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Ann. Kinésithér., 1983, t. 10, nO 4, pp. 129-134 © Masson, Paris, 1983 MEMOIRE Intérêt et rééducation de l'arthroplastie cervico-céphalique dans le traitement des fractures cervico-trochantériennes du sujet âgé H. ZREIK (1), P. HEISSLER (1), E. NAHON (2) (1) Chirurgiens, Centre Hospitalier de Creil, Chirurgie orthopédique et traumatologie, (2) Médecin-rééducateur, attachée au Centre Hospitalier de Creil, F 60100 Creil. J J i t Le lever immédiat des personnes âgées, évitant les complications du décubitus, est toujours le but du rééducateur a qui les chirurgiens demandent de dynamiser leur patient, tout en donnant des conseils de prudence (les deux attitudes étant anti- nomiques, bien que justifiées). Cette expérience clinique rend compte d'un programme de kinésithérapie adapté qui commence par des résistances manuelles raisonnées en fonction des attitudes éventuellement luxantes. L'utili- sation des contractions par «débordement d'énergie », le travail controlatéral, les syner- gies croisées utilisées pour ces rééducations contribuent pour une grande part à l'intérêt de ce travail d'actualité. L'arthroplastie cervico-céphalique s'utilise de préférence dans Je cas les interventions classiques type clou-plaque semblent faire courir un risque sérieux à un malade âgé. Son principal intérêt est de permettre un appui précoce qui évite toutes les complications du décubitus. Notre étude intéresse 32 malades opérés au Centre Hospitalier de Creil, de septembre 1978 à octobre 1979, tous ces malades ayant bénéficié d'une prothèse cervico-céphalique type Merle d'Aubigné-Leinbach non scellée. Caractéristiques de la prothèse Il s'agit d'une prothèse à appui trochantéro-diaphysaire étendu, avec un angle de 135° de valgus (fig. 1). Un pivot Tirés à part: E. NAHON, à l'adresse ci-dessus. long de taille unique (200 mm) présente une surface latérale de contact solide, avec une grande résistance aux rotations. Deux trous en position transverse sont prévus pour la fixation du grand trochanter .. Il a été démontré que l'assise horizontale de ces prothèses fémorales leur donne un appui réel, stable et maximum au niveau de la corticale postérieure (fig. 2). Cet appui est beaucoup plus résistant que sur les prothèses à assise oblique et à queue courte (fig. 3), qui très vite lors des contraintes verticales, vont d'une part trop solliciter la zone cervicale supéro-interne avec comme conséquence une résorbtion du moignon cervical et d'autre part entraîner une aggravation des contraintes au niveau de l'extrémité diaphysaire de l'implant, ce qui peut donner lieu à des fractures de fatigue. Analyse de la série L'âge des patients va de 65 à 92 ans avec une moyenne de 81 ans. On trouve habituellement, dans ce type de fracture, une majorité de patients du sexe féminin (84 %). La moyenne d'âge des femmes (84 ans) est supérieure à celle des hommes (76 ans). Il s'agit de femmes âgées, dont l'équilibre psychique et somatique est souvent précaire et dont la déambulation avant la fracture est parfois difficile à affirmer. Les renseignements fournis, quant à la possibilité de marche du patient, sont souvent contradic- toires et le bilan clinique avec l'interrogatoire et l'examen initial (11) nous démontrent qu'il n'est pas facile de connaître les critères exacts de la marche avant la fracture. Le bilan radiologique comprend un bassin de face, une radiographie de la hanche de la face et de profil. Ce bilan, fondamental pour porter l'indication d'arthroplastie, permet d'une part de trouver des lésions associées (maladie de Paget, ostéoporose, ostéomalacie, coxa-vara, coxa- valga, fracture ancienne sur la hanche contro-latérale), d'autre part de classer la fracture dans l'une des deux catégories, stable ou instable (8, 13): - Les fractures présumées stables sont celles où le trait est généralement simple. Le déplacement une fois réduit

Intérêt et rééducation de l'arthroplastie cervico ... · niveau de l'extrémité diaphysaire de l'implant, ce qui peut donner lieu à des fractures de fatigue. Analyse de la série

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Ann. Kinésithér., 1983, t. 10, nO 4, pp. 129-134© Masson, Paris, 1983

MEMOIRE

Intérêt et rééducation de l'arthroplastiecervico-céphalique dans le traitementdes fractures cervico-trochantériennes du sujet âgé

H. ZREIK (1), P. HEISSLER (1), E. NAHON (2)(1) Chirurgiens, Centre Hospitalier de Creil, Chirurgie orthopédique et traumatologie, (2) Médecin-rééducateur, attachée au CentreHospitalier de Creil, F 60100 Creil.

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Le lever immédiat des personnes âgées,évitant les complications du décubitus, esttoujours le but du rééducateur a qui leschirurgiens demandent de dynamiser leurpatient, tout en donnant des conseils deprudence (les deux attitudes étant anti­nomiques, bien que justifiées). Cette expérienceclinique rend compte d'un programme dekinésithérapie adapté qui commence par desrésistances manuelles raisonnées en fonctiondes attitudes éventuellement luxantes. L'utili­

sation des contractions par «débordementd'énergie », le travail controlatéral, les syner­gies croisées utilisées pour ces rééducationscontribuent pour une grande part à l'intérêtde ce travail d'actualité.

L'arthroplastie cervico-céphalique s'utilise depréférence dans Je cas où les interventionsclassiques type clou-plaque semblent faire courirun risque sérieux à un malade âgé. Son principalintérêt est de permettre un appui précoce quiévite toutes les complications du décubitus.

Notre étude intéresse 32 malades opérés auCentre Hospitalier de Creil, de septembre 1978à octobre 1979, tous ces malades ayant bénéficiéd'une prothèse cervico-céphalique type Merled'Aubigné-Leinbach non scellée.

Caractéristiques de la prothèse

Il s'agit d'une prothèse à appui trochantéro-diaphysaireétendu, avec un angle de 135° de valgus (fig. 1). Un pivot

Tirés à part: E. NAHON, à l'adresse ci-dessus.

long de taille unique (200 mm) présente une surfacelatérale de contact solide, avec une grande résistance auxrotations. Deux trous en position transverse sont prévuspour la fixation du grand trochanter ..

Il a été démontré que l'assise horizontale de cesprothèses fémorales leur donne un appui réel, stable etmaximum au niveau de la corticale postérieure (fig. 2).Cet appui est beaucoup plus résistant que sur les prothèsesà assise oblique et à queue courte (fig. 3), qui très vitelors des contraintes verticales, vont d'une part tropsolliciter la zone cervicale supéro-interne avec commeconséquence une résorbtion du moignon cervical etd'autre part entraîner une aggravation des contraintes auniveau de l'extrémité diaphysaire de l'implant, ce qui peutdonner lieu à des fractures de fatigue.

Analyse de la série

L'âge des patients va de 65 à 92 ans avec une moyennede 81 ans. On trouve habituellement, dans ce type defracture, une majorité de patients du sexe féminin (84 %).La moyenne d'âge des femmes (84 ans) est supérieure àcelle des hommes (76 ans). Il s'agit de femmes âgées, dontl'équilibre psychique et somatique est souvent précaire etdont la déambulation avant la fracture est parfois difficileà affirmer. Les renseignements fournis, quant à lapossibilité de marche du patient, sont souvent contradic­toires et le bilan clinique avec l'interrogatoire et l'exameninitial (11) nous démontrent qu'il n'est pas facile deconnaître les critères exacts de la marche avant la fracture.

Le bilan radiologique comprend un bassin de face, uneradiographie de la hanche de la face et de profil. Ce bilan,fondamental pour porter l'indication d'arthroplastie,permet d'une part de trouver des lésions associées (maladiede Paget, ostéoporose, ostéomalacie, coxa-vara, coxa­valga, fracture ancienne sur la hanche contro-latérale),d'autre part de classer la fracture dans l'une des deuxcatégories, stable ou instable (8, 13):- Les fractures présumées stables sont celles où le traitest généralement simple. Le déplacement une fois réduit

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FIG.2FIG. 3

FIG. 1. - Prothèse cervico-céphalique non scellée de Merled'Aubigné - Leinbach.FIG. 2. - L'assise horizontale de la prothèse cervico-céphaliquenon scellée lui donne un appui réel, stable et maximum.FIG. 3. - Prothèse à assise oblique et à queue courte qui vasolliciter la zone cervicale supéro-interne et aggraver lescontraintes de l'extrémité diaphysaire.

n'a plus tendance à se reproduire et la fixation parostéosynthèse est relativement aisée et possède une bonneprise. Il n'y a pas de vide osseux.- Les fractures instables sont celles à plusieurs fragments,où souvent le petit trochanter est détaché. Il existe unezone de comminution postérieure (fig. 4) ou antéro-internedifficile à réduire et où l'ostéosynthèse n'aura qu'un appuimédiocre.

Dans notre série, nous avons 10 fractures stables et 22fractures instables. Parmi ces dernières, on note 18fractures pertrochantériennes complexes et 4 fracturestrochantéro-diaphysaires. On remarque ainsi la prédomi­nance des fractures instables (2/3) sur les fraCtures stables(113) ; cela se justifie par le fait que l'instabilité a été unargument majeur dans la décision d'opter pour cettetechnique; quant aux cas avec fractures stables, l'étatphysiologique a été le facteur majeur de cette décision.

FIG. 4. - Fracture instable avec:

1 - fragment cervico-céphalique,2 - fragment diaphysaire,3 - Zone de comminution postérieure.

A. Vue externe; B. Vue postérieure.

Traitement chirurgical

Les délais entre le traumatisme et l'interven­tion ayant une importance vitale, les 3/4 despatients sont opérés dans les 24 heures quisuivent la fracture.

La voie d'abord est postéro-externe, ellemesure 20 cm et elle est à cheval sur la régiondu grand trochanter.

Dans le cas de fractures per-trochantériennessimples, sans détachement du grand trochanter,après ouverture de la capsule, le fragmentcomportant ce qui reste du col et de la têtefémorale est retiré. La mise en place de laprothèse est aisée et rapide. Elle n'est pas scellée.Il faut surtout veiller à lui donner une bonneantéversion. En fin d'intervention, la stabilité dela prothèse est testée par des mouvements deflexion avec rotations externe et interne.

La rééducation

Elle a un but essentiellement fonctionnel,tendant à redonner au malade son autonomie.Elle doit être adaptée à chaque patient. Elle acomme principe de ne jamais forcer sur lesamplitudes articulaires, d'effectuer toute mobili­sation avec douceur en assurant des séancescourtes et fractionnées et de tenir le plus grandcompte de la voie d'abord de façon à éviter lesattitudes luxantes et les mouvements combinés.

Notre schéma type de rééducation est lesuivant:

PENDANT LES DEUX PREMIERS JOURS

Immédiatement après l'intervention, le ma­lade est installé dans son lit, le membre inférieuropéré placé en abduction, en évitant la rotationinterne du fait de la voie d'abord postéro­externe, grâce à un système de sacs antirotations.Ceci diminue les risques de luxation parmouvements combinés de flexion-adduction­rotation interne. Un cerceau est placé sous ledrap. Les pieds du lit sont surélevés.

Dès le lendemain de l'intervention, on fait unerééducation respiratoire, un massage des mem-

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bres inférieurs contre la stase, un travail statiquedu quadriceps et des fessiers du côté opéré. Onmobilise la rotule latéralement et de haut en bas.Si un travail isométrique n'est pas possible dufait de la sidération musculaire, on a recours àun mouvement imaginé par débordement d'éner­gie à partir du membre controlatéral (fig. 5, 6et 7).

FIG.5. - Le travail du quadriceps côté sain entraîne unecontraction côté opéré par débordement d'énergie.

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à tous les sujets âgés concernant l'appui sur lemembre opéré.

Au début, on effectue des parcours brefs.La flexion est travaillée en position de

décubitus dorsal pour obtenir 60°. L'abductionn'ira pas au-delà de 20°. L'adduction n'est pasà rechercher pendant cette période. Les stabilisa­teurs de hanche (psoas, moyens fessiers, grandsfessiers) sont travaillés en statique; le quadricepssera travaillé en dynamique (fig. 8 et 9). Il nefaut jamais faire de travail actif contre résis­tance, ni de mobilisation passive forcée, nisurtout de mouvements combinés.

Il ne faut pas non plus chercher à décollerla jambe tendue du plan du lit.

Fra. 7 FIG. 8

FIG. 6. - Le travail du moyen fessier côté sain entraîne unecontraction du moyen fessier côté opéré.

Du TROISIEME AU HUITIÈME JOUR APRÈSL'OPÉRATION

Dès l'ablation des drains de redons, le maladesera assis dans un fauteuil. La marche avec appuiest toujours progressive et commence par lastation assise. On effectue ensuite une verticalisa­tion, si possible sur le plan incliné, qui est utilisénon pas dans un but de musculation statiquedu moyen fessier mais pour résoudre leséventuels problèmes circulatoires liés à l'orthos­tatisme et pour vaincre l'appréhension commune

Fra. 7. - Le travail des rotateurs externes de hanche du côté

sain entraîne une contraction du côté opéré.FIG. 8. - Travail symétrique dynamique des quadriceps.

APRÈS LE HUITIÈME JOUR

On entreprend une rééducation précoce enrecherchant l'indolence, la mobilité et la stabi­lité. Si flexion et abduction sont satisfaisantes,on abandonne les béquilles et le déambulateurpour adopter les cannes anglaises. La montéeet la descente des escaliers sont commencées. Ence qui concerne la récupération de l'amplitude,on doit « laisser venir la mobilité sans violenceet savoir l'exploiter» (14). On commence parle travail actif qu'il faudra répéter un grandnombre de fois, soit à mains libres, soit dansl'eau si l'état de la cicatrice le permet.

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VERS LE 21e JOUR Comparaisons avec d'autres séries d'intervention

FIG. 9. - Travail en synergie croisée ischio-jambiers côté sain­quadriceps côté opéré.FIG. 10. - Le travail du grand fessier côté sain entraîne unefacilitation de la contraction du quadriceps côté opéré.

Après l'ablation des fils et un bilan completde la hanche, on peut, à cette période, essayerde récupérer la force musculaire, progressive­ment, par un travail fractionné: quadriceps etmoyens fessiers en isométrique, psoas et exten­seurs de cuisse en dynamique. On peut utiliserdifférents moyens de facilitation (fig. 10). Toute­fois, la rééducation ne doit pas avoir pour butune musculation intensive; des possibilités fonc­tionnelles suffisent amplement pour ces malades.S'il n'y a pas de piscine, on peut, à cette phase,instituer un travail en poulie avec des chargesfaibles, tout en préservant la bonne position dusujet en ce qui concerne la hanche et le bassinet en évitant toute fatigue. La progressivité del'appui et une certaine indépendance demandentenviron 3 semaines après lesquelles on fait unbilan. Une prothèse entraîne un allongement ouun raccourcissement du membre que l'oncorrigera par une talonnette placée du côté opéréou du côté contro-latéral.

La poursuite de la rééducation dans un centreou à domicile nous paraît très utile chez cespatients âgés si !,autonomie n'est pas acquiserapidement ou si les automatismes de la marchene sont pas revenus.

FIG.9 FIG. 10

AUTRES ARTHROPLASTIES

Nous rapportons la série du ProfesseurG. Lord (9) (clinique de l'APAS). Trente-septarthroplasties cervico-céphaliques ont été poséesde 1971 à 1975 avec 60 % de bons résultats,16 % de mauvais résultats (malades grabataires)et 24 % de mortalité. En ce qui concerne lesrésultats obtenus par intervention sur les frac­tures stables ou instables, ils sont identiques àceux obtenus à l'hôpital de Creil.

L'OSTÉOSYNTHÈSE PAR CLOU-PLAQUE

Il ne sera jamais question de substituer auxostéosynthèses une arthroplastie de principedans le traitement des fractures cervico-trochan­tériennes du patient âgé, dont le traitement estessentiellement chirurgical. Le problème estcelui de l'indication opératoire qui nous sembleactuellement bien codifiée.

Toutefois, l'utilisation du clou-plaque a poséun certain nombre de problèmes techniques (5)qui sont la qualité du montage, surtout dans lesfractures instables, l'appui plus ou moins tardif,la nécessité de transfusions, la durée de l'acteopératoire, le démontage, le sepsis, lapseudarthrose ...

Vingt-quatre malades ont été traités parclou-plaque de Staca au Centre HospitalierGénéral de Creil, entre le mois de septembre1978, date de l'ouverture de l'hôpital et le moisd'octobre 1979. On ne constate dans cette sérieaucun décès, mais 20 bons résultats soit 84 %et 4 mauvais résultats soit 16 %. A la lecturede ces résultats, l'ostéo-synthèse par clou-plaquemonobloc peut donc paraître préférable; cepen­dant, il faut souligner le fait que, dans cettedouble série, les malades ont été sélectionnésavant l'intervention, soit sur des critères anato­miques pour des fractures peu commiriutives,peu déplacées, du 3e et non du 4e âge, soit sur

. des critères généraux (meilleur état général despatients) et sur des critères d'âge (âge moyen:59 ans).

Il existe une variante, l'ostéosynthèse avecpénétration cervico-diaphysaire qui permet un

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appui quasi immédiat. Toutefois, notre expé­rience est trop récente pour que nous puissionsen tirer une conclusion valable. Les premiersrésultats sont cependant très encourageants.

LE CLOU ÉLASTIQUE DE ENDER

Le clou élastique de Ender est une méthodede traitement à foyer fermé des fractures de larégion trochantéro-diaphysaire des sujetsâgés (6). Sous contrôle télévisé, avec amplifica­teur de brillance, la fracture est réduite parabduction et rotation interne. Trois clous sontintroduits dans la diaphyse fémorale par uneouverture de 10 cm placée en avant du condyleinterne qui ne touche pas le cercle artérielpéri-articulaire. Cette intervention respecte doncl'articulation de la hanche et celle du genou etne sectionne aucun élément musculaire niligamentaire. Elle assure l'ostéosynthèse par untriple appui au niveau de la tête où les clous sonten éventail. Dès le 1er jour après l'intervention,la mobilisation active est permise, progressive­ment, en flexion et en extension. La mise encharge est très rapide. Dès le lendemain, le blessépeut être assis dans un fauteuil. L'appui completest ici permis entre le 4e et le Se jour. Il est trèsdifficile de rétablir l'antéversion du col fémoral,lors de la marche, ce qui entraîne une rotationexterne du membre inférieur, inconvénient quel'on ne retrouve pas après une prothèse cervico­céphalique de Merle d'Aubigné. On s'efforceradonc de faire travailler les rotateurs internes dehanche et de veiller à maintenir le membreinférieur allongé au lit en position neutre.

Cette méthode présente aussi certains autresinconvénients comme la descente du clou, samigration transcéphalique ou cotyloïdienne avecmenace de l'articulation de la hanche, le varusavec cal vicieux. Les risques sont d'autant plusimportants que le malade est âgé et ostéoporoti­que. Utilisant peu cette technique, nous rappor­tons la série de J-M Le Goarant de Tromelin,service du Professeur Nordin. Sur 65 cas, lamoyenne d'âge étant de 79 ans, les résultatsglobaux au 4e jour sont les suivants: 56 % depatients autonomes, 24 % de patients nonautonomes et 20 % de décès. Les résultats sontassez superposables à notre série d'arthroplastiequant aux pourcentages.

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Résultats

Le lever avec pas simulé et reprise immédiatede la marche sans appui du côté opéré est uneperformance que bien peu de personnes âgéesréussissent. C'est la raison pour laquelle, en casd'ostéosynthèse classique, la déambulation estpresque toujours différée jusqu'à ce que l'appuisoit autorisé.

Dans le cas d'une intervention avec prothèsecervico-céphalique de Merle d'Aubigné, la re­prise de la marche est fonction des possibilitéspropres à chaque individu. Il s'agit davantaged'une réadaptation à la marche que d'unerééducation proprement dite. Il faut, bien sûr,conserver les mobilités existantes par un travailactif aidé au lit, mais lorsque l'appui est autorisé,il est total et non partiel. Les délais d'appui sontvariables et vont de moins d'une semaine (4 cas)à moins de 15jours (15 cas). Quatre cas ont puavoir un appui entre le 15e et le 30e jour, 4 casentre le 30e et le 90e jour et aucun au-delà de90 jours.

Nous avons appuyé nos résultats, qui peuventêtre considérés comme définitifs, sur un reculde 90 jours :- la douleur se manifeste rarement: 3 cas dedouleur inguinale, 1 cas de gonalgie, 1 cas dedouleur diaphysaire;- le périmètre de marche est semblable à l'étatantérieur à la fracture;- la mobilité de la hanche a été comparée à cellede la hanche contro-Iatérale en groupant lesdiverses données suivant le bilan fonctionnel dela hanche et la cotation de Merle d'Aubigné (11).Toutefois, si le malade peut retrouver sonautonomie, il entre dans les bons résultats.

Globalement, sur 32 patients opérés, 21 sontautonomes, soit 65 %, 5 ne sont pas autonomes(grabataires) soit 16 % et 6 sont décédés soit19 %. Si l'on compare les résultats en fonctiondu type de fracture, les bons résultats dans lesdeux groupes sont pratiquement identiques etnous remarquons que l'arthroplastie diminue lepourcentage de mauvais résultats constatés dansle groupe des fractures instables dans les sériestraitées par clou-plaque ou par clous de Ender.

Conclusion

Les résultats fonctionnels obtenus par arthros-

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plastie cervico-céphalique sont comparables àceux des séries traitées par clou de Ender oupar clou-plaque, mais ce ne sont pas des blessésphysiologiquement comparables. Certes, notresérie est limitée et ne permet donc pas deconclusions définitives; toutefois, les résultatssont encourageants et nous engagent à poursui­vre notre étude en ayant bien soin de poser desindications précises:- avant 70 ans d'âge physiologique et quel quesoit le type de fracture, nous pratiquons uneostéosynthèse par clou-plaque, qui reste uneméthode toujours applicable et qui donne debons résultats;- après 70 ans d'âge physiologique, le remplace­ment prothétique est réservé, soit aux fracturessimples lorsque l'appui immédiat est nécessaire,soit aux fractures per-trochantériennes com­plexes.

L'argument essentiel est la reprise d'appuiprécoce qui, chez les patients du 4e âge plus quechez ceux du 3e âge, nous paraît fondamentale.

Références

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