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REVUE DE PRESSE 46 AMC pratique n°224 janvier 2014 © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés J.-J. Monsuez Ce bilan initial montre que la préva- lence de l’ischémie cérébrale silen- cieuse est plus élevée chez les malades ayant une FA, qu’elle soit persistante ou paroxystique, comparativement aux sujets indemnes de FA (dont on peut toutefois remarquer qu’elle n’est pas négligeable dans ce travail, de l’ordre de 46 %, plus élevée que ce qui a été rapporté précédemment, de l’ordre de 8 % à 28 %, en fonction de l’âge). Le second point important constaté en IRM concerne le nombre total de zones d’ischémie silencieuse, plus élevé chez les malades en FA que chez les témoins, mais aussi plus élevé chez ceux en FA persistante que chez ceux en FA paroxystique, là aussi avec une différence statistiquement signi- ficative (tableau 1). Le déclin cognitif est plus marqué chez les malades en FA que chez les témoins, sans différence sur le score global RBANS entre malades en FA persistante et paroxystiques, mais avec une sévérité plus marquée des tests neuropsychologiques évaluant les adaptations visuo-spatiales en cas de FA persistante (tableau 1). Gaita F, Corsinovi L, Anselmino M, et al. Prevalence of silent cerebral ischemia in paroxysmal and persistent atrial fibrilla- tion and correlation with cognitive func- tion. J Am Coll Cardiol 2013 ; 62:1990-7. Les résultats obtenus dès ce premier bilan de maladies en FA persistante ou paroxystique ont des implica- tions pratiques non négligeables. La FA est le trouble rythmique le plus fréquent. La présence de zones d’is- chémie silencieuse chez une grande majorité des malades (90 % vs 12 % en l’absence de FA) indemnes d’an- técédent neurologique et âgés de moins de 60 ans, amène une réflexion immédiate sur la préven- tion par les anticoagulants. La majorité des malades en FA persis- Boe A, Eren M, Murphy SB, et al. Plasminogen activator inhibitor-1 antagonist TM5441 attenuates N -nitro-L-arginine methyl ester-induced hypertension and vascular senescence. Circulation 2013 ; 128:2318-24. Fibrillation atriale Si le risque thromboembolique et plus spécifiquement celui d’accident vasculaire cérébral (AVC) de la fibrilla- tion atriale (FA) a largement été répertorié, en particulier dans les études sur sa prévention par les anti- coagulants, celui du retentissement direct de la FA sur le déclin cognitif a été beaucoup moins exploré. Pourtant, les malades en FA et ceux atteints de déclin cognitif partagent, au sein d’une population à risque similaire (âge, prévalence accrue de facteurs de risque cardiovasculaires), la particularité commune d’être plus souvent victimes d’épisodes d’isché- mie cérébrale silencieuse, dépistée en IRM par la présence d’hypersignaux de la substance blanche sous-corti- cale et/ou péri-ventriculaire. Une cohorte italienne constituée de 180 patients atteints de FA, paroxys- tique ou persistante, inclus entre 2008 et 2012, a été comparée à 90 témoins avec une double évaluation initiale, en IRM et analyse de leur fonction cognitive. Tous sont indemnes d’anté- cédent neurologique, cérébro-vascu- laire, AVC ou accident ischémique transitoire. L’examen IRM documente l’ischémie cérébrale silencieuse en fonction de la présence ou non d’hy- persignaux de la substance blanche en séquence de flux pondérée en T2, FLAIR, ou de signaux iso untense en séquence T1. La fonction cognitive est quantifiée par des tests neuropsycho- logiques évaluant la mémoire immé- diate et différée, les capacités visuo-spatiales, l’attention et le langage, l’ensemble étant ensuite combiné dans un score global RBANS (repeatable battery for the assessment of neuropsychological status). Hypertension artérielle La NO synthase endothéliale catalyse la formation de monoxyde d’azote (NO) à partir de la L-arginine. Son inhibition chronique par un analogue structural tel que le N-nitro-L- argininemethyl ester (L-NAME), provoque une hypertension artérielle expérimentale et une sénescence vasculaire accélérée chez l’animal. Inversement, les souris déficientes en inhibiteur de l’activateur du plasmi- nogène (PAI-1) sont protégées de cette pathologie induite par l’inhibi- tion de la NO synthase. Un travail expérimental mené sur des souris a comparé l’effet du L-NAME administré seul ou associé à un inhi- biteur du PAI-1, le TM5441. L’adjonction de l’inhibiteur du PAI-1 limite l’apparition de l’HTA et l’hy- pertrophie ventriculaire gauche induites par le L-NAME. Elle réduit aussi de 34 % la fibrose péri-aortique induite. Parallèlement, l’inhibiteur ralentit aussi la sénescence accélérée par le L-NAME, comme en témoigne le moindre raccourcissement de la longueur des télomères observée. Cette étude, dont les méthodes pour- raient paraître bien éloignées de nos préoccupations quotidiennes, offre, au-delà de son aspect purement conceptuel, des perspectives inatten- dues. Si la physiopathologie de l’HTA reste en effet toujours mal comprise et qu’un traitement dont le méca- nisme est plus spécifique s’avère en mesure d’en prévenir l’apparition, sa voie d’activation/inhibition est poten- tiellement mise en jeu. Le second aspect est que débloquer l’inhibition de la NO synthase prévient les lésions vasculaires associées à l’HTA. L’ensemble confirme le rôle possible du NO dans la physiopathologie de l’HTA et de son retentissement, tout en laissant entrevoir un autre maillon dans cette voie physiopathologique, qu’est la place du PAI-1 et de son inhi- bition à visée thérapeutique.

Hypertension artérielle

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REVUE DE PRESSE

46 AMC pratique � n°224 � janvier 2014© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

J.-J. Monsuez

Ce bilan initial montre que la préva-lence de l’ischémie cérébrale silen-cieuse est plus élevée chez les malades ayant une FA, qu’elle soit persistante ou paroxystique, comparativement aux sujets indemnes de FA (dont on peut toutefois remarquer qu’elle n’est pas négligeable dans ce travail, de l’ordre de 46 %, plus élevée que ce qui a été rapporté précédemment, de l’ordre de 8 % à 28 %, en fonction de l’âge). Le second point important constaté en IRM concerne le nombre total de zones d’ischémie silencieuse, plus élevé chez les malades en FA que chez les témoins, mais aussi plus élevé chez ceux en FA persistante que chez ceux en FA paroxystique, là aussi avec une différence statistiquement signi-ficative (tableau 1).Le déclin cognitif est plus marqué chez les malades en FA que chez les témoins, sans différence sur le score global RBANS entre malades en FA persistante et paroxystiques, mais avec une sévérité plus marquée des tests neuropsychologiques évaluant les adaptations visuo-spatiales en cas de FA persistante (tableau 1).

Gaita F, Corsinovi L, Anselmino M, et al.

Prevalence of silent cerebral ischemia in

paroxysmal and persistent atrial fibrilla-

tion and correlation with cognitive func-

tion. J Am Coll Cardiol 2013 ; 62:1990-7.

Les résultats obtenus dès ce premier bilan de maladies en FA persistante ou paroxystique ont des implica-tions pratiques non négligeables. La FA est le trouble rythmique le plus fréquent. La présence de zones d’is-chémie silencieuse chez une grande majorité des malades (90 % vs 12 % en l’absence de FA) indemnes d’an-técédent neurologique et âgés de moins de 60 ans, amène une réflexion immédiate sur la préven-tion par les anticoagulants. La majorité des malades en FA persis-

Boe A, Eren M, Murphy SB, et al. Plasminogen

activator inhibitor-1 antagonist TM5441

attenuates N�-nitro-L-arginine methyl

ester-induced hypertension and vascular

senescence. Circulation 2013 ; 128:2318-24.

Fibrillation atriale

Si le risque thromboembolique et plus spécifiquement celui d’accident vasculaire cérébral (AVC) de la fibrilla-tion atriale (FA) a largement été répertorié, en particulier dans les études sur sa prévention par les anti-coagulants, celui du retentissement direct de la FA sur le déclin cognitif a été beaucoup moins exploré. Pourtant, les malades en FA et ceux atteints de déclin cognitif partagent, au sein d’une population à risque similaire (âge, prévalence accrue de facteurs de risque cardiovasculaires), la particularité commune d’être plus souvent victimes d’épisodes d’isché-mie cérébrale silencieuse, dépistée en IRM par la présence d’hypersignaux de la substance blanche sous-corti-cale et/ou péri-ventriculaire.Une cohorte italienne constituée de 180 patients atteints de FA, paroxys-tique ou persistante, inclus entre 2008 et 2012, a été comparée à 90 témoins avec une double évaluation initiale, en IRM et analyse de leur fonction cognitive. Tous sont indemnes d’anté-cédent neurologique, cérébro-vascu-laire, AVC ou accident ischémique transitoire. L’examen IRM documente l’ischémie cérébrale silencieuse en fonction de la présence ou non d’hy-persignaux de la substance blanche en séquence de flux pondérée en T2, FLAIR, ou de signaux iso untense en séquence T1. La fonction cognitive est quantifiée par des tests neuropsycho-logiques évaluant la mémoire immé-diate et différée, les capacités visuo-spatiales, l’attention et le langage, l’ensemble étant ensuite combiné dans un score global RBANS (repeatable battery for the assessment of neuropsychological status).

Hypertension artérielle

La NO synthase endothéliale catalyse la formation de monoxyde d’azote (NO) à partir de la L-arginine. Son inhibition chronique par un analogue structural tel que le N�-nitro-L-argininemethyl ester (L-NAME), provoque une hypertension artérielle expérimentale et une sénescence vasculaire accélérée chez l’animal. Inversement, les souris déficientes en inhibiteur de l’activateur du plasmi-nogène (PAI-1) sont protégées de cette pathologie induite par l’inhibi-tion de la NO synthase.Un travail expérimental mené sur des souris a comparé l’effet du L-NAME administré seul ou associé à un inhi-biteur du PAI-1, le TM5441. L’adjonction de l’inhibiteur du PAI-1 limite l’apparition de l’HTA et l’hy-pertrophie ventriculaire gauche induites par le L-NAME. Elle réduit aussi de 34 % la fibrose péri-aortique induite. Parallèlement, l’inhibiteur ralentit aussi la sénescence accélérée par le L-NAME, comme en témoigne le moindre raccourcissement de la longueur des télomères observée.Cette étude, dont les méthodes pour-raient paraître bien éloignées de nos préoccupations quotidiennes, offre, au-delà de son aspect purement conceptuel, des perspectives inatten-dues. Si la physiopathologie de l’HTA reste en effet toujours mal comprise et qu’un traitement dont le méca-nisme est plus spécifique s’avère en mesure d’en prévenir l’apparition, sa voie d’activation/inhibition est poten-tiellement mise en jeu. Le second aspect est que débloquer l’inhibition de la NO synthase prévient les lésions vasculaires associées à l’HTA. L’ensemble confirme le rôle possible du NO dans la physiopathologie de l’HTA et de son retentissement, tout en laissant entrevoir un autre maillon dans cette voie physiopathologique, qu’est la place du PAI-1 et de son inhi-bition à visée thérapeutique.