteur de plusieurs portefeuilles

    ministériels et le président du Conseil Supérieur de la Magistrature. Concernant le

    fonctionnement, et l’organisation, du régime présidentiel, voir Ajami (S-M), (1975), « Les

    institutions du régime présidentialiste gabonais », RJPIC, n° 4.

  • Fabrice NFOULE MBA 7

    Humanitas, 11, 2012

    paraissait ardu de définir le type de régime, ou de système, politique5

    en vigueur au Gabon. Empreinte d’autoritarisme, cette situation

    participait d’une centralisation de la gestion de l’État. Bien

    qu’identifiées constitutionnellement, les deux composantes du pouvoir

    exécutif semblaient, dans la pratique, jumelées. A contrario, la mise

    en place des Secrétariats Généraux du gouvernement, et de la

    présidence de la République, exhorta une distinction, plus affirmée, au

    sein du couple exécutif. Cela se traduisait par deux évolutions

    majeures : l’accentuation de la spécification« technique » entre le

    gouvernement, et le Président de la République, d’un côté, et

    la« dépolitisation » de la coordination de l’action publique, de l’autre.

    1.1. Une spécification plus théorique que pratique

    Le Secrétariat Général du Gouvernement (SGG) fut créé par le décret

    n° 220 du 22 juin 19646.Dès le départ, la consonance technique de

    cette fonction s’affirma à telle enseigne qu’elle ne fut exercée que par

    des technocrates7. Mais, au-delà du profil technique des cadres ayant

    incarné la fonction de « SG » du gouvernement dans ses premières

    années d’existence, il apparaissait que, placé sous l’autorité directe du

    Président de la République, le SGG était conçu comme un organe de

    travail, en matière administrative8. L’arrêté n° 732/PR-SGG du 1

    er

    juillet 19649en identifia, non seulement les attributions, mais

    également les services. Fort de ces deux textes créant, et organisant, la

    nouvelle structure administrative et technique, il ressortait que sa

    principale mission consistait à assurer la liaison entre le Chef du

    gouvernement et les différents départements ministériels. Le « SGG»

    disposait ainsi des prérogatives à forte connotation technique telles

    5Sur la nature des régimes, ou des systèmes, politiques en Afrique, voir Fortes (M) et Evans-

    Pritchard (E-E), (1964), Les systèmes politiques africains, Paris, PUF ; Roy (M-P), (1977),

    Les régimes politiques du Tiers-Monde, Paris, LGDJ et Gonidec (P-F), (1978), Les systèmes

    politiques africains, Paris, LGDJ, 2ème éd. 6JORG, n° 19, 15 juillet 1964, p. 398. 7René Rodembinot-Coniquet et Paul Okumba d’Okwatségué, administrateurs civils, diplômés

    de l’Institut de Hautes Études d’Outre-Mer (IHEOM), se succédèrent à cette fonction

    jusqu’en 1968. 8 Article 2 du décret n° 220 /PR portant création et organisation du Secrétariat Général du

    Gouvernement, op. cit. 9JORG, 1 er août 1964, p. 443.

  • 8 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    que la préparation des Conseils des Ministres (CM). À ce titre, il lui

    revenait d’harmoniser aussi bien l’ordre du jour, les convocations que

    le compte rendu, et la mise en forme, des résolutions de cette instance

    technique de concertation, et de finalisation, de la décision politique.

    Le « SGG » assurait également la coordination, et le suivi, des

    activités interministérielles. Aussi synchronisait-il les organes

    techniques, et politiques, autour du Chef de gouvernement. Au plan

    institutionnel, il affirmait la spécificité « technique » du gouvernement

    par rapport au Président de la République. Bien que, politiquement, le

    Président de la République fut toujours simultanément Chef de l’Etat,

    et Chef du gouvernement, il semblait, néanmoins, que les institutions

    du pouvoir exécutif apparaissaient, de plus en plus, distincts l’une de

    l’autre. La création d’un Secrétariat Général à la présidence de la

    République (SGPR), par le décret n° 00612/PR-MFP du 1er

    décembre

    1967, amplifiera cette différenciation technique au sein du couple

    exécutif.

    Trois ans après le gouvernement, la présidence de la République se

    munissait également d’un Secrétariat Général. Historiquement et après

    avoir exercé en tant Secrétaire Général du Gouvernement, René

    Rademdinot-Coniquet, un administrateur civil, accéda à cette fonction

    en 1968. Il officia alors comme le premier, et unique, « SG » de la

    présidence de la République de 1968 à 1986. Perçu comme un organe

    de coordination des services présidentiels, le « SGPR » intervenait

    dans trois domaines principaux, à savoir le travail gouvernemental

    interne, la diplomatie présidentielle et les relations institutionnelles.

    Les attributions du « SGPR », en matière gouvernementale,

    consistaient au suivi et à la préparation matérielle, et juridique, des

    travaux du Conseil des Ministres, mais aussi au contrôle de

    l’application des décisions prises par ledit Conseil ou, directement par

    le Président de la République. Il lui incombait également d’assurer

    l’enregistrement, la promulgation, la notification et la diffusion des

    lois, ainsi que la conservation des originaux. Dans la diplomatie

    présidentielle, le « SGPR » intervenait à deux niveaux : la gestion des

    activités présidentielles aux échelles continentale et internationale,

    d’une part, et de la liaison technique entre le Chef de l’État et les

    missions diplomatiques gabonaises installées à l’étranger, d’autre part.

    Concernant l’agenda continental du Président de la République, il

  • Fabrice NFOULE MBA 9

    Humanitas, 11, 2012

    revenait au « SGPR »d’étudier les affaires inscrites à l’ordre du jour

    des Chefs d’État dans le calendrier des organisations sous régionales,

    et continentales, à l’instar de l’Union Douanière et Économique de

    l’Afrique Centrale(UDEAC) et l’Organisation de l’Unité Africaine

    (OUA), etc. Au niveau international, le « SGPR » suivait directement

    les questions discutées entre le Gabon et les organisations

    économiques et financières internationales, à l’instar de la CEE,

    l’AID, le FED, etc. Le traitement de la liaison technique entre le

    Président de la République et les missions diplomatiques gabonaises,

    amenait le « SGPR » à étudier, et à exploiter, les rapports périodiques,

    adressés au Chef de l’État, non seulement par les chefs de missions

    diplomatiques, mais aussi, et le cas échéant, par les chefs de

    délégations en mission ponctuelle d’inspection, ou de travail, à

    l’étranger. La liaison technique était également assurer au niveau

    interne, à travers les rapports émanant des chefs de circonscriptions

    territoriales comme les Préfets, les sous-Préfets, etc. L’implication du

    « SGPR » dans les relations entre le Président de la République, et les

    institutions constitutionnelles, se résumaient à l’entretien des

    passerelles administratives et juridiques avec l’Assemblée Nationale

    (AN), le Conseil Économique et Social (CES), etc. Au-delà des

    attributions10

    , la mise en place du « SGPR » ambitionnait une

    meilleure organisation de l’administration présidentielle.

    Intimement liée au Président de la République, et travaillant en étroite

    collaboration avec le cabinet présidentiel et le Secrétariat Général du

    Gouvernement, l’administration présidentielle intéressait, non

    seulement les services, et autres entités techniques, de la présidence de

    la République, mais aussi les personnels appelés à y faire carrière. On

    n’y retrouvait, en 1968, aussi bien le Secrétariat du Conseil des

    Ministres (SCM) qu’un service du protocole accompagnés de six

    bureaux, chargés spécifiquement du traitement de certaines questions,

    à l’instar des études juridiques, administratives et financières, le

    courrier, le chiffre, la chancellerie, les études générales11

    .L’enjeu,

    pour les services, et autres organismes, rattachés à la présidence, était

    10Pour plus d’informations sur les attributions du Secrétariat Général de la présidence de la

    République, se reporter à l’arrêté n° 0097/PR-SGG-S, JORG, 15 février 1968, p. 101. 11 Article 4 de l’arrêté n° 0097/PR-SGG-SJORG, 15 février 1968, p. 101.

  • 10 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    de disposer d’une instance de cohésion. Pour les personnels,

    l’instauration du « SGPR » représentait une opportunité de gestion

    permanente, et de suivi constant, des carrières. En plus des cadres

    servant, à titre sporadique, et au gré des affectations ainsi que des

    détachements, la présidence de la République avait alors toute la

    latitude de recruter des agents qui lui étaient propres. À côté des

    experts, et autres spécialistes, venant de la fonction publique, ou du

    privé, s’ajoutaient des corps permanents de cadres, de techniciens, et

    d’agents, de la présidence de la République relevant du Secrétariat

    Général. Cela laissait entrevoir des perspectives de carrière, sinon,

    définitives, du moins, à long terme.

    Au plan institutionnel, il apparaissait que la présidence de la

    République, en densifiant, et harmonisant, son armature

    administrative, cessait d’être un simple « centre d’hébergement » pour

    le Président de la République, son cabinet et certains services, ou

    organes, qui lui étaient rattachés. Elle s’affirmait, bien sûr comme le

    « logis » de la principale institution politique, mais également en tant

    qu’appareil technique devant quotidiennement accompagner le

    détenteur de la magistrature suprême dans certains aspects de son

    action à la tête de l’État. Il lui revenait d’organiser les visites, et autres

    voyages d’État, mais aussi de traiter certaines questions techniques ou

    toutes autres initiatives présidentielles, en matière de politique

    intérieure, voire de diplomatie. Ainsi, en plus d’un cabinet politique,

    civil et militaire, la principale institution constitutionnelle se dotait

    d’une administration, et des personnels permanents, dont la gestion, et

    la cohérence, incombaient au « SGPR ». Ce rôle particulièrement

    important faisait du « SG »de la présidence de la République l’un des

    principaux collaborateurs du Chef de l’État. Toutefois, si

    théoriquement, la différenciation« technique » entre les deux

    composantes de l’exécutif politique se concevait aisément, dans la

    pratique, il apparaissait que les évolutions proposées par l’introduction

    des « SG » ne franchissaient pas certaines limites tant techniques que

    politiques.

    Simultanément réorganisés, par les arrêtés n° 0097, et n° 0098, du 27

    janvier 1968, les Secrétariats Généraux de la présidence, et du

    gouvernement, comprenaient chacun des services propres. L’un,

  • Fabrice NFOULE MBA 11

    Humanitas, 11, 2012

    comme l’autre, fut doté de bureaux d’études et de services techniques

    spécialisés dans des domaines bien spécifiques12

    . Au sein de la

    présidence de la République, et du gouvernement, émergeaient deux

    pôles, administratifs et techniques, dont le poids n’aura de cesse de

    croître. Il s’agissait du début d’une transformation qui marquera

    profondément, et graduellement, l’appareil gouvernemental gabonais.

    Toutefois, la spécification technique des deux institutions du pouvoir

    exécutif n’était pas totale. Elle semblait « incomplète » sur deux

    points particuliers : la mutualisation des services entre le « SGG » et

    le « SGPR », d’une part, et la matérialisation gouvernementale du

    Président de la République, d’autre part. En effet, le cordon ombilical

    n’était pas totalement rompu entre la présidence de la République et le

    gouvernement. Les Secrétariats Généraux de ces deux instances

    disposaient de services communs, à l’instar des bureaux d’études, du

    bureau d’études juridiques, du bureau d’études et du bureau

    administratif et financier ainsi que du bureau du courrier13

    ... Cette

    mutualisation des services perpétuait, dans une certaine mesure, la

    fusion du gouvernement et du Président de la République. Par ailleurs,

    la pratique institutionnelle préconisant l’unicité de l’appareil

    gouvernemental perdurait.

    Politiquement, force était de constater, qu’au sommet, les deux

    institutions du pouvoir exécutif14

    avaient toujours tendance à se

    confondre. Cette fusion se traduisait d’autant plus que la

    matérialisation gouvernementale du Président de la République

    s’affichait comme une constante du fonctionnement des institutions.

    En plus des prérogatives de Chef de gouvernement, le magistrat

    politique suprême pouvait également assumer des fonctions

    ministérielles, entre autres, celles de Ministres des affaires étrangères,

    12 L’arrêté n° 0097 du 27 janvier 1968 réorganisa le Secrétariat Général de la présidence de la

    République en plusieurs bureaux. Dans la même année, l’arrêté n° 0098 dota le Secrétariat

    Général du gouvernement d’un bureau du courrier, d’un bureau des archives et d’un service

    du Journal officiel... 13 Article 11 de l’arrêté n° 0098/PR-SGG-S définissant les services et les attributions du

    Secrétariat Général du Gouvernement, JORG, 15 février 1968, p. 102. 14 Le Président de la République et le Gouvernement.

  • 12 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    de l’Intérieur, de l’Information et du Tourisme15

    . Apparue de façon

    évidente après le coup d’État militaire de février 1964, cette tendance

    à la concentration du pouvoir16

    se pérennisait en dépit de l’instauration

    des Secrétariats Généraux. La composition des gouvernements laissait

    constamment apparaître, non seulement des supers ministères

    regroupant plusieurs départements confiés à des hommes de

    confiance, mais aussi une forte inclinaison gouvernementale du

    Président de la République. Cette « ministérialisation » présidentielle

    touchait particulièrement les domaines jugés névralgiques pour la

    gestion, et la conservation, du pouvoir. En 1968, par exemple, le

    Président de la République fut, Chef du gouvernement, mais

    également Ministre de la Défense nationale, des Affaires étrangères17

    .

    L’extension gouvernementale du Président de la République

    s’accentua d’autant plus que la fonction de Ministre de la Défense

    nationale, lui échut constitutionnellement, à partir de 197518

    . Au-delà,

    le Chef de l’État revêtit constamment, de façon sporadique et selon le

    caractère stratégique de la question, certaines responsabilités

    gouvernementales, entre autres, dans l’Aviation civile et commerciale,

    en 197719

    , l’Information et la Communication, en 1978. Cette

    situation, qui résultait d’un présidentialisme excessif, engendrait un

    pouvoir exécutif profondément monocéphal (Remondo 1987:67). Or,

    ce monocéphalisme politique faisait du Président de la République,

    bien sûr, le Chef de l’État, et du gouvernement, mais aussi le détenteur

    de plusieurs portefeuilles ministériels sensibles ou stratégiques. La

    persistance de ce phénomène prolongeait l’unicité de l’appareil

    15 Le décret n° 75 du 25 février 1964, JORG du 25 février 1964, nous informe sur le fait que

    le Président de la République assumait directement des charges ministérielles. 16 Sur la concentration du pouvoir au Gabon, voir Hervouet (M-F), (1983), « Le processus de

    concentration des pouvoirs par le président de la République au Gabon », Penant, n° 779, p. 5. 17 La composition du gouvernement, déclinée par le décret n° 31 du 25 janvier 1968, JORG

    du 15 février 1968, p. 100, laisse entrevoir que le Président de la République figure, non

    seulement, dans le gouvernement, en tant que Chef de gouvernement, mais y exerce

    également les fonctions de Ministres de l’Intérieur, des Affaires étrangères et de

    l’Information... 18La Constitution du 25 avril 1975 fait du Président de la République, le Ministre de la

    Défense nationale de droit. 19Décret n° 147/PR du 24 février 1977 portant organisation du cabinet du Président de la

    République, Chef de gouvernement, Ministre de la Défense nationale, Ministre de l’Aviation

    civile et commerciale.

  • Fabrice NFOULE MBA 13

    Humanitas, 11, 2012

    gouvernemental. En cela, les modifications induites par les « SG », en

    termes de distinction, même technique, entre le gouvernement et le

    Président de la République, s’avéraient « partielles ». Pour autant, il

    semblait indéniable que, si politiquement les institutions du pouvoir

    exécutif demeuraient fortement reliées entre elles, techniquement et

    avec des « SG »bien distincts, la présidence de la République, et le

    gouvernement, esquissaient une disjonction qui n’eut de cesse de se

    raffermir. Cela était d’autant plus plausible qu’une« dépolitisation »

    de la coordination de l’action publique se profila à l’horizon.

    1.2. Une« dépolitisation »nuancée

    L’extrême présidentialisme induisait une tutelle directe du Chef de

    l’État sur l’appareil politique et administratif. Il en découlait, entre

    autres, une forte emprise présidentielle sur l’administration. Or, si

    cette situation pouvait se justifier dans le contexte de sortie de la

    colonisation, marqué par un déficit numérique des services techniques,

    elle s’avéra, de plus en plus, inopérante avec la multiplication des

    entités administratives après l’indépendance. À la fin des années

    soixante, la prolifération des services techniques, étoffèrent

    considérablement l’ossature de l’administration publique. En effet,

    moins structurés que d’autres, certains ministères ne disposaient, au

    début, que de très peu de service. Ce fut le cas du ministère de la

    Santé20

    dont l’administration se résumait, en 1967, à la seule Direction

    des Services de Santé (DSS). Unique représentante de

    l’administration, ladite direction n’en regroupait pas moins l’ensemble

    des services du ministère de la Santé. Aussi, la« DSS »assumait-elle la

    responsabilité technique d’un réseau, assez dense, de services et

    d’unités de santé disséminés sur le territoire national. Néanmoins et le

    temps passant, elle coordonnait un appareil administratif, assez

    prolixe, incluant aussi bien les régions sanitaires, les équipes mobiles

    que les centres de Protection Maternelle Infantile (PMI), les différents

    établissements hospitaliers et les dispensaires21

    . Cet épaississement

    20Article 2 du décret n° 0023/PR-MSPP du 16 janvier 1967 portant organisation du ministère

    de la Santé publique et de la Population. 21 Article 4 du décret n° 0023/PR-MSPP du 16 janvier 1967, portant organisation du ministère

    de la Santé publique et de la Population.

  • 14 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    institutionnel s’observait également dans d’autres départements,

    comme le ministère de l’Intérieur22

    dont l’administration se résumait,

    en 1968, à deux directions. L’une, consacrée à l’Administration

    Générale et, l’autre, à la Sûreté Nationale. Cet attelage, assez léger au

    départ, s’agrandit avec la création d’une multitude de services

    provinciaux et départementaux. À l’aune d’un découpage territorial

    déclinant une myriade de circonscriptions administratives,

    l’administration territoriale et locale déploiera, à partir de 1975,

    plusieurs gouvernorats, préfectures et sous-préfectures. En considérant

    les nombreux commissariats, et unités, de police, progressivement

    installés à travers le pays, au titre de la Sûreté nationale, force était de

    constater que le ministère de l’Intérieur assurait la tutelle d’un service

    public large et varié. Bien que ne contestant, en aucune façon,

    l’autorité du Président de la République, cette prodigalité des services

    techniques questionnait, néanmoins, l’efficacité de sa tutelle directe

    sur l’administration.

    Située à un niveau trop élevé de la hiérarchie institutionnelle,

    l’efficience d’une coordination des services publics, notamment

    provinciaux, assurée directement par l’institution présidentielle prêta

    sérieusement à caution. Elle apparaissait trop lointaine et globale,

    voire extrêmement lourde pour une administration devenue très

    consistante avec le temps. Par ailleurs, le fait que le Président de la

    République s’immisçât dans« l’intendance » des services publics lui

    faisait perdre de la hauteur. Clé de voûte des institutions, il importait

    que le Chef de l’État se situât nettement au-dessus de la mêlée. Sans

    totalement s’en désintéresser, il devait se départir de certaines tâches

    techniques « mineures » pour se consacrer à sa mission au sommet de

    l’État. Cette « hauteur» institutionnelle impliquait une déconcentration

    de la gestion publique. Aussi le glissement de la coordination de

    l’action publique vers un échelon administratif et technique, plus

    adéquat, semblait-il une transformation inéluctable. Sans l’en

    22 Décret n° 0135/PR-MI du 2 mars 1968 portant réorganisation du ministère de l’Intérieur.

  • Fabrice NFOULE MBA 15

    Humanitas, 11, 2012

    déposséder, cette évolution impliquait que le Chef de l’État

    coordonnât désormais l’action publique en s’appuyant sur des

    instances techniques et spécialisées. Dans un contexte de grande

    instabilité23

    des équipes et de l’armature ministérielle, les « SG »du

    gouvernement, et de la présidence de la République, furent tout

    désignés pour assurer cette mission de suivi. Leur consonance

    technique, les prédisposait à harmoniser, non seulement le travail

    gouvernemental et les activités de l’administration présidentielle, mais

    aussi le fonctionnement, et l’organisation, des services des ministères.

    Bien que demeurant dans le giron présidentiel, la coordination de

    l’action publique leur incombera. Progressivement, l’introduction des

    « SG »entrainait ainsi une « dépolitisation »de la coordination, et de

    l’organisation, des services. On observait alors un relatif relâchement

    de la tutelle présidentielle sur l’administration.

    Techniquement, avec les « SG », la propension du Président de la

    République à exercer une tutelle directe sur les services publics avait

    tendance à s’estomper. Bien que conservant sa prééminence en tant

    qu’organe de décision le plus important en matière d’administration24

    ,

    le rôle du Chef de l’État dans l’action publique tenait désormais dans

    l’impulsion des grandes orientations. Dès lors, la posture de Président-

    gouvernant s’effaça, progressivement, au bénéfice d’une institution

    gouvernementale, de plus en plus, responsabilisée dans la

    concrétisation des politiques publiques. Cependant, si la tutelle

    présidentielle se relâchait graduellement, il n’en fut pas de même de

    23La période qui suit le coup d’État de 1964 et le retour au pouvoir du père de l’indépendance

    ainsi que l’avènement du parti unique, est marquée par une instabilité chronique des

    gouvernements. On note, entre 1965 et 1970, pas moins de trois remaniements ministériels

    par an. Lorsqu’on considère que les changements au sein des gouvernements ne concernent

    pas seulement le positionnement des Ministres, mais aussi les attributions des ministères, cela

    produit une grande fluctuation institutionnelle qui ne manque pas de toucher la composition,

    l’organisation et le fonctionnement des services publics. Ballotés, fréquemment, d’une

    institution à une autre, la mission de service public, et les actions qui en découlent, manquent

    alors cruellement de cohérence tant il devient difficile de maintenir le fil conducteur. 24Selon l’article 8 de la Constitution du 26 avril 1979, le Président de la République était le

    détenteur suprême du pouvoir exécutif. Il conservait ainsi une forte emprise sur l’appareil

    d’État, l’administration y compris. Chef des administrations civiles et militaires, il procédait

    aux nominations des principaux responsables administratifs.

  • 16 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    son emprise, et de son autorité, sur l’administration. Dans la pratique,

    le Président de la République conservait le contrôle politique des

    services civils et militaires. Il disposait toujours de l’administration

    pour la concrétisation de son action à la tête de l’État. Par ailleurs,

    l’idée d’une coordination de l’action publique totalement

    « dépolitisée » au profit d’instances strictement techniques, et

    administratives, méritait d’être fortement nuancée. En effet, si dans

    leur organisation, les « SG » du gouvernement, et de la présidence de

    la République, s’apparentaient bien à des organes techniques et

    administratifs, leur fonctionnement laissait, néanmoins, entrevoir une

    forte prégnance politique. Le rang systématiquement accordé aux

    personnalités appelées à exercer ces fonctions en disait long sur leur

    connotation politique. En effet, les« SG » de la présidence de la

    République, et du gouvernement, disposaient d’un rang ministériel25

    .

    L’un, comme l’autre, siégeait même au gouvernement26

    en tant que

    Ministres27

    . On pouvait alors s’interroger sur l’ampleur de la

    « dépolitisation »déduite par des instances, certes techniques et

    administratives, mais arborant une consonance politique assez

    marquée du fait de leurs qualité et rang de membres du gouvernement.

    Toutefois, cela ne remettait pas fondamentalement en cause les

    évolutions induites par les « SG » au sein des deux institutions

    incarnant le pouvoir exécutif.

    Malgré les écueils, et autres résistances techniques, et politiques, il

    semblait indéniable que la création des « SG » du gouvernement, et de

    la présidence de la République, participa d’une « décongestion » de la

    gestion publique. Celle-ci vit le Président de la République, et le

    25 Le fait que le Secrétaire Général du gouvernement, comme l’indique l’article 5 du décret n°

    24/PR du 11 janvier 1968 portant création du Secrétariat Général du Gouvernement, JORG,

    1er février 1968, p. 59, reçoive délégation de signature du Chef de gouvernement suppose

    qu’il dispose d’un rang ministériel. 26L’article 5 du décret n° 7/PR du 5 janvier 1980 portant organisation de la présidence de la

    République informe sur le fait que le Secrétaire Général de la présidence de la République

    portait, non seulement le titre de Ministre, mais qu’il siégeait également au gouvernement. 27 Avant d’arborer le titre de Ministre d’État dans les années quatre-vingt, le « SG » de la

    présidence de la République apparaît, officiellement, dans le gouvernement en tant que

    Ministre à partir de 1970. Le « SG » du gouvernement, quant à lui et après avoir bénéficié des

    rangs, et prérogatives ministériels, à la fin des années soixante, figure dans l’organigramme

    du gouvernement comme Ministre, dans les années quatre-vingt.

  • Fabrice NFOULE MBA 17

    Humanitas, 11, 2012

    gouvernement, amorcer une transformation qui n’aura de cesse de les

    distinguer l’une de l’autre. Arguant de cela, les « SG » annonçaient

    une division « technique » entre les deux institutions du pouvoir

    exécutif. Théoriquement, cela occasionna une distribution, plus claire,

    des rôles au sein de l’appareil gouvernemental. Conforté dans la

    définition, et l’impulsion, des grandes orientations de la politique

    nationale et internationale, le Président de la République était doté

    d’un « attelage » technique et administratif conséquent, mais aussi des

    personnels permanents, et spécialisés, dont la mission était de

    l’accompagner au quotidien. Venant en appui, et pourvu d’un organe

    de coordination de son action, le gouvernement se chargeait de la

    matérialisation sectorielle des politiques publiques. Il disposait ainsi,

    techniquement, de l’administration. Après avoir ciblé les deux

    principales composantes du pouvoir exécutif, les Secrétariats

    Généraux s’étendront à l’appareil ministériel. Quels en furent les

    impacts?

    2. L’introduction des « SG » dans les ministères (1965-1986)

    En dépit de certaines expérimentations antérieures, mais parfois

    éphémères28

    , au milieu des années soixante, l’absence de Secrétariat

    Général en tant qu’organe administratif, et technique, chargé

    spécifiquement de la coordination, et de l’organisation, des services

    techniques, se faisait particulièrement sentir dans les ministères. La

    notion « d’administration centrale », ou de services centraux, ne

    paraissait pas suffisamment élaborée. Cela posait d’énormes

    problèmes dans la liaison entre les services administratifs, d’une part,

    et les cabinets ministériels, d’autre part. Chaque service technique

    devait, individuellement, transmettre ses dossiers au cabinet pour

    vérification. Au regard d’une évolution marquée par une

    multiplication, et une diversification, des services, observées au début

    28 Le département de l’Information et du Tourisme, rattaché au Président de la République fut

    bien doté d’un Secrétariat Général, en 1962. Mais introduit par la loi n° 38-62, supprimant la

    Direction de l’Information et créant un Secrétariat Général de l’Information et du Tourisme,

    publiée au JORG, n° 2, 15 janvier 1963, p. 62, ledit « SG » fut supprimé, en 1964, par le

    décret n° 234/PR-MITPT du 9 juillet 1964, paru au JORG, 15 juillet 1964, p. 413. Trop

    éphémère, il n’aura vécu que deux ans.

  • 18 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    des années soixante-dix, cela était susceptible de créer une certaine

    anarchie. Il importait de doter les ministères d’organismes techniques,

    et administratifs, pouvant assurer, non seulement la coordination des

    services, mais aussi l’interface entre les cabinets ministériels et

    l’administration. C’est dans ce dessein que la fonction de Secrétaire

    Général fut expérimentée dans les ministères. Il en découla, d’une

    part, une dualité institutionnelle des ministères et, d’autre part, une

    plus grande affirmation de l’administration centrale.

    2.1. Une dualité institutionnelle« atténuée » (1968-1976)

    L’année 1968 vit la fonction de Secrétaire Général introduite,

    officiellement, dans les ministères. L’organisation, et le

    fonctionnement, des instances ministérielles en furent profondément

    affectés. Deux Secrétariats Généraux, aux Affaires économiques29

    et à

    l’Éducation nationale30

    , furent effectivement institués. Alors qu’au

    ministère des Affaires économiques, Albert Chavihot, puis Paul

    Moukambi, administrateurs civils, officièrent comme les deux

    premiers Secrétaires Généraux, à l’Éducation nationale, en revanche,

    Pierre Ambourouet Demba, professeur licencié, assuma cette fonction,

    en 1969, alors que Marcel Ibinga Magwangou, l’exerça en 1973.

    D’autres ministères, à l’instar des Finances,du Travail, de l’Intérieur et

    des Affaires étrangères…, emboîtèrent le pas un peu plus tard. Ainsi,

    l’intégration du Secrétariat Général au ministère des Finances, et du

    Budget, s’opéra en 196931

    .Dès 1972, on retrouve les traces d’un

    Secrétaire Général en la personne de François-Xavier Moundjiegou,

    au ministère du Travail et de la Prévoyance sociale. Cette fonction

    figura, officiellement, dans l’organigramme du ministère de l’Intérieur

    29Décret n° 0076/PR-MAEDPME du 22 février 1968, portant création d’un Secrétariat

    Général au ministère des Affaires économiques, du Développement, du Plan, des Mines et de

    l’Énergie, définissant les attributions et fixant les traitements et indemnités du Secrétaire

    Général, JORG, 15 mars, 1968, p. 175. 30Décret n° 807/PR-MENSC portant création d’un Secrétariat Général au ministère de

    l’Éducation nationale et ses attributions. 31Décret n° 125/PR du 6 février 1969 portant création d’un Secrétariat Général au ministère

    des Finances et du Budget et en fixant les attributions.

  • Fabrice NFOULE MBA 19

    Humanitas, 11, 2012

    en 1972 pour en coordonner et organiser les activités32

    .En dépit de

    quelques expérimentations antérieures33

    , il semble qu’on ne peut,

    véritablement, situer l’existence effective d’un Secrétariat Général aux

    Affaires étrangères, en tant que ministère autonome, jouissant

    totalement de ses prérogatives, et assumant la pleine tutelle sur ses

    services, qu’en 197634. En effet, l’insertion d’un Secrétariat Général

    aux Affaires étrangères, avant 1976, intervint dans une configuration

    très éparse du ministère des Affaires étrangères. Incorporé, après le

    coup d’État de 1964, à la présidence de la République, au même titre

    que d’autres ministères stratégiques comme la Défense nationale et

    l’Information, les attributions de ce ministère n’eurent de cesse d’être

    « dispersées » du milieu des années soixante au début des années

    soixante-dix. Aussi, en 196835

    , la composition du gouvernement

    déclinait-elle, non seulement un ministère d’État, chargé de

    l’Ambassade du Gabon en France36

    , mais aussi un ministère délégué à

    la présidence de la République, chargé des Affaires étrangères37

    . Les

    Affaires étrangères ne réapparaitront, comme département ministériel

    autonome, qu’en 196938

    . Cependant, même en tant que ministère

    plein, et élargi à la Coopération, il faisait constamment l’objet d’un

    «saucissonnage» consistant, entre autres, en une « absorption » de ses

    prérogatives, et de ses services, par la présidence de la République, à

    travers le rattachement directe de certaines missions diplomatiques, à

    32 Décret n° 637/MI-RA SVPG-CAB du 3 mai 1973 portant création d’un Secrétariat Général

    au ministère de l’Intérieur, JORG, 1er-15 mai 1973, p. 359. 33En observant les décrets de nomination, on retrouve les traces d’un Secrétariat Général aux

    Affaires étrangères en 1965. Avant leur rentrée respective au gouvernement, des personnalités comme Pierre Mebaley, Inspecteur du travail, et André Mintsa, administrateur

    civil, ont effectivement assumé la fonction « SG » des Affaires étrangères avant 1976. en

    1965. Dans le même registre de l’exercice de cette fonction avant 1976, Athanase Bouanga,

    inspecteur du primaire, fut « SG » en 1968. 34Article 5 du décret n° 00774/PR/MAEC du 25 août 1976 portant attributions et organisation

    du ministère des Affaires étrangères et de la Coopération. 35 Décret n° 31/PR fixant la composition du gouvernement, JORG, 15 février 1968, p. 100. 36 George Rawiri, assuma cette fonction de Ministre d’État, chargé de l’Ambassade du Gabon

    en France, jusqu’à sa suppression dans les années soixante-dix. 37 Dans ce gouvernement, Paul Malékou, exerça la fonction de Ministre délégué à la

    présidence de la République, chargé de la Coordination et des Affaires étrangères. 38 Ministre de la Fonction publique dans les précédents gouvernements, Jean Rémy Ayenoué

    fut la première personnalité à être Ministre des Affaires étrangères et à la Coopération à part

    entière après le coup d’État de 1964.

  • 20 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    l’instar de l’Ambassade du Gabon en Côte-d’Ivoire39

    , de celle en

    Belgique et auprès de la CEE, à la présidence de la République. Cette

    instabilité institutionnelle rendait l’existence d’un Secrétariat Général

    problématique. Il était, en effet, difficile d’imaginer une action de

    coordination, et d’organisation, des services depuis le Secrétariat

    Général d’un ministère dont la structure, et les attributions, fluctuaient

    constamment ou étaient, fréquemment,« absorbées »par la présidence

    de la République. Aussi considérons-nous que, dans un contexte de

    présidentialisation extrême, il est plus probable que l’harmonisation

    des services et des activités du ministère des Affaires étrangères ait

    relevé, en réalité, des Secrétariats Généraux du Gouvernement (1964

    et 1966), puis de la présidence de la République (1967-1975).Au-delà

    de la datation, quant à l’instauration du Secrétariat Général aux

    Affaires étrangères, il restait que dans les ministères, ainsi identifiés et

    d’autres probablement, l’introduction des « SG » affirma l’existence

    de l’administration centrale en tant qu’entité distincte, et mieux

    affirmée, par rapport aux cabinets ministériels. En effet, dans les

    ministères, les Secrétariats Généraux regroupèrent l’ensemble des

    services techniques centraux et extérieurs ou provinciaux. Ces

    regroupements des services au sein d’entités uniques marquèrent, plus

    fortement, la présence des services centraux dans l’organisation, et le

    fonctionnement, des ministères. Alors que jusque-là, les départements

    ministériels se caractérisaient par l’existence des cabinets ministériels

    englobant, à la fois, les collaborateurs des Ministres (Directeurs de

    cabinets, Conseillers, Chargés de missions…) et les services

    techniques (directions et inspections générales, directions des

    services…), les Secrétariats Généraux donnaient plus de visibilité aux

    administrations centrales. Celles-ci se présentaient désormais comme

    des organismes, sinon autonomes et neutres, du moins bien

    spécifiques et cohérents. Il en résultait une hybridité institutionnelle

    qui distinguait très nettement les cabinets ministériels, d’une part, et

    les services administratifs et techniques, d’autre part.

    Les « SG » rééquilibraient l’organisation des ministères. Aux

    anciennes structures ministérielles hypertrophiées, dominées par les

    39 Le décret n° 0068 /PR du 19 février 1968, portant rattachement à la présidence de la

    République de l’Ambassade du Gabon en Côte-d’Ivoire, JORG, 5 mars 1968, p. 172.

  • Fabrice NFOULE MBA 21

    Humanitas, 11, 2012

    cabinets, succédaient des armatures binaires consacrant la cohabitation

    des cabinets, et des services, en tant qu’organes bien distincts les uns

    des autres. Au milieu des années soixante-dix, les organigrammes des

    ministères déclinaient alors, et systématiquement, deux structures

    principales, à savoir le cabinet et les services. Au ministère des

    Affaires étrangères et de la Coopération, par exemple, cette dualité se

    matérialisait, en 197640, par l’identification d’un cabinet du Ministre,

    d’une part, et d’une administration centrale accompagnée de plusieurs

    services extérieurs, d’autre part. Sous les auspices d’un Directeur, le

    cabinet officia, bien sûr comme un organe politique et technique de

    conception, mais également et surtout de transmission des

    instructions, ou directives, ministérielles (Schrameck 1995).

    Regroupés sous la coupole d’un Secrétaire Général, les services

    administratifs se limitèrent, quant à eux, à un rôle essentiellement

    technique consistant, pour les services centraux, en un travail de

    conception censé aiguillonner les autorités politiques dans la prise de

    décisions (Gohin 2006). Il leur revenait de concevoir, et de produire,

    aussi bien la législation que la règlementation devant régir divers

    secteurs d’activités. Localisée à Libreville, capitale administrative et

    politique, l’administration centrale du ministère des Affaires

    étrangères se déclinait en Directions Générales, Directions et

    Divisions… regroupées au sein du Secrétariat Général. Déployés hors

    du territoire national, les services extérieurs, quant à eux,

    apparaissaient comme des prolongements, à des échelons

    administratifs, et hiérarchiques, inférieurs, à savoir les Ambassades,

    les Représentations dans les organismes internationaux ou sous

    régionaux et les Consulats... Ces services extérieurs appliquaient, non

    seulement, la législation et la réglementation adoptées, mais

    exécutaient aussi les instructions des autorités politiques transitant par

    l’administration centrale. Toutefois, l’hybridité institutionnelle

    préconisée par l’introduction des Secrétariats Généraux dans les

    ministères paraissait« inachevée ».

    La mise en place des Secrétariats Généraux dans les ministères fut

    lente et progressive. Elle procédait d’un processus dont l’application

    40Article 5 du décret n° 00774/PR/MAEC du 25 août 1976 portant attributions et organisation

    du ministère des Affaires étrangères et de la Coopération.

  • 22 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    était insuffisante. Sur une période allant de 1968 à 1976, soit huit

    années, six ministères41

    furent effectivement dotés des Secrétariats

    Généraux. Même si cette liste de départements ministériels disposant

    de « SG » est loin d’être exhaustive, son caractère restreint suppose

    que plusieurs ministères en restaient dépourvus. L’organisation, et le

    fonctionnement, du ministère des Eaux et Forêts, en 1968, et de celui

    des Transports et de l’Aviation civile, en 1970, étaient, entre autres,

    des exemples emblématiques de cette situation. En 1968,

    l’administration des Eaux et Forêts englobait, à la fois, le cabinet du

    Ministre, un Conseiller administratif, un Conseiller technique et une

    Direction des Services des Eaux et Forêts (DSEF)42

    . Ce

    fonctionnement, et cette organisation, en une structure unique

    suscitaient une confusion entre le cabinet du Ministre et les services

    techniques. En effet, l’on passait, directement du cabinet du Ministre

    aux cinq services techniques43

    déclinés au sein de l’unique direction

    du ministère. Au ministère des Transports et de l’Aviation civile44

    aucune instance technique, ou politique, n’existait entre le cabinet du

    Ministre et les trois directions chargées respectivement des

    Transports, de l’Aéronautique civile et de la Météorologie nationale.

    Dans l’un, ou l’autre, des cas, « l’arrimage »des services techniques

    aux cabinets ministériels était symptomatique du manque d’organe de

    coordination. De ce fait, il n’y avait pas de frontière ni de distinction,

    non seulement entre le cabinet et l’administration centrale, mais aussi

    entre les services centraux, d’une part, et les services provinciaux,

    d’autre part. Ces exemples, parmi d’autres, incitaient à penser que

    l’introduction des « SG » dans les ministères était « partielle ». Elle ne

    touchait pas le dispositif ministériel dans son ensemble. Or, cette

    inexistence des Secrétariats Généraux dans plusieurs ministères

    41 Affaires économiques, Éducation nationale, Finances et Budget, Travail, Intérieur et

    Affaires Etrangères. 42 Article 4 du décret 0030/PR-MEF-SF portant modification de l’organisation et des

    attributions du ministère des Eaux et Forêts, JORG, 1er mars 1968, p. 131. 43Le service de la gestion de la forêt, le service de la chasse, pêche et pisciculture, le bureau

    d’études, le service du personnel et de la comptabilité, le service de l’assistance technique aux

    exploitants gabonais sont déclinés comme faisant partie de la Direction des services par

    l’article 9 du décret 0030/PR-MEF-SF portant modification de l’organisation et des

    attributions du Ministère des Eaux et Forêts,op. cit. 44 Décret n° 461/PR du 20 mars 1970 portant organisation et attributions du ministère des

    Transports, de l’Aviation civile et commerciale.

  • Fabrice NFOULE MBA 23

    Humanitas, 11, 2012

    atténuait considérablement la portée de l’hybridité institutionnelle

    ainsi envisagée. Il en résultait une prééminence du cabinet sur les

    services administratifs.

    À la fin des années soixante, les conditions de création des

    Secrétariats Généraux dans les ministères étaient très drastiques, voire

    restrictives. Seuls les ministères justifiant de trois Directions

    Générales, au moins, pouvaient en disposer. En-deçà, la coordination

    des services, et de leurs activités, s’exerçait depuis le cabinet des

    Ministres. Au regard de la jeunesse de l’appareil administratif au

    Gabon, cela réduisait considérablement le nombre des départements

    ministériels pouvant prétendre à un Secrétariat Général. Or, ne

    revendiquant qu’une, ou deux, Directions Générales, plusieurs

    ministères ne remplissaient pas ce critère. Aussi, le fonctionnement, et

    l’organisation, de nombreux ministères prêtaient-ils le flan à une

    coordination des services assumée par l’autorité ministérielle, par le

    canal des Directeurs de cabinets. On pouvait, sur ce fait, avec Zacharie

    Myboto, évoquant son expérience dans cette fonction au ministère des

    Eaux et Forêts, de 1968 à 1971, alléguer que la coordination des

    différentes directions du ministère incombait, en réalité, du Directeur

    de cabinet (2005: 54-55). Abondant dans le même sens, pour ce qui

    est du ministère des Affaires étrangères, Éric Joël Bekalé, précisait

    que le travail du Directeur de cabinet permettait aux services de

    fonctionner, sans discontinuité (2010: 23). Postulant clairement une

    prédominance des cabinets sur les services centraux, les analyses de

    ces deux praticiens de la haute administration au Gabon identifiaient

    la coordination des services comme une des attributions des

    Directeurs des cabinets ministériels. Ceux-ci se présentaient alors, non

    seulement comme de simples éléments de coordination des services,

    mais également de continuité de l’action publique. Pourtant, si la

    proximité avec l’autorité politique de tutelle pouvait conférer une

    certaine primauté aux cabinets sur les services centraux, il était en

    revanche légitime de s’interroger sur la réelle capacité d’un organisme

    politique, dont les membres n’avaient pas vocation à durer, à assurer

    efficacement la continuité de l’action publique. En effet, Guy Hernet

    et Bertrand Badie percevaient les cabinets comme étant l’

  • 24 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    entourage immédiat d’un Ministre, formé de fonctionnaires,

    d’experts ou de cadres politiques nommés, à sa discrétion, pour la

    durée de ses fonctions (2010: 40).

    L’espérance de vie des membres d’un cabinet était, en général, brève.

    Rattachés aux Ministres, leurs carrières en suivaient les itinéraires qui,

    au gré des remaniements ministériels, étaient ponctués de moult

    affectations gouvernementales ou d’arrêt définitif. Toutefois, et en

    dépit des réserves que pouvaient susciter les perceptions, ainsi

    présentées, des rapports cabinets-services centraux, il n’en demeure

    pas moins qu’elles confirmaient la prépondérance des cabinets dans

    les ministères au Gabon au milieu des années soixante-dix au début

    des années quatre-vingt. Cette prééminence politique prétextait une

    « absorption » des prérogatives techniques de l’administration centrale

    par les cabinets. En plus d’organiser la liaison avec la présidence de la

    République, la Primature et les autres ministères, les cabinets avaient

    tendance à contrôler le niveau, et la qualité, des prestations des

    services. L’administration centrale s’en retrouvait affaiblie. Ses

    services, et activités, étaient coordonnés par un organe politique et

    technique extérieur. Cette faiblesse de l’administration dans les

    ministères manquant de Secrétariats Généraux, nuançait

    considérablement la dualité institutionnelle. Pour autant, et

    systématiquement, attenant aux cabinets des Ministres,

    l’organigramme des ministères des Affaires économiques, de

    l’Éducation nationale, des Finances, et des Affaires étrangères…,

    comprit, systématiquement, un Secrétariat Général regroupant les

    services centraux, et déconcentrés, de l’administration. Au-delà de

    l’exacerbation de la distinction entre le politique, incarné par le

    cabinet, et l’administration, représentée par les services techniques, le

    déploiement des Secrétariats Généraux dans ces quatre ministères

    marqua l’affirmation d’une instance technique, et administrative,

    placée, néanmoins, dans une situation statutaire assez particulière.

    2.1.1. Une autorité à la prééminence ambiguë

    L’organisation des ministères, entre 1965 et 1967, souffrait de

    l’absence d’instance de coordination des services techniques centraux

  • Fabrice NFOULE MBA 25

    Humanitas, 11, 2012

    et déconcentrés. En effet, si les cabinets ministériels avaient

    automatiquement à leur tête un Directeur, chargé de l’animation, et du

    suivi du travail, non seulement des Conseillers, mais aussi d’autres

    collaborateurs des Ministres, la coordination des services centraux, et

    extérieurs, n’était pas assurée partout. Face à un cabinet prééminent,

    l’effacement de l’administration centrale était d’autant plus criard que,

    dans plusieurs ministères, de nombreux services techniques

    apparaissaient extrêmement cloisonnés.

    En 1965, l’administration du ministère de l’Agriculture se résumait à

    l’unique Direction de l’Agriculture, de l’Élevage et des Industries

    Animales (DAEIA)45

    . La situation était similaire dans plusieurs autres

    ministères. En règle générale, l’administration déclinait plusieurs

    services techniques autant isolés que séparés les uns des autres. Le

    fonctionnement des ministères souffrait alors du manque d’une entité

    administrative, et technique, spécifiquement consacrée à la

    coordination, et à l’organisation, des services. Mais, si, au début des

    années soixante, cette situation convenait dans un contexte où les

    services centraux, et extérieurs, des ministères tenaient dans une seule

    ou deux structures administratives, elle se révéla, plus tard,

    particulièrement incommodante avec la multiplication des services

    techniques.

    À la fin des années soixante-dix, l’appareil administratif gabonais

    dévoilait une multitude de directions, d’inspections, et de subdivisions

    provinciales ou régionales, notamment dans les domaines des Travaux

    publics, du Trésor, des Douanes, etc. C’est dans cet esprit, qu’en plus

    d’une administration centrale incluant une Inspection et une Direction

    générales, en 1984, le ministère du Travail et de l’Emploi46

    mobilisait

    plusieurs services déconcentrés. Ceux-ci se déclinaient en Directions

    et Inspections Provinciales du Travail, de la Main d’œuvre et de

    l’Emploi, réparties dans l’ensemble du territoire national. Au regard

    des multiples circonscriptions administratives, destinées à accueillir

    les nombreux démembrements locaux des différents départements

    45 Article 10 du décret n° 311/PR-MIN-AEER du 8 octobre 1965 portant réorganisation du

    ministère de l’Agriculture, de l’Élevage et de l’Économie rurale. 46 Décret n° 211/PR/MTE du 6 février 1984 portant attributions et organisation du ministère

    du Travail et de l’Emploi.

  • 26 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    ministériels, il était évident qu’il en résulterait un appareil

    administratif, et technique, exubérant. Or, cette prolixité des services

    techniques extérieurs densifiait considérablement l’ossature de

    l’administration. Il fallut alors disposer d’organes spécifiques pour

    coordonner, et harmoniser, ses activités. Aussi, bien que « partielle »,

    l’avènement des Secrétariats Généraux engendra-t-elle une

    « autorité » administrative majeure. L’une des attributions du « SG »

    dans les ministères était de coordonner, et de contrôler, l’activité de

    l’ensemble des directions et des services47

    . En considérant cette

    déclinaison générique des compétences du « SG » par le décret n° 807

    de 1968, il ressortait que les Secrétariats Généraux, expérimentés à la

    fin des années soixante dans les ministères, étaient avant tout des

    organes de coordination, chargés de la cohésion du travail

    administratif. Mais, le fait aussi de «contrôler» les directions, et autres

    services, impliquait que leurs prérogatives débordèrent largement le

    cadre restreint de l’harmonisation technique. À ces compétences

    s’ajoutait donc une multitude d’autres attributions érigeant les « SG »

    en piliers de la continuité de l’action publique. Cela se faisait

    particulièrement ressentir dans la régulation des flux des personnels de

    l’administration centrale et des services extérieurs. En effet, le « SG »

    devait tenir un rôle prééminent dans les affectations, et autres

    mutations, des agents publics des différents ministères. Aussi,

    s’apparentaient-ils à des« sas » de décompression, notamment pour les

    fonctionnaires, et les contractuels, regagnant leurs administrations

    d’origine après une période de détachement. Sans déboucher sur

    l’émergence d’une instance concurrente, ou gênante, pour la tutelle

    politique, les attributions des « SG » en faisaient les premiers

    responsables des services administratifs. Cela ne manqua pas de

    raffermir la notion d’administration centrale.

    En coordonnant les services, et en régulant, les mouvements des

    agents de l’État, les Secrétaires Généraux consolidaient

    l’administration centrale. Dorénavant dotée d’une « autorité » garante

    de son harmonisation, celle-ci était alors en mesure de garantir

    efficacement la continuité de l’action publique. Pour les services

    47 Cette prérogative apparaît clairement dans le décret n° 807/PR-MENSC portant création

    d’un Secrétariat Général au ministère de l’Éducation nationale et ses attributions.

  • Fabrice NFOULE MBA 27

    Humanitas, 11, 2012

    techniques extérieurs, ou provinciaux, il s’ensuivra une « tutelle »

    administrative cohabitant, bien que subordonnée, à la tutelle politique.

    Incarnée, et exercée, par les Secrétaires Généraux, celle-ci marquait

    plus fortement la présence de l’administration centrale dans les

    ministères. Bien que ne réfutant pas fondamentalement la primauté de

    la tutelle politique sur les services déconcentrés, cette nouvelle

    articulation portait en elle les ferments, sinon d’une autonomie, du

    moins d’une plus grande affirmation des services centraux.

    L’administration centrale recouvrait ainsi certaines de ses prérogatives

    techniques.

    La mise en place des « SG » dans les ministères augurait d’un

    transfert de certaines attributions techniques, auparavant inhérentes

    aux directions des cabinets vers les services centraux. Naguère

    orchestrée depuis les cabinets des Ministres, la coordination des

    services centraux, et extérieurs, releva désormais, et exclusivement,

    des Secrétaires Généraux. Positionnés à l’interface des services

    techniques et des cabinets, les « SG » assuraient la liaison entre ces

    deux composantes des ministères. Cela occasionna un rééquilibrage

    institutionnel qui verra l’administration mieux afficher sa présence sur

    les questions techniques. Bien que subordonnée aux autorités

    politiques, l’introduction des « SG » exhortait la consonance

    technique de l’administration centrale. Celle-ci devait désormais, non

    seulement coordonner les services extérieurs, ou provinciaux, mais

    aussi en canaliser les activités et les actions. Au-delà, de la cohésion,

    les « SG » jouaient aussi un rôle d’interface particulièrement

    important entre les autorités politiques et leurs cabinets, d’une part, et

    les services centraux et extérieurs ainsi que les établissements sous

    tutelle, d’autre part. Il leur revenait de transmettre les instructions, et

    autres directives, des autorités politiques aux différents échelons

    administratifs et de veiller à l’application de celles-ci. Au total, les

    Secrétariats Généraux des ministères suscitèrent l’existence d’une

    administration centrale, en tant qu’entité distincte, devant néanmoins

    trouver sa place entre les Ministres et leurs cabinets respectifs.

    Toutefois, au plan statutaire, la situation du « SG » dans les ministères

    comportait des ambiguïtés qui ne manquèrent pas d’affaiblir sa

    position.

  • 28 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    Les attributions des « SG » devaient, en principe, leur conférer une

    autorité sur les services techniques dont ils apparaissaient

    indubitablement comme les premiers responsables administratifs.

    Pourtant, en dépit d’un rôle perçu comme prééminent, leur situation

    statutaire était assez « minorée ». Le statut des « SG » des ministères

    équivalait à ceux des responsables administratifs des échelons

    inférieurs. Au ministère des Finances, et du Budget, par exemple, le

    « SG » avait rang de Directeur d’administration centrale48

    . Même s’il

    s’agissait, à l’époque, du palier le plus élevé de l’administration en

    termes d’échelon, et de fonction, cela posait un problème flagrant

    d’hiérarchisation entre les services centraux. Considéré au même

    niveau qu’une Direction des services, le Secrétariat Général de

    ministère ne se démarquait pas vraiment des autres échelons de

    l’administration centrale. Cette situation statutaire« amoindrie »

    compromettait sa primauté sur les autres paliers administratifs et

    techniques. Appelés à se prévaloir d’une position prépondérante dans

    l’organisation, des départements ministériels, et le fonctionnement des

    services, les « SG » étaient ainsi dépourvus d’autorité. Il semblait que

    cette fonction était conçue comme un simple élément d’harmonisation

    technique. Sur ce point, la réforme introduisant les Secrétariats

    Généraux dans les ministères apparaissait « inachevée ». Sinon,

    comment comprendre que des organes chargés de la cohésion des

    services, et du contrôle de leurs activités, aient bénéficié d’un statut

    égal à celui des organismes censés être sous leur autorité ? Ainsi

    présentés, les « SG » des ministères ne jouissaient d’aucune

    prépondérance sur les autres échelons administratifs centraux. Il

    importait alors de régler cette question d’échelonnage hiérarchique en

    mettant les « SG » un cran au-dessus des autres paliers de

    l’administration centrale. Par ailleurs, la définition des missions, aux

    contours trop généraux, suscitait une confusion parmi les services

    centraux.

    La coordination des services et organisation des activités, attributions

    phares des Secrétariats Généraux, n’apparaissait point comme leur

    48 Article 3 du décret n° 125/PR du 6 février 1969, portant création d’un Secrétariat Général

    au ministère des Finances et du Budget et en fixant les attributions.

  • Fabrice NFOULE MBA 29

    Humanitas, 11, 2012

    prérogative principale. Elle se diluait dans une foule d’autres charges

    aussi diverses que variées. En effet, les « SG » devaient veiller

    au suivi de la gestion des crédits budgétaires, à l’élaboration et à

    l’application de la législation49

    . Ils intervenaient aussi dans la

    préparation des missions des Ministres. Il leur revenait également

    d’assurer la liaison entre les services techniques et les cabinets

    ministériels. Cette multiplicité des missions attisait une confusion

    dans la distribution des rôles entre les différents échelons de

    l’administration centrale. Dans une certaine mesure, les « SG » étaient

    conçus comme des structures concurrentes, non seulement des

    Directions et Inspections Générales, mais aussi des Directions et

    autres Services. Cette rivalité avec les autres composantes de

    l’administration centrale entravait largement la prédominance

    supposée des « SG ». Le statut de premier responsable administratif,

    devant normalement leur échoir, se retrouvait contesté. Mal

    circonscrites, les prérogatives, au demeurant floues des « SG », ne leur

    permettaient pas de consolider leur posture d’échelon le plus élevé de

    l’administration centrale. Ils se présentaient comme de simples

    services centraux venant alourdir l’organisation, et le fonctionnement,

    de l’administration centrale préexistante. Mais, au-delà des écueils,

    sur la position hiérarchique, et la délimitation des missions, il n’en

    restait pas moins que l’introduction des « SG » marqua

    structurellement l’organisation, et le fonctionnement, des ministères.

    Ceux-ci, même en balbutiant, évoluèrent vers une hybridité

    institutionnelle désignant systématiquement les « SG » comme les

    coordonateurs des services administratifs et affirmant plus fortement

    la présence, et le rôle, de l’administration centrale. La mise en place

    du Secrétariat Général de la Primature constitua un des points d’ogre

    de cette métamorphose institutionnelle.

    49 Ces prérogatives sont déclinées Décret n° 0076/PR-MAEDPME du 22 février 1968, portant

    création d’un Secrétariat Général au ministère des Affaires économiques, du Développement,

    du Plan, des Mines et de l’Énergie, définissant les attributions et fixant les traitements et indemnités du Secrétaire Général, JORG, 15 mars, 1968, p. 175, mais aussi le décret n° 125/PR du 6 février 1969 portant création d’un Secrétariat Général au ministère des Finances

    et du Budget et en fixant les attributions.

  • 30 L’introduction des Secrétariats Généraux…

    Humanitas, 11, 2012

    2.2. Un « SG » à l’influence limitée (1981-1986)

    C’est la réforme constitutionnelle du 22 août 1981 qui octroya au

    Premier Ministre (PM), les attributions de Chef de gouvernement. Il

    faudra, pourtant, attendre 1986 pour que les pratiques institutionnelles

    se conforment aux indications constitutionnelles. C’est finalement

    cinq ans après que le « PM » exerça, effectivement, la prérogative de

    Chef de gouvernement. Mais, en désignant le « PM »50

    comme étant le

    premier responsable de la concrétisation de la politique imprimée par

    le Président de la République, le décret du 7 avril 198651

    , lui accordait

    des attributions assez élargies sur l’administration publique et ses

    agents. Ce texte le responsabilisait, en effet, dans le fonctionnement et

    l’organisation des services publics, mais aussi dans la gestion de leurs

    personnels. Le « PM » disposait ainsi, techniquement, de

    l’administration et des agents civils de l’État. Il lui incombait de

    réguler les situations administratives52

    ponctuant l’évolution de la

    carrière dans la fonction publique. La matérialisation de cette mission

    impliquait la mise en place d’une instance à même d’assurer, non

    seulement la coordination des services techniques de la Primature,

    mais aussi la liaison entre la Primature et les différents services

    centraux de l’administration, en général. Ainsi consacré dans ses

    nouvelles attributions, il importait, pour le « PM », de requérir la

    collaboration des services techniques pour l’aider dans les missions

    qui lui étaient désormais assignées. Cette nouvelle dimension du

    « PM »53

    suggérait un renforcement de l’architecture technique de

    50La fonction de Premier Ministre fut introduite au Gabon en 1959 comme principal

    institution du pouvoir exécutif. Elle a existé dans cette configuration jusqu’en 1960 avant que

    la Constitution du 21 février 1961, en consacrant le Président de la République, ne lui

    substitue le ou les vices présidents du gouvernement. Elle réapparaît en 1975. Dès lors, elle

    évolue dans le sens d’une consolidation qui accentue la bipolarité du pouvoir exécutif. 51En plus des prérogatives sur l’administration, et ses personnels, le décret n° 380 du 7 avril

    1986 confortait le Premier Ministre aussi bien dans la direction de l’action gouvernementale,

    la coordination gouvernementale en matière législative que l’exécution des lois et l’exercice

    du pouvoir réglementaire, l’exercice occasionnel et la délégation des pouvoirs présidentiels. 52Intégrations, engagements, titularisations, confirmations, changements de corps et de

    positions, promotions de classe et de grade, radiation, mise à disposition, retraite, etc.) 53Avant 1986, le Premier Ministre n’avait pas les attributions de Chef de gouvernement. Sur

    la consonance, la place et l’évolution de la fonction de Premier Ministre au Gabon dans

    l’espace institutionnel, à partir de 1975, voir PambouTchivounda (G), (1979), « Essai de

    synthèse sur le Premier ministre africain », RJPIC, p. 259.

  • Fabrice NFOULE MBA 31

    Humanitas, 11, 2012

    l’instance, ou organisme, qui l’accueillait. Aussi, l’instauration d’un

    Secrétariat Général à la Primature apparaissait comme une des

    conséquences directes du renforcement des prérogatives du Premier

    Ministre sur l’administration. Il en découla une réorganisation

    structurelle des services du Premier Ministre.

    À l’instar de certains ministères techniques et régaliens, vers la fin des

    années soixante et le milieu des années soixante-dix, l’introduction

    d’un Secrétariat Général à la Primature, en 1986, suscitait une

    hybridité institutionnelle assez affichée. À côté du cabinet civil et

    politique du « PM », émergeait une armature technique comprenant

    plusieurs services et organismes rattachés. Jusque-là, considérée

    comme un simple « lieu d’accueil » pour le cabinet de travail du

    Premier Ministre, et les services qui lui étaient rattachés, la Primature

    arborait désormais une ossature technique beaucoup plus consistante.

    Comprenant un cabinet civil et politique, d’une part, et un ensemble

    de services et d’organismes techniques, d’autre part, elle apparaissait

    dorénavant comme une instance, à part entière, du dispositif

    gouvernemental. Il en découla une présence institutionnelle plus

    affirmée, non seulement du Premier Ministre, mais également de la

    Primature. À côté, et intimement liés au « PM », se tenait un appareil

    administratif, et technique, mobilisant à la fois des personnels

    permanents et des services, ou des organismes, publics dont la

    vocation première était d’œuvrer à la réussite du Chef du

    gouvernement. En outre, le Secrétariat Général incita une

    amplification de l’ossature administrative, et technique, de la

    Primature.

    La création d’un Secrétariat Général à la Primature54

    , en 1986

    participa d’une réorganisation des services du « PM » densifiant

    considérablement l’armature technique de la Primature. Cela se

    traduisait par la mise en place de quatre Directions, chargées de la

    gestion des personnels, des questions administratives et financières, du

    protocole et de la presse55

    . Cette nomenclature incluait également le

    Secrétariat Général d