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La campagne électorale tourne à la répression, à l'image du bilan « droits de l'Homme » du président Wa Extract of Mouvement mondial des droits humains https://www.fidh.org/fr/regions/afrique/senegal/La-campagne-electorale-tourne-a-la Élection présidentielle à hauts-risques au Sénégal La campagne électorale tourne à la répression, à l'image du bilan « droits de l'Homme » du président Wade - [français] - Régions - Afrique - Sénégal - Publication date: samedi 18 février 2012 Description: La FIDH et ses organisations membres et partenaires au Sénégal, la RADDHO, l'ONDH et la LSDH, condamnent vivement la répression systématique de toute manifestation pacifique dans le centre de Dakar et les dizaines d'arrestations d'opposants et de manifestants depuis ces dernières 72 heures. Nos organisations exhortent les autorités sénégalaises à cesser immédiatement la répression en cours, à libérer les personnes arbitrairement arrêtées et à se conformer à la législation sénégalaise en autorisant le déroulement des manifestations pacifiques. Copyright © Mouvement mondial des droits humains - Tous droits réservés Copyright © Mouvement mondial des droits humains Page 1/4

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La campagne électorale tourne à la répression, à l'image du bilan « droits de l'Homme » du président Wade

Extract of Mouvement mondial des droits humains

https://www.fidh.org/fr/regions/afrique/senegal/La-campagne-electorale-tourne-a-la

Élection présidentielle à hauts-risques au Sénégal

La campagne électorale tourne

à la répression, à l'image du

bilan « droits de l'Homme » du

président Wade- [français] - Régions - Afrique - Sénégal -

Publication date: samedi 18 février 2012

Description:

La FIDH et ses organisations membres et partenaires au Sénégal, la RADDHO, l'ONDH et la LSDH, condamnent vivement la répression systématique de toute

manifestation pacifique dans le centre de Dakar et les dizaines d'arrestations d'opposants et de manifestants depuis ces dernières 72 heures. Nos organisations

exhortent les autorités sénégalaises à cesser immédiatement la répression en cours, à libérer les personnes arbitrairement arrêtées et à se conformer à la législation

sénégalaise en autorisant le déroulement des manifestations pacifiques.

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La FIDH et ses organisations membres et partenaires au Sénégal, la RADDHO, l'ONDH et laLSDH, condamnent vivement la répression systématique de toute manifestation pacifiquedans le centre de Dakar et les dizaines d'arrestations d'opposants et de manifestants depuisces dernières 72 heures. Nos organisations exhortent les autorités sénégalaises à cesserimmédiatement la répression en cours, à libérer les personnes arbitrairement arrêtées et à seconformer à la législation sénégalaise en autorisant le déroulement des manifestationspacifiques.

Depuis près de trois jours, toutes les manifestations dans le centre de Dakar sont systématiquement dispersées parla force et des dizaines de manifestants sont arrêtés. Mercredi 15 février, la manifestation du mouvement citoyenM23 a été dispersée sans ménagement. Le 16 février, c'était au tour du collectif Y en a marre de subir unerépression particulièrement féroce : dispersion dans la violence, arrestation d'une vingtaine de leur membre dontplusieurs de leurs leaders et mauvais traitement des personnes arrêtées. Les 16 et 17 février, ce sont les candidats àl'élection présidentielle et leurs partisans qui ont été la cible de cette répression. Cheikh Bamba Dieye, candidat duFront pour le socialisme et la démocratie /Benno Jubël (FSD/BJ) a été arrêté quelques heures le 17 février alors qu'ilmanifestait place de l'obélisque, tout comme Ibrahima Sene, responsable du Parti de l'indépendance et du travail(PIT). Idrissa Seck, candidat du parti Rewmi ("le pays"), a lui aussi été la cible de tirs de grenade lacrymogène tandisque la manifestation d'Ibrahima Fall, candidat indépendant, s'est vu interdite par le préfet de Dakar malgrél'autorisation et les instructions de la Commission électorale nationale autonome (CENA) saisie par le candidat.

« Les autorités sénégalaises ne peuvent pas aller contre la loi sénégalaise » a déclarée Souhayr Belhassen,présidente de la FIDH. « Il faut que les autorités reviennent à la raison et autorisent l'expression publique et politiquedes opposants et des citoyens sous peine d'être assimilée à un régime autoritaire bâillonnant la démocratie » a-t-elleajoutée.

En effet, le gouvernement justifie la répression des manifestations par un arrêté pris par le préfet de Dakar en juillet2011 interdisant depuis lors toute manifestation publique dans le centre-ville de la capitale. Outre le fait que ce geldes libertés publiques et individuelles contrevient aux dispositions constitutionnelles, cette interdiction estmanifestement illégale au regard de l'article L 61 du Code électoral qui dispose que « tout candidat et tout électeurpeut librement organiser des réunions et des manifestations sur toute l'étendue du territoire en respectant lesconditions prévues par la loi », à sa voir une déclaration préalable de 24h auprès de l'autorité administrative. Cesconditions ont été respectées par toutes les organisations ayant souhaitées manifester ces derniers jours. La Coursuprême du Sénégal elle-même avait déjà considéré dans un arrêt du 13 octobre 2011 que l'interdiction d'unemanifestation similaire de la Radhho en décembre 2010 par un arrêté du préfet de Dakar avait été un « excès depouvoir » et constituait une « atteinte à la liberté de réunion ».

La situation s'est encore dégradée hier lorsque une grenade lacrymogène a été lancée dans la grande mosquée ElHadji Malick Sy au quartier du Plateau, à proximité du centre-ville, provoquant la colère de centaines de fidèles etrappelant l'attaque de la cathédrale de Dakar l'année passé. Plus inquiétant encore un journaliste de l'AgenceFrance presse (AFP) a vu, pendant les incidents, un policier sortir son arme de service et ouvrir le feu. Il a ensuiterécupéré une douille de 9 mm au sol ainsi qu'une balle non percutée laissant craindre une escalade dans larépression et l'utilisation de moyens contraires aux principes des Nations unies sur l'utilisation de la force.

« A la veille d'une échéance aussi importante pour le Sénégal, les plus hautes autorités du pays doivent faire preuvede responsabilité et d'apaisement en laissant la démocratie s'exprimer librement comme la loi le prévoit » a déclaréMe Sidiki KABA, président d'honneur de la FIDH.

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De même, il a été signalé des hommes en civil armés de fusils à pompe circulant à bord de 4X4 banalisés quipourchasseraient les manifestants. Selon les témoignages, certains avaient le visage couvert d'une cagoule noire,comme l'ont pu aussi le confirmer les correspondants de l'AFP et Reuters sur place.

Outre un policier blessé à la tête, les violences de la journée de vendredi ont fait une dizaine de blessés, dont deuxjournalistes occidentaux. Le bilan de la répression des manifestions et de la contestation populaire depuis la fin dumois de janvier est de 5 morts dont un policier, des dizaines de blessés et des dizaines d'arrestations.

Nos organisations s'inquiètent aussi du sort réservé aux nombreux manifestants arrêtés pour avoir bravé cetteinterdiction de manifester. Outre les mauvais traitements constatés lors de leur arrestation, il est à craindre qu'ilssoient actuellement torturés comme c'est souvent le cas au cours des détentions dans les commissariats et lesbrigades de gendarmerie.

La dernière mandature du Président Wade marquée par des régressions en matière des droits de l'Homme

A l'approche du premier tour de l'élection présidentielle prévue le 26 février 2012, nos organisations tirent un sombrebilan du quinquennat qui s'achève en matière de respect des droits de l'Homme. Parmi les nombreuses violationsdes droits civils et politiques, économiques, sociaux et culturels documentés par nos organisations, le scrutinprésidentiel est l'occasion de faire le bilan des trop nombreuses atteintes aux principes démocratiques, aux libertéspubliques et à l'indépendance de la justice au Sénégal ces dernières années.

Une de ces atteintes les plus flagrantes aux principes a été la tentative avortée du chef de l'État de modifier laconstitution pour changer à son avantage les règles du jeu de l'élection présidentielle à moins d'un an du scrutin pourfinalement renoncer face à la contestation populaire le 23 juin 2011. « Le tripatouillage de la loi fondamentale auraitsérieusement porté atteinte aux principes de l'alternance démocratique. La démarche du président Wade, bien questoppée, a démontré son peu d'attachement aux principes démocratiques en contradiction avec la Charte africainede la démocratie, des élections et de la gouvernance qui lie le Sénégal », a déclaré Souhayr Belhassen, présidentede la FIDH.

Les libertés publiques ont également souffert de restrictions. Des manifestations ont été interdites de manière illégale- comme celle que souhaitait organiser la Raddho en décembre 2010 et encore dernièrement le 15 février 2012 6 etparfois réprimées - comme celles du M23 de juin 2011 et celle du mouvement Y en a marre ! le 16 février 2012 - parun usage disproportionné de la force par les forces de sécurité, des arrestations arbitraires et de mauvaistraitements. « A contrario, les violences perpétrées contre les manifestants du M23 et de Y en a marre ! par desnervis du régime ou des sympathisants du parti au pouvoir n'ont jamais fait l'objet d'enquête », a déclaré Me AssaneDioma Ndiaye, le président de la LSDH. « Quant à l'enquête sur l'agression d'Alioune Tine le 23 juin 2011, elle estpiétine alors que toutes les preuves de l'implication des nervis du pouvoirs sont entre les mains de la justicesénégalaise » a ajouté Assane Dioma Ndiaye qui est aussi son avocat.

Nos organisations ont par ailleurs dénoncé les attaques récurrentes contre les défenseurs des droits de l'Homme dela part des autorités : déclarations publiques de membres du gouvernement assimilant les défenseurs aux opposantspolitiques ; atteintes à la liberté d'expression de représentants de la société civile ; arrestations arbitraires, commecelle en janvier 2012 du président de la Raddho, Alioune Tine, finalement libéré sans charge après 48 heures dedétention dans des conditions difficiles et sans accès à son avocat ; expulsion du secrétaire général de la FIDH ; etconfiscation en douane des exemplaire du Rapport annuel de l'Observatoire pour la protection des défenseurs desdroits de l'Homme (FIDH/OMCT).

« Ces violations répétées de la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs convergent vers l'expression

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autoritaire d'un pouvoir qui refuse toute critique de sa gouvernance », a déploré Me Sidiki Kaba, président d'honneurde la FIDH.

La pratique de la torture demeure malheureusement toujours d'actualité au Sénégal, la LSDH a ainsi recensé denombreux cas de tortures par des agents de l'État et a saisi le Comité contre la torture des Nations unies. Cesdernières années une trentaine de cas au moins ont été répertoriées dont une dizaine sont décédées des suites deces mauvais traitement en détention estime la LSDH.

L'indépendance de la justice a aussi été mise à mal dans le dossier Hissène Habré, ancien président Tchadien, exiléau Sénégal, présumé responsable de violations graves et massives des droits de l'Homme dans son pays. Alors quenos organisations s'étaient félicitées de l'adoption d'un cadre juridique propice à l'ouverture d'un procès et qu'unsoutien financier de la communauté internationale avait été accordé à cet effet, le jugement d'Hissène Habré n'esttoujours pas d'actualité. Violant l'obligation internationale de juger ou d'extrader Hissène Habré, le président Wade atenté d'expulser celui-ci en juillet 2011 vers le Tchad avant de se rétracter au dernier moment devant l'opposition desNations unies et des organisations de défense des droits de l'Homme ; et sous prétexte d'un vice de forme, laChambre d'Accusation de la Cour d'appel de Dakar a obligé la Belgique - pays où une procédure judiciaire estengagée contre Hissène Habré - à formuler une quatrième demande d'extradition. « Ces procédures dilatoires sontinacceptable dans un État de droit. Les victimes du régime d'Hissène Habré attendent depuis plus de 20 ans quejustice leur soit rendue », a déclaré Alassane Seck, vice-président de la RADDHO.

Face à ce bilan peu flatteur, nos organisations appellent les futures autorités sénégalaises issues des urnes à fairecesser toutes ces atteintes et respecter strictement les engagements du Sénégal en matière de protection des droitsde l'Homme.

• Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH)• Rencontre africaine de défense des droits de l'Homme (RADDHO)• Organisation nationale des droits de l'Homme (ONDH)• Ligue sénégalaise des droits de l'Homme (LSDH)

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