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ICTÈRE FÉBRILE PR A. FILALI SERVICE DES MALADIES INFECTIEUSES FACULTE DE MEDECINE UDC 3

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ICTÈRE FÉBRILE

PR A. FILALI

SERVICE DES MALADIES INFECTIEUSES

FACULTE DE MEDECINE

UDC 3

DÉFINITION • L’ictère fébrile est défini par une coloration jaunâtre des

téguments et des muqueuses due à une augmentation

de la bilirubine dans le sang survenant dans un contexte

fébrile.

• Il s’agit d’un symptôme fréquent, observé dans plusieurs

affections.

• Tout ictère même fébrile n’est pas toujours d’origine

infectieuse.

RAPPEL PHYSIOLOGIQUE

PHYSIOPATHOLOGIE

• Deux mécanismes sont responsables :

>> hyperproduction de la bilirubine (augmentation de BNC) secondaire à une hémolyse ictère pré hépatique.

>> Trouble d’élimination de la bile :

• Anomalie du métabolisme de la bilirubine :

ictère hépatique

* Anomalies de conjugaison (crigler najjar, maladie de Gilbert) => ictère à BNC.

* Cholestase intrahépatique : ictère à BC (hépatites virales, cirrhose).

• Anomalie d’évacuation de la bile :

ictère post hépatique ictère à BC (obstacle ou compression cholédocienne ; lithiase, Tm focalisée ou Tm d’autres organes).

DIAGNOSTIC POSITIF

• Le diagnostic étiologique repose sur des arguments:

- anamnestiques.

- cliniques.

- paracliniques.

1- INTERROGATOIRE

Doit préciser :

- Age du malade et le sexe.

- Profession.

- Notion d’éthylisme.

- Notion de cas similaires dans l’entourage.

- Notion de séjour en zone d’endémie (palustre,…).

- Notion de baignade ou de pêche en eau douce.

On recherche aussi dans les ATCD:

- Une pathologie hépatobiliaire.

- Notion de prise médicamenteuse ou de toxicomanie.

- Notion de transfusion de sang ou de ses dérivés, d’injection, de soins dentaires, d’intervention chirurgicale

L’interrogatoire doit préciser également :

- La date et le mode d’apparition de l’ictère et son mode

d’évolution.

- Les signes accompagnateurs: troubles de transit,

décoloration des selles, coloration foncée des urines, un

prurit, asthénie, hématurie.

2-CLINIQUE

-On doit rechercher l’existence d’une grosse vésicule ,

une éruption cutanée, des ADP.

A- l’ictère: Suivant son intensité, on distingue:

- ictère discret : sub-ictère doit être recherché à la

lumière du jour au niveau des muqueuses

conjonctivales et muqueuse de la face inférieure de la

langue (correspond à un taux de BT entre 15 et

30mg/l).

- franc: couleur jaune généralisée aux téguments et aux

muqueuses (correspond à un taux de BT>30mg/l).

- Intense: couleur brune verdâtre (BT entre 300-400

mg/l).

B-signes de défaillance hémodynamique:

hypotension, pouls accéléré, oligo-anurie.

C- Signes d’insuffisance hépatocellulaire: Syndrome

hémorragique, angiomes stellaires, atrophie

hépatique.

D- signes d’encéphalopathies hépatique: troubles du

comportement, tremblement.

E-signes d’hémolyse aigue: pâleur cutanéo-

muqueuse, tachycardie, SPM.

F- signes HTP: circulation veineuse collatérale, SPM,

ascite.

3- Examens complémentaires *Examens complémentaires de 1er intention:

A- les examens biologiques: hémoculture, FNS, biologie

hépatique, électrophorèse des protéines sériques, TP.

B- L’échographie abdominale: Systématique devant toute

cholestase

C- TDM abdominale: réalisée en cas de cholestase extra-

hépatique, quand l’échographie ne permet pas un

examen correct du pancréas.

*Examens complémentaires de 2éme intention:

• En fonction de l’orientation étiologique:

- Goutte épaisse et FSP.

- Sérologies:- des hépatites virales (A, B, C, D et E), test

de MNI, amibienne, leptospirose, rubéole, rickettsiose,

syphilis

- IDR à la tuberculine

- Radiographie thoracique de face, bili-IRM.

DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL

Il faut éliminer ce qui n’est pas ictère devant une

coloration jaune des téguments et ou des muqueuses :

*La pâleur jaunâtre de certaines anémies.

*L’hypercaroténémie en cas d’insuffisance rénale,

hypothyroïdie,

*Dans ces deux cas l’examen des conjonctives de

coloration normale fait la différence

DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE

A/ CAUSES INFECTIEUSES

LES CAUSES URGENTES :

ANGIOCHOLITE :

C’est une urgence médico-chirurgicale

Cliniquement :

• Epigastralgie ou douleur de l’hypochondre droitaccompagnée de nausées et vomissements.

• Fièvre avec frissons intenses précédant de 12 à 24 h unictère franc.

Biologie :

• confirme le syndrome rétentionnel associé ou non à unsyndrome de cytolyse.

• NFS : hyperleucocytose à PN.

Echographie : recherche une lithiase bilieuse,épaississement de la paroi vésiculaire, une dilatation desvoies biliaires intra ou extra hépatiques.

Traitement: la libération des voies biliaires chirurgicale ouendoscopique + antibiothérapie parentérale.

INSUFFISANCE HEPATIQUE AU COURS DES

HÉPATITES FULMINANTES :

Le plus souvent due à l’hépatite virales (B,C,A),

le patient présente :une encéphalopathie

(troubles de la conscience, astérixis) associé un

syndrome hémorragique cutanéo-muqueux et

une hypoglycémie .

Biologie : syndrome de cytolyse majeure,

TP< 30%, avec chute du facteur V.

Traitement : mesures de réanimation dans

l’attente d’une transplantation hépatique.

SEPSIS A GERMES PYOGÈNES :

- Surtout à BGN à point de départ urinaire ou abdominal évoqué devant; un début brutal, un Syndrome infectieux associé à un ictère et HPSM.

- Sepsis à streptocoque B évoqué surtout chez le n-né.

- Sepsis à clostridium perfringens secondaire à une intervention gynéco-obstétricale ou abdominale septique.

- Sepsis à listéria ; évoqué chez le n-né devant un état septicémique associé à une méningite, conjonctivite purulente , avec notion d’accouchement fébrile.

-Dans tous les cas le diagnostic repose sur les HMC avec examen du placenta pour la listeria néonatale.

ACCÈS PALUSTRE GRAVE

• Réalise un tableau d’encéphalopathie aigue fébrile avec atteinte polyviscérale, au retour d’une zone d’endémie palustre sans chimio prophylaxie

• À l’examen : SPM inconstante de bon pronostic, HPM fréquente de mauvais pronostic, ictère fréquent par hémolyse.

• Dg : FSP, GE.

• Traitement : Quinine.

FIÈVRE BILIEUSE HÉMOGLOBINIQUE :

Complication très grave due à une hémolyse

massive, souvent déclenchée par l’injection de

Quinine.

L’évolution peut être mortelle en absence

d’épuration extrarénale.

LEPTOSPIROSE ICTÉRO-HÉMORRAGIQUE

Syndrome fébrile et algique.

insuffisance rénale aigue.

Cytolyse hépatique

Syndrome hémorragique.

syndrome méningé.

--ictère à bilirubine mixte .

FIÈVRE TYPHOÏDE COMPLIQUÉE D’UNE

CHOLÉCYSTITE:

Maladie fréquente évoquée devant :

-Notion de prise de l’eau ou aliments suspects.

-Début progressif

-Fièvre en plateau + pouls dissocié +TRL +

diarrhée + SPM

-Salmonella typhi et paratyphi A,B et C

-Diagnostic par hémocultures + sérologie de

widal et felix + coproculture.

LES CAUSES EN DEHORS DE L’URGENCE:

1- VIRALES:

1-hepatites A, B, C, D et E: doivent être évoquées

devant:

• La notion d’épidémie surtout pour l’HVA et E.

• La notion d’injections, soins dentaires,

transfusion sanguine, d’interventions

chirurgicales, de tatouage scarification dans les

6 semaines à 6 mois qui précèdent l’apparition

de l’ictère pour l’hépatite B, C et D.

• Seules les sérologies permettent de trancher.

2. CMV :

-Elle peut se manifester par une fièvre, une

asthénie, des myalgies, des ADP cervicales,

rarement angine et SPM; même un ictère

-Surtout chez les immunodéprimés (VIH,

transplanté..):

-La confirmation est affirmée par l’isolement

du virus par culture cellulaire.

3. MNI :

-Une angine, hépato-splénomégalie,

adénopathies.

-Un rash cutané, survient après la prise

d’ampicilline

-un syndrome mononucléosique au FSP.

*La confirmation repose sur les sérologies.

4. Fièvre jaune : arboviroses

- Notion de séjour en zone d’endémie (Afrique

tropicales, Amérique du sud)

- L’évolution cyclique en deux phases : phase

rouge congestive et phase jaune hépatorénale.

Séparées par une phase de rémission

trompeuse.

- Confirmation : la sérologie.

5.rubéole congénitale :

• Doit être évoquée chez tout nouveau- né qui

présente un ictère fébrile associé à des

malformations surtout oculaires, hépato-

splénomégalie, surtout si on a la notion de

rubéole chez la mère durant sa grossesse, ou si

elle a été en contact avec un rubéoleux.

• Confirmation : isolement du virus dans

l’oropharynx ou par la sérologie.

6.primo-infection à VIH :

-Doit être évoquée devant la notion de contage

ou de comportement sexuel à risque 4

semaines environ avant l’installation de

l’ictère.

-Le diagnostic est sérologique.

B. LES CAUSES BACTÉRIENNES :

1. Brucellose :

• Dans sa forme aigue septicémique ou dans sa forme focalisée, évoquée devant :

-Notion de contage ou de profession exposée.

-Un syndrome sudoro-algique associé à une fièvre ondulante avec ictère.

-Les signes de focalisation.

• Confirmation :

- Hémoculture,

- Sérologie de Wright.

2. TBC :

• Doit être évoquée devant tout ictère fébrile associé à une AEG et les autres signes de diffusion tel que pulmonaire avec IDR t +.

Confirmation : *l’isolement de BK dans les prélèvements (crachats…).

* biopsies hépatiques avec étude anapath.

3. Abcès du foie volumineux :

• Douleur intense provoquée à l’ébranlement du foie dans un contexte fébrile.

• Dg : ponction échoguidée

4. Syphilis secondaire:

• Doit être évoquée devant un ictère fébrile chez

tout patient aux antécédents de chancre

génital non traité associé à une adénopathie ou

des polyadénopathies. Et devant la présence

de signes cutanés avec alopécie

caractéristiques de la syphilis secondaire.

• Confirmation : *la sérologie de la syphilis

(TPHA, VDRL).

5.Rickettsioses :

• FBM : -notion de contact avec les animaux

-Syndrome infectieux parfois accompagné d’un ictère

-Une éruption maculo-papuleuse généralisée avec atteinte palmo-plantaire

-Chancre noirâtre d’inoculation

-Diagnostic: clinique

-TRT: doxycycline 200mg/j

• Fièvre Q : ictère fébrile, atteinte pulmonaire. Myalgies et injection conjonctivale.

Confirmation : sérologie.

6. Mycoplasma pneumoniae :

• A évoquer devant une pneumopathie

interstitielle trainante.

C. CAUSES PARASITAIRES :

1.Bilharziose hépatosplénique :

-Notion de contact de la peau avec des eaux douces infestées.

-Ictère+ HPM+ SPM.

-Eosinophilie sanguine.

• Confirmation : *biopsie hépatique ; à la recherche des œufs de bilharzioses.

*découverte des œufs dans les urines et les selles.

2.Kyste hydatique :

• Soit par compression ou rupture dans les voies biliaires.

• Dg : orienté par l’échographie abdominale et confirmé par la sérologie.

3.Amoebose hépatique :

• Ictère par compression des voies biliaires.

• Dg : orienté par l’échographie abdominale et confirmé par la sérologie.

Toxoplasmose congénitale :

• A évoquer devant tout ictère néonatal

notamment devant la notion de

toxoplasmose maternelle non traitée

survenant pendant la grossesse.

• Confirmation : la sérologie.

Ascaridiose :

• Compliquée par la migration des vers dans le cholédoque.

• Dg : examen parasitologique des selles.

Distomatose hépatobiliaire :

• Compliquée par migration des vers adultes dans les voies biliaires, évoquée devant ; une notion de séjour en zone endémique.

• Hyper éosinophilie, confirmée par la sérologie.

D. LES CAUSES MYCOSIQUES :

EIles sont rares et surviennent en générale dans

un tableau septicémique chez des sujets

immunodéprimés.

Candidose.

Cryptococcose.

Aspergillose.

Histoplasmose.

B/ LES ICTÈRES NON INFECTIEUX :

1.ICTERE RETENTIONNEL OU CHOLESTATIQUE :

**Ictère de cause extra hépatique :

• Lithiase de la voie biliaire principale : Cancer de la tête de pancréas :

• Ampulome vatérien

• Cancer des voies biliaires

• Pancréatite chronique

• Compression de la voie biliaire principale

**Ictère de cause intra hépatique :

• Cirrhose hépatique : donne une hypertension portale.

• Cancer du foie

• Cirrhose biliaire primitive

• Hépatite alcoolique

• Foie cardiaque : foie douloureux, reflux hépato-jugulaire.

• Cause médicamenteuse :

*isoniazide

*rifampicine

*paracétamol( forte dose)

*Psychotropes et anticonvulsivants

*AINS

*anesthésiques.

*toxique: tétrachlorure de carbone, phosphore.

2. ICTÈRE HÉMOLYTIQUE :

• Congénital :

• Sphérocytose héréditaire (anomalie de la membrane érythrocytaire : Minkowski Chauffard).

• Erythro-enzymopathie (déficit en G6PD).

• Hémoglobinopathie (B. thalassémie, drépanocytose).

• Acquis :

• L’iso immunisation fœto-maternelle par incompatibilité RH ou ABO chez le nouveau-né.

• Accident transfusionnel.

• Anémie auto-immune : test de Coombs+.

• Ictère constitutionnel : rare.

• -Maladie de Crigler Najjar et Gilbert.

• -Maladie de Dublin Johnson et syndrome de Rotor.

CONCLUSION :

• L’ictère fébrile constitue une urgence diagnostique

et certaines étiologies nécessitent des mesures

thérapeutiques urgentes, elles doivent être

toujours évoquées en premier lieu.

• Seule une analyse attentive des données

anamnestiques, cliniques et paracliniques permet

d’aboutir à un diagnostic étiologique et par

conséquent la mise en route d’un trt adéquat.