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L e h yle homosexuel En Espagne sous Franco traduit de l’espagnol et introduit par annick allaigre prologue de juan antonio gonzález-iglesias juan gil-albert

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Le hyle homosexuelEn Espagne sous Franco

traduit de l’espagnol et introduit par annick allaigreprologue de juan antonio gonzález-iglesias

juan gil-albert

Écrit en 1955, impubliable à l’époque, ce livre ne fut édité qu’en 1975, alors qu’un vif vent d’espoir soufflait sur un pays désireux de rattraper le temps perdu en matière de liberté. Néanmoins, le propos, dans ce pays catholique, restait scabreux. Une trentaine d’années plus tard, il n’en est pas pour autant devenu consensuel, et Gil-Albert lui-même souligne son manque d’aménité.L’homosexuel dépeint est un homme libre ; traversée de rencontres, sa solitude reste radicale. Ses manières, son style de vie n’ont que faire d’une communauté gay – ce n’est pas le moindre des intérêts de cet ouvrage aujourd’hui où l’existence d’une telle communauté paraît aller de soi.Il ne s’agit pas ici de défendre l’homosexualité, mais de la fonder. Ce à quoi s’attache la figure centrale d’Héraclès, alternative concertée au Corydon de Gide comme à l’Antigone de Kierkegaard.

ISBN 978-2-908855-95-119 €

l’auteur

Délaissant d’ennuyeuses études de droit, philosophie et lettres, Juan Gil-Albert (1904–1994) publie ses premiers récits en prose peu avant sa trentième année. Il ne ces-sera plus d’écrire : essais, chroni-ques, mémoires, romans, certains traduits en français chez Actes Sud (Valentin, en 1987, Les Archanges en 1989).Dès 1929, il milite. Lorsque Valence devient la capitale de la Républi-que, les intellectuels espagnols se réunissent dans sa maison. Il par-ticipe à l’organisation du deuxième congrès international des écrivains antifascistes. De 1939 à 1947, il choi-sit l’exil, d’abord au Mexique, où il travaille avec Octavio Paz, puis en Argentine, où il rencontre Borges et contribue à la célèbre revue Sur. Au début des années soixante-dix, la parution de son anthologie poé-tique et de sa Chronique générale le rend populaire auprès d’un large public. Il publie alors son Heraclés, resté vingt ans sous le boisseau.

dans la même collection

Vernon A. RosarioL’irrésihible ascension du pervers, entre litérature et psychiatrie

David M. HalperinCent ans d’homosexualité et autres esais sur l’amour grec

David M. HalperinSaint Foucault

Jonathan Ned KatzL’invention de l’hétérosexualité

Judith Butler, Gayle RubinMarché au sexe

Lynda HartLa performance sadomasochisteEntre corps et chair

Pat CalifiaLe mouvement transgenreChanger de sexe

Judith ButlerAntigone : la parenté entre vie et mort

Elisabeth LadensonProuh lesbien

David M. HalperinOublier Foucault : mode d’emploi

John J. WinklerDésir et contraintes en Grèce ancienne

Mark JordanL’invention de la sodomie dans la théologie médiévale

Leo BersaniLa mort parfaite de Stéphane Mallarmé

Mario MieliÉléments de critique homosexuelle Italie : les années de plomb

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Trois singes, mais un seul suffirait… s’il avait six mains. Le 4 juin 1969, avec cet un-en-trois, Lacan figure le psychanayste ; plus exactement sa présence en tant qu’ininterprétable.Quelle présence ? Celle d’un « se taire », isolant ainsi la voix, qui est ce qui, du dire, fait parole ; celle d’un « ne rien voir » isolant le regard, nœud serré du sac de tout ce qui se voit au monde ; celle d’un « ne rien entendre » isolant, de ces deux demandes dans les-quelles a glissé le désir, le sein ou bien l’excrément.

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Cet ouvrage a été publié pour la première fois en 1975 à Madridpar Editorial Josefina Betancor sous le titre

Heraclés, sobre una manera de ser.Deuxième édition : Valencia,

Pre Textos/instituto de Cultura Juan Gil-Albert, 2001.

© EPEL pour la traduction française, 200829, rue Madame, 75006 Paris

[email protected]

Couverture Régis Le Bras.

Diffusion, Toèmes Distribution, SoDiS3, allée des Genêts 91220 Le Plessis Paté01 60 84 78 01 - 06 15 61 70 [email protected]

iSBN : 978-2-908855-95-1 iSSN : 1299-6114

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JUAN GIL-ALBERT

Le style homosexuelEn Espagne sous Franco

TRADUIT DE L’ESPAGNOLPAR ANNICK ALLAIGRE

EPEL29, rue Madame

PARIS 6e

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Sommaire

Prologue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

Hommage à Platon . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29

I . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33

II . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67

III . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127

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Prologue

Le traité que Juan Gil-Albert a consacré à l’homoérotisme masculin doit entrer dans la littérature française pour un cer-tain nombre de raisons essentielles. La première se trouve dans le titre qu’il lui a donné : Heraclés, dont la forme habituelle en espagnol est Heracles. En déplaçant l’accent, Gil-Albert renvoie au grec. C’est ainsi que les Athéniens écrivaient ce nom et à peu près comme cela que l’écrivent les Français. Je suis convaincu qu’il s’agit d’une influence française : Gil-Albert utilise fré-quemment les noms gréco-latins à la manière française (par exemple, il écrit « Les Pléiades »), entre autres raisons parce qu’il lit ordinairement les classiques dans des traductions bilingues françaises. Gil-Albert voit dans la France le prolonge-ment naturel de la Grèce antique. Dans Mon poème de France, il dit :

Doux, doux pays, quand ses brasvéritables se levèrent en silenceet je me suis trouvé dans cette vallée de la vie sur les tendres pentes parfuméespar la jacinthe obscure des Grecs.

L’importance de la jacinthe est très grande pour le sujetd’Héraclès : c’est la fleur et le mythe de l’aimé d’Apollon. Face à la dichotomie rose/œillet dont Gide se sert pour opposer l’amour hétérosexuel à l’homosexuel, Gil-Albert en esquisse une

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autre : rose/jacinthe. Et cela, il l’éprouve, physiquement, enFrance. Tout est dit dans quelques phrases à la première per-sonne du même poème : « Je suis poète », « Baudelaire m’ac-compagne ». Ce constat aussi a lieu sur le sol français.

Deuxième raison essentielle : Héraclés n’aurait pas été écritsans le Corydon d’André Gide. C’est un retour sur ce dialoguedécisif. Gide écrit une apologie, Gil-Albert, un fondement oudes assises.

Heraclés doit figurer dans les lettres françaises parce que laprose de Gil-Albert vogue entre les méditations de Michel deMontaigne et la narration minutieuse de Marcel Proust. Il doitêtre dans la même langue que celle où ont vu le jour les person-nages masculins de Marguerite Yourcenar, d’Alexis à Hadrien.Il doit être aux côtés des vers d’Alfred de Vigny ou d’André Ché-nier, poètes préférés de Gil-Albert.

La France est une nation indispensable dans la constitutionvitale de notre écrivain. Le premier volume de son autobiogra-phie, Crónica general, est presque une monographie sur laFrance. Son premier chapitre s’intitule « Un été en Touraine ».De cet été inoubliable que Gil-Albert a passé « comme un jeuneValois » dans les châteaux de la Loire, il faut relever deuxmoments qui se répercuteront, de manière invisible, dans l’essaiqu’il écrira des décennies plus tard. Le sujet d’examen que sonprofesseur de littérature française lui posa sur Montaigne :Chaque homme porte la forme entière de l’humaine condition.C’est ce que notre poète appelle « l’aiguillon pressant de la per-sonnalité ». L’autre moment est intime, mais il l’a partagé avecses lecteurs : c’est la nuit qu’il a passée dans le château de Che-nonceaux avec Kenneth, le compagnon de ces mois-là, l’aiméqu’il n’allait jamais revoir.

Il a traversé de nouveau la frontière française, en tant qu’exiléde la guerre civile. Ce moment-là aussi est à prendre en consi-dération.

Juan Gil-Albert maintient vive la flamme de l’homoérotismegrec. Sur ce sujet, Gil-Albert n’est pas élégiaque (comme l’a été

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Cernuda), ni tragique (comme Lorca). Son Heraclés n’est pas unlivre gay, mais une méditation sur la masculinité, portée à unetelle extrémité qu’elle déchiffre l’amour entre hommes. Juan Gil-Albert est opposé au mariage entre personnes du même sexe età la dérive familiale. Il croit, comme Platon, que l’amour entrehommes est supérieur au mariage, aux enfants et à la famille. Cen’est pas un livre facile ni qui suit la mode. Il ne l’était pas lors-qu’il l’a écrit, en pleine dictature franquiste, et il ne l’est pasdavantage aujourd’hui. Il mérite d’être lu par les compatriotesde Descartes et de Montherlant.

Hercule, le héros qui incarne l’hypermasculinité grecque, estle protagoniste de ce livre. C’est un Hercule hispanique, celui-là même qui sert à représenter Charles en César au Palais Royalde Madrid. Celui-là même qui participa à l’expédition des Argo-nautes dans leur quête de la Toison d’or, la plus grandedécoration espagnole, qui orne la poitrine des rois d’Espagne.Cet Hercule si espagnol apparaît dans ces pages, mais il appa-raît aussi comme un Hercule décidément « français ». C’estainsi que l’écrivain dépeint son homoérotisme, et c’est ainsi qu’ille rend universel, à titre d’essai.

Il y a quelques années, le journal El País a consacré un sup-plément culturel à notre poète. Il s’intitulait : « Cent ans d’unpoète heureux ». Je me risque à dire qu’il aurait été ravi d’avoirune traductrice comme Annick Allaigre. Je crois que c’est unechance pour lui. À la fin de Mon poème de France, Gil-Albertlisant Alfred de Vigny lance : « Oh France, pour être parmi lestiens ! » C’est chez les Français, écrivains et lecteurs, que nousle laissons, avec la sérénité que procure le devoir accompli.

Juan Antonio GOnzáLEz-IGLESIASSalamanque, février 2��8

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