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L’euro dix ans après Colloque de la CEDECE 18 juin 2010 par Jean-Louis Besson, Chaire Jean Monnet ad personam "Union monétaire et intégration européennes" à l'Université de Grenoble (UPMF) Résumé L'intégration des marchés financiers est une dimension du marché unique. Au-delà des effets mécaniques, l'impact spécifique de l'euro (1) résulte de l'action de la BCE qui rend une large partie des dettes en euro substituables sans considération de leur nationalité et met en place des infrastructures de règlement. Après 10 ans de ce processus, la crise financière (2) provoque une "renationalisation" dangereuse qui dramatise une précondition oubliée, la discipline des finances publiques. Si la crise s'élargit et s'approfondit encore, il est à craindre que viennent des temps réellement difficiles. 1 Texte arrêté au 30 juin 2010. JLB

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L’euro dix ans après Colloque de la CEDECE 18 juin 2010

par Jean-Louis Besson, Chaire Jean Monnet ad personam "Union monétaire et intégration européennes" à l'Université de Grenoble (UPMF)

Résumé L'intégration des marchés financiers est une dimension du marché unique. Au-delà des effets

mécaniques, l'impact spécifique de l'euro (1) résulte de l'action de la BCE qui rend une large partie des dettes en euro substituables sans considération de leur nationalité et met en place des infrastructures de règlement. Après 10 ans de ce processus, la crise financière (2) provoque une "renationalisation" dangereuse qui dramatise une précondition oubliée, la discipline des finances publiques. Si la crise s'élargit et s'approfondit encore, il est à craindre que viennent des temps réellement difficiles.

1 Texte arrêté au 30 juin 2010.

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Jean-Louis Besson "L'euro et les marchés financiers"

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L'expression "marchés financiers" est prise au sens large (marchés des dettes à court terme,

des dettes à long terme, des actions et marché du crédit). On parle d'intégration complète quand les transactions domestiques et les transactions

transfrontières (au sein de la zone considérées) sont équivalentes 2, c'est-à-dire lorsqu'il n'y a pas de raison de préférer une transaction domestique à une transaction transfrontières (intrazone). Les marchés financiers nationaux sont alors si parfaitement substituables qu'ils ne constituent plus qu'un seul marché dont la taille, la liquidité et l'efficacité concurrentielle facilitent le financement de l'économie et en diminue le coût, ce qui a un effet positif sur la croissance. A défaut, les marchés sont segmentés et, sauf opportunité d'arbitrage, il est presque toujours préférable d'avoir une contrepartie domestique ("home bias").

Le sous-titre de cet article ("16 et 27+3") indique qu'il ne traite pas de l'intégration financière européenne en général (27+3) ni des intéressants problèmes que lui a posés la crise mondiale et les voies choisies pour l'accommoder. Nous conformant strictement à l'objet du Colloque, nous nous centrons sur l'union monétaire (16). Cette restriction ne simplifie pas l'approche car si l'UEM constitue un sous-ensemble de l'UE, elle s'inscrit dans une autre dimension. Aussi, curieusement, ce thème est-il peu exploré.

Tentons une comparaison : pour unifier un réseau international de transports ferroviaires, il faut que les opérateurs d'un pays aient le droit de faire circuler des trains dans les autres (libre circulation des capitaux 3), que les écartements soient identiques pour éviter les ruptures de charge coûteuses et toujours risquées (union monétaire), qu'il y ait des règles communes de circulation (régulation monétaire et financière), et que les infrastructures techniques soient, au mieux identiques, au moins compatibles 4.

En outre, dans chaque pays, l'industrie financière est réglementée dans le but de protéger l'épargne et d'assurer la stabilité financière. A défaut d'une réglementation unique, la reconnaissance mutuelle dans un cadre commun constitue la base du marché unique des services financiers dont les progrès ont été accélérés par le processus législatif du Plan d'action pour les services financiers initié en 1999 et achevé en 2004.

Où en est-on ?

2 Plus précisément, selon la définition de la BCE : "A financial market is fully integrated when all potential market participants are subject to the same set of rules and have equal access to this market and are treated equally when they operate in this market." 3 En droit, depuis 1988 (directive 88/361/CEE) et, en fait, 1990 pour la plupart des États membres. 4 Les marchés ne fonctionnent pas sans des infrastructures de négociation et d'exécution (livraison-réglement) dont la fragmentation nationale historique entraîne des frottements qui limitent les opérations transfrontières et diminuent leur efficacité. Ces barrières non réglementaires ("obstacles Giovannini") ne peuvent pas être supprimées par une décision ou une directive qui ne peuvent que dresser le cadre et exciter la concurrence entre acteurs.

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Jean-Louis Besson "L'euro et les marchés financiers"

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Les mesures de l'intégration financière 5 sont de deux types: i) en termes de quantité (importance du "transfrontières intra-euro" dans les portefeuilles et

les bilans) ; ii) en termes de prix (dispersion intra-euro des prix d'actifs identiques). Ainsi, l'augmentation de la part de la part des actifs transfrontières intrazone et la diminution

de la dispersion des prix traduisent les progrès de l'intégration financière. Dans la zone euro, on constate (cf Annexe 1) que cette progression diffère selon les segments

du système financier : elle est d'autant plus forte qu'on est plus près de la monnaie, que les acteurs sont de plus grande taille (wholesale market) et que les infrastructures d'exécution sont plus intégrées : le marché de l'argent à très court terme (marché interbancaire) s'est totalement unifié très vite et les marchés de dettes (TCN) à court terme et à long terme se sont très fortement intégrés. Par contre, les marchés d'actions gardent une composante nationale importante et les marchés bancaires de détail restent fortement cloisonnés.

Enfin, les infrastructures de marché et de post-marché, comme les "superstructures" de régulation demeurent, dans une trop large mesure, nationales ce qui est un obstacle à l'intégration.

Sans nous attarder sur ce descriptif bien connu, nous analyserons les liens spécifiques entre union monétaire et intégration financière (Section 1) et, en juin 2010, nous ne pouvons pas éluder les risques de dés-intégration engendrés par la crise financière (Section 2).

Comme le système financier fait le lien entre l'offre de monnaie et l'économie, l'évaluation de sa réponse à l'union monétaire fait partie de la mesure des effets de celle-ci (Lane, 2008).

La segmentation monétaire freinant l'intégration, on en déduit que l'union monétaire l'accélère. Mais ce jugement a contrario est une fausse évidence : lever le pied du frein n'est pas accélérer !

Dans quelle proportion l'union monétaire contribue-t-elle à l'intégration financière (§1.1) ? Comment agit-elle (§1.2) ?

5 Voir pour une analyse en profondeur Baele et al, 2004. et, pour les données et commentaires, les rapports annuels de la BCE depuis 2005. Le dernier en date: Financial integration in Europe, april 2010 http://www.ecb.int/pub/pdf/other/financialintegrationineurope201004en.pdf. Voir aussi les rapports de la Commission, notamment European Commission, 2009, European Financial Integration Report, Brussels, 11.12.2009, SEC(2009) 1702 final .

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Si la conclusion (effet positif de l'euro sur l'intégration des marchés financiers) est largement admise, elle n'a pas vraiment de démonstration car la vérification empirique (et plus encore, la mesure de l'intensité du processus) est difficile.

Pourquoi ? parce que l'intégration financière de la zone euro (dynamique monétaire) est entourée, et en partie déterminée, par deux autres processus qui sont différents dans leur nature et leur géographie :

- le processus du marché unique (marché unique des services financiers) qui a pour territoire l'Espace économique européen à 30 : dynamique législative à 27 ;

- le processus de mondialisation financière dont le territoire est constitué par les centres financiers actifs de la planète: dynamique de marché (Francfort, Londres, New York, Tokyo pour faire bref).

Tous ces processus étaient stimulés par une dynamique technologique forte (information/communication) qui a permis l'élargissement, l'accélération et l'intensification des connexions internationales, elles-mêmes approfondies par l'innovation financière.

Ainsi lorsque on évalue (comme évoqué supra) l'évolution du degré d'intégration des différents compartiments des marchés financiers de la zone euro de 1999 à 2009, on saisit l'effet de tous ces processus joints.

Cet obstacle méthodologique, lorsqu'il est mentionné, finit souvent par être prudemment contourné ou oublié et l'on bien comprend pourquoi : on ne sait pas décomposer la tendance globale pour isoler l'intégration financière dans la zone euro des processus qui l'englobent 6.

Aussi, assimile-t-on l'intégration financière dans la zone euro aux effets de l'union monétaire, soit parce que, regardant la zone euro de l'intérieur, on ne pense pas à son inclusion dans d'autres dynamiques ; soit parce qu'on ne peut pas résoudre le problème. Une mesure indirecte est apportée par les approches de type gravitationnel qui cherchent à saisir le supplément d'intégration dans la zone 7. Outre les hypothèses requises par cette approche, elle se heurte à

6 Cette dissociation n'est pas praticable pour plusieurs raisons : - les 3 ensembles (euro, EEE-euro, planète - EEE) sont hétérogènes et donc non comparables ; - la relation d'inclusion (euro EEE planète) prive de sens les ensembles soustractifs ("EEE - euro" et "planète - EEE") ; - les processus sont interactifs: l'harmonisation réglementaire a été stimulée au niveau EEE par les exigences de l'euro, et l'union monétaire en offrant aux acteurs extérieurs des économies d'échelle et des effets de réseau a stimulé la mondialisation financière ; - les données sont insuffisantes: faute d'instance régulatrice mondiale, les statistiques financières internationales sont partielles et hétéroclites et, d'autre part, dans une approche internationale, les avoirs transfrontières intrazone sont considérés comme des avoirs internationaux de sorte que, par exemple, la multiplication par trois des avoirs bancaires internationaux de 1999 à 2009 inclut la croissance des avoirs intraeuro. 7 Cf Lane, P.R. and G.M. Milesi-Ferretti. 2007. “The International Equity Holdings of Euro Area Investors.” in The Importance of the External Dimension for the Euro Area, ed. Robert Anderton and Filippo Di Mauro. New York: Cambridge University Press ; Papaioannou, E., Portes, R., 2010. "The international role of the euro: a status report", in: EMU@10, Buti, M., Deroose, S., Gaspar, V. (Eds), European Commission, DGEC/FIN, European Economy Economic Papers.

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des problèmes de données et, objectent Kalemli-Ozcan et al. 8, ne permet pas de savoir si le supplément d'intégration est imputable au facteur monétaire lui-même, à ses effets sur les échanges ou à la dynamique institutionnelle. Kalemli-Ozcan et al. effectuent un travail considérable pour estimer le surcroît d'intégration engendré par l'union monétaire et quantifier l'impact respectif des différents canaux. Toutefois, malgré l'ingéniosité méthodologique dont ils font preuve, la difficulté de l'opération (et donc les approximations nécessaires) affaiblit la démonstration 9.

Pourtant, cette conviction générale que l'union monétaire accélère et intensifie l'intégration financière n'est pas infondée et traduit la dynamique monétaire de l'intégration financière que nous allons présenter rapidement.

Les actifs financiers et donc les opérations dont ils sont les supports étant désormais libellés dans la même unité monétaire, il y a une opportunité d'arbitrage en moins (taux de change) et un facteur d'intégration en plus.

Plus précisément, les banques sont le cœur des systèmes financiers en raison de la taille de leur bilan (Total de bilan -TABA- dans la zone euro : €31 000 milliards soit environ 3 PIB), de l'importance de leurs opérations de marché au titre du financement ou du trading, et de leur rôle indirect essentiel dans la liquidité des opérateurs de marché.

L'union monétaire n'est pas seulement une monnaie commune, c'est une gestion commune de cette monnaie. Cette dernière est un puissant moteur d'intégration, à la fois direct et indirect (conditions cadres).

La fonction de l'Eurosystème (BCE+BCN de la zone euro) a deux dimensions : i) macro-monétaire (garantir la valeur de la monnaie = stabilité des prix) : de ce fait, les

conditions monétaires (taux de change et taux de refinancement bancaire) sont les mêmes pour tous les pays membres et diffusent les mêmes effets sur l'économie. Les anticipations se forment au niveau de la zone dans son ensemble et non plus au niveau national ;

8 Sebnem Kalemli-Ozcan, Simone Manganelli, Elias Papaioannou, Joseål Luis Peydro, 2008 http://www.ecb.int/pub/pdf/other/euroattenen2009en.pdf?c4f3bb81df0fb9d36221dd6c4fb57b1c Sebnem Kalemli-Ozcana, Elias Papaioannoub, and José Luis Peydro, 2010, What Lies Beneath the Euro's Effect on Financial Integration? Currency Risk, Legal Harmonization, or Trade?, ECB WP 1210, June 2010. 9 Le test consiste à comparer un groupe cible (zone euro) et un groupe témoin (3 pays UE non euro + 5 non UE). A nos yeux, les principaux problèmes de la démonstration sont : - d'une part, la mesure de l'intégration financière est approximée par les avoirs interbancaires transfrontières (à partir d'une base de données bilatérales confidentielle de la BRI) alors que ces avoirs ne constituent qu'une classe d'actifs imparfaitement représentative de toutes les autres ; - d'autre part, la dynamique institutionnelle européenne est saisie à travers la vitesse de transposition des directives du PASF, indépendamment de leur importance et de l'intégrité de la transposition.

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ii) micro-monétaire (garantir l'élasticité de l'offre de monnaie = liquidité du système bancaire) : les conditions de concurrence sont les mêmes dans tous les pays et, comme nous allons le voir, les actifs de garantie deviennent substituables.

En amont des marchés financiers, l'Eurosystème a unifié l'approvisionnement en "matière première" du système financier. En aval, il a unifié la circulation de la monnaie. Précisons ces deux aspects :

La BCE, organe collectif des banques centrales nationales (BCN) de la zone euro, décide les interventions de liquidité et leurs modalités tandis que les BCN, chacune dans son ressort, appliquent ces décisions et distribuent la liquidité aux établissements de crédit résidents.

Rappelons que ces apports de liquidité sont temporaires et remboursés à l'échéance (une semaine pour les "opérations principales" - MRO -, quelques mois pour les "opérations à plus long terme" LTRO) ; les banques emprunteuses payent à leur banque centrale un intérêt dont le taux est le même pour toute la zone ; et surtout, ces appports sont garantis. Les banques centrales ne prêtent pas "en blanc", elles se protègent du risque de défaut en exigeant de la banque emprunteuse des actifs dont la valeur couvre celle du prêt ("collatéralisation"). Ces actifs ne sont pas un simple gage qu'il faudrait saisir en cas de défaillance : pendant la durée du prêt, leur propriété est effectivement transférée à la banque centrale ("pensions"). La banque centrale définit la qualité minimale des actifs qui leur confère une sécurité suffisante ("actifs éligibles"). Il va de soi que, si ces actifs sont domestiques, les banques privilégieront les débiteurs domestiques.

Ce point est essentiel : avec l'union monétaire, c'est la zone euro qui devient le territoire domestique.

La BCE a défini les critères d'éligibilité communs et tient à jour publiquement la liste des actifs "éligibles", liste aujourd'hui unique pour toute la zone euro, ainsi que les règles et pratiques de protection communes contre le risque résiduel 10. En gros, ce sont des titres de créances en euros (représentatifs de financements accordés) dont l'émetteur est résident de la zone euro et de qualité suffisante, sans privilège aux titres publics 11 et sans considération de nationalité au sein de la zone.

Une banque française peut ainsi obtenir de la liquidité de la Banque de France en lui vendant temporairement des actifs en euros dont le débiteur ultime est allemand, finlandais, portugais etc.

10 Les collatéraux protègent le prêteur du défaut de l'emprunteur mais l'exposent à un risque de second ordre sur les actifs de garantie. Les actifs les plus risqués doivent donc être soumis à des "haircuts" (surcollatéralisation) et, jusqu'à l'échéance, des appels (remises) de marge sont effectués quand le prix de marché diminue (augmente). D'autre part, les actifs qui ne sont pas cotés sur un marché ou dont le marché manque de liquidité doivent faire l'objet d'une valorisation sur la base de modèles ou du scoring effectué par la BC correspondante à partir d'informations non publiques. 11 De fait, ceux-ci sont sous-représentés dans les opérations de liquidité avec les BC car les établissements les réservent aux opérations interbancaires pour lesquelles ils constituent le sous-jacent le moins coûteux puisque le plus sûr.

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Ainsi ces actifs deviennent substituables et les préoccupations de liquidité des Etablissements de Crédit ne les conduisent plus à privilégier les actifs domestiques. Tous les actifs de la liste deviennent des actifs domestiques et apportent la même sécurité sur tous les marchés.

L'effet est d'autant plus fort que la BCE a défini de manière extensive les actifs et contreparties éligibles. Le "gisement" d'actifs de base est actuellement de l'ordre de €10000 milliards 12 et tous les Etablissements de Crédit assujettis aux Réserves Obligatoires y ont accès (environ 1700) 13. En outre, à travers la titrisation imparfaite (qui maintient la responsabilité du cédant) et le marché monétaire (qui redistribue la liquidité banque centrale), pratiquement toutes les créances et tous les établissements financiers sont connectés à ce large circuit central.

Comme la liquidité banque centrale polarise les marchés interbancaires, ceux-ci se dénationalisent 14.

Il ne faut pas avoir une vue trop simple de l'intégration financière et s'attendre à ce que l'union monétaire provoque très vite une consolidation générale et massive du secteur financier, avec une seule bourse de valeurs, des banques ouvrant des guichets partout, etc. On constaterait alors que ce n'est pas le cas. Mais l'intégration est à la fois moins spectaculaire et plus profonde : même si la distribution demeure nationale (pour des raisons liées à la réglementation et à la proximité), la base domestique du processus de production est désormais constituée par la zone euro.

Les opérations transfrontières, qu'elles portent sur des biens, des services ou des actifs financiers se dénouent par des règlements (flux monétaires). Tant qu'il est plus long, plus coûteux et plus risqué de faire un règlement transfrontières qu'un règlement interne, il y a préférence domestique. La question a deux aspects : règlements de montant élevé et règlements de détail. Ce dernier (SEPA en cours d'achèvement) ne concerne pas directement l'intégration financière quoiqu'il la facilite au niveau des petites opérations.

L'existence d'un système de règlement pour la zone euro est une précondition de l'union monétaire car le refinancement interbancaire à court terme se traduit par des flux énormes (l'équivalent du PIB annuel en 2/3 jours) qui doivent être aussi sûrs et rapides en transfrontières qu'en interne. Pour que le marché interbancaire ait la zone euro comme territoire domestique, il fallait une infrastructure domestique. C'est le système TARGET de l'Eurosystème 15 qui assure la

12 Ce gisement représente environ 1/3 du total des actifs financiers de tous types dans la zone euro et, potentiellement, bien davantage avec l'intégration en cours des crédits non négociables de qualité suffisante. 13 Même si, en pratique, les opérations de BC sont surtout pratiquées par les plus grand établissements, le fait que les petits aient le droit d'y accéder dans les mêmes conditions empêche qu'il y ait segmentation. 14 Pour le marché des pensions interbancaires (secured), la livraison transfrontières des garanties est freinée par l'intégration encore insuffisante des infrastructures post marché. 15 Initialement constitué par une interconnexion (interlinkage) des systèmes RBTR nationaux, il est devenu en 2008 un système unique qui ne fait plus de distinction entre règlement domestique et transfrontières intra-euro (Target 2). Target a pour champ les opérations en cash. Pour doter les opérations sur titres du même type d'infrastructure transfrontières, la BCE a ouvert un chantier parallèle, Target2Securities (T2S) : T2S reposera sur une plateforme technique unique intégrée

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fluidité parfaite et la sécurité maximale des règlements de montant élevé au sein de la zone à travers les comptes des banques à leur BC. Cette infrastructure domestique à l'échelle de la zone supprime la différence entre opération domestique et opération transfrontières, que son origine soit une transaction interbancaire ou une transaction sur les marchés des capitaux.

Concluons ce point : avant l'union monétaire, on envisageait 16 que celle-ci déclencherait une vague de fusions des acteurs qui consoliderait le secteur financier à l'échelle paneuropéenne. Dans cette ligne, l'échec des pourparlers entre les Bourses de Paris et Francfort et la fusion NYSE/Euronext, le caractère limité des fusions bancaires résultant de stratégies nationales ou mondiales plus qu'européennes, la fragmentation persistante des infrastructures relativiseraient l'intégration financière.

Mais, hors de vue du public, c'est l'activité bancaire et financière qui a été intégrée par la dynamique monétaire de la BCE. En Europe continentale, la finance est intermédiée par les banques. Or les banques sont des institutions monétaires et la monnaie est unifiée, non seulement en tant qu'unité de compte et moyen de règlement mais en tant que moyen de financement.

Néanmoins, il demeure une tension entre la dynamique monétaire intégratrice et la base historiquement nationale de l'activité financière (réglementation, régulation, infrastructures) et cette tension a été renforcée par la crise financière.

Si la dépendance des institutions financières et des marchés à l'égard de la liquidité de l'Eurosystème a intensifié la dynamique monétaire, la crise a revivifié les bases nationales (§2.1) et révélé leur fragilité (§2.2).

A l'échelle mondiale, ce thème est porté par l'industrie bancaire qui craint le retour à un régime de répression financière 17 . La fragmentation menacerait le marché unique 18 et l'on retrouve dans l'autre sens le lien entre la mondialisation financière et l'intégration européenne 19.

dans les systèmes de règlement brut en temps réel de banque centrale. Ce service fourni par l’Eurosystème aux Dépositaires Centraux de Titres permettra le règlement commun, neutre et transfrontalier d’opérations sur titres, sur la base livraison contre paiement en monnaie banque centrale (Cf. Orientation de la Banque Centrale Européenne du 21 avril 2010 relative à TARGET2-Titres (BCE/2010/2) (2010/272/UE), 12.5.2010 Journal officiel de l’Union européenne L 118/65). 16 Pratti, Shinasi, 1997 ; White, McCauley, 1997. 17 Institute of International Finance, 2009, Restoring confidence, creating resilience. La refragmentation est impulsée par le comportement des institutions financières (moindre asymétrie d'information sur le marché domestique) et par une "reréglementation" dont la coordination est problématique puisque chaque pays cherche à protéger les créanciers domestiques (dont les contribuables) en introduisant de manière contagieuse une approche "bottom-up" dans le traitement des banques internationales. Pour une discussion, voir Nguyen, 2010, "The banking market puzzle : would

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A l'échelle européenne, faute d"un "28ème régime" 20, le contrôle des activités transfrontières par le pays d'origine reste la base prudentielle du passeport unique (reconnaissance mutuelle). Or le "déficit de confiance" actuel entre pays d'origine et d'accueil est incompatible avec la reconnaissance mutuelle. Notons toutefois que si la crise a révélé les insuffisances du dispositif prudentiel européen, elle a aussi révélé celles de tous les dispositifs nationaux et transfrontières (home/host). Il serait donc erroné d'en faire un problème spécifiquement européen.

On a parlé de "renationalisation" à propos des effets de l'action de la Commission contre les distorsions de concurrence provoquées par les aides publiques : le droit de la concurrence a conduit la Commission à exiger de certains établissements des cessions de participations internationales et des déconsolidations (voir le cas d'ING en particulier 21), sans distinguer les positions extérieures au sein de la zone euro et les positions "extérieures extérieures" 22.

Mais ce point ne concerne que quelques établissements et ne peut pas être tranché commodément. Par contre, la crise a provoqué l'intervention des Etats qui ramène (temporairement ?) à la différenciation car la nationalité des Institutions financières importe à nouveau, depuis qu'on s'est souvenu qu'elles sont "global in live, national in death" 23 ou, plus précisément, que, pour les groupes bancaires exerçant une activité mondiale à travers des filiales intégrées, les actifs sont globaux mais les passifs nationaux.

Plus généralement, alors qu'avant la crise, on ne se souciait pas des différences dans les montants et les modalités de l'assurance des dépôts (tout juste encadrée a minima par une directive), c'est devenu une question de survie. De plus, l'extension rapide des protections pour éviter la panique a exigé des garanties publiques c'est-à-dire nationales. Ainsi, outre les apports directs (recapitalisations) et indirects (garanties d'emprunt) des Etats, ceux-ci (ou plutôt chacun d'entre eux) portent la stabilité financière.

coming closer a stand-alone subsidiary model automatically lead to cross-border refragmentation?", NBB, Financial Stability Review. 18 Risque également noté par la BCE : "Euro area banking activities were profoundly affected by the crisis, primarly as a result of increased lending and funding risks but also as a consequence of governement support and regulatory initiatives being confined within national borders" (Financial integration in Europe, 2010, p 26). 19 Au cours des 7 derniers trimestres (finissant Q4/2009), les avoirs bancaires internationaux ont diminué de $5024 milliards, soit une contraction de 12% (suite notamment au repli de l'interbancaire) par rapport au niveau record de la fin mars 2008 (BRI). 20 Dont la nécessité (à défaut de la plausibilité) est argumentée en détails dans Fonteyne et al, 2010. 21 Les Echos, 2009, ING se restructure de fond en comble sous la pression de Bruxelles, Les Echos 27/10/09 22 "We have not seen much pan-European dynamics in cross-border banking recently. And I fear that, in this crisis, some of the demands coming out of the competition department of the European Commission have been aimed at refocusing banks on their national credit and lending operations rather than fostering their pan-European endeavours. For a European bank, foreign subsidiaries are non-EU subsidiaries. I find it surprising – to say the least – that European institutions view cross-border operations within the EU as foreign operations. For me, the euro area is the domestic economy. There should be no discrimination whatsoever in terms of banking organisations or banking industry investment decisions taking place anywhere within this domestic economy called the euro area." Transcript of FT interview with Axel Weber, president of the Bundesbank, April 21 2009 23 Cette formulation, aujourd'hui célèbre, est généralement attribuée à Mervyn King, gouverneur de la Banque d'Angleterre

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En effet, si le prêteur en dernier ressort (illiquidité) est communautaire (BCE), le "payeur en dernier ressort" (insolvabilité) est le contribuable et, dans l'UE, ce contribuable reste national. D'où, malgré les tentatives de coordination, une diversité des mesures de soutien et de garantie, parfois distorsifs, sinon dans leurs mobiles du moins dans leurs effets (Irlande 30/09/2008) qui conduisent les déposants à devoir s'interroger sur le degré de protection direct et indirect dont ils bénéficient et donc à se préoccuper à nouveau de la nationalité de leur banque, question qui avait disparu. Comme l'asymétrie d'information est moindre pour les banques nationales que pour les banques étrangères, il en résulte un biais domestique 24, les établissements résidents redeviennent préférables aux non résidents.

Cela va plus loin : les établissements financiers étant à présent portés par leurs Etats, leur solvabilité et la confiance qu'ils inspirent devient liée à celle de leur Etat car les passifs privés sont potentiellement des passifs publics.

Et plus encore, le lien des passifs est redoublé du côté des actifs puisque la "fuite vers la qualité" a poussé les banques a acquérir des titres publics 25.

Dans un premier temps, les Etats, même endettés sont apparus beaucoup plus sûrs que les banques mais le "Dubai shock" (fin novembre 2009) a attiré l'attention sur les finances publiques, les insuffisances grecques l'ont dramatisé au sein de la zone euro et la corrélation croissante entre les primes de risque des banques et celle de leur Etat (primes de CDS) a débouché sur un alignement des premières sur les secondes 26.

Le système financier de la zone euro est exposé à un risque de fragmentation : les banques résidentes des Etats les plus contestés présentant un risque perçu plus élevé, le coût de leur financement augmente et, éventuellement (mai 2010), les autres banques éprouvent des réticences à leur prêter. Reparaît alors le danger de dislocation de l'interbancaire si laborieusement repoussé après l'épisode Lehman Brothers.

Pis encore, la dégradation de la qualité perçue des dettes publiques (et des dettes privées liées) de certains pays menace leur utilisation comme collatéraux 27, ce qui priverait les banques

24 Quoiqu'extérieur à la zone euro, le cas islandais (EEE) porte à son paroxysme une grave difficulté : si les filiales relèvent en principe du pays "host", les succursales à l'étranger relèvent du pays "home" et lorsque les filiales sont opérationnellement intégrées à leur groupe, la surveillance consolidée par le pays home devient essentielle. C'est donc la capacité du pays home à superviser et, le cas échéant à sécourir, les activités transfrontières de ses groupes bancaires qui conditionne leur réputation et leur note de crédit. 25 Fonteyne et al, 2010, p20 : "The perception that banks are backed by their governements makes them vulnerable to the fiscal situation of these governements, in addition to the exposures to their governements that they carry on their balance-sheet...this implies a risk of fiscal problems adverseley affecting banks and trigerring a twin fiscal-financial crisis which can originate on the financial as well as the fiscal side". 26 ECB, 2010, May, Financial Stability Report , box 9 public debt, sovereign risk and corporate financing costs: possible spillover channels, p77. 27 Sur le marché interbancaire des pensions (secured market), les titres publics sont le principal collatéral. Le rapport trimestirel de la BRI de Juin 2010 note qu'une diminution de la liquidité des marchés de pensions sur obligations au Portugal, Espagne et Irlande a été observée à la suite de la crise grecque.

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de financement et minerait la substituabilité des actifs au sein de la zone qui, nous l'avons montré supra, est le cœur de l'intégration financière.

C'est ce qui explique les récentes décisions extraordinaires de la BCE, à commencer par celle de continuer à admettre la dette publique grecque en collatéral même au-dessous du seuil critique de notation 28. Outre la défiance cachée à l'égard des Agences de notation et la confiance affichée à l'égard du plan de redressement grec, cette décision traduit la volonté de la BCE de forcer la substituabilité des actifs au sien de la zone pour prévenir sa fragmentation.

Il en va de même de la décision plus récente et encore plus extraordinaire d'acheter des titres de dette privée et publique sur le marché secondaire pour en maintenir la fluidité et l'homogénéité intra-euro (Securities Markets Programme) 29

. Même si ce n'est en rien un renflouement de tel ou tel Etat 30 et si ce type d'intervention, largement pratiqué au cours de la crise par d'autres banques centrales de première importance, est justifié par le maintien du cadre

28 Un élargissement des garanties avait déjà été décidé pour une durée limitée en octobre 2008 (Règlement (CE) No 1053/2008 de la Banque Centrale Européenne du 23 octobre 2008 contenant des modifications temporaires aux règles applicables à l’éligibilité des garanties BCE/2008/11, JOUE 25/10/2008) faisant notamment descendre le seuil critique de A à BBB-. La dégradation par Fitch de la note de la Grèce à BBB- avec perspective négative menaçait l'éligibilité de la dette publique grecque. En réponse, la BCE suspend temporairement son critère d'éligibilité pour la dette publique grecque (Communiqué du 3 mai 2010: La BCE annonce la modification de l'éligibilité des titres de créance émis ou garantis par l'État grec). Toutefois, le communiqué ne précise pas les précautions dont s'entoure la BCE (valorisation, haircuts et modalités des appels de marge). 29 Mesures adoptées par la BCE pour faire face aux graves tensions sur les marchés financiers, communiqué de la BCE, 10 mai 2010. Ces achats sont inscrits à la rubrique 7.1 du bilan financier consolidé hebdomadaire (weekly financial statement) de l'Eurosystème. Au 12/06/10 ils atteignent 46 mm€ (http://www.ecb.int/press/pr/wfs/2010/html/fs100601.fr.html). On ne sait pas si les titres ainsi acquis seront conservés jusqu'à l'échéance ou sont susceptibles d'être revendus. Les raisons de ces mesures sont les suivantes (Hearing at the Economic and Monetary Affairs Committee of the European Parliament, Introductory statement by Jean-Claude Trichet, President of the ECB, Brussels, 21 June 2010) : "Let me now turn to the Governing Council’s decision to intervene in euro area debt securities markets, announced on 10 May following abrupt and very severe increases in financial market tensions throughout the world, but especially in Europe. Those tensions were spreading to a wide range of financial market segments, including the stock market, the interbank market and the foreign exchange market. It was observed that the epicentre of these tensions lay in European debt markets, in particular those for government debt. "Overall volatility in markets increased sharply and liquidity conditions deteriorated significantly, not only in sovereign bond markets, but also to a critical degree in the money markets. Transactions within the interbank market declined rapidly and uncertainty among banks about counterparties’ creditworthiness increased. "There was therefore a risk that the normal functioning of markets and the first link in the transmission mechanism of monetary policy between the central bank and credit institutions could become impaired." 30 Une partie de la presse allemande a soutenu que le soutien de la BCE à la Grèce s'expliquait par le souci du français Trichet d'éviter des pertes aux banques françaises. Non seulement c'est une décision collective mais l'exposition de toutes les banques de la zone euro à la dette publique des 4 pays sous pression (GR, SP, IE, PT) ne représente que 16% de leur exposition globale à ces pays. Plus précisément, les créances des banques françaises sur le secteur public grec se montent seulement à €31mm et celles des banques allemandes à €23mm (BRI). De l'autre côté du Rhin, certains ont ironisé à propos des ventes de voitures allemandes à la Grèce et critiqué la posture exagérément exportatrice de l'Allemagne. Au-delà de la démagogie, ce genre de propos illustre les tensions au sein de la zone.

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d'action de la politique monétaire 31, c'est une décision spectaculaire qui, exceptionnellement, n'a pas été prise à l'unanimité mais à une "large majorité" et qui, encore plus exceptionnellement, a fait l'objet d'observations publiques de la part du Président de la Bundesbank Axel Weber. Ce dernier craint les risques financiers auxquels s'expose l'Eurosystème en achetant des titres de mauvaise qualité et réclame un strict plafonnement de ces interventions. Il souligne à juste titre les risques de réputation encourus par la BCE en ce qui concerne son indépendance et sa politique monétaire. Les réponses de Trichet (cf. par exemple l'interview publié dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung du 21/05/2010) sont convaincantes, quoique le fait même de devoir argumenter affaiblisse la crédibilité de la BCE. Le comportement de Weber est troublant : il affecte de croire que ces interventions auront un impact inflationniste (alors qu'elles sont stérilisées) et n'évoque pas le danger de dislocation de l'interbancaire. Plus troublant encore, il ne s'est pas conformé aux règles de comportement de la BCE (responsabilité collective du Conseil).

Depuis le premier rapport Werner de 1970 il est établi, econformément à la théorie économique, que, au-delà des facteurs monétaires, la soutenabilité de l'union monétaire exige une discipline budgétaire commune des pays membres et donc, dans le dispositif institutionnel de l'UE, un mécanisme efficace de surveillance multilatérale que dessinait le Pacte de stabilité.

Sans entrer dans les détails, si le Pacte a réussi en tant que mécanisme de concernement collectif, il a échoué en tant que dispositif disciplinaire 32. Aussi, certains Etats ont "voyagé en 1ère classe avec un ticket de 2nde" et utilisé la bonne monnaie commune pour émettre de mauvaises dettes : puisque les titres publics en euros devenaient substituables, les Etats (surtout les plus petits) ont bénéficié d'un marché large et de l'augmentation du nombre de souscripteurs 33.

Avant l'union monétaire, les taux d'intérêt (rendement) des emprunts publics différaient largement sous l'effet des écarts de leurs fondamentaux (finances publiques) et de leurs

31 Voir l'article de fond "La transmission de la politique monétaire dans la zone euro, dix ans après l’introduction de l’euro", Bulletin BCE de Mai 2010. 32 D'une part, il était mal compris et nombreux étaient ceux qui le dénonçaient comme un "carcan déflationniste" ; d'autre part, l'inter-gouvernementalisme revenait à faire "juger les pêcheurs présents par les pêcheurs futurs" (Von Hagen). Enfin, le climat expansionniste à partir de 2003 rendait la plupart des gouvernements insouciants ou euphoriques. Lorsque les gouvernements français et allemand ont intrigué en 2004 pour se soustraire à la procédure de déficits excessifs, le Pacte a perdu sa crédibilité. Les propositions de la Commission pour le renforcer n'ont pas été suivies et la réforme de 2005, en rendant le Pacte "plus intelligent", a multiplié les possibilités d'échapper à la discipline. La BCE qui n'a cessé d'insister sur la nécessité de rétablir un équilibre tendanciel des finances publiques disait pudiquement que cette réforme "améliore les moyens tout en dégradant l'objectif" (BCE, 2005, "La réforme du PSC", Bulletin, août). De son côté, la Commission prêchait dans le désert en faveur de la "qualité" des dépenses publiques et de la soutenabilité à long terme des finances publiques (Rapports annuels "EMU and Public Finances"). Faisant preuve d'un court-termisme qui justifie tristement l'approche des finances publiques en termes de cycles électoraux, la plupart des gouvernements ont exploité l'union monétaire en même temps qu'ils en affaiblissaient les conditions. 33 Les Compagnies d'assurance et Fonds de pension sont soumis à titre prudentiel à des contraintes d'emploi de leurs ressources et ne doivent pas dépasser certains seuils d'exposition en actifs étrangers que la "domestication" des titres en euro fait sauter. De l'autre côté, pour les souscripteurs non résidents, l'union monétaire a un effet d'échelle puisque le risque monétaire est global.

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conditions monétaires (inflation et taux de change). En supprimant les différentiels macromonétaires intrazone (taux de change et taux d'intérêt à court terme), l'union monétaire a normalement engendré une convergence des taux d'intérêt à long terme (rendements).

Cette convergence a apporté deux surprises : elle ne s'est pas faite vers la moyenne mais vers le haut, les écarts avec le benchmark que constituent les titres allemands diminuant et elle est allée pratiquement jusqu'à l'égalisation des taux. Ainsi, en général, l'économie des autres pays a bénéficié des taux allemands, ce qui a diminué le coût de leur financement à moyen-long terme (investissement). En particulier, les Etats ont financé leurs déficits pratiquement au même coût que l'emprunteur de référence que constitue l'Etat allemand.

A partir de 2004 et même avant quand il est apparu que les efforts consentis pendant la phase de transition ne se poursuivaient pas et que le Pacte de Stabilité était inefficace, les différences dans les positions fondamentales des finances publiques des Etats membres auraient dû se traduire par une différenciation des taux d'intérêt. Ca n'a pas été le cas et, jusqu'en 2007, les écarts sont restés faibles et correspondaient principalement à des différences de liquidité : début 2007, alors que le déficit (officiel) de la Grèce était, en %PIB, le double de l'allemand et la dette publique 40% au-dessus de l'allemande, l'Etat grec à 10 ans ne payait que 0,06% au-dessus du taux de l'Allemagne.

Nul ne s'étonne que des dettes privées de qualité différente soient affectées de primes de risque différentes, ce n'est pas un dysfonctionnement du marché, au contraire, c'est un fonctionnement efficace. Curieusement, nul ne s'étonnait de des dettes publiques de qualité différente aient la même prime de risque.

Cette situation n'était ni correcte ni souhaitable. Elle s'expliquait, d'un côté, par la conjoncture financière mondiale qui, sous l'effet de l'excès de liquidité et/ou de l'excès d'épargne manifestait un appétit exagéré pour le risque dont le prix était abusivement sous-évalué (écrasement des spreads) et, d'un autre côté, par une "illusion macro-monétaire" : pour un investisseur extérieur à la zone, les dettes publiques étant à présent libellées dans la même monnaie semblaient identiques.

Une expérience constante montre que la "discipline des marchés" ne s'exerce pas en continu mais suit un cycle de sous-réaction/sur-réaction. Tant que les marchés financiers en euro ne distinguent pas correctement selon la qualité des débiteurs, ils ne sont pas "normaux". Et si tout marché normal est déjà potentiellement pathologique, un marché anormal est au bord de l'hystérie.

Il est heureux, il était nécessaire, que la question des finances publiques soit enfin prise au sérieux mais il n'est pas certain que les gouvernements aient vraiment compris le problème et qu'ils ne se limitent pas à gagner du temps en attendant le père Noël (le retour de la croissance) : une union monétaire sans fédéralisme budgétaire (c'est-à-dire sans union politique) ne peut pas tenir sans une forte contrainte sur les soldes budgétaires 34.

34 Trichet (Interview Le Monde 31/05/10) : "We are a monetary union. We now need the equivalent of a fiscal union in terms of monitoring and supervising the implementation of policies on public finances". Les finances publiques

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Ceci ayant été oublié, l'intégration des marchés financiers (titres de dette) a eu des effets pervers en facilitant exagérément (dans un climat mondial laxiste) les déficits budgétaires 35 qui, en retour, menacent aujourd'hui l'intégration financière et peut-être même l'union monétaire. Non seulement, cet effet pervers avait été prédit mais il avait été combattu à l'avance en instituant le Pacte de stabilité. Mais qui garde les gardiens ? La BCE étant limitée à donner des avis, il n'y a que la Commission. A défaut d'un renforcement des pouvoirs de surveillance et de sanction de la Commission, les gouvernements laxistes continueront à s'entendre pour tricher au prix d'une dégradation des conditions communes et d'oppositions accrues avec les gouvernements vertueux. Les bonnes réponses existent 36 mais, comme les données du problème restent les mêmes (jeu non coopératif), il est à craindre que la "Task Force" Van Rompuy ne parvienne pas à révolutionner la gouvernance de la zone euro.

Que les marchés discriminent entre les différentes dettes n'affecte pas l'intégration financière 37. Nous serions tenté de dire "bien au contraire". Les dommages collatéraux que la soudaineté et la brutalité de cette discrimination occasionnent à la liquidité bancaire ont, comme on l'a vu, été traités par la BCE.

Si la BCE n'a pas de responsabilité directe à l'égard des marchés financiers, elle a magistralement assuré au cours de la crise le bouclage de la liquidité des marchés en euro 38 et

nationales des pays membres de l'union monétaire sont autonomes au sens où chaque pays décide de ses recettes et de ses dépenses (préférences collectives) tant qu'elles sont tendanciellement équilibrées. La condition de l'autonomie est l'équilibre. En déficit excessif, les finances publiques d'un pays de l'union monétaire deviennent un problème collectif. 35 Ainsi que les déficits persistants de balance courante, en atténuant la pression au rétablissement de la compétitivité. 36 Pour une réponse communautaire a maxima, voir ECB, Reinforcing economic governance in the euro area , 10 June 2010. Pour une réponse nationale a minima, voir Wyplosz, "The debt crisis and the treaty", in Euro Area Governance - Topic 1 - Monetary Dialogue June 2010, Parlement européen. 37 "...in a monetary union, sizeable bond yield spreads may not indicate lack of market integration but market participants’ judgement on relative sovereign credit risks. It is a salient feature of an integrated bond market that investors can easily change their positions among different sovereign securities whenever the credit risk outlook changes. Hence, a widening of sovereign bond yield spreads, reflecting changes in perceived credit risks, does not necessarily signal a reduced degree of market integration." Lucas Papademos, Speech delivered at the conference “Financial integration and stability: the legacy of the crisis” sponsored and organised by the European Central Bank and the European Commission, Frankfurt am Main, 12 April 2010. 38 A partir de l'été 2007, l'Eurosystème a admirablement géré la crise de liquidité bancaire provoquée par l'assèchement de compartiments importants des marchés financiers, la peur du risque et la défiance généralisée entre banques. Le dispositif d'intervention de la BCE s'est trouvé particulièrement adéquat puisque les actifs et contreparties éligibles avaient été, dès le début, définis de manière extensive et que les instruments permettaient de dissocier la politique macro-monétaire de stabilité des prix (n'oublions pas les extrêmes tensions inflationnistes de 2007) et la liquidité bancaire. En servant toutes les demandes à taux fixe à partir d'octobre 2008, l'Eurosystème a limité la concurrence destructrice entre banques sans, pour autant, menacer la stabilité des prix future puisque ces apports sont temporaires (même si les échéances ont été allongées à 1 an pour diminuer la pression à court terme). De ce fait, le doublement du bilan consolidé de l'Eurosystème n'est pas un problème. Le seul problème (mais la BCE le partage avec les autres BC) réside dans les risques de pertes financières auxquels l'Eurosystème a dû s'exposer. Si ces risques se concrétisaient, ils

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même, à travers les accords de swaps passés avec le Federal Reserve Système, le bouclage de la liquidité en dollar des banques de la zone euro 39.

Cette "intensification" de l'union monétaire commence néanmoins à effriter la cohésion de l'Eurosystème (ce que traduit peut-être l'incident Weber) et rencontre le problème de périmètre évoqué au début de cet article puisque le marché unique des services financiers a pour périmètre l'EEE à 30 : si les problèmes d'harmonisation et surtout de régulation sont communs aux 30, ils ont une acuité et une profondeur particulière dans la zone euro à 16. Or celle-ci, à part le pouvoir réglementaire de la BCE, n'a pas d'instrument législatif.

Il en résulte que les problèmes institutionnels urgents de la sphère monétaro-financière de l'euro avancent au rythme du marché unique et sont bloqués par la résistance (éventuellement justifiée) d'outsiders qui ne se réduisent pas au Royaume-Uni. Souvenons-nous, pour illustration, des palinodies qui ont suivi le rapport De La Rosière 40 et ses préconisations phares consistant à mettre en place un European Systemic Risk Council [ESRC]41 présidé par la BCE et à transformer les Comités Lamfalussy de niveau 3 (superviseurs) en véritables "autorités européennes" constituant un European System of Financial Supervision (ESFS) 42. En particulier, la place de la BCE dans l'ESCR et le pouvoir d'arbitrage de l'ESFS ont été contestés par les outsiders.

Dans son principe, l'UEM fait partie de l'acquis communautaire et les dérogations sont transitoires de sorte que les périmètres finiraient par coïncider et l'union monétaire cesserait

auraient un effet négatif sur la cohésion de l'Eurosystème (consolidation et partage des pertes) et, dans une certaine mesure, sur l'indépendance des BCN (dont les Etats devraient alors augmenter le capital). 39 La structure bilancielle des actifs/passifs en USD des Etablissements de crédit de la zone euro les rend dépendants du renouvellement de leurs emprunts à court terme sur les marchés monétaires en dollar externes (eurodollar) et interne (commercial paper). L'assèchement de ces marchés et la défiance à leur encontre ont provoqué un "dollar shortage" (Baba, McCauley, Ramaswamy, 2009, "US dollar money market funds and non-US banks" et McGuire, von Peter, 2009, "The US dollar shortage in global banking" in BIS Quarterly Review, March 2009 ; Coffey, Hrung, Nguyen,Sarkar, 2009, "The Global Financial Crisis and Offshore Dollar Markets", Current issues, Federal Reserve Bank of New York, Volume 15, Number 6, October 2009). 40 De La Rosière (High-Level Expert Group), Report on Financial Supervision in the EU, 25 Février 2010. 41 The Group considers the new body should be set up under the auspices of the ECB, and chaired by the President of the ECB. It will be composed of the members of the General Council of the ECB, the Commission plus the Chairs of CEBS, CEIOPS and CESR. Insurance and securities supervisors will be brought in where necessary. Its role will be to gather information on all macroprudential risks in the EU. It shall have access to all necessary macro and micro information and issue risk warnings on which there would be mandatory follow-up and monitoring by EU supervisors. If the risks were very serious they should be taken up by the EFC, working with the Commission, to address the risks. The ESRC will work closely with the IMF, FSF, G20 at global level. 42 This covers microprudential supervision (the supervision of firms). The 3L3 Committees (CEBS, CEIOPS, CESR) will be each transformed into 3 new European Authorities (the European Banking Authority; the European Securities Authority; and the European Insurance Authority). These Authorities will have a considerably expanded role compared to the current L3 Committees including some legal powers. The main additional tasks of the Authorities on top of the competences of the existing level 3 committees, will be the following: (i) legally binding mediation between national supervisors; (ii) adoption of binding supervisory standards; (iii) adoption of binding technical decisions applicable to individual institutions; (iv) oversight and coordination of colleges of supervisors; (v) licensing and supervision of specific EU-wide institutions (e.g. Credit Rating Agencies and posttrading infrastructures); (vi) binding cooperation with the ESRC to ensure adequate prudential supervision; and (vii) strong coordinating role in crisis situations.

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d'être un ilot. Il est à craindre que ce recoupement progressif se transforme en télescopage et que l'intégration financière dans la zone euro ne souffre de cette malformation géographique de naissance qui est restée cachée tant qu'il faisait beau.

Si l'intégration des marchés financiers dans la zone euro au cours des dix dernières années est, dans une certaine mesure, indépendante de l'euro (mondialisation et marché unique), elle est, en profondeur, engendrée par l'union monétaire qui transforme les actifs transfrontières en actifs "domestiques". Par mauvais temps aujourd'hui, cette dynamique monétaire se heurte à sa dégradation interne (finances publiques) et à sa dépendance à l'égard d'un processus institutionnel plus large. Ou bien la crise passe et la dynamique monétaire reprend sur une base renforcée (BCE), ou bien elle s'élargit encore 43 (des dettes publiques de petits pays périphériques à celles des Etats-Unis) et, pour échapper à la décomposition, la zone euro devra s'approfondir au risque de créer une fracture en les ins et les outs.

43 Le dernier rapport trimestriel de la BRI (Juin 2010) note que, malgré des similitudes apparentes avec l'épisode Lehman-Brothers (liquidité), le présent épisode ressemble davantage aux premières phases de la crise des subprime : lente dégradation, pertes progressives, asymétries d'information, et ainsi de suite peut-être.

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monétaire obligataire actions crédit Observations " Financial integration is of key importance for the conduct of the single monetary policy as a well-

intergrated financial system enhances the smooth and effective transmission of monetary policy impulses throughout the Euro Area" L'intégration est soutenue par les instruments de transfert du risque de crédit (CRT) qui augmentent la complétude des marchés. Dans l'autre sens, elle est freinée par la fragmentation des infrastructures de marché et de post marché.

Indicateurs de prix

* prêts en blanc (unsecured), la dispersion moyenne transfrontières ( ) de l'EONIA est passée de 270 bp en 1996 à 100 bp en 98 et, depuis 99, elle est entre 1 et 3 bp. * pensions (secured), la dispersion moyenne du Repo 1M est, depuis 99, comprise entre 0,5 et 1 bp.

* titres publics : la dispersion moyenne transfrontières ( ) des rendements est passée de 275 bp en 1995 à moins de 25 depuis 99 (avec un ß proche de 1).45 * corporate : la variance des spreads ne s'explique que faiblement par des "country effects"

la part de la variance des rendements expliquée par des chocs propres à la zone (vs chocs américains) est passée de 15% pour la période 86/91 à 23% pour 92/98 et 37% pour 99/06

(retail) : la dispersion moyenne transfrontières intrazone des taux des crédits à la consommation est entre 100/200 bp et celle des crédits au logement entre 20/40 bp

Indicateurs de quantité

la part des TCN à CT émis par des résidents d'un pays de la zone et détenus par des résidents d'autres pays de la zone reste faible (12% en 2005 vs, il est vrai, 4% pour l'extrazone)

la détention transfrontières intrazone de TCN LT est passée de 10% en 1997 à 60% en 2007 (vs moins de 10% pour l'extrazone)

la détention transfrontières intrazone a été multipliée par deux à 29% des PF (vs 5% pour l'extrazone) 46

les avoirs des IFM domestiques sur les IFM des autres pays de la zone sont passés de 12% en 1997 à 31% en 2006 mais prépondérance des filiales 47

Intégration parfaite forte en progrès (infrastructures)

Retail : faible Wholesale : croissante

44 ECB, 2007, Financial integration in Europe : pour chaque secteur du système financier, le rapport essaye de trouver des indicateurs de prix et de quantité sans pouvoir être totalement exhaustif et cohérent. Il en découle une vue cavalière du processus, avec des zooms sur certains détails. 45 Les différences sont liées aux conditions d'émission et aux écarts de qualité qui n'affectent pas l'intégration : "differences in perceived credit risks should not be seen as an indicator of a lack of integration". 46 D'après Lane 2008 à partir de l'IMF Coordinated Portefolio Investment Survey, le % d'intrazone dans les PF d'actifs transfrontières détenus par les résidents est passé (moyenne des données nationales) de 42,9% en 1997 à 61,6% pour la dette et de 44,0% à 53,9% pour les actions. 47 La valeur médiane de la part des actifs des filiales dans le total des actifs bancaires est de 15% vs 2% pour les succurusales.

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48 ECB, FSR, May 2010, BOX 9 PUBLIC DEBT, SOVEREIGN RISK AND CORPORATE FINANCING COSTS: POSSIBLE SPILLOVER CHANNELS, p77

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