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Intervention éducative rapide en situation d'urgence ...unesdoc.unesco.org/images/0012/001248/124828fo.pdf · domaine des situations d'urgence. II fait état du manque de ... coordination

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Table des matières Introduction,/)«^ 3

I. Les instruments des politiques d e base et le cadre d e travail p o u r l'éducation e n situations d 'urgence , page 5

II. Le développement par étapes des

programmes d'éducation de base, page 8

IL 1. Introduction, page 8

II.2. Situations d 'urgence, page 9

II-3- Intervention rapide, page 10

II.4. Éducation non formelle, page 16

II. 5. Matériels et coffrets éducatifs p o u r u n e intervention d 'urgence, page 16

11.6. Procédures d'implantation, éducation d 'urgence par étapes, page 26

11.7. Réintroduction d u p r o g r a m m e scolaire, page 26

III. Coffrets supplémentaires d e survie, page 33

III. 1. Sensibilisation au danger des m i n e s , page 33

111.2. Éducation p o u r prévenir le choléra

et les maladies transmissibles par l'eau, page 37

111.3. Éducation pour la protection de l'environnement, page 39

111.4. Éducation pour la paix et la réconciliation, page 41

TV. Le milieu éducatif physique en situations d'urgence, page 45

TV. 1. La planification de l'emplacement et les tentes éducatives, page 45

TV.2. Les écoles sous tentes, page 45

Liste des acronymes et des abréviations, page 47

Bibliographie choisie, page 47

Les idées et les opinions exprimées dans

cet ouvrage sont celles des auteurs et ne

représentent pas nécessairement celles de

l ' U N E S C O , du H C R et de l'UNICEF. Les

appellations employées et la présentation

des données n'impliquent de la part de

l'UNESCO, du H C R et de l'UNICEF aucune

prise de position quant au statut juridique

des pays, territoires, villes ou zones ou de

leurs autorités, ni quant au tracé de leurs

frontières ou limites.

Avec la chute du Mur de Berlin, le nouvel ordre du monde est confronté à l'apparition de conflits religieux, ethniques et nationalistes marqués par une inhumanité et une violence profondes. Des formes anciennes et nouvelles d'intolérance ont généré des situations d'urgence incontrôlables et complexes. O n estime à près de 100 millions le nombre de personnes prises dans le cercle de la guerre civile, parmi lesquelles environ 50 millions ont été forcées de fuir leurs maisons. En réponse à cette nécessitera Résolution 46/182 des Nations Unies a créé en 1994 le Département des Affaires Humanitaires. Pour la première fois, le rôle et l'importance de la coordination entre les agences en période d'urgence étaient définis dans le cadre des politiques associées. L'intervention dans les urgences humanitaires prend maintenant en compte, et s'adapte à la nécessité de mettre en place des écoles et des structures pour l'éducation des adultes afin d'assurer l'éducation de la prochaine génération.

C e document tente d'ouvrir un dialogue entre les éducateurs travaillant dans le domaine des situations d'urgence. II fait état du manque de perspective à long terme de la plupart des interventions éducatives récemment expérimentées. L'éducation, que ce soit pour la paix et la réconciliation ou pour la reconstitution des ressources humaines, est actuellement à peine abordée. Les études de cas décrites ici fournissent un récit vivant de l'approche basée sur l'utilisation de coffrets pédagogiques. Il est évident que différents contextes et différents degrés d'urgence requièrent différents types d'interventions. Il est alors nécessaire de faire d'autres recherches à partir des expériences menées sur le terrain, spécialement en ce qui concerne la réhabilitation des systèmes d'éducation formelle, les programmes scolaires et l'apprentissage à l'âge adulte.

L'UNICEF et l 'UNESCO, ainsi que les autres agences des Nations Unies croient en l'importance d'avoir une approche évolutive dès les premières phases, de travailler rapidement afin de donner les moyens aux communautés d'identifier leurs propres besoins en matière d'éducation formelle et non formelle et de pouvoir élaborer leurs propres réponses. Nous espérons que les études de cas décrites ici alimenteront un débat constructif et nourri proposant un éventail de sujets liés aux interventions éducatives rapides en situations d'urgence et en situation d'après guerre. Si les approches basées sur l'expérience du terrain décrites ici ne donnent pas forcément tous les principes et toutes les stratégies clés développées dans le passé par l'UNICEF, le H C R et [ 'UNESCO, elles fournissent tout de m ê m e un ensemble d'expériences intéressantes pour l'analyse et la discussion. Nous saluons l'arrivée de ce document et le débat qu'il fera naître entre les partenaires dans l'amélioration de la situation des enfants, des adolescents, des femmes et des adultes victimes de la violence organisée. Bien que des actions supplémentaires soient requises afin d'établir une stratégie en matière d'éducation pour les réfugiés en situations d'urgence, il apparaît aussi essentiel d'améliorer la communication entre les éducateurs sur le terrain.

Dans cette optique, l'Institut de l ' U N E S C O pour l'éducation G U E ) peut contribuer depuis sa modeste perspective à l'évaluation des pratiques et des considérations politiques dans les domaines de l'apprentissage à l'âge adulte et tout au long de la vie, y compris les jeunes adultes parmi les populations concernées. Nous souhaiterions voir dans cette contribution la première étape vers un effort collectif de dialogue et de témoignage pour d'autres éducateurs et travailleurs humanitaires.

La stratégie du H C R relative au suivi du rapport Machel, approuvée par le bureau du comité exécutif en 1997, proposait c o m m e principal objectif pour la protection dans la phase initiale de l'urgence, la mise en place d'activités de récréation et d'éducation de base pour les enfants et les adolescents réfugiés. Le H C R souhaite pour cette raison développer les modalités opérationnelles et les alliances pour garantir à cet objectif de performance la meilleure réalisation possible.

Nous espérons donc que ce document permettra d'avoir une vision plus large du rôle et de l'impact de l'éducation de base et de l'éducation tout au long de la vie c o m m e une pratique en faveur du dialogue dans les circonstances extrêmes de crises politiques et de confrontations sociales. Nous remercions le Bureau international d'éducation (BIE), et particulièrement M.John Fox et Mlle Erin Dorsey, pour leur contribution à la finalisation de cette publication.

Paul Bélanger, Directeur, Institut de l'UNESCO pour l'éducation Nils Kastberg, Directeur, UNICEF/BPU

John Horekens, Directeur, Division de soutien aux Opérations, HCR

Version anglaise publiée en 1998 par le BIE, C.P. 199, 1211 Genève 20, Suisse (avec la participation financière de l 'UNICEF/BPU, H C R et de l 'UNESCO-UIE). Version française publiée en 1999 par le H C R , le BIE et l 'UNESCO-UIE. Couverture : Photo du camp de réfugiés de Benaco, République Unie de Tanzanie, mai 1994 ( P H O T O : D o n Edkins/WCC) Imprimé en France par S A D A G , Bellegarde

Introduction

À l'échelle mondiale, on estime que la moitié des réfugiés sont des enfants. Selon des statistiques récentes, au début 1997 la population totale de réfugiés était de 13,2 millions de personnes.1 À cette date, le Haut Commissariat des Nations Unies aux réfugiés ( U N H C R ) a protégé et soigné plus de 6 millions d'enfants réfugiés dans le m o n d e entier.

Le défi le plus important pour toute organisation internationale souhaitant limiter la souffrance des enfants affectés par la guerre est de garantir leur survie et leur bien-être. En 1996, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a informé, qu'au cours des vingt dernières années, 2 millions d'enfants étaient morts à cause de la guerre. La majorité des victimes sont mortes pendant des guerres civiles, des attaques aveugles et la 'purification ethnique', c o m m e en Bosnie et au R w a n d a , où les enfants étaient systématiquement visés en tant que future génération d'ennemis.

Les m o y e n s par lesquels les enfants pourraient être protégés des conflits armés est le thème central de l'étude réalisée récemment par Graça Machel2 et présentée à l'Assemblée générale des Nations Unies le 8 novembre 1996.

Le Bureau de Coordination des Affaires Humanitaires des Nations Unies ( O C H A ) maintient actuellement des accords de coordination sur le terrain qui concernent des populations réparties dans seize pays et dans une région. Des appels de fonds inter­institutionnels atteignant près de 9 milliards de dollars ont été lancés pour satisfaire les besoins les plus urgents de ces populations.

La croissante instabilité politique et économique e m p ê c h e u n grand n o m b r e d'enfants affectés par la guerre d'accéder à une scolarité normale. C e document représente un effort pour consolider une réponse systématique aux besoins spéciaux des enfants, depuis les prémices de la crise jusqu'à ce qu'ils puissent réintégrer un cycle scolaire de base normal. Il tend aussi à garantir que les conditions minimales d'enseignement sont réunies.

L'objectif central de cet ouvrage sur les interventions éducatives rapides en situations de crises est de fournir u n outil pratique, d'expliquer et d'illustrer chaque étape d'une intervention d'urgence conformément aux principes directeurs du U N H C R . 3

Ce document est composé de quatre parties : • La première partie résume les instruments

des politiques de base qui militent en faveur de l'éducation c o m m e un droit de l'enfant.

La Convention relative aux Droits de l'Enfant de 1989 ( C D E ) est particulièrement importante puisqu'elle a été ratifiée par le U N H C R et par l'UNESCO comme un instrument normatif.

• La deuxième partie analyse et illustre les différentes phases de l'intervention d'urgence en utilisant des exemples récents d'interventions éducatives humanitaires, comprenant des situations de personnes déplacées, réfugiées et rapatriées dans leur pays. Des exemples d'expériences récentes sur le terrain sont également décrits. D e plus, des informations complémentaires et des suggestions de lecture sont données dans les notes de bas de page.

• La troisième partie montre c o m m e n t élargir le noyau central de l'éducation non formelle pour affronter les menaces subies quotidiennement par la population.

• La quatrième partie présente des suggestions pour l'installation de salles de classe temporaires.

Le présent document s'adresse aux professionnels et aux spécialistes qui travaillent sur le terrain (ainsi qu 'aux non spécialistes) et qui doivent réimplanter l'éducation de base dans des situations d'urgence. Sa portée est m o d e s t e et n e prétend pas fournir toutes les réponses à u n e réalité c o m p l e x e . C e p e n d a n t , e n raison de l'aggravation d u p r o b l è m e des enfants et des jeunes adultes victimes de la violence organisée, des systèmes d'interventions éducatives rapides sont nécessaires. Cet ouvrage contribue à anticiper et à préparer des interventions d'urgence en matière d'éducation de base.

Haut Commissariat aux réfugiés, The state of the world's refugees: a humanitarian agenda, 1997-98, Oxford, Royaume Uni, Oxford University Press, 1997.

Rapport de l'expert désigné par le Secrétaire général (Graça Machel), Impact des conflits armés sur les enfants, Assemblée générale, Cinquante et unième session, A/51/306, N e w York, 26 août 1996.

U N H C R , Revised guidelines for educational assistance to refugees, Genève, P T S S / U N H C R , 1995.

CONVENTION RELATIVE AUX DROITS DE L'ENFANT

Article 28 : Le droit de l'enfant à l'éducation

1. Les États parties reconnaissent le droit de l'enfant à l'éducation, et en particulier, en v u e d'assurer l'exercice d e ce droit progressivement et sur la base de l'égalité des chances.

(a) ils rendent l 'enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous ; * (b) ils encouragent l'organisation d e différentes formes d 'ense ignement secondaire,

tant général q u e professionnel, les rendent ouvertes et accessibles à tout enfant, et prennent des m e s u r e s appropriées, telles q u e l'instauration d e la gratuité de l 'enseignement et l'offre d ' u n e aide financière en cas d e besoin ;

(c) ils assurent à tous l'accès à l 'enseignement supérieur, en fonction des capacités d e chacun , par tous les m o y e n s appropriés ;

(d) ils rendent ouvertes et accessibles à tout enfant l'information et l'orientation scolaires et professionnelles

(e) ils prennent des mesu res pour encourager la régularité d e la fréquentation scolaire et la réduction des taux d ' a b a n d o n scolaire.

2 . Les États parties prennent toutes les mesu res appropriées pour veiller à ce q u e la discipline scolaire soit appliquée d ' u n e manière compatible avec la dignité de l'enfant en tant qu'être h u m a i n et c o n f o r m é m e n t à la présente Convention.

3 . Les États parties favorisent et encouragent la coopération internationale dans le d o m a i n e de l'éducation, en vue n o t a m m e n t d e contribuer à éliminer l'ignorance et l'analphabétisme dans le m o n d e et de faciliter l'accès aux connaissances scientifiques et techniques et aux m é t h o d e s d 'ense ignement m o d e r n e s . À cet égard, il est tenu particulièrement c o m p t e des besoins des pays en déve loppement .

Article 2 9 : Les objectifs d e l 'éducat ion

1. Les États parties conviennent q u e l'éducation d e l'enfant doit viser à : favoriser l'épanouissement de la personnalité de l'enfant et le développement de ses dons et de ses aptitudes mentales et physiques, d a n s toute la m e s u r e d e leurs potentialités ;

(a) inculquer à l'enfant le respect des droits de l ' h o m m e et des libertés fondamentales, et des principes consacrés d a n s la Charte des Nations Unies ;

(b) inculquer à l'enfant le respect de ses parents, d e son identité, d e sa langue et d e ses valeurs culturelles, ainsi q u e le respect des valeurs nationales du pays dans lequel il vit, du pays duquel il peut être originaire et des civilisations différentes d e la sienne ;

(c) préparer l'enfant à assumer les responsabilités de la vie dans une société libre, d a n s un esprit de compréhens ion , d e paix, de tolérance, d'égalité entre les sexes et d'amitié entre tous les peuples et groupes ethniques, nationaux et religieux, et avec les personnes d'origine autochtone ;

(d) inculquer à l'enfant le respect du milieu naturel. 2 . A u c u n e disposition du présent article ou d e l'article 2 8 n e sera interprétée d ' u n e

manière qui porte atteinte à la liberté des personnes physiques ou morales d e créer et d e diriger des établissements d 'ense ignement , à condition q u e les principes énoncés au paragraphe 1er du présent article soient respectés et q u e l'éducation dispensée dans ces établissements soit con fo rme aux n o r m e s minimales q u e l'État aura prescrites.

* = l'insistance est la nôtre

I. Les instruments des politiques de base et le cadre de travail pour l'éducation en situation d'urgence

La première partie décrit les instruments des politiques de base, dans lesquels les droits des enfants et des jeunes adultes à l'éducation sont prévus, et parmi lesquels se trouve la Convention sur le Statut des Réfugiés de 1951. La Convention relative aux Droits de l'enfant, qui a été adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies en 1989, est devenue l'un des outils les plus utiles pour évaluer et dé­fendre les besoins des enfants en général, y compris ceux des enfants des pays affectés par la guerre.

1.1. La Convention relative aux Droits de l'enfant, 1989

La Convention relative aux Droits de l'enfant1

( C D E ) a été largement ratifiée. En 1997, presque tous les États avaient signé la C D E , qui établit que les enfants de moins de 18 ans (Article 1) ont des droits spécifiques sans dis­crimination aucune. Cela est particulièrement important pour les enfants réfugiés, parce que la Convention établit des conditions générales qui constituent une base fondamentale pour les protéger.2 Cependant, cela est valable uni­quement quand u n État est partie de la C D E et non pas d 'un autre traité relatif aux réfu­giés. La convention tente de prendre en consi­dération tous les aspects de la vie d 'un enfant, de la santé, de l'éducation jusqu'aux droits sociaux et politiques. Selon la Politique d u U N H C R sur les Enfants Réfugiés (1993), la C D E « constitue un cadre normatif de référence pour l'action du U N H C R » en faveur des en­fants réfugiés. Cette section analyse les articles 28 et 29 de la C D E , qui font référence à l'édu­cation. • L'article 28 de la Convention établit le

droit de l'enfant à l'éducation. L'éducation est reconnue essentielle pour tous les en­fants. Cet article fixe les conditions de base pour l'éducation, gratuité de l'éducation, école primaire obligatoire pour tous et dif­férentes formes d'éducation secondaire et d'orientation professionnelle ouvertes et accessibles à tous. L'éducation secondaire doit être accessible en fonction de la ca­pacité.

• L'article 29 décrit un consensus général concernant les buts de l'éducation. Il fixe

essentiellement les objectifs de base de l'apprentissage : développer le potentiel complet des enfants et les préparer à as­sumer les responsabilités de la vie dans une société libre. D e plus, l'article défend le droit de chaque individu et de tous à ouvrir des établissements éducatifs, pour­vu qu'ils répondent aux objectifs de l'édu­cation prévus dans l'article 29 ainsi qu'à tout autre critère m i n i m u m . Cela est par­ticulièrement important dans le contexte de l'éducation des réfugiés pour lesquels les critères minima ont récemment été dé­veloppés par le U N H C R (voir Tableaux 1 et 2, pages 8 et 9).

UNICEF, Implementation handbook for the Convention on the Rights of the Child, préparé par R. Hodgkin et P. Newell, Genève, UNICEF, 1998. (Les autres références à la C D E renvoient à la m ê m e source.) U N H C R , Enfants réfugiés: principes directeurs sur la protection et les soins, Genève, U N H C R , 1994, p. 19. U N E S C O , Stratégie à moyen terme, 1996-2001, Paris, 1996

PLAN A M O Y E N TERME DE L'UNESCO S'agissant de l'assistance d'urgence, l ' U N E S C O s'est fait l'ardent défenseur, auprès de la communauté internationale, de l'idée que l'assistance humanitaire ne saurait se réduire à la fourniture de nourriture, de médicaments et de couvertures ; qu'il fallait associer étroitement la notion de « secours », de « réhabilitation » et de « dé­veloppement à long terme » ; et que les interventions d'urgence devaient comporter dès l'origine un élément de formation des ca­pacités locales. Cette idée a fait son chemin : le principe c o m m e n ­ce à être reconnu que les victimes de conflits conservent un droit inaliénable à l'éducation, au m ê m e titre que tout autre être humain. Aussi la stratégie de l ' U N E S C O consiste-t-elle à s'efforcer d'établir, dans les situations d'urgence, des structures éducatives intérimaires à l'intention notamment des personnes déplacées ou réfugiées. Là encore, le rôle de l'Organisation ne peut être que catalytique : il est moins de construire des écoles ou d'imprimer des manuels sco­laires que de procéder à l'évaluation des besoins éducatifs priori­taires, d'élaborer les stratégies pour y répondre, en coopération avec le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR) , l'UNICEF et le Programme Alimentaire Mondial (PAM), et de contribuer à la préparation des appels consolidés à l'aide hu­manitaire internationale que coordonne le Département des affaires humanitaires des Nations Unies (UNDHA) . 3

Les instruments des politiques de base

INTERVENTION D'URGENCE DU UNHCR En 1992, le comité exécutif du U N H C R a demandé une plus gran­de et une meilleure attention pour l'éducation de base en ré­clamant que les nécessités éducatives soient identifiées dès les premiers signes de l'urgence afin de pouvoir y faire face le plus rapidement possible.

La stratégie du U N H C R relative au suivi du rapport Machel, approuvée par le bureau du comité exécutif en 1997, proposait c o m m e principal objectif pour la protection dans la phase ini­tiale de l'urgence, la mise en place d'activités récréatives et d'éducation de base pour les enfants et les adolescents réfu­giés. Le U N H C R souhaite pour cette raison développer les m o ­dalités opérationnelles et les alliances nécessaires pour garan­tir à cet objectif de performance la meilleure réalisation pos­sible.

L'UNICEF coopérera avec le U N H C R afin d'assurer la conti­nuité des méthodes, des contenus et de la formation des pro­fesseurs entre l'éducation de base des réfugiés et le système éducatif de base de leur pays d'origine. L'UNICEF, dans le cadre de sa collaboration avec les autorités nationales pour réhabili­ter ou développer le système éducatif de base du pays d'origi­ne, travaillera avec le U N H C R pour faciliter l'accès des enfants de retour dans leur pays aux écoles nationales.

Les deux agences travailleront en coordination avec l 'UNES-

. . . populations

vulnérables victimes

de catastrophes

humaines ou

naturelles.

PHOTO : EPD/WCC

Si l'article 28.1(a) de la convention est d'ap­plication générale à tous les enfants sans dis­crimination, alors l'éducation doit être ouverte et accessible aux enfants réfugiés, aux enfants dans les camps de transit et aux enfants qui demandent l'asile. U n État ne peut pas nier ac­tivement à un enfant le droit à l'éducation sur son territoire.

L'article 31 de la convention établit le droit de l'enfant au repos, aux loisirs, au jeu et à la participation à la vie culturelle et artistique, qui constitue l'objectif le plus important de cette politique. Par conséquent, il est très im­portant de fournir u n soutien opérationnel afin de développer des activités de loisir et de récréation dans les c a m p s et parmi les c o m ­munautés de personnes déplacées.

1.2. La Convention relative au Statut des Réfugiés, 1951

L'article 22 de la Convention relative au Statut des Réfugiés de 1951 prévoit le droit des enfants réfugiés à l'éducation publique. Il dispose que « les États contractants accorderont aux réfugiés le m ê m e traitement que celui accordé aux na­tionaux concernant l'éducation élémentaire. »

Aujourd'hui, alors que les droits de l'enfant ont été violés de façon flagrante, le rôle des pro­

fessionnels sur le terrain, agences des Nations Unies, agences gouvernementales ( O N G ) , or­ganisations non gouvernementales et autres or­ganisations internationales et nationales, etc. est vital pour réaliser la lourde tâche de traduire les droits de l'enfant en actions concrètes. Toutes les parties concernées doivent prendre les mesures effectives dès lors que les droits de l'enfant sont violés ou négligés.

Des exemples existent montrant c o m m e n t les résultats d'expériences sur le terrain ont p u faire changer les stratégies institutionnelles et l'orientation des programmes. L'expérien­ce de l'intervention éducationnelle de Ngara pour les réfugiés rwandais (voir page 17) a aidé à définir les options dans les Principes directeurs du UNHCR. Dans le m ê m e sens, les ministres d'éducation de la région sud afri­caine sont parvenus en 1990 à un consensus intergouvernemental sur l'acceptation de l'uti­lisation du programme scolaire mozambicain dans les écoles pour les enfants réfugiés du Mozambique . Le principe « l'Éducation pour le rapatriement » appliqué à la population ré­fugiée mozambicaine au Z i m b a b w e et au M a ­lawi a eu un impact important sur l'interpré­tation traditionnelle de la convention de 1951.5

1.3. Intervention rapide en situations d'urgence

L'éducation étant reconnue c o m m e u n élé­ment crucial du développement des enfants, l'UNICEF, le U N H C R et l ' U N E S C O appliquent la Convention relative aux droits de l'enfant (CDE) 6 à leurs propres travaux en utilisant ces droits c o m m e des principes directeurs. C o m ­m e il a été décrit lors de la Conférence m o n ­diale sur l'éducation pour tous de Jomtien en 1990, les réfugiés et les personnes réfugiées et déplacées sont souvent des groupes « moins bien servis ». C e document , bien qu'inspiré des principes directeurs et des cadres insti­tutionnels antérieurs, prétend également élar­gir son utilisation potentielle à des situations problématiques de personnes ayant d û fuir leur domicile mais qui n'ont pas nécessaire­m e n t quitté leur pays. Les personnes dépla-

U N H C R , UNICEF, Memorandum d'accord, Genève, 1996. Par. 31-32, p. 7-8.

U N H C R , Rapport du séminaire sur l'Éducation et la Protection des réfugiés mozambicains dans la région sud de l'Afrique, Harare, 14-19 janvier 1990.

U N H C R , Enfants réfugiés.- principes directeurs concernant la protection et l'assistance, Genève, 1994.

Les instruments des politiques d e base 7

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LU

y z o

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cées à l'intérieur d u m ê m e pays et les p o p u ­lations vulnérables victimes de catastrophes naturelles ou d'origine humaine doivent faire face à des situations similaires à celles ren­contrées par les populations réfugiées.

Le nouveau cadre politique à la suite de la guerre froide a contraint la c o m m u n a u t é in­ternationale de donner priorité dans son agen­da à une nouvelle stratégie en faveur du main­tien de la paix et de l'assistance humanitaire. E n réponse à cela, la résolution 46/182 de l'Or­ganisation des Nations Unies a créé des lignes directrices afin d'assurer u n mandat interna­tional capable de fournir « une action conti­nue depuis le début de la prévention jusqu'à l'assistance humanitaire et la transition vers la réhabilitation et le développement. » C e ­pendant, aucune référence précise n'est faite sur le rôle que l'éducation devrait jouer en si­tuations d'urgence.

C e d o c u m e n t propose une stratégie étape par étape, qui prend en considération les dif­férentes phases du processus continu, depuis le secours jusqu'au développement. E n m ê m e temps, il propose des stratégies pour l'antici­pation et la préparation, en présentant des ex­périences récentes d'enseignement basées sur u n e approche par étapes. N é a n m o i n s , l'une des limites de cette proposition est le m a n q u e de recherche et d'évaluation systématique ré­

centes qui permettent de juger l'impact des expériences d'interventions éducatives ac­tuelles et passées. C o m m e l'expliquent Agui-lar et R i c h m o n d dans le cas d u R w a n d a :

Les études et les évaluations manquent pour connaître les répercussions techniques de l'éducation utilisée c o m m e un m o y e n de faire changer les comportements et les attitudes d'une population analphabète ou semi- analphabète affectée par le choléra et les mines, et qui souffre généralement du traumatisme de la guerre. Cela demande des connaissances techniques spé­cifiques et des stratégies éducatives qui obéissent en partie à des réponses logistiques standardisées (des fournitures scolaires par exemple), mais cela demande aussi une adaptation linguistique et culturelle rapide qui ne peut être développée rapidement que par des équipes techniques conjointes d'éducateurs locaux et internationaux (pour élaborer les programmes scolaires et éducatifs par exemple).8

' Nations Unies, rapport du Secrétaire général sur le Renforcement de la coordination de l'assistance humanitaire d'urgence, 21 juin 1994. (Document de l 'ONU N° A/49/177/E/1994/80)

° P. Aguilar et M . Richmond, Emergency educational response in the Rwandan Crisis, dans: G . Retamal et R. Aedo-Richmond, eds., Education as a humanitarian response, London, Cassell, 1998, p. 139.

. . . secours humanitaire et transition vers la réhabilitation et le développement.

II. Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

TABLEAU I.

Les objectifs en

faveur de

l'éducation de base

dans les écoles

financées par le

UNHCR

II. I. Introduction

La deuxième partie de ce document a pour

but de donner aux professionnels sur le ter­

rain, (personnels des O N G , des organisations

des Nations Unies et des autres institutions in­

ternationales, éducateurs, professeurs, e m ­

ployés communautaires qui accueillent les ré­

fugiés ou encore toute institution relevant du

gouvernement hôte) des stratégies éducatives

pragmatiques pour une intervention éduca­

tive rapide dans une situation postcrise. Pour

•»»»•.*»«. <• premières années PWMAfflE de l'éeole primaire)

Objectifs

O Donner une éducation de base (alphabétisation, mathématiques de base et connaissances de la vie) ;

O Couvrir les besoins psychosociaux des enfants et des adolescents déplacés/traumatisés ;

O Préparer les bases de l'éducation secondaire ;

O Préparer les enfants/jeunes au rapatriement, à la réintégration ou à l'installation locale.

Caractéristiques du p r o g r a m m e

O Classes maternelles préscolaires pour les enfants de moins de 6 ans non financées par le U N H C R ;

O Programmes scolaires basés sur celui du pays ou de la région d'origine ;

O Langue utilisée dans les écoles du pays d'origine ;

O Scolarisation primaire pour tous ; O Classes spéciales l'après-midi pour

les enfants/adolescents sortis du système scolaire avec des programmes adaptés ;

O Un min imum de 4 heures de cours par jour à partir de la première année et de 6 heures par jour à partir de la 4e année ;

O Un min imum de cinq jours de classe par semaine ;

O Deux sessions de classe par jour pour

augmenter le nombre d'élèves qui peuvent recevoir un enseignement tous les jours ;

O Examens finaux reconnus par le Ministère de l'éducation (ME) du pays d'origine ;

O Mobilisation de la communauté pour obtenir son soutien à travers un comité d'éducation communautaire ou une association de parents/ professeurs.

FORMATION CONTINUE DES MAÎTRES

Objectifs

O Développer les compétences professionnelles des éducateurs par la formation continue ;

O Recycler les professeurs sur les matières scolaires de base telles que les connaissances psychosociales, la protection de l'environnement, la santé, la résolution des conflits et les droits de l ' homme ;

O Préparer les maîtres au rapatriement, à la réintégration ou à l'installation sur place.

Caractéristiques du p r o g r a m m e

O Sélection des maîtres par des tests en fonction des résultats obtenus à « l'atelier du nouveau maître » ;

O Formation pédagogique incluant les besoins psychosociaux des enfants, des thèmes scolaires, des messages sur l'hygiène, la santé, sur la protection de l'environnement, la résolution des conflits et les droits de l 'homme, etc. ;

O Formation des maîtres devant être documentée et reconnue par leur pays d'origine, si possible ;

O Formation dans l'école m ê m e assurée par des conseillers pédagogiques et des consultants de projets éducatifs ;

O Les éducateurs réfugiés pourront suivre les programmes de formation nationaux et vice versa, selon le cas.

Le développement par étapes des programmes

d'éducation de base

un spécialiste c o m m e pour une personne non spécialiste, il s'agit d'un document d'aide. Les stratégies proposées ont été testées dans des situations d'urgence récentes, particulière­men t en Afrique, et elles ont contribué à la protection générale des enfants et des jeunes adultes. Elles sont basées sur plusieurs sources, certaines sont directement associées à des ur­gences et d'autres sont liées à des tendances et à des développements plus généraux.

Habituellement, l'éducation est perçue com­m e une initiative de développement. Pour cet­te raison, elle est souvent exclue des straté­gies et des interventions d'urgence. Les der­nières interventions humanitaires en matière d'éducation ont été considérées c o m m e des réponses cohérentes présentant deux objec­tifs : (a) répondre aux besoins humanitaires et psychosociaux des enfants affectés ; (b) contribuer au développement des ressources humaines et économiques futures des pays en crise.

II. 2 . Situations d 'u rgence

Il existe une relation évidente entre l'urgence, la reconstruction et le développement. Afin d'assurer une transition fluide entre les pre­mières aides d'urgence, la reconstruction et le développement postérieur, l'assistance d'ur­gence devrait déjà commencer à jeter les bases d'un rétablissement futur et du développement à long terme.Alors, les mesures d'urgence de­vraient être organisées c o m m e le premier pas vers le développement à long terme.1

Cette logique, ainsi qu'une sélection d'études de cas de situations d'urgence ont inspiré, en grande partie, l'approche par étapes décrite dans les sections suivantes de ce document.

D e plus, les Principes directeurs révisés pour l'assistance éducative aux réfugiés de 1995 du UNHCR (voir note de bas de page n° 3 page 3) constituent probablement l'effort institutionnel le plus à jour qui permet de systématiser l'un des aspects les plus importants des urgences dans le secteur éducatif. Il continue d'être un instrument tout à fait valable pour aborder les problèmes humanitaires en général.

Concernant l'offre d'éducation dans les si­tuations d'urgence, les Principes directeurs du U N H C R décrivent trois phases distinctes dans la réponse éducative : • Première phase : récréative/préparatoire • D e u x i è m e phase : scolarisation n o n

formelle • Troisième phase : réintroduction d u pro­

g r a m m e scolaire

Matériels — Classe de la 1re à la 4e année :

ardoises, craies, 2 cahiers d'exercices ; — Classe de la 5e et de la 6e année : au

moins 6 cahiers d'exercices de 200 pages ; — Un manuel de lecture et un manuel

de calcul pour étudiants ; — D'autres matériels de lecture dans

le centre de ressources ; — A u moins un jeu de tous les autres

manuels (50 exemplaires) par école.

PRIMAIRE (CiMMs (le ta 1«re à la 6e année)

Infrastructure — Taille de la salle de classe :

environ 6 m x 7 m ; — Systèmes d'assainissement de l'eau et

approvisionnement en eau potable dans toutes les écoles ;

— Une pièce qui ferme à clé pour la réserve, dans chaque école ;

— Un espace suffisamment grand pour les activités de récréation ;

— Une salle pour le personnel dans chaque école ;

— Une salle de lecture/centre de documentation dans chaque école ;

— Soutien communautaire pour la prépa­ration et la construction de l'école.

Equipement — Des sièges simples et propres pour tous

les élèves, en suivant la pratique locale ; — Un espace min imum de 2,5m dans la

classe pour installer le tableau noir qui sera régulièrement repeint ;

— Un abécédaire portable pour chaque classe ; — Un tableau de chiffres portable dans

chaque classe ; — Un globe terrestre pour chaque classe ; — Au moins une grande carte du pays d'

origine ou du pays d'asile par école avec des versions plus petites dans les salles de classe pour les références fréquentes ;

— Des panneaux laminés en plastique dans chaque classe pour créer un « environ­nement propice à l'apprentissage » ;

— D'autres matériels éducatifs, selon les cas ; — Une machine à ronéotyper et une machine

à plastifier pour chaque bureau de projets ; — Des équipements pour le sport

dans chaque école ; — Une chaise et une table pour chaque

instituteur.

Matériels — U n jeu complet de livres du maître

dans chaque école ; — Matériel pour préparer des éléments

didactiques.

1 Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies, 78e séance plénière, N e w York, 19 décembre 1991, Résolution 46/182, Le renforcement de la coordination de l'assistance humanitaire d'urgence des Nations Unies.

TABLEAU 2.

Critères minimum

pour l'éducation de

base dans une

école financée par

le UNHCR

10 Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

... transition d'un type de programme scolaire non formel

à un type plus formel

Dans une optique analytique et technique les trois phases peuvent être présentées séparé­ment . Cependant, du point de vue de la ges­tion des programmes sur le terrain, particu­lièrement en ce qui concerne l'approvision­nement, les stocks et la distribution du matériel éducatif et de l'aide technique, les deux pre­mières phases doivent être combinées.

Initialement, la première réponse d'urgen­ce, qui donne la priorité aux approches non formelles, devrait être considérée c o m m e un processus « qui évite la technologie de la sco­larisation formelle permettant une plus gran­de flexibilité dans l'espace, dans le temps et dans le choix des matériels éducatifs tout en acceptant un assouplissement quant aux qua­lifications requises pour le personnel afin d'être en adéquation avec la structure du lieu de travail »2 et avec la communauté qui vit dans une situation humanitaire spéciale.

La troisième phase devrait être considérée c o m m e une partie de ce que le U N H C R ap­pelle les activités de soin et d'entretien ; en d'autres termes, les activités qui conduisent à

la consolidation de la pratique éducative. Il est prévisible que, dans une société qui émerge d'une crise sociopolitique o u d 'une catas­trophe naturelle, il se développe une phase de transition pour passer d 'un modèle de pro­g r a m m e non formel à un type de programme scolaire plus formalisé faisant partie d u pro­cessus de reconstruction du système éducatif.

C e que l'on suggère simplement, c'est un processus continu de stratégies adaptées pour préserver et maintenir un réseau de sécurité pour la protection psychosociale des plus vul­nérables, et pour reproduire les connaissances éducatives de base nécessaires à leur survie.

Bien que les organisations d'aide humani­taire ne cessent d'accroître leurs efforts et les budgets en faveur des nécessités de base, l'édu­cation fait rarement partie des priorités et su­bit en général la première des restrictions bud­gétaires en temps de crise. Cependant, l'in­troduction de programmes éducatifs coordonnés et bien planifiés dans les pro­grammes d'aide d'urgence des sociétés en cri­se stabilisera les bénéfices à long terme.

L'éducation dans les situations de crise : • aide aprevenir les conflits et cimente une

société pacifique, en encourageant la réso­lution des conflits, l'intérêt pour la protec­tion de l'environnement, la tolérance vis-à-vis de la diversité, etc. ;

• active Y anticipation et la préparation pen­dant la phase de préurgence, en surveillant les premiers signes d'alerte, en élaborant de nouveaux matériels et en les protégeant au niveau interinstitutionnel, en mettant en œuvre des stratégies de planification pour satisfaire les besoins des groupes affectés par l'urgence ;

• sert à normaliser la situation à travers la création d'habitudes, lesquelles contribuent à la réduction du stress psychosocial, à faire face aux besoins immédiat et à se préparer pour une société meilleure après la crise ; et

• offre une opportunité de développement, d'innovation et de progrès éducatif en pha­se de transition après l'urgence.3

Colleta, N.J. 1996. Formai, non-formal and informai education. Dans : Tuijman, A . C . (dir. publ.). International Encyclopedia of adult education and training. 2e éd., p. 23. Oxford, Royaume-Uni, Pergamon. Bureau International d'Éducation. 1996. Rapport : Réunion interinstitutionnelle sur l'aide humanitaire et les réfugiés. Réunion tenue au Bureau international de l'éducation, à Genève, du 9 au 11 mai 1996, avec la participation de l 'UNESCO, de l'USAID, de ICVA et d'autres O N G internationales.

Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

11

L'IMPORTANCE DE LA RECREATION POUR LES ENFANTS AFFECTÉS PAR LA VIOLENCE ORGANISÉE5

Jouer est le travail des enfants. Les parents doivent encourager les enfants à jouer, spécialement pendant les m o ­

ments de tension. Le jeu permet aux enfants d'être en relation avec les événements présents en les exprimant dans

leur propre langage simplifié. Leur participation aux activités communautaires peut leur redonner courage et les

maintenir occupés de façon positive. Quand on réalise à quel point le jeu est important pour le développement

d'un enfant, on s'aperçoit de la nécessité de fournir aux enfants traumatisés un endroit pour jouer, une opportu­

nité de jouer et des choses avec lesquelles ils peuvent jouer. C'est de cette façon qu'ils pourront retrouver leur cycle

de développement qui a été violemment interrompu. Plus tôt sera l'intervention avec des jeux dans la vie d'un en­

fant traumatisé, plus tôt cet enfant pourra bénéficier des effets curatifs de l'ambiance ludique et plus tôt il retrou­

vera l'espoir lié de son m o n d e d'enfant.

11.3. Intervention rapide II.3.I. LES ACTIVITÉS RÉCRÉATIVES

Une intervention éducative d'urgence devrait commencer par la mobilisation des membres des communautés intéres­sées pour initier des activités de groupes telles que des jeux et devrait aussi aider à réaliser une évaluation des besoins.^

Dans beaucoup de situations d'urgence, les enfants et les adolescents représentent plus de 50 % de la population. La majorité de ces groupes vulnérables ont souffert de trauma-tismes dus à l'irruption de la violence, à la

désagrégation des familles et des structures communautaires, et au m a n q u e de ressources de base qui affecte gravement leur bien-être physique et psychosocial. Dans ce contexte, les activités récréatives et éducatives peuvent être cruciales pour limiter le stress et créer chez les jeunes une certaine estime d'eux-m ê m e s . La première étape destinée à aider

U N H C R , Revised Guidelines for Educational Assistance to Refugees, Genève, P T S S / U N H C R , 1995, p. 25. Adapté par Phyllis Kilbourn, Healing the children of war, M A R C , World Vision International, Californie, 1995.

Des enfants

mozambicains

jouent dans un

camp de réfugiés

en Zambie

12 Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

ces groupes à reconstruire leur « m o n d e dé­truit » consiste à organiser des activités ré­créatives semi-structurées.

À travers la situation d'urgence, il est im­portant d'encourager et de fournir les facili­tés récréatives dont les enfants ont besoin. Les activités socioculturelles et récréatives c o m ­m e par exemple les groupes musicaux, les groupes de danse, les festivals d'art, les c o m ­pétitions de sport, les matchs de football et les sorties en groupe jouissent d'une grande popularité auprès des enfants. Ces activités peuvent être organisées aussi bien par les en­fants que par les maîtres o u les agents de la c o m m u n a u t é . Elles peuvent, dans certains cas, compenser la difficulté d'une vie déracinée et faciliter le processus curatif rendu indis­pensable par ces expériences traumatisantes.

Par exemple, il existe au Liban de nombreux centres soutenus par Save the Children Fund (SCF/GB) pour les enfants et les jeunes adultes palestiniens offrant u n grand choix d'activi­tés informelles comprenant la pratique de sports mais aussi des activités en clubs, en co­lonies de vacances pour les enfants vulnérables ainsi que des programmes pour les enfants qui travaillent. Des volontaires de 16-17 ans aident à animer les clubs. Ces activités jouent u n rôle préventif, elles renforcent l'identité culturel­

le et l'estime des enfants pour e u x - m ê m e s et elles donnent u n soutien informel à ceux qui vivent dans l'adversité la plus extrême.6

C h e z les enfants, le jeu est u n mécan i sme d'adaptation :

L'un des premiers signes de déséquilibre émotionnel chez un enfant est son incapacité à s'intégrer et à jouer avec d'autres enfants de son âge. Car, selon les psychiatres, quand un enfant a beaucoup d'amis de son âge avec qui il peut jouer et s'amuser, il est peu probable qu'il ait des problèmes émotionnels graves ; m ê m e si les parents sont inquiets à son sujet.8

Richman, N . 1995. Principles of help for children involved in organised violence. Londres, Save the Children. (Document de travail n° 13).

Dodge, Cole. P. ; Raundalen, M . 1991. Reaching children in war : Sudan, Uganda and Mozam­bique. S0reidgrend, Norvège, UNICEF/Sigma For-lag, p. 35.

Storr, A. 1993- The Dynamics of Creation. N e w York, Ballantine Books, p. 185. Sur la valeur du jeu c o m m e moyen d'adaptation, voir aussi : Erikson, E. H . 1982. The Life Cycle Completed. N e w York, Norton, p.50-51.

LE JEU Les traumatismes apparaissent constamment dans les jeux et dans les dessins des jeunes enfants. Ils peuvent fa­briquer des jouets clairement liés aux faits, ou exprimer une partie ou la totalité du traumatisme à travers des jeux individuels ou collectifs. Tout cela est évidemment un m o y e n de contrôler les aspects cognitifs et émotionnels de tout ce qu'ils ont vécu. Le jeu peut être très utile pour aider l'enfant à sortir des expériences difficiles.

Le jeu peut normalement soulager l'enfant de certains sentiments, particulièrement de l'anxiété, cependant, si le jeu est lui-même source d'anxiété répétée il ne pourra pas soulager l'enfant. Les adultes doivent contribuer à modifier la forme du jeu afin d'aider les enfants à acquérir une certaine maturité par rapport à la situation. Ils peuvent le faire en se joignant au jeu des enfants et en modifiant la séquence des faits, par exemple en aidant les enfants à inventer une autre fin aux événements.

Souvent les enfants s'identifient avec les forces qui contrôlent les événements dramatiques. À travers le jeu, ils peuvent maîtriser la peur et l'anxiété dans leurs fantasmes et ainsi changer le cours des événements et contrôler ce qui est en train de se passer. Parfois, ils jouent le rôle de ceux qui détiennent le pouvoir. M ê m e si le jeu est l'activité préférée des plus jeunes, il peut également être utilisé chez les adolescents qui peuvent tenter de maîtriser le traumatisme à travers l'expression écrite.

Le dessin peut aussi faire partie du jeu. En effet, à travers le jeu, les enfants peuvent canaliser leurs désirs inconscients, exprimer des sentiments difficiles à traduire en paroles et aborder un événement traumatique de manière symbolique. Le jeu de rôle et les chansons aident aussi à représenter ce qu'ils ont expérimenté.

La re-création d'une situation traumatisante est plus qu'un simple traitement du traumatisme dans le jeu. L'enfant traumatisé peut reproduire la m ê m e activité physique, les m ê m e s attitudes, les m ê m e s peurs que celles qu'il a eues juste avant ou au m o m e n t du traumatisme. L'enfant peut également reproduire les m ê m e s réactions physiques que celles qu'il a eues pendant les faits réels (par exemple s'évanouir, avoir des crampes, se faire pipi dessus), et aussi recréer des choses qui ont eu lieu immédiatement avant les faits (discuter avec des amis ou des adultes). D e telles réactions indiquent que l'enfant a besoin d'une aide active.

Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

13

LA FINALITE DU COFFRET RECREATIF Objectif général — Aider les enfants et les adolescents à reconstruire leur monde et leur communauté.

Objectifs spécifiques : — Offrir aux enfants et aux jeunes des activités récréatives semi-structurées ; — Aider les enfants et les jeunes à retrouver leur bien-être psychosocial ; — Encourager l'expression personnelle à travers des activités diverses.

Activités : — Dessiner, produire et faire des stocks de modules et de coffrets ; — Identifier les personnes de la communauté des réfugiés ou les maîtres réfugiés et leur faire suivre une formation

d'instructeur récréatif en accord avec le Guide de l'Instructeur inclus dans le coffret ; — Coordonner l'apprentissage et la distribution du coffret récréatif.

Logistique : — Il faut tenir compte des adaptations à réaliser telles que la traduction du Guide de l'Instructeur dans la langue

d'apprentissage convenue pour la formation des instructeurs récréatifs.

Bénéficiaires : — Les enfants et les jeunes, les populations scolaires, les agents de la communautés, les enseignants.

L'expression et le jeu peuvent être fonda­m e n t a u x pour renforcer la faculté de récu­pération et d'adaptation des enfants victimes de conflits armés. Les enfants doués de cet­te faculté parviennent à donner un sens aux événements stressants et traumatisants qu'ils ont vécus. Aider les enfants à comprendre et à exprimer leurs propres expériences trau-matiques est u n principe opérationnel fon­damental des p r o g r a m m e s destinés aux en­fants vivant en circonstances particulière­m e n t difficiles.9

D u point de vue éducatif, il existe suffi­s a m m e n t de témoignages qui justifient ce type d'interventions. L'intégration de ces ac­tivités récréatives et éducatives fournit une série d'expériences qui offriront la possibi­lité à tous les enfants d'améliorer leur c o m ­préhension du m o n d e et de m i e u x c o m m u ­niquer leur nouveau savoir.Tous les enfants ne sont pas artistes, mais quelques-uns le sont ; tous ne trouvent pas le m ê m e plaisir dans la poésie o u dans les contes tradition­nels c o m m e les enfants ou les jeunes adultes des cultures n o m a d e s et orales ; tous les en­fants ne peuvent pas représenter u n m o u ­vement o u u n son c o m m e le font naturelle­m e n t les enfants de certaines cultures afri­caines par exemple. Il s'agit de garantir que la g a m m e d'expériences soit suffisamment large pour que l'on puisse y reconnaître la voix de chaque enfant et q u e ces expé­

riences émanent de faits c o m m u n s à tous les enfants.10

Cela prendra du t e m p s avant q u e le pro­g r a m m e scolaire standard parvienne aux en­fants victimes de violence organisée. C e pro­cessus peut prendre quelques mois et dans certains cas cela peut m ê m e prendre u n an. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, la créativité dans ces circonstances devient n o n seulement un mécanisme curatif mais aus­si u n mécanisme d'apprentissage et d'adap­tation aux circonstances nouvelles et extrêmes de fuite ou de déplacement. William James a eu l'occasion de dire :

Je n'ai aucun doute sur le fait que la majorité des gens vivent, physiquement, intellectuellement ou moralement, dans un cercle très réduit de leur être potentiel. Ils n'utilisent qu'une toute petite partie de leur conscience potentielle et de leurs ressources d'âme en général, c o m m e si un h o m m e qui de tout son corps, devait apprendre à ne

° Landers, C . 1998. Listen To Me : protecting the developmentof young children in armed conflict. N e w York, UNICEF, Bureau des programmes d'urgence.

*" Gallas, K . « Arts as Epistemology : enabling children to know what they know ». Dans : Goldberg M . R . ; Phillips, A . (dir. publ.). Arts as Education, Harvard Educational Review (Cambridge, M A ) , n° 24 (série rééditée), p. 26-28.

14 Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

FIGURE I. Présentation du coffret récréatif

bouger que son petit doigt. Les grandes urgences et les crises graves montrent combien nos ressources vitales sont plus grandes que ce que l'on peut imaginer.

Alors que beaucoup de programmes sco­laires comprennent normalement des listes de manuels et des documents de référence pour l'enseignant, peu d'entre eux spécifient de façon adéquate les nécessités logistiques en termes de matériels de travail et d'ins­truction, de biens de consommation et d'équi­pement , de services ou de ressources hu­maines, et peu donnent des indications per­mettant de calculer le temps d'exécution et

les coûts. Les matériels de communication doi­vent être variés, efficaces et intéressants. S'ils ne sont pas disponibles immédiatement, Us se­ront remis à l'instituteur avec l'ensemble du programme scolaire.11

Les coffrets semi-structures qui requièrent une contribution m i n i m u m du maître aide­ront les enfants à établir leur propre rythme et à devenir indépendants. Mais s'il arrivait que le maître o u les maîtres en formation ne soient pas familiarisés avec le contenu et avec les activités récréatives, il serait alors néces­saire de mettre en place u n apprentissage dif­férencié pour qu 'un sous-groupe puisse adap­ter le matériel aux nouvelles circonstances. La fourniture rapide du matériel aidera à ap­porter une réponse adéquate.

Le matériel devra être disponible sous une forme préemballée ou devra être acheté et ras­semblé au niveau local. Il constitue le maté­riel récréatif de base pour la première phase de la réponse d'urgence. Immédiatement, un processus d'identification des enseignants po­tentiels sera initié. Le plus important est que cela créera les conditions de leur bien-être psychosocial. Cette étape permettra de mener au lancement et à la planification de la se­conde phase.

Les avantages d u matériel préemballé d a n s les situations d'urgence sont les suivants : • il peut fournir la première pierre per­

mettant d'initier la réponse éducative d e façon systématique (identification des moniteurs , des maîtres et des fu­turs élèves à travers des réponses ré­créatives et n o n formelles déjà dispo­nibles) ;

• le préemballage peut fournir au secteur éducatif et à d'autres secteurs, une ca­pacité systématique d'anticipation et de calcul du coût unitaire. En constituant des réserves de ce matériel opération­nel, le U N H C R , l'UNESCO et l'UNICEF ont fourni aux agents des services com­munautaires, aux officiers de pro­gramme et aux O N G travaillant au ni­veau des camps dans les régions ayant reçu des réfugiés et des PDI du maté­riel adéquat et des outils de gestion pour une réponse rapide dans le sec­teur éducatif.

il Pratt, D . ; Short, E .C . 1994. « Curriculum Management ». Dans : Husén, T. ; Postlethwaite, T.N. (dir. publ.). The international encyclopedia of education (Londres, N e w York), Pergamon, vol. 3, p. 1322-23.

Le développement par étapes des p r o g r a m m e s d'éducation de base

La figure 1 et le tableau 2 montrent les élé­ments qui composent le coffret récréatif — aussi appelé « R E C R É E R »— que l'on propose pour les premières activités éducatives non formelles et récréatives.

11.3.2. LE COFFRET « RECRÉER »

U n coffret type, associé à un guide type pour le maître/animateur/assistant social/instruc­teur peut être produit en quatre semaines en prenant en considération le temps nécessai­re à l'adaptation locale et culturelle. Des va­riations locales et des coutumes (chansons, folklore, danses, contes, etc.) peuvent être adaptées et/ou ajoutées pour enrichir le programme.

U n coffret a été mis au point au R w a n d a avec un guide pour l'instructeur en français et en kinyarwanda.12 L'adaptation locale à la culture rwandaise a été réalisée par une O N G basée à Kigali, avec le soutien technique et fi­nancier de l'UNICEF.

U n e fois le coffret R E C R É E R produit, il est possible de constituer des stocks, d'anticiper et/ou de développer une capacité régionale. Le coffret de base est composé d'une malle remplie de matériel pour l'éducation sporti­ve et récréative pour 80 à 160 enfants. Il y a en général entre deux et quatre instructeurs pour un groupe de quarante enfants. Le guide de l'instructeur (GI) peut être uti­

lisé par les instituteurs dans n'importe quel­le situation, mais ils devront l'adapter à la réalité locale. Le développement, la tra­duction (si besoin est) et l'impression du GI doivent être planifiés. Le GI devra conte­nir des jeux, des sports, des chansons, des danses et toute autre forme de récréation. U n groupe de maîtres ou d'agents c o m ­munautaires peut réunir très rapidement une série de jeux et de chants tradition-nels.Très souvent on peut former quelques adolescents ou quelques agents c o m m u ­nautaires pour qu'ils aident pendant la pre­mière phase de l'intervention rapide d'ur­gence. (Guide du maître pour l'éducation non formelle et matériel d'instruction, voir page 25.)

12 Centre déjeunes Gatenga-MINITRASO, Éducation par le jeu : guide de l'animateur, Kigali, UNICEF, 1996. Pour une variante de cette proposition voir : Aguilar, P. 1998. Recreational kits for refugees. Genève, U N H C R , (PTSS Best practices paper, n°4).

Quantité

10

20

2 2

2 5

10 20

1

12

12

10 6

1

1

1

2

1

12 1

2

2

2 2

1

2

2

3

1

1

Objets

Pour les enfants

Grandes cordes à sauter

Petites cordes à sauter

Ballons de volley-ball

Filets de volley-ball

Ballons de football

Petits ballons

Petits tambourins

Flûtes, cymbales, maracas, triangles, etc. (en fonction de la culture locale)

Tambour avec des baguettes de tambour

Dossards de couleur (pour différencier les joueurs de chaque équipe)

Costumes de danse (en fonction de la culture locale)

Quilles en plastique

Piquets avec drapeau (pour délimiter l'aire de jeu)

Malle en plastique ou en métal pour ranger tous les objets ci-dessus

Cadenas à clé

Pour les instructeurs de récréation

Cahier d'appel (rayés, 48 pages, A5)

Cahier de notes (rayés, 250 pages, A4)

Guide du maître (dans la langue locale)

Stylos

Boîte de poudre de craie blanche (pour délimiter la zone de jeu)

Clochettes

Sifflets

P o m p e s à air

Trousse de secours pour réparer les ballons crevés (rustines, colle, etc.)

Mètre ruban enroulé (long)

Tableau noir

Tambourins

Boîtes de craies (144 batons dans chaque)

Sac en toile pour ranger tous ces objets

Cadenas à clé

TABLEAU 3. Eléments composant le coffret récréatif destiné à 80 enfants environ

Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

La formation pour l'utilisation du coffret est prévue de façon à permettre une présen­tation pratique du GI et ne prétend pas être exhaustive. La créativité et l'imagination font partie du processus de formation. La durée de la formation devrait être d'au moins une journée.Toutefois, le coffret ne devrait jamais être délivré sans une forma­tion préalable. Le coffret doit rester c o m ­plet, les éléments qui le composent doivent être regroupés et ne pas être dispersés ni utilisés à des fins personnelles, étant don­né le risque de voir certains maîtres consi­dérer le coffret c o m m e une « malle de ca­deaux ». La formation par des activités sys­tématiques et significatives donnera aux jeunes un rôle spécifique à jouer. Les ado­lescents et les agents de la communau té peuvent aussi être formés pour aider à uti­liser le coffret.

U n autre avantage du coffret est la possibilité de l'utiliser dans différentes situations (jeux, tournois entre écoles, compétitions sportives, éducation physique), dans les camps PDI,pour les enfants de la rue et dans les centres d'en­fants non accompagnés ou dans les centres de réhabilitation. Une fois le pic de l'urgence passé, le matériel peut faire partie des activi­tés scolaires régulières ou du programme sco­laire normal. En travaillant à travers les O N G , avec les maîtres et les agents communautaires, la promotion des activités récréatives peut être considérée c o m m e « la première pierre » de la défense des initiatives en faveur de la paix (voir page 41).

11.4. L'éducation non formelle

Cette section décrit la composante éducati­ve des réponses d'urgence et analyse quelques stratégies qui ont récemment été utilisées par le U N H C R , l ' U N E S C O , l'UNICEF et par d'autres organisations internationales.

L'éducation non formelle dans un contex­te humanitaire signifie que les élèves appren­nent les connaissances de base à travers l'étude des matières principales, mais les cours ne mènent pas forcément à l'obten­tion de diplômes ou de certificats reconnus. L'intervention des organisations humani­taires est importante puisqu'elle décourage

la diffusion de messages politiques aux enfants et aux adolescents à travers l'éduca­tion. « A u contraire, la communauté humani­taire internationale, qui fournit l'aide sous forme de biens et de fonds, devrait insister pour former les enseignants à transmettre des connaissances en matière de coopéra­tion, de résolution de conflits et de réconci­liation, ainsi que des messages sur la santé et sur la protection de l'environnement »".

11.5. Le matériel et les coffrets éducatifs

D e nombreuses situations d'urgence au cours des vingt dernières années ont contraint les éducateurs à intervenir en urgence dans le do­maine éducatif. Dans certains cas, les agences ont fait u n effort de collaboration. Les des­criptions faites dans cette section de certaines « expériences d'interventions d'urgence » contribuent à illustrer cet aspect de la straté­gie d'intervention éducative rapide.

II.5.I. LE COFFRET D ' U R G E N C E DE L'ÉDUCATEUR

Le programme d'urgence de l 'UNESCO-PEER (Programme pour l'éducation dans les situa­tions d'urgence et la reconstruction) a élabo­ré en 1993 en Somalie un coffret d'urgence pour les maîtres (TEP). L ' U N E S C O - P E E R a tra­vaillé dans un contexte interinstitutionnel et a développé avec d'autres agences des projets d'urgence similaires en Afrique centrale, en Afrique de l'Est et dans la région sud de l'Afrique.

Le TEP ou « l'école en boîte » est composé d'un coffret de matériel et d'une méthodolo­gie d'alphabétisation et de calcul élémentai­re dans la langue maternelle des enfants.

Il y a une boîte contenant des craies, des ar­doises, des chiffons, des cahiers et des crayons pour 80 enfants (répartis en deux jeux). Le sac de l'éducateur contient de la peinture pour tableau noir, un pinceau et un mètre enrou­leur pour que l'éducateur puisse, en cas de besoin, improviser un tableau noir sur un m u r ou sur une table en bois; il contient aussi des craies blanches et de couleur, des crayons, des stylos, des taille-crayons et des stylos feutres;

1* U N H C R , Revised guidelines [Principes directeurs], op.cit., p. 28.

Les agences humanitaires et les commu­nautés devraient coopérer pour mettre en place le plus tôt possible l'éducation non formelle sur une base systématique. Le contenu devrait suivre les modèles cultu­rel et linguistique des bénéficiaires.

Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

17

trois « jeux de Scrabble » faits de petits cubes en bois avec des lettres et des chiffres pour que l'éducateur puisse créer des jeux de mots et de chiffres pour les enfants; trois tableaux peints sur tissu (abécédaire, chiffres et multi­plication), u n registre d'appel, u n cahier de notes et un guide du maître sur lequel figu­rent les méthodes d'enseignement et le conte­nu des leçons d'alphabétisation et de calcul (figure 2 et tableau 4, page 18).

La boîte est conçue pour environ quatre-vingt enfants réfugiés d'âge scolaire primaire et elle est prévue pour animer deux classes distinctes en alternance. Elle ne contient pas de programme formel pour chaque année, mais du matériel d'alphabétisation et de m a ­

thématiques de base. Dans les pays dans les­quels les chiffres arabes et l'écriture latine ne sont pas utilisés, il faudra créer ou acheter des versions locales du matériel.

La boîte et le sac de l'éducateur offrent une grande facilité d'utilisation qui permet à l'édu­cateur et aux élèves d'installer une salle de classe n'importe où.

Le coffret couvre approximativement la for­mation en alphabétisation et les leçons de cal­cul qui doivent être enseignées pendant les quatre premières années de l'école primaire et il est conçu pour une période de six mois d'enseignement, pour ensuite entrer progres­sivement dans le programme scolaire formel basé sur le manuel scolaire.

Le sac de /'éducateur contient de la peinture pour tableau noir, un pinceau et un mètre enrouleur pour que

l'éducateur puisse, en cas de besoin, improviser un tableau noir sur un mur...

18 Le développement par étapes des programmes

d'éducation de base

FIGURE 2. Le contenu du TEP

TABLEAU 4. La réponse

éducative non formelle

contenue dans le TEP

L'équipe de l ' U N E S C O a également déve­loppé un programme de formation pour la mise en place du TEP basé sur la méthode « for­m e le formateur »." O n peut se procurer les versions Somalie, portugaise, kinyarwandaise, afar, française et anglaise du TEP au bureau de l 'UNESCO-PEER. L'adresse actuelle de l'UNES-C O - P E E R à Nairobi est : P.O. Box 30592, U N . Complex Giriri, Nairobi, Kenya. Le prix uni­taire en 1997 était de 140 dollars environ.

14 Retamal, G . ; Mudiappasamy, D . et Richmond, M . 1995. UNESCO-PEER.- lessons learned in Eastern Africa. Giriri-Nairobi, UNESCO-PEER.

Quantité! Description

40 80 40 80

80 80 80 80 9

1

6 6 6

3 3

96

Pour les enfants

Petites ardoises rigides

Crayons d'ardoise

Chiffons d'ardoise

Cahiers d'exercice (rayés, A 4 , 9 6 pages)

Crayons de papier

Gommes Taille-crayons

Stylos bille (bleu)

Boîtes de craies (de 144 bâtons chacune)

Pendule en bois

Damier ou assimilé (selon la culture)

Malle en plastique ou en métal pour contenir tous les objets cités

Cadenas à clé

Pour les éducateurs

Cahier d'appel

Cahier de notes (rayé, A 5 , 9 6 pages)

Guide de l'éducateur (dans la langue locale)

Stylos bille (bleu)

Stylos feutre

Crayons de papier

Règle (30 c m )

Gommes Taille-crayons

Mètre enrouleur (1,5 m )

Cubes en bois (2 c m )

Boîte de craies blanche (144 bâtons)

Boîte de craies de couleurs assorties (144 bâtons)

Boîte de peinture pour tableau noir

Pinceau

Chiffon

C o m p a s pour le tableau

Équerre de tableau

Règle pour le tableau

Abécédaire (imprimé sur tissu)

Tableau de chiffres de 1 à 100 (imprimé sur tissu)

Table des multiplications de 1 à 10 (imprimée sur tissu)

Carte du pays d'origine (imprimée sur tissu)

Sac en toile pour contenir tous ces objets

Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

11.5.2. L'EXPERIENCE DE N G A R A , 1994

U n e conséquence directe du génocide per­pétré au Rwanda en 1994 fut le déplacement massif de population de l'autre coté de la frontière. En vingt quatre heures, 250.000 personnes ont cherché refuge à Rusumo, en République Unie de Tanzanie et plus de 470.000 personnes se sont dirigées vers la région de Kagera. À ce m o m e n t là, c'était la plus grande population de réfugiés au m o n ­de, mais peu après, l'exode en direction de l'est du Zaïre dépassa ces chiffres. U n appel à la communauté internationale a été lancé pour qu 'un effort massif soit fait en faveur de la population déplacée dans de telles pro­portions.15

L'étroite collaboration interinstitutionnelle a été la caractéristique essentielle et princi­pale depuis le début. Cela a probablement été le seul mécanisme efficace pour aborder le problème de l'éducation des réfugiés. Le U N H C R , l'UNICEF, l 'UNESCO-PEER et la Deutsche Gesellschaft für Technische Zusam­menarbeit (GTZ) ont offert leur soutien conjoint afin de fournir un programme édu­catif c o m m u n pour les camps surpeuplés de Ngara. Le gouvernement de Tanzanie a accepté et approuvé un M é m o r a n d u m d'accord , ain­si que des accords secondaires associés avec des O N G c o m m e base du développement du secteur de l'éducation dans le camp. U n M é ­morandum d'accord décrit quelle organisa­tion sera responsable d'apporter les services d'urgence spécifiques dans les camps en si­tuation critique. Dans le cadre de notre travail sur place, la question principale fut de déci­der quelle agence humanitaire d'urgence se­rait responsable de l'organisation de l'éduca­tion dans chaque camp. Le principe de « l'édu­cation pour le rapatriement » a été adopté par toutes les agences humanitaires concernées qui ont décidé de donner la priorité m a x i m u m à l'éducation primaire.

Pour donner suite au M é m o r a n d u m d'ac­cord, le U N H C R a pris la responsabilité de la coordination générale à partir de laquelle a été établie l'Unité de gestion du program­m e d'éducation ( U G P E ) qui comprenait l 'UNESCO-PEER, l 'UNICEF et la G T Z . 1 6 À tra­vers un Comité de coordination de l'éduca­tion, l 'UGPE a coordonné le programme d'édu­cation avec les services de la communauté et les O N G qui travaillent dans le secteur de l'éducation. Dans chaque c a m p , u n réfugié rwandais a été embauché c o m m e Fonction­naire de Développement du Projet (FDP) pour superviser le fonctionnement des écoles dans

le c a m p . Chaque école avait un directeur qui avait pour mission de gérer l'école avec un as­sistant appelé le « responsable »,.

Très rapidement après le début de l'urgen­ce, le U N H C R et l 'UNICEF ont fait une éva­luation des besoins éducatifs qui a vivement intéressé la communau té et qui a facilité la planification de l'éducation. Les organisations concernées ont alors planifié une interven­tion par étapes présentant les caractéristiques suivantes :

Récréation : Cette méthode a offert, par­ticulièrement dans le c a m p de Lumasi, la pos­sibilité aux enfants, aux éducateurs et aux jeunes adultes de se retrouver ensemble dans un but c o m m u n et de se livrer à des activi­tés de base favorables au bien-être et à la gué-rison psychologique. Le travail d'équipe et les activités organisées faisaient partie du pro­g r a m m e , qui donnait aussi la possibilité de planifier d'autres parties du p r o g r a m m e d'éducation.

Le coffret d'urgence de l'éducateur a été adopté pour aider à mettre en place la première phase du programme éducatif d'ur­gence à Ngara. Initialement, l ' U N E S C O - P E E R a envoyé 300 coffrets à Ngara en vue de l'ou­verture immédiate des écoles dans les camps. C o m m e les éducateurs rwandais ne connaissaient pas le matériel proposé dans le coffret, les spécialistes de l 'UNESCO-PEER ont procédé avec les éducateurs rwandais à la traduction en kinyarwanda et à l'adap­tation des T E P (pour plus de détails sur le contenu du TEP, voir page précédente). L'in­troduction de la méthodologie du T E P et la formation des éducateurs a toujours précé­dé la distribution des coffrets. Les éduca­teurs rwandais l'ont vu c o m m e une moti­vation supplémentaire pour revenir à des activités éducatives. E n avril 1995, à N g a -ra/Karagwe, quarante écoles ont été ou­vertes dans les camps de réfugiés et 60.000 élèves ont été inscrits, utilisant tous le sys­tème d'alternance, c'est-à-dire que la moitié

^Aguilar, P. ; Richmond, M . 1998. > Emergency educational response in the Rwandan crisis ». Dans :Retamal, G . ; Aedo-Richmond, R. (dir. Publ.), Education as a humanitarian response. Londres, Cassell.

1° Riller, F. Regional Emergency Education Mission : Kenya, Tanzania, Rwanda, Zaïre (27 octobre - 24 novembre 1994), Unité spéciale pour le Rwanda et le Burundi (USRB), Rapport de mission, décembre 1994.

20 Le développement par étapes des p r o g r a m m e s d'éducation de base

L'utilisation du TEP au Rwanda

d'entre eux allaient à l'école le matin et l'autre moitié y allait l'après-midi. Les en­fants des camps de réfugiés des pays en dé­veloppement se retrouvent principalement concentrés dans les premiers échelons de l'éducation de base.

La réintroduction d u p r o g r a m m e sco­laire : Des retards ont été observés dans la li­vraison des manuels scolaires pour l'école primaire, mais des efforts ont été faits pour utiliser du matériel dupliqué ou du matériel ad hoc (voir II.7.3- « Créer une unité de pro­duction à moindre frais »,page 31).

11.5.3. LE TEP AU RWANDA

En juillet 1994, l 'UNICEF et l ' U N E S C O ont décidé d'unir leurs efforts pour intervenir ra­pidement au R w a n d a et dans les camps de réfugiés, sous forme d'un programme pour l'urgence et la reconstruction éducative (PEER). La collaboration interinstitutionnel­le avait déjà c o m m e n c é au mois de mai avec la traduction en kinyarwanda et l'adaptation du guide de l'éducateur et des autres maté­riels éducatifs contenus dans le TEP, que le PEER avait déjà élaboré pour son program­m e somali.

Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

21

La coopération des deux organisations dès le début a facilité la conceptualisation, le dé­veloppement et la mise en marche de l'inter­vention éducative d'urgence. « U n degré in­habituel, peut-être unique, d'étroite collabo­ration interinstitutionnelle a été tout de suite atteint et a été maintenu grâce à u n travail d'équipe, à des buts et à des objectifs c o m ­m u n s , à une aide mutuelle et à une complé­mentarité des rôles. »

La reconstruction du système éducatif na­tional a c o m m e n c é avec l'implantation duTEP-— ou L'école en boîte, « School in a box »— c o m m e une « classe mobile ». Le modèle du T E P était, pour la première fois, testé à l'échel­le du pays entier. La stratégie élaborée par le programme d'éducation d'urgence de l'UNI-C E F - U N E S C O , en collaboration avec les fonc­tionnaires du Ministère, s'est basée sur une méthode phase par phase destinée à rétablir le système éducatif.

L'objectif de la première phase était de re­construire les infrastructures quasi inexis­tantes, afin de rouvrir les écoles et de c o m ­mencer à réintégrer les élèves et les éduca­teurs. L'UNICEF a finalement fourni 9.000TEP pour faire face aux besoins initiaux de près de 720.000 élèves de l'école primaire et des éducateurs en formation. Plus de 11.000 édu­cateurs ont été formés pour l'utilisation du TEP, ce qui représente environ 6 0 % de l'an­cien corps enseignant de l'école primaire.

La seconde phase était consacrée à la nor­malisation du système éducatif en termes d'ap­provisionnement en manuels scolaires, en guides de l'éducateur et en fournitures habi­tuelles pour les écoles, en plus de la reconsti­tution de l'infrastructure des services admi­nistratifs de l'éducation fournie par les mi­nistères et les préfectures.

Des campagnes de sensibilisation (sensi­bilisation aux mines, messages de santé re­latifs au choléra) ont été mises en place au niveau des préfectures, avec la participation des éducateurs, des autorités locales et autres. Des matériels didactiques spécifiques en kinyarwanda pour la prévention des mines et du choléra ont été incorporés aux outils de base de l'alphabétisation et du cal­cul du TEP.

11.5.4. LA F O R M A T I O N DES É D U C A T E U R S

Afin de pouvoir rouvrir les écoles, le gouver­nement a eu recours au TEP et à la formation des éducateurs (d'une durée de deux jours). Le premier jour de formation était consacré à la théorie de l'enseignement de base et à une dé-

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TEP Coffrets d' jrgence de l'éducateur

s d'âge scolaire environ 559.680

H H L Tanzanie

4*«r^ ) ft 600 / ^ 4 3 0 ]

1.707

11.759

6.996

concernés :

1 monstration de la méthodologie du TER La se­conde journée était centrée sur les compétences pratiques de l'enseignement pour l'alphabéti­sation et le calcul en utilisant le matériel di­dactique des activités éducatives suggérées dans le TEP, ainsi que le guide de l'éducateur.

U n système de formation des formateurs a été mis au point dans chaque communau t é en ayant recours à une approche en cascade, afin de répondre aux besoins urgents de for­mation des éducateurs rwandais. L'approche en cascade signifie que les éducateurs une fois formés, devaient, à leur tour, former leurs collègues.

' Aguilar, P. et Richmond, M . op. cit.

L'impact du TEP au Rwanda

22 Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

U n groupe de vingt et un formateurs natio­naux divisé en équipes de quatre ou cinq per­sonnes a été envoyé dans les onze préfectures. Chaque c o m m u n e était représentée par deux éducateurs de l'école primaire qui à leur tour formaient les autres éducateurs dans leurs propres communes . Étant donné que c'était la première activité systématique qui était or­ganisée au niveau de la communauté, les au­torités locales telles que les superviseurs lo­caux et de district, les directeurs d'école, les représentants de l'Église et les autorités des gouvernements locaux ont assisté à toutes les sessions de formation. Il faut noter que moins de 10 % des personnes participant à la for­mation étaient des femmes.

11.5.5. UNE INTERVENTION EDUCATIVE N O N FORMELLE

Le matériel didactique doit être « embal­lé » quand il comprend plus d'un article. Le coffret min imum contient quelques matériels pour l'élève et quelques-uns pour l'éducateur. Mais en général, d'autres éléments sont éga­lement fournis tels que différentes méthodes d'instruction, divers travaux individuels, avec des formats et des moyens distincts pour la formation. Par exemple, un coffret pour l'élè­ve peut contenir un texte, un cahier pour tra­vailler ou un jeu de fiches associées au texte, en plus d'un guide pour l'éducateur. Pour les pays développés il existe des coffrets et des

FIGURE 4. La formation des

maîtres

GROUPE DE DEPART DES FORMATEURS

PRÉFECTURE PRÉFECTURE PRÉFECTURE

| COMMUNE) ^COMMUNE}]

ÉCOLES ECOLES ECOLES

Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

23

INTERVENTION EDUCATIVE NON FORMELLE Objectif général :

Donner aux enfants des cours d'alphabétisation de base, de calcul et des compétences essentielles en attendant le rétablissement du système scolaire normal.

Objectifs spécifiques :

• apporter aux enfants des matériels de lecture et d'écriture de base dans leur langue d'enseignement ; • fournir aux enseignants les instruments d'enseignement et de formation de base ; 1 renforcer les initiatives éducatives communautaires de base.

Activités :

• développer, produire/stocker les coffrets et le matériel éducatif pour l'enseignement ; • identifier et/ou adapter les matériels éducatifs non formels à la langue d'enseignement de la communauté ; • identifier les enseignants et les former à l'utilisation du matériel disponible et aux aides didactiques ;

• coordonner l'action des enseignants et des O N G pour mobiliser les parents et les jeunes pour développer la sco­larisation de base au niveau de la communauté, des camps de déplacés et de réfugiés.

jeux multimédia plus élaborés (avec tout l'at­tirail nécessaire, tableaux, fiches, systèmes de notation), disques, disquettes informatiques, films, cassettes vidéo, vidéodisques. D e plus, d'autres éléments peuvent être ajoutés, parti­culièrement pour évaluer les progrès des élèves. Ces procédés peuvent être aussi simples qu'un mécanisme de graduation pour suivre et évaluer le niveau atteint par l'élève dans une série de matériels hiérarchiquement structurés. La progression peut-être repré­sentée par un graphique sur le mur.1S

La fourniture d u matériel éducatif : Les caractéristiques principales du coffret de­vraient être sa solidité, sa facilité de trans­port et d e stockage (l'expérience montre que dans le cas des réfugiés somalis, afars et rwandais, les coffrets éducatifs faisaient par­tie des objets dont les réfugiés prenaient soin et qu'ils emmenaient avec eux quand ils étaient rapatriés). Parfois, il est nécessaire de changer le lieu d'implantation de l'école au milieu du programme scolaire, c'est la raison pour laquelle il est impératif de garder le m a ­tériel dans sa malle.

1° Baker, E. L. 1991. « Curriculum packages ». Dans : Lewy, A . (dir. publ.). The international encyclopedia of curriculum. Oxford, Royaume Uni ; N e w York, Pergamon.

En fonction de la durée de vie des éléments composant le coffret (environ quatre mois), il faudra déterminer rapidement les fourni­tures ou les pièces de rechange locales né­cessaires, afin de préparer immédiatement un budget pour cela et pour acheter également les matériels, les livres et les équipements édu­catifs mentionnés à la page 18.

Des éducateurs

afars réfugiés se

préparant pour le

rapatriement à

Djibouti

Source : Mudipassamy Devadoss et Lois Richards, A scuola parlando VMai,Popoli (Milan), n° 11, novembre 1997,p.l8-21.

24 Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

EXPÉRIENCES D'INTERVENTIONS EN SITUATIONS D'URGENCE

SENSIBILISATION PSYCHOSOCIALE AU RWANDA1 9

À la lumière des graves séquelles telles que les traumatismes, des réactions de douleur et de stress émotionnel, laissées par le génocide, le groupe initial des formateurs a assisté à un troisième jour de formation consacré à l'amélioration de la prise de conscience des conséquences du traumatis­m e psychologique sur les enfants. Cette activité a suivi la formation de deux jours des éducateurs qui a eu lieu au niveau national pour l'introduction du TER Les soixante enseignants qui ont parti­cipé à ce premier cours de formation ont reçu un guide de formation de six pages20 comprenant les notions théoriques de base des traumatismes, l'identification des symptômes de traumatismes chez les enfants de tout âge et les principes directeurs pour les méthodes d'expression verbale ou phy­sique. L'une des attentes était qu'un petit groupe de ces éducateurs continuerait à former d'autres enseignants à la fois à la méthodologie du TEP et à la sensibilisation psychosociale au niveau des préfectures et en suivant la méthode de la « cascade » jusqu'au niveau des communes.

D'un point de vue psychosocial, cette intervention anti-traumatisme avait été conçue pour faire connaître le besoin de normalisation de la vie quotidienne des enfants, souvent symbolisée par la réouverture des écoles primaires, par le rétablissement de l'ancienne routine scolaire et par la four­niture de matériels éducatifs aux enfants et aux enseignants.

Un des 30.000

enfants rwandais

sans famille

raconte son histoire

à un consultant

dans le cadre du

programme de

récupération du

traumatisme

1 9 L'article 39 de la C D E

dispose que tous les

enfants ont le droit à la

réadaptation physique et

psychologique et à la

réintégration sociale en

temps de conflits armés. 2 0 Raundalen, M . 1994.

Introduction to war

trauma treatment. Kigali,

UNICEF-Rwanda.

Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

25

EXPÉRIENCES D'INTERVENTIONS EN SITUATIONS D'URGENCE

TEP POUR L'ANGOLA, 1996

Dans un effort pour répondre aux nécessités éducatives des personnes angolaises « retournées » (réfugiés qui rentrent et personnes déplacées), l 'UNESCO-PEER et le Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC) ont élaboré, en collaboration avec le Ministère de l'éducation, un programme TER Le programme TEP pour l'Angola" a été mis au point grâce aux leçons apprises à partir des expériences de la Somalie et du Rwanda. Il était composé d'un manuel de formation révisé et développé avec des modèles de leçons en portugais et/ou en langue nationale (essentiellement en kikongo), et pratiquement des m ê m e s fournitures d'école que celles qui composaient le précédent TEP de réponse d'urgence. Ce programme éducatif non formel était à l'origine destiné aux enfants et aux adolescents des communautés rurales qui avaient été privés de l'accès aux services éducatifs de base et/ou qui avaient abandonné l'école à cause de la guerre civile. Beaucoup de communautés rurales participèrent activement à l'implantation « d'écoles TEP » dans leurs villages. L'UNICEF participe maintenant à ce programme dans d'autres régions du pays.

L'une des principales innovations du programme du TEP pour l'Angola a été l'allongement de la durée de la formation complémentaire des enseignants à trois semaines, afin de leur présenter le guide révisé de l'éducateur et de faire face aux besoins des enseignants, dont beaucoup avaient reçu une éducation formelle limitée. Une autre innovation a été apportée suite au succès du programme N R C - T E P dans un district de l'Angola; le Ministère de l'éducation a adopté la m ê m e méthode et a proposé aux enseignants de l'école primaire formelle une formation complémentaire pour leur permettre de changer d'échelon.

11.5.6. LE GUIDE DE L'ÉDUCATEUR N O N FORMEL22

Le guide de l'éducateur est un outil pour ai­der l'enseignant à présenter le programme. En général, le guide est associé à un manuel sco­laire déterminé. Cependant, il arrive parfois que les guides soient indépendants du manuel et qu'ils contiennent suffisamment d'infor­mations, d'activités, de questions et de plans de leçons pour enseigner des sujets détermi­nés tels que le football, des chansons, la sen­sibilisation aux dangers des mines, du cholé­ra, des maladies transmissibles par l'eau et de thèmes concernant la protection de l'envi­ronnement, etc. U n guide de l'éducateur n'est pas un manuel pour les élèves.

Certains pédagogues ont voulu présenter une séquence d'enseignement qui soit à la fois efficace et reproductible. Les guides qu'ils proposent s'appuient sur l'idée d 'un texte « à l'épreuve de l'enseignant », par le­quel l'éducateur se contente de faire une présentation initiale du matériel en utilisant un scénario préétabli et de superviser les ré­ponses des élèves à l'aide d'une liste de ré­ponses correctes.

En situations d'urgence, la distribution de fournitures aux enfants sous la supervision d'un éducateur non formé résulterait en un gaspillage d'équipements et à un manque d'ef­ficacité des activités éducatives. C'est la rai­son pour laquelle il faudrait inclure dans le guide, avec le coffret non formel, quelques lignes directrices de base et des documents d'aide pour l'enseignement, c o m m e par exemple des tableaux, des cartes, des tables arithmétiques, des abécédaires, etc. L'absen­ce de ces lignes directrices de base et des instruments d'enseignement rendrait la formation des éducateurs au niveau d u c a m p et au niveau c o m m u n a u t a i r e pu­rement théorique.

2 1 UNESCO-PEER/Conse i l norvégien pour les réfugiés, Guia do professor : pacote de emergencia para o professor, TEP para Angola. Angola, Nairobi, U N E S C O - P E E R , 1996.

2 2 McNeil, J. Teacher's guide. Dans : Lewy, A . (dir. publ.). op. cit. p . 81. Voir aussi, Ball, D . ; Feiman-Neimser, S. 1986. Using textbooks and teachers' guides : what beginning elementary teachers learn and what they need to know. East Lansing, Michigan, Michigan Institute for Research on Teaching, Michigan State University.

26 Le développement par étapes des p r o g r a m m e s d'éducation de base

Évaluation éducative d e base

Analyse interinstitutionnelle

sur le terrain

Coffrets

FIGURE 5. Les procédures

d'exécution suggérées :

intervention éducative

récréative! préparatoire et

non formelle dans une situation

d'urgence

La participation d'éducateurs internationaux, de pédagogues et des autorités éducatives du pays et, si possible d'auteurs/traducteurs, se­rait souhaitable pour adapter et élaborer les guides du maître et les matériels éducatifs. (Dans le cas des réfugiés, le rôle des éduca­teurs du pays d'accueil variera selon qu'ils sont ou non familiers avec la/les langue(s) d'ensei­gnement de la communauté réfugiée.)

11.6. Les procédures d'exécution, l'éducation en phase d'urgence (voir Figure 5)

U n e fois l'évaluation des besoins éducatifs fai­te, si cette information révèle que les condi­

tions ne sont pas réunies pour l'implantation d 'un système scolaire formel, les étapes sui­vantes sont suggérées.

Il faudra produire, constituer des stocks et distribuer les coffrets éducatifs. Le directeur sur le terrain, en coordination avec les parte­naires pour l'implantation, devra procéder à l'identification des enseignants potentiels dans la communauté affectée. U n e formation et une orientation technique seront nécessaires pour préparer u n programme de distribution du coffret récréatif et d'éducation non formelle. L'implantation des programmes récréatifs et des programmes d'alphabétisation non for­melle et de calcul peut démarrer dès que les éducateurs identifiés ont suivi leur formation complémentaire.À ce stade, des coffrets édu­catifs supplémentaires sur la prévention contre les mines, sur des thèmes urgents relatifs à la santé, sur les traumatismes psychologiques, etc. pourraient être intégrés dans le proces­sus éducatif. (Voir la section sur les coffrets supplémentaires de survie, Partie III, p . 33)

11.7. Réintroduction du p r o g r a m m e scolaire

77 est hautement recommandé que la sco­larisation soit, dans la mesure du possible, construite à partir d'un programme sco­laire de base avec des matériels éducatifs familiers aux enseignants et aux élèves.

11.7.1. UNE SALLE DE CLASSE NORMALISÉE

C o m m e nous l'avons mentionné précédem­ment , l'amélioration de l'éducation de base est de la plus haute importance pour le H C R , l'UNICEF et l ' U N E S C O , indépendamment des circonstances, que les communautés affectées doivent faire face aux premiers signes de l'ur­gence ou qu'elles soient déjà installées dans une situation d'asile à long terme. Dans le cas des réfugiés, il faudrait établir des objectifs et des critères m i n i m u m pour les écoles finan­cées par le U N H C R . 2 3

23 U N H C R , Service de l'inspection et de l'évaluation. 1997. Review of UNHCR's refugee education activities. Genève, p. 13. Une proposition de brouillon pour ces critères min imum est actuellement à l'étude en vue de l'élaboration d'une nouvelle version du manuel d'urgence du U N H C R .

Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

27

Cette phase fait référence à une situation normalisée, dans laquelle les écoles essayent d'avoir un horaire normal, avec des ensei­gnants qui dispensent la majorité des thèmes scolaires et qui utilisent les manuels scolaires. Il serait souhaitable que, dans les camps de réfugiés, le programme scolaire et la langue d'enseignement soient ceux du pays ou de la région d'origine des réfugiés. Ce n'est pas tou­jours le cas, et parfois, les réfugiés doivent suivre le programme scolaire du pays d'ac­cueil, c o m m e par exemple les réfugiés sou­danais dans le nord de l'Ouganda et du Ke­nya. L'expérience montre que, lorsque des en­fants réfugiés sont forcés de suivre le programme scolaire du pays d'asile, les consé­quences sont néfastes sur leur réintégration future dans le système scolaire normal et pour leur développement éducatif. Par exemple, les enfants réfugiés mozambicains qui ont sui­vi les programmes de l'éducation nationale du Swaziland, de Zambie et de Tanzanie, ont été obligés d'apprendre le portugais afin de pouvoir reprendre leurs études à leur retour au Mozambique . Il en a été de m ê m e avec l'utilisation du programme scolaire soudanais pour les réfugiés éritréens et tigrés dans l'est du Soudan, ce qui a limité la présence des en­fants réfugiés dans les écoles financées par le U N H C R et qui a conduit à la création par les réfugiés eux -mêmes d 'un système parallèle d'éducation non formelle dans leur langue maternelle.

11.7.2. QUELQUES EXPÉRIENCES

D e plus, au Kenya et au Kirghistan, des m a ­tières spécifiques considérées c o m m e es­sentielles pour l'éducation ont été incorpo­rées au programme pilote, afin de sensibili­ser les enfants et les parents victimes de conflits armés : • Le p r o g r a m m e d'éducation pour l'en­

vironnement fait partie d'un projet pilote au Kenya (REEPP-Kenya).24 En association avec l 'UNESCO-PEER, trois manuels pour les élèves ont été élaborés pour les niveaux 1, 2 et 3, et un guide de l'enseignant ; ils font maintenant partie du programme scolaire du Kenya.

• Le p r o g r a m m e d'éducation pour la paix. U n livre de référence pour le maître a récemment été élaboré pour introduire ou renforcer les concepts relatifs à l'édu­cation pour la paix. C e programme a pour but de faire partie du programme scolaire normal et des activités extrascolaires o u d'approfondissement.25

• L'éducation à la tolérance. Dans la Ré­publique kirghize,un programme d'éduca­tion à la tolérance a été développé et financé par le H C R , avec le soutien total du gou­vernement.26 U n guide du maître et quatre livres d'histoire ainsi qu'une introduction générale sur l'enseignement de la toléran­ce ont été produits et font partie d'une sé­rie de livres. Le programme est utilisé avec des élèves de sixième année d'école pri­maire et au-dessus.

• U n e mention spéciale doit être adressée au projet M E A n g o l a / U N E S C O Aprender de maos dadas. Ce programme a pour but de créer la capacité, au niveau des écoles, de constituer des classes intégrées qui puis-

2 4 U N H C R . Refugee Environmental Education Pilot Project in Kenya. (REEPP-Kenya), avril 1997. Voir aussi, U N E S C O / U N H C R , Environmental Edu­cation Programme Teacher's Guide. Nairobi, 1996.

25 Baxter, P. 1998. Teacher's Resource Book for Peace Education Programme. Manuscrit. Nairobi, UNHCR.

2" Jenkins, S. 1996. Teacher's Guide for the Teaching of Tolerance. UNHCR-Kyrgyz.

...Un système parallèle d'éducation non formelle dans la langue des réfugiés a été établi par les réfugiés eux-mêmes.

28 Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

Un enfant aveugle

utilisant

une machine à

écrire en Braille

dans une classe

intégrée en

Angola.Une

situation de classe

normalisée

Situation d'une

salle de classe

normalisée

sent offrir des conditions et des opportuni­tés d'accès équivalentes aux enfants vulné­rables qui ont été victimes des longs conflits civils en Angola. O n estime qu'un demi mil­lion d'enfants sont morts des conséquences du conflit et l ' U N E S C O estime qu'un autre demi million d'enfants souffrent de défi­ciences diverses provoquées par la guerre.

«Actuellement », c o m m e l'explique Boubacar Cámara, « les enfants non accompagnés, les or­phelins, les mineurs avec des handicaps phy­siques et sensoriels et les enfants souffrant de traumatismes ont un besoin urgent d'assis­tance multiforme, particulièrement en matiè­re de réhabilitation et de réintégration. »2^

C e projet pilote développe une approche intégrée de l'éducation. La promotion d'op­portunités éducatives pour la réhabilitation des enfants vulnérables est directement liée à la réalisation des objectifs suivants : • Mettre à disposition du système scolaire des

instruments éducatifs adaptés pour les acti­vités éducatives intégrées spéciales.

¿' Cámara, B . 1998. Necessidades educativas especiais em Angola. Dakar, UNESCO/BREDA.

Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

EXPÉRIENCES D'INTERVENTIONS EN SITUATION D'URGENCE

SOMALIE : RÉINTRODUCTION DU PROGRAMME SCOLAIRE, 1993-95

En 1990, l'effort éducatif somalien qui a eu le plus de succès fut probablement l'élaboration, par le Centre de Développement des Programmes scolaires (CDP) de Mogadiscio, d'un p rogramme scolaire pour l'éducation de base et la conception, la production et l'édition de manuels scolaires avec les guides correspondant pour le maître. Ce centre s'est converti de facto en un département de développement de programmes du Ministère de l'éducation, qui opère de façon autonome grâce à l'aide financière permanente de sources extérieures.

À cette époque, la Banque mondiale avait estimé que pour satisfaire les besoins liés à l'inscription pour l'éducation de base, un total de 2,6 millions de manuels scolaires et 100.000 guides du maître devaient être produits sur une période de cinq ans. Pour la seule édition de la première livraison de 300.000 livres de textes en 1990, une allocation budgétaire de 1.139.600 dollars a été demandée.

Le matériel d'enseignement développé par le C D P avait virtuellement disparu pendant la guerre civile. L'acquisition de manuels existant et de guides du maître avait constitué un exercice long et coûteux. Le personnel de l ' U N E S C O se souvient encore des discussions avec les commerçants sur le marché de Mogadiscio pour récupérer des livres de textes que les commerçants utilisaient c o m m e du papier journal.

À partir de février 1993, une équipe d'anciens auteurs et de dessinateurs du C D P ont c o m m e n c é à travailler dans les Centres de Développement Éducatif (CDE) du PEER avec les manuels/guides récupérés. Il a été possible, dans certains cas, de rééditer et de réécrire une série de vingt-cinq titres avec les guides du maître correspondants, qui couvraient les programmes d'étude des quatre premières années d'études. Le travail d'édition consista à corriger les erreurs évidentes, à éliminer les références politiques par déférence au nouveau contexte politique et, quand cela était nécessaire, de réécrire des pages entières. Il a été impossible de récupérer une dizaine de guides du maître, qu'il a fallu réécrire de nouveau. Tous les manuels offraient une présentation totalement nouvelle et un format A 5 attirant et maniable.

Sous la supervision technique de l 'UNESCO-PEER, un consortium pour formaliser des alliances avec sept O N G , avec l'UNICEF et avec le U N H C R tous présents en Somalie et dans les camps de réfugiés somalis de la région a été créé. Après une première édition de 152.000 manuels, plusieurs révisions ont eu lieu et on prépare une quatrième édition actuellement en cours d'impression, totalement financée par la Commission européenne-Unité de Somalie. Cette édition propose non seulement des ouvrages de textes pour la Somalie, mais aussi des manuels scolaires édités spécialement pour son utilisation dans le nord-est de la Somalie.

Bien que les programmes d'études existaient déjà pour la cinquième année d'études, les manuels scolaires et les guides du maître avaient disparu et il fallu les écrire de nouveau, à l'exception du manuel d'éducation pour l'environnement et du guide du maître qui ont pu être récupérés. Actuellement, le PEER prépare les matériels de la cinquième année d'études pour l'imprimerie et c o m m e il n'existe pas de manuel scolaire ni de guide du maître pour les années supérieures, on procède actuellement à la rédaction systématique et coordonnée de ces textes dans chacun des CDP. Des ateliers d'écriture de manuels sont organisés dans plusieurs régions du pays. Étant donné l'absence de modèle de manuel ou de centre de développement de programme scolaire susceptible de voir le jour rapidement, l 'UNESCO-PEER et l'UNICEF sont les agences en Somalie qui peuvent coordonner ces activités. À la différence des ouvrages de textes qui devaient être imprimés en grandes quantités en utilisant la technique offset à l'étranger, les guides du maître ont toujours été imprimés à la d e m a n d e , quelques centaines de copies à chaque fois, par le service d'imprimerie bon marché des C D E de Mogadiscio, de Baidoa et de Hargueisa. En plus des manuels scolaires et des guides du maître, l'UNICEF-Somalie et Longman ont publié conjointement des livres de contes somaliens pour enfants destinés à être utilisés dans les écoles et dans les sessions d'éducation non formelle.

L'enseignement de l'anglais qui, de façon compréhensible était très demandé en Somalie, a requis la production de livres de textes. Une série de manuels d'anglais exclusivement destinés à la Somalie a été élaborée. Pour les maîtres en formation et les élèves de secondaire de la S O M O L U , le PEER a publié les manuels d'anglais que le Ministère de l'éducation avait préparés pour les écoles somalíes. Jusqu'à présent, les manuels produits ont été distribués selon un ratio livres/élèves de un pour six. Des efforts sont faits pour augmenter l'approvisionnement en manuels scolaires et atteindre en 1996 le ratio, plus acceptable du point de vue éducatif, d'un jeu complet pour deux enfants. Les écoles ont des caisses pour stocker les manuels pendant la nuit et les récupérer pendant les heures de classe.

Le développement par étapes des programmes d'éducation de base

• Renforcer la capacité nationale en matière de formation et de gestion dans tous les as­pects relatifs aux nécessités éducatives par­ticulières.

Promouvoir les initiatives de réhabilitation à l'échelle locale et communautaire en faveur des enfants victimes de la guerre.

L'expérience pilote a développé u n « cof­fret de formation pour les formateurs »28 qui fournit les instruments de base pour ensei­gner aux maîtres à mettre en pratique la m é ­thode intégrée dans les classes pilotes inté­grées de l'école de formation des maîtres. Le coffret comprend : u n guide modèle d u maître, u n film et u n livre dans lesquels sont décrits les objectifs et les premiers résultats pratiques du projet, ainsi que les instruments de suivi pour les étudiants. Il y a également d'autres matériels à utiliser par une équipe de professeurs-animateurs itinérants. Leur fonction est la formation des maîtres et la promotion de l'approche intégrée dans des écoles sélectionnées en zone urbaine et rurale.

D'autres expériences, qui requièrent des formes de programmes scolaires plus struc­turées pour les groupes qui ont des besoins particuliers en dehors du contexte éducatif humanitaire ou des camps de réfugiés, peu­vent servir de modèles pour planifier et mettre en marche le programme éducatif dans les in­terventions humanitaires complexes.

Parmi celles-là on trouve : l'école mobile sous tentes aux Philippines29; la stratégie Ke-jar ou c o m m e n t se remettre à niveau en In­donésie, ou des expériences concrètes d'en­fant-à-enfant c o m m e le projet Malvani à B o m ­bay et les expériences du Botswana et de la Zambie.30 D e plus, dans les trente dernières années, des approches innovatrices en termes de matériel ont été développées et expéri­mentées dans différents environnements cul­turels à échelle nationale telles que I M P A C T et le Comité d'Amélioration rurale au Bengla-desh en Asie, ou YEscuela nueva en Amérique latine et Z I N T E C H en Afrique. Bien que toutes ces expériences et tous ces matériels didac­tiques aient une grande valeur, il existe une série de raisons qui empêche de les copier fi­dèlement. Par exemple, les expériences pré­sentent des particularités culturelles, les dif­férents jeux de matériels didactiques ont été créés dans des circonstances historiques par­ticulières et requièrent tous de nouveaux m a ­tériels qui nécessitent le développement d 'un programme scolaire à m o y e n ou long terme et des stratégies spécifiques pour la formation des maîtres.31

11.7.3. LA REINTRODUCTION DU PROGRAMME SCOLAIRE

Avant de commencer l'évaluation des besoins éducatifs de base des communautés de réfu­giés ou de PDI, il faut identifier un partenaire ou des partenaires approprié(s) (PA). Le rôle du PA est premièrement de faciliter l'organi­sation et la gestion de leurs propres écoles par les communautés. U n graphique étape par éta­pe est inclus pour suggérer u n processus sys­tématique de tâches, essentiellement basé sur les expériences mises en place à Ngara au Rwanda , en Somalie et dans les camps de ré­fugiés somaliens et ailleurs (Figure 6).

Il est important de noter q u e ce pro­cédé doit être considéré un iquement c o m m e u n e proposition d'orienta­tion et qu'il n e constitue e n aucun cas u n modè l e définitif. Bien q u e chaque situation soit unique , l'expérience m o n t r e que certaines caractéristiques générales se répètent.

Pour déterminer les besoins éducatifs de base, la liste de vérification suivante, qui pourrait prendre la forme d'un questionnaire, devrait être complétée : • N o m b r e d'enfants e n âge scolaire (6-18

ans) à inscrire pour recevoir une éducation de base (garçons, filles; total). A u cas où la capacité d'accueil initiale de 1' (des) école(s) ne couvre pas la d e m a n d e , penser à la meilleure forme de sélection possible pour le premier groupe d'enfants. Explorer la pos­sibilité de faire deux sessions, une le matin et une l'après-midi.

• Salles de classe : Si nécessaire, localiser des sites pour implanter les écoles de réfugiés et de PDI et obtenir des matériels de construction d'urgence. Impliquer la c o m ­munauté pour la préparation et la construc­tion de l'école. Considérer la possibilité

¿tí U N E S C O / B R E D A . 1998. Coffret pedagógico para educação integrada. Luanda. Projet 534/ANG/10.

2 " Mahinda Ranaweera, A . 1989. Non-conventional approaches to education in the primary level. Hambourg, U N E S C O Institut pour l'éducation. (Monographies IUE, n° 14)

30 Hawes, H . 1988. Child-to-child, another path to learning. Hambourg, U N E S C O Institut pour l'éducation. (Monographies IUE, n° 13)

3 1 Cummings, W . K . et Dali, F.P. 1995. Implementing quality primary education for countries in transition [Mettre en place une éducation primaire de qualité dans les pays en voie de développement], A m m a n , U N I C E F - M E N A R O , Al Kutba Publishers.

Le développement par étapes des programmes

d'éducation de base

31

d'ajouter, chaque fois que cela sera possible, des classes provisoires dans les écoles déjà existantes pour accueillir des enfants réfu­giés. Évaluer les capacités de stockage des écoles sous tentes (Voir partie IV). Maîtres : Identifier le n o m b r e de maîtres (qualifiés, non qualifiés, le genre, le nombre). N e pas oublier de recruter des institutrices, 50 % si possible—avec une directrice o u une directrice adjointe dans chaque école. En fonction de la situation, d'autres ques­tions doivent être prises e n considéra­tion, c o m m e par exemple, l'analphabétis­m e des parents; les compétences de la po­pulation de la c o m m u n a u t é (charpentiers, maçons , couturiers, etc.), etc. Quand les matériels d u p r o g r a m m e sco­laire ne sont pas disponibles, il faut récu­pérer u n jeu de manuels scolaires et de guides du maître. Les endroits dans lesquels il faut c o m m e n c e r à chercher ces manuels et ces guides sont : la c o m m u n a u t é de ré­fugiés ou la c o m m u n a u t é locale et au sein de celle-là ; les maîtres, les parents o u les groupements de femmes. Cela est important pour une réimpression future des matériels, quand il est impossible de les acheter par l'intermédiaire du Ministère de l'éducation. Créer une unité d e product ion à m o i n d r e firais. L'idée d'une unité avec une capacité de production sous la responsabi­lité d'un PA apparaît être un outil vital pour la reproduction des matériels éducatifs, c o m ­m e les manuels scolaires, les affiches, les bro­chures, les dépliants, le matériel de forma­tion des maîtres, etc. L'unité de production pourra également être utilisée pour la pro­duction de matériels pour d'autres secteurs tels que, les campagnes pour la santé, pour la nutrition, pour l'eau et l'assainissement, l'hygiène, etc. L'expérience de Ngara a dé­veloppé une capacité semblable en révélant que l'unité de production devient rentable dès lors qu'elle sert à d'autres secteurs.Aus-si, afin de rendre cette unité de production opérationnelle, du personnel et une infra­structure sont nécessaires (voir encadré page 32). Tous les programmes d'éducation requerront une capacité de production de matériels de ce genre. Quand il existe la possibilité d'accéder à des matériels du pays d'origine, il est possible qu'il faille réviser les manuels scolaires, tâche qui doit être m e n é e à bien avec soin par des spécialistes. Il peut y avoir besoin d e ré­viser le c o n t e n u des m a n u e l s et des guides d u maître, e n retirant tous les éléments politiques sensibles o u les

Évaluation de l'éducation de base (voir texte) Évaluation de la

documentation

Achat de matériels au

pays/aire d'origine et distribution

^ Manuels scolaires

et guides du maître

Récupérer un jeu de manuels scolaires et de

guides du maître

Générer des matériels

supplémentaires

Créer une unité de capacité de

production (Partenaire

d'implantation responsable)

T r o u v r e s de textes,

guides du maître et matériel supplémentaire

produits localement

> Reproduire le matériel au niveau local

Créer une Unité de Formation pour les

maîtres de la communauté (où ce sera possible)

Programmes de formation des maîtres

Implanter un programme de

formation des maîtres

Réseau de conseil et de supervision

au niveau de la communauté

Créer un système de distribution pour les manuels scolaires, pour les guides du

maître et pour le matériel

supplémentaire

Implanter un programme

H C R / U N I C E F / U N E S C O négocient la reconnaissance

avec le M E du pays d'origine

Clé : d o c u m e n t s décisions activité/procédé

illustrations qui pourraient n e pas être acceptables p o u r les autorités éduca­tives d u pays d'accueil (cartes géogra­phiques, etc.) o u pour les réfugiés eux-m ê m e s . Cela est également applicable aux communautés de PDI. Si les manuels de for­mation des maîtres d'origine ne peuvent être retrouvés, il faudra en élaborer de nou­veaux. L ' O N U et les O N G devront réexami­ner l'étendue de leur coopération avec les autorités éducatives dans le pays d'origine en ce qui concerne le cas des réfugiés. Améliorer le réseau d e supervision et d'évaluation au niveau du c a m p de réfu­giés ou de la communau té . U n système de distribution devrait également être créé pour l'attribution de manuels scolaires, de guides du maître et d'autres matériels. A u n o m de la c o m m u n a u t é des réfugiés il faudra renégocier la reconnaissance des études réalisées dans le pays/aire d'asile avec le Ministère de l'éducation d u pays d'origine en vue d 'un futur rapatriement.

FIGURE 6. Procédures suggérées pour la réintroduction du programme scolaire

32 Le développement par étapes des p r o g r a m m e s d'éducation de base

En vue d'un futur rapatriement :les réfugiés rwandais

rentrent à la maison

Photo : H C R / R . Chalasani

SUGGESTION DE PROTOTYPE D ' U N E UNITE DE PRODUCTION

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photocopieur. Prix actuel : 3.000 à 4.000 S U S ;

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» Photocopieuse (une petite Gestetner résistante)

•» Générateur (5-8 k W ) , 5.000 S U S

» Personnel pour diriger l'unité de production : 1 directeur/trice de production; 1 technicien/ne; 1 dessinateur/trice

graphique; 1 secrétaire (avec de bonnes connaissances de l'anglais et/ou du français, selon les besoins, en plus

de sa langue maternelle).

En général, l'entreprise qui vend les produits fournit la formation pour savoir se servir des équipements. La raison

pour laquelle on suggère la marque Gestetner est sa robustesse et sa fiabilité dans ce type d'opérations. Un spécialiste

familiarisé avec le schéma peut former le personnel de l'Unité de Production.

* Les coûts mentionnés se basent sur des estimations de 1997 réalisées par l'Unité des Approvisionnements de

l'UNICEF à Copenhague.

III. Les coffrets supplémentaires de survie

Autour d u noyau de base des réponses n o n formelles ( R E C R É E R et R E D U C A R E ) , il y a des thèmes importants o u des « thèmes d'urgen­ce » qui sont fondamentaux pour améliorer la prise de conscience des populations affectées et surtout des enfants et des jeunes victimes de conflits armés. L'enquête et l'évaluation de ces « thèmes générateurs » occupent une part importante d u dialogue entre les éducateurs et les populations affectées par la crise hu­manitaire. Ces thèmes sont essentiels pour créer un cordon de sécurité de connais­sances et de compréhension pour une po­pulation qui vit dans une situation extrême et sous la menace quotidienne des mines, du cho­léra, des maladies transmises par l'eau et/ou de la dégradation de l'environnement. Ces « thèmes », c o m m e les appelle Paulo Freire, re­lient le message et les conditions réelles avec les causes qui sont à l'origine de la crise hu­manitaire. C e sont les « charnières » concrètes qui permettent d'ouvrir la porte sur une ré­flexion plus complexe sur la paix et la ré­conciliation.

Selon Paulo Freire :

Si le programme éducatif est dialogique, les maîtres ont aussi le droit de participer à travers l'introduction de thèmes non suggérés auparavant (par les populations affectées). J'appelle ce der­nier type de thèmes « les thèmes charnières » en raison de leur fonction. Ils peuvent soit faciliter le lien entre deux thèmes du programme, soit illustrer les relations entre le contenu du pro­gramme et la vision qu'ont les gens du monde.1

La conscience de l'horreur de la guerre et du désir de paix et de réconciliation peut être gé­nérée quand o n comprend l'ampleur des dan­gers laissés par ces affrontements, tels que les mines, le choléra, la famine, le Sida, etc.

M M . Les programmes de sensibilisation au danger des mines

L ' O N U estime que pendant les quatre années de guerre civile en Bosnie Herzégovine (que nous appellerons Bosnie), plus de trois mil­lions de mines terrestres ont été posées. Le processus onéreux, long et dangereux de dé­

minage, a déjà c o m m e n c é . Cependant, main­tenant que le conflit est terminé, la protection de la population passe par une importante c a m p a g n e de sensibilisation au danger des mines dont l'héritage est encore présent long­temps après la signature des accords de paix. Les mines attendent au raz d u sol leurs vic­times sans faire de distinction entre u n soldat en mission militaire, un agriculteur qui mois­sonne ses c h a m p s o u u n enfant qui joue.

Les statistiques d'autres pays montrent que les mines terrestres constituent u n danger ex­trême après la guerre. A u C a m b o d g e par exemple, une personne sur 236 a été mutilée par ce type d ' a rme ; en Angola, une sur 470; dans le nord de la Somalie, une sur 1.000 et au Viet N a m , une sur 2.800. La Bosnie est le pays qui a l'une des plus grande densité de mines au m o n d e , plus de 100 mines terrestres posées par kilomètre carré. Le potentiel de destruction causé par les mines en Bosnie pourrait être semblable ou pire que la situa­tion au C a m b o d g e et en Angola.

E n dehors de la solution à long terme qui consiste à déminer, les efforts à m o y e n et à court terme doivent être concentrés sur l'édu­cation à la sensibilisation a u d a n g e r des m i n e s des groupes les plus affectés. Cela né­cessite u n effort particulier pour développer des p r o g r a m m e s d'éducation à la fois plus n o m b r e u x et plus efficaces.

Les enfants sont les personnes les plus ex­posées au mines. Leur curiosité naturelle et leur amour d u jeu dans les espaces ouverts les rendent particulièrement vulnérables aux mines . D e plus, les enfants ont m o i n s de chances de survivre à l'explosion d 'une mine parce qu'ils sont en général plus près d u centre de l'explosion et leur corps, de petite taille survit difficilement à une perte impor­tante de sang. Plus de 50 % des victimes de mines meurent à cause de l'explosion et les autres restent partiellement ou totalement han­dicapées. Pour construire une société d'après guerre saine il faut donner à ses plus jeunes m e m b r e s les connaissances essentielles afin de pouvoir vivre sans risque au milieu des mines.

Freire, P. 1969. Pédagogie de l'opprimé. Paris, La Découverte. Petite collection Maspero.

34 Les coffrets supplémentaires de survie

Sensibilisation

à la protection de

l'environnement

Pratiques de santé

Programme VIH/SIDA

Sensibilisation au choléra

COFFRETS DE RÉCRÉATION,

D'ALPHABÉTISATION ET DE MATHÉMATIQUES

DE BASE Programme

de paix et de réconciliation

Sensibilisation au danger des mines

k terrestres À

Autres programmes

FIGURE 7. Thèmes d'urgence ajoutés au noyau

de base

Certains des premiers programmes de sen­sibilisation au danger des mines ont été dé­veloppés par le Comité international de se­cours, l'Université du Nebraska et d'autres or­ganismes travaillant dans l'opération transfrontalière Pakistan-Afghanistan à la fin des années 80. Le programme scolaire défini pour le programme de sensibilisation au dan­ger des mines (PSM) était fondé sur l'infor­mation recueillie au moyen de questionnaires

et d'entretiens avec les démineurs travaillant en Afghanistan. Des coffrets pédagogiques ont été produits, qui comprenaient des affiches sur toile montrant les types de mines les plus fréquemment rencontrés en Afghanistan.

U n programme similaire s'inspirant du pro­gramme afghan, a été introduit en 1990 dans les camps de réfugiés à la frontière séparant la Thaïlande et le Cambodge. À nouveau, un questionnaire a été préparé et employé pour

Les coffrets supplémentaires de survie 35

recueillir des informations destinées à struc­turer le programme scolaire pour un pro­gramme de sensibilisation au danger des mines terrestres (PSMT). Le questionnaire était spé­cifiquement adapté au contexte cambodgien. Des questions supplémentaires ont été intro­duites, se rapportant à des points plus tech­niques et relatifs aux mines par exemple, com­ment identifier les mines terrestres et les évi­ter. Les réponses au questionnaire modifié ont permis d'apporter des changements dans la conception du programme conduisant ainsi à un P S M T et à un programme scolaire plus souples.

À mesure que l'on a pris conscience de tou­te l'étendue et de l'horreur de la crise des mines au Cambodge, il est devenu de plus en plus évident qu'il était urgent de sensibiliser la population au danger des mines, et qu'il fal­lait absolument disposer d 'un programme d'enseignement bien défini pour exécuter ces programmes.

En 1994, trois organisations opérant au C a m ­bodge ont c o m m e n c é à utiliser le m ê m e pro­gramme et les m ê m e s équipes mobiles de for­mation pour sensibiliser au danger des mines. Les expériences avec les premiers P S M T ont permis de cerner plusieurs difficultés et de ti­rer diverses leçons : • Les programmes initiaux tendaient à se

concentrer davantage sur l'information technique :

— les dangers physiques posés par les mines ; — les types de zones dans lesquelles les mines

risquaient le plus de se trouver ; — le repérage des mines ; — les indicateurs de la présence de mines ; — les techniques permettant d'éviter les

mines ; et — la conduite à tenir dans une zone minée. • Les programmes n'avaient pas d'assise com­

munautaire. Normalement, les éducateurs des P S M T se rendaient dans une c o m m u ­nauté, présentaient leur matériel (avec peu ou pas de participation de la c o m m u n a u ­té locale) et s'en allaient.

• Les programmes scolaires n'étaient ni in­teractifs ni adaptés à l'âge ou au sexe des participants.

• O n observait (et c'est encore vrai aujour­d'hui dans une certaine mesure) un m a n q u e de coordination et de mise en c o m m u n de l'information entre les insti­tutions et les organisations travaillant dans ce domaine.

• Certains pays manquent encore de pro­grammes suffisamment sensibles et adap­tés à la culture pour être efficaces.

• Les activités régulières et permanentes de surveillance et d'évaluation des P S M T ont fait défaut. Ainsi, bien que l'on sache que beaucoup de personnes ont eu accès aux programmes, il est extrêmement difficile, voire impossible, d'évaluer leur succès et leur impact.

Traditionnellement, la sensibilisation au dan­ger des mines à l'école a toujours été c o m ­pliquée par les programmes scolaires impo­sés sans souplesse. L'information a dû être condensée dans des plans de leçons pouvant être mis en œuvre rapidement. Cette approche ajoutait une nouvelle matière à un program­m e déjà surchargé ; en revanche l'enseigne­ment dispensé était concis, adapté à la situa­tion concrète et très structuré. Cette approche était souvent liée aux opérations de démina­ge du pays. Ainsi, la sensibilisation au danger des mines était intégrée dans les opérations locales de déminage et non dans le système scolaire (c'est encore le cas de la plupart des P S M T appliqués dans le m o n d e ) . Ce phéno­m è n e s'explique en partie par le fait que les P S M T sont habituellement conçus et mis au point par ceux qui connaissent le mieux les mines : les démineurs et ceux qui s'occupent des victimes des mines, c o m m e le personnel médical. Il n 'y a pas longtemps que les gou­vernements nationaux ont reconnu que les mines ne seront pas neutralisées rapidement et qu'il existe un problème à long terme qu'il faut aborder.

Une illustration du programme de sensibilisation au danger des mines somali

36 Les coffrets supplémentaires de survie

EXPERIENCES D'INTERVENTIONS EN SITUATIONS D'URGENCE

SENSIBILISATION AU DANGER DES MINES EN AFGHANISTAN

Beaucoup d'écoles en Afghanistan ont été affectées par les mines terrestres. Certaines zones scolaires ont été déminées mais d'autres ne l'ont pas été. À Kaboul, la capitale afghane, il y avait 25 écoles lourdement minées. Les élèves n'ont pas pu assister aux cours, de peur qu'un faux pas ne les tue. Cependant, beaucoup de ces écoles ont été nettoyées par les démineurs du Programme Afghan d'Action contre les Mines en 1996 et 1997. Grâce à ce programme, les écoles de Kaboul enseignent maintenant aux enfants comment éviter les mines antipersonnel.

Mais, certaines écoles en Afghanistan ont encore besoin d'être déminées.. Voici quelques-unes d'entre elles qui ont été identifiées pour le projet :

L'école primaire de Sufikarim, située dans la province de Pakita (dans l'est de l'Afghanistan), est actuellement fermée à cause des mines et de la destruction des locaux. Cette école donnait des cours à des enfants de trois villages (de 300 habitants chacun). Cette école est entourée d'un terrain miné de 26.000 mètres carrés qui constitue un risque majeur pour les enfants. U n e équipe de déminage pourrait nettoyer cette zone en un mois environ.

L'école secondaire de Alikhiel est également située dans la province de Pakita (dans l'est de l'Afghanistan), et compte 250 élèves entre 5 et 16 ans. Un tiers d'entre eux est dans la tranche d'âge 7-10 ans et sont souvent accompagnés à l'école par leurs frères ou leurs sœurs aînés. Des deux côtés de l'école il y a un champ miné d'environ 14.000 mètres carrés, qui constitue donc un risque majeur et permanent pour les enfants. Une équipe de démineurs a nettoyé et a ouvert un chemin d'accès à l'école. Une nouvelle équipe devrait bientôt continuer, avec pour mission de nettoyer et de déminer.

L'école supérieure de Sikander Khiel est également située dans la province de Pakita (dans l'est de l'Afghanistan), mais elle est actuellement fermée en raison de mines et de la destruction des locaux. L'école compte 500 enfants provenant de 400 familles de la zone. Elle a 2.500 mètres carrés de terrain miné tout autour. Une équipe de démineurs pourrait déminer la zone en un mois environ.

SOURCE : [email protected]

À partir des expériences mentionnées, l'UNES-C O a conçu, en collaboration avec le U N H C R en Somalie et l'UNICEF au Rwanda, une cam­pagne de sensibilisation au danger des mines qui a été employée ( C S M ) en Somalie et au Rwanda , au m o y e n d'une méthodologie non formelle destinée aux écoles et aux jeunes dans leur communauté. La campagne est conçue au­tour d'un coffret pédagogique qui facilite la for­mation des enseignants, d 'un film vidéo pour l'éducation de la population et d'un « spectacle itinérant » pour apporter le message éducatif dans les zones reculées dont la population n'est pas suffisamment sensibilisée par le message en milieu scolaire. Se fondant sur ces pro­grammes couronnés de succès, l 'UNESCO-BIE

(en coordination avec le U N H C R et l'UNICEF) a préparé un coffret pédagogique de sensibilisa­tion au danger des mines (KSM) pour répondre aux besoins dans ce domaine en Bosnie.2

U n e stratégie interinstitutionnelle pour la sensibilisation au danger des mines doit pro­mouvoir l'idée qu'il incombe aux écoles de dispenser aux enfants u n enseignement sur les risques liés aux mines. Cela constitue une indication importante de l'intérêt existant à l'égard de la préparation d 'un p rogramme d'études humanitaires. E n rappelant à la gé­nération de l'après-guerre l'horreur quoti-

2 Retamal, G . ; Aedo Richmond, R. op. cit., chap. 9 et 13.

Les coffrets supplémentaires de survie 37

dienne des mines, nous reproduisons les va­leurs de la paix et de la réconciliation.

Ainsi, d'importantes initiatives ont été pen­sées pour servir de base au lancement d 'un processus plus permanent d'information et de recherche dans le domaine de la sensibili­sation au danger des mines.

Les efforts de l 'UNICEF-BPU constituent à ce jour la base de données la meilleure et la plus à jour. L ' U N E S C O - B I E a préparé une im­portante publication présentant les dernières tendances de l'éducation à la sensibilisation au danger des mines.3

C e projet est également un processus conti­nu qui est reflété dans le Réseau mondial d'in­formation sur l'éducation (GINIE) à l'Univer­sité de Pittsburgh. Le GINIE est le dépositaire en ligne de l'information sur l'éducation dans les nations en crise et en transition. Il présente des données fiables, des outils et des plans, mis au point spécialement pour une situation donnée, qui peuvent être utilisés dans d'autres environnements. Le GINIE fournit u n accès en ligne au matériel pédagogique qui a été employé ou qui est utilisé en se fondant sur l'idée que les leçons tirées dans u n ensemble de conditions peuvent informer d'autres per­sonnes. La page d'accueil de la sensibilisation au danger des mines, préparée conjointement avec le BIE, est maintenant un réseau très dé­veloppé de praticiens dans le domaine de l'éducation au danger des mines ainsi que le dépositaire actif de matériel relatif à ce thè­m e provenant des quatre coins du m o n d e . La page d'accueil d'Internet mise à jour par le GINIE traduira les contributions futures et les travaux de recherche en cours.4

III.2. L'éducation pour prévenir le choléra et les maladies transmissibles par l'eau

Dans beaucoup de situations de crise h u m a ­nitaire, les communautés sont privées d'eau potable et de bons services d'assainissement.

UNICEF. Bureau des programmes d'urgence (BPU). Children and anti-personnel land-mines [Les enfants et les mines antipersonnel]. N e w York. n. d. (Publié sous forme de base de données.) Il s'agit d'une série de fiches qui mettent en évidence la crise mondiale causée par les mines terrestres, la position et la campagne de l 'UNICEF pour l'interdiction totale de la production, de l'utilisation, du stockage, de la vente et de l'exportation des mines antipersonnel. Cela inclut aussi l'information concrète par pays sur les programmes de l'UNICEF sur l'éducation dans ce domaine. Disponible : à l'UNICEF, au Département des Affaires Humanitaires des Nations Unies ( D A H ) , ou au Comité international de la Croix rouge. Voir aussi : Baxter, P. ; Fisher, J. ; et Retamal, G . 1997. La sensibilisation au danger des mines. Genève, Bureau international d'éducation-UNESCO. (Disponible en Anglais, en Espagnol et en Français.)

GINIE. (Université de Pittsburgh), Page d'accueil pour la sensibilisation au danger des mines. U n forum ouvert et un lieu d'échanges sur les thèmes relatifs au développement de P S M . Tout lecteur intéressé peut contribuer et participer. Pour plus d'information, contacter : Professeur Maureen McClure, Directrice du GINIE, School of Education, Institute for International Studies in Education, University of Pittsburgh, 5K01 Forbes Quadrangle, Pittsburgh, PA 15260, États-Unis d'Amérique. Internet : http://www.pitt.edu/~ginie/lm

POINTS CLE POUR UNE C A M P A G N E D'INFORMATION PUBLIQUE SUR LE CHOLÉRA

Pour prévenir le choléra :

- boire uniquement de l'eau dont la provenance est sûre et qui a été désinfectée ;

- faire cuire les aliments ou les réchauffer à feu vif et les manger quand ils sont encore chauds ;

- éviter les aliments crus à moins qu'ils soient épluchés ;

- se laver les mains après chaque contact avec des excréments et avant de préparer ou d'ingérer des aliments ;

- éliminer ou enterrer immédiatement les excréments humains.

S e souvenir q u e :

- avec un traitement adapté le choléra n'est pas fatal ;

- il faut emmener immédiatement les patients suspectés d'avoir le choléra voir un agent de santé pour commencer le traitement ;

- il faut augmenter les quantités de liquide que l'on donne aux patients ;

- le vaccin contre le choléra n'est pas efficace.

38 Les coffrets supplémentaires de survie

Un poster anti-choléra

Les maladies d'origine hydrique, particulière­ment le choléra et les infections bactériennes qui provoquent la diarrhée ou la déshydrata­tion, constituent de loin les principales causes de mortalité des réfugiés et des PDI . Néan­moins, si les communau té s de réfugiés, les autres populations affectées et les individus parviennent à améliorer leurs habitudes en matière d'hygiène, ils peuvent contribuer à améliorer leur santé. Ils peuvent également travailler progressivement à l'amélioration de leurs services d'assainissement et d'approvi­sionnement en eau. Le niveau de santé de la population ne peut aller en s'améliorant si les personnes affectées par le choléra ne sont pas soignées. L'éducation pour la sensibilisation signifie aider les personnes seules, les familles

et les communautés à devenir conscients du lien existant entre une mauvaise hygiène et la maladie. Cela veut également dire encourager et aider les personnes à améliorer leurs habi­tudes qui, une fois changées, conduiront à la réduction des maladies. L'éducation en m a ­tière d'hygiène aidera les familles et les c o m ­munautés à découvrir des moyens de conce­voir et de construire leurs propres systèmes sanitaires, ce qui leur permettra d'améliorer et de reconstruire leur communauté tout en maintenant sous contrôle le facteur d'inquié­tude et de peur le plus important.5

Il n'est pas suffisant de dispenser des cours d'éducation à l'hygiène et d'espérer que la communau té acceptera d'utiliser la techno­logie d'assainissement proposée. Cela devrait être la première étape pour que progressive­ment les communautés elles-mêmes prennent les décisions éclairées et se dotent des moyens et du pouvoir pour s'attaquer aux causes du choléra et des autres maladies diarrhéiques. Pour cela, les communautés devront avoir l'op­portunité de participer aux prises de déci­sions, particulièrement en ce qui concerne la sélection des technologies d'assainissement les plus appropriées à leurs habitudes et à leur réalité quotidienne.

III.2.I. PRÉVENIR LA PROPAGATION D ' U N E ÉPIDÉMIE

Les personnes contractent le choléra en buvant de l'eau ou en mangeant des aliments conta­minés par le choléra. La prévention est basée sur la réduction des risques d'ingestion de bac­téries. Quand le choléra apparaît dans une com­munauté, les efforts doivent être intensifiés afin de promouvoir l'élimination appropriée des dé­chets humains, de fournir de l'eau potable et de s'assurer du respect des pratiques d'hygiène dans le maniement de la nourriture.

L'éducation en matière de santé est la clé pour la sensibilisation et la coopération publiques. La voie la plus rapide pour contrôler une épi­démie est la mobilisation des personnes pour limiter la propagation. Les maîtres expérimen­tés, les agents de la communauté et les éduca­teurs de santé jouent u n rôle très important dans le contrôle de l'épidémie. Les organisa­tions de la communauté et celles qui travaillent sur le terrain peuvent aussi aider à diffuser des

Organisation mondiale de la santé. O M S - E O S . 1996. Fact sheet - Environmental Sanitation : cholera and other epidemic diarrhoeal diseases control. Genève.

Les coffrets supplémentaires de survie 39

U N PLAN D'ACTION POUR L'EDUCATION EN MATIÈRE D'HYGIÈNE

Pour préparer un plan d'action pour l'éducation en matière d'hygiène, il est indispensable de se poser les décisions suivantes :

• comment parviendra-t-on à faire participer la communauté ?

• qui seront les bénéficiaires de l'éducation ?

• quel sera le contenu de l'éducation ?

quelles méthodes éducatives seront utilisées ?

• qui s'occupera des activités éducatives ?

• quels seront les programmes sociaux et économiques complémentaires nécessaires ?

quels seront les autres agents ou les autres secteurs impliqués sur le terrain ?

• comment concevoir des technologies acceptables et d'un prix abordable ?

• comment gérer le programme ?7

messages de santé à travers leurs programmes. Il est particulièrement important d'informer

les personnes que, dans la plupart des cas, le choléra peut être traité par des m o y e n s simples, et que les vaccinations ne sont pas efficaces. Rien de tel que de boire uniquement de l'eau potable, d'avoir une bonne hygiène personnelle et de s'assurer que la nourriture est correctement préparée.6

III.3. L'environnement8

Les réfugiés, les personnes rentrées dans leur pays, les P D I et les populations qui ont été vic­times de la guerre souffrent également des conséquences des d o m m a g e s causés à l'envi­ronnement dans leur entourage. Leur santé est menacée par la contamination chimique et fé­cale de l'eau, du sol et de l'air, et à cause du sur­peuplement des camps, de la poussière et de la fumée. Les effets de la dégradation de l'envi­ronnement sont beaucoup plus préjudiciables aux femmes et aux enfants, en particulier les ef­fets liés au ramassage d u bois de chauffage. E n effet, les f emmes et les enfants doivent passer beaucoup d'heures à chercher et à porter le bois, ce qui augmente les risques d'agression. C'est l'une des raisons pour lesquelles les enfants aban­donnent l'école. À mesure que le bois devient plus difficile à trouver, le temps de préparation des repas diminue, l'eau n'est plus bouillie ce qui entraîne l'augmentation de l'incidence des maladies. D e plus, les familles de réfugiés peu­vent être forcées de vendre une partie de leurs rations de nourriture pour obtenir le combus ­tible nécessaire pour faire cuire leurs repas, ce qui provoque leur malnutrition.

Les conflits entre les réfugiés, les personnes

rentrées dans leur pays, les P D I et les c o m ­munautés nationales pour les ressources na­turelles sont une source majeure de problèmes économiques, politiques et sociaux. U n e autre cause de misère économique prolongée est la destruction de la végétation naturelle et l'épui­sement des ressources en eau, qui engendre la détérioration des pâturages et des c h a m p s agricoles. Il est possible que les réfugiés aient

° Organisation mondiale de la santé. 1993. Guide­lines for cholera control. Genève, p.24.

' Pour éduquer les éducateurs, l 'OMS a élaboré une série de matériels particulièrement adaptés aux pro­grammes sur le terrain en relation avec les maîtres, les agents de la communauté et de santé :

• O M S . 1994. Le guide du maître de l'épidémiolo-gie de base. 2e édition. Genève. (Disponible en anglais et en français) Ce manuel présente une introduction aux principes et aux méthodes d'épi-démiologie. Il commence par une explication des causes de la maladie, avec une attention particu­lière aux facteurs environnementaux modifiables, et ensuite les auteurs montrent comment appli­quer l'épidémiologie à la prévention des mala­dies et à la promotion de la santé.

• O M S . 1994. Teacher's guide for one-week training workshop : basic environmental epidemiology. G e ­nève. Ce guide du maître prétend offrir aux épi-démiologistes environnementaux des outils, un cadre de travail et des approches d'enseignement pour organiser et commencer un séminaire in-troductif d'une semaine sur l'épidémiologie en­vironnementale. Recommandé aux organisations qui travaillent sur le terrain.

° Cette section est principalement basée sur : Tal­bot, C . et Muigai, K . Environmental education for refugees guidelines, implementation and lessons learned. Dans : Retamal, G et Aedo Richmond, R. op. cit.

40 Les coffrets supplémentaires d e survie

Trois modèles de fascicules sur l'éducation à

l'environnement

c o m m e n c é à jouer un rôle positif dans les éco­nomies locales, mais il arrive aussi que leur présence perturbe totalement les modèles de l'économie locale. Mais l 'énorme coût éco­nomique d'une telle destruction n'est presque jamais quantifié ni enregistré.

Dans le cadre de la population affectée par la crise humanitaire, la définition la plus prag­matique de l'éducation environnementale est celle qui se caractérise c o m m e :

un processus permanent par lequel les individus acquièrent une certaine conscience de leur envi­ronnement, des valeurs, des connaissances, des aptitudes, des expériences et aussi une détermi­nation qui leur permet d'agir individuellement ou en groupe pour résoudre les problèmes présents ou à venir liés à l'environnement, et de satisfaire leurs besoins sans compromettre les générations futures."

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Les efforts d'éducation à l'environnement seront fondamentalement destinés à quatre populations : • Les réfugiés et les personnes déplacées à

l'intérieur du pays en situation « stable », où l'on ne prévoit pas de flux o u de rapatrie­ment massifs ;

• Les réfugiés et les personnes déplacées à l'intérieur du pays en situation d'urgence ;

• Les populations locales du pays d'accueil ; • Les personnes retournées dans leur pays :

éducation pour la reconstruction et la ré­habilitation de l'environnement ravagé par la guerre.

III.3.I. L'ÉDUCATION POUR L'ENVIRONNEMENT EN SITUATION D'URGENCE

La formulation la plus claire des buts globaux de l'éducation pour l'environnement est donnée dans le rapport final de la Première conférence intergouvernementale sur l'édu­cation pour l'environnement tenue en 1997 à Tbilissi, en Géorgie, sous les auspices de l'UNESCO : • Favoriser la prise de conscience et l'intérêt

pour l'indépendance économique, sociale, politique et écologique dans les régions ru­rales et urbaines.

• Donner à tout le m o n d e l'opportunité d'ac­quérir les connaissances, les valeurs, les at­titudes, l'engagement et la capacité néces­saires à la protection et l'amélioration de l'environnement.

• Créer de nouveaux modèles de comporte­ment des personnes, des groupes et de la so­ciété c o m m e u n tout pour l'environne­ment.1 0

Transposés dans le contexte de l'urgence ou des réfugiés, les buts énoncés dans le rapport final de Tbilissi expriment parfaitement les ob­jectifs de l'éducation pour l'environnement pour les réfugiés, les communautés nationales et les personnes rentrées dans leur pays.

y P N U E / U N E S C O / O C D E . 1992. Cité dans : Thioune, O . 1993- Environmental Education Techniques Suitable for the Use in Rural Areas in Senegal. Bradford, Royaume Uni, Université de Bradford, p.32.

*•" Sterling, S. 1992. Mapping Environmental Education : progress, principles and potential. Dans : Leal Filho, W . Et Palmer, J.A. (dir. pub.). Key Issues in Environmental Education. Bradford, Royaume Uni, Horton, p.1-19.

Les coffrets supplémentaires de survie 41

Photo : UNICEF/Betty Press

III.3.2. L'EDUCATION POUR L'ENVIRONNEMENT POUR LES RÉFUGIÉS

Les sept grands thèmes mentionnés ci-dessous représentent le contenu de la plupart des pro­grammes d'éducation à l'environnement pour les réfugiés : • Conservation de l'énergie ; • Abri durable ; • Conservation des arbres et des autres

plantes ; • Conservation du sol ; • Conservation de l'eau ; • Santé environnementale ; • Lois et traditions locales relatives à l'utilisa­

tion des ressources naturelles.

En 1995, un projet pilote inspiré des principes et des pratiques mentionnés ci-dessus a été lancé au Kenya avec des « extensions » signi­ficatives en Ouganda , en Ethiopie et en Ré­publique Unie de Tanzanie. Ces propositions méthodologiques ont été mises en œuvre et des matériels associés ont été élaborés sur la base de l'évaluation du projet pilote du K e ­nya. D e plus, les initiatives de l'éducation à l'environnement s'étendent maintenant aux campements de réfugiés somaliens, soudanais et rwandais en Ouganda et en Ethiopie."

III.4. L'éducation pour la paix

et la réconciliation

L'éducation pour la paix et la réconciliation a été implantée dans plusieurs pays en crise avec des degrés différents de succès. Certaines de ces expériences sont décrites dans cette sec­tion. Aucune évaluation systématique des ex­périences n'ayant été réalisée, il est impossible de déterminer la pertinence et l'influence de leur approche méthodologique. C e domaine est en évolution constante et exige davantage de recherche et de réflexion. Mais une profonde brèche demeure ouverte entre les spécialistes en éducation qui travaillent sur le terrain en si­tuations d'urgence et les abondantes contri­butions méthodologiques et les initiatives de développement de programmes scolaires pro­duites dans les pays développés, en matière d'éducation pour la paix et la réconciliation.12

III.4.I. S O M A L I E

La Campagne pour la Paix en Somalie (1994) a été conçue c o m m e une stratégie pour sti­muler la sensibilité d u peuple somali aux conséquences de la violence et de la culture

des armes dans la société Somalie. Il y avait une nécessité évidente d'offrir des images et des modèles alternatifs à l'idolâtrie et au ro­mantisme du fusil, qui était vu c o m m e un sym­bole de machisme et de courage. Il a fallu lut­ter contre l'utilisation des armes, considérées c o m m e des instruments de négociation en temps de conflits, mais aussi c o m m e l'unique m o y e n de survie économique pour beaucoup. U n spectacle itinérant sur le thème des armes, appelé « jette l'arme et reconstruis la nation » a été mon té , et peut également être acheté sous forme de cassette vidéo ou audio en an-

1 1 U N H C R / U N E S C O - P E E R . 1996. Environmental education programme. Nairobi. (Le programme consiste en trois manuels scolaires avec le guide du maître correspondant, voir page précédente.)

*2 Rassekh, S. 1996. Éducation et culture de la paix : sélection bibliographique mondiale. Paris, U N E S C O . (Données BIE.)

Un enfant rwandais dessinant des armes dans le cadre du programme de traitement des traumatismes de ¡'UNICEF

42 Les coffrets supplémentaires de survie

EXPERIENCES D'INTERVENTIONS EN SITUATION D'URGENCE

LIBÉRIA : KUKATONON

Après presque six ans de conflit armé, un accord récent a ouvert le chemin de la paix au Libéria. L'As­sociation Chrétienne de Santé du Libéria, avec l'appui de l'UNICEF, a lancé en mars le Projet d'Éduca­tion pour la Paix Kukatonon (qui signifie « nous s o m m e s un » en langue Kpelle) c o m m e un projet pilo­te dans quinze écoles. Le projet offre aux élèves la formation pour la résolution des conflits et leur de­m a n d e de mettre en pratique dans les écoles leur nouvelle capacité de médiation avec leurs camarades.

Le projet Kukatonon est une réponse à la guerre civile qui avait démarré en décembre 1989. Plus de 850.000 libériens avaient fui le pays. Kukatonon a évolué avec le temps, mais il continue à donner la priorité à deux domaines principaux : • les ateliers de formation pour la résolution de conflits, et • l'expression créative à travers des pièces de théâtre, des chants et la danse. Le projet pilote réunit des équipes d'élèves leaders pour participer à des programmes de formation de dix jours conduits par une O N G partenaire. Le cours prépare les étudiants à résoudre par la m é ­diation les conflits entre les élèves dans leurs écoles. Pendant la formation, ils apprennent à : • contrôler les désaccords, les batailles et les divergences d'opinions grâce à un large éventail de ré­

ponses créatives pour résoudre les conflits ; • comprendre les causes du conflit et de la violence ; • se familiariser avec les méthodes pour créer un climat de confiance au sein de la c o m m u n a u t é ; • renforcer le respect mutuel, l'estime de soi et de ses compagnons , ainsi que la confiance et le sen­

timent de responsabilité ; • mettre en pratique les méthodes et les techniques de communication, de coopération et de récon­ciliation ;

• étudier et mettre en pratique les techniques de médiation. Sur une période de six mois, un total de quatre vingt étudiants ont été formés, des groupes de m é ­diation ont été constitués et une évaluation a été réalisée dans les écoles. Après la première moitié de la formation, des artistes et des acteurs ont sélectionné d'autres étudiants pour les initier au théâtre pour la paix en créant « des compagnies culturelles » dans chaque école.

Entre 1992 et 1995, des activités continues ont été organisées sur la base des représentations théâ­trales pour la paix jouées par les élèves de l'école, et des ateliers de formation des maîtres ont été créés pour la résolution de conflits, ce qui a abouti à la production d'un manuel pour l'éducation des éducateurs et la création de matériel scolaire de gestion de conflits ou palava. Un coffret pour la for­mation a également été élaboré pour aider les maîtres à intégrer les leçons du manuel de formation Kukatonon dans les classes.

Le manuel et les ateliers pour la paix ont été conçus en vue d'atteindre les buts essentiels après quoi l'implantation complète du programme pourra commencer . L'intention était de : • réduire de manière substantielle l'importance des conflits à l'école ; • offrir aux enfants l'opportunité d'utiliser leurs talents artistiques pour éduquer leurs compagnons ,

leurs parents et les communautés à la paix ; • assurer que les leaders scolaires et communautaires transmettent de manière efficace les techniques

et les connaissances requises pour la résolution non violente des conflits ; • stimuler les individus pour qu'ils mettent en pratique ce qu'ils ont appris dans leur vie profession­

nelle et personnelle quotidienne. Malheureusement, en raison de la détérioration de la situation politique, le programme a dû être

interrompu.

glais et en somali. À cette fin, les plans d'ac­tion suivants ont été conçus et exécutés : • Production et distribution de fascicules, d'af­

fiches peintes sur tissu, de tee-shirts « d'Éduca­tion pour la Paix », et d'une carte de Somalie ;

• Formation du Comité d'Éducation pour la Paix à Mogadiscio composé de l 'UNESCO,

de l ' U N O S O M 3 D (Désarmement, Démina­ge et Démobilisation), de l ' U N O S O M Media Products, de Radio S N A (La voie du Peuple), de Radio Ali Mahdi (la radio du nord de M o ­gadiscio) et de journaux de Mogadiscio ;

• Une consultation sur l'Éducation pour la Paix qui a abouti à la rédaction d'un rapport de

Les coffrets supplémentaires de survie 43

mission intitulé « U n programme itinérant » (« Road Show ") QORIGA DHIG QARANKA DHIS (jette les armes et reconstruis la na­tion) édité par Mogadiscio Print Media ;

• Symposia/réunions sur le thème de la Cul­ture de la Paix en Somalie destinés aux in­tellectuels somalis à Sanaa (17-20 avril 1995), à Paris (25-27 octobre 1996) et à Addis Abe­ba (8-10 juin 1996) ;

• Production d'une vidéo à bas prix avec des chansons en faveur de l'éducation pour la paix et développement d 'un coffret d'éducation pour la paix avec des chansons, des contes, des activités et des jeux destinés à des contextes d'éducation formelle et non formelle.

III.4.2. LE COFFRET D ' É D U C A T I O N P O U R LA PAIX

L'objectif initial du Coffret d'Éducation pour la Paix était de familiariser les enfants soma­lis au concept de solution non violente des conflits. À travers cette formation d 'un an, les

enfants assimilent les concepts relatifs à la paix et apprennent à les mettre en pratique à la maison et avec leurs amis et leurs voisins. Dans ce but, quelques-unes des leçons contiennent des exercices qui requièrent la participation des parents, de la famille en général et de la communauté dans son ensemble. Pour la com­munauté , les activités du C E P sont une ex­hortation continue à l'arrêt des combats et à donner une chance à la paix.

Stratégie d'exécution et de supervision : Le prototype du coffret en anglais et en somali, a été testé sur le terrain à Jowhar et à Middle Shabelle, en Somalie. U n consultant à plein temps de la CE-Somalie et de l 'UNESCO-PEER a créé ce coffret en sept mois, avec l'aide d'écrivains, de graphistes, d'artistes, de méca­nographes, etc. travaillant à temps partiel.

En plus de ce coffret (qui peut être modifié facilement pour une utilisation dans d'autres pays), l ' U N E S C O - P E E R a mis à disposition ses ressources humaines et financières en Soma­lie et dans les camps pour mettre en œuvre

EXPÉRIENCES D'INTERVENTIONS EN SITUATION D'URGENCE

BURUNDI : BÂTISSONS LA PAIX/ GIRA AMAHORO

Ce projet a été conçu pour que « les jeunes acquièrent les connaissances et les techniques nécessaires pour résoudre les conflits de manière pacifique, pour faire face au stress des conflits ethniques violents et pour préparer un futur moins violent, en leur offrant une aide psychologique et des compétences éducatives ».

Ce projet a débuté en octobre 1994 dans 1.500 écoles primaires et secondaires et dans d'autres centres d'enseignement. Il a permis à 100.000 élèves du Burundi de recevoir des cours sur la construction de la paix. Le projet était destiné au départ tant à l'éducation formelle qu'à l'éduca­tion non formelle. Pendant les séminaires de formation pour la résolution de conflits, un manuel pour les éducateurs et un livre d'activités coopératives a été développé et distribué aux conseillers pédagogiques et aux administrateurs d'écoles.

Grâce aux campagnes de mobilisation sociale, aux programmes d'éducation à la radio et par correspondance et aux autres activités d'éducation non formelle, le projet n'est pas resté enfermé à l'intérieur des classes. Le Ministère de l'éducation de base et de l'alphabétisation pour adultes, les Scouts et d'autres O N G , avec le soutien du bureau des programmes d'urgence de l'UNICEF au Burundi, ont mis en œuvre la campagne « Construisons la paix ». • U n coffret pour la paix : Ce kit contient trente activités différentes avec des jeux, des matériels de travail et de dessin, etc. Il enseigne le concept de paix aux enfants dans toutes les écoles et dans les autres centres d'enseignement qui participent au projet. Les activités peuvent être intégrées au programme scolaire en français c o m m e en kirundi dans les classes de sport et d'art. Le m e s ­sage le plus important de ce coffret est d'apprendre à construire la paix et à vivre en paix.

• Un guide du maître/livre d'activités pour le programme de « Bâtissons la paix ». Ce guide donne quelques idées d'activités éducatives pour les éducateurs ou les formateurs. L'objectif principal de l'éducation pour la paix est de laisser les enfants et les adultes découvrir et comprendre la si­gnification de la solidarité, de la confiance, de l'égalité et de la justice, afin de développer la ca­pacité de se respecter les uns les autres.

• U n exemplaire de la Convention relative aux Droits de l'Enfant en kirundi. • U n exemplaire de la Convention relative aux Droits de l'Enfant en français.

44 Les coffrets supplémentaires de survie

ce projet. Le Service Jésuite pour les Réfugiés (SJR) a financé la production de 400 coffrets. À raison d 'un coffret pour 40 élèves, 16.000 élèves, leurs parents et les communautés cor­respondantes ont p u en bénéficier. Étant don­né que T U N I C E F et le P N U D ont manifesté leur intérêt pour le coffret, ils participeront et contribueront à la production et à la distri­bution de 1.000 coffrets couvrant ainsi 40.000 élèves supplémentaires.

III.4.3. LES MATÉRIELS D U CEP

• Un manuel du maître intitulé « La paix commence par moi » : C e manuel contenait des activités centrées sur le rôle de l'indivi­du dans la construction de la pafx, dans les droits et les responsabilités des enfants, dans la perception des autres c o m m e des égaux, dans la communication, la conscience et la résolution de conflits, et sur la paix, la justi­ce et la tolérance. Chaque activité comprend des objectifs, des descriptions, des c o m m e n ­taires et du matériel didactique de soutien.

• Le rêve de Abdi devient réalité et autres contes : C'est u n opuscule comprenant vingt contes, certains d'origine Somalie. Parmi les valeurs enseignées on retrouve la coopéra­tion, l'amitié et la considération. Chaque his­

toire a des activités de suivi et des c o m ­mentaires pour aider le maître à faire assi­miler à la classe la moralité de l'histoire.

• Chansons de solidarité : C'est u n petit livre avec d'anciennes et de nouvelles chansons des­tinées à réapprendre à vivre avec d'autres et à vivre ensemble. C e livre est accompagné de l'enregistrement sur cassette de ces chansons.

• «Jeux de mots » : C e jeu est c o m p o s é de soixante cartes, chacune avec une image et u n m o t qui illustre le conflit o u la paix. A u verso de chaque carte il y a une phrase sur les droits de l ' h o m m e .

• « La paix gagne la partie » : C'est un jeu qui ressemble un peu au principe du jeu de l'oie dans lequel chaque déplacement lié à la paix est récompensé par le droit d'avancer d'une ou de plusieurs cases et où tout déplacement non associé à la paix est sanctionné par le devoir de reculer d'une ou de plusieurs cases et par la perte de la possibilité de gagner.

• Cartes : U n e m a p p e m o n d e et une carte de Somalie pour la leçon intitulée « U n m o n d e pacifique ».

• Fournitures : Livres d'exercices, matériel né­cessaire pour dessiner/faire des croquis/colo­rier, des g o m m e s , des taille-crayons, de la colle, des ciseaux, des règles et u n ballon gonflable, tout cela emballé et rangé dans u n cartable bleu.

EXPÉRIENCES D'INTERVENTIONS EN SITUATION D'URGENCE

MOZAMBIQUE : CIRCO DA PAZ

Étant donné que des années de conflit ont tué un million de personnes, beaucoup de communautés du Mozambique se sont engagées à aider à éduquer leurs enfants à vivre en paix de manière durable.

La guerre, qui a affecté massivement la population civile, a forcé un million et demi de personnes à fuir dans des pays voisins et 5 millions à devenir des PDI. La guerre a spécialement affecté les en­fants, en séparant des centaines de milliers d'entre eux de leurs familles. Beaucoup des 7 millions d'enfants de moins de 14 ans et 1.650.000 mineurs de moins de 19 ans ont été témoins d'atrocités ou ont été obligés d'en commettre, ce qui a provoqué un traumatisme psychologique généralisé.

La paix est revenue officiellement en octobre 1992 et a été renforcée par les élections démocratiques de 1994. Maintenant le pays est confronté à l'incroyable défit de la pauvreté. Le Mozambique est l'un des pays les plus pauvres du m o n d e . Son P N B en 1994 était estimé à 5.400 millions de dollars. Plus de 70 % des 16,5 millions d'habitants vivent dans la pauvreté absolue, situation qui s'est aggravée avec la guerre et avec la sécheresse dévastatrice. A u moins 80.000 soldats démobilisés font face à un ave­nir sombre à la recherche d'un travail. La guerre a aussi détruit plus de 3.000 écoles ou les a laissées en ruines. Beaucoup d'instituteurs sont morts. En 1995, plus de la moitié des enfants en âge scolaire n'avaient pas accès à une école. Seulement 34 % des enfants inscrits ont terminé le 5e degré.

Après seize ans de sang qui coule, le peuple du Mozambique panse ses plaies de guerre. Le gouvernement, l'UNICEF et d'autres partenaires développent des programmes d'éducation pour la paix qui forment les agents de santé à l'assistance d'enfants traumatisés et qui offrent une formation professionnelle aux handicapés. La première initiative du projet d'éducation pour la paix a c o m m e n c é en 1993 c o m m e un projet expérimental appelé Circo da paz, qui était une compagnie itinérante d'éducateurs qui enseignaient les techniques de résolution de conflits à travers le théâtre, l'art et la danse. Cette expérience est très similaire à celle du projet Kukatonon du Libéria.

IV. Le milieu éducatif physique en situation d'urgence

IV.I. La planification du site et les abris éducatifs/tentes éducatives

Les principes directeurs pour la résolution des problèmes d'abri des victimes de crises h u m a ­nitaires en situations d'urgence suggèrent de n'accorder que le m i n i m u m nécessaire de temps, d'effort et de ressources aux abris tem­poraires d'urgence et de promouvoir en re­vanche dès que possible, la reconstruction per­manente. Q u a n d cela est possible, on utilisera au m a x i m u m les matériels qui peuvent être ré­cupérés des bâtiments e n d o m m a g é s . Cepen­dant, des tentes doivent être disponibles en stock et, si nécessaire, fourniront un abri temporaire adéquat contre les intempéries et/ou quand l'im­provisation d'autres abris est impossible.

U n des avantages des écoles sous tentes est qu'elles peuvent rapidement concentrer leurs efforts sur la fourniture d'assistance et prendre soin des enfants. U n autre avantage est qu'elles peuvent être stockées et réutilisées dans d'autres cas d'urgence.

La planification de l'emplacement dans les camps de réfugiés et de PDI est essentielle et devrait refléter une approche décentralisée pour des petites communautés, en préservant au maxi­m u m les conventions sociales du passé.1 Étant donné qu'il est difficile dans ces circonstances de compter sur les structures et les bâtiments antérieurs, on a souvent recours à la tente et/ou aux poteaux préfabriqués et aux abris en plas­tique dans les situations d'urgence.

IV.2. Les écoles sous tentes

Il existe très peu d'expériences systématiques qui donnent la priorité à l'utilisation de tentes et à d'autres formes d'écoles mobiles.

D e u x études de cas peuvent être présen­tées : l'École Mobile sous Tentes ( E M T ) des Philippines et les Écoles Mobiles sous Tentes de l ' U N E S C O pour les enfants des groupes dé­favorisés dans le m o n d e arabe.

IV.2.1. LES EMT DES PHILIPPINES

Pour couvrir les besoins éducatifs de base de sept groupes ethniques, nomades o u difficiles à atteindre des Philippines, des tentes mobiles

ont été utilisées. Les E M T ont constitué une réponse au caractère itinérant de ces tribus ethniques, qui se déplacent perpétuellement à la recherche de nourriture. Le maître de l ' E M T se déplaçait d 'un campement à u n autre, en faisant la classe sous des tentes ou dans des abris improvisés. D e cette façon, le maître s'est converti en u n « agent » du gouvernement qui n o n seulement veillait aux besoins éducatifs des apprenants, mais aidait également à la pro­duction alimentaire, et intervenait sur les ques­tions de santé, et les problèmes civiques et autres. Le contenu des cours de l ' E M T était li­mité aux principes de survie essentiels, à l'al­phabétisation et au calcul.

Les matériaux et l'infrastructure étaient constitués d'éléments temporaires tels qu'une tente démontable, des chaises, des tables et des tableaux pliants fabriqués localement. U n e bi­bliothèque itinérante et des matériels d'ensei­gnement multimédia sont autant d'autres élé­ments de ressource pour le maître de l ' E M T 2

IV.2.2. LES EMT D A N S LE M O N D E ARABE3

Plusieurs projets ont été développés dans le m o n d e arabe pour donner aux enfants, aux jeunes nomades et aux populations déplacées une éducation de base.Trois types de solutions ont été considérés : a) des écoles qui donnent une scolarité spéciale aux enfants nomades à proximité des c a m p s de Bédouins ; b ) des in­ternats ; ou c) des E M T . Les écoles spéciales pour les nomades ou les internes séparent les enfants de leurs familles, ce qui tend à rompre les liens de la vie familiale. D e plus, il est dif­ficile pour ces écoles d'attirer les filles étant donné la difficulté des Bédouins à se séparer de leurs jeunes filles.

1 U N H C R . 1982. Handbook for emergencies. Ge ­nève, p.56-57.

2 Lasam, G . Z . 1990. Philippines: mobile tent school for selected communities. Genève, U N E S C O -BIE (Classes d'alphabétisation).

$ Ghaidan, U . 1996. Mobile tent schools. A m m a n , U N E S C O / U N E D B A S . Ce document est une ré­ponse systématique à quelques-uns des pro­blèmes traités pendant le séminaire sous-ré­gional sur la fourniture de scolarisation aux en­fants de groupes défavorisés dans le monde arabe, qui s'est tenu à Khartoum en 1995.

46 Le milieu éducatif physique en situation d'urgence

Ces inconvénients disparaissent avec les écoles mobiles pour la simple raison que ces structures se déplacent avec la tribu et peu­vent offrir leurs services à la communauté tou­te entière, enfants et adultes de façon égale. Mais la mobilité présente aussi des inconvé­nients. Les contacts entre les écoles et l'auto­rité éducative centrale sont plus difficiles, ce qui peut provoquer des interruptions d'ap­provisionnement en fournitures, d'inspection, des retards, etc.

L'utilisation de la tente classique montée sur piquets est séculaire. Dans le passé, cela ne dif­férait pas essentiellement de la tente arabe d'au­jourd'hui, appelée beit-el-sha'r = maison de peau (de chèvre), mais cette tente traditionnelle ara­be ne remplissait pas les critères d'espace mi­n i m u m nécessaires à l'enseignement. U n nou­veau prototype plus grand et sans support in­térieur est nécessaire pour cette fonction.

Il est structurellement possible de substi­tuer l'armature et les piquets intérieurs par un système de supports externes conçus pour soulever et soutenir la tente de l'extérieur, mais l'épaisseur importante des poutrelles transversales horizontales requise pour éviter que la tente s'arque et s'incline rend la struc­ture trop lourde pour être transportée et m a ­nipulée. C e qui est nécessaire, c'est une ar­mature qui tient toute seule et dont la forme géométrique ne génère pas de charge sup­plémentaire et ne requière pas de poutrelles de soutien. U n e tente de forme tridimension­nelle en forme de selle, appelée paraboloide hyperbolique est suggérée pour la concep­tion de l'école sous tente.

La conception est illustrée à la couverture IV de ce document. L'unité de base est un carré de 8 mètres au sol et de 4 mètres de haut. L'arma­ture est constituée de tubes d'aluminium à as­sembler avec des coudes et des pièces en for­m e de T pour faciliter le montage, le démonta­ge et le transport. La surface totale de l'unité de

base est de 64 m 2 . U n e partie est séparée par des toiles qui divisent l'espace en une salle de classe avec une porte et sept fenêtres transpa­rentes. La surface nette de la salle de classe m e ­sure entre 40 et 50 m 2 , ce qui est suffisant pour accueillir entre 20 et 40 élèves qui peuvent s'as­seoir sur des chaises ou sur des nattes.

Le mobilier devra être léger et facile à e m ­baller et à transporter. Les cloisons ne sont pas de nature à pouvoir supporter que l'on y ac­croche des tableaux ou autre. Cependant, le dispositif proposé pour remplir cette fonction est u n tube accroché à la structure extérieu­re pour soutenir des cartes, des aides visuelles, des tableaux d'annonce, etc.

U n e série de sacs de toile est aussi compri­se pour ranger les affaires des écoliers. En re­produisant à volonté et selon les besoins la m ê m e unité, o n peut créer des écoles plus grandes, dans ce cas il faudrait prévoir au moins une pièce pour le personnel. Dans des écoles encore plus grandes, il faudrait égale­ment prévoir une réserve pour le stock de m a ­tériel ainsi qu 'une classe pour les activités.

Le prototype décrit comprend u n auvent dont la structure est également une bâche dis­posée pour délimiter un espace extérieur pour les jeux et les réunions. L'école sous tente peut être utilisée c o m m e u n centre de services po­lyvalent pour la communauté , dans lequel on peut dispenser des cours d'alphabétisation, offrir une formation technique, des services de santé ou vétérinaires ou se réunir.

La gestion d'une école mobile demande une grande flexibilité de la part du personnel en­seignant. Les Bédouins s'endorment tôt et se lèvent tôt. La journée d'école pourrait s'adap­ter à ce rythme en commençant plus tôt et en terminant plus tôt que d'habitude, permettant ainsi aux enfants d'aider leurs parents dans leurs tâches quotidiennes. (Pour les détails et les coûts approximatifs de cette tente type, voir encadré.)

DETAILS D'UNE ECOLE MOBILE SOUS TENTE

Cadre : tubes creux en aluminium (en morceaux de 1,6 m de long) que l'on assemble avec des coudes.

Auvent : construction d'un seul tenant en forme de paraboloide hyperbolique. Chlorure de polyvinyle imperméable

rouge, vert, bleu ou jaune.

Cloisons : toile en suspension libre en chlorure de polyvinyle blanc intégrée dans l'auvent, avec sept fenêtres transparentes et une porte.

Sol : Chlorure de polyvinyle avec des œillets et des piquets de tente.

Coût estimé (1997) : 6.500 dollars par unité (en incluant les frais d'envoi et d'assurance jusqu'à la destination).

Liste des acronymes

et des abréviations

Selection bibliographique 47

BIE Bureau international d'éducation

C D E Convention relative aux Droits de l'Enfant

C D P Centre de développement

de programmes scolaires

C E Commission européenne/union européenne

C E P Coffret d'éducation pour la paix

C S M C a m p a g n e de sensibilisation au danger

des mines

CICR Comité international de la Croix-Rouge

C N R Conseil norvégien pour les réfugiés

D A H Département des affaires humanitaires

des Nations Unies

E M T École mobile sous tente

F D P Fonctionnaire de développement de projet

GI Guide de l'Instructeur

GINIE Réseau mondial d'information en éducation

G T Z Deutsche Gesellsschaft für Technische

Zusammenarbeit

IUE Institut de l ' U N E S C O pour l'éducation

K S M Coffret pédagogique de sensibilisation au

danger des mines

M E Ministère de l'éducation

N R C Conseil norvégien pour les réfugiés

O C H A Bureau de coordination des Affaires

Humanitaires des Nations Unies

O M S Organisation mondiale de la santé

O N G Organisation non gouvernementale

O N U Organisation des Nations Unies

PA Partenaire approprié

P A M Programme alimentaire mondial

PDI Personnes déplacées à l'intérieur du pays

P E E R Programme d'éducation dans les

situations d'urgence et de reconstruction

P N B Produit national brut

P N U D Programme des Nations Unies

pour le Développement

P N U E Programme des Nations Unies

pour l'éducation

P S M - T Programme de sensibilisation au danger

des mines-terrestres

PTSS Section de support technique

et de p rogramme

SCF Save the Children Fund

SJR Service Jésuite pour le réfugiés

S O M O L U Somalia Open Learning Unit

(Unité d'apprentissage ouvert de Somalie)

T E P Teacher E m e r g e n c y Package / Coffret

pédagogique d'urgence pour l'éducateur

U G P E Unité de gestion d u p r o g r a m m e

d'éducation

U N E S C O Organisation des Nations Unies pour

l'éducation, la science et la culture

U N H C R Haut Commissariat des Nations Unies

pour les réfugiés

U N I C E F Fonds des Nations Unies pour l'enfance

U N I C E F - B P U Bureau des Programmes d'Urgence

U N O S O M Opération des Nations Unies en Somalie

U S A I D United States Agency for International

Development des Etats-Unis

U S R B Unité spéciale pour le R w a n d a

et le Burundi

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Droits de l'enfant]. Préparé par R. Hodgkin et P.

Newell. Genève, UNICEF.

A propos des auteurs

Pilar Aguilar est actuelle­ment conseillère principale en éducation et en formation pour les situations d'urgences pour le Bureau des Program­m e s d'Urgence de l 'UNICEF (UNICEF-BPU) à Genève. Elle a travaillé en Afrique de l'Est au R w a n d a c o m m e officier principal d'éducation à l'UNI­C E F entre 1994 et 1997, et aussi c o m m e consultante en éducation à Djibouti, en Jor­danie, et en Somalie. Elle avait travaillé auparavant c o m m e consultante pour évaluer la si­tuation des réfugiés salvado-riens au Mexique ; elle a éga­lement été chercheur associé de la Confédération des Uni­versités centreaméricaines. M a d a m e Aguilar a u n doctorat (Ph. D ) en études pédago­giques de l'Université de Hull au Royaume Uni. Elle a écrit plusieurs publications sur la formation des enseignants et sur l'éducation humanitaire. E-mail :[email protected]

Gonzalo R e t a m a l est actuel­lement spécialiste principal des politiques éducatives hu­manitaires à l'Institut de l 'UNESCO pour l'Éducation à Hambourg. Il était, il y a peu de temps encore, le représen­tant de l 'UNESCO pour le pro­g ramme " Food for Oil " en Iraq. Il a créé et développé le Programme d'éducation dans les situations d'urgence et de reconstruction (PEER) de l 'UNESCO implanté enAfrique de l'est (à Djibouti, en Ethio­pie, au Kenya, au Rwanda, en Somalie et en République Unie de Tanzanie). Aupara­vant, il était chef du program­m e d'éducation scolaire de l ' U N R W A au M o y e n Orient, Officier principal d'éducation au U N H C R à Genève et il a également travaillé en A m é ­rique Centrale et dans les Ca­raïbes. M . Retamal a un doc­torat (Ph. D . ) du département d'éducation pour adulte de l'Université de Hull. Il est l'au­teur de plusieurs publications sur l'éducation des réfugiés et sur l'éducation humanitaire. E-mail: [email protected]

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