28

John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

  • Upload
    others

  • View
    8

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre
Page 2: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

John Rawls

et la théorie de la justice

Page 3: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

Actuel Marx Confrontation

Page 4: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre
Page 5: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

Déjà parus dans la collection :

Fin du communisme ? Actualité du marxisme ? L'idée du socialisme a-t-elle un avenir?

Le nouveau système du monde Les paradigmes de la démocratie La crise du travail

Dessin de couverture par Béatrice Tabah, d ' a p r è s l ' œ u v r e d e M a r c CHAGALL,

Paix aux chaumières, guerre au palais, Vitebsk, 1918-19

ISBN 2 13 047141 2

ISSN 1158-5900

Dépôt légal — 1 édition : 1995, mai

© Presses Universitaires de France, 1995 108, boulevard Saint-Germain, 75006 Paris

Page 6: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

Envoi

- «Agis de telle sorte que ton bon plaisir s'accorde avec celui d'autrui selon une règle universellement acceptable», dit le Sphinx.

- Œdipe : «Ton énigme est obscure. L'énoncé est si bref et si plein. Comment débrouillerais-je tous les fils ?».

- «Tu as droit à trois phrases», dit le Sphinx.

- Œdipe réfléchit longuement et dit : «Les libertés les plus larges seront

assurées semblablement à chacun. Toutes les places seront effectivement

ouvertes à tous. Toutes choses et puissances seront

également partagées, si ceux qui ont moins n'en jugent autrement ».

- «C'est bien cela», dit le Sphinx, catégo- rique. «Mais il ne suffit pas d'en rêver. L'impératif est d'agir et d'instaurer».

- «Malheureux Œdipe ! dit le chœur. Voile-toi la face. L'insupportable crève les yeux».

Page 7: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

Ce livre est pour une large part issu d'une collaboration avec Annie Mordrel-Bidet, qui ne partage pas nécessairement les opi- nions qui y sont exprimées, mais avec laquelle son contenu a été point par point discuté, de façon souvent contradictoire. Je lui dois nombre de suggestions, de clarifi- cations et de rectifications.

Le manuscrit a été revu par Sonia Feltesse, à laquelle j'adresse mes remerciements.

Page 8: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

INTRODUCTION

Il aura fallu seize années pour que l'ouvrage principal de Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre temps, dans le cadre du débat suscité par son livre, l'auteur fit paraître de nombreux articles, dont les plus importants ont été refondus en un second grand ouvrage, Political Liberalism, 1993. On peut lire la plupart d'entre eux dans le recueil Justice et démocratie, paru en langue française la même année. Il s'agit, pour l'essentiel, d'une discussion de la théorie présentée en 1971, qui lève certaines ambiguïtés et marque une évolution sur quelques points majeurs. Il existe également un document parallèle, de caractère didactique, Justice as Fairness, dans lequel l'auteur présente, de façon parfois plus tranchée et plus explicite, les mêmes analyses*.

* On utilisera les sigles suivants : - TJ pour Théorie de la justice, Seuil, 1987, - PL pour Political Liberalism. Columbia University Press, 1993, - JD pour Justice et démocratie, Seuil, 1993, - J F pour Justice as Fairness, A Restatement, polycopié, Harvard University,

Cambridge, 1990.

Page 9: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

On peut se demander à quoi bon lire Rawls. Qui construit l'utopie d'une société juste, sans se demander (si ce n'est en termes assez formels) comment, dans le monde d'aujourd'hui, se produit et se reproduit l'injustice. Qui semble attendre du tableau, édifiant, de la « société bien ordonnée » qu'il motive les humains à tenter de s'en rapprocher. Qui donne priorité à la liberté sur l'égalité, comme si l'on pouvait séparer l'une de l'autre. Qui semble admettre que l'inégalité est légitime, dès lors qu'elle est profitable au grand nombre. Qui tend à dissoudre les conflits humains en affrontements d'idées, de cultures, voire de doctrines.

Il y a du vrai dans ces critiques, couramment adressées à Rawls. Elles ne sauraient cependant suffire à le disqualifier. Son propos est certes souvent difficile à cerner, et surtout à apprécier. Mais c'est parce qu'il combine plusieurs traditions théoriques distinctes, et qu'il affronte, en engageant des catégories et des approches nouvelles, les questions les plus fondamentales.

C'est bien à juste titre qu'il fait figure, dans la philosophie politique contemporaine, de référence majeure. Son œuvre, la plus novatrice depuis des décennies, réalise en effet la première jonction forte du contractualisme et de l'utopie sociale. Et cette conjonction est productive. Elle modifie l'état des lieux de la philosophie et de la politique.

La conceptualité rawlsienne fait interférer et travailler ensemble une éthique anglo-saxonne, où Hume et Mill occupent une place de choix, une épistémologie marquée par l'indivi- dualisme méthodologique et l'économie néo-classique, une conception métaphysique de la personne qui se réclame de Kant, des idéaux politiques inspirés du libéralisme et des préoc- cupations sociales héritées du socialisme. Mais on ne saurait apprécier l'intervention de Rawls si on ne la réfère pas en même temps au contexte d'une Amérique où les questions juridiques occupent depuis l'origine une place privilégiée dans l'espace public, et plus spécifiquement au climat social et politique des années soixante, celles des luttes pour les droits civiques, et de l'essor du Welfare State, où s'affirme, serait-ce sous une forme atténuée, l'idée social-démocrate.

Il serait désastreux qu'il arrive à Rawls la même mésaventure qu'à Weber, dont la réception en France fut telle qu'il y demeura pendant un demi siècle l'otage de la pensée

Page 10: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

conservatrice. On peut, avec Rawls et grâce à lui, penser au-delà de lui et contre lui. Rawls, comme tout vrai philosophe, introduit dans la culture théorique des concepts nouveaux. Mais il ne peut en être considéré comme le propriétaire, ni même comme l'interprète ultime. Car ces concepts ont d'autres implications que celles qu'il leur prête, et sont appropriés à d'autres perspectives que celles qu'il envisage.

Je tenterai de montrer lesquelles. Le présent ouvrage, qui est issu d'un cours destiné à des étudiants de philosophie, a cepen- dant d'abord pour objet un exposé aussi clair que possible de la théorie de Rawls, ouvrant à la discussion de ses éléments essen- tiels. Je ne m'y propose nullement de présenter mes propres conceptions de la société ou de la « question de la justice ». Celles-ci n'apparaîtront que dans la mesure où c'est à partir d'elles que j'interroge la construction de Rawls, donc de façon seulement indirecte et implicite. Et ce n'est qu'en conclusion que j'en viendrai à certaines propositions visant à la réinterprétation des principes rawlsiens dans un autre contexte conceptuel. Mais l'objet de ce livre n'est pas de présenter une théorisation alternative.

Je suivrai, dans ses grandes lignes, le plan de Théorie de la justice, qui propose en effet, en même temps qu'un cercle hermé- neutique, un exposé systématique, dont l'ordre détermine à chaque moment la pertinence des concepts utilisés. Rawls part de la conscience moderne, « d'un certain nombre d'idées de base familières, implicites à la culture politique publique d'une société démocratique » (PL 43). Ou plutôt, il commence par la prise en considération critique des « jugements bien pesés » de cette conscience commune. Il détermine les « idées intuitives » qui y sont impliquées ; et, par un travail d'explicitation et de clarification, il les reformule en une conception cohérente, qui se résume dans des « principes de justice ». Après quoi, à travers l'expérience théorique de la « position originelle », il établit, par une épreuve argumentative, que ceux-ci seront préférés à tout autre conception moderne de la justice (notamment à la conception censément dominante, l'utilitarisme). Puis il montre quelles conséquences on doit en tirer pour l'élaboration des institutions politiques et économiques. Il manifeste qu'une société ainsi constituée est « stable », c'est-à-dire tend à se repro- duire en tant que système juste de coopération. A chaque stade

Page 11: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

du développement de l'exposé, et notamment à son terme, il s'assure que l'élaboration théorique est en conformité avec les intuitions initiales, et il ne se dit satisfait que lorsqu'un « équi- libre réfléchi » s'est établi entre le point de départ, les jugements bien pesés, et le terme, la conception explicite.

Mon analyse tient compte, sur chaque point, de l'évolution de la conception de Rawls et des clarifications qu'il apporte dans ses écrits ultérieurs. Elle s'appuie, serait-ce tacitement, sur les principaux commentaires de l'ouvrage, et sur les débats auxquels il a donné lieu. Mais il s'agit pour l'essentiel d'une analyse interne de l'ouvrage, de la nature de ses concepts et de ses présupposés, ouvrant à une critique et à une réinterprétation. A ce titre, elle interpelle l'œuvre d'une façon spécifique, à partir d'autres exigences que les siennes, à partir d'une autre culture, qui revendique notamment certains héritages du marxisme et de la philosophie classique allemande. En cela, ce livre diffère sans doute d'autres ouvrages consacrés au même sujet.

Page 12: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

CHAPITRE I

LES PRINCIPES DE JUSTICE

Rawls propose en définitive la formulation suivante de ses principes de justice :

« a. Chaque personne a un droit égal à un ensemble, scheme, pleinement adéquat de libertés et droits de base égaux pour tous, qui soit compatible avec un même ensemble pour tous, et dans lequel les libertés politiques égales, et elles seules, doivent être garanties à leur juste valeur.

b. Les inégalités sociales et économiques doivent satisfaire à deux conditions : 1° s'attacher à des positions et à des fonctions ouvertes à tous selon une équitable, fair, égalité des chances, 2° être au plus grand avantage des membres les plus désavan-

tagés de la société » (PL 5-6).

Notons que la rédaction diffère sur plusieurs points de celle présentée au § 11 de Théorie de la Justice. Le premier principe exige un « système pleinement adéquat » et non le « système le plus étendu », et la «juste valeur des libertés politiques ». Le second principe présente un ordre inverse, l'égalité des chances

Page 13: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

passant avant le principe de différence. Et il définit les diffé- rences acceptables comme celles qui favorisent le « plus grand avantage des plus désavantagés » et non de « l 'avantage de tous ».

L 'objet des principes

Avant d'examiner le contenu de ces principes, il convient de considérer leur objet : ces principes concernent la « structure de base de la société », ils l 'abordent dans les termes de la distri- bution de « biens sociaux primaires ».

La notion de « structure de base »

1. Au regard de ce qu 'on entend communément par « structures sociales », la notion rawlsienne de « structure de base » ne va pas de soi. Pour Rawls, une « institution » en général est « un système public de règles qui définit des fonctions et des positions avec les droits et devoirs, les pouvoirs et immunités, etc., qui s 'y attachent » (TJ 86, traduction modifiée). Exemple : jeux, rites, parlements, systèmes de propriété. L'institution ainsi comprise suppose un « accord, understanding, public sur l'obéissance au système des règles qui la définissent », une « entente, understanding, réciproque ». Les participants de l'institution sont supposés connaître ces règles, et l'ensemble constitue de ce fait un système d'attentes réciproques. La « structure de base » de la société n'est donc, aux yeux de Rawls, rien d'autre que « l'organisation des institutions sociales majeures en un seul système de coopération »(TJ 85).

Le projet rawlsien de « théorie de la justice » s'inscrit donc dans le paradigme du jeu et des règles du jeu, mais dans une perspective normative. La théorie (sociologique) de l'institution, tout comme la théorie des jeux, souligne-t-il, considère ces règles et l 'accord à leur sujet comme donnés. Elle examine quelles seront, dans ce contexte institutionnel, la répartition des pouvoirs et des opportunités, les stratégies des agents, etc., La théorie (philosophique) de la justice, pour sa part, s'interroge sur les conditions d'une juste structure de base. Elle doit certes, parce qu'elle vise la réalisation de la justice, élaborer des règles telles

Page 14: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

que des individus rationnels ont intérêt à s'y conformer. Mais son objet est la détermination de règles acceptables par tous.

Rawls cherche donc à définir une structure de base, c'est-à- dire à élaborer le système général de règles sur lesquelles une société peut être construite. C'est le côté hobbesien, démiur- gique, de son entreprise. Concevant la société, comme un système de règles, il peut la reconstruire (en esprit) en recons- truisant celles-ci. La conception de la justice est ici immédiate- ment structurante : elle prescrit une structure sociale déterminée, en prescrivant les règles qui la constituent.

D'un autre côté pourtant. Rawls avance aussi que les règles qu'il propose sont celles qui « s'appliqueront » à la structure de base. Ce qui implique que le théoricien de la justice prend en considération une forme qui lui est prédonnée, et qui est la forme structurelle générale supposée de la société « démocratique » moderne (Rawls parle équivalemment de société libérale ou de démocratie constitutionnelle). On reviendra, aux chapitres suivants, sur cette ambiguïté de sa théorie, qui oscille entre construction rationaliste et critique de l'empirie. Retenons seule- ment pour l'instant que Rawls appréhende les sociétés empiri- quement données comme des « systèmes de règles », auxquelles il oppose un autre système de règles.

On peut sans doute préférer une approche socio-historique plus réaliste des « structures sociales ». On peut objecter que les rapports de production, de pouvoir, de représentation, etc.. ne découlent nullement de tels complexes de règles, mais au contraire - ou tout autant - les déterminent. Et que les sociétés s'analysent comme des ensembles fonctionnels et conflictuels, avec leurs contradictions et leurs tendances spécifiques, leurs potentialités, et leurs idéologies « régulatives », qui condi- tionnent des règles qu'on ne peut prendre pour les « structures » mêmes de la société. La conception rawlsienne de la société comme système public de règles peut donc apparaître comme une réduction intellectualiste ou culturaliste des rapports sociaux. Une telle objection ne ruine cependant pas le projet. Car la question « à quelles conditions un système social est-il juste, c'est-à-dire conforme à des règles acceptables par tous ? », n'en demeure pas moins irrécusable. On devra seulement examiner quels effets produisent éventuellement sur elle la conception de l'institution qui est celle de Rawls.

Page 15: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

Il préconise certes une action de l'Etat à l'encontre des maux publics. Mais il manque à son concept économique de quoi penser positivement « l'œuvre » commune, – ce qu'exige pourtant l'unité systémique des diverses productions humaines dans leur rapport global au système écologique, soit l'effet de savoir, de progrès et de sens, ou de destruction, que, toutes ensemble, elles produisent.

Une politique seulement morale

L'idée d'œuvre implique aussi celle d'une histoire humaine, celle d'acteurs et de pratiques historiques. Or une telle pers- pective se trouve singulièrement occultée par la façon dont Rawls articule théorie idéale et non-idéale.

S'il propose une théorie de la société juste, et de la société bonne, désirable en tant qu'elle est juste, il ne parvient pas à une théorie de la juste pratique, de l'instauration de la justice dans un monde injuste. D'une part, l'édification de la société juste est, si l'on peut dire, attendue du caractère édifiant de la représentation de la société juste. L'idée régulative est censée inspirer les esprits, prendre force constructive à mesure qu'elle se réalise. D'autre part, le concept de la pratique politique proposé est un concept purement moral : ceux qui obéissent aux lois justes, ceux qui résistent (dans les limites, du moins, que la théorie juge acceptables) aux lois injustes, ceux qui favorisent une législation plus juste, sont désignés comme moralement bons. Ce qui expri- me certes une profonde vérité : il n'y a de moralité publique que dans la mise en œuvre de la justice. Mais, à en rester là, la con- duite politique se trouve aussi entièrement jugée en termes de moralité. Et cette approche ne laisse pas de place pour les « justes », c'est-à-dire pour une éthique qui prenne les principes de justice comme critères immédiats de la pratique. Dans leur version rawlsienne, les principes de justice, loin de constituer une reformulation de l'impératif juridique kantien (« agis... »), ne définissent que les caractères d'une société juste. Ils expri- ment une utopie, non une exigence, – si ce n'est une exigence purement morale : il est bon d'être juste. Ils ne déclarent pas un exigible. C'est pourquoi du reste Rawls n'a pas de discours, mais seulement des parenthèses évasives, sur ce qui pourrait légitimer par exemple une conduite militante ou « révolutionnaire ». Il

Page 16: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

propose une évaluation des conduites vertueuses, selon qu'elles s'élèvent au « surérogatoire », à « l'héroïque ». Mais cette casu- istique ne peut masquer le manque d'une théorie éthico-politique de la pratique. Qui doit inclure – dans une situation où toute pra- tique de la justice doit faire face à des forces sociales qui entre- tiennent un ordre injuste - une théorie de la juste lutte politique.

Ajoutons qu'au regard de l'emprise globale et indivisible de la production humaine sur la planète, au regard de l'unité systé- mique du monde, de la sujétion des peuples et de l'écrasement des multitudes, il y a chez Rawls - qui ne pense le projet substantiel du bien qu'en termes individuels ou associatifs, qui conceptualise dans le seul cadre supposé de l'Etat-nation et de rapports entre nations, ignorant l'ordre impérial des centres aux périphéries –, quelque chose de formel et de daté.

Un renouveau du contractualisme

Ce n'est pourtant pas par hasard si un renouveau de la philo- sophie politique s'est trouvé engagé à partir de son œuvre. Rawls réouvre la voie d'une philosophie politique constituée autour du schème contractualiste. Il s'engage sur un terrain que socialistes et marxistes ont, à la suite de Hegel, refusé, considérant que la notion de contrat restait celle d'un rapport entre individus privés, concernant leurs intérêts particuliers. Il est vrai que la valori- sation du contrat comme paradigme suprême a eu le plus souvent pour effet (sinon comme motif) de soustraire à la volonté générale tout regard sur la sphère économique, considérée comme relevant de la contractualité entre personnes privées disposant librement de leurs biens, – ou, au mieux, de réduire le contenu contractuel à la re-distribution et sa forme au consensus. Le schème du contrat a été utilisé pour mettre hors d'atteinte la question de la propriété. Rawls fait éclater la contradiction en remontant à la question primordiale qui est celle de savoir ce qui pour chacun peut être considéré comme son bien. Il manifeste que cette question ne peut se déterminer que dans les termes contractuels d'un ordre politico-économique acceptable par chacun. Il récuse ainsi d'emblée le point de vue dit « libertarien » - et qu'il conviendrait plutôt d'appeler « propriétarien » - selon lequel la seule question légitime serait celle du juste transfert des propriétés. Il s'agit en effet de déterminer les fondements mêmes

Page 17: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

de la propriété, c'est-à-dire de savoir non seulement ce qui des fruits de la coopération sociale revient légitimement à chacun, mais d'abord quelle part chacun peut légitimement prétendre prendre à celle-ci. La question économique est ainsi comprise en termes politiques. Symptomatiquement, c'est du reste le terme de « citoyen » qui, chez Rawls, désigne régulièrement la personne en tant qu'elle est définie dans l'espace, économico-politique, de la société bien ordonnée, - le terme d'« individu » la désignant dans ses rapports privés, associatifs ou interindividuels.

Le schème contractualiste doit assurément faire l'objet d'une refondation critique en des termes assurant, comme y invitait Hegel, la conception d'un bien commun substantiel, – question considérable qui ne peut être traitée dans le cadre de la présente étude. Et il ne peut du reste, dans son abstraction, prétendre occuper tout l'espace d'une philosophie politique. Il ne peut notamment assumer les tâches qui reviennent à l'éthique du discours, dans la considération du monde vécu et de l'œuvre concrète. Il échappe pourtant aux limites que la pensée radicale lui a le plus souvent assignées. Et s'il passe, en général, pour la légitime propriété du libéralisme au sens « fort » du terme, qui pose la connaturalité entre rapports de marché et démocratie poli- tique, cela n'est pas, me semble-t-il, dans la nature du concept.

Il faut souligner la spécificité du contractualisme de Rawls, que l'on pourrait désigner comme un « contractualisme de principe ». L'un des intérêts de sa démarche tient en effet à ce qu'elle se déploie des principes à l'institution. Comme on l'a vu, il reprend ici en un sens Locke contre Hobbes. Mais dans l'esprit de Rousseau : le droit naturel n'est rien d'autre que ce sur quoi nous pouvons tous ensemble être d'accord (et à cet égard, Rawls se distingue radicalement de Locke). Cette procédure théorique, qui va des principes à l'institution, est celle qui permet de conce- voir la juste rébellion contre l'ordre établi, – sur la base, bien entendu, de principes tout autres que ceux dont se réclame Locke. Cela suppose, il est vrai, que l'on fasse apparaître, ce qui n'est pas le cas chez Rawls, que les principes de justice s'étei- gnent d'eux-mêmes s'ils sont ceux de la seule cité céleste, s'ils ne s'imposent pas en même temps, comme exigence du droit (et non de la seule morale), à la pratique immédiate. Cela suppose qu'on les prenne pour les principes de la pratique politique.

Page 18: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

A partir de là, une réinterprétation générale des concepts de Rawls me semble possible, en vue d'une autre sorte de théorie politique. Elle supposerait, pour que soit évitées de multiples confusions, de très longues explications qui ne peuvent être four- nies ici. Une telle réinterprétation fait notamment corps avec l'élaboration corrélative d'une théorie (réaliste) de la société moderne. Je me limiterai à quelques remarques nécessaires à la compréhension de la lecture de Rawls que j'ai proposée dans ce livre. Ces remarques concernent le seul aspect éthico-pratique de la question.

L'invention du principe de différence

Il me semble que l'une des innovations majeures de Rawls – et je m'en tiendrai à ce point - se trouve dans la formulation du principe de différence, qui définit la forme même de la relation contractuelle. Ce qui est nouveau, ce n'est pas l'idée qu'il énonce, mais sa promotion en « principe de justice », en un principe dont on peut montrer qu'il a un caractère général, ou mieux « générique ». Quoiqu'il soit à comprendre comme un principe égalitariste, il constitue en effet, par opposition au principe moral d'égalité - au sens où Kant distingue le droit (ou le politique) de la morale –, le principe de l'éthique proprement politique.

Cet usage cardinal du principe de différence n'est cependant possible qu'à plusieurs conditions, évoquées et parfois argumen- tées au cours de ce livre, et que je me contenterai d'énumérer.

1/ Qu'on lui conserve sa formulation « générique » initiale (que Rawls a cru devoir dépasser en la scindant en deux principes, l'un concernant les libertés, l'autre les inégalités sociales) : « Toutes les valeurs sociales – liberté et possibilités offertes à l'individu, revenus et richesses ainsi que les bases so- ciales du respect de soi-même - doivent être réparties également à moins qu'une répartition inégale de l'une ou de l'autre de ces valeurs ne soit à l'avantage de chacun » ( 93). Ou, plus précisément, comme l'expose Rawls, des plus désavantagés.

2/ Que l'on considère son noyau conceptuel, qui comporte quatre éléments :

(a) c'est un principe d'égalité, (b) qui incorpore la question de l'efficacité,

Page 19: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

(c) et par là l'éventualité d'inégalités acceptables, (d) en déterminant le point de vue qui en juge : le point de

vue du défavorisé. 3/ Que l'on admette que, dès lors, la question de « l'ordre

lexical », celle d'une priorité de la liberté sur l'égalité, ne se pose pas. Car un tel principe générique implique en lui-même que les « libertés de base », pour reprendre les termes de Rawls, sont tout simplement reconnues comme inaliénables, et à ce titre doivent être « égales pour tous ». Si l'on considère en effet que la domination politique n'a pas pour fin en général l'instauration de l'égalité, mais au contraire d'asseoir les avantages de ceux qui dominent, on doit supposer que les défavorisés ont toute raison d'exiger un ordre politique pleinement démocratique, c'est-à-dire notamment des « libertés de base égales pour tous ».

4/ Que l'on observe que la question de l'efficacité intervient en position subalterne, mais constitutive, dans la question de la justice. Ou, équivalemment : que c'est en ce que la question économique se trouve impliquée dans la question politique que celle-ci se trouve constituée comme telle. A cet égard, Rawls dépasse, en en développant le concept, la notion kantienne d'impératif catégorique juridique. Il incorpore et soumet la rationalité-en-finalité à la rationalité-en-valeur. Il dessine ainsi l'objet d'une théorie de la justice, selon deux dimensions insé- parables. D'une part comme celle d'une « idée de la société juste » : car il n'y a d'acteurs éthiquement responsables que s'ils s'assurent que les effets de leurs choix convergent vers un résultat d'ensemble universellement acceptable. Et en sens la notion d'un « modèle » (à poursuivre, mais toujours à réviser) est inhérente à celle de juste. D'autre part, comme théorie de l'action politique, en tant qu'efficace dans l'instauration et la défense de la justice.

5/ Que l'on refuse l'opération spéculative qui donne primau- té à la première de ces dimensions sur la seconde, dans le langa- ge de Rawls, à la théorie « idéale » sur la théorie « non-idéale », c'est-à-dire aussi au concept de « société juste » sur celui de « juste pratique ». Ce refus se fonde sur la forme d'impératif (et la forme impérative) qui appartient au principe en tant que principe de la relation contractuelle. Il y a sur ce point régression par rapport à Kant. Là où Kant énonce : « agis de telle sorte... », Rawls dégrade l'impératif en optatif : « la société doit être telle

Page 20: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

que... ». Le principe de justice appelle certes le concept de société juste. Mais, en tant qu'impératif, il est une règle immé- diate de l'action. Il s'énonce donc ainsi : « abolissons toute iné- galité qui n'est pas à l'avantage de ceux qui ont moins ». Il faut pourtant souligner qu'il n'est pas un principe d'action en vue de l'instauration programmée d'une société idéale. Il s'énonce dans le temps d'acteurs concrets et dans l'horizon de leur vie.

6/ Que la question soit prise à un niveau supérieur d'abs- traction. En ce qui concerne les institutions économiques de la société juste, le principe générique est à prendre comme règle de la socialité dans son ensemble, gouvernant notamment la ques- tion du partage entre contractualité privée et publique, qui ne peut être soustraite à la compétence de la théorie comme ne relevant que des circonstances historiques, - ainsi que le fait Rawls, quand il exclut du champ des principes la question de la propriété des moyens de production.

7/ Que le contrat soit appréhendé non comme simple « expérience de pensée », mais en tant que concept spécifique des rapports sociaux (réels) modernes. La théorie que je propose constitue précisément la contractualité, en tant que « décla- ration » principielle, au cœur des processus de domination et d'exploitation propres au monde moderne - exploitation de l'homme « libre », comme l'ont développé Marx et Weber –, au cœur des procès conflictuels (voire exterminatoires) qui le carac- térisent. Dans un rapport dialectique de « métastructure » à « structure » qui ne peut être exposé ici.

8/ Que l'élément « économique » de la différence, généralement banalisé en termes chosistes (accepter d'avoir moins qu'autrui pour avoir au total plus), soit rapporté à son contexte philosophique naturel, celui du spinozisme, c'est-à-dire celui de l'élévation de la «puissance» en général, – et l'on comprendra qu'il s'agit là d'un vaste programme. Par quoi le principe de l'action se donne à comprendre comme principe stratégique.

9/ Que les « défavorisés », donc, - que le principe de différence constitue en observateurs de référence, dont le point de vue est pour tous le juste point de vue – se constituent en acteurs capables de le faire valoir dans le procès de l'histoire commune. Si leur position détermine le point de vue qui est juste, elle ne détermine cependant pas la justesse de leurs

Page 21: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

opinions, ni l'efficience de leur stratégie. Et leur point de vue ne constitue pas non plus un camp unifié : il est divers et pluriel comme le sont les faces et les dimensions de ce qui se désigne sous le vocable, éminemment suspect, de la « défaveur ».

10/ Qu'une autre sorte d'investigation s'intéresse précisément à cette défaveur, à ce « point du vue », qui est aussi comme un point de fuite au cœur du tableau rawlsien. Car il reste évidemment à savoir, c'est là l'objet non d'une philosophie de la justice, mais d'une théorie de la société (de celle que je nomme « métastructurelle »), pourquoi il y a des « défavorisés », et quel est le statut d'un tel concept. Pour une telle question, qui n'est pas celle de Rawls, on peut sans doute chercher avec profit du côté de l'espace théorique (socio-historique, et non éthico- juridique) ouvert par Marx. A condition d'élargir critiquement celui-ci de telle sorte qu'il englobe l'ensemble des formes d'oppression et d'exploitation spécifiquement modernes, qu'elles se cachent sous le manteau de la contractualité interindividuelle du marché ou de la contractualité centrale de l'Etat, dans la division sexuelle ou culturelle des tâches de la coopération, qu'elles se déploient à l'intérieur d'une nation, ou dans les rapports interethniques ou inter- ou supra-nationaux, dans le cadre de ce qu'il faut désormais considérer comme le « système du monde »*.

* Je me permets de renvoyer à mon livre, Théorie de la modernité, 1990, PUF, et surtout à Théorie générale (en préparation), où je développe, entre autres, les présupposés des argumentations ici proposées. A partir d'une réinterprétation générale tant des théories socio-historiques que des théories contractualistes, j 'y propose l'articulation de ces deux tâches, dont l'une concerne ce qui est et l'autre ce qu'il faut faire, dans l'unité conceptuelle d'un même discours. L'ensemble s'organise autour du concept dialectique de « méta/structure » contractuelle, qui désigne le présupposé posé général des structures sociales modernes. Les structures de classes modernes y sont pensées à partir de la forme contractuelle comme le retournement de celle-ci, inhérent à sa réalisation à l'échelle sociale, dans les formes du marché et de l'organisation. Ces rapports modernes ne se développent comme tels qu'au travers d'une « déclaration » de contractualité dans un espace public ainsi ouvert à la critique. La question de la philosophie politique émerge ainsi du sein même de la « science sociale ».

Page 22: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

NOTE BIBLIOGRAPHIQUE

1. Ouvrages originaux

J. Rawls, A Theory of Justice, Harvard University Press, 1971.

J. Rawls, Political Liberalism, Columbia University Press, 1993,

A quoi il faut ajouter un texte dactylographié : J. Rawls, Justice as Fairness, a Restatement, Harvard

University, Cambridge, 1990.

2. Traductions françaises

J. Rawls, Théorie de la justice, Seuil, 1987, traduction de Catherine Audard.

J. Rawls, Justice et démocratie, Seuil, 1993, traduction sous la direction de Catherine Audard.

Remarques. 1. Je renverrai le plus souvent, en raison de leur excellente

qualité, à ces deux traductions. 2. La traduction française de Théorie de la justice, étant

fondée sur un texte remanié par l'auteur en 1975, possède une valeur scientifique propre. Dans la préface à cette édition française, J. Rawls s'explique sur l'évolution de sa problématique.

Page 23: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

3. Justice et démocratie rassemble les principaux articles de la récente période (1978-1989). Ce sont, à deux exceptions près, ces mêmes articles que J. Rawls a refondus (et souvent augmentés), dans le cadre d'une reformulation d'ensemble, pour former son second livre, Political Liberalism, qui comprend également des textes inédits. Je ne renvoie donc à celui-ci que lorsqu'il s'agit d'énoncés ou de contextes différents. Le recueil Justice et démocratie comporte en outre de précieuses notes introductives, ainsi qu'un glossaire, une bibliographie complète de Rawls et un index thématique.

4. Political Liberalism paraîtra en français dans une traduction de Catherine Audard sous le titre Libéralisme politique (PUF, 1995).

3. Principaux articles de Rawls non repris dans les ouvrages ci-dessus (soit PL, soit JD)

« Justice as Fairness », The Journal of Philosophy, N° 22, 1957. Traduction par J.F. Spitz : « La justice comme équité », revue Philosophie, N° 14, 1984.

« Social Unity and Primary Goods », in Utilitarianism and Beyond, edited by Amartya Sen and Bernard Williams. Cambridge University Press et Maison des Sciences de l'Homme, 1982.

« A Kantian Conception of Equality », in Post Analytic Philosophy, de John Rajchman and Cornel West (eds), Columbia University Press, 1985. Traduction par A. Lyotard-May : « Une conception kantienne de l'égalité », in La pensée Américaine contemporaine, PUF, 1991.

4. Livres et publications autour de Rawls

L'âge de la science, N° 1, Ethique et philosophie politique. Mai 1988.

Cahiers de CREA, N° 4, « Le libéralisme et la question de la justice sociale », 1984.

Critique, Vol. 505-506, « John Rawls, Justice et libertés », 1989.

Page 24: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

Ethics, Vol. 99, The University of Chicago Press, 1989. Revue de Métaphysique et de Morale. 1988 N° 1, « John

Rawls, le politique ».

Audard Catherine (et al.), Individu et justice sociale, Autour de J. Rawls, Seuil, 1988.

Audard Catherine (ed.), Democracy and Consensus, Blackwell, Oxford, 1994.

Benhabib Seyla and Cornel Drucilla (eds.), Feminism as Critique, University of Minnesota Press, 1987.

Benhabib Seyla, Critique, Norm and Utopia, Columbia University Press, 1986.

Bidet Jacques (éd.), Paradigmes de la démocratie, PUF 1993.

Boudon Raymond, Effets pervers et ordre social, PUF, 1977.

Buchanan Allen, Marx and Justice, Romann and Littlefield, 1982

Cohen Gerry A., History, Labour and Freedom, Oxford University Press, 1988.

Couture Jocelyne et Duhamel André, Justice distributive, Lekton, Vol. 1, N° 2, Université du Québec à Montréal, 1991.

Daniels Norman (eds), Reading Rawls, Stanford, 1989. Dworkin Ronald, Taking Rights seriously, Duckworth, 1991. Dupuy Jean-Pierre, Le Sacrifice et l'Envie, Calmann-Levy,

1992. Gauthier David, Morals by Agreement, Oxford University

Press, 1986. Heller Agnès, Beyond Justice, Basic Blackwell, 1987. Höffe, Otfried, L'Etat et la justice, Vrin, 1989. Kolm Serge, Le contrat social libéral, PUF, 1985. Kukathas Chandra, Pettit Philip, Rawls, A Theory of Justice,

and its Critics, Standford, 1990. Kymlicka W., Liberalism, Community, and Culture,

Clarendon Press, 1989. Ladrière Jean et Van Parijs Ph. (éds), Fondements d'une

théorie de la justice, Louvain-La-Neuve, 1984. Lukash F.S. (ed.), Justice and Equality, Here and Now,

Ithaca, 1986

Page 25: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

Mouffe Chantal (ed.), Dimensions of Radical Democraty, Verso, 1992.

Mouffe Chantal (ed.), The Return of the Political, Verso, 1993.

Nielsen Kai. Equality and Liberty, Rowman and Allanheld, 1985.

Nozik Robert, Anarchie, Etat et Utopie, PUF, 1988. Okin Susan, Justice, Gender and the Family, Basic Books,

1989. Peffer Robert, Marxism, Morality and Social Justice,

Princeton university Press, 1989. Petrucciani Stefano, Trincia Francesco, Marx in America,

Editori Riuniti, 1992, Pogge Thomas, Realizing Rawls. Cornell University Press,

1989. Reiman Jeffrey, Justice and Modern Moral Philosophy, Yale

University Press, 1990. Renaut Alain et Sosoe Lukas, Philosophie du droit, PUF,

1991. Roemer John, A General Theory of Exploitation and Class,

Harvard University Press, 1982. Sandel Michael, Liberalism and the Limits of Justice,

Cambridge University Press, 1982. Sen Amartya, Ethique et économie, PUF, 1993. Sen Amartya and Williams Bernard (eds), Utilitarianism

and Beyond, Cambridge University Press, 1982. Van Parijs Philippe, Qu'est-ce qu'une société juste ? , Seuil,

1991. Veca Salvatore, Una filosofia pubblica, Feltrinelli, 1986 Walzer Michael, Spheres of Justice, Basic Books, New-

York, 1983. Wellbank J.H., et alii, John Rawls and His Critics. An

Annoted Bibliography, Garland Publishers, 1982. Wolgast Elizabeth H., Equality and the Rights of Women,

Cornell University Press. Williams Bernard, Ethics and the Limits of Philosophy,

Fontana, 1985. Young Iris Marion, Justice and the Politics of Difference,

Princeton University Press, 1990.

Page 26: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre

5. Articles concernant Rawls, et ne figurant pas dans les publications ci-dessus

Buchanan Allen, « A critical Introduction to Rawls' Theory of Justice », in Blocker & Smith (eds), John Rawls' Theory of Justice, Ohio University Press, 1980.

Bertram Christopher, « Principles of Distributive Justice : Counterfactuals and History », The Journal of Political Philosophy, 1993.

Carens Joseph H., « Difference and Domination : reflections on the relation between pluralism and equality « , in Majorities and minorities, Nomos XXXII, 1990.

Cohen Gerry A., « Self-Ownership, World-Ownership, and Equality », in Lukash F.S. (ed.), Justice and Equality, Here and Now, Ithaca, 1986.

Cohen Gerry A., « Self-Ownership, World-Ownership, and Equality, Part II », in Social Philosophy and Policy, Vol. 3, N° 2, 1986.

Cohen Gerry A., « Are Freedom and Equality Compatible ? « , in Elster J. & Moene K.O. (ed.), Alternatives to Capitalism, Cambridge University Press et Maison des Sciences de l'Homme, 1989.

Harsany John. « Can the Maximin Principle Serve as a Basis for Morality ? A Critique of John Rawls' Theory », American Political Science Rewiew, Vol. 69, 1975.

Lafrance Guy, « Les deux principes de justice selon Rawls », Dialectica, 32/2, 1978.

Kervégan Jean-François, « Y-a-t-il une philosophie libérale ? Remarques sur les œuvres de J. Rawls et F. Hayek », in Rue Descartes, N° 3, Citoyenneté, démocratie, république, 1992.

Nagel Thomas, « Moral Conflict and Political Legitimacy », Philosophy and Public Affairs, Vol. 16, 1987.

Ricoeur Paul, « J. Rawls : de l'autonomie morale à la fiction du contrat social », Revue de Métaphysique et de Morale, N° 3, 1990.

Spitz Jean-Fabien, « La justification rationnelle des théories politiques », Hermès, N° 1, 1982.

Page 27: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre
Page 28: John Rawls et la théorie de la justice - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782130471417.pdf · Rawls, Théorie de la justice, qui date de 1971, soit traduit en français. Entre