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LA CONSOMMATION DALCOOL CHEZ LES JEUNES · Les marques l’appliquent en plaçant subrepticement lors d’une émission ou d’un film un produit, en concevant des programmes courts

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© REPRODUCTION AUTORISEE MOYENNANT ACCORD PREALABLE DE L’EDITEUR ET MENTION D E LA SOURCE.

LA CONSOMMATION D’ALCOOL CHEZ LES JEUNES

QUELLES STRATÉGIES COMMERCIALES ?

Fondation d'utilité publique

Rue des Chevaliers 18 – 1050 Bruxelles

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La consommation d’alcool chez les jeunes Quelles Stratégies commerciales ?

S’interroger sur les pratiques publicitaires des producteurs et distributeurs de boisons alcoolisées vis-à-vis des jeunes consiste à répondre aux questions "Quoi ? Pourquoi ? Comment ?" Lors d’une conférence organisée dans le cadre du colloque "Jeunes et alcool" à Louvain-la-Neuve, le CRIOC a présenté le résultat de ses recherches.

LE "QUOI" ?

Selon les études récentes du CRIOC (www.crioc.be), quel que soit l’indicateur considéré (achat par le jeune, essai (goût), consommation/semaine), l’intérêt pour les boissons alcoolisées augmente avec l’âge. Ainsi, en vieillissant, le jeune achète plus souvent des boissons alcoolisées avec son argent de poche, goûte plus des boissons alcoolisées, consomme plus de boissons alcoolisées, et ce en plus grand nombre.

L’intérêt pour les boissons alcoolisées augmente avec l’âge

Près de 9 jeunes sur 10 ont déjà consommé de l’alcool. A 11-12 ans, ils ont déjà bu leur premier verre. Avec l’âge, la consommation augmente. Si à 11-12 ans, 2 jeunes sur 3 ont consommé de l’alcool, ils sont presque 9 sur 10 à en avoir consommé à 15-16 ans. En grandissant, le jeune augmente sa consommation de boissons alcoolisées et la diversifie à travers cocktails, apéritifs et alcopops.

Les pops : une limonade avant tout

L’apprentissage de la consommation des alcopops (ready to drink) s’opère par la recherche d’une boisson désaltérante au goût sucré. Au départ, le pré-adolescent est confronté à la pression du groupe qui l’incite à boire une limonade (disponible au domicile des parents).

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Le goût sucré atténue l’impression qu’il s’agit d’une boisson alcoolisée et encourage la consommation. La consommation s’installe au fil des mois chez les jeunes, surtout au domicile.

Lors de sorties, l’intérêt pour les cocktails (éventuellement déclinés sous forme de boissons énergétiques (energy drink) additionnées d’alcool se développe.

Après 18 ans, la consommation des alcopops est remplacée par des mélanges personnalisés, vu notamment les prix pratiqués dans l’horeca (3 euro/bouteille).

LE "POURQUOI" ?

Le marché des boissons alcoolisées connaît une évolution comparable quel que soit les pays d’Europe concerné. Les boissons alcoolisées traditionnelles (la bière en Belgique, le vin en France) connaissent une diminution ou une stagnation des ventes, l’eau de vie (plus de 20 degrés) n’a plus la cote, ce que confirme l’évolution de la consommation depuis 1961.

Il est vrai aussi que l’âge moyen des consommateurs de boissons alcoolisées augmente, notamment pour le vin et les mousseux.

Evolution de la consommation d’alcool au cours des quarante dernières années

Le statut social du vin a évolué même si l’apprentissage de sa consommation demeure un rite d’insertion.

Le vin : un rite d’insertion sociale

Au départ, l’enfant pré-adolescent, à l’occasion d’une cérémonie familiale (communion, anniversaire, fêtes de fin d’année) est invité à tester le vin (parfois en trempant un doigt dans le verre). Souvent, il s’agit d’un blanc liquoreux. Par la suite, les parents encourageront à l’occasion d’une autre fête, la dégustation du même vin ou d’un vin blanc fruité.

A l’adolescence, le jeune s’intégrera au sein du banquet familial en dégustant un verre de vin lors du repas, ou du mousseux ou du champagne à l’apéritif.

La consommation festive de vin deviendra régulière après 18 ans, notamment lors des sorties familiales au restaurant.

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Le passage à la vie en couple encouragera la consommation de vin lors des réceptions ou des sorties au restaurant.

La consommation régulière "en couple" n’apparaît qu’au-delà des 30 ans (avec le premier enfant !). Enfin, la consommation "privée" n’apparaît qu’après la quarantaine.

Les réactions de professionnels

Face à cette évolution qui conduit à une diminution des ventes et des bénéfices et aux contraintes légales ou sociétales qui visent à limiter la consommation d’alcool, les entreprises du secteur se devaient de réagir ; en recherchant de nouvelles cibles, d’une part, en développant des approches spécifiques, d’autre part.

LE "COMMENT" ?

Le monde des consommateurs adultes est saturé de boissons alcoolisées et les contraintes légales s’orientent vers une volonté de lutte contre les assuétudes. Les producteurs sont donc amenés à rechercher de nouvelles cibles : les jeunes.

S’adapter au goût des jeunes

Cependant les goûts de jeunes ne correspondent pas aux goûts des adultes, d'où nécessité d’adapter l’offre de boissons. Les brasseurs développent des bières sucrées comme la Leffe ou la Blanche1. Les producteurs d’alcool proposent des « mix-drinks », des limonades alcoolisées. Les producteurs de cidre modifient le cidre traditionnel au goût de pommes pour le positionner en succédané de bière. En un mot : proposer des produits sur-mesure.

Segmenter le marché des jeunes en cibles spécifiques

Toutefois, les jeunes ne sont pas une cible unique. Les producteurs de boissons alcoolisées l’ont compris depuis longtemps en proposant des produits spécifiques à chaque groupe d’âge.

1 Souvent d'ailleurs, la bière blanche est servie accompagnée d'un sirop de sucre aromatisé au citron.

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Le cidre décliné selon les segments jeunes (nature, degré zéro, aromatisé, mousseux pour enfants, imitation bière et substitut d’alcopop)

Parmi les jeunes, trois catégories peuvent être identifiées :

LES 12-17 ANS : LES TEENS

Leurs moyens financiers étant souvent limités à l’argent de poche, les 12-17 ans cherchent la reconnaissance des pairs; ils veulent provoquer et se démarquer de l’autorité parentale.

En réponse, les marques de boissons alcoolisées proposent de pénétrer ce marché via internet (téléchargement de programmes, jeux en ligne, chats, bannières), par SMS ou par le canal scolaire.

Les boissons proposées imitent les boissons d’adulte et répondent au besoins de provocation : alcopops et cocktail, apéritif et bière.

LES 18-24 ANS : LES ACADÉMIQUES

Leur recherche du sens de la vie se traduit par une volonté de vivre intensément une vie sociale et de partager ce fun. Comme ils disposent de plus de moyens financiers que les plus jeunes – ils occupent des jobs étudiants – , les marques vont leur proposer des produits alcoolisés (apéritif, bière, cocktail, … mélanges "maison" (alcool + x)) qui se démarquent de l’autorité parentale et qui constituent la marque d’appartenance à la tribu. Les marques sont très présentes sur les campus (lors d’activités associatives), dans les cinémas, les snacks, les magasins multimédias, les centres sportifs où les marques assurent leur présence via le sponsoring.

LES 25-34 ANS : LES ACTIFS

Engagés dans la vie professionnelle active, financièrement indépendant et vivant dans un monde de stress, ils cherchent à se libérer de leurs tensions. Les marques distribuent leurs boissons branchées « trendy » tendant vers le « cosy » via les canaux « trendy » (pubs, bars, cafés, restaurants …).

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Des approches marketing spécifiques

Parmi les techniques marketing utilisées, les marques de boissons alcoolisées ont privilégié quelques approches : le mar keting viral, tribal, la publicité cachée, le produit sur mesure et la "rassurance" des parents.

LE MARKETING VIRAL

Ce marketing bouche-à-bouche consiste à encourager le jeune à transmettre à d’autres jeunes le message de la marque. Le jeune devient ambassadeur de la marque en diffusant SMS et carte Web. La marque se constitue rapidement des bases de données nourries d’informations personnelles fournies par les jeunes utilisateurs.

Un exemple d’e-carte (Bacardi)

LE MARKETING TRIBAL

Créer des groupes sociaux (des tribus) autour d’un service ou d’un produit tel est l’objectif du marketing tribal. Il s’agit de remplacer les pères par les pairs. Le jeune, sensible aux messages émotionnels de la marque, impose des achats à sa famille (et à lui-même) en fonction de ce que pensent ses copains.

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La tribu « Bacardi » : un seul monde, une seule fête.

LA PUBLICITÉ CACHÉE

Cette technique consiste à promouvoir une marque en dehors de la publicité, ce qui augmente la réceptivité du message, vu l’absence de perception du statut du message par le jeune consommateur.

Les marques l’appliquent en plaçant subrepticement lors d’une émission ou d’un film un produit, en concevant des programmes courts sponsorisés, des clips musicaux, des mini-séries de fiction ou en développant une signature sonore spécifique.

L’objectif est de normaliser la consommation d’alcool. La boisson alcoolisée est symbole de lutte, comme la cigarette, contre le stress.

LA PUBLICITÉ DE LA CONNIVENCE ET DES EFFETS POSITIFS

Quand elle n'est pas cachée, la publicité cherche à renforcer la connivence avec le jeune. Les publicités accentuent la complicité entre le consommateur et la boisson en jouant sur le second degré ou le caractère décalé (Budweiser, Molson, Absolut …).

Elles mettent aussi en valeur les effets positifs supposés de l'alcool. Deux axes sont développés :

• La convivialité euphorique : l’alcool conduit à l’épanouissement, l’intégration sociale, au dépassement des inhibitions ou à la réussite amoureuse … (Jupiler, Budweiser, Campari, Bacardi, …)

• La disjonction : l’alcool conduit à découvrir une autre dimension, un monde parallèle, plus exaltant, plus fou, plus drôle que le monde normal. La publicité met en évidence des perturbations liées à l’ivresse (Smirnoff, Absolut, ..)

LE PRODUIT SUR MESURE

Mais avant de commercialiser et de communiquer sur les produits alcoolisés, les marques devaient développer des produits répondant aux « attentes » des jeunes. Aujourd’hui, ces produits se caractérisent par un goût sur mesure - sucré! - une image branchée, une communication centrée sur la recherche de l’aventure imaginaire et la différenciation voire la la provocation avec un packaging adapté et une contenance limitée pour rester dans des prix modiques et inciter à l’achat. Les publicités mettent en évidence la singularité (le

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témoignage dans ce qu’il a de plus singulier) à travers la recherche d’une expérience fantastique (le piercing, dans le cas de Campari) et vise à renforcer, chez le jeune, l'affirmation de soi.

La communication Campari joue sur la séduction et la provocation

LA RASSURANCE DES PARENTS

Evidemment, ces phénomènes inquiètent les familles. C’est la raison pour laquelle, les professionnels du secteur développent différentes initiatives pour rassurer les parents. Ainsi, un code de "bonne conduite" a été élaboré et est reconnu par le JEP - Jury d'Ethique Publicitaire - et le Conseil de la Publicité (organismes composés exclusivement de professionnels). Ce code d’autodiscipline, limité aux signataires et non coercitif ne satisfait pas les organisations de consommateurs. Il ne répond pas aux préoccupations actuelles (alcopops, vending, communication publicitaire)

VERS UN MEILLEUR CONTROLE DE LA VENTE DE BOISSONS ALCOOLISEES ?

L’analyse des pratiques commerciales des producteurs et distributeurs de boissons alcoolisées inquiètent. D’ailleurs, le ministre de la santé publique soulignait récemment que "Les brasseurs n’ont pas le souci essentiel ou exclusif de l’être humain mais de vendre des produits".

Sans doute conviendrait-il aujourd’hui de mieux encadrer les pratiques pour dépasser le stade des déclarations d’intention ou des codes de bonnes pratiques

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Editeur responsable

Marc Vandercammen

CRIOC

Rue des Chevaliers 18

1050 Bruxelles

Tel. 02 547 06 11 – Fax 02 547 06 01

www.crioc.be

Edition 2004

Référence catalogue: 274-04-R

D-2004 –2492-66

Prix: € 2,5

© CRIOC Reproduction autorisée moyennant accord préalable de l’éditeur et mention de la source.