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1 INFRACTIONS BOURSIERES Délits et manquements et Fautes disciplinaires CLAUDE DUCOULOUX-FAVARD

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INFRACTIONS BOURSIERES

Délits et manquementset

Fautes disciplinaires

CLAUDE DUCOULOUX-FAVARD

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L’agiotage qui s’exerce à Paris sur les effets dont le profit éventuel égare l’imagination ne peut qu’engendrer

la plus abominable des industries. Et quelle compensation offre-t-elle quand son résultat unique, son dernier produit est un jeu effréné, où des millions n’ont d’autre mouvement que de passer d’un portefeuille à l’autre, sans rien créer,si ce n’est un groupe de chimères que la folie du ,jour promène avec pompe et que celle de demain fera évanouir.

Comte de MIRABEAU

(Dénonciation au Roi et à l’Assemblée des notables, H DCC-LXXX VII, p 27)

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INTRODUCTION

A) Caractéristiques Le droit répressif boursier, comme toutes les questions de droit pénal des affaires est complexe. Non seulement la fraude boursière, comme dans les autres domaines du droit pénal des affaires, a pour soubassement les mécanismes du droit des affaires, mais il faut compter avec l'internationalisation des marchés qui est un facteur de plus de complexité. Au surplus, notre système juridique depuis la loi n° 1989-531 du 2 août 1989, comporte une double procédure répressive: la voie classique des poursuites et sanctions judiciaires pénales reposant sur les définitions légales des délits et la voie administrative pour manquements aux règlements de l'autorité des marchés et réprimés hier par la Commission des opérations de bourse, COB (1), aujourd'hui l'Autorité des marchés financiers,AMF(2), installée le 24 novembre 2004. Ces deux procédures fonctionnent en concomitance et parallèlement. Elles sont parfaitement autonomes si ce n'est qu'en cas de prononcé d'une double peine, l'une d'elle est absorbée par l'autre afin de respecter, dans une certaine mesure (3), le principe fondamental du "non bis in idem". . Il convient dès lors, de bien distinguer dans les infractions boursières les délits (correctionnels) des manquements administratifs. B) Difficultés. Ce système de la double poursuite et de la double peine du droit français n’a pas été sans créer quelques difficultés. Qu'il suffise de rappeler, comme le mettait en exerce Alain VIANDIER (4), "le rôle du fait divers dans la création du droit", en l'occurrence le scandale dit PECHINEY qui conduisit le législateur. Or, il fut très vite souligné que la datation d'un pouvoir de sanction propre à la COB, n'était pas sans créer quelques difficultés d'application. Pierre BEZARD (5), dont le nom fait encore autorité en matière boursière, en avertissait les financiers en ces termes: "les voies très larges" qui se sont ouvertes à la COB puisqu'elle peut sanctionner doivent la conduire à "une approche raisonnable de son pouvoir" alors que "les autorités judiciaires (au niveau des voies de recours)se voyaient chargées plus d'une mission de contrôle de l'action des autorité boursières que de décider

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Dès 1984, c’est à dire cinq ans avant la loi du 2 aôut 1989, la Cour européenne de Strasboourg avait posé que les sanctions à fort caractère répressif, selon les critères de la Convention européenne des droits de l’homme de 1974 devait, à l’image des sanctions purement pénales, respecter les droits fondamentaux de la défense (6).

C ) Evolution législative

1)Loi n° 96_597 du 2 juillet 1996.

La COB n'a pas toujours su respecter certains principes fondamentaux inscrits non seulement dans notre Déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen de 1789, mais repris par le Conseil de l'Europe en 1950 dans la Convention européenne des Droits de l'Homme, CEDH, ratifiée par la France 24 ans plus tard, le 3 mai 1974. Ainsi, déjà en 1993, à l'occasion d'une condamnation de la COB pour fausse information du marché lors d'une opération de fusion, les autorités judiciaires, statuant sur recours, ont été conduites à annuler cette pour non respect de la présomption d'innocence et du contradictoire (7). Le législateur se devait donc de préciser les bonnes règles de ce droit procédural administratif. C'est en ce sens que la loi n°96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières avait prévu la rédaction d'un règlement intérieur de la COB qui complèterait la réglementation en la matière qui se réduisait jusque là à quelques articles (8). Un décret n° 97-774 du 31 juillet devait compléter ces dispositions légales (9).

6- Cela nous conduisit, Nicolas RONTCHEVSKY et moi-même à un complément de la publication éditée un an plus tôt (8).

2) La loi n° 2003-706 du 1° aôut 2003 Le paysage de la répression administrative des infractions boursières a encore changé avec la loi sécurité financière n° 2003-706 du 1° août 2003, opérant fusion des trois autorités de marché (Commission des opérations de Bourse, Conseil des Marchés financiers et Conseil de discipline de la Gestion financière) en une seule entité, l'Autorité des Marchés Financiers, AMF. Cette fusion fait problème au niveau de la compétence rationae materie de l’AMF et des voies de recours contre ses décisions. Le contentieux disciplinaire passé aux mains de la Commission des sanctions de l’AMF est resté au Conseil d’Etat lors du second degré de juridiction, alors que la 1° Chambre de la Cour d’appel de Paris reste compétente pour les manquements aux règlements de l’AMF. Au résultat de quoi, le dossier éclate au stade du recours s’il y a eu dex catégories de coauteurs (dirigeants initiés et professionnels de l’intermédiation financière également initié). Ce qu’une partie de la doctrine a très vite dénoncé (10), sans grand succès d’ailleurs.Cette réforme suit d'ailleurs de près la directive européenne Abus de marché (11).Pour comprendre cette suite de modifications législatives, il n'est pas inutile de se souvenir des vicissitudes judiciaires autour des affaires OURY, KPMG et FISCHER (9) qui contraignirent la COB à suspendre toute procédure de sanction entre le 20 mars et le 2 août 2000, le temps de rédiger de nouveaux textes procéduraux. Ces derniers, encore peu

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satisfaisants ont conduit le législateur de 2003 à mieux séparer les fonctions d'enquête et de poursuite en les partageant entre le Collège de l'AMF et une Commission des sanctions, totalement distinctes l'une de l'autre dans leur composition et leur fonction. De surcroît, sans que cela ait été indispensable, les manquements infractionnels boursiers ont été nouvellement définis à l'occasion du Règlement général de l'AMF du 24 novembre 2004, publié au Journal officiel du 25.

3) Directives européennes.

Les directives sur le droit boursier ont été lentes à venir : la première, Directive n° 89-592 du 13 novembre 1989, ne portait que sur les initiés d’une information privilégiée ; la seconde, Directive n° 93-22 du 10 mai 1993, s’élargissait à tous les problèmes des marchés financiers. Et toutes deux ont été abrogées pour être remplacées par la directive dite «abus de marché», n° 2003/6/ CE du 28 janvier 2003, JOUE du 12 avril. Celle-ci a été transposée en droit français dès 2005.

4) Loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005.

Cette loi de 2005, dite pour la confiance et la modernisation de l’économie, a élargi les pouvoirs d’injonction de l’AMF en modifint l’article L 621-14 du code monétaire et financier. L’injonction devenue pouvoir d’ordonner (jusqu’ici appartenant au judiciaire, n’a plus àêtre ratifié par le tribunal pour être exécutoire. Ce qui est une réforme de plus qui fait glisser le pouvoir du juge aux mains de l’administration. Au surplus, ce texte renvoie à l’article L 621- 15 sur lers pouvoirs de sanction de l’Autorité des marchés de sorte qu’une fois encore, n’est plus respecté la séparation des pouvoirs du législatif et du judiciaire. En effet, la sanction adinistrative à fort caractère pénal ne se fonde plus sur un comportement clairement défini par une loi préalable, mais sur une appréciation de l’amf qui peut évoluer dans le temps. Ce qu’a souligné Daniel OHL (13).

Méthode

Sanscompter qu'il convient de spécifier les règles d'application dans le temps des nouvelles dispositions tant sur le plan substantiel que procédural, les infractions seront donc présentées chapitre par chapitre en partageant à l'intérieur de ceux-ci les explications concernantles délits et celles sur les manquements. Seront donc pris en considération le fait que si les infractions sont parallèles, leur définition n'est pas absolument identique. Elles méritent d'autant plus d'être exposées séparément et comparées que l'interprétation stricte qui prévaut en droit pénal est également de rigueur en droit administratif des manquements.D'autres considérations méritent d'être faites, en particulier l'évolution du jeu spéculatif qui fut depuis toujours l'élément moteur de la vie boursière et qui, en soi, n'a rien de répréhensif (14). Or la spéculation s'est quelque peu transformée du fait de l'usage des outils techniciens et en particulier de l'informatique (15). Devenant plus technique, la vie boursière a perdu quelque peu l'humain qui se cachait derrière la spéculation d'hier et l'investisseur tout autant que l'épargnant d'aujourd'hui n'acceptent plus

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volontiers le risque ; ils tentent d'y pallier en étant mieux informés que les autres. Cette recherche d'information, qu'elle se fasse ou non par personne interposée (avec les analystes financiers) met en lumière l'exigence accrue de transparence de la vie financière afin que l'égalité des partenaires continue d'être et que l‘interdépendance des offreurs et des mandataires soit justement prise en comptes.

E) Amplification du droit disciplinaire L’ évolution du contexte social de la vie desmarchés financiers conduit à mieux réglementer les activités d'intermédiation et à développer les sanctions disciplinaires de ces professionnels. Dès lors, aux cotés de la procédure des sanctions administratives, sera faite une place à la procédure disciplinaire . A noter aussi, qu’en marge du souci de bonne information boursière, se font jour les problèmes d’un marché boursier non seulement dématérialisé mais virtuel.

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notes:

(1) Ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967

(2) En application de la loi n° 2003-706 du 1° août 2003, dite de sécurité financière, J O du 2 août, p 13 220.

(3) Infractions boursières, délits boursier et manquements administratifs, JOLY édition, 1997 (4) A.VIANDIER, Sécurité et transparence du marché financier; commentaire des titres 1 et 2 de la loi du 2 août 1989; JCP éd. E 1989, I. 15612; éd. G. 1989, I. 3424, n°4.

(5) P. BEZARD, in actes colloque le juge et le marché boursier, 17 et 18 mars 1994, Les Petites Affiches 15 juin 1994, n°71, p 119.

(6) CEDH 21 février 1984 , aff. n° 8544/èç, Ostrück / Allemagne, Série A, n° 73;

(7) CA Paris , 15 janvier 1993, D 1993, p 273, note C. Ducouloux-Favard.

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(8) articles 5, 5A, 5B et 5ter de l'ord. du 28 sept. 1967 et art. 2 à 8 du décret n°90.263 du 23 mars 1990.

(9) Bull. Joly Bourse, avril 1998, p 107 : C. DUCOULOUX-FAVARD et N. RONTCHEVSKY, La procédure de sanction administrative des infractions boursières après le décret n° 97-774 du 31 juillet 1997, Bull. Joly Bourse 1998, p 107. (10) J.J. DAIGRE, Recours contre les décisions de la future AMF, compétence administrative oou judiciaire ? Revue Droit bancaire et financier 2003, p 197 ;C. DUCOULOUX-FAVARD, Quelques coonsidérations sur les pouvoirs de l’AMF, Droit des sociétés 2006, étude 16.

(11) Directive Cons. CE, n° 2003/6, 28 janvier 2003, JOCE 12 avril, n° L 96, p 16, C. DUCOULOUX-FAVARD, Transposition en droit français de la directive Abus de marché, Bull. LAMY Droit pénal des affaires, 2005, n° 34.

(12 Infra, n°

(13) D. OHL, Droit des sociétés cotées, Litec 2005, p 132.

(14) J.F. ROUGE' La spéculation, règle du jeu, Les Petites Affiches, 6 aôut 1993, p 16.

(154) C. DUCOULOUX-FAVARD, La marche du temps réel en bourse, Bull. Joly Bourse 2001, p 222.

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PLAN

INTRODUCTIONchapitre 1 DEFINITIONS chapitre 2 :DELIT ET MANQUEMENT D’ACTION ILLICITE SUR LES COURSchapitre 3 DELITS ET MANQUEMEENTS D’INITIEchapitre 4 :DELITS DE FAUSSE INFORMATION ET MANQUEMENTS A LA BONNE INFORMATION FINANCIEREchapitre 5 : :DELIT D’OBSTACLE A LA MISSION D’INVESTIGATION DE L’AMF

chapitre 6: OBLIGATION DE DECLARATIONS BOURSIERES SUSPECTES

Chapitre 7 : DROIT DISCIPLINAIRE

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CHAPITRE -I -

DEFINITIONS

Section 1

Différentes sortes de faute

§1. Faute civile et faute pénale.

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Ne pas exécuter une obligation ou enfreindre une disposition légale est une faute dont la nature juridique sera différente selon la branche du droit qui la prend en considération (14) et qui se trouvera réparée selon les règles de procédure qui lui sont propres. Ainsi, a-t-on distingué la faute civile et la faute pénale et beaucoup débattu pour savoir s’il y avait unité ou dualité de nature de ces deux sortes de faute (15). Actuellement encore, la doctrine continue de se poser la question, d’autant qu’est apparu une autre sorte de faute infractionnelle, la faute administrative. Au point qu’il est possible de se demander si le critère distinctif ne serait pas plus formel qu’organique ; si la distinction des différentes fautes ne résiderait pas essentiellement dans le caractère punitif de la sanction prononcée que dans les caractéristiques de l’infraction à la règle de droit (16). Il n’en reste pas moins que les sanctions sont très différentes en cas de faute pénale (une peine) ou de faute civile (un dédommagement ou une nullité). De sorte que la question des critères distinctifs se pose. Une réponse à cette question se trouve sous les plumes de F. Desportes et F. Le Gunehec (17), la seule raison d’être du droit pénal serait de définir légalement les comportements infractionnels troublant l’ordre public. Mais ces auteurs d’ajouter et d’expliciter que : “Si la définition juridique de l’infraction tirée de la peine applicable est claire, quoiqu’ insatisfaisante, il n’est pas possible d’avancer une définition matérielle tirée de la nature des comportements incriminés. Dans le souci de clarté, une définition des différentes catégories de fautes et des infractions qui sont réprimées les unes et les autres par une peine, mérite d’être donnée §2. L’infraction

Une infraction, à la différence de la faute, est un acte, par action ou omission, qui porte atteinte à l’ordre public et qui à ce titre est sanctionné d’une peine parce qu’ainsi le veut la loi. Evidemment, la faute pénale, qu’il s’agisse d’un crime, d’un délit ou d’une contravention, est synonyme d’infraction. Mais il est un autre type d’infraction : le manquement administratif qui peut être sanctionner aussi fortement que le délit pénal. En droit boursier, la dualité délit-manquement est apparue avec la loi du 2 aôut 1989 créant la double procédure de sanction. Autrement dit, il est une seule faute qualifiable de délit et de manquement. A cela s’ajoute souvent une faute professionnellle qui donne lieu à une sanction disciplinaire de toute autre nature. Du fait que l’infraction ait pour

Une telle définition dont le noyau central est la peine, repose essentiellement sur le principe fondamental à toute société démocratiquement organisée de la légalité des délits et des peines. De ce principe découle l’obligation pour le législateur de n’établir que les peines strictement nécessaires et pour le juge de ne fixer la sanction qu’en respectant le principe de proportionnalité, c’est à dire de sa juste adéquation à la faute commise. Au surplus, ce principe emporte comme corollaire la non rétroactivité de la loi pénale nouvelle plus sévère.

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L’infraction pouvant être pénale ou administrative, ces principes s’appliquent aux deux catégories, c’est à dire tant aux délits boursiers qu’aux manquements aux règlements de l’autorité des marchés.A) Deux types d’infraction : le délit et le manquement1) Le délit pénalLe délit pénal relève de la loi. C’est elle et elle seule (sauf délégation législative) qui érige un comportement en délit sanctionné par une peine. Outre qu’elle doit être claire, la loi doit caractériser le délit sur deux points : La loi doit définir abstraitement la matérialité du délit. Elle doit aussi fixer l’échelle des peines ; c’est à dire, depuis le code de 1994, le seuil maximum encouru pour les différentes sortes de sanctions. Quant à la mauvaise foi, elle n’a pas à être spécifiée formellement, sinon lorsqu’il y a dol spécial, le dol général devant nécessairement être établi par la prévention en raison de l’article 121-3 inséré dans le code pénal de 1994. Celui-ci n’admet plus, en dehors des contraventions, l’existence en droit français de délit objectif ou matériel (18).

Le principe de légalité des peines implique que pour chaque délit, ces éléments soient donnés dans les textes légaux. Cependant, peu importe qu’ils figurent ou non dans un même article, voire même une même loi. Il suffit qu’il soit clairement renvoyé d’un texte à l’autre (19).

La règle est que c’est l’autorité judiciaire qui est compétente pour sanctionner les délits (tribunaux correctionnels ; cours d’appel, chambre pénale et chambre criminelle de la Cour de Cassation). Mais depuis très longtemps, cette fonction de juger se trouvait parfois dévolue à une administration, telle les Douanes ou le Fisc. La répartition du contentieux judiciaire et administratif traditionnelle a été déclarée ne relevant pas des principes constitutionnels (20) et ainsi, depuis ces dernières décennies, les Autorités administratives dites indépendantes, AAI, ont pu proliférer. Elles ont souvent été dotées, en plus de la surveillance d’un marché ou d’un secteur d’activité spécifique, du pouvoir de sanctionner. Telle l’autorité des marchés boursiers qu’a été la COB de 1967 à 2OO3 et l’actuelle AMF. Avec la COB et aujourd'hui l’AMF les choses ont pris un aspect particulier du fait que la compétence judiciaire a subsisté, alors que naissait le concept de manquement, face à la notion de délit.

2) Le manquement administratif Comparativement au délit, le manquement administratif se concrétise dans le même acte infractionnel. C’est une même et seule infraction à l’encontre de l’ordre public boursier qui est réprimé par le tribunal correctionnel et par la COB depuis la loi du 2 août 1989 et aujourd’hui par l’AMF. Cependant, au regard des textes, la définition du manquement ne coïncide pas totalement avec celle du délit. Au surplus, si les peines d’amende ont la même échelle (élevée), la prison ne peut être infligée qu’au regard du délit, le manquement administratif ne peut être sanctionné par une privation de liberté, tel fut l’avis du Conseil d’Etat (21) lors de l’examen du projet de loi qui devait aboutir à la loi du 2 août 1989.

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Traditionnellement les sanctions administratives mettaient en cause les relations de l’administré avec l’administration. Avec les manquements boursiers ce sont les rapports de l’auteur du manquement par rapport au marché qui sont considérés comme infractionnels. Ce qui fait que le manquement boursier se rapproche énormément du délit pénal, avec pour seule différence l’absence de l’élément moral. Cela n’empêche pas la jurisprudence administrative de retenir parfois la volonté d’agir sciemment en infraction à la loi, par exemple en cas de diffusion de fausse information (22).

Tous ces aspects communs aux délits et aux manquements font que la Cour Européenne des Droits de l’Homme assimile les infractions administratives à fort caractère répressif, tels les manquements boursiers, aux délits financiers du droit pénal (23).

§ 3 La faute disciplinaire

1) Caractère professionnel de la faute

La terminologie n’est pas neutre ; il s’agit d’une faute, non d’une infraction. C’est que la faute disciplinaire contrevient à un code de bonne conduite fixant la déontologie d’une profession, alors que l’infraction est une désobéissance à une disposition légale de protection de l'ordre public. Codes de bonne conduite, règlements intérieurs sont des règles qui ne protègent que l’ordre professionnel concerné. comme ce fut déjà dit, la faute disciplinaire (24) va souvent de paire avec une infraction pénale ou administrative. Mais elle ne peut recevoir le même traitement répressif que les délits ou manquements. Le régime juridique de la faute disciplinaire n’a rien à voir avec celui de l’infraction (délit ou manquement). En particulier, la répression disciplinaire n’est pas soumise au principe de la légalité des peines, cependant que son caractère répressif conduit à appliquer les droits de la défense comme pour la répression des infractions.

2) Compétence L’exercice de la répression des fautes disciplinaires est confié à des autorités variées, déterminées spécifiquement pour chaque secteur professionnel. En matière boursière depuis la loi n°2003-706 du 1° août 2003 opérant fusion des trois autorités de marché, c’est la Commission des Sanctions de l’AMF qui est compétente en matière disciplinaire. Or, elle est également compétente pour réprimer les manquements administratifs boursiers. Mais si les deux procédures sont confiées à la même autorité, lorsqu’un professionnel devra répondre des deux types de comportements répréhensifs, il n’y a aucune raison de pratiquer la fusion des dossiers puisque infraction de manquement aux règlements boursier et faute à l’encontre d’un code professionnel ne sont pas de même nature. Ce qui rend critiquable, au

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moins à ce titre, l’organisation actuelle des voies de recours comme cela a déjà été souligné. Actuellement, prennent de plus en plus d’ampleur les procédures disciplinaires. Cela s’explique par la nécessité d’assainir certaines professions, en particulier celles qui oeuvrent en matière financière. D’autant que les marchés globalisés, perdent leur territorialité au profit de l’intermédiation. Mais cette évolution conjecturelle et qui s’impose par la force des choses, ne doit pas se faire par empiètement du pouvoir judiciaire.

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NOTES

(14) Voir l’étude comparative de la faute civile, pénale, administrative, de gestion ou disciplinaire sous la plume des premiers intervenants au colloque : La criminalité d’argent: quelle répression ? éd. MONTCHRETIEN, collection Grands colloques, 2004.

(15) A. PIROVANO, Faute civile et faute pénale, Essai de contribution à l’étude des rapports entre la faute des articles 1382, 1383 du code civil et les articles 319 et 320 du code pénal, LGDJ 1967.

(16) Notamment C. GARCIN, Faute civile et faute pénale : unité ou dualité ? Actes du colloque précité, p15.

(17) F. DESPORTES et F. LE GUNEHEC, Droit pénal général, Economica 2005, p10.

(18) Un bon exemple de la transformation légale en 1994 d’un délit matériel en délit subjectif peut être donné avec la publicité trompeuse, LAMY Droit pénal des affaires 2005, n° 2052 et s ;

(19) F. DESPORTE et F. LEGUNEHEC, précité, note 17 ;

(20) S. PETIT, Le contentieux judiciaire et l’administration, 2D ; BERGER-LEVRAULT 1993, L’administration devant le juge judiciare, Que sais-je ? 1997B. GENEVOIS, Le Conseil constitutionnel et le principe de la séparation des autorités administratives et judicaires, RFD adm. 1987, p 287 ; infra, n°

(21) Conseil d’Etat, Décision 82-260, DC du 28 juillet 1989 JO 1° août.

(22) infra, n° et n°

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(23) CEDH 21 février. 1984, affaire n° 8544/79, Oztrük / All. série A, n°73 et aussi S. JANIN, L’infraction à caractère répressif à la Cour Européenne des Droits de l’Homme. Actes du colloque : La criminalité d’argent, précité, p 45.

(24) BRETHE DE LA GRASSAYE, Guide juridique Dalloz, VERBO Discipline ; M. DELMAS MARTY, Réflexion sur le pouvoir disciplinaire, Rev. Trim. Droits de l’homme 1995, p 155.

(25) voir, supra,

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CHAPITRE I

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Chapitre II

DÉLIT ET MANQUEMENT Dʼ ACTIONILLICITE SUR LES COURS

Section 1

Considérations générales

A) Rappel historique.

Le délit dʼaction illicite sur les cours de bourse, autrefois dénommé agiotage, est le plus ancien des délits boursiers (1). Il date en effet de la loi du 3 décembre 1926 introduisant sous lʼarticle 419, 2° du code pénal napoléonien de 1810, les termes “effets privés” à la liste des cas dʼincrimination de hausse ou de baisse artificielle des prix. Ce terme “effets privés” englobant les valeurs mobilières, dès lors, il était possible de punir la spéculation illicite sur le marché boursier. La spéculation qui consiste à passer des ordres en bourse en considération des fluctuations prévisibles des prix nʼest pas illicite. Bien au contraire, elle est inhérente au

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jeu boursier (2). Elle devient illicite, lorsque la loi de lʼoffre et de la demande se trouve faussée par des manipulations résultant dʼordres en bourse donnés pour faire varier artificiellement les cours.Les condamnations en la matière furent très peu nombreuses, les tribunaux ayant quelques difficultés à faire la différence entre les manœuvres caractéristiques de la vitalité dʼun marché et celles à but illicite. De surcroît, lors de lʼordonnance n°86-1243 du 1° décembre 1986 sur les prix, lʼarticle 419 du code pénal fut abrogé au profit de nouveaux textes sur la répression des actes anticoncurrentiels sans prendre garde à ce que ceux-ci ne concernaient pas la vie boursière. Le vide législatif ainsi créé fut comblé par la loi n°1988-70 du 22 janvier 1988 réformant lʼordonnance du 28 janvier 1967 dans laquelle figurait depuis 1970 le délit d ʼinitié. A partir de là, le vieux délit dʼagiotage reprit vie en se trouvant complètement coupé du droit économique. Actuellement il figure au code monétaire et financier sous lʼarticle L 465-2 (et L 465-3 en ce qui concerne les personnes morales (3)).

B)Terminologie juridique

58- Lʼancienne appellation dʼagiotage a disparu et cʼest quelque peu dommage car cela permettait de savoir de quoi il était exactement question: dʼactes entravant les cours de bourse. Il fut question de manipulations de cours, mais la directive “abus de marché” du 28 janvier 2003 (4), sous lʼinfluence des concepts anglais, englobe sous cette expression les trois types classiques de comportements illicites, le délit dʼinitié, la manipulations de cours et la mauvaise information financière. Or, elle regroupe les deux derniers sous la rubrique “manipulations de marché”. Il est vrai que la fausse information a une répercussion sur le cours de bourse. Pour éviter toute confusion, il est semble-t-il préférable de parler dʼaction illicite sur les cours ou sur le marché, lorsquʼil est question du vieux délit dʼagiotage qui actuellement est réprimé sous lʼarticle L 465-2 du code monétaire et financier qui parle, pour sa part, simplement dʼ “entrave” au fonctionnement du marché. Quant au manquement introduit à la suite de la loi n°89-531 du 2 août 1989 par le règlement COB 90-04, plusieurs fois modifié, il était dit “relatif à lʼétablissement des cours” et sous sa forme actuelle du règlement AMF du 24 novembre 2004 il porte lʼintitulé de “manipulation des cours”, sous le titre général de manipulation de marché englobant, comme le fait la directive européenne, la mauvaise information du marché.

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SECTION 2

Délit dʼaction illicite sur les cours (anciennement agiotage)

A) Frontière incertaine entre le licite et lʼillicite.

Le nombre réduit de décisions judiciaires sanctionnant ce délit sʼexplique en partie par les difficultés à établir la spéculation illicite par rapport à celle qui est normale sur tout marché. Lʼarrêt de la Cour dʼAppel de Paris du 28 juin 1984 (5) illustre bien ce partage difficile. Mais, il est une autre raison, les deux autres délits, infraction dʼinitié et diffusion de fausse information absorbent souvent la qualification dʼaction illicite sur le marché. B) Les textes

1) Article L 465-2 du code monétaire et financier:“Est puni des peines prévues au premier alinéa de lʼarticle L 465-1 le fait, pour toute personne, dʼexercer ou de tenter dʼexercer, directement ou par personne interposée, une manoeuvre ayant pour objet dʼentraver le fonctionnement régulier du marché dʼinstruments financiers en induisant autrui en erreur.”

2) Article L 465-3 du code monétaire et financier:“Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par lʼarticle 121-2 du code pénal, des infractions définies aux articles L 465-1 et L 465-2.Les peines encourues par les personnes morales sont:1) lʼamende, suivant les modalités prévues par lʼarticle 131-38 du code pénal,2) les peines mentionnées à lʼarticle 131-39 du code pénal.Lʼinterdiction mentionnée au 2° de lʼarticle 131-39 du code pénal porte sur lʼactivité dans lʼexercice ou à lʼoccasion de lʼexercice de laquelle lʼinfraction est commise”.

§1 Personnes punissables

Durant les deux ans qui suivirent lʼordonnance sur les prix de décembre 1986, aucun sujet de droit nʼétait punissable pour avoir manipulé le cours de bourse. Avec la loi du 22 janvier 1988 seules les personnes physiques pouvaient être sanctionnées pénalement et cela même après lʼinstauration, avec le code pénal de 1994, de la responsabilité pénale des personnes

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morales. Avec la loi du 2 août 1989 le manquement administratif prit forme à partir dʼun règlement COB de 1990 et ce texte visait aussi bien les personnes morales que les personnes physiques.Actuellement, personnes physiques et personnes morales sont sanctionnables aussi bien pénalement quʼadministrativement. Sur le plan correctionnel lʼarticle L 465-2 du code monétaire et financier vise les personnes physiques et définit lʼinfraction tandis que lʼarticle L 465-3 de ce même code vise les personnes morales en adaptant lʼéchelle des peines à ce type de délinquance.

§2 – Eléments constitutifs du délit

A) Premier élément matériel : des manoeuvres.

Il est quasiment impossible de déterminer abstraitement ce qui de la spéculation licite devient répréhensible. Le législateur napoléonien avait tenté de la faire, mais il avait dû se résoudre, après avoir visé certains actes types comme le fait de semer sciemment des faits faux ou de lancer des offres et sur-offres dans le seul but de modifier artificiellement les cours, à ajouter une catégorie “fourre-tout” sous la formule “toute autre manoeuvre illicite pour...”.Le législateur de 1988 a opté pour une formule plus générale de manoeuvre (6) et celui de 1996 nʼa fait quʼune légère retouche pour définir le délit sans décrire le comportement subjectif de lʼauteur de lʼinfraction, celui-ci pouvant être celui dʼune entité personnifiée. La loi de 2005 a précisé cet élément du délit en exigeant que les manoeuvres aient pour ojetif dʼentraver lʼévolution normale du marhé. Quant à la jurisprudence, elle a déjoué un montage juridique à travers une société de bourse qui, à première vue, laissait penser à une opération lidite (7).

Certains auteurs ont rapproché les manœuvres de ce délit de celles de lʼescroquerie (8), ce qui ne fait guère avancer lʼanalyse si ce nʼest que le simple mensonge, qui nʼest pas assimilable à une manoeuvre caractérisée, nʼest pas facile à démarquer de la fausseté de lʼinformation lancée sur un marché De toute façon, les manœuvres doivent être exercées sur le marché et donc il ne peut sʼagir que dʼordres ayant un impact sur les cours. La preuve peut résulter dʼenregistrements téléphoniques dont le parallélisme de leur contenu avec les opérations litigieuses est établi (9)B) Deuxième élément matériel : lʼobjectif poursuivi

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Pour dire que ces manoeuvres sont délictueuses, il faut donc se pencher sur leur finalité, cʼest à dire examiner si lʼobjet de ces manoeuvres a été dʼentraver le fonctionnement régulier du marché, aux termes mêmes de lʼarticle L 465-2 du code monétaire et financier. Il nʼest certes pas nécessaire que cet objectif soit atteint, une décision du Tribunal correctionnel de Paris (10) lʼa confirmé. Mais atteint ou pas, il est difficile à établir ce quʼaurait été le cours du titre sans les manipulations incriminées. Cʼest dʼautant plus difficile que ce délit peut se cumuler avec une fausse information qui, elle aussi, trouble les cours (11). Il convient aussi de se demander quelle est la portée de lʼexpression manoeuvre “induisant autrui en erreur”. Il fut se souvenir que les testes antérieurs exigeaient une “action” provoquant une “hausse ou une baisse artificielle des cours”. La substitution du terme action à celui de manoeuvre conduit certes, à sous-entendre une tromperie. Mais, il ne faut pas oublier que le choix du législateur pour cette modification de la terminologie sʼest effectué dans le souci de tenir compte de la nécessité pour lʼémetteur de protéger les titres, par exemple par des opérations de maintien des cours (12).

Le délit est commis même si la finalité des manoeuvres nʼa pas été atteinte. Ce qui explique que la tentative nʼest pas punissable (13 )

C) Lʼélément moral

69- Textuellement lʼélément moral aurait disparu avec lʼélimination du terme sciemment opérée par la loi du 2 juillet 1996 et le passage du texte dans le code monétaire et financier. Mais, la raison de cette modification tient au fait que la mauvaise foi nʼait plus besoin dʼêtre spécifiée puisque le code pénal de 1994 a éliminé toute possibilité dʼavoir dans notre système pénal des délits matériels ou objectifs. Cependant, lʼintention de nuire si elle continue de devoir être caractérisée se déduit facilement des manoeuvres comme cʼest le cas par exemple en matière dʼescroquerie. En même temps que certains éléments matériels, la mauvaise foi peut aussi se trouver simplement établie par les enregistrements téléphoniques (14).

§ 3- Tentative

Pour être punissable, elle doit être prévue spécifiquement, ce qui est le cas même depuis la réforme 2005. Ellesuppose un minimum de concrétisation des éléments de lʼinfraction, sans

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que celle-ci soit entièrement consommée. Or, il nʼest pas nécessaire que les conséquences sur le marché se soient produites pour que les manoeuvres illicites de lʼarticle L 465-2 soient punissables (alors que les manoeuvres de lʼescroc doivent avoir provoquées la remise de la chose pour que le délit soit commis). Il convient de noter que cette adjonction de la loi de 2005 est peu logique puisqʼen même temps ce texte a retenu lʼélément dʼimpact possible sur le marché dans les éléments constitutifs du délit.

§ 4- Répression

Lʼéchelle des peines pour les personnes physiques, comme pour les personnes morales est très lourde. Elle est celledu délit dʼinitié, lʼarticle L 465-2 renvoyant à lʼarticle L 465-1 (8bis).

A) Pour les personnes physiques

1) Lʼemprisonnement La peine de prison est fixée à un maximum de deux ans et bien entendu ne sʼapplique quʼaux personnes physiques.

2) LʼamendeCʼest la peine la plus adaptée à la délinquance financière. Lʼéchelle des peines pécuniaires est très élevée, cependant que les magistrats français, comparativement à ceux des Etats-Unis, ne sont jamais aussi sévères que le législateur. Cette peine pécuniaire peut aller jusquʼà 1.500.000 euros et même plus, puisquʼelle peut être portée au-delà en fonction du profit illicite tiré du délit (dix fois le montant de celui-ci). Et en tous cas, elle ne devrait jamais être inférieure à ce profit Il convient de noter que le calcul du profit illicite est particulièrement délicat à faire puisquʼil faut le comparer au cours qui aurait été (ce qui est forcément aléatoire) fixé si le marché nʼavait pas été perturbé B) Pour les personnes morales.

Comme il se doit, aux personnes moralesest appliqué un tarif supérieur calculé selon lʼarticle 131-38 du code pénal. Cela se justifie en ce sens que, particulièrement en cas de délit boursier, la personne morale a des capacités financières bien supérieurs à celles des personnes physiques et peut donc opérer illicitement à grande échelle. Pour une amende consécutive à une manipulation de cours, voir C A Paris 2 février 2007 (15). Par ailleurs, la responsabilité pénale de lʼentité personnifiée nʼévite pas que la propre responsabilité des personnes physiques ayant agi pour le compte de celle-ci soient punies. Ces mêmes personnes physiques peuvent dʼailleurs opérer également pour leur propre compte. Dans ce

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cas, il est logique et équitable que lʼamende-profit soit en rapport avec le profit personnellement tiré par chacun des co-auteurs ou complices.

C) Des peines complémentaires. Dans les cas où il sʼagit dʼune personne physique ou morale ayant une activité dʼintermédiation boursière et qui commet un délit boursier, une peine complémentaire dʼinterdiction dʼexercer avait été prévue par une ordonnance n° 2005-429 du 6 mai 2005dʼune légalité particulièrement contestable puisque la peine nʼétait pas seulement automatique mais rétroative (16) . Quant aux autres peines complémentaires, elles ne sʼappliquent quʼaux personnes morales. Ce sont celles du 2° de lʼarticle 131-39 du code pénal qui vont de la dissolution à la fermeture temporaire dʼétablissements, à lʼexclusion des marchés publics, à lʼinterdiction de faire appel public à lʼépargne et à celle dʼexercer certaines activités, jusqu à lʼaffichage et à la confiscation.

§ 4. Action civile.

Comme nʼimporte quelle victime dʼun délit, lʼépargant pour se constituer partie civile doit établir un préjudice subi directement et personnellement. La difficulté en lʼoccurrence tient au fait que cʼest la bonne marche du marché qui a été troublé. La question du préjudice direct et personnel se pose à peu près dans les mêmes termes que pour le délit dʼinitié. Et lʼon sait que pour ce dernier, la jurisprudence est plus favorable à recevoir la demande de dédommagement de la victime dʼune infraction boursière quedans le cas dʼabus de biens sociaux (Voir infra).

Section 3

Manquement de manipulation de cours A) Caractéristiques"

Le manquement qui fait pendant au délit dʼaction illicite sur les cours a été conçu par la COB en 1990 de manière plus large. Cʼest que lʼautorité de surveillance des marchés ne doit pas seulement se préoccuper de réprimer les manoeuvres qui peuvent perturber les cours, mais elle doit aussi veiller au bon établissement des cours. Aussi, le règlement COB 90-04 avait-il un double objectif. Dʼune part, il a cherché à imposer des règles dʼintervention sur le marché, applicables à lʼensemble des opérateurs, en vue dʼinterdire des pratiques irrégulières qui

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faussent la libre confrontation des ordres sur le marché; dʼautre part, il a édicté une présomption de légitimité en ce qui concernait, dans certaines conditions, les interventions des sociétés sur leurs propres titres. A la différence de lʼarticle 10-3 de lʼordonnance de 1967 réprimant la manipulation de cours de lʼépoque, le règlement n°90-04 se caractérisait par un fondement plus économique quemoral En effet, il sanctionnait davantage un comportement objectivement nuisible pour le marché quʼun acte coupable dʼun intervenant sur le marché.

Les articles 631-1 et suivants du règlement de lʼAMF du 12 novembre 2004, publié au JO du 24, nʼont pas changé de « politique réglementaire » malgré une rédaction nouvelle.. En effet, le chapitre “manipulations de cours” comporte deux sections: la première aux obligations dʼabstention, cʼest à dire à la définition à contrario des infractions de manquement et la seconde énumère les exemptions qui sont des,sortes de faits justificatifs.

B) Texte : le règlement général AMF du 24 novembre 2004.1) Obligations dʼabstentionArticle 631-1. “Toute personne doit sʼabstenir de procéder à des manipulations de cours.Constitue une manipulation de cours:1°. Le fait dʼeffectuer des opérations ou dʼémettre des ordres.a) Qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses sur lʼoffre, la demande ou le cours dʼinstruments financiers ou;b) Qui fixent, par action dʼune ou plusieurs personnes agissant de manière concertée, le cours dʼun ou plusieurs instruments financiers à un niveau anormal ou artificiel, à moins que la personne ayant effectué les opérations ou émis les ordres établisse la légitimité des raisons de ces opérations ou de ces ordres et leur conformité aux pratiques de marché admises sur le marché règlementé concerné;

2°. Le fait dʼeffectuer des opérations ou dʼémettre des ordres qui recourent à des procédés donnant une image fictive de lʼétat du marché ou à toute autre forme de tromperie ou dʼartifice. En particulier, constituent des manipulations de cours:a) Le fait, pour une personne ou pour plusieurs personnes agissant de manière concertée, de sʼassurer une position dominante sur le marché dʼun instrument financier, avec pour effet la fixation directe ou indirecte des prix dʼachat ou des prix de vente ou la création dʼautre conditions de transaction inéquitables;b) Le fait dʼémettre au moment de lʼouverture ou de la clôture ou, le cas échéant lors du fixage, des ordres dʼachat ou de vente dʼinstruments financiers du marché ayant pour objet

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dʼentraver lʼétablissement du prix sur ce marché ou pour effet dʼinduire en erreur les investisseurs agissant sur la base des cours concernés”.

Article 631-2. “Sans que ces éléments puissent être considérés comme formant une liste exhaustive ni comme constituant en eux-mêmes une manipulation de cours, lʼAMF prend en compte, pour apprécier les pratiques mentionnées au 1° de lʼarticle 631-1:1°. Lʼimportance de la part du volume quotidien des transactions représentées par les ordres émis ou les opérations effectuées sur lʼinstrument financier concerné, en particulier lorsque ces interventions entraînent une variation sensible du cours de cet instrument ou de lʼinstrument sous-jacent;2°. Lʼimportance de la variation du cours de cet instrument ou de lʼinstrument sous-jacent ou dérivé correspondant admis à la négociation sur un marché réglementé, résultant des ordres émis ou des opérations effectuées par des personnes détenant une position vendeuse ou acheteuse significative sur un instrument financier;3°. La réalisation dʼopérations nʼentraînant aucun changement de propriétaire bénéficiaire dʼun instrument financier admis à la négociation sur un marché réglementé;4°. Les renversements de positions sur une courte période résultant des ordres émis ou des opérations effectuées sur le marché réglementé de lʼinstrument financier concerné, associés éventuellement à des variations sensibles du cours dʼun instrument financier admis à la négociation sur un marché réglementé;5°. La concentration des ordres émis ou des opérations effectuées sur un bref laps de temps durant la séance de négociation entraînant une variation de cours qui est ensuite inversée;6°. Lʼeffet des ordres qui sont émis sur les meilleurs prix affichés à lʼoffre et à la demande de lʼinstrument financier, ou plus généralement de la représentation du carnet dʼordres auquel ont accès les participants au marché et qui sont annulés avant leur exécution;7°. Les variations de cours résultant des ordres émis ou des opérations effectuées au moment précis ou à un moment proche de celui-ci où sont calculés les cours de référence, les cours de compensation et les évaluations”.

Article 631-3. “Sans que ces éléments puissent être considérés comme formant une liste exhaustive ni comme constituant eux-mêmes une manipulation de cours, lʼAMF examine, pour apprécier les pratiques mentionnées au 2° de lʼarticle 631-1:1°. Si les ordres émis et les opérations effectuées par des personnes sont précédés ou suivies de la diffusion dʼinformations fausses ou trompeuses par ces mêmes personnes ou des personnes qui leur sont liées;

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2°. Si les ordres sont émis, ou les opérations effectuées, par des personnes avant ou après que celles-ci, ou des personnes qui leur sont liées, produisent ou diffusent des travaux de recherche ou des recommandations dʼinvestissement qui sont faux ou biaisés ou manifestement influencés par un intérêt significatif”.

Article 631-4. “Toute personne ayant transmis des ordres sur le marché doit être en mesure dʼexpliquer publiquement, si lʼAMF le lui demande à lʼoccasion dʼune enquête ou dʼun contrôle, les raisons et les modalités de cette transmission”.

2) Exemptions1°. Interventions des émetteurs sur leurs propres titres.

Article 631-5. “Les dispositions de la section 1 du présent chapitre ne sʼappliquent pas aux opérations effectuées par un émetteur sur ses propres titres dans le cadre de programmes de rachat dès lors que ces opérations:1°. Sont effectuées conformément aux dispositions du règlement n°2273/2003 de la Commission européenne du 22 décembre 2003;2°. Sont conformes à une pratique de marché admise et respectent les modalités dʼacquisition définies par e règlement n°2273/2003 susmentionné, à lʼexception des dispositions de ce règlement dont lʼapplication est écartée par la décision dʼacceptation de cette pratique mentionnée à lʼarticle 612-4. Les titres acquis dans le cadre du 1° font lʼobjet dʼune affectation immédiate par objectif et ne peuvent être réaffectés à dʼautres objectifs que ceux prévus par le règlement n°2273/2003 susmentionné”.

Article 631-6. “Conformément aux dispositions de lʼarticle 6 du règlement n°2273/2003 de la Commission européenne du 22 décembre 2002, lʼémetteur doit sʼabstenir dʼintervenir sur ses propres titres:1°. Pendant la période comprise entre la date à laquelle cette société a connaissance dʼune information privilégiée et la date à laquelle cette information est rendue publique;2°. Pendant la période de quinze jours précédant les dates auxquelles ses comptes consolidés annuels, ou à défaut ses comptes sociaux annuels, ainsi que ses comptes intermédiaires (semestriels et, le cas échéant, trimestriels), sont rendus publics. Lʼapplication de ces dispositions peut être écartée lors de la mise en oeuvre dʼune pratique de marché admise si la décision dʼacceptation de cette pratique mentionnée à lʼarticle 612-4 le permet”.2°. Stabilisation dʼun instrument financier.Article 631-7. “Les dispositions de la section 1 du présent chapitre ne sʼappliquent pas auxopérations réalisées par des prestataires de services dʼinvestissement dans le cadre de la stabilisation dʼun instrument financier, telle quʼelle est

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définie au 7 de lʼarticle 2 du règlement n°2273/2003 de la Commission européenne du 22 décembre 2003 sous réserve que ces opérations sʼeffectuent conformément aux dispositions du règlement susmentionné”.

Article 631-8. 3 Lʼémetteur ou le cédant, selon le cas ou lʼentité effectuant la stabilisation, quʼelle agisse ou non pour le compte de ces personnes, doit porter à la connaissance du public les informations mentionnées à lʼarticle 9.1 du règlement n°2273/2003 de la Commission européenne du 22 décembre 2003 avant le début de la période dʼoffre des instruments financiers, sous la forme dʼun communiqué dont il sʼassure de la diffusion effective et intégrale et qui est mis en ligne sur le site de lʼAMF et sur le site de lʼémetteur lorsque celui-ci dispose dʼun tel site. Cette obligation est réputée satisfaite lorsque lʼémetteur a inclus ces informations dans le prospectus soumis au visa de lʼAMF”.

Article 631-10. “Les informations mentionnées à lʼarticle 9.3 du règlement n°2273/2003 de la Commission européenne du 22 décembre 2003 relatives à lʼexistence et aux modalités de la stabilisation doivent être portées à la connaissance du public dans la semaine qu suit la fin de la période de stabilisation sous la forme dʼun communiqué qui est mis en ligne sur le site de lʼAMF et sur le site de lʼémetteur lorsque celui-ci dispose dʼun tel site. Lʼexercice de lʼoption de couverture mentionnée à lʼarticle 11 du règlement 2273/2003 susmentionné est rendu public sans délai dans les mêmes conditions que celles mentionnées au premier alinéa”.

C) Directive europenne, sa mise en application.

Une remarque mérite dʼêtre faite à la simple lecture de ces textes ;ils se réfèrent directement en y renvoyant,aux mesures dʼexécution des directives européennes. Autrement dit, lʼAMF adhère pleinement aux méthodes actuelles dʼintégration européenne par voie réglementaire et non législative, (plus techniques, voire bureaucratiques) ; ce qui permet, sous prétexte dʼefficacité, de « sauter » par dessus la souveraineté des Etats de lʼUnion européenne.

§ 1 Entrée en application du règlement AMF A) Textes abrogés.

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Lʼarticle 2 du règlement AMF énumère les règlements de la COB qui ont été abrogés, lesquels restaient en vigueur jusquʼà leur remplacement, aux termes mêmes de lʼarticle 47 de la loi n°2003-706 du 1° août 2003 ayant créé la nouvelle autorité des marchés. Par conséquent, le dit règlement, publié au JO le 24 novembre 2005, est donc entré en application dès le 25. Sauf en matière répressive.

B) Application du principe de non rétroactivité.

Il nʼest plus guère nécessaire de développer le caractère fortement répressif des manquements boursiers depuis quelques décisions-clefs de la Cour européenne de Strasbourg (17) qui, certes, ne concernaient pas les litiges avec la France, mais qui font jurisprudence pour tous les pays démocratiques adhérant à la Convention de Strasbourg. C) Premières décisions de la Commission des sanctions.

Comment lʼAMF a pris en compte ces principes ? Notamment la non rétroactivité des lois répressives. Les premières décisions de la Commission des sanctions de lʼAMF ont été relatives à des questions de faute disciplinaires (18). Au regard des manquements, une première décision portait précisément sur une question de manipulation des cours (assortie dʼune mauvaise information du marché). Il sʼagit de lʼaffaire NAF NAF (19).

1) Affaire Naf-Naf. Les faits de procédure étaient les suivants : Cʼest le directeur général de la COB qui avait décidé le 24 juillet 2003 dʼouvrir une enquête sur le second marché ou étaient admis les titres NAF NAF; laquelle devait aboutir à une notification des griefs en date du 1° juillet 2004, sur la base des règlements COB 98-07; 90-04 et 98-02 relatifs à lʼobligation dʼinformer le public, au bon établissement des cours et à lʼinformation à diffuser en cas de rachat de ses propres titres. Le rapporteur fut nommé par le président de la COB le 2 novembre 2004, peu avant que ne soit publié le règlement AMF du 24 novembre 2004. Or, la décision de sanction de la Commission des sanctions de lʼAMF porte la date du 7 avril 2005. Il convenait donc de poser et résoudre la question de lʼapplication du nouveau règlement par rapport aux anciens. Sous un considérant intitulé –II- « sur lʼapplication des règlements dans le temps »”, la Commission des sanctions a considéré que: « “le principe permettant dʼincriminer la manipulation de cours anciennement posé dans les articles 2, 3 et 7, al1 du règlement COB n°90-04 est repris dans les articles 631-1 à 631-4 du règlement général de lʼAMF et reste dont applicable aux interventions des émetteur ne respectant pas les présomptions de légitimité (article 631-5 du règlement général de lʼAMF); que les dispositions anciennes qui étaient

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rédigées de manière concise, ont été précisées et illustrées dans le règlement général de lʼAMF; que si les règles nouvelles indiquent de manière plus précise les éléments caractérisant le manquement, ces précisions ne modifient pas sensiblement les principes figurant dans le règlement COB n°90-04; quʼainsi, les deux textes interdisent, le premier “les ordres (ayant) pour objet dʼentraver lʼétablissement du prix sur le marché” ou “le fonctionnement régulier du marché” et “dʼinduire autrui en erreur” (article 3 et 7 du règlement COB n°90-04), le second “les ordres qui recourent à des procédés donnant une image fictive de lʼétat du marché ou toute autre forme de tromperie ou dʼartifice” (2° de lʼarticle 631-1 du règlement général de lʼAMF); que le manquement ne pourra être caractérisé quʼaprès avoir vérifié, en prenant en compte les éléments de lʼun et de lʼautre texte, lʼéventuelle incapacité des mis en cause à rapporter la preuve de leur bonne foi en démontrant que les modalités des opérations de rachat nʼont pas eu pour objet dʼentraver le fonctionnement régulier du marché ou nʼont pas revêtu un caractère trompeur. » Ce principe bien posé de comparer les deux textes, malgré leur similitude (le considérant parle de précisions qui ne modifient pas sensiblement les principes...), a été curieusement appliqué puisque la Commission des sanctions nʼopte pas pour lʼapplicabilité de lʼun ou lʼautre règlement, mais raisonne sur les deux à la fois. Cʼest ainsi quʼopère,le considérant suivant: : « non seulement la société NAF NAF ne justifie aucunement avoir respecté dans leur contenu ou dans leur esprit les règles auxquelles elle était soumise, mais il apparaît en outre, au sens des dispositions susvisées du règlement COB n°90-04 et du règlement général de lʼAMF, que le fonctionnement du marché a été altéré et que les investisseurs ont été trompés sur lʼintensité des interventions de rachat, dès lors que celles-ci, dissimulées grâce à la pluralité des opérateurs, ont dépassé le volume autorisé; que même si, comme le relève le rapport dʼenquête, “cette forte activité ne (parait)... pas avoir eu dʼeffet sur le cours de lʼaction” (cote 856), de telles pratiques nʼen ont pas moins été “de nature à porter atteinte aux droits des épargnants” et à “fausser le fonctionnement du marché” comme lʼénonce lʼarticle 621-14 du code monétaire et financier; quʼelles ont en effet permis à a société de racheter davantage de titres, et dans des conditions plus avantageuses que celles des offres de rachat quʼelles sʼapprêtait à faire quelques mois plus tard dans la perspective de sont retrait; que le manquement est donc caractérisé dans tous ses éléments, tant au regard des règles alors applicables que de la réglementation actuelle; quʼil ne sera retenu quʼà lʼégard de la société NAF NAF, les interventions étant reprochables au seul émetteur au sens des articles 6 et 7 du règlement COB n°90-04. 2)Critique de cette jurisprudence.

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Cʼest une façon quelque peu “désinvolte” de sérier lʼinterprétation de la loi répressive applicable, alors que les meilleurs pénalistes (20) expliquent clairement que lʼinterprétation analogique (qui nʼest pas lʼapplication cumulative) nʼa pas de raison dʼêtre lorsquʼelle est favorable à la personne poursuivie (encore faut-il comparer les analogies) et que lʼévaluation de la loi nouvelle doit être faite “liminairement avant tout examen des faits et cela sur la base de critères non pas factuels mais selon lʼesprit de la règle abstraite quʼest la loi. Et les auteurs de bien préciser que “la Cour de Cassation censure les juridictions qui feraient application dʼun texte pénal plus sévère de manière rétroactive” et que “de même, peuvent être déclarés illégaux les règlements qui violeraient le principe” .

§2- Éléments constitutifs du manquement

A) Rappel.

- Il était possible dʼécrire sous le régime du règlement COB 90-04 que les éléments constitutifs du manquement sont bien distincts de ceux du délit de manipulation des cours réprimé par lʼarticle 10-3 de lʼordonnance du 28 septembre 1967. Certes, ce règlement prohibait également le fait dʼentraver lʼétablissement du prix du marché et le fait dʼinduire en erreur. Mais il nʼexigeait pas de “manœuvres”. Il était question dʼentrave au fonctionnement du marché, notion que la COB a précisé dans son rapport annuel de 1990 (21) et du fait dʼinduire autrui en erreur. Cette dernière expression rendait très proche ce manquement avec celui du règlement 90-02 réprimant le manquement à la bonne information financière, la différence entre les deux infractions résidant dans le fait que cʼétait uniquement sur le marché quʼétait commise la tromperie en cas de manipulation de cours et quʼau surplus, il devait y avoir une répercussion sur les cours.

B) Lʼacte de manipulation..1) Manipulation, notion très large.Le règlement AMF en reprenant la notion de manipulation de cours a posé que toute parsonne devait sʼabstenir de procéder à des actes pouvant être qualifiés de manipulation. Sui alors une longue liste non limitatitve de ce qui pourrait constituter une telle manipulation (article 631-1°. Comme il est bien préciser que cette énumération nʼest pas exhaustive, lʼAMF sʼest vu attribuer un large pouvoir sanctionnateur qui peut conduire à la fixation des éléments de définition de lʼinfraction par sa propre jurisprudence.

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2) Cas de manipulation.Lʼexamen des divers cas de manipulation énumérés fait apparaître quʼil sʼagit dʼopérations ou dʼordres, lesquels sont nécessairement relatifs à des instruments financiers admis sur un marché réglementé, y compris les obligations (22) sans avoir à être effectués ou donnés en bourse (23). Cʼest là un changement qui tient à la pratique de la bourse en ligne et de lʼinternationalisation des ordres.

3) Auteurs et complicesCes manipulations peuvent être concertées à plusieurs. Il sʼagit alors de déterminer la participation active de chacun des co-auteurs ou complices. Il nʼest pas impossible que se cumule des manquements sous les deux casquette respective comme dans lʼaffaire Eurotunel (24).

B) Les effets sur les cours. Il nʼy a actes répréhensibles que sʼils donnent ou sont susceptibles de donner des indications trompeuses sur lʼoffre ou la demande et donc les fluctuations possibles des cours.

C) Intérêts protégés."

96- Cʼest pour éviter que par des opérations contestables les intervenants ne faussent les cours que le manquement es réprimé. Autrement dit, lʼintérêt protégé par ce manquement cʼest le jeu libre de la loi de lʼoffre et de la demande déterminant un prix de marché égalitaire pour tous les partenaires. Cʼest pourquoi, le règlement AMF vise aussi le fait de sʼassurer une position dominante sur le marché ayant pour effet de fixer les cours ou les conditions des transactions qui risquent fort dʼêtre inéquitables. Incontestablement, le manquement comme le délit , nʼest commis que si lʼobjectif poursuivi par les manipulateurs était de modifier la marche normale des cours. Cette finalité malhonnête est un élément à prendre en compte pour caractériser lʼinfraction. Cʼest même ce qui explique que le règlement ait prévue une longue série dʼexceptions. Cependant , le dommage au marché peut ne pas exister ou être très faible et justifier une peine réduite à 100 euros comme dans le cas de la manipulation des titres RENAULT par une société de bourse américaine (25)

D)Caractère objectif du manquement.

Les infractions administratives se démarquent essentiellement des délits par la non exigence dʼétablir la mauvaise foi des contrevenants aux règles. Mais si lʼintention coupable nʼa pas à être recherchée pour qualifier lʼinfraction objective, la nature même de la commission du

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manquement (tromper, agir artificiellement sur les coursen fausser le prix etc.) implique indirectement une analyse du comportement des auteurs des manipulations.Cela donne nécessairment un caractère ambigu à lʼélément subjectif du manquement. Cela implique que dʼune part, lʼAMF a pu considérer que le fait de tenir un tableau de bord des opérations boursières ne permettait pas de prétendre au caractère involontère de lʼopération illicite (Affaire Exane précitée). Et dʼautre part, il nʼest pas possible de prétendre que du fait de la disparition de lʼélément volontaire du texte du Règlement AMF, celui-ci serait plus sévère que

celui qui fut abrogé (Affaire GPG, décision AMF 26 janvier 2006).§3- Causes exonératoires

A) Exemptions réglementaires.

Cʼest sous la rubrique exemptions que sont prévus les faits justifiant une opération ou un comportement qui entrerait dans le champs des manipulations. Les articles 631-5 et 631-6 sont relatifs aux interventions des émetteurs sur leurs propres titres et les articles 631-7 à 631-10 concernent les opérations réalisées par des prestataires de services dʼinvestissement, des émetteurs ou des cédants pour stabiliser les cours.

B) Présomptions de légitimité.

Bien que lʼexpression “interventions répétées légitimes” du règlement COB nʼait pas été repris dans le règlement AMF, il convient de considérer que les opérations effectuées ou ordres donnés dans le cadre des exemptions retenue dans le passé comme présumées légitimes subsistent.A ce propos, il peut être rappelé que dans un rescrit du 16 avril 1991 (27), la Commission des opérations de bourse avait indiqué que étaient présumées légitimes les interventions dʼune société sur ses propres titres que, quotidiennement, nʼexcèdaient pas le quart de la moyenne des transactions journalières observées sur la période de trente jours précédant les interventions. La Commission avait précisé à ce sujet quʼil devait être tenu compte exclusivement des transactions en bourse. Cette présomption reste une présomption simple qui peut être renversée par lʼautorité poursuivante et sanctionnatrice. Même en cas de rejet de la présomption, lʼAMF a considéré que pouvaient être pris en comptes certains faits pour disculper (affaire Exane, précitée).

92 Les cas jurisprudentiels sont rares. Hormis lʼaffaire NAF NAF précitée (28) un cas a été traité sous lʼégide de lʼAM9) (29) il concernait des sociétés cotées au second marché et qui avaient procédé à lʼacquisition constante et massive de leurs propres actions durant la période précédant une offre publique de ces titres sur le marché. Les achats effectués représentaient environ 84% et 62% des achats effectués sur le marché pendant ce laps de

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temps. Ces acquisitions avaient eu pour effet de freiner considérablement la baisse des cours et ainsi maintenir ceux-ci artificiellement en induisant au surplus le public boursier en erreur. Les amendes infligées furent de 10.000 francs et 15.000 francs. A noter une autre affaire, à propos de deux décisions conjointes à lʼencontre dʼune société de gestion de portefeuille et de son président dont les titres ont fait lʼobjet dʼinterventions systématiques sur le marché pour le compte de clients, ce qui devait provoquer deux hausses de 19 et 11% pour être suivies dʼune chute au moment de la cessation des achats en bourse (30).

§ 4- Répression

A) Lʼamende.

La répression ne peut consister quʼen une sanction pécuniaire qui est à la même échelle que celle du délit. Elle est fixée par lʼarticle L 621-15 du code monétaire et financier pour tous les manquements boursiers à 1.500.000 euros ou au décuple du profit et peut donc dépasse ce montant déjà très lourd (et dʼailleurs jamais prononcé à notre connaissance). Dʼautres circonstances que le profit illicite peuvent motiver une forte amende. Ce fut le cas dans lʼaffaire Sedia Development (31) à propos de lʼaquelle il fut constaté que les actes de manipulation furent nombreux.

B) Publication de la sanction

La publication de la décision qui est une façon dʼinformer le public boursier mais est aussi une peine, intervient quasi automatiquement au BALO tenu par le journal officiel et également dans la revue de lʼAMF qui remplace le Bulletin de la COB. Il convient de noter que la position de lʼAMF et de la Cour dʼappel de Paris diverge de celle du Conseil dʼEtat, lequel considère que la publication est une peine complémentaire qui nʼaurait donc pas à être motivée (32) Un sursis à exécution de la publication (comme de la sanction dʼamende) peut être demandé dans le délai du recours devant la 1° Chambre de la Cour dʼAppel (33.

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notes

(1) L. MAZEAUD, Le délit dʼaltération des prix DP 1927, 4, p146; Y. GUYON, Aspects juridiques de la manipulation de cours, Rapport moral sur lʼargent dans le monde, 1995, p87; H de VAUPLANE et O. SIMART, La notion de manipulation de cours et ses fondements en France et aux USA, RD bancaire, octobre 1996, p158; C. DUCOULOUX-FAVARD, Droit pénal des affaires, éd. Masson 1987, p130 et 1993, p160.

(2) D.PONTON-GRILLET, La spéculation en droit privé, D 1990, chr. p157.

(3) Voir infra, n°

(4) Directive n°2003/6 du 28 janvier 2003, JOUE 12 avril 2003, L96, p16.

(5) CA Paris 28 juin 1984, JCP éd. E 1986 I n°15846 note A. VIANDIER et J.J. CAUSSIN; Rev. sc. crim. 1986, p625, note M.MASSÉ, infirmant T. corr. Paris," " 8 novembre 1993; Rev. sc. crim. 1986, p625, obs. M Massé. La cour dʼAppel a estimé que “la qualification de normale ou dʼanormale donnée à une intervention sur le marché boursier échappe à tout critère objectif dès lors que les opérations de vente et dʼachat se sont réalisées selon les cours applicables; la spéculation, même hasardeuse, nʼest pas, en elle-même, constitutive dʼun délit, sauf précisément en cas de manipulation des cours qui reste à démontrer; la cour estime que la mise en jeu dʼun nombre très élevé dʼobligations sur un marché très étroit a nécessairement eu une influence déterminante sur les cours; mais ce nʼest pas dire quʼune telle mise en jeu soit à priori suspecte et doive laisser présumer une action pénalement répréhensible sur les cours”.

(6) A noter que les travaux parlementaires à lʼoccasion du rapport AUBERGER ont tenté de décrire quatre types de manœuvres qui pourraient être illicites, voir AN. 1987.88, Rapport n°1159 et J Cl Banque et Crédit ou Sociétés 2001, fasc. 1640, n°23.

(7) Aff, Deveaux, C A Paris, 9° Ch, 2 février 2007, Bull Joly Bourse 2007, p 200, note E. Dezeuze.

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(8)J.H.ROBERT, note sous TGI 14 mars 1999 et C A Paris 19 février 1991, Dr. Pénal 1991, n° 202 ; plus nuancés H. DE VAUPLANE et O. SIMARTLa notion de manipulation de cours et ses fondements en France et aux Etats Unis, Rev. Dr. Bancaire et bourse 1996, p 158 ;

(9) Décision COB, 4 février 2003, Bull COB, mai 2003, p 85.

(10)TGI Paris, 26 sept. 2003, n°0016192037-H, Droit des Sociétés 2004, n°116, note R.SALOMON; RTD com. sept. 2004, p574, note N.R.

(11) Voir C.FREYRIA, Les aspects répressifs de la réglementation boursière et de la bourse, RD bancaire et bourse 1988, p113 et aussi S.ALAMONITCH, De la rumeur à la manipulation, Marchés et techniques financières, oct. 1995, n°74, P13.

(12) Illustre bien de telles situations lʼaffaire Bouygues Trois Quartiers lors de la préparation de lʼOPE; TGI Paris 5 mars 1993, RJDA 1993, n°11, n°813.

(13) Infra, n°èà

(14) TGI Paris 5 mars 1993, RJDA 1993, n°11, N°813 retenant et caractérisant la volonté de perturber le marché au détriment des autres partenaires.

(14) TGI Paris 26 sept. 2003, précité note 7,;ord. n°2005-429 du 6 mai 2005, voir infra, chapitre 7.

(15) Bul Joly Bourse éààè, p 200.

(16) C. DUCOULOUX-FAVARD, Une peine dʼinterdiction automatique et rétroactive sur jugement passé en autorité de la chose jugée, Rev. Lamy DR; pénal aff. décembre 2005, p 1 ; C. LEGUEVAQUES et N. PATUREAU, une surprenante disposition à effet rétroactif en matière pénale, Les petites Affiches 25 juillet 2005, n° 146, p 4.

(17) Voir supra, n°7 et surtout infra, n° (p5 procédure).

(18) C.DUCOULOUX-FAVARD, note sous Commission des sanctions 18 mars 2004, Les Petites Affiches 28 juillet 2004, n°150, p16.

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(19) Décision AMF, 7 avril 2005, Rev. AMF, mai 2005 ou BALO du

(20) F. DESPORTES et F. LE GUNEHEC, Droit pénal général, Litec, 11°éd. 2005.

(21) Précité note 14, n°326, p278.

(22) Rapport COB 1990, p89 et 90.

(23) Décision AMF, 27 septembre 2007, Société IXI Corporat investment, Rev. AMF 2007, n° 41, p 89.

(24) Ainsi pour des opérations hors séance dans lʼaffaire Exane et Eurazeo, Décision AMF 16 septembre 2005.

(25) Décision AMF, 7 ocotbre éààʼ, affaire Provalor et Rabineau, banque et droit 2005, n° 99, p 45, obs. H. de Vauplane et J. J. Daigre.

(26) Décision COB, précitée, note 8, à propos dʼachats massifs de titres RENAULT dʼune société de bourse aux USA, la ABN AMRO.

(27) Décision AMF, 7 décembre 2007, Rev. AMF 2007, n° 26, p 81.

(28) P. LE CANNU, Rescrit du 16 avril 1991 relatif à lʼachat en bourse par une société de ses propres titres: Bull. Joly 1991, p987, §348; sur le rescrit financier (organisé par le règlement n°90-07 relatif à la procédure de rescrit de la Commission des opérations de bourse) par lequel la COB prend position de manière préalable sur lʼinterprétation de lʼun de ses règlements, v. notamment P. LE CANNU, Le rescrit de la Commission des opérations de bourse: un nouvel instrument dʼinterprétation du droit boursier: Bull. Joly 1990, p927, §295; B.OPPETIT, La résurgence du rescrit: D. 1991 chr. p105; L.RICHER et A.VIANDIER, Le rescrit financier: JCP, éd. E 1991, I, n°10; N.DECOOPMAN, Le rescrit: Rev. sociétés 1991, P449.

(29) voir supra;;;

(30) Décision amf 27 septembre 2007, Société IXI Corporat Investment, Rev. AMF 2007, n° 41, p 89.

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(24) Décision COB 24 novembre 1992, Bull. COB 1992, p 29, à lʼencontre des sociétés ICPU COMPUTEL et FIDINVEST.

(25) Décision COB 27 sept. 1994, Bull. COB sept. 1995, Banque et droit 1995, n°44, p23, note F.PELTIER.

(26) Voir infra, partie procédure, n°

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CHAPITRE III

DELITS ET MANQUEMENTS D’ INITIE

INTRODUCTION

- Le marché boursier a été juridiquement pensé comme reposant sur la loi de l’offre et de la demande entre partenaires égaux. C’est sur de telles bases que repose le libéralisme. Or, l’égalité ne peut exister que si l’information financière, moteur de la spéculation licite qui donne vie au marché (1), est également partagée, c’est à dire correctement diffusée. Aussi, a-t-il été considéré que ceux qui sont au cœur du secret des affaires devaient s’abstenir d’opérer en bourse tant que l’information qu’ils détenaient par privilège n’était pas communiquée. C que les américains résument sous la formule « abstain or disclose ».

97- Sur ces bases, lors de l’introduction en 1970 du délit d’initié en droit pénal français, cette infraction fut baptisée « délit d’utilisation illicite d’une informations privilégiée » et ne se commettait que par un initié, c’est à dire une personne dans le secret des affaires par profession ou fonction.

98- Au fil du temps et des lois, le délit d’initié s’est considérablement élargi. Depuis 1983, ce délit ne se commet plus seulement en opérant illicitement sur le marché, mais aussi en communiquant l’information réservée à un tiers susceptible de l’utiliser en période d’abstention. Et depuis 1989, le bénéficiaire, c’est à dire l’initié d’initié, est lui aussi devenu punissable s’il opère en de telles circonstances, ceci grâce à la jurisprudence qui lui a appliqué la qualification de receleur d’information privilégiée. En 1996, ce sont les personnes morales qui peuvent se voir reprocher ce délit. Et avec la loi de 2001, le bénéficiaire est punissable sans plus passer par le détour du recel mais du délit d’initié lui-même.

99- Le délit d’initié consiste donc à opérer ou à communiquer illicitement en période d’abstention. Par conséquent,la matérialité du délit s’établit en déterminant de manière précise les dates de la période de réserve (de la précision de l’information privilégiée jusqu’à sa diffusion au public boursier) et la qualité d’initié ou de celle de bénéficiaire.

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100 Ces caractéristiques se retrouvent à quelques nuances près dans le manquement administratif réprimable,, depuis 1989, par l’Autorité de marché

Section 1

Délit d’initié

§ 1 Evolution de la législationA) Mise au nominatif

Le souci de transparence était déjà très présent dans l’esprit du législateur lorsqu’il instaura la Commission des Opérations de Bourse en 1967 L’ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 (2), avait inséré dans la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales un article 162-1, aux termes duquel certaines personnes avaient l’obligation de mettre au nominatif les actions qu’elle, ou leurs proches, détenaient dans la société, ses filiales et sous filiales, ainsi que d’informer la COB de tout mouvement portant sur leurs titres .Les initiés visés étaient d’une part des dirigeants des sociétés cotées et des membres du personnel lorsque la COB avait constaté qu’ils disposaient en raison de leurs fonctions, d’informations privilégiées. Ce texte s’inspirait du droit américain qui avait depuis longtemps mis en place un contrôle de la Securities Exchange Commission , SEC(3)

Cependant, très vite, la COB devait s’apercevoir de l’inefficacité de ces mesures qui n’étaient assorties d’aucune sanction. Ainsi, naissait la loi n° 7O-1203 du 23 décembre 1970 créant le délit d’initié.

B) Premiere loi répressive du délit d’initié : 1970

– La loi de 1970 sanctionnait le fait, pour un initié de réaliser sur le marché boursier, soit directement, soit par personne interposée, une ou plusieurs opérations en exploitant, avant que le public en ait connaissance, des informations sur la marche technique, commerciale et financière d’une société dont un initié avait eu connaissance à l’occasion de ses fonctions ou sa profession.

La loi Delors, n° 83-1 du 3 janvier 1983 sur le développement des investissements et la protection de l’épargne a modifié le délit d’initié en élargissant la notion d’information pprivilégiée et en créant une nouvelle forme de commission du délit par communication fr l’information réservée à un tiers, un non initié .Cependant, ce dernier, même s’il opérait en période de réserve, restait hors d’atteinte de la répression, seul celui qui avait violé le secret d’affaire était punissable.

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C) Elargissement aux opértion hors marché : 1988

– La loi n° 88-70 du 22 janvier 1988 (5) sur les bourses de valeurs se contenta de modifier la terminologie à deux niveau : tout d’abord en supprimant le qualificatif de boursier relatif au marché, ce qui élargit la répression aux opération hors bourse ; ensuite, en remplaçant le terme exploiter par celui de réaliser, ce qui éliminait la controverse doctrinale sur l’appréciation de la mauvaise foi sur la base de cette terminologie malheureuse en « objectivisant » le délit

D) Scandale Péchiney et dévolution du puuvoir de sanction à la COB : 1988, 1989

A l’automne 1988 éclatait le fameux scandale dit PECHINEY, sur les titre TRIANGLE cotés aux Etats-Unis (6) Ce qui faisant scandale c’était, certes, la qualité de certains opérateurs proches du Président de la République de l’époque, mais c’était aussi le volume considérable des transactions illicites. En même temps, apparaissaient les lacunes de la loi pénale ; les bénéficiaires qui étaient ceux qui avaient opéré avec l’énormes sommes, n’entraient pas dans le champs de la définition légale du délit. Le scandale fut « réparé » par une loi….

Pour commencer, la loi n° 89-531 du 2 août 1989 relative à la sécurité et la transparence financière, renforça le montant des peines et doubla le délit pénal en instaurant un manquement administratif à échelle de peine pécuniaire équivalente (7) Cette double procédure reçu avec assez peu de réserves, le feu vert du Conseil constitutionnel (8).Curieusement, alors que le scandale était né de bénéficiaires d’informations communiquées en période de réserve, la loi de 1989 les laissait encore hors de portée du délit d’initié . Il fut simplement créé le délit dit de « dîner en ville » c’est à dire de l’initié bavard qui « lache » un secret inconsidérément et non pas en connaissance de cause, c’est à dire pour permettre à celui qui le reçoit d’opérer par privilège.E) Incrimination des personnes morales : 1996

Le code pénal de 1994 dont l’une des principales innovations fut la responsabilité pénale des personnes morales sur la base du principe de spécialité (9), omit de viser les délits boursiers. C’est la loi n° 96-567 du 2 juillet 1996, dite de modernisation des activités financières (10) qui répara l’oubli. Et l’on sait qu’aujourd’hui c’est le principe de la généralité qui s’applique depuis la loi Perben II, n° éàà’_ 204 du 9 mars 2004 (circ ministérielle du 13 février 2006, voir Lamy Droit pénal des affaires 2010, n° 163 et s).

F) Incrimination du bénéficiaire d’une information réservée : 2001 La loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, outre qu’elle a intégré les délits boursiers dans le terrorisme, a finalement fait du bénéficiaire d’une information privilégiée opérant en période de réserve un délinquant boursier au même titre que l’initié par profession au fonctions. Quant à la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005, dite pour la modrenisation de l’économie, elle s’est contentée de déplacer l’article L 465-1 du code monétaire et financier relatif à la fausse informatin (sous l’article L 465-2). En outre,

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elle a exigé l’établissement d’une liste présumée d’initiés (Voir communiqué AMF du 10 javier 2006).

G) Nouvelle répartition du contentieux administratif du deuxième degré : 2003 ;

Pour l’heure, l’évolution de la loi répressive boursière semble marquer un temps d’arrêt, la loi n° 2003-706 du 1° août 2003 dite de sécurité financière qui a opéré la fusion des autorités de marché sous l’égide la la nouvelle AMF (11). Cependant, elle a modifié, de manière «discrète» et fort critiquable la répartition du contentieux administratif au niveau des recours (12)

§ 2 Droit européen

A) Directive initié : 1982

La première directive européenne en matière boursière, aujourd’hui abrogée est du 13 novembre 1989 513) et ne concernait que le délit initiés. Elle eut le mérite d’obliger les Etats membres qui ne l’ignorait de l’intégrer dans leur droit. Cependant l’harmonisation du droit substantiel pas plus que de la procédure répressive ne s’en est pas suivie (14)

B) Directive Abus de marché : 2003 Une nouvelle directive a vu le jour le 28 janvier 2003 (15), laquelle concerne sous le concept d’ Abus de marché, les trois principales infractions boursières. Mais surtout, cette directive change de politique législative ; elle cherche moins l’harmonisation des droits qu’une certaine homogénéité de l’organisation institutionnelle de la surveillance des marchés, avec notamment l’institution d’une.Autorité unique et la mise en place d’une procédure administrative allant de l’enquête à la sanction des infractions financières.

C) Textes

1) Art. l L 465-1 / du code monétaire et financier Est puni de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 1 500 000 euros dont le montant peut être porté au -delà de ce chiffre, jusqu’au décuple du profit éventuellement réalisé, sans que l’amende puisse être inférieure à ce même profit, le fait pour les dirigeants d’une société mentionnée à l’article L 225-109 du code de commerce, et pour les personnes disposant, à l’occasion de leur profession ou de leurs fonctions, d’informations privilégiées sur les perspectives ou la situation d’un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé ou sur les perspectives d’évolution d’un instrument financier admis sur un marché réglementé, de réaliser ou de permettre sciemment de réaliser ,soit directement, soit par personne interposée, une ou plusieurs opérations avant que le public ait connaissance de ces informations.

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Est puni d’un an d’emprisonnement et de 1 500 000 euros d’amende, le fait pour toute personne disposant dans l’exercice de sa profession ou de ses fonctions d’une information privilégiée sur les perspectives ou la situation d’un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé ou sur les perspectives d’évolution d’un instrument financier admis sur un marché réglementé, de la communiquer à un tiers en dehors du cadre normal de sa profession ou de ses fonctions. Est puni d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 1 500 000 euros dont le montant peut être porté au-delà de ce chiffre, jusqu’au décuple du montant du profit réalisé, sans que l’amende puisse être inférieure à ce même profit, le fait pour toute personne autre que celles visées aux deux alinéas précédents, possédant en connaissance de cause des informations privilégiées sur la situation ou les perspectives d’un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché réglementé ou sur les perspectives d’évolution d’un instrument financier admis sur le marché réglementé, de réaliser ou de permettre de réaliser, directement ou indirectement, une opération ou de communiquer à un tiers ces informations, avant que le public en ait connaissance. Lorsque les informations en cause concernent la commission d’un crime ou d’un délit, es peines encourues sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 1 500 000 euros si le montant des profits réalisés est inférieur à ce chiffre »

Art. L 465- 3 « Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l’article 121-2 du code pénal, des infractions définies aux articles L 465-1 et L 465-2 Les peines encourues par les personnes morales sont : 1) l’amende, suivant les modalités prévues par l’article 131-38 du code pénal ; 2) les peines mentionnées à l’article 131-39 du code pénal. L’interdiction mentionnée au 2° de l’article 131-39 du code pénal porte sur l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise »

§ 1 -Personnes punissables

A) Longue chaîne d’initiés

Aujourd’hui les personnes morales sont punissables aux coté des personnes physiques et le droit pénal s’est harmonisé avec le doit répressif administratif. Tous ces sujets de droit doivent être soit des initiés, soit des bénéficiaires, c’est à dire des initiés d’initié.

B) Les initiés

1) Qualité d’initié ou de bénéficiaire Il y a plusieurs catégories d’initié et une présomption de connaissance de l’information privilégiée pèse sur certains.Les initiés peuvent se définir comme les personnes qui sont dans le secret des affaires et c’est généralement par les fonctions occupées au sein des sociétés cotées qu’ils entrent dans les informations confidentielles Ce peut être aussi par les rapports professionnels avec cette première catégorie d’initiés. C’est bien pourquoi, le droit français de 1970 s’est limité à

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voir dans ces seules personnes des initiés, alors que d’autres systèmes de droit y incluent d’autres catégories de personnes (18). Pour le droit français,toutes les autres personnes sont des bénéficiaires qui n’ont pas toujours été punissables pénalement (19)

2) Les initiés présumés connaitre l’information priivilégiée – La loi de 1970, retenant comme seuls initiés les personnes informées par fonctions ou profession, les a divisé en deux catégories en faisant présumé sur certain la connaissance de l’information privilégiée et l’habitude fut prise alors de parler d’initiés de première ou de seconde main (20).Des initiés ditsde première main sont présumés savoir. Ce sont les personnes énumérées aujourd’hui sous l’article L 225-109du code de commerce, à savoir : le président, les directeurs généraux, les membres du directoire, les personnes physiques ou morales exerçant les fonctions d’administrateur ou de membre des conseils de surveillance, ainsi que les représentants permanents des personnes morales.

Cette présomption est une présomption simple qui peut donc se renverser par la preuve contraire. Mais comment convaincre de l’ignorance de l’information réservée lorsque l’on est PDG ou administrateur, même parti en déplacement à l’époque de l’arrêté des comptes énormément bénéficiaires ou très en perte ?.

Les conjoints des initiés ont été également présumés savoir. loi du 3 janvier 1983 avait assimilé aux initié présumés les conjoint de ceux-ci. C qui laissait hors de cette présomption les autres membres de la famille (21). Mais

aujourd’hui, la loi du 2 juillet 1996 a fait glisser les conjoints dans la catégorie des bénéficiaires devenus punissables. Cela fait donc disparaître à l’endroit des conjoints la présomption qui pèse sur leur partenaire dans la vie.

3) Simple rappel Depuis la loi n° 83-1 du 3 janvier 1983 jusqu’à celle n° 96-597 du 2

juillet 1996, il existait une présomption de réalisation de l’opération d’initié sur la tête des dirigeants de droit des personnes morales au profit desquelles un délit d’initié avait été commis. Avec la possibilité de punir les personnes morales, la présomption n’avait plus de raison d’être. Le cumul des responsabilité des personnes morales et de celles des personnes physiques étant possible, dès ,lors que l’infraction se caractérise pour chacun des sujet de droit, et ce séparément.

C) Les bénéficiaires

1) Les receleurs devenus bénéficiaires– Comme cela a déjà été dit les bénéficiaires, ces initiés d’initié, ne sont punissables comme des initiés que depuis la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001. Jusque là, et à compté de l’affaire dite PECHINEY (22), ils n’étaient sanctionnés que pour recel.

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L’intérêt de faire des bénéficiaires des auteurs de l’infraction d’initié réside dans le fait de ne plus devoir établir le délit d’origine. Il suffit dorénavant de prouver qu’il lui a été communiqué une information privilégiée et que sur la base de celle-ci, alors qu’il s’avait que la période d’abstention courait, il a opéré sur le marché ou communiqué illicitement l’information privilégiée. Cependant, la situation antérieur étant de ce fait plus douce, le délit d’initié du bénéficiaire n’a pu être poursuivi de ce chef que pour des faits commis avant l’entrée en vigueur de la loi nouvelle (23) .

2) Les bavards d’un «dîner en ville»124- Reste à se demander sur quelle base le bénéficiaire peut être poursuivi s’il a eu l’information d’un initié bavard ayant commis le fameux délit de « dîner en ville » (24) ? Autrement dit la communication dont il a bénéficie et qui lui a permis d’opérer en initié, doit-elle avoir été faite sciemment ou non ? Il semble clair qu’il suffit que le bénéficiaire soit conscient d’avoir reçu une information encore secrète car l’article L 465-1 vise le fait de « posséder en connaissance de cause des informations… »

§ 2- Marché et instruments financiers concernés

A) La Bourse La bourse qui se définissait essentiellement comme un marché géographique, (25) , se trouve aujourd’hui concentrée en quelques places(New York, Londres, Paris, Frankfort) et se défini en terme de marché réglementé au regard des titres qui y sont admis. Il y a là une délocalisation favorisée aussi par la bourse en ligne (26)

En France, l’évolution s’est faite, à propos du délit d’ initié par la suppression, en 1988, du qualificatif « boursier » du marché qui se trouve, depuis 1996,assorti du terme « réglementé (27). Ces changements ne sont pas neutres, ni arbitraires ; ils suivent simplement l’évolution de la vie financière d’un monde globalisé. Quant aux produits échangés sur la bourse, les anciens termes de valeurs mobilières ont cédés la place, sous la pression de la directive Services d’investissement à l’expression «instruments financiers » qui recouvre une réalité plus large, nécessitée par la création constante de nouveaux produits financiers. Encore que ce concept apparaît déjà comme trop étroit, une loi n°2005-842 du 26 juillet 2005 ayant remplacé, à propos de l’article 465-1 du code monétaire et financier sur l’information financière e qualificatif de «financier » âr celui de « réglementé ». C) Conception dualiste du marché

Cette mouvance du marché qui s’accompagne d’une prolifération des produits échangés, explique sans doute l’interprétation différente qui peu être faire, à un même moment, par deux autorités instituées différentes : les tribunaux judicaires et l’autorité des marché. L’affaire PIERRE BERGE illustre pour l’histoire cela

Il s’agissait de titres YVES SAINT LAURENT, admis au second marché et qui advint de gré à gré par convention passée en Suisse entre preneur et vendeur, alors que le public

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boursier était encore dans l’ignorance des difficultés de l’entreprise et de la baisse des cours qui ne pouvait manque d’advenir dès que celles-ci seraient révélées à tous. La COB sanctionna cette opération des initiés en considérant que le marché concernait « l’ensemble des transactions sur les valeurs mobilières » dès lors qu’elles étaient admises aux négociations en bourse (28). La première chambre de la Cour d’appel de Paris devait ultérieurement confirmer ce point de vue (29), alors que le Parquet ouvrait une information le 30 novembre 1993 et que s’en suivi une mise en examen, le 30 mai, de Pierre BERGE. Or, le juge d’instruction rendit une ordonnance de non-lieu considérant que la question du délit se posait en des termes plus stricts que celle du manquement. Les effets désastreux d’une double procédure se faisait alors sentir d’autant que la chambre commerciale de la Cour de cassation (30) confirmait la décision de la Cour d’appel ayant statué en matière administrative. Pourtant l’avocat général, M C. PIGNOT, avait relevé que « du moment que les marchés ne présentent plus de cloisonnement national, le critère de rattachement ne peut plus être celui du lieu de cotation, c’est à dire d’admission au marché ».L’évolution législative, sous la pression du droit européen, ne pouvait qu’aller en ce sens

§ 3- Eléments constitutifs matériels

e délit d’initié ne peut être commis que sur la base d’une information privilégiée et durant le strict laps de temps où, encore secrète elle n’est pas encore divulguée au public.Et l’on sait que, depuis la loi DELORS de 1983, le délit se commet en opérant ou en communiquant .Encore faut-il cerner ce qu’est une information privilégiée.

A) L’inforation privilégiée

1) ConceptL’information en cause doit porter sur un instrument financier ou une opération comportant des incidences sur cet instrument .Mais elle doit aussi présenter un certain nombre de caractéristiques : une certaine précision, un caractère confidentiel et non encore diffusée auprès du public.

2) Nature de l’information.Dans la loi de 1970, il était question d’information « sur la marche technique, commerciale et financière d’une société » cotée. Trop étroite, en 1983, elle fut élargie aux « perspectives ou à la situation d’un émetteur de titres ou sur les perspectives d’évolution d’une valeur mobilière ». Mais, étant donné l’évolution dans sa nature même, du marché il a été, à juste titre soutenu qu’à partir de là, il s’agissait de tous les titres admis sur un marché réglementé et donc des informations concernant ceux-ci.

A) Caractère précis de l’information.

1) l’affaire Péchiney

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Opérer en bourse sur la base d’une information réservée élimine la spéculation sur les possibles évolution des cours. Dès lors, une rumeur (31), un projet, une négotiation en cours qui peut encore échouer ne sont pas des informations suffisamment précises. Cependant, la précision ne suppose pas la certitude et encore moins une certitude chiffrée. Ainsi, un pronostic de 15 %, alors qu’il s’agit de 33 %, n’est pas une information précise (32), alors qu’une perte importante connue subitement l’est (33). Il est donc délicat de déterminer dans un cas d’espèce et donc en fonctions des circonstances, la précision lorsque les tractations se déroulent sur plusieurs mois;Le cas Péchney a donné pour la première fois, une illustration de cette difficulté et les juges du fond ont longuement décrit les aléas des négociations et considéré qu’un espoir de gain de 400% à 500% en cas d’aboutissement des négociations contre une probabilité de perte de seulement 20% en cas d’échec rendait l’acquisition des titres Triangle sous un risque minime à partir d’une information suffisamment précise pour entrer dans le concept légal de la qualification (34).

2) L ‘Affaire ZODIAC.Une autre affaire(36), illustre la difficulté à caractériser la précision de l’information lorsqu’il reste l’incertitude caractéristique d’une offre publique précédée d’un ramassage en bourse. Celui-ci doit cesser dès que la réussite de l’OPA s’est fait jour. Dans cette affaire, l’avocat général Y. JOBARD, a pu affirmer qu’un projet formé était suffisamment défini s’il avait des « chances raisonnables d’aboutir » et que peu importait l’existence d’aléas inhérents à certaines opérations .

33) Circonstances de fait donnant certitudeLa certitude est aussi fonction de celui qui la reçoit. Une poignée de mains chaleureuse exprimant la satisfaction d’un accord entre deux personnes en négociation est une certitude de la conclusion de l’accord pour celui qui connaît les pourparlers (37). L’analyse subjective a également été faite, tant au niveau du tribunal que de la Cour dans l’affaire de la BUE (38). Il fut considéré que la banque était parfaitement au courant de l’évolution du secteur économique en cause qu’il ne faisait aucun doute pour elle et ses dirigeants « qu’une lutte ouverte pour l’acquisition des titres de la RUCHE MERIDIONALE entre la société RALLY et CFAO était inévitable » La Cour de cassation devait censurer les juges du fond en estimant que l’information devait être objectivement analysée. Cependant, les sentences ne sont pas aussi contradictoires qu’il ne paraît. Si la Haute juridiction exige l’analyse objective de l’information, elle n’interdit pas qu’ensuite il faille se demander quelle a pu être, sur la base de cette information, la connaissance qu’a pu en avoir telle ou telle personne. Autrement dit, l’analyse de l’information doit être objective, celle de la connaissance qu’en a l’initié ne peut qu’être subjective. (Sans compter que dans cette affaire venue à une époque où les personnes morales, en l’occurrence la banque, n’était pas punissable, il était difficile de fixer une amende égale au profit à l’encontre des personnes physique qui avaient opéré pour le compte de l’établissement où elles étaient en fonction)

C) Abstain or disclose

– A partir du moment où l’information est suffisamment certaine s’ouvre le délai d’abstention qui a très tôt été dit absolu . Le fameux « abstain or disclose ». Et cette période de réserve subsiste tant que l’information n’a pas été diffusée sur le marché. La fixation de ces deux moments est déterminante pour retenir comme infractionnels les

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opérations faites dans ce laps de temps. Il est évident que le secret de tout le monde n’est plus un secret. N’empêche que la jurisprudence a considéré que les rumeurs qui circulaient dans la presse financière ne rendait l’information publique (35).La COB a d’ailleurs très vite réclamé une diffusion officielle de l’information pour rendre celle-ci incontestablement connue du public ; D) Absence de lien de causalité

La loi n) 88-70 du 22 janvier 1988 a supprimé la nécessité d’établir le lien de causalité entre l’information réservée et l’opération illicite. C e qui crée nécessairment une certaine objectivation du délit; or, la Cour de cassation a encore rappelé en 2006, qu’il était superflux pour qualifier le délit de rechercher si l’information a été déterminante de l’opération boursière (36).

§2) L’acte illicite

A) L’ordre en bourse : moment de commission

–L’opération sur le marché, c’est à dire l’ordre donné, marque le moment de commission du délit (Sur les motivations du législateur, Voir JO Sénat 27 octobre 1987, p 3521). La Cour de cassation vient encore de rappeler que, de ce fait, qu’il était superflu de rechercher si l’informétion privilégiée avait été déterminante de l’opération illicite (41). Le délit d’initié par opération illicite sur le marché est non seulement un délit instantané, mais aussi à caractère objectif. Comme cela a déjà été indiqué, en 1970 le délit d’initié se commettait seulement en opérant en bourse, c’est à dire en donnant un ordre d’achat ou de vente (et même en effectuant une cession ou une acquisition de gré à gré (41)). Il fut même considéré qu’un ordre donné en bourse avant d’être informé et non révoqué au moment où la détention de l’information devenait certitude était constitutif d’un délit d’initié (42). Mais cela ne vaut pas si l’ordre antérieurement donné s’est trouvé simplement liquidé durant la période d’abstention (43)

B) La communication de l’information privilégiée : moment de commission Ce n’est que si l’initié communique l’information secrète en dehors des nécessités professionnelles qu’il commet le délit par communication illicite. La loi de 1983 a au surplus précisé que cette communication devait être faite « sciemment » (ce qui fait la différence avec le délit dit de « dîner en ville »). Cela signifie aussi que l’initié doit savoir que le bénéficiaire est susceptible d’opérer en bourse en période d’abstention et donc de commettre lui aussi une infraction d’initié. C’est au moment où l’initié communique l’information réservée qu’il sait se mettre en infraction, mais celle-ci ne se concrétise qu’à partir de l’opération illicite du bénéficiaire.Ce n’est qu’à ce moment qu’apparaît l’acte de communication infractionnel. Autrement dit, l’instantanéité du délit est retardée.

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C) La communication inconsédérée, dite «délit de dîner en ville» – La loi de l989 qui a instauré le délit de communication inconsidérée d’information

privilégiée a proportionné la faute à cette divulgation par bavardage ; la peine est en effet inférieure .Si la jurisprudence est quasiment vide, ce n’est pas que des initiés bavards, il n’y en aurait pas, mais la preuve de ceux-ci sont difficiles à établir C’est si vrai, que le seul cas qu’ait eu à connaître le tribunal correctionnel (44) a donné lieu à une décision de relaxe. Dans cette affaire, l’information privilégiée était parue dans la presse financière et il fut particulièrement difficile de remonter aux sources de l’initié bavard. Il eut d’ailleurs été possible de poursuivre sur la qualification de divulgation de secret professionnel et de recel de ce secret de la part du journaliste. Mais les difficultés à poursuivre dans de tels cas de figure sont bien connues ; le journaliste sachant obtenir la divulgation de secret et sachant aussi bien garder pour lui l’origine de ses sources.

§ 4) L’élément moral

L’élément moral doit être analysé différemment selon que le délit se commettant en opérant ou en communiquant

A) A) La mauvaise foi de l’initié opérant et le délit obectif

Avant le code pénal de 1994, la jurisprudence avait qualifié le délit d’initié par opération sur le marché comme un délit matériel qui ne requérait que la démonstration de la qualité d’ initié, opérant d’ailleurs avec précipitation caractéristique, sur la base d’une information qu’il savait ou aurait du savoir comme étant réservée (45) Cette jurisprudence était d’ailleurs critiquée à partir de l’idée que l’on exploite pas une information par inadvertance (46). Or ce sont précisément de telles critiques qui sont à l’origine de la réforme terminologique ; la loi ayant remplacé le terme « exploiter » par l’expression « réaliser ou permettre de .réaliser » (47) Cela n’empêche pas de considérer que l’infraction n’est pas purement objective. Le dol, à partir de là, consiste à ne pas savoir ou ne pas avoir cherché à vérifier l’obligation d’abstention d’opérer. Pour illustrer cet aspect de l’élément moral, il peut être rappelé une décision de 1979 dans laquelle le tribunal a estimé suffisant le fait que le prévenu avait « la connaissance d’utiliser une information que sa fonction lui a permis d’exploiter » (48). Evidemment, la présomption de connaissance qui pèse sur certains initiés (49) a pour conséquence que c’est à eux d’établir qu’ils ne pouvaient avoir cette connaissance. Ce qui est particulièrement difficile à établir dès lors que la situation privilégié d’initié ne l’empêche pas de pouvoir donner matériellement des ordre d’opérer en bourse.

144- En revanche, la preuve de la connaissance du caractère privilégié de l’information est plus difficile à établir à l’encontre du bénéficiaire sur lequel ne peut peser aucune présomption. A cette difficulté ne s’ajoute cependant pas l’obligation pour la prévention de déterminer qui a informé le bénéficiaire, il suffit d’établir qu’il a bel et bien été illicitement informé. C’est le cas de figure des receleurs de l’affaire PECHINEY (50).

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B) La mauvaise foi de l’initié communiquant

La loi de 1983 qui a instauré la commission du délit d’initié sous cette forme, avait spécifié que cette communication devait être faite « sciemment » pour être punissable. Selon les textes actuels, il n’est plus question que de « communiquer à un tiers en dehors du cadre normal de la profession ou des fonctions ». Or un professionnel se doit de savoir quels sont ses devoirs de réserve. Il est donc un dol général difficile pour un professionnel de ne pas connaître de telles obligations. Quant au dol spécial consistant à savoir que le tiers qui reçoit l’information est susceptible de l’utiliser durant la période de réserve, , tout dépend des circonstances et donc de la qualité du bénéficiaire et des relations habituelles des deux protagoniste. Par ailleurs, au cas où ce dol spécial ne serait pas établi, il serait toujours possible de songer à requalifier la communication en bavardage…

§ 5 : Le profit : élément non constitutif du délit

La lecture de la loi définissant l’infraction d’initié ne fait apparaître aucune référence au profit en tant qu’élément constitutif.(51). Le profit illicite ne sert qu’à établir la proportionnalité de la peine avec la gravité du délit financier A noter seulement que le terme profit a été substitué par la loi DELORS de 1983 à celui de gain du texte légal initial.Une ancienne décision avait, sur la base de la notion de gain illicite,pris en compte le fait que l’acquisition d’actions en initié avait permis à celui-ci d’acc2déder au conseil d’administration, ce qui constituait un avantage frauduleux (52). Il n’y a pas, apparemment, de raison pour que cette jurisprudence ne s’applique pas avec la notion de profit illicite, bien que dans l’affaire PICCIOTTO (53) l’accession au contrôle de la société dont les titres ont été acquis en initié n’ait pas été prise en compte. Il est n’en reste pas moins vrai que le calcul du profit, généralement fait par les services de la COB, aujourd’hui l’AMF, n’est pas toujours facile à faire ; c’est d’ailleurs ce qu’illustre l’arraire PICCIOTTO puisque le tribunal correctionnel a opté pour un mode de calcul différent de celui de la COB.

§-6 Faits justificatifs

Le fait justificatif, dit aussi cause légitime, fait disparaître l’infraction bien que tous les éléments se trouvent réunis. Il n’est pas nécessaire que la loi les ait prévu ; les tribunaux peuvent retenir ces sortes d’exonération de responsabilité. Bien entendu, il ne suffit pas d’évoque n’importe quelle justification pour relaxer le prévenu.Ainsi, des nécessités de gestion financière (54), des échéances pressantes (55) ne justifient d’opérer en initié. Par contre, la défense anti OPA, selon les circonstances, peut justifier un ramassage en bourse (56), à condition de démontrer une nécessité impérative de se défendre par ce moyen. La COB a plusieurs fois refusé le ramassage face à une OPA inamicale (57)

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§ 7 – Tentative et complicité

A) TentativeLa tentative n’est pas punissable puisqu’elle n’a pas été prévue par la loi, comme l’exige le système de droit pénal français, contrairement à d’autres (tel celui de l’Italie). Or, il est difficile d’imaginer la tentative de donner un ordre, à part une panne de téléphone ou d’ordinateur…ou la tentative de communiquer une information privilégiée à une personne qui ne veut pas entendre…Pourtant la directive européenne de 2003 y fait allusion…

B) ComplicitéEn revanche, la complicité, bien qu’elle n’ait jamais été retenue (58), est envisageable dans les strictes conditions d’aide et d’assistance du code pénal.

§ 8 – Sanctions

A) Amende et prison

L’échelle des peine est élevée, elle comporte de la prison, jusqu’à deux ans, mais jusqu’ici, il n’y à guère que A. . BOUBLIL qui en ait fait (affaire PECHINEY), et l’amende peut être très forte puisque le maximum légal peut être dépassé au regard du profit illicite (le décuple). Des variations d’échelle sont prévues, ainsi selon que le délit est commis par un initié présumé opérant sur le marché (2 ans de prison) ou communiquant l’information (un an) ou par un bénéficiaire (un an). Quant à l’initié bavard de l’article L 451 1, al 2, s’il tombe sous l’échelle d’ une peine d’amende de 150 000 euros au lieu de 1 500 000 dans tous les autres, encourt tout de même un an de prison. Pour les personnes morales, le calcul de l’amende se fait conformément à la multiplication prévue par le code pénal sous l’article 131-39.

B) Peine complémentairePour les infractions les plus graves du droit des affaires depuis les décrets Laval de 1935 s’appliquaient l’interdiction de gérer temporairement ou de manière définitive. Ces textes anciens ont été abrogés par une ordonnance de 2005 n° 2005-427 du 6 mai 2005, les nouveaux textes se trouvant insérés sous l’article 500-1 du code monétaire et financier. Reste à savoir quelle est la sévérité des nouvelles dispositions par rapport aux anciennes afin de déterminer s’il y a rétroactivité ou non (Voir, J.H. Robert, un décret Laval fait de la résistance, note sous Cour crim; 17 octobre éààè, n) ৠ!( ç»é, Droit pénal 2008, comm 11).

§ 9 – Action civile

Après le scandale PECHINEY, la COB avait demandé à Alain VIANDIER un rapport sur la réparation civile et les obstacles à celle-ci en cas d’infraction boursière Ce rapport n’a pas seulement non été rendu public(60), mais il n’a donné lieu à aucune suite concrète (61).

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La seule avancée fut la loi n° 946 du 8 août 1994 n’a fait que donner aux associations d’épargnants les mêmes droits que ceux des associations de consommateurs. Mais les conditions trop strictes (les actionnaires doivent être inscrits au nominatif et détenir ensemble au moins 5°/° du capital pour pouvoir se regrouper) pour rendre leur action efficace,, surtout comparativement aux associations américaines (62). Quant aux associations agrées que la loi n° 88- du 5 janvier 1988 avait prévues, les conditions d’agrément sont également trop restrictives et jusqu’à ce jour aucune n’a reçu l’agrément, pas même l’ADAM de Colette NEUVILLE, pourtant particulièrement active.Celle6ci doit donc se contenter d’exercer l’action civile devant les tribunaux enfermée dans les limites du code de procédure civile-Quant à la jurisprudence, si parfois elle fait des avancées dans les possibilités offertes par le système juridique, elle recule aussi souvent. Ainsi, en 2002 la chambre criminelle de la Cour de cassation a admis, qu’à le supposé établi, le délit d’initié était susceptible de causer un dommage direct aux actionnaires (63). Or, trois ans plus tard, la Première chambre de la Cour d’appel de Paris, section H, admettant comme recevable l’action de l’ADAM (certes hors cas d’initié mais à propos d’une offre publique obligatoire) a rejeté l’action volontaire, jointe à celle de l’ADAM d’un actionnaire isolé (64). Mais les juridiction de fond résistentà cette restriction et dans une affaire Sidel la constitution des actionnaires en partie civile a été admise et à donné lieu à dédommagement (TGI Paris, 11° Ch, 1° section, 12 septembre 2006, Bull Joly bourse 2007, p 37, note E. Dezeuze). Au surplus, il a été considéré qu’il n’y avait pas à appliquer la théorie de la faute détachable ( voir C. Ducouloux-Favard, La règle de la faute détachable est dans la loi de 1966, Droit sociétés, octobre 2007, chr. 10).

§ 9 : règles du droit commun de droit international privé C’est encore l’affaire PECHINEY qui a fait jurisprudence. Dans cette affaire les délits d’initié et de recel d’information privilégiée ont été commis sur des titres cotés au Marché de New York Cependant les ordres avaient été pour la plupart donné de Paris et les principaux auteurs étaient français ou domiciliés en France. Ce fut d’ailleurs la SEC américaine qui saisit la COB L’incompétence du tribunal correctionnel de Paris a été plaidée par deux fois. Et par deux fois (65), la Cour de cassation, appliquant les règles du droit international privé français a admis la compétence française. Il suffit, en effet, qu’un élément de fait relatif à un élément constitutif du délit ait été perpétré sur le territoire national (66).

§ 10 : Prescrition

156 – Comme pour tout délit, la prescription est de trois ans à compter de la commission de l’infraction. Lorsque le délit d’ initié se commet par opération en bourse, le délit se commet dès que l’ordre est donné ou l’opération conclue. En cas de délit par communication illicite

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de l’information, le délit est concrétisé que par l’opération illicite qui s’en est suivie et le délai de prescription ne court d’=onc qu’à partir de là.

Section 2

Manquement d’initié : Comme le délit d’initié, le manquement administratif se commet, soit en opérant en

initié en période d’abstention, soit en communiquant une information réservée. La définition des contours infractionnels du manquement aurait pu se construire en harmonie avec celle du délit Mais les textes, touts en interprétation, stricte ne sont pas identiques, l’analyse doit se faire de façon autonome, même si elles peuvent se faire en référence l’une de l’autre. La question est particulièrement délicate aujourd’hui puisque le Règlement AMF a rédigé sous une forme nouvelle les infractions boursières administratives et que, dès lors se pose la question de la rétroactivité de ce dernier par rapport aux règlements de la COB (67). Il convient donc de redonner l’ensemble des textes répressifs.

§1 Textes

A) Le Règlement COB , tel que modifié en 1992

Art. 1°: «Au regard du présent règlement, le terme « marché » désigne l’ensemble des transactions portant sur des valeurs mobilières, des contrats à termes négociables ou des produits financiers admis aux négociations par le Conseil des bourses de valeurs OU LE Conseil du marché à terme : le terme « émetteur » désigne une personne morale dont les titres sont admis aux négociations sur la cote officielle ou sur la cote du second marché d’une bourse de valeurs ; le terme « informations privilégiées » signifie une information non publique, précise, concernant un ou plusieurs émetteurs, une ou plusieurs valeurs mobilières, un ou plusieurs contrats à terme négociables ; un ou plusieurs produits financiers cotés qui, si elle était rendue publique, pourrait avoir une incidence sur le cours de la valeur, du contrat ou du produit financier concerné » Les dispositions du présent règlement sont également applicables aux négociations sur le marché hors cote.

Art. 2: « Les personnes disposant d’une information privilégiée à raison de leur qualité de membres des organes d’administration, de direction, de surveillance d’un émetteur, ou en raison des fonctions qu’elles exercent au sein d’un tel émetteur, doivent s’abstenir d’exploiter, pour compte propre ou pour compte d’autrui, une telle information sur le marché, soit directement, soit par personne interposée, en achetant ou en vendant des titres de cet émetteur, ou des produits financiers liés à ce titre. Les personnes mentionnées à l’alinéa précédent doivent s’abstenir de communique l’information privilégiée à des fins autres ou pour une activité autre que celles à raison desquelles elle est détenue ».

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Art. 3:Les personnes disposant d’une information privilégiée à raison de la préparation et de l’exécution d’une opération financière ne doivent pas exploiter, pour compte propre ou pourcompte d’autrui, une telle information sur le marché ni la communiquer à des fins autres ou pour une activité autre que celles à raison desquelles elle est détenue ».

Art.: Les personnes auxquelles a été communiqué une information privilégiée à l’occasion de l’exercice de leurs profession ou de leurs fonctions ne doivent pas exploiter, pour compte propre ou pour compte d’autrui une telle information sur le marché ou la communiquer à des fins autres ou pour une activité autre que celles à raison desquelles elle a été communiquée ».

Art. Toute personne qui, en connaissance de cause, possède une information privilégiée provenant directement ou indirectement d’une personne mentionnée aux articles 2, 3 et 4 du présent règlement, ne doivent pas exploiter, pour compte propre ou pour compte d’autrui, une telle information sur le marché ».

. 6: Les émetteurs dont les titres se négocient sur un marché et les personnes mentionnées à l’article 19 de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988 sur les bourses de valeurs sont tenues de prendre toutes mesures utiles en vue d’éviter l’utilisation abusive ou la circulation indue d’informations privilégiées »

Art. : Les dispositions du présent règlement sont applicables aux dirigeants de ‘émetteur ou de la personne morale concernés »

B) Règlement AMF

Titre II Opérations d’initiéChapitre 1 : L’information privilégiée

Art 621-1 : »Une information privilégiée est une information précise qui n’a pas été rendue publique, qui concerne, directement ou indirectement un ou plusieurs émetteurs d’instruments financiers, ou un ou plusieurs instruments financiers, et qui si elle était rendue publique, serait susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés ou le cours d’instruments financiers qui leur sont liés Une information, qui si elle était rendue publique, serait susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours d’instruments financiers dérivés qui leur sont liés est une information qu’un investisseur raisonnable serait susceptible d’utiliser comme l’un des fondements de ses décisions d’investissement ».

Art. –621-2 : 3Pour les instruments dérivés sur produits de base, constitue une information privilégiée une information précise qui n’a pas été rendue publique, qui concerne,

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directement ou indirectement, un ou plusieurs de ces instruments dérivés et que les utilisateurs des marchés sur lesquels ces instruments dérivés sont négociés s’attendraient à recevoir conformément aux pratiques de marché admises sur ces marchés, lorsque cette information 1° est périodiquement mise à la disposition de leurs utilisateurs ou 2° est rendue publique application de la loi, des règlements ou des règles de marché, de contrats ou d’usages propres au marché du produit de base sous-jacent ou au marché d’instruments dérivés sur produits de base concernés ».

Art. –621-3 : Pour les personnes chargées de l’exécution d’ordres concernant des instruments financiers, constitue également une information privilégiée toute information transmise par un client, est d’une nature précise, se rapporte directement ou indirectement, à un ou plusieurs émetteurs financiers et seraient susceptibles si elle était rendue publique d’avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers qui leur sont liés ».

Chapitre II Obligation d’abstention

Art. –622-1 /Toute personne mentionnées à l’article 622-2 doit s’abstenir d’utiliser l’information privilégiée qu’elle détient en acquérant ou en cédant, pour son compte ou pour compte d’autrui, soit directement, soit indirectement, les instruments financiers auxquels se rapporte cette information ou les instruments financier auxquels ces instruments financiers sont liés. Elle doit également s’abstenir de : 1° communiquer cette information à une autre personne en dehors du cadre normal de son travail, de sa profession ou de ses fonctions ou à des fins autres que celles à raison desquelles elle lui a été communiquée ; 2° recommander à une autre personne d’acquérir ou de céder, ou de faire acquérir ou céder par une autre personne, sur la base d’une information privilégiée, les instruments financiers auxquels se rapportent cette information ou les instruments financiers auxquels ces instruments sont liés. Les obligations d’abstention posée au présent article ne s’appliquentpas aux opérations effectuées pour assurer l’exécution d’une obligation d’acquisition ou de cession d’instruments financiers devenue exigible, lorsque cette obligation résulte d’une convention conclue avant que la personne concernée détienne une information privilégiée ».

Art. – 622-2 / Les obligations d’abstention prévues à l’article 622-1 s’appliquent à toute personne qui détient une information privilégiée en raison de : 1° sa qualité de membre des organes d’administration, de direction, de gestion ou de surveillance de l’émetteur : 2° sa participation dans le capital de l’émetteur ; 3° son accès à l’information du fait de son travail, de sa profession ou de ses fonctions, ainsi que de sa participation à la préparation et à l’exécution d’une opération financière ; 4°) ses activités susceptibles d’être qualifiées de crimes ou de délits. Ces obligations d’abstention s’appliquent également à toute personne détenant une information privilégiée et qui sait ou aurait du savoir qu’il s’agit d’une information privilégiée.

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Lorsque la personne mentionnée au présent article est une personne morale, ces obligations d’abstention s’appliquent également aux personnes physiques qui participent à la décision de procéder à l’opération pour compte de la personne morale en question ».

§ 2 Rapide comparaison

A) Terminologie

Une première comparaison a été faite par A. DETHOMAS (68) qui es time que la notion d’initié se trouve élargie dans le Règlement AMF en ce sens que les initiés ne sont pas seulement ceux qui savent, mais aussi ceux qui auraient du savoir. Par ailleurs, le nouveau texte ne vise pas seulement le fait de communiquer mais aussi de recommander d’opérer. La différence est subtile dans les termes eux mêmes mais surtout il est passé sous silence le fait que la recommandation est faite sur la base d’un savoir privilégié. Une autre modification terminologique semblait à première vue encore plus prêter à difficulté ; c’est la substitution du terme sensible à celui de significatif qualifiant l’influence de l’information sur le cours des titres. Ce terme sensible peut être compris en deux sens opposés Mais une première interprétation de la Commission des sanctions (69) précise que l’actuelle terminologie est plus sévère que le précédant.Et puisque c’est l’AMF qui le dit !...

B) Le marché – Sur le marché concerné, l’opposition des thèses entre le judiciaire et l’administratif (70) n’a plus guère de raison d’être puisque le Règlement AMF circonscrit l’infraction en fonction des produits du marché et non plus du marché lui-même et en prenant soin de viser même les liens entre ceux qui sont de base et ceux qui en sont dérivé. Ce qui est une bonne façon de se mettre en adéquation avec une vie financière productrice de nouveautés.

§ 2- Personnes punissables Le règlement COB avait divisé les initiés en quatre cercles, le Règlement AMF, les classe à nouveau en quatre rubriques, plus une :-L’article 622-2, al 2 vise les actionnaires sous l’expression participant au capital ;-l’article 622-2, al 1 , 3° concerne les initiés par profession ou fonction, tels les journalistes financiers (71), les salariés en contact avec les services de gestion financière et de manière plus générale toute personne participant à la préparation d’une opération financière, y compris les fonctionnaires des services publics ou gouvernementaux ;-l’article 622-2, al 2 incluse les bénéficiaires dès lors qu’ils savent ou auraient du savoir qu’ils entrent dans le secret des affaire et une période de réserve ;-l’article 622-&, 3° concerne spécifiquement les mandataires de gestion. Ceux-ci pouvaient antérieurement entrer sous la catégorie des personnes initiées par profession (72)-Anoter que les conjoints ne sont plus assimilés aux initiés, mais il sont poursuivables en tant que bénéficiaires.

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1) Liste d’initiésPour faciliter la détection des initié»s, l’amf a imposé aux émetteurs de tenir une lite des personnes pouvant avoir accès à des informations prvilégiées. Et, même des tiers ou des initiés occasionnels doivent être portés sur la liste. En revanche, les analystes financiers dont c’est la fonction d’être à la recherche d’informations boursières, restent hors liste. Cette façon de classer les personnes susceptibles d’être dans le secret des affaires laisse en suspens la question de la présomption de la qualité d’initié lorsque se révèle un mouvement anormal des cours du à un délit d’initié. En outre, certains initiés ne parviennent pas souvent à prover qu’ils ne l’étaient pas (Voir affaire Société MONEYLINE, décision AMFé» octobre 2008°;

§ 3- Eléments constitutifs du manquement A) Caractère précis et non public de l’information

1) Alignement sur le délit – Comme pour le délit, l’information prise en compte porte soit sur l’émetteur, soit sur l’instrument financier et l’une comme l’autredoit être précise et non publique. D’ailleurs, le règlement de la COB avait repris la notion telle que la jurisprudence judiciaire l’avait

précisé.

2) JurisprudenceLa précision de l’information est tributaire de sa source et de sa formulation. Si la COB avait jugé qu’une information n’avait pas à être chiffrée pour être précise (Décison COB 14 avril éàà», Affaire VANNIER, Bul COB 2003, n° 381, 193), l’AMF a jugé qu’une lettre à plusieurs banque pouvait ne pas comporter des indications suffisamment précises (Décision AMF, 7 septembre , affaire IXI-CIB).Il est des cas qui semblent faire exception, notamment l’affaire VIVENDI. A une époque ou le groupe présentait des difficultés son président et son directeur financier tout en donnant une information trop optimiste sur le marché, sedéfaisaient de leurs titres. Ils furent condamnés pour fausse information mais relaxés pour le manquement d’initié ; ce qui sous entend que s’il est possible de mal informer sans être au fait de la situation précise ! (Voir C. Ducouloux-Favard, La fausse information n’implique pas la qualité d’initié, Bull d’actualisation Lamy Droit pénal des affaires 2005, n° C et Note sous CA PAris 1° Ch 28 juin 2005, Bull Joly Bourse 2005, p 592).

3) Rumeurs La COB avait eu l’occasion de dire que les rumeurs sur le marché n’étaient pas des informations précises à rendre l’information privilégiée (73). 4) Effet immédiat de l’information sur le coursDans une des dernières affaires jugée par la COB, celle-ci a cru poouvoir déduire de la chute immédiate du cours que l’informations divulguée avait bien le caractère privilégié. Mais, l

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a Cour d’Appel section financière n’a pas admis, comme l’avait fait la COB, que la preuve du caractère précis de l’information pouvait se déduire des effets immédiatement produit lorsque le public en prit connaissance (74)

5) Influence sensible sur les cours A l’origine le texte réglementaire se contentait de dire que l’information en cause devait avoir une influence sur les cours (75). C’est en 1997 que la COB a ajouté le terme significatif pour le voir remplacé, par la jeune AMF par le mot sensible (76). Alors que le délit ne vise pas les effets de l’information mais uniquement la matière sur laquelle elle porte , perspectives ou situation d’un émetteur . Avec l’atténuation des effets de l’information sur les cours, le règlement de 2004 en s’éloignant du précédant, se rapproche du délit. il n’en reste pas moins qu’un lien de causalité entre l’information et l’ordre en bourse n’a pas à être établi; le simple rapprochement chronologique suffit (Décision AMF, Affaire LE COADON, Bull Joly Bourse 2008, p 298, note N. Rontchevsky

B) Exploitation ou communication de l’information

1°L’exploitationen que le terme exploiter ait donné lieu à controverse à propos de la première rédaction du texte sur le délit, la COB le reprit en en précisant qu’il fallait le comprendre dans le sens de tirer profit. Quant au nouveau règlement, il insiste sur ,l’idée d’abstention ; il s’agit de s’abstenir d4exploiter. La règle reste le fameux « abstain or disclose » américain.

2) La communication illicite 168 La nouvelle rédaction qui fait référence, de manière plus général, au fait de communiquer un secret d’affaire en dehors du cadre normal de la vie des affaires, permet

de sanctionner l’initié de l’initié, c’est à dire le bénéficiaire et de plus le bénéficiaire du bénéficiaire. Reste que la preuve au bout de la châine devient de plus en plus difficile à faire. L’intérêt majeur de cette référence aux nécessités professionnelles fait que la finalité professionnelle est reconnue comme cause justificative de la communication en période d’abstention. La constitution de « murailles de Chine » dont il a tant été question dans les années 90 était visée sous l’article 7 du Règlement COB ; De toute façon, ces protections ne peuvent être évoquées pour échapper à la répression. En revanche, la négligeance à organiser la séparation entre les services d’investissement et ceux d’analystes ne peut qu’être une base pour plaider la responsabilité de l’article 1382 du code civil(78). il faut compter également avec le droit disciplinaire; c4EST AINSI QUE LA société Générale qui a pu échapper à une condamnation pour manquement d’initié grace à un savant montage par paradis fiscaux interposés, a pu être tout de même condamnée sur la faute professionnelle consistat à l’organisation de la non transparence (Décision AMF è février 2008, C Ducouloux-Favard, Un exemple de gouvernement d’entreprise non transparent, Les Petites affiches 2008, n° 116, p &» et Bull joly Bourse ............................

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C) Elément moral indifférent

– L’infraction administrative est objective ; le dol n’est pas un élément à établir. Ce qui n’empèche pas de prendre en compte la mauvaise foi pour justifier une certaine sévérité.

D) Indifférence du profit Comme pour le délit, le profit n’est pas un élément consitutif du manquement. Il doit servir à proportionner la peine à la gravité de l’infraction d’autant que l’intérêt protégé par le manquement est essentiellement la vie saine du marché dont seul peut résulter la confiance en la bourse.

§ 4 : Sanctions

1) L’amende – Seule l’autorité judiciaire peut priver une personne de liberté. L’AMF, comme feue la COB ne peut que prononcer des peines d’amende dont l’échelle des peine est la même et figure sous l’article L 465-1 du code monétaire et financier 2) La publication de la décision -La publication de la décision, prévue actuellement sous l’article l §é&-15 du code monétaire et financier, modifié par l’ordonnance n° 2007-544 du 12 avril 2007, est effectuée dans tous les cas au BALO et souvent en extrait ou intégralement dans la revue de l’AMF, comme antérieurement dans le bulletin de la COB. Cette publicité, qui est une peine complémentaire, permet d’ailleurs d’informer les tiers afin qu’il puisse présenterun recours ; elle est aussi un moyen d’informer le marché. Ce sont ces raisons qui on

déterminé la Cour d’appel à refuser le sursis à exécution de cette peine (79) et le Conseil d’Etat partage ce point de vue (80).

§ 5 Pescription

176 –Jusqu’à la loi N° 2003-706 du 1° août 2003, aucun délai de prescription n’avait été prévu. Ce vide a étécomblé le délai de prescription pour manquement de trois ans, a été caqué sur le droit pénal.

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Notes

(1) Cf. supra, n°

(2) JO du 29 septembre 1967; voir M.C ROBERT et B. LABROZ, La Commission des opérations de bourse, Puf, “Que sais-je ?” 1991, n°2622.

(3) La loi américaine prévoit en effet que le bénéfice dʼune opération qui a été réalisée par un initié (insider) sur les titres de sa société peut être réclamé par la société à la demande de celle-ci ou de lʼun de ses actionnaires. Aussi tout insider doit-il notifier à la SEC le nombre de toutes les actions de la société ou de titres assimilables dont il est propriétaire ainsi que les mouvements qui se produisent dans son portefeuille. La SEC diffuse tous les mois ces informations Sur la réglementation américaine, v. notamment A. TUNC, Le droit des sociétés anonymes aux États-Unis, 1985, n°185 et s. A. Georges, Lʼutilisation en bourse dʼinformations privilégiées dans le droit des États-Unis, Paris, 1976 et P. Didier, Droit commercial, t 3, Le marché financier, Les groupes de sociétés, PUF, coll. Thémis, 1993, p155-156; E. CHAMY, “Le délit dʼinitié aux États-Unis et en France”: Banque et droit, janvier-février, 1993, p12.

(4) JO, 24 décembre 1970; JCP, 1971, III, n°37323; voir J. HEMARD, F. TERRE et P. MABILAT, “Les réformes apportées à la loi sur les sociétés commerciales en décembre 1970”: D 1971, chron. p139; A. CANAC, “La surveillance des opérations dʼinitiés et du marché boursier”: Gaz. Pal., 1971, doctr. p181; adde M. DELMAS-MARTY, “Le délit des initiés va-t-il changer la bourse ?”: D 1977, chron, p 91. A. TUNC, La lutte contre les opérations dʼinitié, neuf ans dʼexpérience, Mélanges RODIERE 1981, p395; C. DUCOULOU-FAVARD, Le délit dʼinitié, dix ans de jurisprudence et dʼactivité de la Commission des opérations de bourse, Gaz. Pal, 1984, 2, doct. p479.

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(5) JO 23 janvier 1988, voir C GOYET Présentation générale de la loi du 22 janvier 1988 , Rev dr bancaire et bourse, 1988, p 109 Ch. FREYRUA, “Les aspects répressifs de la réglementation boursière actuelle”: RD bancaire et bourse, 1988, p113.

(6) Voir, infra n°

(7) C. DUCOULOUX-FAVARD Nouveaux pouvoirs pour la COB, la loi n°89-531 du 2 août 1989, Gaz. Pal. 1990, 1, doct. p2; P. JALADE, Vers un renforcement des pouvoirs de la COB, Petites affiches 18 juin 1989, p4; Le renforcement des pouvoirs de la Commission des Opérations de bourse, Petites affiches 13 sept. 1990, p2; A. COOURET D. MARTIN et L. FAUGEROLAS, Sécurité et transparence du marché financier, Bull. Joly 1989, n° spécial 11 bis; A. VIANDIER, “Sécurité et transparence du marché financier (commentaire des titres 1 et 2 de la loi du 2 août 1989)”: JCP, éd. E, 1989, I, n°15612 et JCP, éd. G, 1989, I, n°3420; D. CARREAU et J.Y. MARTIN, “La loi n°89-531 relative à la sécurité et à la transparence du marché financier”, ALD, 1989, p191; Ch. GAVALDA, “Commentaire de la loi du 2 août 1989 concernant lʼamélioration de la transparence et de la sécurité du marché financier”: Rev. sociétés, 1990, pI; J. STOOUFFLET et J.P. DESCHANEL, “Commentaire de la loi du 2 août 1989”: Banque 1990, p27 et p146; H. SYNVET, “Le nouveau droit boursier français après la loi sécurité et transparence du marché financier”: RD bancaire et bourse, 1990, p3.

(8) JO, 4 août 1989, Conseil Constitutionnel, avis n°89-260 DC, 28 juillet 1989, JO 1° août, p9676, rectificatif 5 août, p9896.

(9) Voir notamment LAMY Droit pénal des affaires.

(10) JO, 4 juillet 1996, Bull. Joly Bourse, 1996, p423, §71 et, sous la direction de Th. BONNEAU, La modernisation des activités financières, Joly 1996. Cette loi est dʼailleurs une loi dʼharmonisation de la directive “Services dʼinvestissement”, Dir. CEE n°93/22, &à mai 1993, JOCE 11 juin n°141, p27.

(11) Voir supra,

(12) Voir infra,

(13) Directive CEE n°891592 du 13 novembre 1989, JOCE 18 nov. n°L 334, p30.

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(14) C. DUCOULOUX-FAVARD, Géographie européenne de la qualité dʼinitié, actes colloque “Le juge et le marché boursier” 17 et 18 mars 1994, Petites affiches 15 juin 1994, p49.

(15) Directive CEE Abus de marché n°2003/6 du 28 janvier 2003, JOCE 12 avril, n°L96, p16.

(16) C. DUCOULOUX-favard, Transposition en droit français de la directive “abus de marché”, Bull. LAMY, Droit pénal des affaires, 2005, n°34.

(17) Directive CEE n°93/22 du 10 mai 1993, JOCE 11 juin, n° L141, p27.

(18) Alors que la directive européenne considérait comme initiés primaires les initiés par profession ou fonction et comme initiés secondaires les initiés de ces initiés; Voir C. DUCOULOUX-FAVARD, Géographie européenne de la qualité dʼinitié, précité, note 14. J.P.DOUCET, Le délit dʼinitié en droit communautaire et en droit français, Gaz. Pal. 1992, 1, doct. p422.

(19) Supra, n°

(20) Lʼexpression semble venir de V. CHAVANNE, Chronique législative, Rev. sc. crim. 1971, p440.

(21) Ce quʼa illustré lʼaffaire PORON; TGI 28 janvier 1985, Gaz. Pal. 1985, 1, jur. p287, note C. DUCOULOUX6FAVARD; D 1985, jur. p137, note J.P MARCHI.

(22) TGI Paris, 11° CH. 29 septembre 1993, aff. n°89-031.6925-3; Petites affiches 5 novembre 1993, n°133, p12, note C. DUCOULOUX-FAVARD; CA Paris, 9° ch. 6 juillet 1994, Petites affiches 16 novembre 1994, n°137, p17, note C. DUCOULOUX6FAVARD; C. cass. ch. crim. 26 octobre 1995, n°1794.83.780 P.F Petites affiches 24 novembre 1995, n°141, p19 note C. DUCOULOUX-FAVARD; J.C MARIN, Le recel de délit dʼinitié, Rapport moral de lʼargent dans le monde, 1995, p143.

(23) TGI Paris, 11° ch. 16 novembre 2004, Bull. Joly Bourse 2005, p27, note C. DUCOULOUX-FAVARD, à propos de lʼaffaire dʼinitié à lʼoccasion de lʼOPE préparée par la Société SITA, filiale de la Société Suez-Lyonnaise des Eaux.

(24) Voir, infra n°

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(25) Jusquʼen 1991, il y avait en France sept bourses qui ont été transformées en simples places du fait que seule la bourse de Paris a pu à partir de là procéder à lʼadmission des produits financiers sur un marché.

(26) H. DALLERAC, Les marchés financiers à lʼheure dʼInternet, Les entretiens de la COB 1998; C. DUCOULOUX-FAVARD, La marche du temps réel en bourse, Actes Colloque “Le temps et le droit”, Besançon 24 novembre 2000, Bull. Joly Bourse 2001, p222; L. RUET, La réglementation de lʼutilisation dʼInternet dans la passation des ordres en bourse, Dr. Sociétés 2000, p6

(27) Supra, la loi n°88-70 du 22 janvier 1988, n°…..et la loi n° 96-567 du 1° juillet 1996,

(28) Décision COB, Bull. 1994, n°277, p31.

(29) C A Paris, 1° ch., 16 mars 1994, conclusions Y. JOBARD, Gaz. Pal 1994, 2, jur p297; JCP, éd. E. 1994, n°605, note T. FORSCHBACH et F. LELOUP; JCP, éd. E 1994, n°22321, note J.H ROBERT; C. DUCOULOUX-FAVARD5 », Le marché de lʼinfraction dʼinitié, Petites affiches 1° juin 1994, n°29, p29.

(30) Cass. COM ; 18 juin 1996, n° 94 13 666, JCP éd G 1996 –II- 22 710, p 399 note H. HOVASSE . DR ; Sociétés 1996, N° 182, p 13 ; Dalloz Affaires 1996, p 994 ; RJDA 1996, n° &à ? N) &éàè ? P _-_ . Bull Joly Bourse 1997, p 21

(31) N. RONTCHEVSKY, Instruments financiers et délit boursiers, Colloque de Reins, 9 janvier 2002, Les Petites Affiches 28 mars 2002, p 25

(32) Sur une jurisprudence ancienne de bruits alarrmants, T G I Paris, 11° Ch 17 mars 1976, n° 46 684, J C P, éd G 1976 – II – n° 18 496, note A.TUNC , confirmé par C A Paris 30 mars 1977, JCP, éd G 1978 –II – 18 789, note A. TUNC

(33) T G I Paris, 11° Ch 28 avril 1985, Gaz ; Pal. 1985, 1, jur. P 287, note C. DUCOULOUX-FAVARD

(34) T G I Paris ? &&) Ch , &( octobre 1976, J C P, éd G 1977 –I – n° 18 543, note A. TUNC, Rev. Sociétés 1977, p 133, note M. DELMAS-MARTY ;

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(35) Voir lʼarrêt de la Cour dʼappel, précité, note 22

(36)C A Paris,1) Ch, sect COB, 15 novembre 1994, Bull COB 1995, n° 1995, n° 279, p 25.. Bull Joly Bourse 1995, p 9, note H DE VAUPLANE,conclusions Y. JOBARD, Gaz. Pal 1995, 2, jur, p 253

(37) Le cas de lʼarchitecte assistant à une poingnée de mains chaleureuse et qui sʼempresse de téléphoner des ordres en bourse, T G I Paris, 11°Ch, 15 octobre 1976, J C P, éd G 1977 –I- n° 18 543, note A. TUNC ; D 1977, chr. P 91, M. DELMAS-MARTY ;

(38) TGI Paris, 11° ch. 4 novembre 1992, p17, note C. DUCOULOUX-FAVARD; JCP, éd. G 1992- II, n°3612, p392, note A. VIANDIER et J.J CAUSSIN; Bull. Joly Bourse 1993, p35, note P. LE CANNU.

(39) Cass. crim. 26 juin 1995, n°93-81.646, Bull. crim. n°233, p635, Petites affiches 26 juillet 1995, p44, note C. DUCOULOUX-FAVARD; Bull. Joly Bourse 1995, p285, note P. LE CANNU; Rev. sociétés 1995, p562, note B. BOULOC; JCP éd. E, 1996-II-n°766, note A. VIANDIER. Voir aussi, affaire FLAMMARION, CA Paris, 25° ch., sect. B, 26 septembre 2003, n°2001-21885, Bull. Joly Bourse 2004, p43, note E. DEZEUZE.

(40) Voir la toute première jurisprudence; TGI Paris, 11° ch., 19 décembre 1975 et CA Paris, 9° ch., 26 mai 1977, JCP, éd. G 1978-I-n°18789, note A. TUNC.

(41) Supra, n°

(42) TGI Paris, 31° ch., 30 mars 1979, JCP éd. G 1980-I-n°19306, note A. TUNC; TGI Paris 11° ch., 18 avril 1979, JCP éd. G 1980-I-n°19306, note A TUNC.

(43) TGI Paris, 11° ch. , 29 octobre 1975, JCP éd. G 1976-I-n°18329, note A. TUNC, D 1976, jur.p53, note M. DELMAS-MARTY, Rev. sociétés 1976, p 345, note B. BOULOC; TGI Paris, 11° ch., 15 octobre 1976, JCP éd. G 1977-II-n°18543, note A. TUNC; Rev. sociétés 1977, p123, note B. BOULOC.

(44) TGI Paris, 11° ch., 13 février 2002, Petites affiches 12 avril 2002, n°74, p20, note C. DUCOULOUX-FAVARD.

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(45) TGI Paris, 11° ch., 19 décembre 1975, JCP éd. G 1976-II-n°18329, note A. TUNC.

(46) M. DELMAS-MARTY, Le délit des initiés va-t-il changer la bourse ?, D 1977, chr. p91.

(47) Supra, n°

(48) TGI Paris, 11° ch., 18 avril 1979, J C P éd.G 1980-I-n°19306, note A. TUNC.

(49) Supra, n°

(50) Précité, note

(51) TGI Paris, 11° ch., 29 octobre 1975, D 1976, jur. p53, note M. DELMAS-MARTY.

(52) Décision précitée, note 51.

(53) Décision COB, 22 décembre 1992, Bull. COB 1992, n°264, p3, Petites affiches 24 juin 1993, n°74, p14; TGI Paris, 11° ch., 3 décembre 1993, n°P92-243-6937-6, Petites affiches 19 janvier 1994, n°8, p8.

(54) TGI Paris, 11° ch., 28 janvier 1985, Gaz. Pal., 1985, 1, jur. p287, note C. DUCOULOUX-FAVARD

(55) TGI Paris, 11° ch., 19 décembre 1975; CA Paris, 26 mai 1977, D1978, jur. p379, note J. COSSON; TGI Paris, 11° ch., 3 décembre 1993, Petites affiches, 19 janvier 1994, p18, note C. DUCOULOUX-FAVARD; Gaz. Pal. 1994, 2, jur. p352.

(56) Communiqué COB 16 mai 1989 dans lʼaffaire LVMH.

(57) Voir, infra, les affaires Haddad et CCCC, n°

(58) Affaire Bodo, CA Lyon, 7° ch., 18 décembre 1991, Gaz. Pal. 1992, 2, jur. p449.

(59) Supra, n°46 et C. DUCOULOUX-FAVARD, Lʼamende et son rapport avec le profit illicite, Actes Colloque La criminalité dʼargent : quelle répression ? 14 novembre 2003, Monchrétien 2004, p183 ou Petites affiches 16 mars 2004, n° , p3.

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(60) Voir Entretiens COB nov. 1991, Bull. Joly Bourse 1992, p253.

(61) M.C ROBERT, La réparation civile des infractions financières, Actes Colloque La criminalité dʼargent, précité, p75.

(62) M.E TAHYAR, La réparation à lʼégard des investisseurs victimes de malversations boursières aux États-Unis, Actes Colloque précité, notes 59 et 60, p79.

(63) Cass. crim. 11 décembre 2002, n° O1-85-176, Bull. crim. n°224, Gaz. Pal. 2003, 1,jur. p496, note C. DUCOULOUX-FAVARD; Dr. pénal 2003, n°35, p17, note J.H ROBERT; RTD com. 2003, p336, note N. RONTCHEVSKY.

(64) CA Paris, 13 septembre 2005, n°2005-0458, Bull. Joly Bourse, 2005, pnote C. Ducouloux-Favard.

(65) Cass. crim. 3 novembre 1992, n°92-84-745, Bull. crim. n°352; D 1993, jur. p120, note C. DUCOUOLOUX-FAVARD, Bull. Joly Bourse 1993, p153, note M. JEANTIN. Cass. crim. 26 octobre 1995, n°94.83.780, Bull. crim. n°324; Rev. sc. crim. 1996, p136, note J.P DINTILHAC; Droit pénal 1996, n°189, p9, note J.H ROBERT.

(66) Voir LAMY Droit pénal des affaires, partie introductive et chapitre sur la coopération judiciaire sous la plume de D. FONTANEAU.

(67) Supra, n°

(68) A. DETHOMAS, Lʼévolution du manquement dʼinitié, D, 2005, p706.

(69) Décision AMF 21 avril 2005, BALO du 15 juin, affaire Perfect Technologie.

(70) Supra, affaire Pierre Bergé, n°

(71) CA Paris, 1° ch., sect. H, 24 février 2004, Banque et droit 2004, n°92, p30; dr. sociétés, juin 2004, comm. 109, note TH. BONNEAU.

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(72) CA Paris, 15 mars 1995, Bull. Joly Bourse 1995, p181, note N. DECOPMAN; Dr.sociétés 1995, com. 154, note H. HOVASSE; Décision COB, 24 septembre 2002, Bull. COB 2002, n°394, p39; CA Paris, 1° ch., 1° avril 2003, n°2002-18762 et 2002-18856.

(73) CA Paris, 1° ch., sect. H, 24 février 2004, p775, note S. TORCK.

(74) Décision AMF 3 novembre 2004, BALO, 1° décembre 2004, p29367; C. DUCOULOUX-FAVARD, La fausse information nʼimplique pas la qualité dʼinitié... Bull. LAMY Droit pénal des affaires 2005, n°36; CA Paris, 1° ch., sect .H, 28 juin 2005, n°2005-02233.

(75) R. BRONNER, La définition du délit d ʼ initié dans la loi pénale française, Gaz. Pal. 1994, 1, doct. p56.

(76) Supra, n°

(77) Bull. COB 1994, n°284, p32.

(78) A la suite de la mise hors de cause de la Société LVMH, voir Supra, n° ,une action en dédommagement sur cette base a été accueillie par le tribunal de commerce de Paris; T. com. 12 janvier 2004, Petites affiches, 28 avril 2004, p9, note B. LE BRAS.

(79) CA Paris, 1° ch., sect.COB, affaire FOURNIER, 15 mars 1995, Petites affiches 28 juin 1995, p27, note C. DUCOULOUX-FAVARD; Bull. Joly Bourse 1995, p281, note N. DECOPMAN.

(80) C E 9 novembre 2007, n° 29 89 11, Affaire BOURSE DIRECTE SA, décision de,la Commission des sanctions de lʼAMF du 5 octobre 2006.

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CHAPITRE IV

DÉLITS DE FAUSSE INFORMATION ETMANQUEMENTS A LA BONNEINFORMATION FINANCIERE

Section 1

Organisation de la transparence

§ 1 Politique de transparence

A) En droit des sociétés Ce n'est que peu après la création de la COB, à partir de 1970 que l'on parla d'information financière. C'est en effet la loi n°70.1208 du 23 décembre 1970 qui instaura les trois délits boursiers aujourdhui classiques dont le délit de fausse information du marché boursier. Mais, au niveau des sociétés de capitaux et en particulier de la société anonyme qui peut depuis toujours faire appel public à l'épargne (1), l'information financière existait déjà puisque les comptes annuels doivent êtr publiés ; que cette publication doit donner une image fidèle des résultats et qu'en outre, certaines opérations sur le capital sont soumises à des formalités à publier dans les journaux d'annonces légales et au Bulletin des Annonces Légales Obligatoires, BALO, tenu par le Journal officiel.

B) En droit boursier

C es règles du droit des sociétés sur l'information des actionnaires (épargnants notamment) la COB a ajouté ses propres exigences et dès qu'un émetteur accède à la bourse il est tenu de respecter les obligations d'informer le marché tel que les a prévu le droit boursier, c'est à dire les règlements émis par l'Autorité des marchés.

C) Exigences supplémentaires de la COB

A peine un an après sa création, la COB montra des exigences supplémentaires en imposant aux côtés de l'information périodique du droit des sociétés une information qu'elle qualifia de permanente (2). Elle considéra qu'il n'y avait pas véritable transparence du marché si le

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public n'était pas immédiatement informé et de manière fiable de tout événement survenant dans la vie de l'émetteur qui pouvait changer le cours de bourse. Autrement dit, à l'obligation du droit des sociétés de publier périodiquement une juste information, la COB ajoutait une obligation de prendre l'initiative d'informer. Et lorsque d'autorité de mission elle devient, en 1989, autorité de sanction, le règlement 90.02 sur l'information financière érigea en manquement infractionnel tant la diffusion financière qui ne présente pas le caractère de précision, exactitude et sincérité requise par la bonne information, que l'omission d'informer. Le règlement 98.07 qui abrogeait le précédent reprit la double "incrimination" par action et par abstention sur la base de la double distinction de l'information périodique et de l'information permanente.§ 2 Pouvoirs exorbitants de l’AMF

Lorsque le règlement AMF du 24 nov. 2004, publié au JO du 25 a abrogé le règlement 98.07, la question de la sanction peut se poser. Certes, il restait encore ces deux manières de manquer à la bonne information, mais les articles relatifs à la question se sont trouvés déplacés et ne figurent plus avec la définition des autres infraction (initié et manipulation de cours). Or, il s’agit de répression à caractère pénal (Voir infra p.....). Il n’en subsiste pas moins l'ensemble des obligations d'information pesant sur les émetteurs soumis au contrôle de l'AMF qu’il convient de rappeler.

Section 2

INFORMATIONS FINANCIERES OBLIGATOIRES

Quel qu' en soit la sanction qui garantit l'observation des obligations d'informer le marché, la distinction faite en 1968 par la COB entre l'information périodique, relevant du droit des sociétés et l'information permanente, créée par le droit boursier, reste valable. Elle est reprise dans l'intitulé même du Titre II du règlement AMF du 24 nov. 2004.A) §1 Information périodique

C'est essentiellement celle du droit des sociétés qui soit être donnée annuellement dans un rapport en fin d'exercice social et présenté à l'assemblée et dans un rapport semestriel accompagné d'un rapport d'activité (articles 221-1 à 221-5 inclus du règlement). L'AMF peut compléter ces dispositions par des instructions. Quant aux dispositions du Code de commerce relatives au gouvernement d'entreprise, elles sont complétées par les articles 221-6 à 221-8.

1) Modalité de diffusionLa diffusion de ces rapports doit être faite gratuitement au siège de la personne morale et copie doit pouvoir être communiquée à toute personne (et pas seulement aux actionnaires) qui le demande. En outre une diffusion par voie électronique sur le site de l'AMF est obligatoire et éventuellement sur celui de l'entité concernée si elle en a créé un. 2) Contenu

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Le contenu de ces informations est appelé à se modifier et se préciser avec les travaux de l'Union Européenne et notamment la soumission aux normes internationales, IFRS, de présentation des comptes.

B) Information permanente

1) Entités et personnes tenus d’informer selon le droit boursierSous cette rubrique, le règlement AMF reprend mot pour mot les articles 1 et 2 du règlement COB 98-07 sur la définition de l'émetteur et de la personne (morale ou physique) susceptibles de commettre une diffusion d'information critiquable.2) Information en rapport avec le secret de l’entrepriseCurieusement les articles 223-3 à 222-6 sont consacrés à l'information privilégiée au sens du droit répressif (renvoyant à l'article 621-1 réglementant sur le manquement d'initié) et tout en posant que cette information doit être communiquée au marché au plus vite, sont précisées les conditions dans lesquelles il peut être différé à un communiqué immédiat.

3) IncertitudesA première vue, l'article 22-7 reprend l'ancien article 4 du règlement COB, ajoutant seulement à l'émetteur sur lequel pèse l'obligation d'information, la personne agissant pour le compte de celui-ci. Cependant, alors que l'ancien texte visait "tout fait important susceptible, s'il était connu d'avoir une incidence significative sur le cours", la nouvelle rédaction vise plus restrictivement "la préparation d'une opération financière". Cette restriction s'explique sans doute par les développements qui précèdent sur l'information privilégiée. Il semblerait que les rédacteurs du règlement AMF ait voulu uniformiser l'élément matériel de l'information qui fait l'objet soit d'un manquement d'initié, soit d'une mauvaise information. Cette unification conceptuelle semble d'autant plus voulue que le terme "sensible" a été ajouté à l'incidence que peut avoir l'information privilégiée sur le marché à propos du manquement d'initié ; terme qui était déjà présent sous l'article 6 du règlement COB 98-07. Cette unification a été très vite perçue par la doctrine (3). Or, la première jurisprudence de l'AMF fait tout l'inverse puisque dans l'affaire VIVENDI (4) les informations des initiés ont été considérées comme étant, soit incertaines, soit imprécises. Ce qui a donné lieu à une décision de mise hors de course sur ce chef d'accusation, sans empêcher que ne soit retenue la fausse information. 4) Autres obligations à la transparenceLe chapitre sur l’information permanente du règlement général de l’AMF compote également des articles consacrés au dépassements de seuils, aux pactes d’actionnaires et aux opérations des dirigeants, ou de leurs proches, sur leurs propres titres. Par ailleurs, il va de soi que l'information doit être donnée de manière satisfaisante en cas d'opérations financières telles qu'un appel public ou lors d’un lancement d’offre sur le marché (6). D'autant que les actes préparatoires à de telles opérations, dans la mesure où la confidentialité n'est pas momentanément nécessaire, doivent donner lieu à communiqué aux termes mêmes de l'article 222-7 du règlement AMF5) Veille de l’AMFL'Autorité de marché peut par injonction (7) imposer une communication au marché à l'émetteur ou ses dirigeants.

§3 Modalités de communication de l’information permanente

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1) Les communiqués de presse En dehors des cas de formalités particulières, telles les rapports de gestion, les notices au BALO ou le fameux prospectus, c'est par voie de communiqué que se fait l'obligation d'informer le marché. Communiqué à la presse sur quelque support que ce soit, voire aux sociétés concernées en cas de dépassement de seuils de participations.

2) Les communiqués à l’AMF De plus, il y a un communiqué obligé de l'AMF par voie scripturale et par voie télématique en application de l'article 222-10 du règlement AMF. Selon ce texte, la diffusion de l'ensemble des diverses informations financières doit donner lieu à un communiqué à l'AMF, au plus tard lors de la publication officielle et si l'émetteur possède un site Internet, cette information doit y figurer durant un certain temps. §4 Personnes tenues d’informer

1) Personnes morales émettrices et dirigeants personnes physiquesLes personnes responsables d'une absence de communiqué ou d'un communiqué insuffisant ou donnant lieu à de fausses informations sont les personnes morales émettrices des instruments financiers et les personnes physiques. A noter que ces dernières ne peuvent déléguer ces sortes de pouvoirs que de façon limitée et dans les conditions fixées par une jurisprudence bien établie (8).

2) Toute personne A noter aussi que toute personne peut faire une communication sur la situation ou les perspectives d'un émetteur d'instruments financiers et qu'elle est, et elle seule, responsable du contenu de cette information. Les dirigeants de l'émetteur concerné ne sont pas tenus de rectifier la fausse information.(9).

L'AMF, comme feu la COB, peut enjoindre tout émetteur de publier sous un certain délai les informations qu'elle juge utile de faire connaître au marché. Si l'injonction n'est pas suivie d'effet, depuis la loi n°85-1321 du 14 déc. 1985, l'Autorité de marché peut demander au Président du Tribunal de Grande Instance de Paris de lui donner force exécutoire sous astreinte. Bien que peu utilisées (10), ces dispositions ont été reprises par la loi sécurité financière instituant l'AMF (article L621-14). Il convient de noter la possibilité pour l'AMF , lors de la requête au tribunal, de demander également la suppression des effets de l'acte faisant l'objet de l'injonction. A noter aussi, que le nouveau texte (in fine) prévoit la possibilité d'user de cette procédure même en cas de poursuites pénales. Les poursuites administratives pour manquements ne sont pas visées ici, mais elles entrent dans le champ général de compétence du pouvoir d'injonction de l'AMF (comme de feu la COB). Il convient seulement de relever que ces pouvoirs sont fort peu utilisés par l'Autorité administrative dès lors qu'elle use de son pouvoir de sanctions propres. Sans doute l'arsenal des mesures coercitives pour contraindre les intervenants sur le marché boursier à jouer un

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jeu loyal est trop fourni pour être entièrement utilisé. Ce qui ne gène pas l'efficacité car, non seulement les diverses procédures fonctionnent en parallèle ou en coopération, voir enconcurrence, mais elles présentent chacune leurs qualités et leurs défauts.

section 2

Délit de fausse informationArticle L 465-1, al.3 du code

monétaire et financier

1) Origine Cette incrimination pénale est née, avec la loi n° 70-1208 du 23 déc. 1970 en même temps que le délit d' initié. Il a été à l'époque été introduit dans l'ord. n°67-833 du 28 sept. 1967 (art. 10-1, al.3).Depuis il a été assez peu modifié : lors de la réforme de la bourse en 1988 (loi n°88-70 su 22 janvier), l'incrimination a été entendue non seulement aux valeurs mobilières mais à tous les produits financiers ; avec la loi n°96-597 du 2 juillet 1996 il y eut changement de vocabulaire avec l'apparition de l'expression, venue du droit anglo-saxon, via la directive Services investissement, « instruments financiers » et à l'image des nouvelles modalités de définir les délits du Code pénal de 1994, c'est le fait infractionnel lui-même qui sert à définir l'acte illicite et non plus l'auteur agissant en infraction.

2) Définition - Ce délit de fausse information du marché est le fait pour quiconque de lancer une fausse information au public qui risque de troubler les cours de bourse. L'action délictuelle emporte ses effets sur le marché sans qu'elle ait été effectuée nécessairement sur celui-ci (comme l'est la manipulation de cours).

3) Incrimination des personnes morales Ces retouches légales minimes sont assorties d'une autre plus importante : les sujets punissables englobent les personnes morales ; la loi d'adaptation du code pénal de 1994, faisant reposer la responsabilité pénale des personnes morales selon le principe de spécialité qui impliquait une énumération des délits que pourrait commettre une entité personnifiée comportait des lacunes, dont le droit boursier.

- §1 Textes

A) Directives européennes

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La première directive en matière de délits boursiers se limitait au délit d’initié (Voir supra.......). C’est la directive «Abus de marché» qui, en 2003, prit en compte l’ensemble des infractions 5Directive du parlement et du Conseil, n° 2003/CE du 28 janvier 2003 JOCE 12 avril). Les dispositions sur les initiés furent remodelées et des indication cadres furent données pour les autres infractions. Les instances européennes ne sont en effet pas abilité à créer des délits qui relèvent de la souveraineté des Etat et de leur pouvoir de police.Pour cncrétiser les dispositions légales européenne furent donc prises des mesures d’exécutuin élaborées par la Commission sur avis du Comité européen des vlaurs mobilières créé le § juin 2001 (JOCE du 13 juillet, Voir E. DEZEUZE, Les nouveaux contours de la répression des infrations boursières, Bull d’actualisation Lamy Droit pénal des affaires, 2003, J).

B) Code monétaire et financier

ctuellement le délit se trouve définit dans le Code monétaire et financier sous l'article L 465-1.Depuis, avec la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l’économie (!), il a été déplacé et reporté sous l’article L 465-2 et les termes marché réglementé ont été remplacés par ceux de marché financier De toute façon, la rédaction, reste très proche de celle de 1970 ; elle est la suivante :

-"Le fait pour toute personne de répandre dans le public par des voies et des moyens quelconques des informations fausses ou trompeuses sur les perspectives ou la situation d'un émetteur dont les titres sont négociés sur un marché financier ou sur les perspectives d'évolution d'un instrument financier admis sur un marché réglementé, de nature à agir sur les cours".

§2 Personnes punissables

A) Auteurs

201- Émetteurs et dirigeants des entités émettrices sont tenus à la bonne information du public boursier (v. supra, n°13). S'ils ne le font pas ils encourent toutes sortes de sanctions, civiles, pénales, administratives. Mais il faut déterminerlesquels de ces dirigeants sont les responsbles de la fausse information et ce n’est pas toujoutrs évident. Le cas EUROTUNNEL illustre bien cette difficulté (cass crim 5 octobre 2005, n° 04 85 247). Il peut aussi advenir que d'autres personnes, notamment les analystes financiers, ou un émetteur concurrent, lancent sciemment de mauvaises informations ; elles tombent alors, elles aussi, sous le coup de l'article L465-1 du C. mon. et fin. B) CoauteursL'incrimination vise donc un grand nombre de personnes ; il n’en reste pas moins que tous ceux qui ont participé à la diffusion de la fausse information sont généralement poursuivis au titre de coauteur

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C) Complices

203 – Pour les quelques cas où la qualité d’auteur est à exclure, il peut être fait appel à celle de complice. A condition qu’aide et assistance, au sens du code pénal, avant diffusion de l’information incriminée soit établie ; ce qui n’est pas toujours aisé. A ce propos, il peut être utilement rappeler le cas de l'affaire de la Société Générale de Fonderie qui diffusa de fausses informations sur la base desquelles des épargnants avaient alors acquis des titres. L'un d'eux ayant acheté pour presque trois millions de francs d'actions, le Tribunal reteint la complicité de la banque qui participait aux comités exécutifs de la Société de Fonderie et de ses filiales. Mais la Cour d'appel relaxa en considérant qu'aucun fait précis émanant de la banque n'avait été établi et la Cour de Cassation approuva cette sentence (11). En revanche, la complicité des Commissaires aux comptes a été retenue car ils avaient participé activement à la présentation par les dirigeants sociaux d'informations fausses.

§ 3 Eléments constitutifs matériels du délit

L'infraction est limitée à un acte de commission : la diffusion d'une fausse information. Le texte de 1970 n'avait prévu que "le fait d'avoir répandu" et l'obligation d'information dite permanente n'était assortie que d'une mesure d'injonction de la part de la COB. Lorsque le défaut d'information permanente devint une infraction administrative avec le règlement de 1990, le texte pénal ne fut pas aligné sur le manquement (sans doute parce qu'à l'époque l'idée que la sanction administrative serait plus efficace, notamment parce que plus rapide, s'était imposée au législateur face au scandale Pechiney). Toujours est-il que le délit ne peut se commettre que par action et non par omission.

A) Acte de diffusion

1) Diffusion Les termes légaux "par voie et moyens quelconques" couvrent tous les moyens de diffusion pourvu qu'ils atteignent un public assez large : les formalités légales tels le prospectus, la notice à faire viser, le rapport de gestion et même les comptes annuels Si ces dernier peuvent faire l'objet du délit de présentation de comptes non fidèles de l'article L 241-3,3°, C. com , ils peuvent aussi se cumuler avec le délit de fausse information du marché, comme dans l'affaire du Comptoir Entrepreneur (12). Mais, toutes sortes d'autres moyens peuvent être retenus : communiqué de presse, articles de journaux à diffusion suffisante, conférences à l'aide de médias, y compris les forum de discussion par voie informatique.

2) La diffusion par voie informatique.Mais si la technique informatique a ses avantages, elle produit aussi des méfaits plus considérables : l'informatique amplifie la diffusion en touchant un vaste réseau de personnes et en écrasant le temps, justement qualifié de réel. Ce qui fait que les effets

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dévastateurs d'une fausse information sont très vastes et immédiats. C’est d’autant plus grave que l'anonymat est aisé à organiser à travers ces techniques. L'affaire du MINITEL (13) avait déjà, en 1988, mis en lumière la difficulté de détecter l'auteur de la fausse information et de sanctionner le serveur au titre de la complicité. Encore que le tribunal, dans cette affaire, ait fait une application critiquable du régime de la complicité, considérant impossible de retenir celle-ci du fait que l’auteur principal était inconnu.9 Cependant, l’'auteur du délit ne se cache pas forcément derrière l'anonymat ; dans une affaire où une société française fut victime de la société américaine EDELMAN, celle-ci alla même jusqu'à risquer d'être sanctionnée pour dénonciation calomnieuse (14).

A signaler que L'OICV, Organisation Internationale des valeurs mobilières, (http//www.iosco..org) a initié des travaux et dénoncé les risques et la COB avait, elle aussi, communiqué un certain nombre d'avertissements (15).

B) Information diffusée

1) Sur l’émetteur Bien des informations, voire même des rumeurs, peuvent faire bouger le cours de bourse (une guerre au Moyen-Orient, un scandale sur une grande place boursière étrangère etc.). Mais ce sont des questions qui sont en marge de l'obligation d'information des émetteurs et leurs dirigeants. Dans le cadre du délit de l’article 645-1, l'information à faire connaître aux partenaires du marché boursier concerne essentiellement l’émetteur. Cette information présente plusieurs caractères qu'il convient donc de spécifier pour bien la circonscrire.

2) Sur les instruments financiers Informations relatives à des instruments financiers admis sur un marché. La distinction entre l'admission ou la négociation est importante car, surtout avec la course au financement des sociétés spécialisées dans les nouvelles technologies qui ont foisonné à un moment donné, les documents produits pour l'admission en bourse étaient souvent volontairement excessivement optimistes.

3) Sur la situation de l’émetteur Informations relatives aux perspectives ou à la situation de l'émetteur. Ces informations ont trait au développement interne de la vie de l'entreprise et aussi à ses activités financières externes. En ce sens, il s'agit souvent d'une information privilégiée identique à celle qui contraint l'initié à l'abstention. Par exemple, la connaissance de mauvais résultats, voire de difficultés proches de la "faillite". Dans un tel cas, la tentation pour les dirigeants est grande de minimiser ou carrément cacher la situation au public boursier. Et c'est bien pourquoi le nombre de cas où de cumul du délit de fausse information et du délit d'initié est important. Mais, alors qu'il faut établir le caractère précis, certain et non public de l'information détenue par privilège, ce n'est pas sous cet angle, c'est même à contrario, que se fait l'examen de l'information qui aurait dû être diffusée comparativement à la réalité.

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C) Information de nature à agir sur les cours

1) Impact sur les cours L'information doit être « de nature à » agir sur les cours. Mais, tout comme le profit n'est pas un élément constitutif du délit d'initié, il n'est pas nécessaire que la mauvaise information ait produit une perturbation des cours. Généralement, le but de fausser les cours est atteint lorsqu'une fausse information trompe les épargnants sur la situation financière du titre ; c'est pourquoi il n'y a pas de jurisprudence sur ce point, sauf une décision en matière de manquement, le public des épargnants n’ayant pas répondu au lancement d’une souscription, compte tenu ou non de la fausseté de l’information financière (16). Sont particulièrement concernés les informations périodiques obligatoirement imposées par la loi, mais aussi toute information pouvant avoir un impact sur le marché. Or, en ce cas, il faut déterminer ce qu’il y a sous ce «pouvant». La jurisprudence dépendra de cette analyse. Ainsi, il a été considéré que l’omission d’informer sur les comptes consolidés n’emportait pas nécessairement une fausse information (Cass crim 16 novembre 2005, n° 04 85 815. De là découle une sorte de corrolaire : le délit même s’il n’y a pas de dommage. Mais, le préjudice pour demander un dédommagement, s’il existe, doit être la conséquence directe de la fausse information. Celle-ci n’élimine pas la spéculation qui est toujours plus ou moins risquée (CA Paris, 17 octobre 2008, Bull joly Bourse 2009, p 28, note E. Dezeuze ; Bull Joly Sociétés, 2009, p 143, nte J F Barbieri).

2) Absence de lien de causalité - La loi de 1988 a supprimé la nécessité de prouver le lien de causalité entre la diffusion de la mauvaise information et l'intention d'agir sur le cours. Et bien que cela aggrave l’incrimination, la doctrine a généralement largement approuvé par la doctrine (17).

E) Information fausse faite au marché

1) Commission C'est au moment où l'information est lancée que le délit se commet si cette information trompe les partenaires boursiers .C’est donc à ce moment qu’il faut rechercher le caractère faux de l’information à incriminer par rapport aux réalités qui lui sont contemporaines.

2) Mensonge, tromperie En ce qui concerne l'information elle-même, l'article L645-1 C. mon. et fin. use des deux qualificatifs de mensongère et trompeuse. Une infermation incomplète est mensongère et donc punissable (Cass crim 14 juin 2006n n° 05 82 453, Bull n° &è!. Ce qui n’est pas critiquable mais illogique dès lors que l’bstention n’est pas réprimée en tant que telle (Voir infra, alinéa suivant).

3) Parallélisme avec la publicité trompeuse Ce qui est mensonger est nécessairement trompeur et donc susceptible de fausser le comportement des épargnants sur le marché. La différence entre les deux termes est qu'il est impossible de mentir sans être conscient du mensonge alors qu'au contraire la tromperie est un acte plus objectif. Qu'il suffise pour le comprendre de penser à la publicité mensongère

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devenue en 1973, avec la loi Royer, publicité trompeuse (18). D'ailleurs, le délit de fausse information financière comme la publicité trompeuse des produits de consommation, même s'ils doivent être commis sciemment, se concrétisent par le simple fait que la tromperie peut avoir eu elle-même un impact sur le marché. Ce rapprochement n’est pas seulement théorique ; le délit de la loi Royer fut parfois utilisé en cas d’information trompant épargnants ou émetteurs. Il suffit de se rappeler l’affaire SCPI Pierre et Cristal (19) Se pose donc la question de savoir s'il est possible de tromper en se taisant. L'interprétation stricte des textes d'incrimination pénale ne permet pas d'inclure sous le terme "répandre" l'acte d'abstention intégral (19). Le fait de ne pas informer échappe donc à la répression délictuelle à l’inverse de ce qui était le cas du manquement sous le régime de la COB ; Mais diffuser une information lacunaire et par là trompeuse entreincontestablement dans les conditions de commission du délit.

§ 4 Elément moral

A) Tomperie dolosive

Le code pénal de 1994, face à la multiplication des délits objectifs, dit encore matériels, a cru devoir poser le principe général qu'il n'y avait point de crime ou délit sans intention de le commettre (art. 121-3, al. 1, C.P). Cependant, la loi d'adaptation de ce nouveau code n°92.1226 du 16 déc. 1992 a prévu que tous les délits non intentionnels réprimés antérieurement à l'entrée en vigueur du code demeurent constitués en cas d'imprudence ou de négligence. Il serait donc possible (malgré ce qui vient d'être exposé au paragraphe précédent), d'inclure sous la qualification de l'article L.645-1 C. mon. et fin. le fait de négliger d'informer, dès lors qu'émetteurs et dirigeants sont tenus par une forte obligation d'informer et même si le terme sciemment qui ne figure plus sous ce texte avec son passage dans le Code monétaire et financier qui a opéré une codification à droit constant, y est sous-entendu. Il n'en reste pas moins que les tribunaux, en l'absence de modification des termes de la loi, ne punissent pas l'absence d'information qui laisse le marché dans l'ignorance des réalités. Mais ils prennent soin de caractériser le caractère dolosif de l'information fausse ou lacunaire qui l'une comme l'autre trompe le marché. Sur la mmauvaise fois de hauts dirigeants actifs qui doivent prendre part à l’information financière, les tribunaux considèrent qu’ils ne pouvaient pas ne pas savoir que l’information était fausse (Affaire SIDEL, CA Paris, 9° Ch, 31 octobre 2008, Dictionnaire permanant Epargne et produits financiers, Bull octobre 2008 et févier 2009; P

1 B) Elément moral de la personne morale Depuis la loi de 1996 n° 96- 597 du 2juillet 1996, les personnes morales, c'est à dire les émetteurs , sont punissables aux côtés des personnes physiques. Cette responsabilité est une responsabilité personnelle, l'article 121-1 C.P qui retient ce principe, s'appliquant à tout sujet de droit passible d'une peine.

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222 Au surplus, l'article 132-24 de ce même code pose un autre principe général ; celui de l'adaptation de la peine en fonction des circonstances et de la personnalité de l'auteur. Au surplus, la loi a prévu le cumul possible, l'article 121-2 C.P ayant posé que la responsabilité de la personne morale n'excluait pas celle de la personne physique. Cela signifie qu'à contrario, l'entité personnifiée peut être le seul auteur incriminé (20). Raison de plus pour déduire l'élément conscient ou dolosif des seules circonstances révélant un comportement répréhensible de l'émetteur. C'est certainement une analyse pas facile à faire, sauf dans le cas où systématiquement l'information financière serait mal diffusée et constamment négligée à propos d'instruments financiers émis par une personne morale.

§ 5 Prescription Comme pour tous les délits, la prescription est de trois ans à compter de l'acte de commission, en l'occurrence de la diffusion incriminable. Ce qui est aisé à établir puisqu'il y a nécessairement un acte matériel ( le délit par omission n'étant pas sanctionnable) et que la commission du délit est instantanée. Ce sont finalement les mêmes règles que pour les délit de faux bilan et de publicité mensongère; il n(y a pas allongemment de la prescription (Voir, affaire Eurotunnel Cass crim 5 octobre 2005, n)04 85 247).

§ 6 Sanctions

A) Personnes physiques L'échelle des peines est fixée pour les personnes physiques sous l'article L.465-1, al.3 C. mon. et fi. soit un maximum de deux ans de prison et une amende de 1.500.000 Euros. Calquée sur les peines du délit d'initié, l'amende pourrait aller au delà de ce montant ; au moins jusqu'au profit illicite tiré de l'infraction ou même dix fois celui-ci. Mais, à l'inverse du délit d'initié le profit tiré d'une mauvaise information n'est guère calculable. En revanche, comme pour ce dernier, les deux amendes (pénale et administrative) s’imputent l’une sur l’autre selon l’article L 621-16 du code monétaire et financier. Ce qui n’empèche pas la peine de prison d’être effective (Affaire SIDEL, précitée).

B) Personnes moralesLes taux de l’amende sont plus élevés pour les personnes morales, elles sont fixées par l’article L 465-3 du code monétaire et financier;

C) Les peines complémentaires Ces peines sont identiques à celles prévues pour les délits d’initié ou de manipulation de cours. § 7 Action civile

A) Les victimes Les victimes d'un délit d'initié sont constituées par l'ensemble des épargnants mais perçoivent très mal le dommage qui ont subi du fait que les initiés ont opéré avant eux. En matière de fausse information, ces mêmes victimes savent généralement qu'elles ont été trompées. La meilleure preuve de cette divergence de

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situation réside dans le fait que peu (pour ne pas dire pas) de lettres de plainte des épargnants n'ont été adressées à la COB, aujourd'hui à l'AMF, pour infraction d'initié et que les citations directes le sont encore moins, alors que de plus en plus souvent les victimes de mauvaises informations réagissent très vite pour se défendre, voire se constituter en association de défense et réclamer un dédommagement. La société peut également subir un préjudice du fait par exemple de la révélation des malversations (Voir A. PIETRANCOSTA, déliets boursiers, la réparation du préjudice subi par l’investisseur, RTDF 2007, p 21).

B) Conditions

Qu'il s'agisse d'une action civile menée au pénal à la suite d'une plainte, ou d'une action civile présentée devant la juridiction civile, la victime prétendant à réparation doit établir qu'elle a subi un préjudice direct. Ce qui n'est pas facile. De surcroit ce préjudice doit résulté de la faute infractionnelle. Si l’action est menée contre un dirigeant, s’est trouvée posée la question de la faute détachable (C A Paris, affaire Flammarion, 26 septembre 2003 et affaire Gaudriot, TGI Guéret 20 février 2007, Banque et droit 2007, n° 113). Mais, du fait que la faute est pénale, la question de la faute détachable ne se pose pas (Voir C. Ducouloux-Favard, La règle de la faute séparable des fonctions de gestion des sociétés de capitaux est dans la loi, Droit des sociétés, octobre 2007, étude 11). A noter que le préjudice peut être évaluer en fonction d’une perte d’une chance comme dans l’affaire Gaudriot dont il vient d’être fait référence.

Du côté des épargnants, s'ils parviennent à établir qu'ils ont acquis (21) ou vendu des titres sur la base des mauvaises informations, le préjudice direct est prouvé. Il l'est bien moins si la mauvaise information les a laissés en possession de leurs titres alors que ceux-ci allaient subir une décote. Et s'ils n'ont pas su acquérir à temps parce que l'information ne fut pas clairement donnée, le préjudice ne peut être considéré que comme éventuel et donc non indemnisable. Du côté de la société, la Chambre criminelle a admis que la société, en l'occurrence le Comptoir des Entrepreneurs (22), subissait un préjudice direct en même temps que les actionnaires, confirmant ainsi la position des juges de première instance (TGI Paris, 11° ch. 17 déc. 1997) qui avait été infirmée sur ce point par la Cour d'Appel. Cette solution , en retenant le caractère direct du préjudice pour la société, est identique à celle du délit d'initié mais différente de celle des abus de biens sociaux (23).

Section 3

Manquements aux obligations d’information

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Article 632-1 du règlement AMFdu 24 nov. 2004

§ 1 Questions préalables

A) Structure bicéphale de l’AMF La fusion de la COB, du CMF et de la CDGF en une seule autorité, l'AMF opérée par la loi Sécurité financière n°2003-706 du 1° août 2003 emportait nécessairement des modifications dans l'organisation structurelle de la nouvelle institution par rapport aux anciennes. Mais cette concentration bicéphale avec un Collège et une Commission des sanctions au sein de l’AMF les rend parfaitement autonomes l'un par rapport à l'autre.

B) Réécriture des manquements

les raisons de cette rénovation étaient essentiellement pour améliorer l'autorité de surveillance des marchés en aménageant les règles de procédure qui avaient révélées trop de défauts graves (24), il n'y avait aucune exigence pressante à ce que les infractions administratives que sont les manquements soient rédigés à neuf. Néanmoins, le règlement AMF du 24 novembre 2004, a réécrit le manquement à la bonne information sous l'article -……..1 sous le double intitulé "Manquement aux obligations d'information" et "Diffusion de fausse information" Dès lors, il faut non seulement procéder à une analyse de cette nouvelle définition de l'infraction, mais en déterminer l’entrée en vigueur (d'ailleurs comme pour les autres manquements) en fonction de l'adoucissement ou au contraire de l'aggravation de la sévérité du nouveau texte. Cette question est d’autant plus délicate que le principe de légalité des peines, pour cette infraction, conduit à comparer la terminologie mais aussi les retranchements de texte. En effet, même si le règlement AMF commence par énumérer les anciens règlements de la COB qui sont abrogés, ceux-ci ne le sont qu’en respect des principes démocratiques ; l’aggravation ne peut être d’application immédiate dès lors qu'il s'agit de textes sanctionnant plus sévèrement.

§ 2 Textes

A) Le nouveau texte : le Règlement AMF.

L'article 632-1 récite : "toute personne doit s'abstenir de communiquer, ou de diffuser sciemment, des informations, quel que soit le support utilisé, qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications inexactes, imprécises ou trompeuses sur les instruments financiers émis par voie d'appel public à l'épargne au sens de l'article L.411-1 du code monétaire et financier, y compris en répandant des rumeurs ou en diffusent des informations inexactes ou trompeuses, alors que cette personne savait ou aurait dû savoir que les informations étaient inexactes ou trompeuses. "Constitue en particulier la diffusion d'une fausse information le fait d'émettre, sur quelque support que ce soit, un avis sur un instrument financier ou indirectement sur

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l'émetteur de celui-ci, après avoir pris des positions sur cet instrument financier et de tirer profit de la situation qui en résulte, sans avoir simultanément rendu public, de manière appropriée et efficace, le conflit d'intérêts existant. "Le non respect de l'interdiction mentionnée au premier alinéa par les journalistes agissant dans le cadre de leur profession doit être apprécié en tenant compte de la réglementation applicable à cette profession. Cependant, ce non respect est susceptible de constituer par lui-même un manquement dès lors que les intéressés retirent directement ou indirectement un avantage ou des profits de la diffusion de telles informations".

B) Les anciennes dispositions : le Règlement COB 98-07.

Il est possible de se contenter de rappeler que l'article 1° donnait simplement la définition de "l'émetteur", nécessairement une personne morale, et de la "personne susceptible de commettre le manquement, c'est à dire un sujet de droit aussi bien personne physique que personne morale, y compris, comme cela allait de soi, les dirigeants de l'émetteur. L'article 2 : précisait tout bonnement que "l'information donnée au public doit être exacte, précise et sincère". Les articles 3 à 6 : déterminent les modes de commission de l'infraction consistant, soit en un acte concret de tromperie du marché, soit en une omission d'informer. Ce qui coïncidé avec la distinction faite par la COB dès le début de son existence entre l'information périodique et l'information permanente (22).

La rédaction de ces quatre articles est la suivante :Article 4 Tout émetteur doit, le plus tôt possible, porter à la connaissance du public tout fait important susceptible, s'il était connu, d'avoir une incidence significative : - sur le cours d'un instrument financier ou sur la situation et les droits des porteurs de cet instrument financier ; - ou sur le cours du contrat à terme ou de l'instrument financier admis aux négociations sur un marché réglementé mentionnés à l'article 1°.

Toutefois, il peut prendre la responsabilité de décider de différer la publication d'une information de nature à porter atteinte à ses intérêts légitimes s'il est en mesure d'en assurer la confidentialité.

Article 5 Lorsqu'une personne a été amenée à faire état publiquement de ses intentions et que, par la suite, ces dernières ne sont plus conformes à sa déclaration initiale, elle est tenue de porter immédiatement à la connaissance du public ses nouvelles intentions.

Article 6

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Toute personne qui prépare, pour son compte, une opération financière susceptible d'avoir une incidence significative sur le cours d'un instrument financier ou sur la situation et les droits des porteurs de cet instrument financier doit, le plus tôt possible, porter à la connaissance du public les caractéristiques de cette opération. Si la confidentialité est momentanément nécessaire à la réalisation de l'opération et si la personne mentionnée à l'alinéa précédent est en mesure de préserver cette confidentialité, elle peut prendre la responsabilité d'en différer la publication.

Article 7 Tout émetteur doit assurer en France de manière simultanée une information identique qu'il donne à l'étranger dans le respect des dispositions de l'article 2.

C) Comparaison des textes A première lecture, ce qui saute aux yeux c'est que le texte répressif du Règlement AMF est très court et qu’il ne fait aucune référence, même sous-entendue, à l'information permanente. Celle ci longuement exposée dans le règlement COB 90-02, si elle n’était qui pas effectuée au plus rapide donnait lieu à sanction sur la base de l'article 4 du ce règlement ; lequel avait d’ailleurs suscité beaucoup d'inquiétudes et de vifs débats critiques de la part des professionnels. Il est alors possible de penser à une lacune malencontreuse à moins que ce ne soit un vide voulu au profit de l’injonction et au détriment de la sanction répressive. Cela mérite de s'y arrêter et nous y reviendrons. Comme sous le régime de la COB la mauvaise information sanctionnée est celle qui porte sur les instruments financiers auxquels le Règlement AMF ajoute les titres dont la vie financière dépend d'autres instruments financiers déjà existants. Cette extension, due aux produits nouveaux se justifie pleinement, mais la sanction ne peut être encourue que pour les mauvaises informations qui seraient données à compter du 25 novembre 2005, date de publication au JO du nouveau texte infractionnel plus sévère. Sur le manquement par action, c'est à dire par diffusion d'informations trompeuses, si le nouveau texte pose que la sanction est encourue si les indications données sont "inexactes, imprécises ou trompeuses", alors que l'ancien règlement posait le problème a contrario en commençant par affirmer que l'information doit être "exacte, précise et sincère", la matérialité de la définition du manquement ne change pas. Cependant, il est un élargissement et donc une sévérité plus grande, dans le fait que le Règlement AMF vise aussi les rumeurs. Sur ce point non plus la rétro-activité n'est pas possible et de plus il sera nécessaire de se demander pour chaque cas d'espèce si la rumeur s'est assez "enflée" pour avoir trompé le marché. Sur le manquement par abstention, c'est à dire celui qui avait été érigé en 1990 sous les articles 4 et suivants du Règlement COB 90-02 devenu 98-07, le pénaliste imprégné du principe fondamental de l'interprétation stricte des lois répressives, qui vaut aussi pour les manquements administratifs(24), ne peut qu'y voir une sorte de dépénalisation . En effet, les dispositions sur l'information permanente obligatoire n'ont pas totalement disparues du texte du Règlement de l'AMF ; ils se trouvent sous les articles 221-1 à 222-11, mais ceux-ci ne renvoient pas à l'article 632-1 et ce dernier est totalement muet sur l'existence de ceux-là. D'ailleurs, comme nous l'avons déjà relevé l'article 632-1 définissant le manquement est intitulé "diffusion de fausse information ». Il devrait en découler une certitude : l'impossibilité pour l'avenir de

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sanctionner par une lourde amende administrative le fait de s'abstenir de respecter l'obligation d'information permanente et l'application de la loi plus douce, en l'occurrence le Règlement AMF, pour les faits commis et non encore définitivement sanctionnés avant le 25 novembre 2005.

D) La voie prise par la Commission des sanctions

Nous avions pensé (25) que cette sorte de "dépénalisation" administrative que la situation nouvelle n'était pas due à une inadvertance des rédacteurs du Règlement AMF. Mais les premières décisions en la matière de la Commission des sanctions passent outre ces règles pourtant fondamentales au regard des Droits de l'Homme (26). Il ne reste plus qu'à attendre la jurisprudence de la Chambre commerciale de la Cour de cassation...

§3 Eléments constitutifs du manquement par diffusion de fausses informations

Cette analyse sera, comme il sedoit, être présentée à partir du texte en vigueur à compter du 25 novembre 2005, à savoir l'article 632-1 du Règlement AMF. Mais il sera tenu compte de la jurisprudence antérieure dès lors qu'elle est applicable au droit nouveau.

A) Personnes punissables

1) Toute personne, y compris les journalistes financiers Comme l'ancien texte, c'est toute personne qui est punissable lorsqu'elle diffuse une fausse information financière. Et peut importe de savoir à quel titre elle a agi car c'est la mauvaise qualité de l'information qui est au coeur du délit plus que la personne en cause, ce qu'avait déjà relevé P. LE CANNU (27).Depuis l'objectivation du manquement s'est encore accentuée du fait que c'est la tromperie plus que la non sincérité (le mensonge) qui est puni. Cependant, il est un traitement particulier fait aux journalistes financiers dont le régime juridique sera évoqué plus loin.

2) Les personnes morales Comme par le passé il est possible de supposer que les personnes morale sont également visées sous le terme très général de "personne". Il est également possible de se souvenir que le premier règlement COB avait omis les personnes physiques en ne visant que "l'émetteur" qui ne peut être qu'une personne morale. En revanche le terme personne peut s'appliquer à tout sujet de droit.

3) Régime particulier des dirigeantsSous le régime de la COB, le manquement imputable à l’émetteur, l’était aussi contre la personne des dirigeants responsables de l’information financière (Voir Tomasi, L’imputation des manquements aux règles de l’autorité des marchés financiers, Banque et droit 2006, n° 109, p 35). Or, le règlement AMF avait omis de le préciser, mais d’une part,

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la Cour de cassation a estimé que l’abrogation d’un texte sur une incrimination reprise dans un autre n’entrainait aucune modification de fond (Cass com 12 juin 1989, n° 88 83 448, Bull crim n° 251 et d’autre part, un arrêté de 2007 a pallier la lacune.Quant à l’analyse de la faute séparable des fonctions de gestion du dirigeant, cela fait plus de dix ans que la Cour de cassation a affirmé que la règle ne s’appliquait pas aux infractions administratives à fort caractère répressif (Voir notamment, Cou cass com 31 mars 2004, n° 03 14 991, Bull Joly bourse 2004, p 460, note J J Daigre. A noter que le dirigeant ayant manoeuvré pour caché les éléments d’information peut se trouver seul sanctionné. (Cass com 11 juillet 2006, n° 05 18 528, Droit bancaire et fi. 2006, n° 180).

B) Acte de diffusion L'article 632-1 du Règlement AMF emploie les termes de communiquer ou diffuser et comme il n'est plus fait référence à une communication au public, il y a une ambiguïté. Certes, la diffusion s'adresse à un certain nombre de personnes mais la communication peut se faire à une seule. Cependant, il n'y aurait en ce cas qu'une victime et le marché ne serait pas perturbé. Il faut donc entendre le terme communiquer comme se référant aux communiqués à l'Autorité de marché ou à la presse ou encore à l’ensemble des actionnaires.. Quant au support de la diffusion, comme pour le délit, il est des plus varié, aucune restriction n'étant posée par le texte.

C) Information diffusée

1) Quelle information 245- Il est bien spécifié qu'elle concerne les instruments financiers et même les titres qui dépendent de ceux-ci. En revanche, il n'est plus fait référence au fait susceptible, s'il était connu, d'avoir une incidence sur le marché, puisque l'omission d'informer est passée sous silence par l'article 632-1 du nouveau règlement. Cependant, l'information relative à un titre admis en bourse ne peut être complète si elle ignore l'ensemble des événements sociaux et financiers de l'émetteur. Il n'est pas non plus spécifié, comme pour le délit, que l'information peut avoir une influence sur le cours de bourse. Cependant, le terme "trompeuses" concernant les indications inexactes incriminées qui prend place en substitution de la non sincérité visée par le règlement COB, suppose que c'est le marché, l'ensemble des épargnants et des investisseurs qui sont trompés.

2 ) Peu importe les effets sur le marché A rappeler que la jurisprudence antérieure avait posé qu'il n'était pas nécessaire que la fausse information produise les effets recherchés : Bernard Tapie avait lancé des souscriptions publiques pour obtenir des fonds pour financer, indiquait-il, la reprise de la société TESTU en difficulté, alors qu'il entendait utiliser ces fonds pour acquérir d'autres sociétés. Bien qu'aucun épargnant ne souscrivit, il fut tout de même condamné (28).

.D) Fausseté de l’information

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248 L'infraction consiste plus à tromper les destinataires de l'information que de mentir ou de dire le faux en sachant le vrai. Et cette tromperie peut advenir non seulement par fausses indications, mais par indications lacunaires, sans que l'abstention totale d'informer ne soit dorénavant sanctionnable. Mais il faut bien reconnaître que la plupart des nombreuses décisions de sanction de la COB sur la base du règlement 92-07, ont presque toutes trait à une communication d'informations franchement fausses ou grandement insuffisantes. Dès lors, il est possible de se demander quelle sera la fortune des "rumeurs" d'informations ne satisfaisant pas à l'article 632-1 du Règlement AMF. Doit aussi être pris en compte l’information diffusée en marge des obligations légales dès lors qu’elles induient en erreur, d’autant que le communiqué de presse a souvent plus d’impact sur le public que l’annonce au BALO. De ce point de vue les informations données à titre prévisionnelles doivent ne pas induire en erreur ou avoir un impact sur les informations des comptes définitifs. Il en va de même d’une information donnée sur un marché étranger (par exemple une augmentation de capital) non répercutée en France (alors qu’il y a des droit de souscription préférentiels des actionnaires français (Décision AMF, 24 novembre éàà(, affaire ALLIANZ AG).

E) Elément moraln principe, la différence essentielle entre les délits et les manquements réside dans le caractère objectif de ces derniers. Il ne devrait donc pas être question d'élément moral. D’autant qu’au départ, le premier règlement ne visait que l’émetteur (29) La COB a , au moins une fois (30) ,souligné que la mauvaise foi n'était pas à établir pour retenir la constitution d'un manquement à la bonne information financière. Cependant, si la communication d'une information au public de l'article 3, al.1 du Règlement COB 98-07 pouvait être considérée comme une infraction purement objective, le terme "sciemment" de l'alinéa 2 relatif à la diffusion de l'information contraint à faire un minimum d'analyse subjective. L'article 632-1 du Règlement AMF pose qu'il faut s'abstenir de "communiquer, ou de diffuser sciemment" la virgule, surtout avant le "ou" montre bien que la différence de régime entre le fait de communiquer et celui de diffuser se perpétue avec le nouveau texte.

§ 5 Prescription

Depuis que la COB avait été dotée d'un pouvoir de sanctions propres en 1989, il n'y avait aucune disposition sur la prescription de l'action de poursuite administrative et il aura fallu attendre la loi n°2003-706 du 1° août 2003 pour qu'un délai de trois ans, similaire au droit pénal, soit prévu.

§ 6 Sanctions Bien entendu, une autorité administrative ne peut prononcer des peines de prison et de toute façon, c'est l'amende qui est la peine la plus adaptée aux infractions financières.

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L'amende suit l'échelle (très haute) du délit, soit 1.500.000 d'euros ou plus s'il y a profit illicite dépassant ce montant qui ne peut excéder dix fois celui-ci. De toute manière, l'amende au-delà d'un million d'euros est le maximum prononcé jusqu'à ce jour. Pour éviter "le non bis in idem" de la peine, l'article L 621-16 du code mon. et fin. modifié par la loi sécurité financière de 2003, il est prévu que lorsque l'AMF a prononcé une sanction pécuniaire devenue définitive avant que l'autorité judiciaire ait elle-même décidé d'une peine, le tribunal correctionnel peut imputer l'amende administrative sur celle qu'il fixe.L'amende peut être assortie de l'obligation de publier, aux frais des personnes sanctionnées, la décision dans un journal d'annonces. Généralement la COB avait pris l'habitude de choisir le BALO et procédait elle-même à la parution dans son bulletin. L'AMF suit cette habitude. A l'inverse de la décision judiciaire, le recours de la décision administrative ne suspend pas le caractère immédiatement exécutoire de la peine. Mais il est possible, en même temps que les formalités de recours devant la Cour d'Appel, de requérir parallèlement auprès de la 1° Chambre un sursis à exécution. Si le sursis à exécution est relativement facilement concédé pour ce qui est de l'amende, il a été refusé en ce qui concerne la publication et ce pour deux motifs : la publication de la décision dans un journal d'annonces légales permet de la rendre opposable aux tiers et elle assure et rétablit la bonne information du public (31).

§ 7 Cas particulier du journaliste

Sous le terme "toute personne", les journalistes et analystes financiers peuvent être réprimés en application des dispositions sur le manquement à la bonne information. Étant donné l'importance croissante que prend leur médiation dans l'information financière, leur activité s'organise de plus en plus professionnellement. Ils se trouvent soumis à un code de comportement et s'ils dérogent aux règles éthiques ils risquent des sanctions disciplinaires. En commettant un acte qualifiable de manquement (ou de délit), ils sont dont passibles d'une double sanction (administrative et disciplinaire).

1) Critique du découpage réglementaire La faute disciplinaire, cumulée à un délit ou un manquement, est différente de nature de ces deux catégories d'infractions. En effet, la faute disciplinaire ne trouble pas l'ordre public (en l'occurrence la transparence du marché), mais l'ordre professionnel. Bien que la faute disciplinaire, à l'inverse de la faute civile, entraîne une sanction, le principe de la légalité de la peine présidant la répression des délits et des manquements, n'a pas à être pris en considération. Cela n'empêche pas que la décision de sanction disciplinaire doit toujours pouvoir faire l'objet d'un recours et d'un contrôle de la légalité et de la conformité aux droits fondamentaux de l'Homme. (La Convention de Strasbourg primant sur le droit interne des États). Cette dualité de nature et de régime juridique commande qu'il n'y ait pas amalgame des deux contentieux mais si la loi stipule que c'est la même autorité qui est compétente pour juger du manquement infractionnel et de la faute. Même en admettant que faute disciplinaire et infraction pour manquement puissent être jugées lors d’une même séance de la Commission des sanctions,la motivation explicative de la peine devra être distincte (36) Il est donc dommage que l'article 632-1 du Règlement AMF définisse une faute professionnelle sous le même article que le manquement à la bonne information. Ce qui

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contraint à caractériser la nature des interdits des deux derniers alinéas de ce texte en comparaison du premier qui définit l'infraction de manquement à la bonne information financière que peut commettre toute personne. 2) Manquement du journaliste Le journaliste visé par l'article 632-1 peut donc commettre un manquement en communiquant, ou en diffusant sciemment une fausse information. Cela suppose qu'un initié lui ait communiqué, non pas une information privilégiée, mais au contraire une fausse information concernant cette dernière et que le journaliste en ait fait état dans la presse ou les médias, autrement dit l'ait diffusée. Généralement, un bon journaliste ne se contente pas de recopier ou répéter ; il travaille l'information et donne un avis personnel à partir de celle-ci. Si en même temps, il prend position sur l'instrument financier qui a fait l'objet de ses analyses, le public boursier risque fort de le suivre, surtout s'il s'agit d'un professionnel jouissant d'une certaine notoriété. L'alinéa 2 de l'article 632-1 ne lui interdit pas cette prise de position sur le marché à partir des avis qu'il aura publié, il lui est seulement interdit d'agir ainsi sans en avertir le public (d'un soi-disant "conflit d'intérêts" selon une terminologie du règlement à première lecture assez peu explicite). La question qui se pose est de savoir si le manquement du journaliste ne peut se commettre que de cette façon, c'est à dire si l'infraction à son égard comporte des éléments matériels de plus : le premier, la prise de position sur le marché concomitante à la diffusion d'une information trompeuse et le second, la non diffusion d'un conflit d'intérêts existant. Sans oublier un troisième, prévu in fine de l'article 632-1, à savoir avoir tiré directement ou indirectement un avantage ou un profit.Autrement dit, toutes ces conditions font un sort à part (privilégié) au professionnel qu'est le journaliste analyste financier par rapport à l'ensemble des personnes de toutes catégories pouvant commettre le manquement défini à l'alinéa 1 de l'article 632-1. Bien pire, le manquement de cette catégorie particulière de professionnel doit de surcroît "être apprécié en tenant compte de la réglementation applicable à cette profession". Faut-il comprendre que l'infraction et la faute professionnelle doivent être appréciées en amalgame Il semble bien que ce soit ce qu'aient voulu les financiers présidant à la rédaction du nouveau règlement boursier, d'autant qu'une sorte de privilège de juridiction, tout à fait antidémocratique, ait été organisé au niveau des recours(32)

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NOTES

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(1) B. FRANCOIS, L’appel à l’épargne, critère de distinction des sociétés de capitaux, Thèse Paris II, 2003

(2) Rapport COB, 1968, p 11

(3) N. RONTCHEVSKY, Liberté d'expression et délits boursiers, Bull. Joly Bourse 2001, p211, n°42 ; D. SCHMIDT, Transparence et marchés financiers et boursiers, R. J. com. 1993, p168.

(4) Décision AMF 3 nov. 2004, BALO 10 déc. 2004, p29367, Bull. Lamy Droit pénal des affaires fév. 2005, n°36, p2, La fausse information n'implique pas la qualité d'initié..., note C. DUCOULOUX-FAVARD ; C.A Paris, 1° ch. 28 juin 2005.

(5) Infra, n°

(6) Que T. BONNEAU et F. DROMMOND traitent sous la rubrique information occasionnelle, Droit des marchés financiers, Economica, 2005, n°455, p408.

(7) Sur ce pouvoir d'injonction, voir Infra, n° . M C. ROBERT , LAMY Droit pénal des affaires 2005, n°1159 et C. DUCOULOUX-FAVARD, Rep. Dalloz Société 2005, verbo Contentieux boursier.

(8) Voir Lamy Droit pénal des affaires 2005, n°134.

(9) Cass. crim. 15 mars 1993, Dalloz 1993, p612, note C. DUCOULOUX-FAVARD.

(10) Infra, n° et Supra,n° (11) TGI Paris, 27 fév. 1999, Bull. Joly Sociétés 1998, p927, note N. RONTCHEVSKY.

(12) Cass. crim. 20 nov. 2000, n°99.80.324 FS, Bull. Joly Sociétés, avril 2001, p 407, note E. DEZEUZE qui confirme C.A Paris, 16 déc. 1998, n°P9304169023.

(13) TGI Paris 5 juillet 1988, Les Petites Affiches; 3 fév. 1989, p2, note C. DUCOULOUX-FAVARD et C.A Paris 15 déc. 1989, Dr. Sociétés 1991, n°38 ; Droit pénal 1990, n°327, note J.H. ROBERT.

(14) TGI Paris 9 mars 2004, n°9928592017, Bull. Joly Bourse 2004, p255, note C. DUCOULOUX-FAVARD.

(15) Bull. COB 1997, n°318, p15 et communiqué COB, 16 mai 2000, http//www.cob.fr .

(16) Aff. Bernard Tapie, C.A Paris 30 nov. 1994, Les Petites Affiches 30 janv. 1995, n°13, p13 note C. DUCOULOUX-FAVARD ; voir infra, n°

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(17) H. DE VAUPLANE et J. P. BORNET, Droit des marchés financiers, 3° ed. Litec 2001, n°1043, p921.

(18) C. GARCIN, Lamy Droit pénal des affaires 2005, n°2007. Il convient aussi de se souvenir que le délit économique de publicité trompeuse a parfois été utilisé pour qualifier une fausse information financière même après la loi de 1970 ; le cas des Diamantaires d'Anvers ou du scandale des placements en parts de Forêts de chasse sont bien connus ; Dictionnaire permanent Epargne et produits financiers, verbo Délits financiers et boursiers, n°36 ; verbo Diamants et pierres précieuses, n°25.

(19) t g i Paris ? 11° Ch, 31 juillet 1980 et C A Paris, 9° Ch, 4 février 1981, D &980, IR, p 389 ; Bull COB, mars 1981, p 3.

(20) Lamy Droit pénal des affaires 2005, notamment n°137 et 139.

(21) Affaire Société Générale de Fonderie, cass. crim. 15 mars 1993, Dalloz 1993, p612, note C. DUCOULOUX-FAVARD ; supra, n°21.

(22) Infra, note 9

(23) C. DUCOULOUX-FAVARD, Quels intérêts protégés pour quelles victimes ?, Gaz. Pal. 22 fév. 2003, p25, sous cass. crim. 11 déc. 2002.

(25) C. DUCOULOUX-FAVARD, Allègement de la répression au manquement à la bonne information financière, Dalloz 2005, n°14, p946.

(26) Décision AMF, comm. San,c. 1° sect. 6 2005, affaire TELECOM CITY, Bull Joly Bourse mai 2005, p 257, note C. DUCOULOUX-FAVARD

(27)Cass. Com, 14 novembre 1995, Bull Joly Bourse 1996, p 115, note P. LE CANNU

(28) ART ; 632-1 in fine , voir Supra, note 16 et Infra n°

(29) Décision COB juillet 1992, Bull COB, 1992, n° 260, p10, affaire CONEPT qui donna lieu à un rectificatif du règlement

(30) Décision COB , affaire WELCOM, 1° juin 1995, Bull COB juin 1995, p 15, confirmé paar C A Paris 23 janvier 1996, Bull Joly Bourse, juillet 1996, p 411, note H. PISANI

(31) C A Paris, 1° Ch, 15 mars 1995, affaire FOURNIER, Les petites affiches 28 juin1995, p 27, C. DUCOULOUX-FAVARD, Bull Joly Bourse 1995, p 181, N. DECOPMAN

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(32)J. F. KRIEGK, Culture judiciaire : une contribution au débat démocratique, Dalloz 2005, p 1592

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CHAPITRE VI

DELITS D’OBSTACLE A LA MISSION DE L’AMF

1) Présentation Il ne suffit pas de donner à une autorité de contrôle, voire de poursuite et de sanction comme la COB depuis 1989 ou l’AMF aujourd’hui, de larges pouvoirs d’investigation. Encore faut-il que les obstacles aux agents enquêteurs soient sanctionnés

-En 1967, lorsque fut créée la COB par l’ordonnance du 28 septembre, l’Autorité de surveillance du marché qu’ elle était ne pouvait que se faire communiquer par les sociétés cotées elles-mêmes ou par leurs banquiers et agents de change toute pièce utile. Et l’on sait que cette jeune COB prit très vite une certaine autorité morale lui permettant d’exercer son pouvoir de contrôle. D’autant que dès 1970, avec la loi n°70-1230 du 23 juillet 1970 instaurant le délit d’initié, le Collège de la COB a pu auditionner et convoquer par l’intermédiaire de ses agents toute personne susceptible de lui fournir des informations. Ce pouvoir de surveillance et d’investigation, même secondé par la technique informatique (1), se révélait trop étroit. Il se devait d’être élargi. Ce fut d’autant plus nécessaire que ces pouvoirs se sont considérablement élargis au fil du temps (2) et que de surcroît l’autorité de marché n’est plus seulement un organisme enquêteur procédant à des “actes de pré instruction” (3) lui permettant de transmettre un rapport circonstancié au Parquet, mais est devenu un véritable juge d’instruction, assorti du pouvoir de saisie (il est vrai sous contrôle du tribunal) et de juge sanctionnant pouvant prononcer de lourdes peines.

2) Trois délitsLa naissance des délits d’obstacle s’est faite en deux temps : la loi n°88-70 du 22 janvier 1988 a créé le délit d’obstacle à la mission des agents enquêteurs de la COB, à l’image de celui qui protège la mission de contrôle des Commissions aux comptes. Et la loi n°89-531 du 2 août 1989 a ajouté deux autres délits : le premier concerne les mesures de séquestre et le second est relatif à la non consignation dans le délai imparti du bien séquestré. Ces trois infractions figurent aujourd’hui sous les articles L642-2 et L642-3 du code monétaire et financier que la loi n°2003-706 du 1° août 2003 a quelque peu retouché.

§1 Textes

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1)Art. L642-2. Est puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 300.000 euros le fait, pour toute personne, de mettre obstacle à une mission de contrôle ou d’enquête de l’Autorité des marchés financiers effectuée dans les conditions prévues aux articles L621-9 à L621-92 ou de lui communiquer des renseignements inexacts.

2)Art. L642-3. Est puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 300.000 euros le fait, pour une personne, de mettre obstacle aux mesures de séquestre ou de ne pas respecter l’interdiction temporaire d’activité professionnelle prononcée en application de l’article L621-13.

Est puni d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 75.000 euros le fait, pour toute personne, de ne pas consigner la somme fixée par le juge, en application de l’article L621-13, dans le délai de quarante huit heures suivant la date à laquelle la décision est devenue exécutoire.

§ 2 Personnes punissables

Les textes se réfèrent à toute personne, c’est à dire à tout sujet de droit. Or les personnes morales à compter du 1° janvier 2006 vont se trouver responsables pénalement pour toute infraction, le principe de l’incrimination générale ayant été adopté par la loi PERBEN II. Cependant, il faut bien reconnaître que l’entrave est nécessairement un acte perpétré par une personne physique. Mais la non consignation du bien séquestré ou saisi de l’article L642-3, al.2 peut être voulue par la personne morale possédant ou détenant celui-ci.Jusqu’ici aucun de ces trois délits ne semble avoir été appliqué.

§ 3 Eléments consitutifs matériels

A) Le délit d’obstacle à la mission d’enqûete (article L642-2 code monétaire et financier). Le pouvoir d’investigation de l’Autorité de marché est très large puisque l’AMF, comme feue la COB, peut enquêter aussi bien auprès des personnes soupçonnées que de celles qui ont été en rapport d’affaire avec elles, notamment les entreprises et en particulier les banques. Au surplus, les établissements qui n’entrent pas sous le contrôle de l’Autorité de marché au sens des articles L621-9 à L621-9-2 peuvent être soumis à des investigations de l’Autorité boursière. L’obstacle peut donc venir d’eux tous8- La COB et aujourd’hui l’AMF procèdent souvent à un premier contact informel par une simple lettre par laquelle il est demandé de répondre à un questionnaire. Ce n’est que dans un second temps que les

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enquêteurs sont officiellement désignés et dès lors, il est possible de soutenir que ce n’est qu’à l’encontre des enquêteurs munis d’un ordre de mission (qu’ils doivent d’ailleurs être en mesure de montrer) que le délit peut se commettre.

Le délit se commettrait aussi par mensonge ; en effet, l’article L642-2 vise également le fait de “communiquer des renseignements inexacts”. A première lecture, une personne soupçonnée n’aurait pas le droit de garder le silence ou de ne pas contribuer à sa propre mise en cause comme cela est admis devant l’autorité judiciaire et selon les principes des Droits de l’Homme. Et l’on sait qu’en matière douanière où le pouvoir d’investigation des Douanes françaises est particulièrement dérogatoire au droit commun judiciaire, la Cour de Strasbourg a confirmé le respect obligé de l’article 6 de la DECH et donc le droit de ne pas prendre part à sa propre incrimination (4). Pour en revenir à la matière boursière, de toute façon, le délit sous cette forme de renseignement inexact ne peut être purement matériel, c’est à dire commis par un simple non-dit, puisque l’article 121-3 du code pénal exige la mauvaise foi pour tout délit.

B) L e délit d’obstacle au séquestre (art. L642-3, al.1 code monétaire et financier). 1) Le séquestre Le séquestre est une mesure conservatoire décidée par ordonnance du Président du Tribunal de Grande Instance sur requête du Président ou du Secrétaire Général de l’AMF. A noter que, si la demande de séquestre doit être motivée de la part de l’AMF, peu importe la nature des faits qui ont provoqué la mesure ; il n’est pas nécessaire qu’ils soient susceptibles d’une qualification pénale. Cette interprétation est celle du Tribunal de Paris (5) qui a pris soin de préciser que les termes “personnes mises en cause” de l’article L621-13 “ne se rattachait pas à la notion pénale de mise en cause ou de mise en examen. Il exclut même cette interprétation restrictive, puisqu’il indique qu’il s’agit de personnes mises en cause par cette même autorité, laquelle autorité ne saurait s’identifier au ministère public”. Cette mesure intervient nécessairement après une perquisition en bonne et due forme, c’est à dire contrôlée judiciairement, sans que le juge qui est chargé d’y veiller ne soit tenu d’être présent (6). Ce sont les agents habilités par l’AMF qui procèdent à ces actes inquisitoriaux et ces agents sont les mêmes que ceux des simples visites. Aussi, est-il possible de se demander si le délit d’obstacle à la mission d’enquête, vu précédemment, ne pourrait pas s’appliquer en l’occurrence. N’y aurait-il pas doublon d’incrimination ? Ou alors le délit d’obstacle au séquestre se retrancherait-il seulement autour de l’exécution de l’ordonnance ordonnant la mesure ? Cette dernière interprétation n’est pas à exclure puisque l’obstacle au séquestre se jumelle à l’obstacle à l’interdiction temporaire d’activité, laquelle résulte aussi d’une ordonnance du Président du Tribunal de Grande Instance

2) L’obstacle.

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Sur l’acte d’obstacle proprement dit, en l’absence de jurisprudence, il n’est qu’une possibilité pour analyser l’infraction : se reporter aux délits similaires. En effet, la procédure de séquestre dont bénéficie l’AMF est similaire à celle qui existe depuis longtemps en matière de concurrence (7).

12-Aussi, la jurisprudence réduite, mais existante, de ce secteur pourrait servir de modèle. Ainsi, le fait de refuser d’être présent ou d’avoir délégué un mandataire au moment de la perquisition serait un acte d’obstacle puisque cette présence est nécessaire à la validité de l’opération.

13- A propos de l’infraction commise en ne s’abstenant pas d’exercer une activité interdite par le Président du tribunal de grande instance, sur requête de l’AMF, il faut noter que depuis le mois de mai 2005 cette infraction est doublée, bien que cette dernière ressort d’un texte illégal (8).

C) Le délit d’obstacle à la consignation (art. L642-3, al. 2, codemonétaire et financier). Encore ici, la situation juridique n’est pas claire dans les textes. De quelle consignation de somme d’argent s’agit-il ? L’article L642-3, al.2 définissant le délit renvoie à l’article L621-13. Or ce texte comporte trois alinéas : le premier concerne le séquestre (la somme à consigner peut donc se rapporter à celle séquestrée) ; le second et le troisième sont relatifs à la possibilité pour l’AMF d’obtenir du Président du Tribunal de Grande Instance, statuant en référé, “qu’une personne mise en cause soit astreinte à consigner une somme d’argent”, ce qui ne suppose pas une perquisition, ni une mesure de séquestre. Le délit pourrait donc se commettre en raison de ces deux sortes de circonstances. Mais dans le cas des deux derniers alinéas, il s’agit d’un refus d’exécuter une sentence, pourtant prononcée sous astreinte, ce qui est très dissuasif. Aussi, l’interprétation large laisse perplexe .

§ 4 Elément moralLa nature même des délits d’entrave ou d’obstacle suppose une volonté de s’opposer à une mesure d’investigation. Dès lors, ils ne peuvent être qu’intentionnels (8). La mauvaise foi est moins facile à établir par la prévention dans les cas de refus d’exécuter le séquestre dans les quarante-huit heures ou l’interdiction d’exercer l’activité professionnelle. Toutefois, ceux qui y contreviennent ne peuvent pas ignorer qu’ils sont en infraction puisqu’ils ont déjà été soumis à perquisition au cours de laquelle ils ont fait preuve de mauvaise volonté.

§ 5 Prescription

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Elle est pour tous les délits de trois ans à partir de l’acte d’entrave ou des quarante-huit heures de la sentence définitive ordonnant le séquestre. Pour ce qui est de la non exécution de la décision interdisant l’activité professionnelle, le délit étant continu, la prescription ne court que lorsque l’activité a cessé.

§ 6 Santions Les peines sont plus douces dans le cas de non consignation de la somme fixée par ordonnance judiciaire pour autant que cette non consignation ne se cumule pas dans les faits à l’obstacle à séquestre d’une somme d’argent.

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NOTES

(1) C. Ducouloux-Favard, L’informatique et la recherche des infractions boursières, Dalloz 1988, p270.

(2)Voir Conac

(3) Pour reprendre l’expression de P. DIDIER, Droit commercial, tome 3, Themis 1993, p45. Voir aussi, J.H ROBERT, Les investigations des fonctionnaires investis de certaines fonctions de police judiciaire, Mélanges en l’honneur d’A. Vitu, Cujas 1989, p431 et J.P MICHAU, in Investigations et enquêtes des autorités de marché, Actes colloque Université Paris IX Dauphine 16 nov. 1999, Droit français, la COB, Les Petites Affiches 30 janv. 1995, p3.

(4) Affaire Funke / France §44, Dalloz 1993, jur. p457, note J. PANNIER ; JCP éd. G. 1993 II n°22073, note R et A GARNON.

(5) TGI Paris, Ch. req. 8 nov. 2004, n°04-14004, Zhang et Société AI Investment / AMF, RTD com. janv. 2005, p144, note N.R.

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(6) Sur la différence entre les visites-accès de l’article L621-10 et les visites perquisitions de l’article L621-12, C. Ducouloux-Favard, Le contentieux boursier, Répertoire Dalloz =société 2005, n°36 et s.

(7) En matière de concurrence, voir Cass. crim. 25 fév. 1992, Bull. crim. n°86, JCP 1992 IV n°2167, p236. Voir aussi C. Ducouloux-Favard, Les mesures conservatoires en matière boursière, Les Petites Affiches 22 juin 1992, p13.

(8) Infra, n°

(9) A titre de comparaison voir Cass. crim. 22 mai 1989, Bull. crim. n°211, Dalloz 1990, somm. p363, observation G. ROUJON DE BOUBÉE (à l’encontre des inspecteurs du service des fraudes) ; Cass. crim. 14 janv. 1991, Droit pénal 1991, n°117, note J.H ROBERT (en matière de concurrence) ; Cass. crim. 26 nov 1980, Bull. crim. n°322, Rev. sc. crim. 1981, p861, note A. VITU ; Cass. crim. 28 sept. 1993, Bull. crim. n°269 () l’encontre d’un inspecteur du travail).

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ADDITIF

OBLIGATION DE DÉCLARATION D’ OPÉRATIONS BOURSIÈRES SUSPECTES

1- Au titre de la prévention de la lutte contre le terrorisme et le crime organisé, une nouvelle obligation de déclaration de soupçons est née .Elle concerne le droit boursier. A l’image de la déclaration de soupçons de blanchiment (1) pesant, dès 1990, sur les établissements de crédit et de banque et qui s’est étendu largement à nombre d’activités professionnelles (notaires, avocats, commissaires aux comptes etc...), une loi n°2005-811 du 20 juillet 2005 organise une obligation similaire en matière boursière.

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2- Un article L621-17-2 est inséré dans le code monétaire et financier qui impose aux établissements de crédit, aux entreprises d’investissement et aux membres des marchés financiers (réglementés sous l’article L 421-8 du code monétaire et financier) de déclarer sans délai à l’AMF les opérations financières pouvant être suspectées de constituer une opération d’initié ou une manipulation de cours : action illicite sur le marché ou fausse information financière.

3- Le texte est le suivant: Article L.621-17-2.Les établissements de crédit, les entreprises d’investissement et les personnes mentionnées à l’article L 421-8 sont tenus de déclarer sans délai à l’Autorité des marchés financiers toute opération sur des instruments financiers admis aux négociations sur un marché réglementé, ou pour lesquels une demande d’admission aux négociations sur un tel marché a été présentée, effectuée pour compte propre ou pour compte de tiers, dont ils ont des raisons de suspecter qu’elle pourrait constituer une opération d’initié ou une manipulation de cours au sens des dispositions du règlement général de l’Autorité des marchés financiers.

4- Il est assez surprenant que l’Autorité des marchés ait besoin du secours de cette sorte de déclaration pour lui faire connaître des infractions dont elle est depuis longtemps l’organisme le plus apte à détecter les fluctuations boursières et à détecter les fluctuations boursières et à rechercher si elles sont dues à un délit d’initié ou une manipulation de cours.

5- Comme dans le cas des déclarations de soupçons de blanchiment à TRACFIN, le secret des déclarations est protégé. L’AMF ne doit pas transmettre de telles déclarations avec le dossier avisant le Ministère public de faits constitutifs de délit. Au surplus, la divulgation d’une telle déclaration est passible d’une peine d’un an de prison et de 15.000 euros d’amende (article L 621-17-5 du code monétaire et financier renvoyant aux peines de l’article 226-13 du code pénal). En revanche, les peines relatives à l’atteinte à un secret professionnel ne peuvent être appliquées aux auteurs de la déclaration, ni aucune action en responsabilité civile ne peut être menée contre eux (article L 621- 17-7).

6- Comme pour la déclaration à TRACFIN en matière de blanchiment, la non déclaration n’est pas sanctionnée pénalement. A ce propos, il est possible de se demander si, au vu des circonstances de fait, celui qui a omis de faire la déclaration risque d’être inquiété pour complicité. En matière de délit d’initié, pas plus qu’en cas de manipulation de cours, il semble difficile d’imaginer que l’absence de déclaration soit un acte d’aide ou d’assistance suffisamment concret pour constituer une complicité au sens de l’article 121-7 du code pénal.

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Notes

(1) Sur ces questions, à titre de comparaison avec cette nouvelle obligation, voir LAMY Droit pénal des affaires, chapitre Délits de blanchiment de l’argent illicite sous notre plume.

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CHAPITRE VII

FAUTES DISCIPLINAIRES

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CHAPITRE 7

FAUTE DISCIPLINAIRE

A) Nature de la faute disciplianireLa commission d’un délit ou d’une infraction administrative grave (manquement) est souvent l’occasion de découvrir, de la part des professionnels impliqués dans une telle infraction, la transgression des règles éthiques (1). La faute disciplinaire peut alors être réprimée, sans se confondre avec le délit ou le manquement que l’on a révélé au grand jour.La faute disciplinaire n’est pas de même nature que l’infraction (qu’elle soit pénale ou administrative). Cette dernière est un acte ou une omission qui porte atteinte à l’ordre public, alors que la faute disciplinaire transgresse une règle déontologique et trouble l’ordre professionnel.

B) L’exercice du pouvoir de sanction

L’exercice du pouvoir disciplinaire est confié à des instances très diverses selon la catégorie professionnelle considérée (fonctionnaires, professions libérales ou commerciales réglementées). Et le pouvoir de réprimer les fautes disciplinaires n’est pas nécessairement confié à l’organisme qui édicte les codes de déontologie ou d’éthique (2). En matière boursière, sous le régime antérieur à la loi n°2003- du 2 août 2003, c’était le Conseil des marchés financiers et le Conseil de discipline des OPCVM qui étaient compétents en matière disciplinaire, même si c’était souvent la COB qui détectait les fautes commises par les professionnels à l’occasion d’infractions au marché.

5- Depuis la fusion des autorités de marché au sein de l’AMF, décrétée par la loi de 2003 et mise en place le 24 novembre 2004 avec l’installation officielle de l’AMF, le pouvoir disciplinaire appartient à cette dernière. Et c’est la Commissions des Sanctions qui sanctionne après que les services d’enquête du Collège aient instruit l’affaire, souvent parallèlement à l’enquête sur les manquements. Les règles de procédure se déroulent donc selon des règles voisines, bien que ce soit sous un régime juridique différent (3).

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6- L’autorité boursière agit d’office à l’encontre du professionnel, mais peut être saisie aussi par le Gouverneur de la Banque de France ou le Président de la Commission bancaire. Cette dernière (4), si elle a la compétence disciplinaire de la profession bancaire, a aussi qualité pour agir à l’encontre des établissements de crédit puisque celle-ci ont pu recevoir agrément pour effectuer un certain nombre de services d’investissements. Aussi l’article L 613-2 du code monétaire et financier répartit les pouvoirs de surveillance des deux autorités en limitant la compétence de la Commission bancaire aux règles générales (légales et réglementaires) autres que les règles de bonne conduite de la profession.

§1- compétence de l’AMF faisant problèmes

La loi du 1° août 2003 créant l’AMF lui a donné un champ de compétence élargi, comparativement à l’ancien CMF puisque aux côtés des prestataires de services d’investissement se trouvent dorénavant les démarcheurs, les conseillers en investissements financiers et les analystes financiers (art. L621-9, II, 9°, 10° et 11° code mon. et fin.).A) Le pouvoir disciplinaire doit être autonomeLa compétence pour sanctionner les fautes professionnelles ne doit pas coïncider avec le pouvoir répressif pour manquements aux règles du marché ( lesquels peuvent être commis par des professionnels boursiers ou d’autres personnes). Même si c’est la Commission des Sanctions de l’AMF qui est compétente pour les deux sortes de procédures,ela n’empêche pas que la procédure disciplinaire doit rester autonome.Il est anormal que l’AMF fusionne les dossiers d’enquête et de pousuite du répressif et du disciplinaire, même si c’e sont de manques concomitants. Le Conseil d’Etat a d’ailleurs sur certains points, vu les choses de cette façon en posant que la publicité des débats ne se justifiait pas (à l’inverse des séances de la Commission des Sanctions pour manquements) en matière disciplinaire (5). Dès lors, les dossiers, même s’ils venaient à être dirigés vers la même section de la Commission des Sanctions, n’ont pas à être joints. La Commission des sanctions lorsqu’elle traite de questions disciplinaire n’assume pas un pouvoir de juridiction.

§ 2 La faute professionnelle n’est pas une infraction.

L’intérêt protégé en matière disciplinaire est l’ordre d’une profession réglementée, alors que ce sont les délits et les manquements qui assurent la bonne santé du marché. Il nous est apparu très choquant que la commission des sanction motive dans une véritable mixture le manquement et la faute professionnelle (Voir, Décision AMF, 16 mars 2004, Rev. AMF, mai 2004, affaire GSD Gestion, cette

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même affaire qui a donné lieu à l’arrêt du Conseil d’Etat, précité, Dic Perm Epagne et produits financiers, Bull 2005, n° 365, p 967°