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Influence de l'administration aigue ou chronique de l'ethanol sur la reponse pharmacologique a la methaqualone MICHELINE ROUSSEAU,' JEAN-JACQUES ROUSSEAU~ ET JULES BRODEUR" Dkpartement Be Pharmacologie, Facultt de Mtdecine, Universith de Montreal, Montrkal (QuC.), Canada Regu le 26 juillet 1979 ROUSSEAU, M., J.-J. Rsuss~~u et J. BRODEUR. 1980. Influence de l'administration aigue ou chronique de l'ethanol sur la reponse pharmacologique a la methaqualone. Can. J. Physiol. Pharmacol. 58: 865-873. Nous avons entrepris ce travail dans le but d'etudier l'influence d'un traitement aigu ou chronique a l'ethanol sur la reponse pharmacologique a la methaqualone. Afin de preciser le mecanisme de l'interaction ethanol-methaqualone, nous avons egdement etudie l'effet de l'administration aigue ou chronique de l'ethanol sur quelques parametres microsomiaux, ainsi que sur la cinetique sanguine et cerebrale de la methaqualone. Bien que l'administration aigue (4 glkg, per 0s) d'ethanol conduise a une inhibition progressive de l'activite enzymatique microsomiale a l'egard de la methaqualone, l'on n'observe pas de prolongement de la duree de sommeil a la methaqualone. Comme les animaux traites avec ethanol et methaqualone se reveillent alors que la concentration cerebrale de methaqualone est plus elevee qu'elle ne l'est chez les animaux n'ayant r e p que la methaqualone seule, l'on peut alors formuler l'hypot hese d'un phenomene de tolerance croisee fonctionnelle aigue ethanol-methaqualone. L'administration d'ethanol a 6% dans l'eau de breuvage dextrosee pendant 7 a 14 jours conduit egalement a un raccourcissement de la duree de sommeil la methaqualone, a condition que les animaux aient acces a l'ethanol jusqu'au moment de l'injection de la methaqualone. Encore une fois, les animaux traites a l'ethanol se reveillent alors que les concentrations sanguines et cerebrales de methaqualone sont plus elevees que chez les animaux contrbles. L'analyse de ces resultats suggere qu'il s'agit encore d'un phenomene de tolerance croisee fonctionnelle entre l'ethanol et la methaqualone. L'administration repetee de dextrose entraine une inhibition des paramktres microsomiaux, mais cet effet ne reussit pas a emp2cher la manifestation du phenomene de tolerance. ROUSSEAU, M., J.-J. ROUSSEAU, and J. BRODEUR. 1980. Influence de l'administration aigue ou chronique de l'ethanol sur la reponse pharmacologique a la methaqualone. Can. J. Ph ysiol. Pharmacol. 58: 865-873. This study was undertaken to investigate the influence of ethanol given either acutely or chronically on the pharmacological response to methaqualone. In order to define the mechanism(s) responsible for the interaction between ethanol and methaqualone, a study was also conducted on the influence of ethanol on microsomal activity, as well as on the disappearance curves of metha- qualone in blood and brain. Although acute administration of ethanol (4 g/kg, orally) leads to a progressive inhibition of microsomal enzyme activity towards methaqualone, this is not accompanied by a prolongation of the sleeping time to the hypnotic. Under these conditions animals given both ethanol and methaqualone regain their righting reflex at higher brain concentrations of me- thaqualone than those given methaqualone only; this can be interpreted as being an acutely acquired tolerance phenomenon re- sulting from exposure to ethanol. Chronic ingestion (7 and 14 days) of 6% ethanol dissolved in an aqueous solution of 10% dextrose shortens the sleeping time to methaqualone provided the animals have access to ethanol until the administration of methaqualone. Once again, under these conditions, the concentrations of methaqualone in blood and brain at awakening are more elevated in pretreated animals than in control ones. These results suggest the development of a functional tolerance state as a result of ethanol pretreatment. Chronic ingestion of dextrose leads to inhibition of microsomal enzyme activity, yet this is not sufficient to prevent the appearance of a tolerance phenomenon. Introduction Dans un premier temps, nous avons cherche Au cours des dernieres annees, l'on a assiste a un accroissernent considerable de l'ingestion de la methaqualone, un hypnotique, pour des fins non medicales. L'impression generalement repandue est que souvent 19ingestion de la methaqualone est combinee a celle de l'ethanol. Nous avons donc choisi d'investiguer en laboratoire les consequen- ces pharmacodynamiques et pharmacocinetiques de 1' association ethanol- methaqualone, afin d'en arriver a caracteriser la nature des interactions sur- venant lors de l'emploi combine de ces deux subs- tances. determiner l'influence d'un traitement aigu a l'ethanol sur la reponse pharmacologique a la me- thaqualone. I1 est bien connu que les personnes in- toxiquees a l'ethanol sont plus susceptible~ a cer- tains medicaments a proprietes depressives cen- trales (Soehring et Schuppel 1966)' ceci etant attribue a l'effet depresseur central de l'ethanol lui- meme. D'autre part, l'administration d'ethanol peut rapidement induire des modifications du sys- teme nerveux central de type tolerance aigue (Mel- ville et al. 1966). Enfin, il est demontre que l'ethanol inhibe le metabolisme de nombreux me- dicaments in vitro (Rubin et al. 1968) et que l'administration simultanee d'un medicament et 'Adresse actuelle: Laboratoire de police scientifique, Minis- tkre de la iustice. 1701 Parthenais. Montreal (0~6.). Canah. d'ethanol chez l'animal entier diminue la vitesse du ~~dressk actudle, a laquelle les demandes de-tir~&a-~art doi- metabolisme de ce medicament (Rubin et al. 1970). vent 2tre faites: Departement de medecine du travail et d9hygiene du milieu, Faculte de Universite de Man- un deuxieme temps, nous avOns etudie treal, C.P. 6128, MontrCal (Que.), Canada H3C 337. l'influence d'un pretraitement de quelques jours a 0008-42 12/80/070865-09$0 1.OO/O @ 1980 National Research Council of CanadaIConseil national de recherches du Canada Can. J. Physiol. Pharmacol. Downloaded from www.nrcresearchpress.com by UNIVERSITY OF NEW MEXICO on 11/29/14 For personal use only.

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Page 1: Influence de l'administration aiguë ou chronique de l'éthanol sur la réponse pharmacologique à la méthaqualone

Influence de l'administration aigue ou chronique de l'ethanol sur la reponse pharmacologique a la methaqualone

MICHELINE ROUSSEAU,' JEAN-JACQUES ROUSSEAU~ ET JULES BRODEUR" Dkpartement Be Pharmacologie, Facultt de Mtdecine, Universith de Montreal, Montrkal (QuC.), Canada

Regu le 26 juillet 1979

ROUSSEAU, M., J.-J. R s u s s ~ ~ u e t J. BRODEUR. 1980. Influence de l'administration aigue ou chronique de l'ethanol sur la reponse pharmacologique a la methaqualone. Can. J. Physiol. Pharmacol. 58: 865-873.

Nous avons entrepris ce travail dans le but d'etudier l'influence d'un traitement aigu ou chronique a l'ethanol sur la reponse pharmacologique a la methaqualone. Afin de preciser le mecanisme de l'interaction ethanol-methaqualone, nous avons egdement etudie l'effet de l'administration aigue ou chronique de l'ethanol sur quelques parametres microsomiaux, ainsi que sur la cinetique sanguine et cerebrale de la methaqualone. Bien que l'administration aigue (4 glkg, per 0s) d'ethanol conduise a une inhibition progressive de l'activite enzymatique microsomiale a l'egard de la methaqualone, l'on n'observe pas de prolongement de la duree de sommeil a la methaqualone. Comme les animaux traites avec ethanol et methaqualone se reveillent alors que la concentration cerebrale de methaqualone est plus elevee qu'elle ne l'est chez les animaux n'ayant r e p que la methaqualone seule, l'on peut alors formuler l'hypot hese d'un phenomene de tolerance croisee fonctionnelle aigue ethanol-methaqualone. L'administration d'ethanol a 6% dans l'eau de breuvage dextrosee pendant 7 a 14 jours conduit egalement a un raccourcissement de la duree de sommeil la methaqualone, a condition que les animaux aient acces a l'ethanol jusqu'au moment de l'injection de la methaqualone. Encore une fois, les animaux traites a l'ethanol se reveillent alors que les concentrations sanguines et cerebrales de methaqualone sont plus elevees que chez les animaux contrbles. L'analyse de ces resultats suggere qu'il s'agit encore d'un phenomene de tolerance croisee fonctionnelle entre l'ethanol et la methaqualone. L'administration repetee de dextrose entraine une inhibition des paramktres microsomiaux, mais cet effet ne reussit pas a emp2cher la manifestation du phenomene de tolerance.

ROUSSEAU, M., J.-J. ROUSSEAU, and J . BRODEUR. 1980. Influence de l'administration aigue ou chronique de l'ethanol sur la reponse pharmacologique a la methaqualone. Can. J. Ph ysiol. Pharmacol. 58: 865-873.

This study was undertaken to investigate the influence of ethanol given either acutely or chronically on the pharmacological response to methaqualone. In order to define the mechanism(s) responsible for the interaction between ethanol and methaqualone, a study was also conducted on the influence of ethanol on microsomal activity, a s well as on the disappearance curves of metha- qualone in blood and brain. Although acute administration of ethanol (4 g/kg, orally) leads to a progressive inhibition of microsomal enzyme activity towards methaqualone, this is not accompanied by a prolongation of the sleeping time to the hypnotic. Under these conditions animals given both ethanol and methaqualone regain their righting reflex at higher brain concentrations of me- thaqualone than those given methaqualone only; this can be interpreted a s being an acutely acquired tolerance phenomenon re- sulting from exposure to ethanol. Chronic ingestion (7 and 14 days) of 6% ethanol dissolved in an aqueous solution of 10% dextrose shortens the sleeping time to methaqualone provided the animals have access to ethanol until the administration of methaqualone. Once again, under these conditions, the concentrations of methaqualone in blood and brain at awakening are more elevated in pretreated animals than in control ones. These results suggest the development of a functional tolerance state as a result of ethanol pretreatment. Chronic ingestion of dextrose leads to inhibition of microsomal enzyme activity, yet this is not sufficient to prevent the appearance of a tolerance phenomenon.

Introduction Dans un premier temps, nous avons cherche

Au cours des dernieres annees, l'on a assiste a un accroissernent considerable de l'ingestion de la methaqualone, un hypnotique, pour des fins non medicales. L'impression generalement repandue est que souvent 19ingestion de la methaqualone est combinee a celle de l'ethanol. Nous avons donc choisi d'investiguer en laboratoire les consequen- ces pharmacodynamiques et pharmacocinetiques de 1' association ethanol- methaqualone, afin d'en arriver a caracteriser la nature des interactions sur- venant lors de l'emploi combine de ces deux subs- tances.

determiner l'influence d'un traitement aigu a l'ethanol sur la reponse pharmacologique a la me- thaqualone. I1 est bien connu que les personnes in- toxiquees a l'ethanol sont plus susceptible~ a cer- tains medicaments a proprietes depressives cen- trales (Soehring et Schuppel 1966)' ceci etant attribue a l'effet depresseur central de l'ethanol lui- meme. D'autre part, l'administration d'ethanol peut rapidement induire des modifications du sys- teme nerveux central de type tolerance aigue (Mel- ville et al. 1966). Enfin, il est demontre que l'ethanol inhibe le metabolisme de nombreux me- dicaments in vitro (Rubin et al. 1968) et que l'administration simultanee d'un medicament et

'Adresse actuelle: Laboratoire de police scientifique, Minis- tkre de la iustice. 1701 Parthenais. Montreal (0~6.) . Canah. d'ethanol chez l'animal entier diminue la vitesse du

~ ~ d r e s s k actudle, a laquelle les demandes de-tir~&a-~art doi- metabolisme de ce medicament (Rubin et al. 1970). vent 2tre faites: Departement de medecine du travail et d9hygiene du milieu, Faculte de Universite de Man- un deuxieme temps, nous avOns etudie treal, C.P. 6128, MontrCal (Que.), Canada H3C 337. l'influence d'un pretraitement de quelques jours a

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l'ethanol sur la reponse pharmacologique a la me- thaqualone. Sous ces conditions un phenomene de tolerance pharmacocine tique est susceptible de se produire suite a une stimulation des voies meta- boliques de biotransformation hepatique de I'etha- no1 (Lieber et DeCarli 1968; Tobon et Mezey 197 1) et d'autres medicaments comme la meprobamate et le pentobarbital (Misra et al. 1971)' I'aminopyrine (Vesell et al. 1971) et le tolbutamide (Carulli et ale 1971). L'ethanol administre en traitement chroni- que se comporte donc comme un inducteur des en- zymes des microsomes hepatiques.

Dans le but de preciser le mecanisme de I'inter- action ethanol-methaqualone, nous avons egale- ment etudie I'effet de I'administration aigue ou chronique de 17ethanoli sur quelques parametres microsomiaux, ainsi que sur la cinetique sanguine et cerebrale de la methaqualone.

Nous avons utilid des souris miiles de la lignee Swiss pesant entre 20 et 25 g. TOUS les animaux ont sejoume dans une ani- malerie ou la temperature a ete maintenue a environ 22°C. 11s ont resu la diete "Purina laboratory chow"; ils ont tous ete pri- ves de noumture solide 16 h avant les experiences. tout en con- servant cependant le liquide de breuvage.

Le chlorhydrate de methaqualone a ete administre par voie intraperitoneale a dose de 80 mglkg. Le medicament a ete mis en suspension dans une solution de salin physiologique conte- nant du carboxymethylcellulose a 1% (plv). L'ethanol (95%) a ete administre (a) ud libitum dans I'eau de breuvage dissous a 6% (vlv), (b) a d libitum dans l'eau de breuvage dextrosee (10%' plv) dissous a 6% (vlv) e t (c) par gavage a partir d'une solution B 40% (vlv) dans l'eau de breuvage.

Etudes in vitro Le cytochrome B-450 a ete mesure a partir de microsomes

hepatiques selon la methode d'Omura et Sato (1964). Les pro- teines microsomiales hepatiques ont ete mesurees suivant la methode de Lowry et al. (1951). Le metabolisme de la metha- qualone a ete mesure sur le surnageant hepatique de 9000 g selon une methode que nous avons mise au point et qui repond aux normes d'un essai enzymatique. Le milieu d'incubation a ete ainsi constitue: 0.25 mL de surnageant equivalent a 62.5 mg de foie frais; 8.75 mL de tampon phosphate 0.1 M , pH 7.4; 2 mL des eofacteurs glucose-6-phosphate (9 pmol), NADP (2.08 pmol), chlorure de magnesium (24.2 pmol) et nicotina- mide (50 pmol), 100 p g de methaqualone. L'incubation a 37°C a dure 30 min. La reaction enzymatique a ete arr2tee par I'addition de 1 mL d'hydroxyde de sodium 2.5 N au milieu d'incubation. La determination de la methaqualone a ete faite selon la methode d'Akagi et al. (1963) que nous avons legere- ment modifiee (voir plus bas, analyses dans le sang et le cer- veau).

Etz~des in vivo La duree du sommeil a ete mesuree a partir de l'intervalle

compns entre Be moment de la perte du reflexe de redressement et le retour de ce reflexe; les animaux n'ont ete stimules d'aucune f a ~ o n pendant la durke du sommeil. La mesure de la concentration sanguine et cerebrale de la methaqualone s'est faite comme suit. Le sang heparine a e t i recueilli apres deca- pitation de l'animal, alors que le cerveau a ete preleve, eponge,

pese et homog6nCise dans 4 mL d'eau. Dans ulae fiole a decan- tation de 125 mL, on a depose (a) dans le cas du sang: I mL d'hydroxyde de sodium 2.5 N, 0.5 mL de sang heparine et en- viron 5.5 mL d'eau distillee; (6) dans 1e cas du cerveau: 1 mL d'hydroxyde de sodium 2.5 N , 4 mE d'homogenat de cerveau et environ 2.0 mL d'eau distillee. Apr2s addition de 50 mL d'hexane, on a agite vigoureusement pendant 3 min. On a laisse decanter et on a preleve pour la conserver la phase organique. La phase aqueuse a ete reextraite a nouveau avec 50 mL d'hexane pendant 1 min. On a combine les volumes de la phase organique qui ont ete fdtres sur papier filtre Whatman nu- mero 114. On a ajoute 4 mL d'une solution d'acide chlorhydri- que 2 N , on a agitk pendant 3 min, et l'on a conserve la phase aqueuse pour lecture, a l'aide d'un spectrophotomktre Beck- mann, modele Acta V. La lecture a ete obtenue a partir de la difference d'absorbance des echantillons entre 234 et 340 nm. Le recouvrement calcule pour cette methode analytique est 82.5% avec un cseficient de variation de 3.6% pour 24 echan- tillons analyses. D e plus, une analyse a l'aide d'un chromato- graphe en phase gazeuse couple a un spectrometre de masse a demontre la presence de methaqualone seule dans l'extrait biologique ainsi traite.

Analyses statistiques Les analyses statistiques utilisees au cours de ce travail ont

ete le test de "t" de Student, l'analyse de variance unidimen- sionnelle et le test de Dunnett effectue selon Winer (1971).

Resultats Influence d'un truitement aigu a l'e'thanol sur la

rkponse pharmacologique a la rne'thuqualone Au cours d'une experience preliminaire, nous

avons choisi une dose inhibitrice optimale d'ethanol et nous avons determine l'intervalle de temps re- quis pour obtenir une inhibition maximale. Les re- sultats obtenus ont montre qu7une dose orale de 4 g d'ethanollkg inhibitait le metabolisme in vitro de la methaqualone de fason importante, sans toutefois induire le sommeil; de plus, a cette dose, l'inhibition maximale du metabolisme de la methaqualone sur- vient 6 h apres l'administration d'ethanol. Le ta- bleau 1 montre I'influence de I'administration orale d'ethanol(4 glkg) sur le metabolisme in vitrcs de la methaqualone, ainsi que sur la quantite de protei- nes et de cytochrome P-450 dans les microsomes hepatiques. On y voit que le traitement a l'ethanol produit, apres 6 h, une chute importante de l'activite enzymatique a l'egard de la methaqualone, mais n7affecte pas la quantite de proteines microsomi- ales ni celle du cytochrome P-450.

Au cours de l'experience suivante, nous avons etudie I'influence d9un pretraitement aigu a I'ethanol (4 g/kg, per 0s) sur la reponse pharmacologique a la methaqualone (80 mglkg, i.p.) administree 6 h plus t a d . Les resultats ont montre que l'ethanol n'exer~ait aucun effet significatif sur la duree du ssmmeil par rapport a un groupe contrble ne re- cevant que du salin physiologique (138.4 -F- 21.8 min chez le groupe ethanol vs. 109.7 -e 10.9 min chez le groupe contrijle, n = 15; p = N.S.). Par contre,

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TABLEAU 1. Influence d'un pretraitement aigu a l'ethanol(4 glkg, per 0s) sur la quantite de proteines microsorniales, de cytochrom P-458 et de mkthaqualone rne'ftabolisee in vitro par la fraction microsomiale hkpatique

Cytockrome P-458, ProtCines, Methaqualonea Nombre nrnolllOO g poids mg1180 g poids n~ktaboliske,

Sroupe d'animaux corporel corp ore1 pg/62.5 mg de foie

Seuls anq animaux ont et i ut~llses pour la mesure de ce parmetre Les tra~tements au salln phys~olog~qw et B I'ethanol ont ete admln~stres 6 h avant le sicr~lice. Moyenne + erreor standard Dmffere de faeon smgnlficatlve de ia valeur csntrBIe @ < 0 05).

chez ees msmes animaux, les concentrations san- gu ine~ et cerebrales de la methaqualone au reveil se sont averees etre significativement plus Glevees chez le groupe ethanol que chez le groupe contriile (19.5 k 1.0 vs. 15.1 + 1.5 pg/mL dans le sang, n = 15 ,p K0.05; 18.2 iz 1.1 vs. 11.1 +0 .9pg /g dans le cerveau, n = 15,p < 0.05).

Tou~ours a l'aide du meme protocole, nous avons etudie l'influence d'un pretraitement a l'ethanol sur la cinetique sanguine et cerebrale de la metha- qualone (80 mg/kg, i.p.). La figure 1 montre que le traitement a l'ethanol augmente de f a ~ o n signifi- cative les concentrations sanguines 10, 20 et 30 min, alors que les concentrations cerebrales sont accrues a 60 et 120 min.

ment est sans effet sur les divers parametres exa- mines. Lorsque ce pretraitement est porte de 1 semaine a 2 semaines, les resultats sont identi- ques.

B e meme, un pretraitement d'une semaine a l'ethanol 4% ne modifie pas la duree du sommeil chez les animaux ayant reCu methaqualone (80 mgl kg, i.p.) (100.3 L- 4 1.3 min chez le groupe ethanol vs. 91.5 + 15.6 min chez le groupe contrble, n = 15, p = N.S.). De meme, au reveil, nous n'avons note aucune difference significative entre les animaux traites et les animaux contrbles en ce qui a trait aux concentrations sanguines et cere- brales de methaqualone (14.5 +- 0.9 pg/m% chez les traites vs. 20.0 + 3.0 pg/mL chez les contrbles dans le sang; 13.8 2 0.7 vs. 14.6 2 4.4 pg/g pour

Influence d'unprktraiternent chroniqite d l'bthunol les memes groupes respectivement dans le cer- sur la r e ~ o n s e p l larrnucolo~~q~e a la metha- .,a,, n = 15. p = N. S.). Le pro1ongement du trai- quulone tement a l'ethanol pour une 2ikme semaine n'ap-

Ethanol 6% (vlv) en solution dans l'eau de breu- vage

Au cours d'une expkrience preliminaire, nous avons administre a une centaine de souris, pendant 5 semaines, de l'ethanol a 6% (v/v) dans l'eau de breuvage dans le but d9etablir (a ) le volume moyen d'eau consomme par jour et (b) la quantite moyenne d'ethanol consommee par jour. A cette concentra-

porte egalement aucune modification a la reponse des animaux. Enfin, les resultats d'une expkrience visant a caracteriser la cinktique sanguine et cerk- brale de la methaqualone (80 mglkg, i.p.) chez les animaux traites B l'ethanol et chez les animaux con- tr6les ont revele qu'il n'existait aucune difference significative entre les deux groupes (resultats non illustres).

d'ethanol, 'e moYen d'eau inger' quo- Ethanol 6% (v/v) en sol14tion htls dpxtro- tidiennement est de 5.1 mLlanima1 et ne diff'ere pas de celui ingere par le groupe contrble: l'ingestion

see d 10%

moyenne d'ethanol est de 9.4 g/kg par souris par Bevant les resultats de la sCrie d'experiences

jour. Nous avons etabli de plus, au cours de cette precedente nous avons cru utile de favoriser une

experience preliminaire, que la croissance pon- ingestion accrue d'ethanol en pliqant celui-ci en

derale etait equivalente pour le groupe traite a solution dans l'eau dextrosee a 40% (p/v); la con-

l'ethanol et pour le groupe ne recevant que de centration d'ethanol a ete maintenue a 6% (v/v). Nous en avons conclu que, tous les animaux ayant SOUS CeS conditions, le volume moyen d9eau dex- libre acces a la nouniture solide, I'apport calorique trosee ingere quotidiennement est d'environ 17 mL/ utilisable etait vraisemblablement eauivalent chez animal, alors qu'il s'etablit a 7.5 mL lorsque l'eau l'un et l'autre groupe. dextrosee contient en plus de 1'ethanoI. Bans ce

L'influence d'un pretraitement de 1 semaine a dernier cas, l'ingestion quotidienne d'ethanol est l'ethanol6% sur les parametres microsomiaux est equivalente a 14 g/kg par animal. Par ailleurs, la resumee sur le tableau 2. On y voit que le traite- croissance ponderale s'est averee tout a fait com-

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o---- 0 Ethanol 4 g /kg, per os - Salin

Temps ( minutes)

FIG. 1. Influence d'un pretraitement aigu a l'ethanol (4 glkg, per 0s) sur la cinetique sanguine et cerebrale de la methaqualone (MTQ, 80 mglkg, i.p.) administrke 6 h apres l'ethanol. Chaque point represente la moyenne & l'erreur standard de cinq obser- vations.

TABLEAU 2. Influence d'un pretraitement de 1 semaine a I'ethanol 6% (vlv) en solution de l'eau de breuvage sur la quantite de proteines microsomiales, de cytochrome P-450 et de methaqualone rnt5tabolisCe in virro par la fraction microsomiale hepatique

Cytochrome P-450, Proteines, Nombre nrn011 100 g mg/ 100 g Methaqualone metaboliste,

Groupe d'animaux poids corporel poids corporel pg/62.5 mg de foie

Eau 10 55.1 &2.4a 149.9k6.5 22.422.0 Ethanol 6%

dans I'eau 10 57.1 k0.5 157.225.2 24.923.9

Moyenne -t erreur standard.

parable, peu importe que les animaux aient reGu ou non de l'ethanol et peu importe le volume d'eau dextrosee ingere.

Tout comme dans les experiences precedentes, nous avons mesure l'influence de l'ethanol sur les parametres microsomiaux, la duree du soinmeil a la methaqualone, les concentrations sanguines et cerebrales de methaqualone au reveil et la cineti- que sanguine et cerebrale de la methaqualone. Nous avons cependant impose deux traitements differents aux animaux recevant de l'ethanol: une partie de ceux-ci s'est vue retirer l'ethanol 16 h avant le sacrifice pour ne recevoir alors que de l'eau dextrosee, tandis que l'autre partie a eu acces a l'ethanol dans l'eau dextrosee jusqu'au moment du sacrifice. Les animaux du groupe contr6le ont reGu de l'eau dextrosee jusqu'au moment du sacri- fice.

Le tableau 3 rksume l'influence de ces divers traitements sur les parametres microsomiaux. On y voit qu'un pretraitement de 1 semaine a l'ethanol

augmente de f a ~ o n significative la quantite de pro- teines microsomiales, de cytochrome P-450 et de methaqualone metabolisee in vitrs par rapport au groupe ne recevant que du dextrose seul. I1 n'existe pas de difference significative quant a ces para- metres entre le groupe prive d'ethanol 16 h avant le sacrifice et le groupe non prive d'ethanol.

Par contre, le retrait de l'ethanol au cours de la periode precedant le sacrifice influence la d u k e du sommeil a la methaqualone et les concentrations sanguines et cerebrales de la methaqualone au re- veil, ainsi que le montrent les tableaux 4 et 5. En effet, alors que les animaux ayant acces a l'ethanol jusqu'au moment du sacrifice presentent une duree de sommeil considerablement raccourcie par rap- port aux animaux contrbles, tel n'est pas le cas pour ceux prives d'ethanol durant la periode de 16 h precedant le sacrifice. Quant aux concentra- tions sanguines de methaqualone au reveil, elles depassent les valeurs contreles uniquement chez les animaux ayant acces a l'ethanol jusqu'au mo-

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TABLEAU 3. Influence d'un traitement de 1 semaine a I'ethanol6% (vlv) en solution dans l'eau dextrosee a 10% sur la quantite de proteines microsomiales, de cytochrome P-450 et de methaqualone metabolisee in vitro par la fraction microsomiale hepatique

-.

Cytochrome P-450. Proteines, hITQ metabolisee, Nombre rim011 100 g mg/100 g pg162.5 mg

Groupe d'animaux poids corporel poids corporel de foie

Dextrose 10% 10

Ethanol 6%* dans dextrose 1wo 10

Ethanol 6W dans dextrose 18% 10

" Moyenne c erreur standard. Les crochets rejorgnent des valeurs slgn~ficatlvement dlfferentes @ c 0.05) selon le test de Dunnett (Wmer 1971). Ces an~maux ont eu aeces a l'ethanol dans I'eam drxtrosee jusqu'au moment Je l'expkrience. Ces ammaux n'ont eu acces qu'a I'eam dextrosee au cours des 16 h precedant I'exper~ence.

ment du sacrifice. Bans le cas des concentrations cerebrales, les dfferences entre les groupes ne sont pas significatives, mais la tendance reste la mkme.

Pour la caracterisation de la cinetique sanguine et cerebrale de la methaqualone, seul le groupe ayant eu acces a l'ethanol jusqu'au moment du sa- crifice a ete retenu et a ainsi subi la comparaison avec le groupe contr6le. La figure 2 montre que le

TABLEAU 4. Influence d'un pretraiternent de 1 semaine a 1'ethanol6% (vlv) en solution dans I'eau dextrosee a 10% sur la reponse pharmacologique a la methaqualone (80 mglkg, i.g.)

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Groupe

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Nombre Sommeil, d'animaux min

Dextrose 10% Ethanol 6%*

dans dextrose 10%

Ethanol 6%" dans dextrose 10%

- -

Voir 16gende du Tableau 3.

traitement a l'ethanol augmente de fason signifi- cative les concentrations sanguines a 5 et 10 min, alors que les concentrations cerebrales sont accrues a 5, 10 et 20 min.

Dextrose 10% erz l'absence d'e'thanol Cette derniere serie d'experiences a ete entre-

prise dans le but d'etablir l'influence du dextrose seul sur les parametres dejh mesures. Une etude preliminaire a montre que la quantitk moyenne de liquide consommee sous forme d'eau dextrosee est de 16.5 mL/souris par jour, solt plus du double de ce le consommee sous forme d'eau du robinet. L'ingestion moyenne quotidienne de dextrose s'etablit donc i environ 64 g/kg par animal. La croissance ponderale est independante du traite- ment.

L'influence d'un pretraitement de 1 semaine a l'eau dextrosee 10% est resumee sur le tableau 6. Les resultats obtenus montrent que le pretraite- ment reduit la quantite de cytochrome P-458 ainsi que l'activite enzymatique a f'egard de la metha- qualone. Par contre, ce type de pretraitement est

TABLEAU 5. Influence d'un pretraitement de 1 semaine a l'ethanol 4% en solution dans I'eau dextrosee a 10% sur les concentrations sanguines et cerebrales de la methaqualone (80 mglkg,

i.p.) au reveil

Nombre Concentration Concentration Groupe d'animaux sanguine, pglmL cerebrale, pglg

Dextrose 10% 17 15.8k2.3" I 10.02 1.5 Ethanol 6%*

dans dextrose 10% 17 22.95 1.7 I 13.4k1.4

Ethanol 6%' dans dextrose 10% 17 13.2+1.1 8.721.4

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"A ec Voir legende du Tableau 3.

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0- ---a Ethanol 6% dons dextrose - Dexhore 10%

Temps (minutes9

FIG. 2 . Influence d'un pretraitement de 1 semaine B l'ethanol6% (v/v) en solution dans l'eau dextrosee h 18% sur la cinktique sanguine et cerebraie de la methaqualone (MTQ, 80 mg/kg, i.p.1. Chaque point represente la moyenne 5 l'erreur standard de cinq observations.

sans effet significatif sur la duree du sommeil a la methaqualone administree B la dose de 80 mglkg, i.p. (149.4 2 13.4 min chez le groupe dextrose vs. 125.8 2 12.2 min chez le groupe contrble, n = 19, p = N.S.). Au reveil, aucune difference significa- tive n'a ete notee entre les animaux traites au dex- trose et les animaux contrbles en ce qui a trait aux concentrations sanguines et cerebrales de metha- qualone (16.5 + 1.2 p,g/mL chez les traites vs. 18.9 -t 1.7 pg/mL chez les contrbles dans le sang; 11 -8 2 0.6 vs. 12.9 _+ 0.6 pg/g pour les mSmes groupes respectivement dans le cerveau, n = 19, p = N .S .). Enfin, les courbes de la cinetique san- guine e t cerebrale de la methaqualone (80 mglkg, i.p.1 chez les animaux traites au dextrose et les animaux contrbles sont strictement superposables (resultats non illustres).

Discussion L'administration d'un pretraitement aigu d'etha-

no1 par voie orale a raison de 4 g/kg inhibe de fason

marquee le metabolisme in vitro de la metha- qualone. Lorsque la methaqualone est administree par voie intraperitoneale a des animaux prealable- ment trait& a I'ethansl, la cinetique tissulaire mon- tre une elevation significative des concentrations cei-ebrales de methaqualone. L'ensemble de ces donnees suggere donc que, sous des conditions in vivo, l'ethanol inhibe la biotransformation de la methaqualone, bien que d'autres phenomenes relies a I'excretion biliaire de ce medicament puis- sent egalement Stre invoques (Whitehouse et al. 1977). Neanmoins, sous les conditions experimen- tales que nous avons utilisees, I'administration de l'association ethanol-methaqualone ne conduit pas a un allongement significatif du temps de sommeil, contrairement a ce que I'on observe lorsque I'administration de methaqualone est precedee de celle de SKF 525-A (M. Rousseau, J.-J. Rsusseau et J. Brodeur, resultats non publies); de mkme, les concentrations cerebrales de la methaqualone au reveil sont augmentees de f a ~ o n significative par

TABLEAU 6. Influence d'un pretraitement de 1 semaine au dextrose 10% sur la quantite de proteines microsomiales, de cytochrome P-450 et de methaqualone metabolisee in vitro par la fraction microsomiale hepatique

Cytochrome P-450, Proteines, Methaqualone mitabolisee, Nombre nmolll08 g m g / l w g pg/62.5 mg de

Groupe d'animaux poids corporel poids corporel foie

Eau Dextrose

10%

a Moyenne 2 erreur standard. Differe de f a ~ o n significative de la valeur contrbk ( p < 0.05).

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rapport a celles mesurees chez les animaux con- tr6les.

Une explication plausible aux observations qui precedent est qu'un pretraitement aigu a l'ethanol peut conduire au phenomene de tolerance. 11 existe des exemples, dans la litterature, ou l'acquisition de la tolerance a I'ethanol se fait de f a ~ o n tres ra- pide (Mellanby 1919; Mirsky et al. 1941; Leblanc et al. 1975; Greizerstein 1977). De plus. l'acquisition de tolerance aigue a I'ethanol, chez le rat, rend egalement tolerant a l'hexobarbital (Wahlstrom et Widerlov 1971); cette derniere observation rejoint la n6tre a I'effet qu'une exposition aigue a l'ethanol confere une tolerance rapide a l'endroit de la me- thaqualone. Dans ce cas, pour utiliser la terminolo- gie suggeree par Kalant et al. (1971)' il s'agirait de tolerance (croi see) fonctionnelle .

La deuxieme partie de notre etude visait a etu- dier l'influence d'un pretraitement chronique & l'ethanol sur la reponse a la methaqualone. Une in- gestion moyenne d'ethanol equivalente a environ 9.4 glkg par animal par jour pendant 7 ou 14 jours s'est averee insuffisante pour provoquer des chan- gement s des parametres microsomiaux, du temps de sommeil a la methaqualone, des concentrations cerebrales de methaqualone au reveil et de la ci- netique de la methaqualone. Apres modification du protocole d'administration de l'ethanol, l'ingestion moyenne de l'alcool s'est accrue, passant a 14 glkg par animal par jour. Ce traitement a entraine une serie de modifications au niveau des parametres mesures; cependant, ces modifications variaient selon que les animaux avaient acces a la solution d'ethanol jusqu'au moment de l'experience, d'une part, ou selon que la solution d'ethanol leur etait retiree 16 h avant le debut de l'experience, d'autre part.

Dans l'ensemble, les resultats obtenus suggerent que la consommation accrue d'ethanol dans l'eau dextrosee stimule en apparence les parametres mi- crosomiaux; sur le plan in vivo, ceci devrait resul- ter en une diminution du temps de sommeil a la methaqualone. Toutefois, cette diminution ne se produit que lorsque I'ethanol est conserve dans l'eau de breuvage jusqu'au moment de l'administration de la methaqualone. Ceci nous amene a penser que ce n'est pas I'induction enzy- matique comme telle qui reduit la duree du som- meil, puisque I'induction est presente peu importe le regime d'administration de I'ethanol, mais qu'il s'agit encore une fois d'un phenomene de tolerance fonctionnelle croisee. A l'appui de cette hypo- these, on note que les souris ayant eu acces a l'ethanol jusqu'au moment de l'experience se re- veillent avec des concentrations sanguines et cere-

brales plus elevees que celles du groupe contr6le ainsi que celles ayant ete privees d'ethanol 16 h avant le debut de I'experience. Semblables obser- vations de tolerance fonctionnelle induite par ad- ministration repktee d'ethanol ont ete faites par Kalant et al. (1970) et Hatfield et al. (1972).

L'elevation temporaire des concentrations san- gu ine~ et cerebrales de la methaqualone (figure 2) observee chez les animaux ayant conserve I'ethanol jusqu'au moment du sacrifice est difficile a inter- preter. Un certain nombre d'explications peut ce- pendant ktre avance. Cette elevation pourrait ktre le resultat (a) d'une inhibition du metabolisme de la methaqualone suite a la presence, dans l'or- ganisme, de faibles quantites residuelles d'ethanol, mkme si celui-ci n'est pas decelable a ce moment dans le sang et le cerveau (M. Rousseau, J .-J. Rousseau et J. Brodeur, resultats non publies); (b) d'une acceleration de l'absorption de la metha- qualone chez les animaux traites a l'ethanol; ceci irait toutefois a I'encontre de l'observation de Kalant et al. (1970) a I'effet que, suite a un pretrai- tement chronique avec l'ethanol, le pentobarbital pourrait etre absorb6 plus lentement a partir d'un site d'injection intraperitoneale; ( c ) d'un retard a l'excretion de la methaqualone chez les animaux trait& a l'ethanol, en accord avec l'observation deja citee de Whitehouse et al. (1977). Cependant, notre travail ne nous a pas permis d'accumuler au- cune evidence qui puisse nous permettre d'appuyer I'une ou l'autre explication. 11 reste neanmoins que I'eICvation des concentrations cerebrales de me- thaqualone ne se traduit pas par un prolongement du temps de sommeil: il est alors possible que le phenomene de tolerance predomine et cache tout autre phenomene relie a la disposition de la metha- qualone, comme nous l'avons deja remarque dans le cas de l'experience sur l'administration aigue d'ethanol.

La derniere serie d'experiences nous a permis de jeter un peu de lumiere sur l'effet supposement in- ducteur enzymatique de l'ethanol administre en solution dans l'eau dextrosee. Les resultats ont montre que le dextrose entrainait une chute des parametres microsomiaux, mais aucun change- ment de la duree du sommeil a la methaqualone, des concentrations cerebrales au reveil de la me- thaqualone et de la cinetique sanguine et cerebrale de la methaqualone.

Cet effet inhibiteur du dextrose sur les parame- tres microsomiaux a deja ete observe par Strother et al. (1971) et par Peters et Strother (1972). B e mkme, Khanna et al. (1976) font allusion a l'effet inhibiteur possible du sucrose. 11 semble donc maintenant assez evident que ce qui, dans

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l'experience precedente, avait I'apparence d'un effet inducteur de I'ethanol etait plut6t la manifes- tation d'un effet inhibiteur du dextrose, effet par- tiellement ou complktement aboli par la presence d'ethanol dans la solution de dextrose. Ainsi, mkme s'il reste possible que l'ethanol ait eu un effet inducteur au cours de notre etude, cet effet a ete reduit en vertu de l'effet inhibiteur du dextrose.

Ce qui est remarquable, toutefois, c'est I'absence d'un effet du dextrose sur le temps de sommeil a la methaqualone, compte tenu du fait que le dextrose inhibe les parametres microsomiaux. Une expli- cation possible nous est fournie par le travail de Strother et al. (1971); ces auteurs ont observe que les animaux maintenus pendant 4 ou 5 jours sur une diete riche en glucose ne presentaient plus d'allongement du temps de sommeil a l'hexo- barbital, comme c'etait le cas lorsque le traitement ne durait que 1 ou 2 jours. Selon Strother et al. (1971) ii s'agirait alors d'un phenomene de com- pensation. Les donnees de ces auteurs ne nous per- mettent cependant pas de cjuger s'il s'agit de com- pensation fonctionnelle ou metabolique.

Une autre explication au manque de correlation entre le metabolisme microsomial de la metha- qualone, d'une part, et sa cinetique sanguine et cerebrale, ainsi que la reponse pharmacologique, d'autre part, pourrait 2tre d'ordre cinetique enzy- matique, bien qu'il soit difficile, en ce moment, d'en preciser la nature exacte. En effet, il se pour- rait que la disponibilite des co-facteurs du systeme microsomial soit differente sous des conditions in vitro et in v ivo, les conditions in vitro favorisant l'expression du contenu absolu en cytochrome P- 450 et (ou) de l'activite des systemes enzy~natiques relies a l'hemoproteine, alors que les conditions in vivo refleteraient ~ lu t6 t la vitesse de ~roduction du

manifester. Cette rapidite avec laquelle cette tolerance peut se perdre contraste avec certaines donnees de la litterature. Pour Leblanc et ai. (1969), la tolerance a l'ethanol se perdrait sur une pkriode de 3 a 4 semaines chez le rat; en s'appuyant sur ces donnees, Kalant et al. (1970) ont emis 1' hypothese que la tolerance croisee ethanol-bar- bituriques disparaitrait au cours d'une periode identique. Selon Ratcliffe (1969)' il suffirait de 1 semaine de retrait de l'ethanol pour que dis- paraisse la tolerance croisee a l'amobarbital chez le rat. Bans tous ces cas, la perte de la tolerance s'effectuerait sur une periode beaucoup plus lon- gue que celle que nous avons observee. Une ex- plication possible a cette divergence d'observations serait que le retour a une reponse pharmacologique normale, suite a I'apparition du phenomene de tolerance, s'effectuerait beaucoup plus rapidement chez la souris que chez le rat; les travaux de Grieve et al. (1979)' effectues chez la souris, semblent fournir une evidence indirecte a I'appui de cette hypothese.

Remerciements Les auteurs remercient madame Sanae Yama-

guchi et monsieur Robert Tardif pour l'aide appor- tee lors de la realisation de ce travail. Le support financier a ete accorde par le Conseil de recherches medicales du Canada: subvention au Groupe de re- cherche~ en toxicologie medicamenteuse et sub- vention MA-6 159.

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